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Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Séance du 13 avril 2011 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • loi-cadre
  • lois-cadres
  • stabilité

La séance

Source

La Commission procède, sur le rapport de M. Gilles CARREZ, Rapporteur général, à l'examen pour avis du projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques (n° 3253).

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Nous arrivons aux articles de ce projet, qui nous a été présenté hier par le garde des sceaux et le ministre du budget.

Article premier (art. 34 de la Constitution) : Monopole des lois de finances et de financement de la sécurité sociale sur les dispositions relatives aux mesures fiscales et aux recettes de la sécurité sociale et création des lois-cadres d'équilibre des finances publiques

La Commission est saisie de l'amendement CF 9 de M. Jean-Claude Sandrier.

PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Avec cet amendement, je défendrai tous les autres amendements de suppression que nous avons déposés.

Tout d'abord, nous nous penchons sur un texte qui ne sera jamais adopté puisque, une fois voté par chacune des deux chambres, il faudrait réunir le Congrès ou organiser un référendum. Alors, à quoi bon faire du cinéma ?

Ensuite, ce texte est totalement inacceptable parce qu'il équivaut à une mise sous tutelle de notre pays. Nous n'avons pas à être télécommandés par une institution supranationale, quelle qu'elle soit. Le pacte de stabilité ne stabilisera que les salaires, les dépenses publiques et les régimes de retraite. Et il ne fera, le rapport Camdessus l'explique bien, que rigidifier le cadre de discussion des lois de finances et de financement. Le but, au-delà de l'objectif de maîtrise des comptes publics sur lequel nous sommes d'accord, c'est d'imposer la régression en matière de dépenses publiques et de protection sociale, et de limiter la liberté d'administration des collectivités locales.

Non seulement ce texte programme la régression sociale, mais il cible tout ce qui n'est pas responsable de la crise. Les déficits budgétaires sont chez nous la conséquence de l'assèchement des recettes consécutif aux cadeaux fiscaux – 100 milliards d'euros –, et de la crise. Un pacte de stabilité européen devrait s'attaquer, d'une part, à l'explosion des dividendes – l'OCDE a montré que, dans notre pays, les salaires avaient augmenté de 81 % en vingt ans, et les dividendes de 355 % –, des stock-options et des bonus ; d'autre part, à la spéculation, aux paradis fiscaux et à la circulation des capitaux. Une gouvernance politique européenne, pourquoi pas, mais à condition qu'elle recherche une harmonisation sociale par le haut et un système fiscal plus juste qui favoriserait emploi, formation et innovation, plutôt que dividendes et rémunération des grands patrons.

Voilà pourquoi il faut supprimer l'article 1er et les suivants.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je demande une suspension de séance (Protestations socialistes.).

La séance, suspendue à dix heures quinze, est reprise à dix heures vingt-cinq.

PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

Le premier argument invoqué par notre collègue Sandrier était pour le moins étrange et pourrait être retourné aux membres de tout groupe minoritaire. Doivent-ils s'abstenir de déposer des propositions de loi sous prétexte qu'elles ne seront pas votées ? L'essence de notre fonction consiste à alerter, discuter et convaincre. Du reste, rien n'indique aujourd'hui que ce projet de loi ne sera pas voté.

Ensuite, il nous faut nous mettre en convergence avec l'Allemagne, ne serait-ce que pour renforcer la qualité de la signature de la France. Plusieurs initiatives ont été prises pour revenir à l'équilibre budgétaire et elles sont restées jusqu'à présent restées lettre morte. Nous avons donc tout intérêt à discuter de ce texte.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est saisie, en discussion commune, des amendements CF 22 de M. le président Jérôme Cahuzac, CF 11 de M. Jean-Claude Sandrier, CF 23 de M. le président Jérôme Cahuzac, CF 35 du rapporteur général et CF 1 de M. Charles de Courson.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

L'amendement CF 22 revient sur le monopole fiscal des lois de finances et de financement. La circulaire du Premier ministre est respectée et elle suffit. Il est inutile de lui donner un statut constitutionnel.

Je propose ensuite un amendement de repli, le CF 23, consistant à faire valider en loi de finances ou de financement les mesures fiscales votées dans un projet de loi. Voter, comme l'envisage le Gouvernement, des lois ordinaires amputées de leur volet fiscal n'aurait pas de sens. Les mesures adoptées seraient privées de toute portée avant le passage en loi de finances, qui conduirait à recommencer le débat. C'est dire que les travaux du Parlement ne gagneraient pas en lisibilité ! Mon amendement permet de continuer à adopter des dispositions fiscales lors de l'examen des textes, tout en conditionnant leur entrée en vigueur à à une disposition de loi de finances. En pratique, très rares sont les amendements parlementaires ou les propositions de loi comportant des dispositions fiscales qui entraînent une aggravation des déficits. Dès lors, le monopole fiscal qui les condamnerait à l'irrecevabilité au titre du contrôle du domaine exclusif des lois de finances ne garantirait en rien l'équilibre des finances publiques. En revanche, il désorganiserait nos débats et compromettrait la crédibilité de nos votes.

