La Commission entend M. François Baroin, ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, et de Mme Valérie Pécresse, ministre du Budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, sur le projet de loi de finances pour 2012.
Nous accueillons M. François Baroin, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, et Mme Valérie Pécresse, ministre du Budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, qui vont nous présenter le projet de loi de finances pour 2012.
Le projet de loi de finances pour 2012 s'inscrit dans une actualité économique particulièrement dense, mais, face à ces turbulences, il incarne la continuité de l'action du Gouvernement après les mesures prises en 2010 et en 2011 pour lutter contre les déficits et soutenir la croissance.
L'année précédente, alors que je présentais ici même le projet de budget pour 2011, nombreux étaient ceux qui doutaient de la capacité du Gouvernement à opérer un virage aussi radical dans la maîtrise des déficits publics. Et pourtant : nous avons plafonné les niches fiscales et sociales – comme nous nous y étions engagés – à un niveau jamais atteint, et mis en oeuvre de nouvelles règles pluriannuelles de maîtrise des finances publiques avec la loi de programmation des finances publiques – plafonds de dépenses, plancher de recettes, interdiction d'endettement des opérateurs – ; et le gouvernement de François Fillon a conduit une réforme de structure essentielle à la sauvegarde et à la consolidation de nos régimes sociaux : la réforme des retraites.
Alors que nous avions fixé l'objectif de déficit en 2010 à 7,7 % du PIB, le déficit réalisé a été de 7,1 %. Cette performance nous a permis d'abaisser notre cible pour 2011 à 5,7 %. Enfin, nous avons tiré toutes les conséquences de la révision de nos perspectives de croissance à la baisse – 1,75 % pour 2011 – : la loi de finances rectificative que vous avez adoptée comprend 1 milliard d'euros de mesures correctives. Nous maintenons ainsi nos objectifs intangibles de réduction du déficit public à 4,5 % en 2012 et à 3 % en 2013 ; et irons jusqu'à 2 % en 2014 et 1 % en 2015.
Le respect de la parole donnée est un élément de confiance indispensable vis-à-vis des Français, de nos partenaires européens et des investisseurs. Ce projet de loi de finances s'inscrit donc dans la continuité des précédents : il allie réduction des déficits, maîtrise des dépenses et soutien à l'activité.
C'est également un projet de budget adapté aux circonstances économiques et aux incertitudes du contexte international.
L'activité mondiale reste convalescente. Après une phase de croissance soutenue à la fin de 2010 et au début de 2011, le reste de l'année 2011 a connu une série de nouvelles macroéconomiques en deçà des attentes. Au Japon, la terrible catastrophe de mars a eu de graves répercussions. Le prix du pétrole en dollars a augmenté d'environ 35 % au premier semestre 2011, en raison notamment du « printemps arabe ». La croissance a ralenti ces derniers mois aux États-Unis. Les difficultés qui ont entouré le vote du relèvement du plafond de la dette par le Congrès ont alimenté l'attentisme des marchés financiers et la dégradation de la note du pays par une agence a été ressentie comme un électrochoc sur toute la planète. Les tensions sur les dettes souveraines, que ce soit aux États-Unis ou dans la zone euro, dont l'atténuation conditionne le rebond de la croissance mondiale, ont fortement perturbé les marchés boursiers tout au long de l'été. Enfin, comme la France, l'Allemagne subit les aléas de la conjoncture et a connu un ralentissement marqué au deuxième trimestre.
Partout dans le monde, cependant, un rééquilibrage est à l'oeuvre qui sera un soutien à l'activité. Les États se désendettent progressivement mais ce mouvement prendra du temps. Les États-Unis ont fait adopter un plan ambitieux, conforme aux fondamentaux de leur économie, et leur croissance est estimée à 2 % en 2012. Les économies des pays émergents devraient rester dynamiques l'année prochaine et le plan de reconstruction au Japon devrait tirer la croissance vers le haut – la reconstruction est même en avance par rapport aux prévisions. Enfin, les prix des matières premières se sont stabilisés depuis le début du mois et la situation en Libye est de nature à permettre une reprise de ses exportations de pétrole.
Dans la zone euro, les efforts budgétaires de l'Italie, de l'Espagne et du Portugal sont tangibles, durables, et porteront leurs fruits à moyen terme. L'Irlande connaît une nette amélioration de sa situation et a pris de l'avance dans le calendrier de ses engagements vis-à-vis de ses créanciers. L'Espagne, quant à elle, s'est dotée d'une règle d'or constitutionnelle.
La France dispose de tous les atouts pour renouer avec la dynamique de croissance car ses fondamentaux sont solides. La demande intérieure est demeurée robuste durant l'été, comme en témoignent les chiffres de la production industrielle – + 1,5 % en juillet – et les immatriculations de véhicules neufs – + 2 % en août –. Les ménages français sont peu endettés et leur niveau d'épargne est encore supérieur à celui qui prévalait avant 2008 ; l'inflation plus modérée en 2012, conjuguée à la progression des salaires, permettra l'augmentation de leur pouvoir d'achat.
Par ailleurs, les importantes réformes structurelles entreprises par le Gouvernement depuis 2007 améliorent progressivement la croissance potentielle de notre économie. Les premiers résultats sont au rendez-vous et les indicateurs macroéconomiques restent bien orientés malgré la période d'incertitudes et de turbulences que nous traversons : nos taux d'intérêt demeurent stables, à un niveau historiquement bas, ce qui témoigne de notre cote de confiance auprès des investisseurs ; l'investissement des entreprises est en hausse continue depuis le quatrième trimestre 2009 et cette tendance devrait se poursuivre en 2012 ; l'investissement des ménages est en accélération progressive depuis le début de cette année, les mesures prises par le Gouvernement étant de nature à les rassurer sur le maintien de leur pouvoir d'achat ; enfin, 220 000 emplois salariés ont été créés entre juin 2010 et juin 2011 – par comparaison, entre juin 2009 et juin 2010, seules 20 000 créations nettes avaient été comptabilisées.
Le FMI prévoit pour 2012 un taux de croissance plus soutenu en France qu'en Allemagne, et supérieur à la moyenne de la zone euro. C'est une bonne nouvelle, qui n'est pas le fait du hasard mais une preuve de la solidité des fondamentaux économiques de notre pays. Toutes ces raisons nous font maintenir, en dépit des doutes que certains ne manqueront pas d'émettre, une prévision de croissance à 1,75 % pour 2012.
Le vrai problème, aujourd'hui, c'est l'endettement excessif de certains pays, comme le montre la situation grecque. La gouvernance de la zone euro doit être adaptée en conséquence.
Face aux turbulences financières, les États agissent. En 2008-2009, sous l'impulsion du Président de la République, le G20 est parvenu à stopper l'effondrement des marchés. La coordination internationale a permis de restaurer la confiance et de ramener la croissance. Aujourd'hui, la problématique a changé, mais la même méthode s'impose. Les pays du G20, sous présidence française, et la zone euro travaillent ensemble à une solution coordonnée. La stabilité financière de la zone euro est notre bien commun et nous sommes déterminés à la préserver, tout comme nous sommes déterminés à soutenir la Grèce.
Nous avons pris des mesures essentielles pour assurer la soutenabilité des finances publiques et mettre en oeuvre les décisions prises le 21 juillet 2011 pour accroître la capacité d'action du Fonds européen de stabilité financière, le FESF. Cette instance, rendue plus flexible, pourra intervenir sur les marchés secondaires de la dette, mener des actions d'anticipation et de précaution, et, en tant que de besoin, répondre aux établissements bancaires qui solliciteraient une recapitalisation. La mise en oeuvre de l'accord suppose sa ratification par les Parlements de chacun des dix-sept pays de la zone euro. L'Allemagne débute demain son examen et la séquence se terminera par la Slovaquie le 14 octobre. Tous les moyens d'actions seront donc opérationnels à la mi-octobre.
Les pays du G20, dont j'ai présidé la réunion des ministres des finances jeudi dernier à Washington, manifestent leur unité d'action et leur volonté d'apporter une réponse forte et globale. En interne, les efforts de consolidation budgétaire seront proportionnés à la situation de chaque pays et aux caractéristiques de son économie dans le souci de soutenir l'activité. La réponse collective repose sur l'addition des réponses individuelles. La consolidation budgétaire est indispensable et c'est une curieuse idée de vouloir régler le problème des déficits par une politique de relance qui ne ferait que les aggraver !
