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Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Séance du 9 avril 2008 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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Le Président Didier Migaud a remercié Mme Christine Lagarde, ministre de l'Économie, de l'industrie et de l'emploi, et M. Éric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, d'avoir bien voulu participer à cette audition.

Le 28 mars dernier, la France a communiqué à la Commission européenne une notification relative aux finances publiques pour la période 2004-2007. Cette notification a été adressée à la commission des Finances dans le même temps. Ce document est rédigé essentiellement en anglais, ce qui est assez surprenant. Mais comme les chiffres, eux, n'ont pas besoin d'une traduction, il n'a pas échappé à la Commission que les résultats communiqués ne correspondaient pas tout à fait à ceux qui avaient pu être avancés auparavant. Le déficit public, tous comptes confondus – État, collectivités locales, sécurité sociale – est estimé, pour 2007, à 50,3 milliards d'euros, soit près de 8 milliards de plus qu'en 2006 ; il représente 2,7 % du PIB. La dette cumulée s'élève à 1 209,5 milliards d'euros, en augmentation de 59 milliards par rapport à 2006 ; elle représente 64,2 % du PIB.

On constate donc, entre 2006 et 2007, un dérapage du déficit public par rapport à la prévision initiale qui le situait à 2,4 % du PIB.

S'il est vrai que la croissance, à 1,9 %, n'a pas été au rendez-vous au niveau espéré, elle n'est toutefois pas éloignée de l'hypothèse basse de la fourchette que le ministère de l'économie avait fixée, soit 2 %. Dans ces conditions, comment expliquer une telle aggravation du déficit ? Quelles recettes n'ont pas réagi comme attendu ? Quelles sont les explications d'une telle détérioration ? Quelles sont, enfin, les prévisions du ministère pour l'année 2008, sachant que la loi de finances initiale retenait des hypothèses qui sont aujourd'hui quelque peu infirmées ?

Avant d'en venir à ces questions, Mme Christine Lagarde, ministre de l'Économie, de l'industrie et de l'emploi, a souhaité rectifier certaines appréciations du Président de la commission des Finances, dont elle a eu connaissance par un journal du soir puis par un courrier signé par M. Migaud, sur la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite loi TEPA. Elle s'est élevée contre un tel mode de transmission, qui n'est pas conforme à l'esprit de coopération qui a jusqu'à présent prévalu entre la Commission et le ministère de l'Économie. Ce dernier a toujours répondu avec diligence aux demandes de la Commission et lui a fourni données, commentaires et analyses. Il serait donc souhaitable d'éviter à l'avenir de tels procédés et de continuer à travailler en bonne intelligence.

L'argument, déjà soulevé par M. Pierre-Alain Muet, selon lequel la loi TEPA aurait des effets désincitatifs en matière d'emploi – les chefs d'entreprises préféreraient recourir aux heures supplémentaires plutôt que d'embaucher – est démenti par les chiffres. On n'a guère entendu les députés de l'opposition s'en féliciter, mais les créations nettes d'emplois ont atteint en 2007 leur niveau le plus élevé depuis 2000 et le taux de chômage est descendu à 7,5 %. C'est la preuve que création d'emplois et recours aux heures supplémentaires ne s'excluent nullement. Au surplus, comme le journal Les Échos le rapportait ce matin en première page, la plus récente enquête de l'UNEDIC prévoit que les embauches seront en hausse de 6,1 % en 2008 par rapport à 2007.

Quant aux heures supplémentaires, 500 000 entreprises y ont déjà eu recours. Le nombre moyen d'heures supplémentaires par salarié à temps plein déclaré par les entreprises a augmenté de 28,3 % entre le quatrième trimestre 2006 et le quatrième trimestre 2007, dont 14,4 % pour les entreprises dont la durée collective de travail est égale ou inférieure à 35 heures. Ces données factuelles, chiffrées par la Direction de l'Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques – la DARES – qui les détaillera dans quelques jours, montrent que l'effet est sensible.

Enfin, même si l'on peut convenir que ce n'est pas le cas le plus commun, il faut tout de même souligner qu'un salarié au SMIC, payé 1 000 euros nets, perçoit 180 euros nets en plus s'il effectue quatre heures supplémentaires par semaine.

Permalienéric Woerth ministre du budget

a ajouté qu'elle répondra aux questions que lui pose le Président Didier Migaud dans le courrier qu'elle a reçu ce matin. C'est l'honneur de la démocratie que d'échanger des analyses sur la base de faits vérifiés, traduisant ce qui se passe véritablement dans les entreprises. Il appartient au ministère de l'Économie, de l'industrie et de l'emploi de s'assurer que les mesures prises et les deniers publics engagés servent à quelque chose : c'est pourquoi les chiffres de la DARES et de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale – ACOSS –, ventilés par catégories d'entreprises, seront désormais communiqués chaque mois à la ministre, qui sera heureuse de les partager et de les analyser avec la commission des Finances.

Pour en venir à l'objet de cette audition, il faut d'abord souligner que l'environnement international est beaucoup plus incertain depuis l'été 2007 du fait d'une crise financière particulièrement sérieuse aux États-Unis – à tel point que l'OCDE prévoit pour ce pays une croissance de 0,1 % au premier trimestre 2008 et de 0 % au deuxième trimestre. L'envolée du prix du pétrole constitue un facteur aggravant : le cours du baril est passé de 73,80 dollars le 3 septembre 2007 à 109 dollars aujourd'hui, soit une augmentation de 43 % en sept mois. Enfin, si la parité actuelle de l'euro permet de réduire de 50 % le prix du pétrole exprimé dans notre monnaie, l'envolée de la monnaie européenne de 15 % par rapport au dollar et de 6,5 % par rapport à l'ensemble des monnaies depuis septembre 2007 représente un désavantage compétitif pour les entreprises qui doivent affronter la concurrence internationale, en particulier celles qui produisent en dollars ou en équivalents-dollars.

En résumé, les trois grandes menaces pour notre économie sont le ralentissement économique des États-Unis, qui entrent dans une situation de quasi-récession, l'envolée des cours des matières premières – non seulement le pétrole, mais aussi les denrées alimentaires, ce qui aura des conséquences dramatiques dans les pays émergents – et la surévaluation de l'euro par rapport aux fondamentaux de l'économie européenne, reconnue par le commissaire Almunia lui-même.

Compte tenu de ces facteurs, le Gouvernement a été amené à réviser la prévision de croissance pour 2008, qui est maintenant comprise dans une fourchette de 1,7 à 2 %. Cette prévision est équilibrée et cohérente avec les estimations d'un certain nombre d'analystes. Elle tient également compte des bons résultats obtenus en début d'année. À cet égard, la lecture des analyses laisse apparaître une certaine schizophrénie : d'un côté, les prévisions sont particulièrement alarmantes sur le plan financier et en ce qui concerne l'inflation ; de l'autre, les données fondamentales de la zone euro, notamment de la France sont encourageantes. Ainsi, alors que la prévision d'inflation retenue est de 2,2 % pour l'année 2008, la production industrielle française a progressé de 1,2 % en janvier, les exportations ont augmenté de 6,9 % dans la même période – ce qui ne s'était pas vu depuis 2005 – et l'emploi dans l'intérim, qui est souvent un bon indicateur du mouvement de l'économie, a connu une hausse de 4,6 %. En février, l'augmentation de la consommation des ménages a été de 1,2 %, 29 000 entreprises ont été créées et le nombre de demandeurs d'emploi a baissé de 13 700. L'indicateur du climat des affaires, qui est passé à 109 au mois de mars, est lui aussi en redressement significatif. Tous ces clignotants sont donc au vert.

Sur les marchés financiers, les facteurs d'inquiétude tiennent en particulier au manque de confiance des opérateurs dans les opérations interbancaires et aux nécessaires réajustements dans les bilans des sociétés du fait de la difficulté d'appliquer aujourd'hui la fair value et le mark to market. On ne sait donc pas très bien si l'on a atteint un point bas, si l'on s'en approche ou si l'on en est encore loin. Certains analystes considèrent que l'intervention de la Réserve fédérale américaine pour le sauvetage de Bear Stearns constitue un tournant et démontre que, dès lors que l'on descend en dessous d'un certain seuil, la Banque fédérale ou toute autre banque centrale intervient pour sauver les établissements en grande difficulté.

S'agissant maintenant de l'année 2009, le Gouvernement table sur une croissance comprise entre 1,75 et 2,25 % du PIB, avec un point médian à 2 %. Il s'agit d'une prévision un peu volontariste par rapport au consensus de place, qui est actuellement à 1,8 %, et délibérément optimiste par rapport aux prévisions qui seront commentées par le directeur général du FMI. Celui-ci considère que, en dépit du plan de 165 milliards de dollars lancé aux États-Unis, l'économie ne repartira pas avant la fin de 2009, ce qui semble extrêmement pessimiste.

Les prévisions macroéconomiques du ministère de l'Économie ne seront rendues publiques que le 15 avril, mais il faut d'ores et déjà souligner que les réformes engagées et celles qui sont envisagées sont de nature à justifier une prévision plutôt optimiste pour 2009 et devraient permettre à la France de mieux résister en 2008 par rapport à des pays comme l'Espagne, l'Irlande, l'Italie ou même l'Allemagne.

La loi TEPA a été critiquée et le sera encore. L'important est que ses effets sur l'économie et sur l'emploi soient positifs. De nombreux économistes, y compris certains de ceux qui l'avaient critiquée en son temps, conviennent qu'elle arrive au bon moment. Alors que le plan de relance américain ne commencera à produire ses effets qu'au mois de juin 2008, la réforme adoptée en France en juillet 2007 produit déjà les siens et nous sert, d'une certaine manière, de bouclier au début de l'année 2008.

La fusion de l'ANPE et des ASSEDIC, lancée au début de cette année, devrait permettre au marché de l'emploi, qui se porte bien, de se porter mieux encore. La plateforme unique offrira une gamme complète de services, de l'accueil du demandeur d'emploi jusqu'à sa prise en charge en passant par son indemnisation. Il faut espérer que le processus qui est en train de s'engager permettra de résorber les 500 000 offres d'emploi non pourvues sur le marché du travail français.