PermalienPhoto de Charles de Courson

L'enjeu de ces amendements est le droit d'initiative parlementaire en matière de recettes. La solution maximaliste du Gouvernement n'est pas raisonnable. L'amendement du rapporteur général, qui consiste à partager le monopole en créant une catégorie de loi ordinaire – la loi de prélèvements obligatoires –, permettrait les propositions de loi à composante financière. Ce mécanisme conciliant à la fois le droit d'initiative parlementaire et l'objectif de maîtrise des finances publiques me paraît préférable à celui que propose notre président, car certains, soucieux de leur popularité, pourraient être tentés de faire voter des mesures irresponsables puis de dénoncer le refus de la Commission des finances de les faire entrer en vigueur.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je comprends cet argument, mais le Parlement est un tout. En outre, mon amendement ne concerne pas que les propositions de loi ou les amendements parlementaires : il vaut aussi pour les projets de loi. Quelle cohérence auraient-ils si les moyens correspondants étaient renvoyés à l'adoption d'une loi de finances ultérieure ?

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le sujet est important. Notre code général des impôts est devenu colossal. Ces dernières années, pour échapper à la contrainte des enveloppes de dépenses, un certain nombre de dotations se sont transformées en incitations fiscales : s'agissant de l'accession sociale à la propriété, du logement social locatif outre-mer par exemple. En rejetant sur le Gouvernement la responsabilité de ce phénomène pervers, notre président n'a que partiellement raison. Les initiatives parlementaires étaient sans doute plus limitées, mais leur multiplication pose problème. Nous devons remettre de l'ordre.

La solution du Gouvernement me semble intégriste. Les textes d'accueil des amendements ne pouvant être que des lois de finances ou de financement – qui sont le monopole de l'exécutif – les parlementaires seraient privés de la faculté de faire la moindre proposition de loi comportant des éléments de recettes. Ils seraient soumis au bon vouloir du Gouvernement. D'autre part, je partage le point de vue de Charles de Courson sur la solution de notre président : elle placerait notre commission dans une position impossible.

Je propose donc d'étendre le monopole à des lois ordinaires, du type « Mesures d'urgence à caractère fiscal » ou « Diverses dispositions d'ordre fiscal », qui portent sur des recettes. Sur un plan pratique, si un de nos collègues dépose une proposition de loi sur un sujet particulier, il la dédoublera : une proposition de loi portera sur les aspects non financiers ; l'autre sur les recettes, et cette dernière sera soumise à la Commission des finances. On ménage donc et le droit d'initiative parlementaire, et la cohérence.

L'intérêt de mon amendement CF 35, c'est qu'il vaut aussi pour l'exécutif. La loi sur le tourisme, par exemple, aurait été scindée entre les aspects propres à ce secteur, et les aspects fiscaux – baisse de la TVA – dont la Commission des finances aurait été saisie.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Mon amendement CF 1 précise que le monopole inclut bien la dépense fiscale.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il est satisfait : l'article 34 de la Constitution préciserait que les lois de finances ou de financement et les lois de prélèvements obligatoires fixeraient l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement de l'impôt, ce qui inclut les dépenses fiscales.

PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je me rallie à l'amendement du rapporteur général car le passage obligé en Commission des finances serait un gage de sérieux, tandis que les textes thématiques peuvent être l'occasion de toutes les dérives. Il faut cesser de parler de monopole car le droit d'amendement subsiste. Et nous garderions le droit d'initiative avec ces lois spécifiques. L'état des finances publiques nous oblige à nous imposer un cadre particulier pour mettre en balance recettes et dépenses.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

Toute loi constitutionnelle est soumise au fond à la Commission des lois. Alors pourquoi les dispositions fiscales ne seraient-elles pas soumises à la Commission des finances ?

PermalienPhoto de François Goulard

Je me rallie aux arguments du rapporteur général. Il serait difficile de revenir, dans le cadre des lois de finances, sur des baisses d'impôt déjà votées par ailleurs – d'autant plus qu'elles sont généralement appliquées par les services fiscaux avant que le Parlement se prononce. La solution imaginée concilie les différents impératifs : la Commission des finances sera le lieu où la protection des finances publiques sera prise en considération.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Un fonctionnaire qui applique des dispositions non votées, cela s'appelle un concussionnaire aux termes de la loi de 1795, toujours en vigueur.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Dans l'organisation de la discussion des niches parlementaires, il faudrait penser à tenir compte de ce dédoublement des propositions de loi.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ce n'est pas un réel problème. Tout se fera dans le cadre du même débat puisque le projet de loi de prélèvements obligatoires et le projet de loi sectorielle pourront être mis en discussion commune.

L'amendement CF 1 ayant été retiré, la Commission rejette successivement les amendements CF 22, CF 11, CF 23, puis elle adopte l'amendement CF 35.