Dans le même temps, le G20 s'est engagé à prendre toutes les mesures nécessaires pour préserver la stabilité des systèmes bancaires et des marchés financiers. Les banques centrales continueront à fournir les liquidités nécessaires. Le collatéral mobilisable au niveau de l'Eurosystème est de 5 000 milliards d'euros. Les banques centrales ont décidé de garantir l'accès à la liquidité en dollars quelques jours après le G7 de Marseille. Elles agissent donc en coordination.
Les banques disposent donc d'un capital adéquat et ont un accès suffisant aux financements pour faire face aux risques actuels. Les banques françaises ont déjà considérablement augmenté leurs fonds propres : plus de 50 milliards d'euros en deux ans. La situation actuelle les oblige à accélérer le calendrier de Bâle III dans lequel elles étaient déjà engagées. L'État sera particulièrement attentif à ce qu'elles atteignent leurs objectifs de renforcement des fonds propres sans resserrer le crédit à l'économie domestique.
Je rappelle également que toutes les banques françaises ont passé avec succès les tests de résistance de cet été. Plus exigeants que les précédents, ils reposaient sur des hypothèses de risque extrêmes, notamment une chute de 4 % du PIB européen et un effondrement du marché immobilier de plus de 20 % – plus grave encore que ce qui s'est produit dernièrement aux États-Unis. Je le répète, les banques ne rencontrent ni problèmes de liquidités, du fait de l'initiative des banques centrales, ni problèmes de solvabilité, du fait de leurs plans de renforcement des fonds propres.
Malgré les difficultés de la zone euro, il serait irresponsable de revenir sur les acquis de la construction européenne. Mais il existe à l'évidence un problème de gouvernance. La France et l'Allemagne travaillent actuellement à la renforcer en vue d'instaurer une capacité de décision rapide et efficace, et d'intégrer davantage la politique budgétaire de la zone euro. Le pacte de stabilité, conforté par le paquet législatif voté ce matin même par le Parlement européen, contribuera également à renforcer la surveillance et à dissiper, à terme, les menaces qu'un endettement insuffisamment maîtrisé, faute de coordination et de convergence budgétaire, fait peser sur nos pays.
Dans ce contexte, il nous a paru indispensable de proposer, dans la continuité de 2011, un projet de loi de finances pour 2012 équitable, qui allie réduction des déficits et soutien à l'activité.
Ce projet repose sur trois principes.
Premier principe : privilégier la baisse des dépenses et la réduction des niches fiscales par rapport à une hausse générale des impôts. Il n'y a pas eu de hausse générale des impôts au cours des années précédentes, il n'y en aura pas non plus en 2012. Nous avons aussi gelé les dépenses de l'État en valeur, gelé les transferts aux collectivités locales, gelé le point d'indice de fonction publique. Le projet de loi de finances poursuit le rabotage des niches fiscales. Il le fait à la fois de manière transversale – avec un nouveau « coup de rabot » – et ciblée. Surtout, il poursuit la déclinaison méthodique et déterminée de la loi de programmation des finances publiques, avec des objectifs adaptés à l'évolution de la croissance.
Deuxième principe : protéger les plus fragiles de nos concitoyens par un budget d'équité. Les mesures fiscales pèseront davantage sur les grandes entreprises que sur les PME, et davantage sur les ménages les plus aisés que sur les classes moyennes. À 80 %, les efforts seront portés soit par les grandes entreprises, soit par les foyers les plus aisés avec la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Cette contribution vient s'ajouter aux réformes structurelles et aux mesures adoptées dans le cadre des lois de finances précédentes : augmentation de la taxation des stock options, des retraites chapeau, des parachutes dorés, des bonus des traders, majoration du taux de la tranche marginale de l'impôt sur le revenu dans le cadre de la réforme des retraites, taxation des successions et donations, suppression du bouclier fiscal. Bref, ce budget est équitable et il faudra avoir beaucoup d'aplomb pour soutenir le contraire !
Troisième principe : préserver l'emploi et la compétitivité de nos entreprises. Nous ne touchons pas au crédit d'impôt recherche. L'innovation, la recherche, ce sont les emplois de demain. C'est la raison pour laquelle nous maintenons les dispositifs qui soutiennent les PME et les entreprises de taille intermédiaire.
À travers ce projet de loi de finances pour 2012, le Gouvernement poursuit son effort de sincérité et de responsabilité.
La réduction des déficits publics dans la zone euro est un impératif, d'abord économique, parce que les niveaux actuels d'endettement public, sous l'effet de la crise, sont aujourd'hui insoutenables ; moral aussi : lorsqu'un problème est évident, la responsabilité politique est d'y répondre. Les causes d'une telle situation sont connues, les responsabilités largement partagées. De l'avis même de la Cour des comptes, la moitié de notre déficit est l'héritage de trente années de laxisme budgétaire, et 40 % du déficit est lié à la crise de 2008, qui a bouleversé nos finances publiques.
Mais les raisons qui nous ont conduits à ce niveau d'endettement importent moins que les solutions que nous allons mettre en oeuvre pour le réduire. Ce qui compte, ce sont les engagements pris. Ce qui compte, c'est le respect scrupuleux de la parole de la France. Ce qui compte c'est le chemin pour y arriver. En la matière, le Gouvernement a fixé un cap clair : 5,7 % de déficit public en 2011, 4,5 % en 2012, 3 % en 2013 et 2 % en 2014. La France entamera son désendettement en 2013, avec un ratio d'endettement qui baissera de plus d'un point de PIB entre 2012 (87,4 %) et 2014 (86,2 %).
Le budget pour 2012 est donc une étape essentielle sur le chemin du désendettement. C'est d'abord le budget des engagements tenus. Avec une réduction de 15 % du déficit budgétaire de l'État, nous opérons un tournant historique. Pour la première fois depuis 1945, les dépenses de l'État baisseront. C'est enfin un budget d'équilibre et d'équité. D'équilibre, car l'effort de réduction des déficits est accompagné du souci constant de préserver la croissance. D'équité, car les efforts pèsent pour l'essentiel sur les grands groupes et non sur les PME, sur les ménages aisés et non sur les plus fragiles.
La stratégie de réduction des déficits que nous mettons en oeuvre avec constance depuis trois ans repose sur trois piliers : la maîtrise des dépenses ; le recours ciblé à des recettes supplémentaires ; la préservation de la croissance.
Premier pilier : il n'y a pas de désendettement possible sans maîtrise des dépenses publiques, c'est-à-dire sans économies. Notre effort dans ce domaine est sans précédent, et il est le fruit de notre action profonde de réforme dans l'ensemble des administrations publiques.
En 2011, nous avons gelé les dépenses de l'État hors dette et pensions, ce qui était déjà un changement majeur. Nous irons plus loin en 2012 puisque les dépenses, dans ce périmètre, seront en baisse. Le Gouvernement, je l'ai dit, met fin à l'augmentation continue des dépenses de l'État depuis 1945. Grâce à nos efforts en matière de dépenses de personnel – en particulier les 150 000 suppressions de poste de fonctionnaires d'État au cours du quinquennat –, la masse salariale de l'État baissera l'année prochaine. Là encore, c'est une première historique. Dans le cadre du budget triennal 2011-2013, les dépenses de fonctionnement et d'intervention des ministères sont soumises à un impératif d'économies de 10 % sur trois ans, ce qui représente près de 8 milliards d'euros d'ici à 2013. Les opérateurs sont évidemment touchés par ce mouvement général, en qui concerne tant leur masse salariale que leurs dépenses de tous les jours. À titre d'exemple, nous aurons supprimé un total de 3 700 emplois en 2011 et 2012 chez les opérateurs à l'exception de ceux de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui seront épargnés.
Cet effort de maîtrise s'applique également aux concours aux collectivités territoriales. Le gel des dotations de l'État représente chaque année près d'1 milliard d'euros d'économies. C'est, là encore, un changement considérable.
En matière de dépenses sociales, les réformes des retraites d'une part, de l'assurance maladie d'autre part, nous ont permis de prendre plus de deux ans d'avance sur nos objectifs de réduction du déficit de la sécurité sociale. La réforme des retraites représente 5,5 milliards d'euros de dépenses en moins dès 2012. Le respect de l'objectif national des dépenses de l'assurance maladie – ONDAM – pendant trois années consécutives constitue une autre rupture majeure qui a permis 11 milliards d'économies pour l'assurance maladie depuis 2008. Entre 2010 et 2012, le déficit de l'assurance maladie sera divisé par deux, et cette réduction repose à 60 % sur notre maîtrise des dépenses.
