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Intervention de Valérie Pecresse

Réunion du 28 septembre 2011 à 12h30
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Valérie Pecresse, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état :

La réduction des déficits publics dans la zone euro est un impératif, d'abord économique, parce que les niveaux actuels d'endettement public, sous l'effet de la crise, sont aujourd'hui insoutenables ; moral aussi : lorsqu'un problème est évident, la responsabilité politique est d'y répondre. Les causes d'une telle situation sont connues, les responsabilités largement partagées. De l'avis même de la Cour des comptes, la moitié de notre déficit est l'héritage de trente années de laxisme budgétaire, et 40 % du déficit est lié à la crise de 2008, qui a bouleversé nos finances publiques.

Mais les raisons qui nous ont conduits à ce niveau d'endettement importent moins que les solutions que nous allons mettre en oeuvre pour le réduire. Ce qui compte, ce sont les engagements pris. Ce qui compte, c'est le respect scrupuleux de la parole de la France. Ce qui compte c'est le chemin pour y arriver. En la matière, le Gouvernement a fixé un cap clair : 5,7 % de déficit public en 2011, 4,5 % en 2012, 3 % en 2013 et 2 % en 2014. La France entamera son désendettement en 2013, avec un ratio d'endettement qui baissera de plus d'un point de PIB entre 2012 (87,4 %) et 2014 (86,2 %).

Le budget pour 2012 est donc une étape essentielle sur le chemin du désendettement. C'est d'abord le budget des engagements tenus. Avec une réduction de 15 % du déficit budgétaire de l'État, nous opérons un tournant historique. Pour la première fois depuis 1945, les dépenses de l'État baisseront. C'est enfin un budget d'équilibre et d'équité. D'équilibre, car l'effort de réduction des déficits est accompagné du souci constant de préserver la croissance. D'équité, car les efforts pèsent pour l'essentiel sur les grands groupes et non sur les PME, sur les ménages aisés et non sur les plus fragiles.

La stratégie de réduction des déficits que nous mettons en oeuvre avec constance depuis trois ans repose sur trois piliers : la maîtrise des dépenses ; le recours ciblé à des recettes supplémentaires ; la préservation de la croissance.

Premier pilier : il n'y a pas de désendettement possible sans maîtrise des dépenses publiques, c'est-à-dire sans économies. Notre effort dans ce domaine est sans précédent, et il est le fruit de notre action profonde de réforme dans l'ensemble des administrations publiques.

En 2011, nous avons gelé les dépenses de l'État hors dette et pensions, ce qui était déjà un changement majeur. Nous irons plus loin en 2012 puisque les dépenses, dans ce périmètre, seront en baisse. Le Gouvernement, je l'ai dit, met fin à l'augmentation continue des dépenses de l'État depuis 1945. Grâce à nos efforts en matière de dépenses de personnel – en particulier les 150 000 suppressions de poste de fonctionnaires d'État au cours du quinquennat –, la masse salariale de l'État baissera l'année prochaine. Là encore, c'est une première historique. Dans le cadre du budget triennal 2011-2013, les dépenses de fonctionnement et d'intervention des ministères sont soumises à un impératif d'économies de 10 % sur trois ans, ce qui représente près de 8 milliards d'euros d'ici à 2013. Les opérateurs sont évidemment touchés par ce mouvement général, en qui concerne tant leur masse salariale que leurs dépenses de tous les jours. À titre d'exemple, nous aurons supprimé un total de 3 700 emplois en 2011 et 2012 chez les opérateurs à l'exception de ceux de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui seront épargnés.

Cet effort de maîtrise s'applique également aux concours aux collectivités territoriales. Le gel des dotations de l'État représente chaque année près d'1 milliard d'euros d'économies. C'est, là encore, un changement considérable.

En matière de dépenses sociales, les réformes des retraites d'une part, de l'assurance maladie d'autre part, nous ont permis de prendre plus de deux ans d'avance sur nos objectifs de réduction du déficit de la sécurité sociale. La réforme des retraites représente 5,5 milliards d'euros de dépenses en moins dès 2012. Le respect de l'objectif national des dépenses de l'assurance maladie – ONDAM – pendant trois années consécutives constitue une autre rupture majeure qui a permis 11 milliards d'économies pour l'assurance maladie depuis 2008. Entre 2010 et 2012, le déficit de l'assurance maladie sera divisé par deux, et cette réduction repose à 60 % sur notre maîtrise des dépenses.

