Je remercie les membres de la Commission d'être venus si nombreux, ce qui prouve que l'auto-entrepreneuriat, même s'il ne fait pas l'unanimité, suscite l'intérêt.
À écouter certaines interventions, je serais l'auteur du rapport que je vous ai remis ; or il n'en est rien. Ce rapport, qui m'a été demandé par le Parlement et pour lequel j'ai estimé qu'il se justifiait après un an de fonctionnement, a été suivi par un comité de pilotage où étaient représentées l'Union professionnelle artisanale, les organisations consulaires, les administrations de Bercy et de la sécurité sociale et l'Agence pour la création d'entreprise. Enfin, il a été réalisé par un prestataire, l'institut Ipsos pour ne pas le nommer, sur la base de sondages car nous n'avons pas encore tous les éléments chiffrés : avec une marge d'erreur de 2 ou 3 %, la présente étude donne donc une évaluation globale.
Selon Laure de La Raudière, on pourrait étendre la simplification du régime auto-entrepreneurial à la micro-entreprise ou à l'ensemble des entrepreneurs individuels. Un groupe de travail a précisément été constitué sur ce point, en association avec le ministère du budget ; il remettra ses conclusions fin octobre.
S'agissant des obligations d'assurance, elles s'imposent, dans une centaine de professions, à tous, entrepreneurs comme auto-entrepreneurs. Si certains d'entre ces derniers, dans le secteur du bâtiment, ne parviennent à obtenir une garantie décennale, ils doivent saisir le Bureau central de tarification, lequel désignera un assureur.
M. Gaubert et M. Paul m'ont interrogé sur les chiffres d'affaires des auto-entrepreneurs. En 2009, ceux-ci ont déclaré 3 700 euros par trimestre, contre 3 200 euros en 2010. Cette légère baisse, désormais stabilisée, s'explique par le développement de l'auto-entreprise comme activité accessoire. Vous avez raison, monsieur Paul, de dire qu'il faudra attendre trois ans pour procéder à une véritable évaluation ; mais si je ne vous avais pas présenté ce rapport aujourd'hui, vous me l'auriez à bon droit reproché. Nous sommes donc amenés à faire des bilans d'étape.
Contrairement à ce que beaucoup d'entre vous ont dit, je ne suis nullement autosatisfait. Je me félicite bien sûr des conclusions du rapport, qui vont dans le sens de ce que je souhaite ; mais si les conclusions avaient été inverses, je vous les aurais présentées de la même façon.
M. Gaubert a posé une question intéressante au sujet des métiers nouveaux : de fait, l'auto-entrepreneuriat en a créé beaucoup – ce qui explique au passage les chiffres d'affaires encore modestes –, notamment dans le secteur des services.
Vous avez été nombreux à vous inquiéter d'éventuels abus, le chiffre d'affaires n'ayant pas à être déclaré s'il est nul, ce qui pose en effet un problème. Je réfléchis donc à l'idée d'imposer une telle déclaration, comme à un éventuel raccourcissement de la durée, actuellement de trois ans, au terme de laquelle l'absence de déclaration du chiffre d'affaires entraîne la radiation.
Comme l'a observé M. Benoit, les entrepreneurs du BTP se voient appliquer, pour les travaux effectués chez les particuliers, une TVA à 5,5 %, et peuvent déduire, pour les achats de matériaux, une TVA à 19,6 %. Les auto-entrepreneurs, eux, ne bénéficient pas de ces dispositions, et s'en trouvent, pour le coup, désavantagés : évitons donc les visions un peu manichéennes.
M. Benoit a aussi évoqué ce sujet majeur qu'est la proratisation. Lorsque le chiffre d'affaires est déclaré sur les six premiers mois de l'année, l'administration fiscale a pour habitude de le multiplier par deux, si bien que des milliers d'auto-entrepreneurs ont été radiés pour avoir dépassé le plafond. La proratisation n'a aucun sens pour l'auto-entreprise, dont les activités ne sont pas régulières : elle sera donc supprimée pour tous les régimes de micro-entreprise, dont celui d'auto-entrepreneur, dans le projet de loi de finances rectificative. Quant aux seuils de 32 000 et de 80 000 euros, ils s'appliqueront l'année de création, quelle que soit la date.
Monsieur Paul, le lien entre le développement de l'auto-entrepreneuriat et la crise est évident, puisque le désir des individus de s'en sortir est décuplé ; mais ne faut-il précisément pas se réjouir que, dans une telle période, des centaines de milliers de Français aient créé une activité ? C'est une très bonne nouvelle, qui montre que l'État n'est pas le seul à pouvoir résoudre leurs problèmes.
Avec le ministre du travail, j'ai par ailleurs écrit à la CIPAV ainsi qu'à la CNAVPL, pour leur confirmer un changement des règles comptables en juillet prochain. Ainsi, les auto-entrepreneurs ne réalisant aucun chiffre d'affaires ne seront pas comptabilisés pour le calcul de la compensation démographique ; en outre, les cotisations des auto-entrepreneurs ne seront pas versées en priorité aux caisses d'assurance vieillesse, mais aux caisses de la branche maladie ; de cette façon, les auto-entrepreneurs réalisant un faible chiffre d'affaires ne seront pas comptabilisés pour le calcul de la compensation démographique, et leur impact comptable restera limité à moins de 50 millions d'euros, ce qui satisfait le président de la CNAVPL.