Au total, la part des dépenses publiques par rapport à la richesse nationale baissera de 0,3 point en 2011 et diminuera encore de 0,5 point en 2012. La maîtrise des dépenses est désormais une réalité tangible en France comme partout en Europe. Aucun gouvernement européen, qu'il soit de gauche ou de droite, n'y échappe. Aucun n'augmente les effectifs de la fonction publique, ni les dépenses de fonctionnement. Aucun ne revient en arrière sur les retraites. Aucun ne fait l'impasse sur la maîtrise des dépenses maladie. C'est ce qui s'appelle la convergence, thème qui semble faire si peur à l'opposition ! Mais je conçois qu'elle puisse s'en effrayer : rien, dans le programme économique et budgétaire du parti socialiste, n'est aujourd'hui à l'oeuvre en Europe. Je comprends que cela pose un problème.
Deuxième pilier de notre stratégie de réduction des déficits publics : le recours ciblé à des recettes supplémentaires. Dans un pays qui figure parmi les plus imposés au monde, la hausse générale des impôts n'a pas d'avenir. À nos yeux, la fiscalité est un outil complémentaire de la maîtrise des dépenses et doit répondre à trois exigences.
D'abord l'équité : pour atteindre les 10 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour 2012 annoncées le 24 août dernier, nous demandons plus à ceux qui ont plus, comme en témoignent la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, la hausse des prélèvements sur le patrimoine ou le renforcement de la taxation des plus-values immobilières.
Ensuite la réduction des niches fiscales et sociales injustifiées : nous poursuivons en 2012 l'effort entamé en 2011, en particulier pour redresser de 2 milliards d'euros l'impôt sur les sociétés dans la perspective d'une convergence fiscale franco-allemande.
Enfin le développement d'une fiscalité comportementale, avec la hausse des prix du tabac, la taxe sur les boissons trop sucrées ou la réforme du barème de la taxe sur les véhicules de société.
Se préoccuper en priorité des dépenses et ensuite seulement des recettes, avec toujours des objectifs précis : tels sont les principes qui nous guident. Au total, sur les 45 milliards d'euros d'efforts réalisés en 2011 et 2012, plus de la moitié reposera sur les dépenses. Je précise que le mode de calcul de ce montant est le même que celui qu'utilisent nos partenaires allemands, espagnols ou britanniques. Il permet donc la comparaison.
Troisième pilier de notre stratégie : concilier en permanence la réduction des déficits et le soutien à la croissance. Dans son rapport de juillet 2011 sur la France, le FMI a relevé que nous respections cet objectif essentiel. Notre trajectoire de réduction des déficits n'est donc ni trop rapide ni trop tardive. Nos priorités budgétaires sont cohérentes avec notre politique de croissance : du côté des recettes, puisque notre effort de réduction des niches ne pèse pas sur celles qui sont favorables à l'emploi et à la compétitivité ; mais aussi du côté des dépenses, puisque nous avons accompagné l'autonomie des universités et la réorganisation de la recherche d'un effort budgétaire sans précédent de 9 milliards d'euros.
Le projet de loi de finances pour 2012 marque donc une nouvelle étape dans notre effort de maîtrise des dépenses de l'État. Nous ferons mieux que la norme « zéro valeur » : dans le projet du Gouvernement, les dépenses hors dette et pensions sont gelées à leur niveau de 2011, soit 275,6 milliards d'euros, mais les mesures annoncées le 24 août les feront baisser d'un milliard. Nous nous situerons également très en dessous de la norme « zéro volume », qui limite la progression des dépenses de l'État à la seule inflation, prévue en l'espèce à 1,7 % : les dépenses n'augmenteront que de 1,2 % grâce aux mesures du 24 août.
La maîtrise des dépenses de personnel est un élément central de cette baisse. La masse salariale de l'État sera réduite de près de 200 millions d'euros. Cette année encore, nous ne remplacerons pas 30 400 départs à la retraite dans la fonction publique d'État.
On peut maîtriser les dépenses sans renoncer pour autant aux priorités budgétaires. Le budget pour 2012 le prouve une nouvelle fois.
Ainsi, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche verra ses crédits augmenter de 287 millions d'euros. La politique de cohésion sociale est également privilégiée, avec la poursuite de la revalorisation de l'allocation adulte handicapé et du minimum vieillesse, qui auront augmenté de 25 % en cinq ans conformément aux engagements du Président de la République. Pour l'AAH, l'augmentation globale des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est de 423 millions d'euros. En cette période de crise, nous renforçons les filets de protection sociale destinés aux plus fragiles.
Pour ce qui est des missions régaliennes de l'État, le budget de la justice connaîtra une nouvelle hausse de près de 200 millions d'euros. C'est le seul ministère qui bénéficiera de créations nettes d'emplois. Les moyens des forces armées seront, quant à eux, renforcés à hauteur de 467 millions d'euros.
Les recettes fiscales s'établiront à 273 milliards d'euros, soit une hausse de 19,2 milliards par rapport à nos dernières prévisions pour 2011. Cette hausse traduit d'une part le rétablissement progressif de nos recettes. Même si, en valeur, celles-ci sont globalement supérieures à leur niveau d'avant la crise, un retard subsiste, en particulier pour l'impôt sur les sociétés. Elle traduit d'autre part l'effort de redressement engagé l'année dernière.
Enfin, le plan du 24 août prévoit 3,6 milliards d'euros de ressources supplémentaires en 2012. Vous avez voté l'essentiel de ce plan et il ne reste aujourd'hui que deux mesures à soumettre à votre examen : la suppression de l'abattement d'impôt sur les sociétés sur les résultats des exploitations dans les DOM et la création d'une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus. Dans le projet du Gouvernement, cette contribution de 3 % s'applique à tous les revenus dépassant 500 000 euros pour une personne seule et 1 million d'euros pour un couple. Je sais que certains d'entre vous souhaitent un seuil d'entrée plus bas. Le Gouvernement y est favorable et nous en discuterons au cours du débat parlementaire.
Les autres mesures en recettes figurant dans le projet de loi de finances respectent elles aussi les principes que nous nous sommes fixés.
En premier lieu, nous poursuivons l'effort de réduction et de rationalisation des niches. En matière d'impôt sur le revenu, nous appliquons un coup de rabot de 10 % sur les réductions et crédits d'impôts, dans le même périmètre qu'en 2011, avec à la clef une économie de 340 millions d'euros en 2013. Les avantages fiscaux liés aux services à la personne et à l'investissement dans le logement social ultramarin ne seront pas concernés.
Dans le même esprit d'amélioration de l'efficacité des niches, nous proposons de proroger, en les modifiant, le crédit d'impôt développement durable, qui est refondu pour inciter les particuliers à réaliser des rénovations lourdes renforçant l'efficacité énergétique des bâtiments et pour permettre aux foyers les plus modestes de bénéficier d'un prêt à taux zéro dans ce cadre ; et les régimes d'investissement locatif dits « Scellier » et « Censi-Bouvard ».
Nous avançons sur le terrain de la fiscalité comportementale avec deux dispositifs : une taxe sur les boissons à sucres ajoutés et une taxe dissuasive sur les loyers exorbitants demandés pour des chambres ou des studios d'une surface inférieure à 13 m2.
Enfin, nous proposons de proroger sans modification le crédit d'impôt relatif aux installations pour personnes âgées et handicapées.
Au total, le solde budgétaire de l'État s'établira à moins 80,8 milliards d'euros, soit une baisse de 14,8 milliards d'euros – ou 1,2 point de PIB – du déficit précédent. L'effort structurel représentera 90 % de cette baisse.
Pour ce qui est du rabot permettant d'obtenir une réduction de dépenses d'un milliard d'euros, j'ai eu de nombreux échanges avec le rapporteur général et plusieurs d'entre vous sur les principes et la méthode qui doivent nous guider. Le Gouvernement vous soumettra à compter de la semaine prochaine des propositions reposant sur l'idée d'un effort partagé entre l'État, les opérateurs et les collectivités territoriales. La participation des opérateurs me semble indispensable car certains ont bénéficié de taxes affectées très dynamiques. Il me paraît également légitime et équitable que les collectivités territoriales soient parties prenantes.