La transposition dans la loi de l'accord signé le 11 janvier 2008 par les partenaires sociaux pour créer un mode de rupture moins conflictuel entre employeurs et salariés et mettre en oeuvre le principe de flexi-sécurité permettra également d'améliorer le marché du travail. La renégociation de la convention d'assurance chômage définira l'« offre valable d'emploi » et les conditions dans lesquelles un double refus exposera le demandeur à une diminution de son indemnisation. Il faut ajouter à cet ensemble la réforme, d'ici à la fin de 2008, du système de formation professionnelle, sur laquelle le Conseil d'orientation de l'emploi a déjà fait certaines propositions de bon augure, et enfin un soutien à l'emploi des seniors. Sur ce quatrième point, le ministère a déjà demandé à l'ANPE de mettre en place un régime spécifique d'accueil. Il faudra certainement remettre en cause la dispense de recherche d'emploi et instaurer des dispositifs associant formation, soutien et accompagnement pour ramener les seniors vers le marché du travail.

La deuxième grande réforme portera sur le marché des biens et services, dans le cadre de la loi de modernisation de l'économie. Ce texte, actuellement en examen au Conseil d'État, ne sera pas une loi fiscale puisque les dispositifs d'exonération n'excéderont pas 300 millions d'euros : il est en effet possible d'utiliser d'autres mesures que la simple dépense pour relancer la croissance. Le projet prévoit des mesures destinées aux entrepreneurs, notamment individuels, pour accompagner les 321 000 entrepreneurs de 2007 dans le développement de leur activité grâce à un régime fiscal et social simplifié. Il comporte également un chapitre important sur la concurrence au service du consommateur dans le secteur de la distribution. Un retour des marges commerciales à leur niveau antérieur au vote de la loi Galland a été évalué par le ministère : il permettrait de créer plus de 80 000 emplois. Le dispositif repose sur un triptyque : permettre la négociabilité des conditions générales de ventes, réglementer différemment l'urbanisme commercial – ce qui ne sera pas facile –, renforcer les pouvoirs de l'autorité de la concurrence pour lutter contre les abus, les ententes et les rentes.

Au total, les dispositions de ce projet devraient soutenir la croissance pour environ 0,3 % du PIB au cours des prochaines années. À cet effet favorable s'ajoute celui des mesures pour le pouvoir d'achat votées au début de 2008.

Enfin, le ministère travaille à la revue générale des prélèvements obligatoires, qui a donné lieu à de nombreux travaux de réflexion au sein des administrations. Cette réforme n'a pas pour but de modifier les taux des prélèvements obligatoires – on ne peut se le permettre – mais de rendre la structure de ces prélèvements plus favorable à la compétitivité des entreprises et moins défavorable aux revenus du travail. Elle portera sur l'impôt sur les sociétés, sur la taxe professionnelle, sur les valeurs locatives et sur la suppression de l'impôt forfaitaire annuel a minima.

En 2007, l'objectif du Gouvernement en matière de prélèvements obligatoires – 44 % du PIB – a été atteint et même dépassé, puisque le taux s'est établi à 43,5 %. De même, l'objectif de dette publique, fixé à 64,2 % du PIB, a été exactement respecté en 2007.

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

, a souhaité revenir sur l'évolution des finances publiques et sur la stratégie du Gouvernement pour parvenir à leur équilibre. Il n'y a pas de contradiction entre la recherche de la croissance et l'assainissement des finances publiques mais au contraire une parfaite adéquation. Un euro mieux dépensé par la puissance publique, c'est un euro plus rentable pour les Français et plus efficace pour la croissance, c'est une marge de manoeuvre retrouvée. Il faut le répéter : lorsqu'un État est affaibli par ses déficits et ses dettes, ce sont les plus vulnérables qui en souffrent, ceux qui ont le plus besoin de la protection publique.

Le déficit public pour 2007 s'établit à 2,7 points de PIB – 50,6 milliards d'euros – contre une prévision de 2,4 points. Cet écart de 0,3 point s'explique par :

– une dégradation inattendue, de l'ordre de 0,2 point, du besoin de financement des collectivités locales, due à un fort accroissement de leurs dépenses ;

– des retraitements comptables sur les recettes pour environ 0,1 point. Ces retraitements portent sur des recettes effectivement encaissées par le budget de l'État, mais qui ne sont pas prises en compte pour la réduction du déficit maastrichtien. En 2007, ils concernent en particulier la COFACE. Cette société, qui gère les garanties publiques destinées à soutenir les exportations françaises, verse annuellement des recettes à l'État au titre de cette activité. Or environ la moitié de ses versements de 2007 n'ont pas été pris en compte en comptabilité nationale, en raison d'une modification du traitement opéré par l'INSEE. Il s'agit donc de recettes effectivement encaissées, mais comptabilisées dans la comptabilité budgétaire seulement.

Par ailleurs, deux effets de moindre ampleur se compensent :

– une amélioration du déficit du régime général de sécurité sociale – 9,4 milliards d'euros contre 11,7 milliards prévus –, due à des rentrées de CSG et de cotisations supérieures aux prévisions et à la bonne tenue de la dépense. Cela prouve que le plan d'alerte décidé en juillet dernier par le Gouvernement a produit ses effets, même s'il reste évidemment beaucoup à faire.

– des moins-values fiscales, notamment sur l'impôt sur le revenu, dues à certains crédits d'impôts, dont la prime pour l'emploi. En revanche, la norme de dépense du budget de l'État a été tenue.

La dette publique à la fin de l'année 2007 s'établit à 64,2 % du PIB, soit exactement l'objectif du Gouvernement.

Les prélèvements obligatoires ont baissé de 43,9 points de PIB en 2006 à 43,5 points en 2007, soit significativement mieux que l'objectif du Gouvernement. Ce chiffre doit être comparé au point haut de 44,9 points de PIB atteint en 1999.

Un débat s'est amorcé sur la dégradation du besoin de financement des collectivités locales. Il convient de le clarifier autant que faire ce peut. Que l'on parle de l'évolution de 2006 à 2007 ou de l'écart entre la prévision du Gouvernement pour 2007 et ce qui a été effectivement réalisé, le constat est le même : le besoin de financement des collectivités locales est passé de 0,2 point à 0,4 point de PIB, soit un dérapage de l'ordre de 4 milliards d'euros. C'est un simple constat et non un jugement de valeur : il est donc inutile de s'énerver. Cela ne remet pas en cause le fait que l'État est le premier contributeur au déficit et à la dette publique. Et il ne s'agit en aucun cas d'accabler les élus locaux pour occulter les responsabilités des gouvernements qui se sont succédé.

La dégradation du solde des collectivités locales n'en a pas moins surpris tous les observateurs – non seulement le ministère du Budget, mais aussi Dexia. Si l'on en croit les arguments opposés au Gouvernement, elle proviendrait de l'absence de « juste compensation » de dépenses transférées particulièrement dynamiques. Cela revient d'abord à dire que l'État ne respecte pas ses obligations constitutionnelles, qu'il ne sait pas faire d'efforts lorsque la compensation octroyée s'écarte de façon importante des dépenses constatées. Cela revient ensuite à faire comme si les dépenses transférées en 2007 n'avaient pas été compensées. Cela revient enfin à faire comme si la dégradation du solde des collectivités n'était imputable qu'aux seuls départements et régions, auprès de qui des compétences ont été transférées, en faisant abstraction de la contribution des communes à ce solde.

Il convient de répondre sur chacun de ces points.

Premièrement, les transferts de compétences ont été entièrement compensés. C'est une obligation constitutionnelle dont le respect est vérifié par la commission consultative d'évaluation des charges – CCEC –, rattachée au Comité des finances locales, sous la présidence des élus locaux. Cette instance a fourni un travail considérable : en trois ans, vingt-trois réunions ont permis de valider soixante arrêtés interministériels fixant les montants de compensation pour chaque transfert, pour un total de 3,7 milliards d'euros en 2007 au titre de la loi du 13 août 2004. Son rapport d'activité 2005-2006, établi par le sénateur Fourcade, estime que la CCEC a « constaté le respect par l'État de ses obligations légales et l'exact transfert des moyens consacrés par l'État, avant la décentralisation, à la compétence transférée ». Le Gouvernement a même réalisé 158 millions d'efforts supplémentaires en accédant à la demande des élus de modifier les modalités initiales de calcul de certaines compensations.

En outre, lorsqu'il s'est avéré que les dépenses augmentaient plus vite que les ressources affectées, comme dans le cas du RMI, l'État a abondé financièrement les collectivités. Il a ainsi consenti pour la compensation du RMI un effort supplémentaire de près de 2 milliards d'euros entre 2005 et 2008, au-delà de ses obligations constitutionnelles. Pour la première fois, on constate en 2007 une baisse du nombre de bénéficiaires du RMI de 100 000, ce qui représente une diminution de la dépense de 3,2 %. C'est un signe encourageant qui traduit les premiers résultats des actions menées par le Gouvernement et par les départements en faveur de l'insertion. Si ces résultats se confirment, la couverture des dépenses de RMI par les recettes transférées sera presque parfaite.

Deuxièmement, la règle a bien évidemment continué d'être appliquée en 2007. Les nouveaux transferts intervenus au cours de cette année ont été compensés. Ils représentent 2,3 milliards d'euros supplémentaires en 2007 par rapport à 2006, portant le total des transferts opérés en application de la loi du 13 août 2004 à 3,7 milliards. Il s'agit essentiellement de transfert de personnels – 1,2 milliard –, de dépense de formation professionnelle – l'AFPA pour 500 millions – et, plus marginalement, de dépenses d'action sociale, d'investissement et de fonctionnement. Ces nouveaux transferts ont été compensés par l'affectation de 1,3 milliard d'euros de TIPP aux régions et d'environ 1 milliard d'euros de taxe spéciale sur les conventions d'assurance – TSCA – aux départements. Chacun conviendra que 2,3 milliards de transferts, de surcroît compensés, ne sauraient expliquer une dégradation de 4 milliards d'euros du solde des collectivités locales.