La Commission examine en discussion commune les amendements CF 20 de M. Pierre-Alain Muet, CF 10 et CF 12 de M. Jean-Claude Sandrier et CF 6 de M. Daniel Garrigue.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Les dérives budgétaires et autres cadeaux fiscaux ne sont pas le fruit des amendements parlementaires mais l'oeuvre des gouvernements. C'est pourquoi notre groupe considère l'article 1er comme sans objet.

Par l'amendement CF 20, nous proposons de supprimer au moins les cinquième, septième et huitième alinéas, qui visent à introduire dans la Constitution une nouvelle catégorie de loi, supralégislative, les « lois-cadres d'équilibre des finances publiques ».

Chacun sait très bien que la réduction des déficits n'est pas tant affaire de textes que de volonté politique.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Défavorable. Les alinéas visés donnent aux lois-cadres d'équilibre des finances publiques, dont une loi organique précisera le contenu, une primauté juridique sur les lois de finances et de financement annuelles – ce qui n'avait pas été fait dans la révision constitutionnelle de 2008 instaurant les lois de programmation des finances publiques.

Les autres pays européens connaissent la même évolution, parfois sous une forme plus radicale, comme en Allemagne : à l'horizon 2016, le déficit de l'État fédéral ne devra pas excéder 0,35 % ; à l'horizon 2020, il en sera de même pour les Länder.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Ces alinéas posent la question du pouvoir du Conseil constitutionnel, qui pourra annuler tout ou partie d'une loi de finances ou de financement de la sécurité sociale qui ne serait pas conforme aux lois-cadres. En revanche, les lois-cadres influeront-elles sur des dispositions de loi ordinaires qui ne seraient pas compatibles avec elles ou le contrôle ne visera-t-il qu'à s'assurer de la conformité des lois de finances et de financement avec les lois-cadres ?

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Le Conseil constitutionnel pourra, certes, invalider les lois de finances initiales. Mais qu'en sera-t-il des lois de règlement – qui sont les seules à constater les dérapages ? Si le Conseil constitutionnel ne peut pas les annuler, cela confirmera que la maîtrise des déficits n'est pas une question de contrainte juridique mais de volonté politique.

PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Monsieur le rapporteur général, l'idée que le Conseil constitutionnel devienne l'autorité budgétaire suprême vous satisfait-elle ? Cela me semble une grave régression de la démocratie. Du reste, les déficits publics sont inversement proportionnels au nombre de lois adoptées pour les juguler.

PermalienPhoto de René Couanau

Je voterai cet amendement. En effet, ou bien le projet de loi constitutionnelle est du théâtre d'ombres et il est inutile de poursuivre la discussion ; ou il ne l'est pas et, dans ce cas, nous commettons une grave imprudence à l'encontre des gouvernements actuel et futurs et du Parlement. Ce qui fait la force de l'exécutif, c'est sa réactivité : or, le texte l'enfermera dans des contraintes empêchant les adaptations nécessaires. Les années précédentes ont pourtant montré combien l'exécutif devait pouvoir s'adapter aux événements.

Nous subissons déjà de lourdes contraintes, du fait tant de l'action des juges que de la dérive libérale de l'Union européenne. Or, ce projet de loi imposera à l'action publique une nouvelle contrainte qui videra de toute substance les débats parlementaires sur les lois de finances et de financement, et donc sur la politique sociale. Ce texte transforme profondément nos institutions : c'est pourquoi je ne le voterai pas.

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Nous sommes déjà soumis aux critères du pacte de stabilité en vue d'assurer la cohésion de la zone euro. Or, alors que la réforme de ce pacte a prévu d'instaurer une certaine souplesse, celle-ci fait défaut à ce texte aussi idéologique que dangereux.

L'empilement absurde des dispositifs – lois de programmation des finances publiques, lois-cadres d'équilibre des finances publiques, semestre européen – fera du Parlement la proie permanente du Conseil constitutionnel.

PermalienPhoto de François Goulard

Si je suis favorable à cette nouvelle contrainte – car c'en est une –, la question de sa mise en oeuvre n'est est pas moins posée, s'agissant des décisions du Conseil constitutionnel. Supposons qu'une loi de finances prévoie des recettes grossièrement surévaluées après que le Gouvernement aura fait adopter une loi-cadre très stricte : le Conseil constitutionnel se sentira-t-il le droit de l'annuler comme non conforme à la loi-cadre ? Il ne pourrait dire le droit en pareil cas, qu'après avoir porté une appréciation d'ordre économique et budgétaire. Le projet de loi constitutionnelle implique une réforme de l'organisation de nos institutions permettant au Conseil constitutionnel de s'appuyer sur une expertise qui lui fait défaut aujourd'hui.

PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

La contrainte de voter des budgets en équilibre existe déjà pour les collectivités territoriales. C'est une règle ancestrale que personne n'a jamais trouvée choquante.

PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

On ne gère pas l'État comme une commune !

PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

La Cour des comptes contrôle également chaque année l'exécution des dépenses. Ce projet est donc conforme au principe républicain de l'équilibre budgétaire.