Je conclus en insistant sur l'importance de la maîtrise des dépenses publiques. Les réformes structurelles que nous avons réalisées sont la clé de la réduction des déficits et du désendettement. Il n'existe aucun autre moyen pour préserver la crédibilité de la France en matière budgétaire.
Ce projet de loi de finances traduit clairement la volonté de poursuivre la réduction de nos déficits publics. L'effort budgétaire considérable consenti par l'État – moins 14 milliards d'euros, 0,7 point de PIB – répond à une nécessité absolue. C'est une question de souveraineté nationale : notre besoin de financement pour couvrir les déficits et refinancer la dette venant à échéance atteint plus de 200 milliards d'euros.
La prévision du Gouvernement est d'autant plus crédible qu'elle est répartie de façon équilibrée entre les économies réalisées sur la dépense publique et les hausses d'impôt – même si on les dénomme réductions de niches fiscales. En outre, les mesures de baisse de la dépense et d'augmentation de la recette sont parfaitement calibrées pour ne pas pénaliser la croissance. Il ne s'agit en aucun cas d'un budget récessif ou d'austérité.
En matière de pouvoir d'achat des ménages, par exemple, tout ce qui relève des allocations et de la solidarité est soigneusement protégé. Les mesures d'augmentation des prélèvements portent uniquement sur les revenus du patrimoine. D'après les chiffres de l'INSEE, d'ailleurs, si la croissance a été nulle au deuxième trimestre 2011, le pouvoir d'achat des ménages s'est accru de 0,6 %.
De même, aucune mesure n'est susceptible de porter atteinte à la compétitivité de nos entreprises en alourdissant leurs charges. Le dispositif vise seulement à accélérer le rétablissement de l'impôt sur les sociétés applicable aux grands groupes en limitant les reports déficitaires.
La contribution exceptionnelle des hauts revenus, qui répond à l'exigence de justice fiscale de ce budget, présente un intérêt qui dépasse le symbole puisque, contrairement à ce qui se passerait si l'on ajoutait une tranche à l'impôt sur le revenu, elle frappe de façon égale les revenus du capital et les revenus du travail. Or, plus les revenus sont hauts, plus la part des revenus du patrimoine est importante.
S'agissant de la maîtrise des dépenses, condition absolue d'un rétablissement des comptes publics, ce projet montre que les efforts entrepris depuis 2007 commencent à porter leurs fruits. Alors même que le PIB augmente moins vite que prévu, le ratio entre dépenses publiques et PIB amorce une baisse, refluant au-dessous des 56 %. Cela étant, le niveau des dépenses reste beaucoup plus élevé dans notre pays que chez la plupart de nos partenaires européens.
Pour ce qui est des recettes, la remise à plat de certaines niches fiscales est assurément indispensable mais nous devons être bien conscients que la réduction des niches, au-delà d'un certain montant, n'est ni plus ni moins qu'une hausse d'impôt. Or, s'il existe beaucoup de niches, c'est parce que celles-ci jouent un rôle de soupape de façon à atténuer la sur-pression fiscale. À la fin de 2012, les prélèvements obligatoires seront remontés à 44,5 % du PIB et, selon les prévisions gouvernementales, ils resteront supérieurs à 45 points les années suivantes. Cela signifie que nous n'avons plus aucune marge de manoeuvre en matière de hausse des prélèvements. Seuls des redéploiements restent possibles : alléger le coût du travail, par exemple, en trouvant d'autres sources de financement pour la protection sociale. Mais tout choc fiscal supplémentaire entraînerait immédiatement la chute d'une croissance encore bien faible.
Pour moi, la qualité essentielle de ce budget est qu'il fait tout pour ménager le retour progressif de la croissance tout en étant profondément marqué par un souci de justice fiscale.
J'en viens à mes questions.
La réduction du déficit du budget de l'État, nous est-il indiqué, se répartit à parts égales entre diminutions de dépenses et augmentations d'impôts. Cet équilibre est-il le même dans la prévision en termes de déficit public consolidé ?
Par ailleurs la loi de programmation pluriannuelle prévoyait une réduction de 10 % des dépenses de fonctionnement, des dépenses d'intervention et des dépenses discrétionnaires, avec une baisse de 5 % en 2011, de 2,5 % en 2012 et de 2,5 % en 2013. Pourriez-vous nous donner le détail de l'évolution pour chacune des trois rubriques ?
Pour ce qui est de l'impôt sur les sociétés, le Gouvernement prévoit une croissance du bénéfice fiscal de l'ordre de 10 % en 2011, ce qui ne sera pas sans incidences sur les recettes de 2012. En régime de croisière, un quart environ de l'IS provient du secteur financier – banques et assurances. Quelles sont les hypothèques qui pèsent sur lui, qu'il s'agisse du plan de soutien à la Grèce – abandon de 21 % des créances de banques et institutions financières françaises – ou de la crise boursière, qui conduit les établissements à passer des provisions ?
Les recettes fiscales seront également affectées. Ainsi, la Banque de France et la Caisse des dépôts devraient rapporter à elles deux plus de 2 milliards d'euros de moins par rapport aux années précédentes. Cette diminution préoccupante risque-t-elle de se prolonger au-delà de 2012 ?
Enfin, la dette publique représentera à la fin de l'année prochaine 87,4 points de PIB. Si l'on retranche les diverses mesures de sauvetage, le chiffre est ramené à 85,5 %. Autrement dit, elles représentent 1,9 point de PIB, soit environ 40 milliards d'euros. Or j'ai cru comprendre, au sujet du Fonds européen de stabilité financière, que l'intégration des montants à la dette publique des États apportant leur garantie ne se faisait qu'au fur et à mesure des levées de fonds, lesquelles, à ma connaissance, sont encore très partielles. En tout état de cause, une analyse très détaillée de ces mesures et du calendrier de mise en place en 2012 est indispensable.
Je vous remercie d'avoir apporté des précisions sur le milliard d'économies supplémentaires, madame la ministre. Je souscris au principe mais je pense que le Gouvernement et le Parlement doivent mener un travail commun à ce sujet.
Le rapporteur général a raison d'appliquer le terme adéquat aux politiques constatées : il y a bien des hausses d'impôt et celles-ci se poursuivront. D'ailleurs, d'après mes renseignements, le taux des prélèvements obligatoires devrait être dès cette année légèrement supérieur à ce qu'il était en 2007 et il le sera bien davantage en 2012, comme l'a indiqué le rapporteur général. Dès lors, comment expliquer cette augmentation lorsque l'on affirme que la hausse de la fiscalité n'est pas une solution ?
D'autre part, le Gouvernement prévoit 10 % d'économies sur les frais de fonctionnement d'ici à 2013 et 2,5 % pour la seule année 2012, soit 2 milliards d'euros. Or cette économie n'apparaît pas dans le document de présentation qui indique que, à structure constante, la catégorie « autres dépenses » du budget général reste de 123,9 milliards d'euros de 2011 à 2012. Où donc se trouvent les 2 milliards d'économie annoncés ?
Le plan d'aide à la Grèce et la décote de 21 %, monsieur le rapporteur général, auront incontestablement un impact sur les recettes. Nous devrons être très attentifs à un éventuel ralentissement global. Nous nous efforçons d'anticiper les évolutions mais l'élasticité des recettes est si importante qu'il est difficile de faire une prévision valable tout au long de l'année. Cela étant, nous nous adapterons pour tenir nos engagements en matière de déficit.
L'instauration du Fonds européen de stabilité financière – FESF – permettra de passer d'un système de prêts directs d'État à État à un système de garanties. Dans sa conception, le dispositif est un pare-feu destiné d'une part à accompagner la Grèce et l'aider à tenir ses engagements vis-à-vis de ses créanciers –, d'autre part à produire un effet de levier suffisamment puissant pour éviter une propagation : c'est ce que nous avons appelé au G20 « maximiser l'impact de la flexibilité ». Le FESF fonctionnera comme une banque en cherchant des ressources sur les différentes places. La hausse de la contribution des États ne fait donc pas partie de la problématique.
S'agissant des décaissements, le plan d'aide global représente 1,9 % de PIB, soit 38 milliards d'euros. Nos prêts bilatéraux à la Grèce s'élèvent à 16 milliards d'euros. Via le FESF, nos prêts atteignent 14,6 milliards pour ce même pays, 3,9 milliards pour l'Irlande et 4 milliards pour le Portugal. Cela étant, la situation s'impose à tous les pays. Dans le cadre de la nouvelle gouvernance, nous examinerons les moyens de négocier avec la Commission européenne pour que cette évolution n'ait pas de conséquences sur le statut de la dette des États prêteurs.