Troisièmement, on ne peut imputer la totalité de la dégradation des comptes aux seules collectivités qui ont été bénéficiaires des transferts de compétences. Même si l'on ne connaît pas encore le détail des comptes rendus publics par l'INSEE, il y a gros à parier que les communes et les EPCI ont aussi leur part de responsabilité dans ce déficit, alors qu'ils n'ont pas connu de transferts de compétences.

Comme le montrent les rapports Richard et Lambert, les transferts de compétences ne représentent, sur une longue période, qu'un tiers de l'accroissement des dépenses des collectivités locales. Sur 3 points de PIB d'augmentation de ces dépenses au cours des vingt-cinq dernières années – de huit à onze points entre 1980 et 2006 –, seul 1 point est imputable aux transferts de compétences. De plus, la moitié de la croissance des dépenses publiques locales sur cette période, comme l'a rappelé le rapport d'Alain Lambert, provient du couple commune-intercommunalité.

Au-delà de ce débat un peu stérile sur la compensation, il faut rappeler quelques chiffres simples.

L'État assure près de 50 % des recettes des collectivités territoriales, tant par le biais des dotations budgétaires et des prélèvements sur recettes que par celui de la prise en charge de la fiscalité : en 2007, il a versé 89 milliards d'euros aux collectivités, dont 56 milliards hors dégrèvements et hors fiscalité transférés. On ne peut donc dire qu'il se désintéresse des collectivités.

L'État est le premier contributeur local. Il prend en charge près d'un tiers de la fiscalité locale par le biais des dégrèvements et des exonérations d'impôt. S'il n'intervenait pas pour alléger la charge des contribuables les plus pauvres, les collectivités seraient évidemment obligées de financer ces dégrèvements. Rien que pour la taxe d'habitation, cette prise en charge représente un coût net pour l'État de 1,2 milliard d'euros.

L'État s'est montré plus généreux avec les collectivités territoriales que pour ses propres dépenses. Entre 2002 et 2007, l'ensemble de ses concours aux collectivités territoriales – hors fiscalité transférée et hors mesures de décentralisation – a été de 3,7 % en moyenne par an en valeur, à champ de compétences constant. Sur cette même période, ses dépenses globales ont augmenté en moyenne de 1,3 % par an en valeur.

Que s'est-il alors passé en 2007 ? Selon les premières indications disponibles, la hausse des dépenses a en fait été causée par une augmentation importante des dépenses des collectivités hors transfert de compétences. Il s'agit tout d'abord des dépenses de personnel : dans le secteur communal, la progression a été plus rapide que l'année passée, avec plus de 5 % d'accroissement. Selon les chiffres préliminaires, elle a également été très rapide dans les départements et les régions, même hors transferts de personnel. On constate également – ce qui n'est pas coutumier en année électorale – une hausse des dépenses d'investissement de plus de 11 % en 2007, hors remboursement de la dette. Ces premiers chiffres devraient être confirmés dans les prochaines semaines, lorsque sera publiée l'analyse détaillée des comptes des collectivités locales par la direction générale de la comptabilité publique et par l'INSEE.

Pour autant, le propos n'est pas de polémiquer sur les résultats de 2007 mais d'en tirer quelques leçons. Ce qui a bien fonctionné, c'est la maîtrise de la dépense lorsque l'on s'en est donné les moyens, sur l'État d'une part, sur l'assurance maladie après le comité d'alerte d'autre part. Il faut renforcer cette maîtrise et l'inscrire durablement dans le temps par une budgétisation pluriannuelle la plus juste possible. Elle devra être équitablement partagée entre tous les acteurs de la dépense publique, y compris les collectivités locales, pour que soient tenus les engagements du Gouvernement envers les Français et envers nos partenaires européens.

Quant aux perspectives pour 2008, elles se fondent sur un engagement et sur une réalité.

L'engagement est le strict respect de la dépense votée, aussi bien dans le PLF que dans le PLFSS. C'est un engagement ferme, car c'est l'un des piliers de notre politique budgétaire. L'évolution de la dépense de l'État est plus contenue que jamais – zéro volume sur une norme élargie – et l'évolution des dépenses maladie est très modérée, avec une augmentation de 2,8 % en valeur, après 4,2 % en 2007 et 3,1 % en 2006.

La réalité, c'est que l'environnement international implique une révision à la baisse de notre fourchette de croissance, entre 1,7 % et 2 %. Ce n'est évidemment pas une bonne nouvelle mais ce n'est pas non plus la catastrophe que certains se plaisent à annoncer. Quelles en sont les conséquences sur les comptes publics en 2008 ? S'il y a bien sûr une relation entre croissance et recettes publiques, il y a d'autres facteurs à prendre en compte, tout aussi importants. Le dynamisme du marché du travail par exemple : le taux de chômage est au plus bas depuis vingt-cinq ans et cette baisse soutient l'évolution de la masse salariale, et donc des cotisations sociales. De plus, certaines recettes – l'impôt sur revenu notamment – dépendent de l'année précédente, d'autres, comme la TVA, répondent à la fois à la croissance et aux prix. Enfin, comme l'a régulièrement souligné M. le Rapporteur général, le Gouvernement a été prudent quant à l'évolution des recettes fiscales dans le PLF.

Les prévisions par rapport à 2007 sont donc les suivantes :

– une légère dégradation du solde de l'État, limitée par le respect de la norme de dépense et par la disparition de la plupart des retraitements comptables défavorables de 2007 ;

– une amélioration du solde du régime général, rendue possible par la maîtrise de l'ONDAM grâce aux mesures votées en PLFSS ;

– une amélioration du solde de l'UNEDIC et du Fonds de solidarité vieillesse, grâce à la bonne tenue du marché du travail ;

– une légère amélioration de la situation des collectivités locales après la dégradation de 2007.

Au total, par rapport à 2007, le solde public s'améliorerait donc légèrement, à 2,5 points de PIB en 2008. Ce n'est pas un pari risqué, à condition que les Cassandre de tout poil n'aient pas raison et que l'Europe continentale, en particulier la France, continue à résister aux turbulences américaines comme elle l'a fait jusqu'à présent.

Certains ont accusé le Gouvernement de tailler subrepticement dans les dépenses avec la réserve de précaution. Mais cette réserve a toujours existé : elle est dans l'exposé général des motifs du projet de loi de finances !

Il a ajouté que le Gouvernement serait amené dans le cours de l'année, suivant les développements, à l'utiliser et à annuler une partie des crédits – probablement la moitié.

Pour ce qui est de sa stratégie pour 2009 et les années suivantes, le Gouvernement n'a pas changé. Il n'y a pas de « plan de rigueur » mais il reste bien sûr beaucoup à faire, et l'aide du Parlement sera nécessaire pour poursuivre une stratégie d'assainissement structurel de nos finances publiques, fondée sur les réformes porteuses de croissance et une maîtrise sans faille des dépenses publiques.

Le Gouvernement est déterminé à enclencher ce cercle vertueux. Il n'y aura pas de croissance durable sans une dépense publique plus efficace, et c'est cette croissance qui accélérera l'assainissement des finances publiques. C'est ainsi que l'on rendra du pouvoir d'achat aux Français de façon durable et que l'on dissipera le poids de la dette qui pèse sur les épaules de nos enfants.

Comment parvenir à cette maîtrise des finances publiques ?

Dès le débat d'orientation budgétaire en juillet dernier, puis dans le projet de loi de finances et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, enfin dans le programme de stabilité envoyé à la Commission européenne, le Gouvernement a toujours dit et écrit qu'il faut diviser le rythme de progression de la dépense publique par deux pour parvenir à l'équilibre des finances publiques. En euros constants, il s'agit de passer d'un rythme tendanciel d'accroissement d'un peu plus de 2 % à à peine plus de 1 %. Concrètement, cela veut dire qu'il faut trouver, par rapport à l'évolution tendancielle des dépenses, environ 10 milliards d'euros d'économies par an. Le Gouvernement s'y est engagé, et il le fait.

Un premier pas décisif a été accompli la semaine dernière lors du conseil de modernisation des politiques publiques. Il s'agit d'environ 7 milliards d'euros d'économies sur le champ de l'État à l'horizon 2011. Ces économies sont prouvées, documentées et portées au plus haut niveau de l'État. Cela n'avait tout simplement jamais été fait auparavant en France.

À elle seule, cette action ne suffira pas à rétablir l'équilibre des comptes publics, mais la révision générale des politiques publiques – RGPP – n'est pas terminée. Le conseil de modernisation se réunira à nouveau d'ici le mois de mai, comme le Président de la République l'a confirmé hier à Cahors, afin de boucler le projet. Lors de cette nouvelle phase de la RGPP, l'objectif est d'aboutir à un niveau d'économies comparable à ce qui a été annoncé vendredi dernier, pour arriver à un total de 13 à 15 milliards d'euros d'ici à 2011.

Il s'agit bien de construire, de 2009 à 2011, trois budgets respectant la norme « zéro volume ». Dans un contexte où les charges d'intérêts et les retraites des agents publics augmentent tendanciellement, cela nécessite d'aller chercher ces économies.

L'État n'est pas le seul acteur de la dépense publique. Rétablir l'équilibre du régime général de sécurité sociale est également un impératif. Si l'on ne fait rien, si l'on laisse les dépenses de maladie et de retraites évoluer sur leurs tendances naturelles, le déficit du régime général se creusera d'ici à 2011 alors qu'il est à peine revenu sous les 10 milliards d'euros. C'est bien cela qu'il faut combattre en identifiant rapidement 5 milliards d'euros d'économies par rapport à cette évolution tendancielle, notamment sur l'assurance maladie.

Les autres acteurs devront également consentir leur part d'efforts. L'amélioration du marché de l'emploi aidera notamment à réduire les dépenses de prestations chômage. Quant aux collectivités locales, selon toute vraisemblance, elles n'en resteront pas à un niveau de déficit aussi inhabituel et elles devraient, elles aussi, rétablir progressivement leurs comptes.