PermalienPhoto de Yves Censi

Ce débat concerne plutôt l'examen, à venir, de la loi organique.

Le Conseil constitutionnel n'aura pas à porter une appréciation d'ordre économique et financier…

PermalienPhoto de Yves Censi

Il s'agit là de droit. Voyez ce qui se passe en Allemagne : le débat sur le bien-fondé des choix économiques et la sincérité des recettes sera dissocié de celui qui, en amont, portera sur la conformité du projet de loi de finances à la loi organique.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Le principe de sincérité, cher collègue Goulard, est déjà inscrit dans la loi organique. Or, le Conseil constitutionnel n'a encore jamais annulé tout ou partie d'une loi de finances pour insincérité. Il s'est contenté de soulever, dans des cas de saisine, la question des recettes surévaluées.

Pour ce qui nous concerne ici, le Conseil constitutionnel ne pourra que constater une donnée objective, à savoir l'écart existant, en termes de dépenses comme de recettes, entre les lois-cadres et les lois de finances ou de financement.

L'organe qui contrôle la sincérité des budgets des collectivités territoriales, c'est le préfet. Celui-ci peut, après avis de la chambre régionale des comptes, renvoyer le budget pour insincérité, ce que n'a encore jamais fait, je le répète, le Conseil constitutionnel pour le budget de l'État. Le fera-t-il ? Je n'en sais rien.

PermalienPhoto de Michel Vergnier

Ce texte exprime de la défiance vis-à-vis du Parlement. Qui veut-on censurer ou qui veut-on protéger ? La contrainte qu'il tend à instaurer n'est pas acceptable.

PermalienPhoto de René Couanau

On ne saurait comparer le budget de la nation avec celui des collectivités locales, d'autant que ce texte n'est pas d'ordre comptable, mais politique, économique et social. Un budget est un instrument politique : il reflète les choix d'un gouvernement, soutenu par une majorité, ce qui dépasse largement la seule question de l'équilibre des finances publiques. Leur déséquilibre est parfois justifié. Ne nous trompons pas de débat !

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Si, dans le cadre du semestre européen, l'Union européenne s'entend pour relancer les politiques budgétaires, que deviendra la loi-cadre d'équilibre des finances publiques ?

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

La sincérité est déjà une disposition de nature organique, mais le Conseil constitutionnel, n'ayant pas les moyens d'apprécier les dispositions qui lui sont soumises, n'a jamais censuré un budget pour ce motif. Or, voici qu'à moyens identiques, il devra, en plus, se prononcer sur la conformité de la loi de finances avec la loi-cadre !

Soyons sérieux : quel Gouvernement prendra le risque de faire adopter, par sa majorité, une loi de finances en contradiction avec la loi pluriannuelle examinée quelques semaines auparavant ? Le projet de loi constitutionnelle heurte le bon sens.

PermalienPhoto de Georges Ginesta

Ce texte est-il nécessaire alors même qu'un trop grand nombre de contraintes pèsent déjà sur nous ? Nous nous conduisons comme des mineurs, qui aspirent à une nouvelle tutelle !

PermalienPhoto de Georges Ginesta

Nous finirons par être amputés à la fois de notre autorité et de notre responsabilité, comme si nous n'étions pas capables de faire notre travail.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je tiens à répéter ma question : que se passera-t-il si une loi de règlement n'est pas conforme à une loi-cadre ?

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il convient de distinguer la prévision de l'exécution. En matière de prévision des recettes, l'article 32 de la loi organique a déjà introduit la notion de sincérité. Il convient maintenant de permettre en outre au Conseil constitutionnel de s'assurer de la cohérence de la loi de finances avec la loi-cadre, s'agissant non pas des recettes existantes, qui sont soumises aux aléas économiques, mais des mesures nouvelles, qui ne doivent pas contrevenir à la loi-cadre. L'hypothèse d'une censure est d'autant plus limitée que les lois-cadres pourront être révisées dans les mêmes conditions que les lois de finances, ce qui laisse de la souplesse à l'exécutif en cas de crise économique ou de changement de majorité. Le texte n'instaure donc pas un système rigide à l'allemande.

S'agissant de l'exécution, la loi organique devra prévoir les modalités de mesure et de correction des écarts. Ceux-ci pourront être corrigés par la modification de la loi-cadre, sur le modèle de ce que le Parlement a fait durant des années pour l'ONDAM. On pourra compenser l'augmentation des dépenses soit par une augmentation des recettes, soit par une diminution des dépenses d'une autre mission, ce qui suppose, pour garder la trajectoire, une certaine fongibilité des mesures à adopter en termes de recettes et de dépenses. Nous devons explicitement inscrire dans le projet de loi constitutionnelle l'obligation pour la loi organique de préciser les modalités selon lesquelles les écarts devront être corrigés. En cas de crise, comme en 2008, la révision de la loi-cadre permettra au Gouvernement de réagir.