Pour ce qui est de la hausse des prélèvements obligatoires, monsieur le président Cahuzac, je me permets de souligner la forte élasticité de notre modèle économique. De plus, le ratio par rapport au PIB intègre les impôts et les cotisations sociales. La hausse de ces dernières est plutôt positive puisqu'elle est la traduction des créations nettes d'emplois. Certes, nous prévoyons de terminer à 43,7 % de prélèvements obligatoires en 2012, soit au-dessus des 43,4 % de 2007, mais permettez-moi de me référer aussi aux 44,1 % de 2006 et même aux 44,9 % de 2000.
Mais avec une croissance sensiblement différente !
À l'appui des propos de François Baroin, je précise que les recettes fiscales nettes augmentent de 7,5 %, mais que cette hausse se décompose en 5,4 % d'augmentation spontanée – rattrapages de recettes – et en 2,1 % seulement de recettes nouvelles – plan du 24 août notamment.
En 2012, nous abaisserons le déficit de 1,2 point de richesse nationale, monsieur le rapporteur général, et 90 % de cette baisse sera structurelle, dont 0,7 point en recettes et 0,4 point en dépenses. Néanmoins, ce dernier taux de 0,4 % ne tient pas compte des dépenses évitées qui, si on les incluait, permettraient d'obtenir un total de 45 milliards d'euros en 2011 et en 2012. Il s'agit là d'une méthodologie européenne qui prend en compte les dépenses évitées par rapport au trend de croissance. Le plan allemand est construit selon cette méthode, si bien que les efforts réalisés par nos deux pays peuvent être comparés.
J'en viens aux dépenses de fonctionnement des ministères, qui représentent environ 10 milliards d'euros hors défense et hors dépense exceptionnelle de 300 millions d'euros pour l'organisation des élections. L'objectif de 2,5 % d'économie brute par rapport à 2011 est bien atteint dans le projet de loi : les crédits connaissent une diminution nette en 2012 comme en 2011 de près de 1 % tandis que leur trend d'augmentation est de l'ordre de l'inflation, soit 1,7 %. J'ajoute que le financement des moyens nouveaux pour les priorités gouvernementales – augmentation de 100 millions des moyens de fonctionnement de la justice, par exemple – est inclus dans le périmètre de ces crédits en baisse nette de 1 %.
Les acomptes d'impôt sur les sociétés concordent aujourd'hui avec nos prévisions. Nous devrons attendre le versement du cinquième acompte en décembre pour avoir une vision précise de l'année 2011.
Les prévisions de recettes non fiscales, monsieur le rapporteur général, ont été revues à la baisse tant pour 2011 que pour 2012, en particulier pour les dividendes de la Caisse des dépôts et la Banque de France. Cette baisse est directement corrélée à celle des cours de la Bourse. Nous ne faisons pas de prévisions à plus long terme car nous avons constaté par le passé des remontées rapides des recettes non fiscales issues de ces deux établissements, après 2008 notamment.
Quel est le climat politique dans la zone euro ? On a le sentiment que deux groupes de nations s'opposent sur les moyens de résoudre la crise de la dette publique. Ces groupes sont-ils identifiés ou sont-ils fluctuants ? La France fait-elle clairement partie de l'un d'entre eux ou s'efforce-t-elle de rapprocher les points de vue ?
S'agissant de la convergence fiscale franco-allemande, le Gouvernement est-il à même de préciser un calendrier ? L'objectif est-il de court ou de moyen terme ? La priorité est-elle bien le maintien de la ressource fiscale, plutôt que l'alignement sur le régime allemand ?
Plus généralement, ce que je retiens de ce projet de budget est la combativité du Gouvernement et de sa majorité face à une situation sans précédent. La recherche de solutions confine à la quadrature du cercle : il faut tout à la fois maintenir la crédibilité de l'État au niveau international pour conserver la note triple A qui garantit un financement à moindre coût, maintenir le taux des prélèvements le plus bas possible dans une tendance très haute – 45 % de PIB, cela correspond au sommet inégalé atteint par Dominique Strauss-Kahn en 1999 –, et conserver les priorités du Gouvernement que sont l'investissement dans l'attractivité et la compétitivité, la protection des Français soumis à la pression du chômage et ayant besoin de protection sociale, et enfin la recherche continue d'une rationalisation des dépenses sans toucher à l'essentiel, c'est-à-dire à la qualité du système français.
De ce point de vue, ce projet de budget tient les promesses et tient le cap. Notre devoir sera d'aller plus loin avec le Gouvernement, pour trouver dans l'immédiat 1 milliard d'euros supplémentaire mais aussi pour veiller à conserver la trajectoire de réduction importante des déficits jusqu'à 2 % en 2014. Si des efforts supplémentaires s'avèrent nécessaires, nous devrons les assumer, les faire voter et appliquer. Plus nous nous approchons de la fin de l'année 2011, plus il nous sera difficile de prendre des mesures correctrices pour l'exercice en cours et d'éviter des reports sur 2012.
Il n'est jamais populaire de réduire les déficits, de surcroît dans une situation si tendue. Il y va cependant de notre responsabilité vis-à-vis des générations futures, auxquelles nous ne devons pas transmettre un niveau d'endettement aussi colossal. La volonté du Gouvernement et de la majorité est à mettre à notre crédit. À nous d'en faire la pédagogie dans le débat budgétaire et de veiller à ce qu'elle soit respectée dans les années à venir.
La baisse « historique » du déficit entre 2010 et 2011 tient à ce que le déficit de 2010 incluait 35 milliards d'euros d'investissements d'avenir. Corrigée de ces investissements et du reliquat de plan de relance, quelle est la réduction effective ?
Même en examinant votre projet à la loupe, madame la ministre, je ne vois pas comment il peut soutenir la croissance. J'y vois plutôt une politique d'austérité. Au lieu de supprimer des niches fiscales inefficaces et injustes, comme vous y invitaient aussi bien le Conseil des prélèvements obligatoires que le rapport de l'Inspection générale des finances, vous avez inventé des impôts nouveaux – sur les mutuelles et sur la consommation, notamment – qui auront un effet dépressif.
En outre, pas un institut de conjoncture – ni même vos services –, ne peut croire que les coupes aveugles que vous pratiquez dans les dépenses publiques n'auront pas d'effet dépressif sur l'activité économique. Si vous ne prenez pas simultanément des mesures de soutien à l'emploi, votre plan d'austérité cassera un peu plus une croissance qui est déjà nulle au deuxième trimestre, et les recettes fiscales. Vous devrez alors courir continuellement après la réduction des déficits sans jamais y arriver car il faut pour cela une politique un peu plus subtile : la maîtrise des dépenses est bien entendu nécessaire, mais il faut savoir également soutenir l'emploi et la croissance, notamment la croissance à long terme par une politique industrielle.
Puisque vous parlez de convergence franco-allemande, je vous invite à vous inspirer de l'action de nos voisins face à la crise. En 2009, l'Allemagne a dépensé 5 milliards d'euros pour réduire le temps de travail dans la période de crise en subventionnant le Kurzarbeit – ce que nous appelons en France le chômage partiel. Ainsi, le chômage n'a pas augmenté et les salariés sont restés dans l'entreprise. Si l'Allemagne a redémarré à 3 % de croissance juste après la crise, ce n'est pas un miracle : c'est parce que les salariés étaient à pied d'oeuvre quand les commandes sont revenues. Vous pourriez du reste vous inspirer de l'Allemagne en matière de temps de travail : les données de l'OCDE montrent que nos voisins sont à 35 heures et demie et les Français à 38 heures, toutes activités concernées.
Bref, alors que nous pourrions nous inspirer de beaucoup de choses en Allemagne, je ne suis pas sûr que vous choisissiez ce qu'il y a de meilleur.