Si nous parvenons à faire ces efforts, nous atteindrons alors un déficit public de 2 points de PIB en 2009, compte tenu des perspectives de croissance présentées par Mme le ministre. Le déficit se trouvera ainsi amélioré de 0,5 point de PIB, ce qui est conforme aux engagements de la France vis-à-vis de ses partenaires européens. C'est aussi ce qui paraît le juste équilibre entre ce qui est souhaitable – rééquilibrer les comptes au plus vite – et ce qui est possible sans en venir à des coupes claires ou porter atteinte à la croissance.

C'est en tenant ce cap que le Gouvernement parviendra à rétablir l'équilibre de nos finances publiques. Pour lui donner toutes les chances de réussir dans la transparence et grâce à la responsabilisation de chaque acteur, il faut que cette trajectoire soit inscrite dans une loi de programmation des finances publiques pour 2009-2011 qui serait discutée avant le débat sur le projet de loi de finances pour 2009.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

, revenant sur la question des heures supplémentaires, a rappelé que le Président de la Commission et lui-même avaient écrit conjointement le 5 mars dernier à Mme le ministre afin que leur soit fourni, à partir des données de l'ACOSS, un suivi de l'évolution des heures supplémentaires par secteur. En effet, le nombre de ces dernières n'est pas sans incidences sur le budget de l'État, appelé à compenser les exonérations de charges. L'objectif était d'organiser un débat sur ce thème au sein de la Commission. Le Président ayant souhaité, avant même ce débat et sur la base d'une note interne, communiquer sur ce sujet et donner sa propre interprétation des chiffres, on comprendra que le Rapporteur général tienne, dans ces conditions, à donner la sienne, qui est exactement inverse.

Tout d'abord, la prévision de 900 millions d'heures ne pouvait être tenue : du temps était en effet nécessaire pour modifier tous les logiciels de paye et pour prendre en compte les heures supplémentaires dont une grande partie n'était pas déclarée. Toutefois, entre le mois d'octobre et le mois de janvier, le nombre d'heures supplémentaires a doublé, passant d'un peu plus de vingt millions à un peu plus de quarante millions par mois, et tous les indices montrent que cette progression se poursuit.

Ensuite, la disposition relative aux heures supplémentaires apparaît comme particulièrement appropriée puisqu'elle permet, en un moment où la croissance faiblit un peu, de distribuer du pouvoir d'achat, ce qui explique d'ailleurs que la consommation dans notre pays résiste mieux qu'ailleurs. En effet, un salarié célibataire d'une PME de moins de vingt personnes payé au SMIC a vu, depuis le 1er octobre, les heures – devenues supplémentaires – effectuées entre la trente-cinquième et la trente-neuvième heure non seulement exonérées de charges, mais également rémunérées non pas à 10, mais à 25 %, pour un gain de pouvoir d'achat de 800 euros nets annuels, soit presque un treizième mois.

Par ailleurs, la création d'heures supplémentaires n'a pas conduit à une augmentation du chômage, contrairement à ce que soutenait Pierre-Alain Muet avec d'autres, restés dans un cadre intellectuel fixiste. La disposition en question a en effet créé une dynamique, au point que la prévision de 900 millions d'heures semble pouvoir être atteinte alors qu'elle avait été envisagée en juillet 2007 à une époque où les perspectives de croissance étaient beaucoup plus favorables. Voilà donc une mesure de pouvoir d'achat typiquement contracyclique, à l'inverse de nombre d'interventions publiques qui n'arrivent qu'après la bataille.

À l'inverse de la prime pour l'emploi, qui présente le défaut structurel d'être accrochée à l'impôt et de jouer avec un an de retard, les heures supplémentaires apparaissent immédiatement sur la feuille de paye. En se transformant en mesure d'offre, elles permettront en outre de tirer pleinement parti du redémarrage de la croissance en facilitant la production. Où en serions-nous aujourd'hui si les trente-cinq heures avaient été généralisées, comme le proposaient les socialistes en juillet dernier, sinon à la poursuite de la baisse du pouvoir d'achat et des salaires et à une multiplication des goulets d'étranglement dont souffre déjà notre économie ? La mesure retenue présente donc un caractère, sinon divinatoire, du moins prémonitoire.

Pour en venir aux perspectives concernant les finances publiques, notamment au programme de stabilité, l'effort à réaliser en matière de dépenses n'a pas varié depuis deux ans. La dépense publique dans son ensemble, soit 950 milliards d'euros – 300 milliards pour l'État, plus de 200 milliards pour les collectivités locales et le reste pour les comptes sociaux –, ne doit plus progresser que de 1,1 % au-delà de l'inflation contre 2,2 % ces cinq dernières années. Si l'on prend pour hypothèse une inflation de 1,6 % dans les trois ans à venir, cela signifie que l'augmentation de la dépense publique doit passer d'un peu moins de 40 milliards par an à un peu moins de 30 milliards. Il faut donc, non pas faire des économies, mais faire en sorte que l'augmentation soit inférieure de 10 milliards à celle constatée depuis cinq ans, cela en jouant sur trois postes.

S'agissant du budget de l'État, la norme de dépense a été étendue, depuis 2008, aux prélèvements sur recettes, soit une masse non plus de 270 mais de 350 milliards. La contribution de l'État à la moindre augmentation de 10 milliards de la dépense publique, peut ainsi être évaluée, compte tenu de l'inflation, à 2 milliards, ce qui paraît tout à fait compatible avec les exercices RGPP en cours.

Les 5 à 6 milliards de marge de manoeuvre que la limitation à l'inflation de la progression du budget, prélèvement sur recettes compris, donne chaque année sont immédiatement absorbés par 1,8 milliard d'intérêt de la dette, 2,1 milliards d'augmentation des pensions et, élément nouveau, 1,6 milliard au titre de l'indexation sur l'inflation du prélèvement sur recettes afférent aux collectivités locales. Reste ensuite la masse salariale. Si l'on respecte le principe du remplacement de seulement un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, le gain en année pleine est de l'ordre de 900 millions d'euros. Or cette somme est immédiatement absorbée par la nécessaire augmentation annuelle du point d'indice, par les mesures catégorielles et par le principe d'une ristourne versée aux fonctionnaires. On n'obtient donc qu'une stabilisation de la masse salariale. Cependant, grâce aux exercices RGPP, aujourd'hui très documentés et précis – c'est par exemple le cas de l'analyse des aides aux entreprises –, on peut penser que le budget de l'État sera tenu.

De même, les chiffres de 2007 montrent que l'on est sur la bonne voie en matière de sécurité sociale, notamment d'assurance maladie.

Reste la question de la dépense locale. Dans tous les pays qui ont connu des problèmes de régulation de la dépense – en Suède, au Canada, au Royaume-Uni… –les relations entre l'État et les collectivités locales ont posé des problèmes. Il ne s'agit pas d'intenter un procès mais de constater que l'évolution des dépenses locales est plus forte que prévue. Le fait qu'il s'agisse, pour partie, de dépenses d'investissement ne les rend pas forcément saines. La multiplication de salles polyvalentes, par exemple, alimente un processus de dépenses de fonctionnement. Il n'est pas question de mettre les collectivités locales à la diète comme on va le faire pour l'État, mais de s'assurer que la dérive ne soit pas de 3, voire de 4 points au-dessus de l'inflation.

Contrairement aux autres pays, la France compte 40 000 collectivités locales, donc autant de décideurs locaux. L'article 72 de la Constitution impose la libre administration des collectivités territoriales. Le rapport d'Alain Lambert exclut, à juste titre, l'idée de normes imposées d'en haut. Compte tenu de ces éléments, comment parvenir à une certaine régulation de la dépense locale ? Il serait à cet égard très souhaitable de réunir la Conférence des finances publiques, qui a le mérite de mettre autour d'une même table l'ensemble des acteurs de la dépense publique – État, collectivités locales, organismes de sécurité sociale – et de les obliger à analyser la situation de façon lucide, sans se renvoyer constamment la balle.

S'agissant des recettes, le calibrage effectué dans les programmes de stabilité est, depuis le budget 2004, prudent : depuis cette date, l'exécution en recettes a été très supérieure aux prévisions. Le problème tient surtout à la multiplication des dépenses fiscales. De 66 milliards d'euros en 2006, celles-ci sont passées à 68 milliards en 2007 et à 73 milliards dans le PLF pour 2008. On les voit maintenant fleurir dans tous les textes. Mme Albanel propose ainsi au Parlement de voter un prêt à taux zéro pour l'achat d'oeuvres d'art contemporain, une deuxième loi de programme pour l'outre-mer est en préparation, il est question de « verdir » le crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt et le PTZ, etc. Le fait que la direction de la législation fiscale relève à la fois du ministère de l'économie et de celui du budget conduit à une situation paradoxale : le ministre du budget est responsable de l'ensemble des recettes mais chaque ministre se sent le droit de bricoler sa propre incitation fiscale, sans que le filtre joue autant qu'il le faisait auparavant. Ne faudrait-il pas, dès 2009, mettre en place une norme spécifique aux dépenses fiscales et adopter, dans la perspective d'un budget triennal, une approche pluriannuelle ? Cela permettrait, s'il y a dépassement une année, d'apporter dès l'année suivante un correctif.

En outre, la commission des Finances dans son ensemble souhaite que l'on réserve les mesures de dépense fiscale aux lois de finances ou aux lois de financement de la sécurité sociale. Le président de la section des finances du Conseil d'État est également de cet avis.

Si l'on veut tenir l'objectif de recettes, il ne faut pas trouer celles-ci de toutes parts. On observe par exemple, pour la première fois depuis au moins une dizaine d'années, que le produit de l'impôt sur le revenu de 2007 est inférieur à la prévision.

Les règles de bonne gouvernance ont connu des progrès considérables. Il convient maintenant de prévoir une programmation triennale non seulement pour les dépenses, mais aussi pour les recettes.

Le Président Didier Migaud a souhaité dire à son tour quelques mots sur le sujet évoqué par Mme le ministre, qu'il a remerciée de s'être exprimée avec franchise et courtoisie.

La loi TEPA et le « paquet fiscal » font l'objet de polémiques, notamment en ce qui concerne les heures supplémentaires. Un travail est en cours qu'il convient de poursuivre, non seulement par des réunions de la commission des Finances mais aussi par la rencontre, sur le terrain, de chefs d'entreprise et de représentants du personnel afin d'apprécier l'effectivité du dispositif.