M. Censi a eu raison de rappeler que le contrôle du Conseil constitutionnel sera d'ordre juridique et ne portera pas sur la sincérité macro-économique des prévisions de recettes – comment prévoir deux ans à l'avance un taux de croissance au dixième de point près ? En revanche, une loi de finances pourrait être censurée si elle prévoyait des mesures nouvelles en recettes ou des plafonds de dépenses contraires aux dispositions de la loi-cadre.

Monsieur Ginesta, si nous devons compléter la réforme constitutionnelle de 2008, c'est que nous nous trouvons confrontés à un besoin de financement particulièrement important – entre 200 et 250 milliards d'euros par an. Tous les pays européens, indépendamment de considérations liées à la stabilité de la zone euro, se sont dotés de garde-fous leur permettant de résorber progressivement leur endettement. Il s'agit de règles de sagesse pragmatiques, qui ne visent pas à nous enserrer dans des contraintes supplémentaires. Donnons-nous les moyens de maintenir, sauf circonstances exceptionnelles, la trajectoire que nous nous sommes fixée.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Si je comprends bien, la contrainte macro-économique et budgétaire est devenue telle qu'il faut suspendre les activités parlementaires et démocratiques normales, toute loi ayant des incidences financières. Nous assistons au basculement vers un autre système politique que la démocratie parlementaire.

PermalienPhoto de Georges Ginesta

Devons-nous réclamer une tutelle pour nous contraindre à prendre des mesures de bon sens ? Ne sommes-nous pas suffisamment responsables ?

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

À mes yeux, ceux qui espèrent, grâce à ces dispositions, atteindre chaque année un équilibre budgétaire durable se font des illusions. Comme l'a rappelé le rapporteur général, les lois de finances suivront de quelques semaines, voire de quelques jours, les lois-cadres. De plus, le Conseil constitutionnel n'a jamais censuré une loi de finances pour insincérité.

Faut-il craindre que le Parlement soit amputé, dans les faits, de ses prérogatives ? Certes, l'objectif de ceux qui ont imaginé ces dispositions, à savoir les experts de la commission Camdessus, était d'exprimer une véritable défiance vis-à-vis du Parlement. Mais celui-ci a les moyens de jouer son rôle : il lui suffit de le décider collectivement.

PermalienPhoto de Yves Censi

Il est inadmissible d'affirmer que les dispositions du texte reprennent les propositions des experts.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

C'est un fait : la commission Camdessus était composée de quatre parlementaires et d'une quinzaine d'experts et de directeurs d'administrations centrales. Je vous renvoie au compte rendu de ses travaux.

PermalienPhoto de Yves Censi

Tout projet de loi est précédé, en commission, d'auditions d'experts. Lorsque leurs propositions sont reprises dans un texte et que celui-ci passe devant l'Assemblée nationale, il s'agit d'autre chose.

Le présent texte est, en matière de rigueur budgétaire, un signal fort adressé par la France, à la suite de l'Allemagne, à nos partenaires européens. Le fait, pour le Parlement, de se fixer une contrainte, passible de la censure du Conseil constitutionnel, n'est pas contraire à sa liberté.

Je suis convaincu que les pays de la zone euro et, plus largement, de l'Union européenne, qui sauront faire preuve de rigueur budgétaire, seront les plus puissants.

PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Tout à fait. Beaucoup de choses ont changé depuis que la crise de la dette publique est devenue un enjeu mondial. Tous, nous avons pesté contre les agences de notation qui dégradent la dette des pays dont ils augmentent le niveau de spread exigé par les prêteurs. La France, comme les autres pays, est aux mains des investisseurs qui peuvent, dans une démarche concertée, augmenter subitement son niveau de spread s'ils n'ont pas le sentiment qu'elle s'engage dans la maîtrise de son endettement. C'est vrai, ils n'ont plus confiance dans la seule démarche budgétaire pour atteindre cet objectif. Ce texte adresse donc un signe très fort aux marchés. On peut évidemment les mépriser, mais on peut également faire preuve de sérieux en se rappelant que cinquante points supplémentaires de spread se traduisent par 5 milliards de coût budgétaire supplémentaire.

Ce texte nous permettra de continuer de bénéficier de la confiance des marchés car il valide la démarche française de maîtrise des déficits. La France est aujourd'hui soutenue par les marchés parce que ce sont eux qui, pour l'essentiel, financent la dette publique. Si nous nous trouvions dans la situation de la Grèce, de l'Espagne ou de l'Irlande, dont le niveau de spread est très élevé, nous aurions à résoudre des problèmes budgétaires encore plus graves.

PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Vouloir opposer la rationalité des marchés à l'irresponsabilité des parlementaires, c'est indécent ! Heureusement que, dans les tous les pays occidentaux, il y a eu des parlements pour venir au secours de financiers irresponsables !

