Ce projet de loi de finances traduit clairement la volonté de poursuivre la réduction de nos déficits publics. L'effort budgétaire considérable consenti par l'État – moins 14 milliards d'euros, 0,7 point de PIB – répond à une nécessité absolue. C'est une question de souveraineté nationale : notre besoin de financement pour couvrir les déficits et refinancer la dette venant à échéance atteint plus de 200 milliards d'euros.
La prévision du Gouvernement est d'autant plus crédible qu'elle est répartie de façon équilibrée entre les économies réalisées sur la dépense publique et les hausses d'impôt – même si on les dénomme réductions de niches fiscales. En outre, les mesures de baisse de la dépense et d'augmentation de la recette sont parfaitement calibrées pour ne pas pénaliser la croissance. Il ne s'agit en aucun cas d'un budget récessif ou d'austérité.
En matière de pouvoir d'achat des ménages, par exemple, tout ce qui relève des allocations et de la solidarité est soigneusement protégé. Les mesures d'augmentation des prélèvements portent uniquement sur les revenus du patrimoine. D'après les chiffres de l'INSEE, d'ailleurs, si la croissance a été nulle au deuxième trimestre 2011, le pouvoir d'achat des ménages s'est accru de 0,6 %.
De même, aucune mesure n'est susceptible de porter atteinte à la compétitivité de nos entreprises en alourdissant leurs charges. Le dispositif vise seulement à accélérer le rétablissement de l'impôt sur les sociétés applicable aux grands groupes en limitant les reports déficitaires.
La contribution exceptionnelle des hauts revenus, qui répond à l'exigence de justice fiscale de ce budget, présente un intérêt qui dépasse le symbole puisque, contrairement à ce qui se passerait si l'on ajoutait une tranche à l'impôt sur le revenu, elle frappe de façon égale les revenus du capital et les revenus du travail. Or, plus les revenus sont hauts, plus la part des revenus du patrimoine est importante.
S'agissant de la maîtrise des dépenses, condition absolue d'un rétablissement des comptes publics, ce projet montre que les efforts entrepris depuis 2007 commencent à porter leurs fruits. Alors même que le PIB augmente moins vite que prévu, le ratio entre dépenses publiques et PIB amorce une baisse, refluant au-dessous des 56 %. Cela étant, le niveau des dépenses reste beaucoup plus élevé dans notre pays que chez la plupart de nos partenaires européens.
Pour ce qui est des recettes, la remise à plat de certaines niches fiscales est assurément indispensable mais nous devons être bien conscients que la réduction des niches, au-delà d'un certain montant, n'est ni plus ni moins qu'une hausse d'impôt. Or, s'il existe beaucoup de niches, c'est parce que celles-ci jouent un rôle de soupape de façon à atténuer la sur-pression fiscale. À la fin de 2012, les prélèvements obligatoires seront remontés à 44,5 % du PIB et, selon les prévisions gouvernementales, ils resteront supérieurs à 45 points les années suivantes. Cela signifie que nous n'avons plus aucune marge de manoeuvre en matière de hausse des prélèvements. Seuls des redéploiements restent possibles : alléger le coût du travail, par exemple, en trouvant d'autres sources de financement pour la protection sociale. Mais tout choc fiscal supplémentaire entraînerait immédiatement la chute d'une croissance encore bien faible.
Pour moi, la qualité essentielle de ce budget est qu'il fait tout pour ménager le retour progressif de la croissance tout en étant profondément marqué par un souci de justice fiscale.
J'en viens à mes questions.
La réduction du déficit du budget de l'État, nous est-il indiqué, se répartit à parts égales entre diminutions de dépenses et augmentations d'impôts. Cet équilibre est-il le même dans la prévision en termes de déficit public consolidé ?
Par ailleurs la loi de programmation pluriannuelle prévoyait une réduction de 10 % des dépenses de fonctionnement, des dépenses d'intervention et des dépenses discrétionnaires, avec une baisse de 5 % en 2011, de 2,5 % en 2012 et de 2,5 % en 2013. Pourriez-vous nous donner le détail de l'évolution pour chacune des trois rubriques ?
Pour ce qui est de l'impôt sur les sociétés, le Gouvernement prévoit une croissance du bénéfice fiscal de l'ordre de 10 % en 2011, ce qui ne sera pas sans incidences sur les recettes de 2012. En régime de croisière, un quart environ de l'IS provient du secteur financier – banques et assurances. Quelles sont les hypothèques qui pèsent sur lui, qu'il s'agisse du plan de soutien à la Grèce – abandon de 21 % des créances de banques et institutions financières françaises – ou de la crise boursière, qui conduit les établissements à passer des provisions ?
Les recettes fiscales seront également affectées. Ainsi, la Banque de France et la Caisse des dépôts devraient rapporter à elles deux plus de 2 milliards d'euros de moins par rapport aux années précédentes. Cette diminution préoccupante risque-t-elle de se prolonger au-delà de 2012 ?
Enfin, la dette publique représentera à la fin de l'année prochaine 87,4 points de PIB. Si l'on retranche les diverses mesures de sauvetage, le chiffre est ramené à 85,5 %. Autrement dit, elles représentent 1,9 point de PIB, soit environ 40 milliards d'euros. Or j'ai cru comprendre, au sujet du Fonds européen de stabilité financière, que l'intégration des montants à la dette publique des États apportant leur garantie ne se faisait qu'au fur et à mesure des levées de fonds, lesquelles, à ma connaissance, sont encore très partielles. En tout état de cause, une analyse très détaillée de ces mesures et du calendrier de mise en place en 2012 est indispensable.
Je vous remercie d'avoir apporté des précisions sur le milliard d'économies supplémentaires, madame la ministre. Je souscris au principe mais je pense que le Gouvernement et le Parlement doivent mener un travail commun à ce sujet.