Mme le ministre ne manque pas de s'exprimer régulièrement sur ce texte.

PermalienPhoto de Yves Censi

a objecté qu'elle le fait en son nom.

Le Président Didier Migaud a répondu qu'il s'exprime lui aussi en son nom et a demandé à M. Yves Censi de ne pas placer le débat sur le terrain de la polémique.

Mme le ministre vante donc régulièrement les vertus de la loi TEPA, dont l'efficacité serait tangible sur le terrain. Or nous sommes encore dans la phase de montée en puissance du dispositif, ce qui interdit de tirer des conclusions définitives quant à son efficacité réelle. Aussi Mme le ministre devrait-elle comprendre que l'on puisse exprimer un point de vue à partir de données officielles.

Le Président Didier Migaud a ensuite souligné que, sachant qu'il devait accorder un entretien à une journaliste et jugeant convenable que Mme le ministre soit informée de la nature des questions susceptibles d'être soulevées, il a pris la peine de faire porter son courrier mardi après-midi. Les affirmations parues dans la presse résultent d'un travail. Ce travail, le Président de la commission des Finances est en droit de le demander aux services de l'Assemblée. Ce n'est tout de même pas la première note des services de la commission des Finances ou des services de Bercy à être publiée dans la presse ! Comme le disait M. Éric Woerth, il est inutile de s'énerver.

De plus, l'analyse est fondée sur les données de base fournies par le Gouvernement en juillet dernier et sur les données de l'ACOSS et de l'INSEE. Elle ne comporte rien de contestable sur le plan de la méthode.

Il est clair, cependant, que ce n'est pas la commission des Finances qui s'exprime ici. Pas un citoyen un tant soit peu au fait de la vie politique n'imagine que son Président, issu de l'opposition, porte la parole du Gouvernement ! Une autre chose est le débat de la Commission, qui débouchera sur un rapport de la commission des Finances après – il faut l'espérer – une expertise contradictoire.

Le chiffre de 900 millions d'heures supplémentaires n'est pas inventé : c'est une évaluation avancée par Mme le ministre en juillet dernier. Le fait que, d'après certaines données, ce chiffre apparaisse comme sensiblement surévalué met surtout en relief la nécessité de disposer d'études d'impact en amont. Sur ce point, la commission des Finances est sans doute unanime. On ne peut continuer de voter des dispositions sans bénéficier d'études d'impact au préalable. La révision constitutionnelle doit être l'occasion de mettre fin à cela et de permettre au Gouvernement et au Parlement de sortir de cette culture de démission où ils se trouvent parfois plongés.

Il convient de débattre en toute transparence des questions posées : a-t-on atteint les objectifs affichés ? Le texte a-t-il accru le nombre des heures supplémentaires ? Personne ne peut avoir la naïveté de croire que la suite n'est pas affaire de débat politique !

Madame le ministre, dont le Rapporteur général vient de saluer le pouvoir de divination, s'est félicitée que la loi TEPA serve de « bouclier » face à la situation actuelle, mais tel n'était pas l'objectif assigné à ce texte. Il s'agissait plutôt d'une arme offensive destinée à créer le « choc de confiance et de croissance ». Qu'il ait maintenant des effets contracycliques, peut-être : encore faut-il le prouver !

Encore une fois, il doit être bien clair que le Président n'engage pas la majorité de la commission des Finances lorsqu'il s'exprime. Ce n'est que la conséquence de la décision de confier la présidence de la Commission à un membre de l'opposition. Cette répartition est stimulante pour tous et oblige à plus de transparence. Au-delà de leurs divergences, le Président de la commission des Finances et les ministres de l'Économie et du budget entretiennent des relations empreintes de courtoisie et de respect. C'est toute la noblesse du débat politique.

Le Président Didier Migaud a ajouté que, si Mme le ministre a pu être choquée de découvrir un courrier pourtant envoyé la veille, il avait pour sa part quelque motif de réagir avec encore plus de mauvaise humeur aux propos du secrétaire d'État chargé de l'emploi, qui a employé à plusieurs reprises dans l'après-midi le terme de malhonnêteté à son endroit. Si être malhonnête, c'est ne pas relayer la communication gouvernementale, cela fait beaucoup de gens malhonnêtes ! M. Wauquiez affirme que le dispositif est trop récent pour être évalué. Faut-il, alors, accuser de malhonnêteté ceux qui l'évaluent positivement ? On s'en gardera bien. Le débat doit s'instaurer dans la sérénité.

Pour en revenir à l'ordre du jour de cette audition, le rapporteur général de la commission des Finances du Sénat observe que la responsabilité de l'État et des collectivités locales dans la dégradation du déficit de ces dernières est partagée : il évalue à 0,2 % de PIB la part de chacun.

Pour le reste, on ne peut que souscrire à certaines propositions formulées par M. Gilles Carrez, non seulement en matière de RGPP mais aussi au sujet des relations entre l'État et les collectivités territoriales. M. le ministre devrait convenir aisément qu'il n'est pas anormal, dès lors qu'il y a transferts de compétences, que le périmètre des collectivités territoriales augmente et que celui de l'État diminue, que cela se traduise par une variation de leur poids respectif dans le budget, en pourcentage de PIB. On ne saurait s'offusquer, dans ces conditions, de l'évolution des dépenses des collectivités.

En outre, le fait de rapprocher le centre de décision politique du lieu d'expression des besoins peut être un facteur qui incite à la dépense. Plutôt que de poser à nouveau le sempiternel problème du niveau territorial qu'il faudrait supprimer, il convient d'avancer dans la clarification des compétences entre l'État et les collectivités, entre les collectivités elles-mêmes et entre les collectivités et les établissement publics locaux. Sur ce sujet, qui ouvre des perspectives de réduction de la dépense publique, l'opinion des élus locaux mûrit. Il paraît donc opportun d'aborder la question du maintien ou non de la compétence générale au niveau de chaque collectivité territoriale.

Enfin, malgré tout le talent qu'on lui connaît, comment M. Éric Woerth entend-t-il contenir le déficit des comptes publics de 2008 à 2,5 % avec une croissance estimée à 1,8 %, alors que le déficit s'est élevé à 2,7 % en 2007 pour une croissance de 1,9 % ? Par quel miracle obtiendra-t-il un déficit moindre avec une croissance moindre, même s'il existe une réserve de précaution, dont on connaît, depuis la modification de la LOLF à l'initiative d'un ministre de l'économie devenu aujourd'hui Président de la République, le montant – elle est de 7 milliards d'euros pour 2008 –, puisque des dépenses supplémentaires vont intervenir par rapport au budget voté ? À plus long terme, comment arriver à l'équilibre en 2012 dans ces conditions ?

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

a rappelé que le dispositif TEPA, qui, selon d'aucuns, coûterait plus qu'il ne rapporterait, comprend des exonérations de charges de cotisations non seulement salariales, mais également patronales, qui diffèrent selon que l'entreprise compte plus ou moins de vingt salariés.

La démonstration du Rapporteur général selon laquelle l'État doit freiner la dépense publique de 2 à 3 milliards aurait dû tenir compte des dépenses nouvelles à absorber, notamment en matière d'enseignement supérieur et de recherche. C'est pourquoi ce sont en fait 5 milliards d'économies qu'il faut identifier.

Quant aux dépenses des collectivités locales, elles doivent être régulées au moyen tant du dialogue – le Premier ministre réunira prochainement la conférence nationale des exécutifs locaux, et d'ici au mois de mai certainement, la conférence nationale des finances publiques – que de la poursuite de la maîtrise des concours de l'État. Le fait que ce dernier n'impose plus de normes qui, par principe, sont coûteuses pour les collectivités locales, est un sujet sur lequel le Premier ministre a pris des engagements et qui fait l'objet de réflexions de la part tant de la commission consultative d'évaluation des normes que de parlementaires. De même, il conviendra, toujours au titre de la maîtrise de la dépense, de trouver de nouveaux mécanismes, tel celui du bonusmalus : plutôt que de financer systématiquement l'augmentation de la dépense, peut-être convient-il d'aider les collectivités qui tentent de la maîtriser.

Il n'est pas sûr que faire entrer la dépense fiscale dans la norme générale de dépense soit une bonne idée. Mieux vaudrait une norme spécifique avec deux périmètres différents, d'autant que la Direction de la législation fiscale – DLF – et la Direction générale des impôts – DGI – coopèrent de façon quotidienne. Cette dépense fiscale est d'ailleurs si facile à décider et si indolore qu'on a envisagé, lors d'un récent séminaire organisé par le Premier ministre, de laisser à chaque ministère le soin de financer la sienne.

La loi de programmation concernera tant les dépenses que les recettes, car l'idée est bien celle d'un budget pluriannuel. Un groupe de travail réunissant des parlementaires de l'opposition et de la majorité devrait proposer des règles qui pourraient être mises en oeuvre dès les prochains PLF et PLFSS.

Pour les collectivités locales, le coût des transferts correspond au tiers de l'augmentation des dépenses, mais ce montant n'explique en rien la dégradation du solde des collectivités. Il s'agit moins en l'espèce de leur besoin de financement que du rythme de leurs dépenses.

Quant au fait qu'il puisse y avoir à la fois moins de croissance et moins de déficit, il faut d'abord comprendre que le déficit initialement prévu de 2,3 % par rapport au PIB a été corrigé en le faisant progresser de 0,2 %, compte tenu de la réalité de 2007 et de la situation économique. Ensuite, l'objectif de l'assurance maladie devrait, compte tenu des trois premiers mois de l'année, être tenu. De la même manière, on peut espérer que le solde des collectivités locales ne progressera pas au même rythme qu'auparavant. Enfin, la sous-budgétisation a été réduite au sein du budget de l'État, et les retraitements comptables devraient être moins élevés qu'en 2007.

Il existe donc des raisons solides et sérieuses de penser que le réajustement effectué est compatible avec le ralentissement de la croissance.