PermalienPhoto de René Couanau

Nous sommes au coeur de la question ! Monsieur Chartier, je ne partage pas vos priorités. Il ne nous appartient pas de donner des gages aux marchés en abaissant les parlements. Que le Gouvernement prenne sa responsabilité dans la gestion des finances publiques sans écorner les prérogatives du Parlement.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur Emmanuelli, quel est l'endettement du département des Landes ?

PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Il est très faible, sans que le conseil général ait eu besoin de recourir à tous vos mistigris !

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Mais cela prouve que l'on ne peut pas traiter cette affaire de la même manière à Paris et à Mont-de-Marsan.

La Commission rejette l'amendement CF 20.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CF 10 et CF 12 de M. Jean-Claude Sandrier, ainsi que l'amendement CF 6 de M. Daniel Garrigue.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CF 24 de M. Jérôme Cahuzac, CF 2 de M. Charles de Courson et CF 36 du rapporteur général.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Mon amendement précise la durée dans laquelle s'inscriront les prochaines lois-cadres d'équilibre des finances publiques. La logique veut qu'elles ne puissent s'exercer que dans la limite de la durée de la législature, de façon à respecter les éventuels changements de majorité.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Le programme de stabilité transmis par la France aux autorités de l'Union européenne devant couvrir une période de quatre années, je propose de mettre en cohérence la durée des lois-cadres avec celle du programme de stabilité. Du reste, celui-ci sera soumis en premier au Parlement, la loi-cadre venant ensuite et les lois de finances en dernier.

De plus, la loi-cadre devra être révisée chaque année.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

L'amendement de M. de Courson pose un problème d'articulation avec le programme de stabilité. Dans le cadre de l'examen de la loi de programmation pluriannuelle, nous avons obtenu que le programme de stabilité fasse l'objet d'un débat et d'un vote au Parlement avant sa transmission aux autorités européennes. Dans le cadre du semestre européen, cette exigence est renforcée. Pour éviter que les lois de finances annuelles ne soient cadrées par le programme de stabilité et non par la loi-cadre votée par le Parlement, il faut instaurer une certaine cohérence entre les deux. Du reste, le président de la Commission présentera un amendement exigeant que tout projet de loi d'actualisation de la loi-cadre soit déposé en même temps que le programme de stabilité.

En revanche, M. Cahuzac propose l'obligation de réviser, chaque année, la loi-cadre : à mes yeux, il n'est pas opportun d'inscrire une telle obligation dans la Constitution, pour se garder la possibilité de ne réviser la loi-cadre que lorsqu'il n'est pas possible de faire autrement. Si les écarts qui se sont produits dans l'exécution peuvent être corrigés sans remettre en cause la loi-cadre, pourquoi la réviser systématiquement ? Cela risque de la décrédibiliser. Il faut distinguer entre l'obligation de réviser chaque année les dispositions de la loi-cadre qui s'imposent aux lois financières, et son actualisation pour tenir compte de l'impact de la conjoncture sur la trajectoire et pour maintenir une programmation sur quatre ans. Cette question de l'actualisation pourra être réglée par la loi organique.

C'est pourquoi mon amendement fixe une durée minimale de trois ans pour les lois-cadres. Je suis prêt à le rectifier en portant cette durée à quatre ans, voire à le fusionner avec celui du président de la Commission, si celui-ci abandonne la mesure prévoyant une révision annuelle. Les quatre ans sont en effet un élément de cohérence important avec le programme de stabilité.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

L'amendement de M. de Courson propose de se caler sur une législature, tandis celui du président retient une durée de quatre ans, soit celle du programme de stabilité transmis aux autorités communautaires. Il convient de choisir entre les deux impératifs, l'un de nature nationale, l'autre européenne.

Par ailleurs, l'idée d'une révision annuelle est contraire au principe même d'une loi-cadre. Celle-ci perdrait une partie de sa force.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Nous paraissons tout d'accord sur la nécessité d'aligner la durée de validité de la loi-cadre avec celle du programme de stabilité.

Quant au principe d'une révision annuelle, je remarque d'abord que la possibilité existe déjà d'examiner chaque année une loi pluriannuelle de financement. Je propose donc de parler d'un « examen » annuel de la loi-cadre, et non de « révision » : nous aurions alors toute liberté de confirmer les dispositions adoptées l'année précédente. Mais un tel examen me paraît nécessaire. Faisons preuve d'humilité : nous ne sommes pas capables de prévoir, un ou deux ans à l'avance, quelle sera la future situation économique, sociale ou internationale. Cet amendement me paraît donc constituer une précaution minimale.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je suis favorable à l'adoption d'une durée de quatre ans, et je suis prêt à rectifier mon amendement en ce sens. Mais les mots : « chaque année » me gênent. Nous devons pouvoir chaque année allonger d'un exercice la loi-cadre, sans pour autant être obligés de réviser les dispositions relatives aux exercices précédents.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Chaque année, nous transmettons à Bruxelles un nouveau programme de stabilité qui, le cas échéant, confirme le programme transmis l'année précédente. Pourquoi n'en ferions-nous pas autant avec la loi-cadre, alors même que nous sommes d'accord pour que les deux documents aient la même durée de validité ? Je le répète, examiner ne signifie pas réviser : on peut se contenter de confirmer l'existant.