Quant à la taxe transitoire sur les hauts revenus, le rapporteur général indique avec raison qu'elle touchera tous les revenus, contrairement à l'impôt sur le revenu. Mais il existe d'autres moyens que nous ne cessons de vous proposer : la suppression des prélèvements forfaitaires sur les revenus du capital, la suppression de la plus grande partie des niches et le plafonnement sévère des autres. Si tous les revenus passent au barème, les revenus du capital et les revenus du travail seront imposés de la même façon : c'est la logique de la réforme fiscale que nous préconisons. Et elle peut être décidée très rapidement, de manière à ce que les dix plus hauts revenus ne soient pas, comme aujourd'hui, soumis à un taux effectif d'imposition inférieur à 20 %. Tous les spécialistes savent bien que l'imposition pour les très hauts revenus est régressive. Une fois que tous les revenus sont imposés de façon uniforme et progressive, on peut alors augmenter la tranche marginale d'imposition du revenu comme l'ont fait les Britanniques et les Allemands. Nous demanderons donc, outre le nettoyage de notre impôt sur le revenu, un relèvement de la tranche supérieure à 45 %. La contribution des hauts revenus sera alors pérenne, dans le cadre d'une vraie réforme, bien différente du bricolage que vous proposez.
J'ajoute que les 200 millions d'euros que pourrait rapporter votre taxe paraissent bien dérisoires au regard des 1,8 milliard de cadeaux fiscaux faits aux plus fortunés lors de la réforme de l'ISF de juin et juillet derniers.
Depuis deux ans, on se tue à dire au Gouvernement que ses hypothèses de cadrage macroéconomique sont trop favorables. Pour la loi de programmation pluriannuelle, nous avions préconisé de retenir un taux de croissance de 1,5 % et il avait fait un geste en le ramenant progressivement à 2 %, puis à 1,75 %. Mais ce n'est pas suffisant. Avec des prévisions moindres, de l'ordre de 1,5 %, nous pourrions, si nous faisions mieux, réduire plus vite les déficits et dégager une marge de 4 à 5 milliards d'euros environ. Que pensez-vous de l'idée de constituer une réserve ?
Par ailleurs, il y a tout de même de quoi s'inquiéter en examinant les composantes de la demande finale. Certes, l'investissement des entreprises a repris – après avoir fortement baissé au moment de la crise – mais le taux de marge est en chute libre. À 28,9 %, il est à son plus bas niveau depuis 1986, ce qui devrait se ressentir sur l'investissement. Vos prévisions, madame et monsieur les ministres, sont bien optimistes.
Le pouvoir d'achat des ménages continue de progresser, autour de 1 % par an, à un rythme voisin de celui que vous avez retenu, mais ils ne consomment pas : le taux d'épargne augmente continûment – il est à 17 % –, alors que la consommation chute au deuxième trimestre, à cause de l'incertitude de la conjoncture internationale. Vos prévisions sont donc surévaluées.
Quant au commerce extérieur, la dégradation régulière de notre compétitivité nous a coûté depuis dix ans un demi-point de croissance annuelle, par rapport à l'Allemagne. Le différentiel de croissance entre nos deux pays s'explique d'ailleurs massivement par l'évolution de leur compétitivité sur les marchés extérieurs. En misant sur un impact négatif très limité du commerce extérieur, vous êtes là encore trop optimistes.
Bref, nous maintenons nos hypothèses de 1,2 % pour 2011, alors que vous êtes à 1,75 %. Ce différentiel nous coûtera 4 ou 5 milliards d'euros de déficit supplémentaires que la réserve que je vous propose permettrait d'absorber.
En ce qui concerne le cadrage des finances publiques, le Gouvernement va incontestablement dans la bonne direction. Mais pas assez vite. Le ratio dépenses publiquesrichesse nationale PIB baisse : 56,6 % en 2010, 56,3 % en 2011 – chiffre très aléatoire si la croissance n'est pas au rendez-vous –, 55,8 % en 2012. Toutefois, une analyse des comptes consolidés révèle, pour l'année prochaine, une augmentation des dépenses sociales, y compris le Fonds de solidarité vieillesse, de 3,4 %. Les détracteurs du Gouvernement devraient lui reprocher de ne pas aller assez loin puisque le budget de l'État n'est pas en croissance zéro. Il augmentera de 1,6 % si l'on tient compte des intérêts de la dette, des pensions et de l'impact de la réforme de la taxe professionnelle qui a réduit les prélèvements sur recettes. Le document du Gouvernement affiche donc une hausse de 5,7 milliards d'euros sur la base de 365 milliards.
Il manque le milliard d'euros du plan Fillon.
Il n'est pas dans le projet de budget. Mais, même en en tenant compte, l'augmentation des dépenses sera encore de 1,2 ou 1,3 %. C'est encore trop. Aussi proposerons-nous des mesures de réduction des dépenses : à côté du traditionnel amendement centriste qui propose d'abaisser de 1,6 à 1,5 SMIC le plafond des salaires donnant lieu à allégement de charges patronales, ce qui rapporterait 1 milliard d'euros supplémentaire, nous suggérons d'examiner Rubik. Où en sont les négociations avec la Confédération helvétique ? Ne pourrait-on envisager que les 3 milliards d'euros qu'engendrent les 85 ou 86 milliards non déclarés par les résidents français et placés dans les banques suisses soient taxés à 32,5 %, soit le prélèvement forfaitaire majoré de la CSG et de la CRDS ? Nous récupérerions alors 1 milliard d'euros par an. Contrairement à ce qui a été dit, ce serait un élément de lutte contre la fraude puisqu'il n'y aurait plus aucun intérêt à effectuer des placements en Suisse au regard de l'impôt sur le revenu. Resteraient seulement l'ISF – ramené à 0,5 % au maximum depuis sa réforme – et l'imposition du patrimoine.
En ce qui concerne l'alourdissement de la pression fiscale, là encore les centristes avaient prôné que l'effort porte à 60 % sur la réduction des dépenses et 40 % sur les recettes. Or le Gouvernement a retenu les proportions inverses. Du coup, n'allant pas assez loin en matière de dépenses, il doit forcer sur les recettes. Je rappelle le taux de prélèvements obligatoires : 42,5 % en 2010, 43,7 % en 2011, et 44,5 % en 2012, ce qui me semble raisonnable après 1,2 point supplémentaire prélevé en 2011. Mais l'effort est déséquilibré : c'est sur les dépenses qu'il faut rogner 5,7 milliards d'euros supplémentaires.
Le déficit va être ramené à 4,5 % du PIB, soit 1,2 point de mieux. Mais il faudra, l'année suivante, gagner encore 1,5 point pour tenir l'objectif de 3 % en 2013. Ce n'est pas tenable. En appliquant la règle d'or chère aux centristes, c'est-à-dire sans recours à l'emprunt, il faudrait être à 1 %, ce qui laisserait un déficit public stabilisé à 1,4 ou 1,5 % du PIB. Autrement dit, au rythme actuel, il faudra trois ans de plus avant d'atteindre l'objectif.
Venons-en à la dette, autour de 87,4 % du PIB. L'impact des plans d'aide aux pays de la zone euro sera marginal, 1,3-1,4 point de PIB, soit en valeur absolue 30 milliards d'euros sur la Grèce et 8 milliards sur les deux autres États.
S'agissant de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, je n'ai pas compris la logique gouvernementale. On avait prétendu vouloir s'approcher de la fiscalité allemande. Or, outre-Rhin, le taux marginal d'impôt sur le revenu est de 45 %, ce qui nous laisse une marge de manoeuvre de 4 points. Pourquoi 3 % seulement ? Et le seuil qu'ils ont retenu correspond, chez nous, à un seuil de 150 000 ou 180 000 euros. Êtes-vous d'accord pour l'abaisser à ce niveau ?
Quant à la contribution sur les boissons sucrées, ne dites pas, madame la ministre, qu'elle est destinée à lutter contre l'obésité ! Apparemment, tous les rapports de l'OMS sur le sujet montrent le contraire. Les 120 millions d'euros qu'elle rapportera seront-ils dédiés à l'allègement des charges sociales pour les salariés agricoles titulaires d'un CDI, prévu dans le PLFSS ?
Pourriez-vous détailler la mesure exceptionnelle prise pour permettre aux entreprises de racheter des quotas d'émission de CO2 ?
Dans tous les propos tenus par nos deux ministres, les Français étaient curieusement absents. Autrement dit, même s'ils ont du mal à boucler leurs fins de mois, il n'y aura rien pour le pouvoir d'achat, rien pour l'emploi, rien pour l'investissement parce que, au fond, vous refusez de toucher à la répartition des richesses.