PermalienPhoto de Michel Bouvard

, revenant sur le dispositif TEPA, a souhaité que lorsqu'un document aussi important que la note en cause est rédigé par les services de la Commission, un débat contradictoire soit organisé, ce qui n'ôte en rien au Président de la Commission la capacité de s'exprimer librement par ailleurs. Les commissaires ont suffisamment démontré leur attachement à la culture du contrôle pour qu'on ne laisse pas croire qu'un document issu de la Commission a été validé par elle si tel n'a pas été le cas. L'occasion sera certainement offerte à l'avenir de trouver les voies et moyens d'éviter un tel débat, d'autant plus navrant que tous les parlementaires partagent l'objectif d'améliorer la qualité du contrôle.

La réunion de la conférence nationale des finances publiques, proposée par le Rapporteur général, est une nécessité. Parmi les mesures à envisager figurent, pour les collectivités locales, la spécialisation tant des compétences que de la fiscalité. Le principe de l'autonomie fiscale introduit dans la Constitution n'a pas facilité les choses en ce dernier domaine, car dès lors qu'une recette est supprimée à une collectivité, une autre doit être trouvée. Aussi la spécialisation de la fiscalité, en donnant au contribuable une meilleure lisibilité de la dépense locale, permettrait-elle également de calmer les ardeurs dépensières des élus locaux.

Pour ce qui est des mises en réserve, les annulations pourraient porter sur 50 % des réserves effectuées cette année, ce qui est conforme à la nécessité de respecter la norme de dépense fixée par le Parlement et d'ajuster les dépenses par rapport aux recettes. Le rapport de la mission d'information sur la LOLF – MILOLF – reviendra sur ce point dans quelques semaines. Il semble cependant que, sur le terrain, l'épargne de précaution soit amplifiée, certains ministères annonçant des mises en réserve n'ayant aucun rapport avec les dispositions adoptées par le Parlement, ce qui ne peut que désorganiser profondément toute exécution budgétaire normale, voire renchérir des opérations d'investissement qui se trouvent ainsi décalées. Le passage aux mises en réserve n'aurait donc pas mis fin aux errements du passé en matière d'annulations de crédits intempestives.

Il conviendrait que les rapporteurs spéciaux soient mieux associés à la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques – RGPP. Il n'est pas normal, par exemple, que le préfet de la région Île-de-France ne connaisse que le parc immobilier régional de l'État, alors que les hausses de loyer peuvent atteindre 25 à 33 % au niveau central. D'une façon générale, une vision globale serait préférable, ce qui permettrait aux rapporteurs spéciaux de vérifier la pertinence des économies proposées et d'avancer des propositions.

Les problèmes de trésorerie des organismes de sécurité sociale peuvent être un facteur de hausse de la dépense car les ressources auxquelles ils peuvent faire appel sont plus coûteuses en raison tant de la remontée des taux d'intérêt, suite à la contraction des liquidités disponibles, que du passage de certains seuils. Quels moyens seraient susceptibles de faire face à cette situation ?

Le groupe UMP soutient les orientations prises car il n'y a pas d'autre voie pour revenir à l'équilibre que celle de la réforme. À cet égard, le rapatriement de la dépense fiscale dans les lois de finances serait une heureuse initiative.

Le Président Didier Migaud a rappelé, s'agissant de la RGPP, que faute d'avoir pu trouver avec le ministre du budget une date permettant à ce dernier d'être reçu par la Commission avant le débat sur ce même thème le jeudi 17 avril dans l'hémicycle, à l'initiative du groupe UMP, il a été convenu avec M. Woerth qu'une réunion de travail aurait lieu après ce débat avec l'ensemble des rapporteurs spéciaux sur les propositions qui peuvent être formulées en ce domaine.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

a rappelé que lorsqu'il fut décidé que le Président de la commission des Finances appartiendrait à l'opposition, personne n'imaginait que ce dernier soit contraint à l'approbation des mesures prises par la majorité, et encore moins au mutisme. De même, ce n'est pas parce que les conclusions que l'on peut tirer d'une note des services de la commission des Finances paraissent désagréables à certains qu'il faut pour autant remettre en cause ces services voire la note elle-même. D'autres documents de la commission des Finances, repris par la presse, n'ont-ils pas d'ailleurs permis au Gouvernement d'éviter à l'époque certaines erreurs, notamment dans le cadre du projet pouvoir d'achat ?

Contrairement à M. Laurent Wauquiez qui a manifesté un énervement de très mauvais aloi, il convient d'examiner l'affaire avec sang-froid, même si le sujet est d'une extrême sensibilité, car c'est une promesse emblématique de la campagne présidentielle qui se trouve conditionnée par la réussite ou non d'une politique de soutien au pouvoir d'achat. Les caisses étant vides, il n'y aura en effet pas d'autres mesures en la matière. Il n'est en tout cas pas choquant de voir contester, à partir de chiffres officiels, l'efficacité de la politique suivie, car on ne peut se satisfaire d'entendre dire, même de bonne foi, que cette dernière enregistre de bons résultats dans le même temps où tout conduit à être inquiet.

Alors qu'en 1993 le rapport Mattéoli estimait le nombre des heures supplémentaires à 1,3 milliard en 1991, ce même nombre a été évalué l'année dernière à 900 millions. Cette année, ce sont 50 millions d'heures supplémentaires qui ont été estimées pour le seul mois de janvier. Sur l'ensemble de l'année 2008 cela ne conduit donc qu'à environ 700 millions d'heures supplémentaires.

Quant à la remarque du Rapporteur général soulignant que la mesure constitue un gain immédiat et non différé comme pour la prime pour l'emploi, l'avenir dira s'il valait mieux un avantage immédiat pour certains qu'un avantage, certes différé, mais bénéficiant à tous. L'alternative proposée par les socialistes ne consistait pas, en effet, à la généralisation des trente-cinq heures, mais au doublement de la prime pour l'emploi.

On ne peut nier que le pouvoir d'achat reste un problème pour les citoyens, d'autant qu'il est difficile d'imaginer comment il pourra être traité de manière satisfaisante avec une croissance qui ne s'améliore pas. Faut-il rappeler que les socialistes avaient formulé les plus extrêmes réserves sur les paramètres du budget, qu'il s'agisse de la parité entre l'euro et le dollar, du prix du baril de pétrole ou de l'inflation ? La loi de finances rectificative permettra de mettre la réalité en accord avec les faits, qui risquent d'être cruels pour le pays.

Plus généralement, on ne peut que souscrire à la déclaration de principe du ministre du Budget selon laquelle la recherche de la croissance et l'assainissement des finances publiques doivent ressortir à une seule et même démarche, sauf que la croissance manque et que l'assainissement ne risque pas d'être atteint avec un déficit public de 2,7 % pour 2007 et certainement pour 2008. De même, deux articles du PLFSS relatifs au volume de médicaments remboursables n'ont-ils pas donné les moyens à l'industrie pharmaceutique d'améliorer son chiffre d'affaires et aux dépenses pharmaceutiques d'augmenter de façon excessive par rapport à 2007 ?

Quant aux 3,5 milliards d'annulations de crédits annoncées, jamais le pays n'aura connu, si elles sont suivies d'effet, un tel montant d'annulations sèches. On ne peut qu'avoir des inquiétudes pour les administrations dans lesquelles une telle rigueur risque de s'exercer.

Les économies à réaliser entre 2009 et 2011 ne portent, une fois de plus, que sur l'année suivante ou celle d'après. Ainsi, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, mesure qui devait être d'application immédiate, ne concernera cette année qu'un fonctionnaire sur trois. Faut-il cependant comprendre, si la mesure est réellement mise en oeuvre, qu'après 11 300 postes supprimés en 2008, l'éducation nationale se verra privée de près de 20 000 postes l'an prochain ?

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

a répondu que ce chiffre était faux, mais qu'il ne pouvait donner, pour ne pas prêter à confusion, celui qui sera retenu.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

a estimé qu'en tout état de cause ce chiffre ne pourrait être inférieur à celui de cette année puisque le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, et non plus sur trois, a été annoncé. Il sera intéressant de voir les réactions des parlementaires, sur tous les bancs, lorsqu'ils constateront les dégâts ainsi provoqués. À cet égard, comment les 3,5 milliards d'euros d'économies supplémentaires pourraient-ils être réalisés autrement que par l'instauration d'un plan de rigueur, transformant la RGPP en « Rigueur Généralisée Pour la Population » ?

PermalienPhoto de Charles de Courson

a fait observer à Mme le ministre que la note des services de la Commission n'aurait jamais existé si un débat rigoureux avait été conduit sur la partie heures supplémentaires de la loi TEPA, dont l'objet est de distribuer du pouvoir d'achat aux travailleurs modestes. Un tel débat aurait permis de disposer d'une estimation sur deux ou trois ans de l'augmentation du stock d'heures supplémentaires et complémentaires, donc d'éviter toute polémique stérile en la matière.

La question de l'accroissement envisageable du stock d'heures supplémentaires sur deux ou trois ans pose d'ailleurs celles de la réforme des quotas d'heures supplémentaires et de l'assouplissement du droit du travail. Il convient en effet de desserrer les goulets d'étranglement dans les branches ou entreprises qui n'arrivent pas à recruter.

Le déficit tournant autour de 2,5 %, il ne reste que quatre ans pour respecter les engagements de la France en la matière. Il convient, dans ces conditions, d'aller plus loin pour rétablir l'état des finances. Sachant que le Gouvernement reconnaît maintenant que l'on ne peut promettre la baisse des prélèvements obligatoires avant le rétablissement des finances publiques, la première mesure à prendre, après celle de ne plus toucher aux prélèvements obligatoires – la gauche reconnaissant elle-même que l'on ne peut plus les augmenter – est donc de réduire la dépense. Contrairement à ce que l'on croit, une telle mesure n'est pas antisociale. Il faut en effet savoir que si la France était à l'équilibre budgétaire depuis cinq ou six ans, elle bénéficierait d'au moins un demi point de croissance supplémentaire.