Si on estime qu'un examen annuel de la loi-cadre en affaiblirait la valeur contraignante, il faut tenir le même raisonnement au sujet du programme de stabilité.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Les deux exercices ne sont pas de même nature. Chaque nouveau programme de stabilité peut comporter quelques modifications par rapport à celui de l'année précédente, mais en ce qui concerne la loi-cadre, il convient de lui conférer un minimum de permanence. Je suis donc défavorable à l'amendement CF 24. En revanche, l'harmonisation des durées de validité est un point important. Je rectifie donc mon amendement CF 36 en remplaçant « au moins trois années » par « quatre années ».

L'amendement CF 2 est retiré.

La Commission rejette l'amendement CF 24.

Puis elle adopte l'amendement CF 36 ainsi rectifié.

Elle examine ensuite l'amendement CF 37 du rapporteur général.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Outre les normes d'évolution et les orientations pluriannuelles, les lois-cadres doivent pouvoir déterminer les règles de gestion des finances publiques telles que l'interdiction faite aux opérateurs d'emprunter à plus d'un an, ou la règle de gage des dépenses fiscales.

La Commission adopte l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement CF 3 de M. Charles de Courson.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Il s'agit de préciser la notion d'équilibre des finances publiques en parlant d'équilibre « de fonctionnement ». Il n'est pas illégitime de s'endetter pour financer des investissements de long terme. C'est d'ailleurs ce qui se pratique dans les entreprises et dans les collectivités territoriales.

La portée d'un tel amendement serait d'ailleurs nulle en ce qui concerne les lois de financement de la sécurité sociale, qui par définition ne comportent pas de dépenses d'investissement. Il ne concernerait que les dépenses d'investissement du budget de l'État, soit 20 milliards d'euros sur un total de 380 milliards. Ce sont en effet les collectivités locales qui assurent aujourd'hui le plus gros de l'investissement public.

L'équilibre des finances publiques ne doit pas s'entendre comme une obligation d'autofinancer intégralement les maigres investissements de l'État.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nous avions eu ce débat en 2008, mais depuis, les choses ont profondément changé. Pour réduire notre endettement, nous devons aller au-delà du simple équilibre de fonctionnement, car le niveau de déficit stabilisant – c'est-à-dire celui qui permet de ne plus augmenter la dette en pourcentage du PIB – est désormais inférieur à la formation brute de capital fixe publique. Et les exemples étrangers, celui de l'Angleterre notamment, montrent que la fameuse « règle d'or » ne suffit pas à éviter une crise des finances publiques.

Il est vrai que votre idée est séduisante. Nous raisonnons en termes de déficit consolidé, mais cette notion n'a pas le même sens selon que l'on parle de l'État, de la sécurité sociale ou des collectivités territoriales. Ainsi, les comptes sociaux devraient normalement être en strict équilibre. Cela étant, les contraintes auxquelles nous sommes confrontés m'interdisent de donner un avis favorable à cet amendement.

PermalienPhoto de Charles de Courson

La norme que nous proposons revient à dire que l'État ne peut s'endetter de plus de 20 milliards d'euros par an, soit 1 % du PIB, sachant que l'investissement des collectivités territoriales ne pourrait pas dépasser 2 % et que la sécurité sociale ne pourrait pas s'endetter du tout. Compte tenu de la part d'autofinancement des collectivités locales, adopter l'amendement reviendrait donc à tolérer un déficit maximal de 2 % du PIB, ce qui correspond à l'ordre de grandeur du niveau de déficit stabilisant.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CF 38 du rapporteur général.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

M. Muet s'interrogeait tout à l'heure sur ce qu'il adviendrait si des écarts étaient constatés en exécution. Cet amendement fait obligation à la loi organique de préciser les modalités de compensation de tels écarts. La loi organique ne doit pas concerner le seul contenu des lois-cadres, mais aussi leurs conditions d'exécution. Un autre amendement étendra d'ailleurs au contrôle de leur mise en oeuvre la compétence de la Cour des comptes.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Quand les écarts seront-ils constatés ? Si c'est au moment de la loi de règlement, le rejet de cette loi – dont on ne trouve qu'un seul exemple dans notre histoire budgétaire – n'aurait pas d'autre conséquence que de différer l'inscription du déficit annuel sur le déficit global du pays.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le contrôle de l'exécution des lois de finances ou de la mise en oeuvre des lois-cadres pourrait parfaitement être exercé dans l'année.

La Commission adopte l'amendement.

Elle donne ensuite un avis favorable à l'adoption de l'article 1er ainsi modifié.

Article 2 (art. 39 de la Constitution) : Droit de priorité de l'Assemblée nationale pour l'examen des projets de loi-cadre d'équilibre des finances publiques

La Commission donne un avis favorable à l'adoption de l'article 2 sans modification.