Il faut toute la foi qui anime François Baroin pour affirmer que les banques françaises n'ont pas de problème, qu'elles ont franchi les stress tests sans encombre. Elles me rappellent le malheureux Goscinny, mort d'une crise cardiaque en revenant de chez son cardiologue. Le fait d'avoir passé l'épreuve ne dit rien sur ce qui arrivera demain. Vous n'avez pas parlé de l'éventualité d'une recapitalisation du système bancaire. S'il était en difficulté, cela pèserait sur l'économie nationale et les équilibres budgétaires.
En matière d'équité, nous continuerons de vous harceler pour vous faire admettre la vérité, ou vous faire renoncer à la dissimulation où vous excellez, avec une mention particulière pour François Baroin, qui a la sagesse de ne pas répondre à la question sur le montant de la feuille d'impôt de Mme Bettencourt en 2011 et 2012. Mme Pécresse, en s'abritant derrière le secret fiscal, a déjà avoué le péché.
Vous avez l'audace de parler de convergence avec l'Allemagne, de manière totalement désincarnée. La prochaine fois que vous irez à Berlin, allez donc dans le quartier de Marzahn voir par vous-même les conséquences d'une politique que vous portez au pinacle. Vous pourrez mesurer la paupérisation massive et la précarisation qu'elle engendre à la longueur des queues devant les soupes populaires ! Et avez-vous vu les prévisions allemandes pour l'année prochaine, vous qui rêvez de fonder la croissance sur le développement des exportations ? La croissance attendue n'est que de 1,5 % pour 2012 et ce ralentissement se fera sentir chez nous.
Toujours à propos de la convergence, arrêtons l'arnaque sur les retraites, même si le Premier ministre s'en fait le complice. Vous devriez suggérer à Mme Morano d'envoyer une note à sa collègue allemande pour lui indiquer comment se fabriquent les enfants. Au fond, c'est tout le problème. Chez nous, il y a environ 2,1 enfants par femme, contre 1,31 en Allemagne. Tout le reste n'est que propagande.
Madame Pécresse, que pensez-vous des Allemands et des Anglais, qui en signant les accords Rubik, ont donné la prime aux voleurs ? Proposer d'en faire autant, c'est un comble ! C'est cela la fiscalité comportementale dont vous parlez ? !
En ce qui concerne les positions au sein de la zone euro à propos de la Grèce, celle de la France est claire : elle soutient l'accord du 21 juillet, tout l'accord du 21 juillet, rien que l'accord du 21 juillet. Et elle s'opposera à toute autre stratégie. La France restera aux côtés de la Grèce et elle soutient l'intégrité de la zone euro.
Monsieur Muet, sur la convergence et les prélèvements obligatoires, nous avons un désaccord persistant. Inutile d'en rajouter. Nous considérons, quant à nous, que c'est en ne procédant pas à une hausse généralisée des impôts que nous protégeons le pouvoir d'achat. En décidant d'épargner certaines niches fiscales comme celle consentie aux retraités, et qui représente environ 4 milliards d'euros, nous faisons un choix politique stratégique qui concourt au maintien du pouvoir d'achat. Nous sommes cohérents tout en nous adaptant aux circonstances puisque nous révisons les hypothèses de croissance. Et les dépenses fiscales, qui se superposent aux efforts structurels en matière de dépense, nous permettent d'éviter la récession. Je suis convaincu que vos propositions auraient un impact terriblement récessif et immédiat, compte tenu de l'extrême réactivité des agents économiques.
À propos de la suggestion de M. de Courson d'aligner le taux marginal de l'impôt sur le revenu sur le taux allemand, il faut, pour que la comparaison soit valide, tenir compte des prélèvements sociaux. C'est bien ce que l'on fait quand on calcule le taux global de prélèvement obligatoire qui est plus élevé en France qu'en Allemagne. Comme nous ne voulons pas d'une hausse généralisée des impôts, nous ne retiendrons pas votre proposition.
Je conclus en soulignant l'importance de deux événements : le vote par le Parlement européen du Six pack governance, c'est-à-dire du renforcement de la gouvernance économique, auquel personne ne croyait plus après dix-huit mois de blocage ; et celui de l'adoption de la modification du FESF par le Parlement finlandais. C'est de bon augure à la veille du vote allemand.
Monsieur Muet, je ne peux pas vous laisser dire qu'il s'agit d'un impôt nouveau sur les mutuelles. Non ! Il s'agit seulement de supprimer la niche fiscale sur les contrats solidaires et responsables qui étaient sous-taxés – à 3,5 % au lieu de 7 % – et qui représentent plus de 90 % des contrats.
Accepterez-vous l'amendement de Mme Rosso-Debord visant à taxer les réserves excessives des mutuelles ?
Nous n'y sommes pas favorables, mais nous en discuterons. Et, je le répète, comme l'a fait Xavier Bertrand, les mutuelles peuvent ne pas répercuter la hausse de cette taxe sur les primes des assurés. Après tout, avec le respect de l'ONDAM pour la troisième année consécutive et la hausse des affections de longue durée, supportées en totalité par l'État, les mutuelles font des économies.
S'agissant de l'effet dépressif de nos mesures, monsieur Muet, je crois que, aujourd'hui, la croissance, c'est la confiance. Et la confiance s'obtient par la réduction des déficits et le désendettement. Donc, la réduction des déficits soutient la croissance. Je vous rappelle aussi que nous avons dégagé 500 millions d'euros en faveur de l'emploi en début d'année. L'emploi est bel et bien une priorité du Gouvernement.
Réduire le chômage en période de croissance nulle, c'est beaucoup moins facile que quand elle est de 4 % par an. Cela ne nous empêche pas d'essayer de rapprocher la demande et l'offre de travail au sein des bassins d'emploi, pour faire baisser le chômage.
Le déficit est passé de 7,1 % du PIB à 5,7 % en 2011, soit 1,4 point de PIB de moins, dont 0,7 point dû à la fin du plan de relance.
Ma question concernait le budget de l'État, et pas le compte des administrations publiques.
Alors, je vous donnerai une réponse plus précise quand je reviendrai devant vous.
Nous avons maintenu des dispositifs de soutien à la croissance très importants, que ce soit la réforme de la taxe professionnelle ou le crédit d'impôt recherche, ou encore les dépenses des universités.
M. de Courson suggère de réduire le déficit de 7 milliards d'euros, mais j'attends qu'il documente exactement sa proposition.
Réduire les allégements de charges Fillon constituerait un risque pour l'emploi, surtout pour l'emploi peu qualifié et les bas salaires. Aussi nous abstiendrons-nous.
Le dispositif Rubik fera l'objet d'une évaluation dans un rapport attendu en décembre. Le Gouvernement réserve donc sa réponse mais, en tout état de cause, nous ne sacrifierons pas notre âme pour 1 milliard d'euros et nous entendons poursuivre notre lutte contre la fraude fiscale.
Monsieur Brard, l'équité est au coeur de ce projet de budget. Avec une hausse de 25 % de l'allocation adulte handicapé et du minimum vieillesse en cinq ans, et le maintien du crédit d'impôt pour les installations que requièrent les personnes âgées et handicapées,…
…les plus fragiles d'entre nous ne sont pas oubliés.
Quelle est votre hypothèse concernant le coût de la dette ? Si toutes les recettes n'étaient pas au rendez-vous, faute de croissance en particulier, les ajustements porteraient-ils prioritairement sur des recettes nouvelles ou sur des économies nouvelles ?
S'agissant de la gouvernance économique européenne, où sont les avancées ? Il s'agit là d'un enjeu politique important, dont la légitimité auprès des citoyens n'est pas acquise d'avance. Il faut s'en expliquer bien en amont parce que, si un gouvernement, de droite ou de gauche, arrive avec un projet totalement ficelé, il risque d'être mal compris.
À propos de la politique immobilière de l'État, il est écrit que « le Conseil d'État quittera le site qu'il occupe avenue Saint-Honoré pour s'installer sur un nouveau site qui a été pris à bail en deçà du plafond » de 400 euros par mètre carré et par an fixé par l'État. Est-ce à dire que vous envisagez la suppression d'une institution aussi prestigieuse ? Sinon, pourquoi louer au lieu d'acheter ?
Les opérateurs de l'État ont vu leurs effectifs plafonnés à 373 456 ETP dans la loi de finances initiale. Cette limite vaut pour l'ensemble des emplois, « à l'exclusion des emplois à durée déterminée financés par les ressources propres de l'opérateur ». J'avoue être surpris que l'utilisation des ressources propres échappe au budget de l'État, alors que les opérateurs sont souvent bénéficiaires de taxes affectées. Quelle est exactement la politique du Gouvernement en la matière ?