Au total, la part des dépenses publiques par rapport à la richesse nationale baissera de 0,3 point en 2011 et diminuera encore de 0,5 point en 2012. La maîtrise des dépenses est désormais une réalité tangible en France comme partout en Europe. Aucun gouvernement européen, qu'il soit de gauche ou de droite, n'y échappe. Aucun n'augmente les effectifs de la fonction publique, ni les dépenses de fonctionnement. Aucun ne revient en arrière sur les retraites. Aucun ne fait l'impasse sur la maîtrise des dépenses maladie. C'est ce qui s'appelle la convergence, thème qui semble faire si peur à l'opposition ! Mais je conçois qu'elle puisse s'en effrayer : rien, dans le programme économique et budgétaire du parti socialiste, n'est aujourd'hui à l'oeuvre en Europe. Je comprends que cela pose un problème.

Deuxième pilier de notre stratégie de réduction des déficits publics : le recours ciblé à des recettes supplémentaires. Dans un pays qui figure parmi les plus imposés au monde, la hausse générale des impôts n'a pas d'avenir. À nos yeux, la fiscalité est un outil complémentaire de la maîtrise des dépenses et doit répondre à trois exigences.

D'abord l'équité : pour atteindre les 10 milliards d'euros de recettes supplémentaires pour 2012 annoncées le 24 août dernier, nous demandons plus à ceux qui ont plus, comme en témoignent la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, la hausse des prélèvements sur le patrimoine ou le renforcement de la taxation des plus-values immobilières.

Ensuite la réduction des niches fiscales et sociales injustifiées : nous poursuivons en 2012 l'effort entamé en 2011, en particulier pour redresser de 2 milliards d'euros l'impôt sur les sociétés dans la perspective d'une convergence fiscale franco-allemande.

Enfin le développement d'une fiscalité comportementale, avec la hausse des prix du tabac, la taxe sur les boissons trop sucrées ou la réforme du barème de la taxe sur les véhicules de société.

Se préoccuper en priorité des dépenses et ensuite seulement des recettes, avec toujours des objectifs précis : tels sont les principes qui nous guident. Au total, sur les 45 milliards d'euros d'efforts réalisés en 2011 et 2012, plus de la moitié reposera sur les dépenses. Je précise que le mode de calcul de ce montant est le même que celui qu'utilisent nos partenaires allemands, espagnols ou britanniques. Il permet donc la comparaison.

Troisième pilier de notre stratégie : concilier en permanence la réduction des déficits et le soutien à la croissance. Dans son rapport de juillet 2011 sur la France, le FMI a relevé que nous respections cet objectif essentiel. Notre trajectoire de réduction des déficits n'est donc ni trop rapide ni trop tardive. Nos priorités budgétaires sont cohérentes avec notre politique de croissance : du côté des recettes, puisque notre effort de réduction des niches ne pèse pas sur celles qui sont favorables à l'emploi et à la compétitivité ; mais aussi du côté des dépenses, puisque nous avons accompagné l'autonomie des universités et la réorganisation de la recherche d'un effort budgétaire sans précédent de 9 milliards d'euros.

Le projet de loi de finances pour 2012 marque donc une nouvelle étape dans notre effort de maîtrise des dépenses de l'État. Nous ferons mieux que la norme « zéro valeur » : dans le projet du Gouvernement, les dépenses hors dette et pensions sont gelées à leur niveau de 2011, soit 275,6 milliards d'euros, mais les mesures annoncées le 24 août les feront baisser d'un milliard. Nous nous situerons également très en dessous de la norme « zéro volume », qui limite la progression des dépenses de l'État à la seule inflation, prévue en l'espèce à 1,7 % : les dépenses n'augmenteront que de 1,2 % grâce aux mesures du 24 août.

La maîtrise des dépenses de personnel est un élément central de cette baisse. La masse salariale de l'État sera réduite de près de 200 millions d'euros. Cette année encore, nous ne remplacerons pas 30 400 départs à la retraite dans la fonction publique d'État.

On peut maîtriser les dépenses sans renoncer pour autant aux priorités budgétaires. Le budget pour 2012 le prouve une nouvelle fois.