Après l'article 2

La Commission examine l'amendement CF 25 de M. Jérôme Cahuzac.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

L'article 40 de la Constitution interdit aux parlementaires de formuler des propositions dont l'adoption aurait pour conséquence une aggravation d'une charge publique, mais les autorise à gager une diminution des ressources publiques par de nouvelles recettes fiscales, notamment en faisant jouer le montant des droits pesant sur le tabac ou l'alcool. Or, la combinaison de l'article 40 et de la règle de monopole prévue par ce projet de loi constitutionnelle priverait les parlementaires de la possibilité de faire des gages fiscaux en loi ordinaire, et ferait peser une lourde contrainte sur leur capacité d'initiative. Je propose donc, non de supprimer cet article, mais d'en modifier les règles de mise en oeuvre : la recevabilité serait, comme aujourd'hui, appréciée par le président de l'assemblée concernée, mais à la demande du Gouvernement. Ainsi, les propositions de loi ou les amendements pourraient dans tous les cas être déposés et publiés.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je suis très réservé à l'égard de cet amendement. Le dispositif actuel, qui laisse au président de la commission des finances le soin de juger la recevabilité d'une proposition, me paraît préférable. S'il appartient au Gouvernement de déclencher la procédure de vérification, je crains qu'il n'use de cette faculté à son gré, voire de manière partiale, quand bien même l'appréciation de la recevabilité resterait de la compétence du Parlement. Dans ce domaine, je fais davantage confiance à un contrôle interne au Parlement qui est gage d'impartialité.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Comme vous l'avez souligné, le juge de la recevabilité d'une proposition de loi ou d'un amendement resterait le président de l'Assemblée nationale, qui délègue ce pouvoir au président de la Commission des finances. Mon amendement n'a pour but que de préserver le droit d'initiative parlementaire sans pour autant remettre en cause le fondement de l'article 40.

Il arrive déjà que l'exécutif signale à la Commission des finances l'existence d'amendements qu'il estime irrecevables au regard de l'article 40 parce que le contenu de ces amendements le gêne. Ma proposition ne ferait qu'officialiser cette pratique. La transparence y gagnerait sans que les exigences financières posées par la Constitution y perdent quoi que ce soit.

PermalienPhoto de Jérôme Chartier

L'adoption d'un tel amendement reviendrait à encourager l'irresponsabilité des parlementaires. Ces derniers pourraient déposer des propositions de lois ou des amendements qu'ils savent contraires à l'article 40.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Vous pouvez être en désaccord avec l'amendement, mais ne lui prêtez pas des intentions qu'il n'a pas. L'application de l'article 40 resterait de la responsabilité du Parlement. Peut-être songez-vous à l'hypothèse dans laquelle le Gouvernement n'oserait invoquer l'irrecevabilité financière pour s'opposer à un amendement aggravant la dépense publique. Mais dans un tel cas, c'est le Gouvernement lui-même qui ferait preuve d'irresponsabilité.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

En tant que délégataire du pouvoir de vérifier la recevabilité au titre de l'article 40, vous êtes fréquemment amené, monsieur le président, à nous expliquer les raisons qui vous ont conduit à écarter tel ou tel amendement. L'application de cet article fait d'ailleurs l'objet d'une jurisprudence constante depuis de nombreuses années, même si un élément nouveau est intervenu, puisque depuis bientôt quatre ans, la présidence de la commission des finances revient de droit à un membre de l'opposition. Pourquoi remettre en cause l'équilibre auquel nous sommes parvenus ?

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

L'adoption de l'amendement n'affecterait pas la façon dont l'article 40 est appliqué, ni la nécessité pour le président de la Commission des finances de rendre compte de ses choix devant les parlementaires. Elle ne ferait que rendre possible le dépôt des propositions jugées par la suite irrecevables.

La Commission rejette l'amendement.

Article 3 (art. 42 de la Constitution) : Engagement de la discussion des projets de loi-cadre d'équilibre des finances publiques sur le texte du Gouvernement et absence de délai impératif entre le dépôt ou la transmission et l'examen par une assemblée

La Commission donne un avis favorable à l'adoption de l'article 3 sans modification.

Article 4 (art. 46-1 [nouveau] de la Constitution) : Renvoi des conditions de vote des projets de loi-cadre d'équilibre des finances publiques à la loi organique et possibilité pour le Gouvernement d'encadrer les délais de discussion

La Commission donne un avis favorable à l'adoption de l'article 4 sans modification.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je dois maintenant me rendre à l'Élysée, où le Président de la République va nous informer de ses choix en matière de réforme fiscale.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je vais donc lever prématurément la séance. Mais je le regrette, et cela d'autant plus que nous n'avons pas pu démarrer nos travaux à l'heure prévue, parce que les députés de la majorité n'étaient pas suffisamment nombreux. Il convient de faire preuve de respect à l'égard de l'institution.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Vous avez raison, monsieur le président, je le reconnais, mais vous conviendrez que le retard de ce matin était exceptionnel.

Information relative à la Commission