Pourquoi le statut d'auto-entrepreneur serait le seul dont nous devrions limiter la durée ? Au nom de quoi les retraités, les mères de famille ou les étudiants qui créent leur auto-entreprise seraient-ils limités à deux ou trois ans ? Cela n'a pas de sens ; j'y suis résolument défavorable.
Environ un tiers des auto-entrepreneurs, madame Massat, travaillent dans le bâtiment, secteur où le régime concentre l'essentiel des critiques. Toutefois, comme l'Ordre des experts comptables l'indique lui-même, les dispositions particulières relatives à la TVA et aux charges n'entraînent pas de concurrence déloyale, l'exonération de TVA ayant aussi ses inconvénients puisqu'elle empêche certaines déductions.
M. Morisset a relayé des inquiétudes auxquelles j'ai répondu, qu'il s'agisse de l'assurance décennale ou de la formation professionnelle. Celle-ci est prise en charge par l'État – qui a versé 5 millions d'euros aux chambres consulaires cette année –, mais, à l'avenir, elle devra être financée par les contributions des auto-entrepreneurs.
La loi Raffarin de 1996 oblige tous les artisans, auto-entrepreneurs ou non, à une obligation de qualification professionnelle, et ce même si l'activité est exercée en complément d'une autre. J'ai pris un décret permettant aux chambres de métiers de contrôler la qualification professionnelle lors de la déclaration d'activité. Mais, je le répète, ce décret s'applique également aux artisans traditionnels : auparavant, la qualification n'était pas contrôlée.
Il est vrai, madame Got, que le taux de chômage élevé explique en partie le succès des auto-entreprises : pourquoi empêcher ceux qui connaissent des difficultés de tenter leur chance ? Quant à l'obligation de déclarer les chiffres d'affaires, même nuls, j'en ai parlé. Nous sommes déterminés à lutter contre les abus.
Non, monsieur Saint-Léger, je n'ai pas raison contre tous puisque, je le répète, je ne suis pas l'auteur du rapport que vous avez entre les mains, lequel a fait l'objet d'un suivi, y compris des artisans eux-mêmes. Il est, à ce stade, la seule évaluation objective et complète dont nous disposions. Si je suis prêt à faire évoluer le régime de l'auto-entreprise, je me refuse à en limiter la portée.
Je ne crois d'ailleurs pas, madame Marcel, qu'il mette en péril les chambres de métiers : si l'on additionne créations d'auto-entreprise et créations d'entreprise artisanale traditionnelle, on s'aperçoit que les activités régies par les chambres de métiers vont croissant. Notre priorité n'est donc pas d'affaiblir ce régime bénéfique aux chambres de métiers elles-mêmes, mais d'accompagner les auto-entrepreneurs dans leur évolution jusqu'à l'entreprise. Pour ce faire j'ai défini trois orientations : le renforcement de la coordination entre tous les acteurs de l'accompagnement ; l'amélioration de la qualité de l'information – un agrément sera ainsi donné aux sites internet spécialisés, et le guide de l'auto-entrepreneur vient d'être actualisé – ; le développement de l'accompagnement individualisé.
Madame Le Loch, si nous n'avions pas créé le statut d'auto-entrepreneur, nous aurions pris du retard en matière de simplification des procédures : je pense notamment au guichet unique, qui servira d'interface entre les porteurs de projet et l'administration. La simplification pourra donc s'étendre à l'ensemble du processus de création d'entreprise.
M. Nicolas m'a demandé des précisions sur les chiffres d'affaires. En 2009, sur un chiffre d'affaires global de 1 milliard d'euros, 122 millions ont été réalisés dans le secteur de la construction, 224 millions dans le commerce et 163 millions dans le soutien aux autres entreprises pour ne citer que les principaux secteurs d'activité.
M. Lefait doute, comme M. Villaumé et d'autres, que seuls 1,5 % des auto-entrepreneurs le soient devenus à la demande de leur employeur d'origine ; mais c'est une réalité ! Le sondage a été réalisé de façon anonyme, et l'on ne peut qu'invoquer une marge d'erreur statistique. En tout état de cause, le chiffre est inférieur à 5 %, ce qui, sans être négligeable, reste marginal. Quant aux charges sociales et aux questions de concurrence, j'en ai déjà parlé.
Le contrôle est en effet nécessaire, monsieur Marsac ; mais pourquoi contrôler les auto-entrepreneurs plus systématiquement que les autres entrepreneurs ? Je suppose que nul, ici, ne veut stigmatiser telle ou telle catégorie, d'autant que 20 % des auto-entrepreneurs sont d'anciens chômeurs. Néanmoins, nous devons rester vigilants : des instructions claires ont été données aux administrations compétentes.
J'ai répondu sur l'accompagnement des auto-entrepreneurs et sur l'assurance décennale, monsieur Cosyns