Il convient également d'intégrer dans la norme de dépense les remboursements et dégrèvements, toutes ces fausses imputations qui constituent de véritables dépenses, ainsi que les nouvelles dépenses fiscales de l'année. Additionner des variations de dépenses fiscales d'année en année donne un résultat approximatif, mais qui permettrait au moins de constater certaines années un niveau très au-delà – d'un voire de deux points – de la norme affichée. Pourquoi ne pas profiter de la réforme constitutionnelle pour décider que les lois de finances et les lois de financement de la sécurité sociale ont l'exclusivité des mesures fiscales ou sociales en matière de CSG et de cotisations sociales ?

Finalement, la réelle inquiétude a trait à la protection sociale. La dépense hospitalière pose en effet un véritable problème à la branche maladie, car si les statistiques donnent l'illusion que la dépense est tenue, un tiers des hôpitaux sont en déficit. Pour connaître la véritable dépense de l'objectif national d'évolution des dépenses d'assurance maladie – ONDAM – il faudrait majorer ce dernier des déficits, qui s'aggravent, de l'ensemble du secteur hospitalier et des cliniques privées.

Concernant les collectivités locales, c'est une révolution intellectuelle qu'il faut opérer. Afin d'en finir avec l'irresponsabilité – sur 200 millions d'euros de dépenses des collectivités territoriales en 2008, 93 milliards représentent des transferts de l'État – il faut sanctionner les dépensiers et récompenser les bons gestionnaires, grâce à une régulation non pas de la dépense – sauf sous certaines réserves – mais de la recette. Il faut diminuer de façon drastique les transferts, réduire la CSG à due concurrence et donner la possibilité aux départements et aux régions, à prélèvements inchangés, de fixer un taux de CSG. Le fait qu'il s'agisse d'un impôt impopulaire ne pourra qu'inciter à réduire la dépense. Il convient en outre de spécialiser l'impôt et de concentrer la taxe d'habitation et le foncier bâti sur les communes. Chaque assemblée territoriale doit être responsable devant ses électeurs.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

s'est félicité que, dans le débat sur la note relative aux heures supplémentaires, personne n'ait mis en cause les fonctionnaires des services de la commission des Finances – il faut dire que cette note est fondée sur des données officielles de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale – l'ACOSS – et de l'INSEE.

Le Président Didier Migaud a souligné qu'aucune conclusion n'était tirée dans la note.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

a remarqué que le travail en question était conforme à la logique de loyauté des fonctionnaires de l'Assemblée. En tout cas, si l'on devait compter sur le seul Gouvernement, les parlementaires ne sauraient pas grand-chose.

On ne peut reprocher au Président de la commission des Finances d'avoir demandé un travail que les médias ont permis de faire connaître, alors qu'au mois de février un travail, demandé cette fois par le Rapporteur général, a été publié par le journal Les Échos sans que personne ne s'en indigne. Il s'agissait, à cette occasion, de faire l'inventaire des nouveaux impôts proposés, y compris par le Président de la République – chacun se rappellera la taxe de 2 % envisagée sur la vente du poisson.

Le débat sur les heures supplémentaires est biaisé car le Gouvernement et la majorité ne croient pas eux-mêmes à leurs mesures. En 2004, un membre du Gouvernement, M. Nicolas Sarkozy, n'a-t-il pas demandé au directeur de l'ACOSS de l'époque une note dans laquelle ce dernier a estimé difficile d'encourager le Gouvernement à aller dans la direction qu'il se donnait ? Ce qui était vrai alors l'est tout autant aujourd'hui. Et le Rapporteur général n'a-t-il pas rappelé avoir montré à Mme Lagarde dès le mois de juillet, lors du débat sur le projet TEPA, qu'elle se trompait dans ses évaluations ?

Aujourd'hui, Mme le ministre se réfère, en matière de pouvoir d'achat, aux 200 euros supplémentaires qu'un salarié au SMIC pourrait percevoir. C'est « Christine au pays des merveilles » ! Le seul critère valable en la matière, c'est ce qui reste dans le porte-monnaie après avoir fait un tour sur un marché. Tout le reste n'est que bla-bla.

Mme le ministre a parlé d'une prévision équilibrée et cohérente de croissance qui tient compte des bons résultats du début de l'année. N'oublie-t-elle pas qu'elle avait dit la même chose l'an dernier et qu'avant de ramener le taux à 1,7 %, elle avait traité à l'époque ceux qui dénonçaient son excès d'optimisme d'oiseaux de mauvais augure ?

Alors que le Rapporteur général critique les dépenses fiscales, le Gouvernement proposera dans la prochaine loi de modernisation de l'économie 300 millions d'euros de dépenses fiscales de plus. Où est la cohérence ?

On parle de réduction des marges commerciales. Va-t-on à cet effet rétablir le contrôle des prix ?

Quant aux réserves de précaution, le ministre du budget a prétendu qu'elles avaient toujours existé. Il s'agissait en fait de régulations. La logique de la LOLF est tout autre puisqu'elle a pour objet de vérifier la pertinence de la dépense publique. Les auditions réalisées en Île-de-France par la MILOLF ont été à cet égard illuminantes. En ne voulant réduire que la dépense sans agir sur les recettes et sans tenir compte des travaux de la Cour des comptes démontrant l'inutilité des réductions de cotisations sociales, le Gouvernement conduit le pays dans le mur.

Le ministre du budget a annoncé fin janvier, lors de l'émission de radio Le franc-parler, que la TVA sociale serait comme d'autres sujets de financement de protection sociale, abordé au cours du premier semestre. Quels autres sujets seront mis sur la table d'ici à la fin du mois de juin ?

Alors qu'on affirme que la loi TEPA est un succès, peut-on évaluer le coût de ses diverses dispositions pour les finances publiques en 2008 et 2009 ?

Quelles recettes supplémentaires peut-on attendre, pour la même période, de l'intensification de la lutte contre la fraude fiscale que le ministre a évoquée lors de son audition la semaine dernière à propos de la liste Liechtenstein, les transferts des 64 groupes familiaux concernés – notion certainement nouvelle en droit fiscal – représentant un milliard d'euros ?

Enfin, quelles recettes supplémentaires nettes le Gouvernement escompte-t-il en 2008 et 2009 de la fin du prétendu caractère confiscatoire de l'impôt et donc du possible retour en France de contribuables particulièrement fortunés, déduction faite des dépenses fiscales effectuées à cet effet ?

PermalienPhoto de Frédéric Lefebvre

a remercié le Président Didier Migaud d'avoir reconnu, dans l'interview accordée au Monde, le poids pris par les heures supplémentaires : le paquet fiscal n'est donc pas la caricature que le parti socialiste cherche à dénoncer.

Lors de la discussion de la loi TEPA, le Gouvernement avait été accusé de prendre le risque, en augmentant le nombre d'heures supplémentaires, de faire baisser l'emploi. Or non seulement la croissance du nombre d'heures supplémentaires n'a pas empêché l'emploi de progresser, mais la crise économique a eu dans le pays un effet moindre qu'ailleurs.

Contrairement à ce qu'affirme le parti socialiste, le paquet fiscal, et particulièrement sa partie heures supplémentaires, n'a pas eu d'effet d'aubaine.

Quant à « rendre », comme M. François Hollande le souhaite, les heures supplémentaires, le parti socialiste ira-t-il vraiment jusqu'à demander aux employés et aux ouvriers qui bénéficient du dispositif de rendre le pouvoir d'achat supplémentaire dont ils ont bénéficié ? Il serait paradoxal, alors que l'on a reproché au Gouvernement de ne pas distribuer suffisamment de pouvoir d'achat aux salariés, de demander à ces derniers, fort nombreux, de rendre ce dont ils ont bénéficié.

Concernant les gels budgétaires, il convient de rappeler à l'opposition que Jean Arthuis avait déjà, en 1996, gelé l'équivalent de 3 milliards d'euros.

Enfin, il est à remarquer que si l'État a un besoin de financement de plus 0,2 point du PIB et la sécurité sociale de moins 0,1 point, soit plus 0,1 au total, les collectivités locales – les chiffres ne mentent pas – ont, elles, un besoin de plus 0,2 point.

PermalienPhoto de Hervé Mariton

après avoir fait remarquer que l'ouverture à la presse des travaux de la Commission avait certainement conduit à l'allongement des interventions, a posé les questions suivantes :

L'engagement du retour à l'équilibre en 2012 implique de réduire le déficit grâce, pour partie, à la réduction de la dépense et, pour une autre partie, à l'évolution des recettes. À cet égard, le programme de stabilité se fonde en termes de croissance, soit sur un scénario minimum, soit sur un scénario maximum. Ne pourrait-on prendre en compte un scénario médian ?

Le PLF pour 2008 a été présenté avec une norme de « zéro volume » en termes de dépenses, à périmètre étendu. Le même périmètre sera-t-il retenu pour les budgets suivants ?

Par ailleurs, le calendrier relatif à la révision générale des prélèvements obligatoires – RGPO – peut-il être précisé ?

Enfin, les mesures concernant l'évolution des prélèvements obligatoires sont présentées, comme ce fut le cas après le Grenelle de l'environnement, comme des mesures neutres. Or le mécanisme du bonusmalus écologique a montré que le montant du malus ne contrebalançait pas forcément celui du bonus. Pour établir la courbe des prélèvements obligatoires des années qui viennent, il convient donc de parvenir à la stabilité de ces derniers.

PermalienPhoto de Yves Censi

s'est déclaré moins choqué sur le fond que sur la forme s'agissant du sujet TEPA. Si personne ne souhaite interdire à un membre de la Commission de s'exprimer, il n'empêche que l'étude dont il a été fait état a été considérée comme un document de la commission des Finances puisque le journal Le Monde parle d'une « étude parlementaire ». Or ce n'est pas une étude parlementaire et encore moins un premier bilan, et il faut regretter que le président ait été l'initiateur de cette ambiguïté volontaire. D'ailleurs si M. Didier Migaud s'était prononcé à titre personnel, cela aurait-il fait la une du quotidien ?

La France n'est pas encore une République d'experts dans laquelle une expression directe des services de la commission des Finances serait possible.

Ce procédé tout à fait contestable n'est pas correct vis-à-vis des ministres. Ce n'est pas la peine d'usurper le nom de la commission des Finances pour donner du poids à des arguments.