Ainsi, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche verra ses crédits augmenter de 287 millions d'euros. La politique de cohésion sociale est également privilégiée, avec la poursuite de la revalorisation de l'allocation adulte handicapé et du minimum vieillesse, qui auront augmenté de 25 % en cinq ans conformément aux engagements du Président de la République. Pour l'AAH, l'augmentation globale des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » est de 423 millions d'euros. En cette période de crise, nous renforçons les filets de protection sociale destinés aux plus fragiles.

Pour ce qui est des missions régaliennes de l'État, le budget de la justice connaîtra une nouvelle hausse de près de 200 millions d'euros. C'est le seul ministère qui bénéficiera de créations nettes d'emplois. Les moyens des forces armées seront, quant à eux, renforcés à hauteur de 467 millions d'euros.

Les recettes fiscales s'établiront à 273 milliards d'euros, soit une hausse de 19,2 milliards par rapport à nos dernières prévisions pour 2011. Cette hausse traduit d'une part le rétablissement progressif de nos recettes. Même si, en valeur, celles-ci sont globalement supérieures à leur niveau d'avant la crise, un retard subsiste, en particulier pour l'impôt sur les sociétés. Elle traduit d'autre part l'effort de redressement engagé l'année dernière.

Enfin, le plan du 24 août prévoit 3,6 milliards d'euros de ressources supplémentaires en 2012. Vous avez voté l'essentiel de ce plan et il ne reste aujourd'hui que deux mesures à soumettre à votre examen : la suppression de l'abattement d'impôt sur les sociétés sur les résultats des exploitations dans les DOM et la création d'une contribution exceptionnelle sur les très hauts revenus. Dans le projet du Gouvernement, cette contribution de 3 % s'applique à tous les revenus dépassant 500 000 euros pour une personne seule et 1 million d'euros pour un couple. Je sais que certains d'entre vous souhaitent un seuil d'entrée plus bas. Le Gouvernement y est favorable et nous en discuterons au cours du débat parlementaire.

Les autres mesures en recettes figurant dans le projet de loi de finances respectent elles aussi les principes que nous nous sommes fixés.

En premier lieu, nous poursuivons l'effort de réduction et de rationalisation des niches. En matière d'impôt sur le revenu, nous appliquons un coup de rabot de 10 % sur les réductions et crédits d'impôts, dans le même périmètre qu'en 2011, avec à la clef une économie de 340 millions d'euros en 2013. Les avantages fiscaux liés aux services à la personne et à l'investissement dans le logement social ultramarin ne seront pas concernés.

Dans le même esprit d'amélioration de l'efficacité des niches, nous proposons de proroger, en les modifiant, le crédit d'impôt développement durable, qui est refondu pour inciter les particuliers à réaliser des rénovations lourdes renforçant l'efficacité énergétique des bâtiments et pour permettre aux foyers les plus modestes de bénéficier d'un prêt à taux zéro dans ce cadre ; et les régimes d'investissement locatif dits « Scellier » et « Censi-Bouvard ».

Nous avançons sur le terrain de la fiscalité comportementale avec deux dispositifs : une taxe sur les boissons à sucres ajoutés et une taxe dissuasive sur les loyers exorbitants demandés pour des chambres ou des studios d'une surface inférieure à 13 m2.

Enfin, nous proposons de proroger sans modification le crédit d'impôt relatif aux installations pour personnes âgées et handicapées.

Au total, le solde budgétaire de l'État s'établira à moins 80,8 milliards d'euros, soit une baisse de 14,8 milliards d'euros – ou 1,2 point de PIB – du déficit précédent. L'effort structurel représentera 90 % de cette baisse.

Pour ce qui est du rabot permettant d'obtenir une réduction de dépenses d'un milliard d'euros, j'ai eu de nombreux échanges avec le rapporteur général et plusieurs d'entre vous sur les principes et la méthode qui doivent nous guider. Le Gouvernement vous soumettra à compter de la semaine prochaine des propositions reposant sur l'idée d'un effort partagé entre l'État, les opérateurs et les collectivités territoriales. La participation des opérateurs me semble indispensable car certains ont bénéficié de taxes affectées très dynamiques. Il me paraît également légitime et équitable que les collectivités territoriales soient parties prenantes.

Je conclus en insistant sur l'importance de la maîtrise des dépenses publiques. Les réformes structurelles que nous avons réalisées sont la clé de la réduction des déficits et du désendettement. Il n'existe aucun autre moyen pour préserver la crédibilité de la France en matière budgétaire.

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