Le rapport de la Cour des comptes a suscité un long débat sur ce qui relevait respectivement du déficit structurel et du déficit conjoncturel. Apparemment, le premier va baisser au point d'être ramené à un niveau inférieur à celui d'avant la crise. Comment parvenez-vous à un tel résultat ?
Au deuxième trimestre, la croissance a été nulle, mais pas la hausse des prix, ce qui s'est traduit immédiatement par plus d'1 milliard d'intérêts supplémentaires pour le service de la dette. Que se passerait-il si la politique monétaire se faisait, contrairement à la pratique des vingt dernières années, plus accommodante avec l'inflation, c'est-à-dire si les taux d'intérêt courts restaient en deçà de l'inflation ? Quelle en serait l'incidence sur le coût de la dette ?
Je m'étonne qu'il ne soit nulle part fait mention du semestre européen. De deux choses l'une : soit nous sommes dans les clous et il faut le dire, soit nous sommes en dehors pour telle ou telle raison, et il faut le dire aussi. Mais on ne peut pas parler de gouvernement économique de l'Europe, et faire comme si rien n'existait.
Je ne vois guère de corrélation dans le temps entre le niveau des prélèvements obligatoires et le taux de croissance. Pierre-Alain Muet et le rapporteur général ont souligné à juste titre que, du fait de la fin du plan de relance, il était plus facile de faire apparaître une baisse du déficit en 2011 qu'en 2012. Comment, dès lors, ne pas solliciter davantage la fiscalité, notamment l'impôt sur le revenu, voire la TVA en instituant un deuxième taux réduit ?
À propos de Rubik, je tiens à déclarer que signer un accord avec les Suisses équivaudrait à capituler devant eux et à abdiquer toute volonté de faire reculer le secret bancaire. Les conséquences seraient considérables, puisque cela reviendrait à renoncer à l'application de la directive européenne sur l'épargne. On voit bien que, dans toutes les affaires troubles, les flux financiers passent soit par la Suisse, soit par le Luxembourg, même s'ils se prétendent tous deux irréprochables. Ce ne serait pas la peine d'avoir fait tous ces discours devant le G20 pour finir par accepter Rubik.
Enfin, la taxe sur les boissons sucrées, je l'avais proposée il y a deux ans, sous les risées, pour apporter des ressources au régime des retraites agricoles. Je constate pourtant que le ministre de l'agriculture l'a reprise à son compte pour financer un allégement de charges sur les CDI, pour les éleveurs en particulier, ce qui n'aurait pas été déraisonnable. Mais il est dérisoire de prétendre réduire le déficit de l'État avec pareille accise.
M. Mariton a raison d'attacher de l'importance à la gouvernance franco-allemande. Nous en sommes à la phase préparatoire et les propositions seront présentées au Parlement le moment venu. La Chancelière Mme Merkel et le Président Sarkozy nous ont demandé, à Wolfgang Schaüble et à moi-même, de travailler à la convergence fiscale – nous l'avons anticipée avec l'impôt sur les sociétés – et à la taxe sur les transactions financières. Nous négocions avec nos partenaires sur la base d'un périmètre qui serait l'Union européenne. Nous rencontrons des réticences, de la part des Britanniques mais pas seulement. Les Suédois, qui avaient mis en place cette taxe, ont constaté que les flux s'étaient déplacés, et ils font désormais campagne contre. Le consensus est encore loin, mais nous gardons l'objectif d'une taxe sur les transactions financières, au mieux dans l'Union, au moins dans la zone euro.
S'agissant de la gouvernance de la zone euro, le blocage vient de la règle de l'unanimité. Mais le débat ne peut pas s'ouvrir tel quel, puisqu'elle figure dans les traités constitutifs de la zone euro. Ce qui, en revanche, peut être corrigé rapidement concerne la présidence permanente et structurée, des rendez-vous institutionnels réguliers, le suivi de l'information et le renforcement de la communication dont l'impact est particulièrement fort sur des marchés aussi fragilisés qu'ils le sont aujourd'hui. Le moindre écart par rapport à ce qui est dit par le président Juncker nourrit la spéculation.
Que faire si la croissance n'est pas au rendez-vous ? Eh bien, en politique, on ne parie pas sur l'échec. Aussi ferons-nous en sorte de réussir. Mais il ne s'agit pas de nier la réalité. Et si la croissance devait être inférieure aux prévisions, nous tâcherions de respecter l'objectif de déficit. Les arbitrages étant du ressort du Président de la République ou du Premier ministre, nous ne pouvons pas répondre, mais ce n'est pas s'avancer beaucoup que de dire que nous refuserions une hausse généralisée d'impôts. Ce serait donc sur les dépenses que nous agirions, y compris sur l'ONDAM.
Monsieur Carré, vous semblez envisager des taux d'intérêt réels très faibles. Or la politique monétaire de la BCE se transmet surtout via les taux longs. Au vu des anticipations inflationnistes, nous ne devions pas modifier notre politique d'émission. À plus long terme, un tel cas de figure devrait diminuer notre coût de financement. En tout cas, à court terme, la Banque centrale européenne ne devrait pas modifier sa politique.
Monsieur Mallié, vous connaissez mon attachement à la noble institution du Conseil d'État, sans lequel je ne serais rien de ce que je suis ! Cela dit, force est de reconnaître que chaque agent disposait au Carrousel du Louvre de 35 mètres carrés en moyenne. Dans le cadre de la rationalisation de la politique immobilière, nous avons ramené les loyers du Conseil d'État à des niveaux plus proches de la norme de 400 euros annuels le mètre carré. Ce n'est porter atteinte ni au prestige ni au bon fonctionnement de l'institution.
Les surfaces occupées par l'État vont baisser. C'est aussi une première historique. C'est la conséquence de la baisse du nombre de fonctionnaires, de celle des dépenses et de la revue générale des politiques publiques. Et c'est une très bonne chose.
Le solde des administrations publiques – moins 4,5 % du PIB – que nous présentons aujourd'hui se décompose en – 1,9 point de solde conjoncturel et – 2,6 points de solde structurel. En 2012, le solde structurel se réduira de 1,1 point. Avec une hypothèse de croissance de 1,75 %, nous atteignons notre croissance potentielle et toute baisse du déficit correspond à une amélioration du solde structurel.
La taxe sur les sodas me donne l'occasion de relever l'absence de dialogue entre la commission des affaires sociales et la commission des finances. La première a fait un rapport sur les taxes nutritionnelles et l'OMS, qui relaie l'opinion des chercheurs, affirmant que l'arme la plus efficace pour prévenir l'obésité, ce sont les taxes nutritionnelles, notamment sur les boissons à sucre ajouté qui n'entrent pas dans le régime de base des humains. Mais nous sommes ici pour parler réduction des déficits et compétitivité de l'économie. Monsieur Garrigue, vous avez eu raison avant l'heure en proposant une contribution pour abonder la baisse des charges sociales sur le travail agricole. Nous débattrons de sa destination mais, à l'heure actuelle, les 120 millions d'euros prévus sont destinés à réduire les déficits publics, et non les charges sur le travail agricole.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 28 septembre 2011 à 12 h 30
Présents. - M. Gérard Bapt, M. Claude Bartolone, M. Jean-Marie Binetruy, M. Pierre Bourguignon, M. Jean-Pierre Brard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Bernard Carayon, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Jérôme Chartier, M. Charles de Courson, M. Jean-Yves Cousin, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Flory, M. Nicolas Forissier, M. Jean-Michel Fourgous, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, Mme Annick Girardin, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Marc Goua, M. Laurent Hénart, M. Jean-François Lamour, M. Marc Le Fur, M. Patrick Lemasle, M. Richard Mallié, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Patrice Martin-Lalande, M. Jean-Claude Mathis, M. Pierre Moscovici, M. Pierre-Alain Muet, M. Hervé Novelli, Mme Béatrice Pavy, M. Jacques Pélissard, M. Nicolas Perruchot, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. François de Rugy, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Sapin, Mme Isabelle Vasseur, M. Philippe Vigier
Excusés. - M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Michel Bouvard, M. Alain Claeys, M. Henri Nayrou, M. Michel Vergnier
Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Patrick Gille, M. Lionnel Luca, M. Victorin Lurel