Le Président Didier Migaud a rappelé que tout ce qui est excessif est insignifiant. Il s'abstiendra pour sa part d'être désagréable, même si les propos tenus l'ont été particulièrement et ne correspondent pas à la réalité, mais il n'a pas de leçons à recevoir s'agissant de ses relations avec les ministres.

PermalienPhoto de Yves Censi

ayant déclaré que cela ne l'empêcherait pas d'exprimer ses opinions, le Président Didier Migaud l'a assuré qu'il se réserverait alors le droit de lui répondre.

Revenant à l'équilibre général à l'horizon 2012, M. Yves Censi a souhaité que l'objectif soit atteint sans que les missions de l'État, telles qu'elles sont définies dans la LOLF, soient réduites pour autant. Quant à l'équilibre de fonctionnement, tout aussi important, dans quel délai pourra-t-il être obtenu ?

PermalienPhoto de Jean Launay

a regretté que l'échéancier élaboré pour répondre aux attentes de la Commission européenne n'ait pas été détaillé, qu'il s'agisse des baisses d'impôt qui devaient être subordonnées à la réduction du déficit des dépenses fiscales non maîtrisées, qui affaiblissent le rendement de l'impôt sur le revenu, ou des 7 milliards d'euros de réserve de précaution dont l'annulation pure et simple même à hauteur de la moitié n'est pas réaliste.

Alors que l'orthodoxie impliquait que l'équilibre des comptes publics soit retrouvé en 2010, ce dernier est aujourd'hui repoussé à 2012 tandis que le paramètre de la dette n'est même pas pris en compte. Pour expliquer le retard, le ministre a appelé l'attention sur la forte dégradation du solde des collectivités locales. Leur part dans la dette publique totale n'est pourtant que de 11 %.

Le transfert des parcs d'équipement aux départements pour 2009 ainsi que l'abandon de l'ingénierie publique concurrentielle, annoncés dans le cadre de la RGPP, ne feront qu'accroître les transferts aux collectivités.

PermalienPhoto de Thierry Carcenac

a fait remarquer que les collectivités locales, évoquées à propos de l'équilibre de fonctionnement, effectuent plutôt, en empruntant, de l'investissement.

Quant aux transferts, si la commission consultative d'évaluation des charges a pu, à l'époque, estimer que la compensation avait eu lieu à l'euro près, il ne faut pas oublier que les dépenses transférées sont dynamiques alors que les recettes transférées ne le sont pas, qu'il s'agisse de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances – TSCA – ou de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers – TIPP.

En matière de compétences de collectivités locales, il convient que l'État assume ses responsabilités et ne demande pas aux départements de participer, comme en matière de routes nationales après la loi de 2004, à un programme de développement et de modernisation des itinéraires – PDMI – ou encore à un partenariat public-privé.

En matière de normes, l'État devrait reprendre la compétence dans le domaine des services départementaux d'incendie et de secours – SDIS – afin que les collectivités n'aient plus à les assumer.

S'agissant de l'évolution des prélèvements obligatoires, il a été annoncé que ces derniers devraient rester relativement stables. Or Mme le ministre a indiqué vouloir travailler sur l'impôt sur les sociétés, sur la taxe professionnelle ou encore sur les valeurs locatives. Dans ces conditions, si les impôts perçus par les collectivités locales sont appelés à évoluer, il ne faudra pas oublier que l'investissement des collectivités locales contribue à la croissance du pays.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

, revenant sur le sujet des heures supplémentaires, a souligné que l'on ne pouvait nier le fait que l'article paru dans la presse parlait « d'étude parlementaire ».

Le Président Didier Migaud a fait remarquer que l'on ne saurait être responsable des écrits d'un journaliste et qu'il valait mieux prendre connaissance directement de la note elle-même.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

a demandé qu'une précision sur la nature de la note soit alors apportée.

Un minimum d'élégance aurait par ailleurs voulu qu'il soit fait référence aux travaux de la mission d'information commune sur les exonérations de cotisations sociales que la commission des Finances a instituée avec la commission des Affaires culturelles.

L'accroissement de pouvoir d'achat entraîné par la loi TEPA est tout de même de plusieurs milliards d'euros par an. Si un tel montant peut être considéré par certains comme n'étant pas à la hauteur de ce qu'ils espéraient, au moins devrait-il les conduire à réviser à la baisse les 15 milliards que la loi coûte, selon eux, à l'État.

On sait par ailleurs que, pour des raisons techniques, notamment l'adaptation des logiciels de paye dans les entreprises, le dispositif heures supplémentaires ne pouvait être entièrement appliqué au cours du quatrième trimestre 2007. Aujourd'hui, il serait intéressant de savoir à quelle hauteur cette faculté a été utilisée par les entreprises et si la suppression des cotisations salariales sur les heures supplémentaires a permis un vrai gain de pouvoir d'achat.

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

a d'abord indiqué à M. Brard qu'elle avait fait référence, s'agissant des économistes qui avaient estimé que le programme de réforme engagé était de nature à préserver la France du ralentissement de la croissance, d'une part aux économistes de place, d'autre part, au FMI.

Concernant les chiffres considérés par certains commissaires comme faux, les prévisions de croissance annoncées en 2007 ne tenaient manifestement pas compte de chocs exogènes susceptibles d'intervenir. Le fait que le ministre allemand des finances, Peter Steinbrück, ait évalué les pertes liées aux subprimes à 400 milliards de dollars, tandis que Dominique Strauss-Kahn et le FMI chiffrent à 1 000 milliards de dollars le coût de la crise financière, montre combien la prévision est à cet égard un art magnifique. Il n'est pas surprenant, avec de tels écarts, que les perspectives de croissance soient révisées. Certes, l'objet du texte était d'être non pas un amortisseur, puisque la crise n'existait pas, mais un accélérateur de croissance. Si la crise conduit aujourd'hui à l'utiliser comme un amortisseur, il pourra, demain, servir d'accélérateur en permettant de prendre la risée de la croissance.

S'agissant des heures supplémentaires, qui ont un véritable effet sur la croissance, sur l'emploi et sur le pouvoir d'achat, aucune donnée réellement utilisable n'existe que ce soit au sein de l'ACOSS, de la DARES ou encore de l'INSEE. C'est ce qui explique que les éléments de comparaison soient difficiles à établir d'un mois sur l'autre. Aussi la ministre ne compte-t-elle répondre au courrier tant du président de la Commission que du Rapporteur général que lorsqu'elle aura reçu de la DARES les chiffres que cette dernière publiera dans les trois jours car ils bénéficieront d'un peu de recul dans le temps.

À supposer que le chiffre des heures supplémentaires soit le même qu'en 2006, le complément de rémunération ainsi que les exonérations de charges fiscales, sociales ou forfaitaires n'en constituent pas moins un accélérateur de croissance et un complément de pouvoir d'achat pour les salariés, même si par ailleurs la croissance est moindre que prévu.

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

a répondu à M. Michel Bouvard, à propos de la spécialisation de la fiscalité – piste souvent évoquée –, qu'il convient d'abord de savoir ce que propose Alain Lambert en la matière.

Quant aux mises en réserve, un échange peut avoir lieu entre les membres de la MILOLF et le ministère, plus précisément avec le directeur du budget.

De même, il convient d'associer les rapporteurs spéciaux à la mise en oeuvre de la RGPP. Le ministre a d'ailleurs écrit aux présidents des commissions des Finances de l'Assemblée et du Sénat pour leur indiquer qu'il était prêt à être auditionné sur ce point autant qu'ils le souhaiteraient. L'exécutif prend à cette occasion toutes ses responsabilités, en particulier le Président de la République qui pilote le conseil de modernisation des politiques publiques. Si un manque de concertation a pu être regretté, quoique de nombreux rapports aient déjà été consécutifs à une concertation, c'est que tout dialogue doit simplement être précédé par l'élaboration d'un diagnostic et d'objectifs. En tout cas, lors de sa prochaine audition devant la Commission, le ministre produira un chiffrage afin de répondre aux légitimes interrogations des uns et des autres.

Pour ce qui est de la réserve de crédits, les annulations ne porteront au maximum que sur la moitié de son montant, la réserve de précaution étant aussi faite pour faire face à des dépenses imprévues, ce qui permettra également de mieux respecter la norme de dépense.

Il n'est pas sûr, s'agissant de la CSG, que celle-ci se territorialise très bien et que son transfert ne conduise pas à une augmentation des prélèvements obligatoires.

Quant à donner aux lois de finances l'exclusivité des mesures fiscales ou sociales en matière de CSG ou de cotisations sociales, si un tel dispositif n'est pas prévu dans le projet de loi constitutionnelle, sa mise en oeuvre n'en reste pas moins un souhait du ministre.

Pour ce qui est des dépenses hospitalières, l'hôpital est une source d'inquiétude et le Président de la République s'est à plusieurs reprises exprimé sur ce point. M. Larcher, dont la mission a pris fin, doit d'ailleurs remettre au chef de l'État son rapport préparatoire à la réforme de l'hôpital. C'est un sujet qu'il convient d'aborder avec un maximum de lucidité et de responsabilité, mais si l'on se compare à d'autres pays, des gains de productivité sont à obtenir à l'hôpital.

Il convient par ailleurs sinon de sanctionner, du moins de moduler les financements en fonction du respect par les collectivités locales d'un rythme de dépenses compatible avec les déficits publics.

La TVA sociale ne fait pas partie des projets du Gouvernement, surtout au taux actuel de l'inflation.

Quant à obtenir des recettes supplémentaires à partir de la liste Liechtenstein, les montants en cause, anecdotiques à ce niveau, ne permettront pas de rétablir les finances publiques, même si, sur le plan des principes, le contrôle fiscal ira jusqu'au bout. C'est ainsi qu'ont d'ores et déjà été lancés sur vingt groupes familiaux – notion qui n'est pas nouvelle – des contrôles approfondis.

Pour le budget pour 2009 et les suivants, il conviendra de respecter la norme de « zéro volume » en dépit de l'augmentation du coût de la dette. En effet, si le taux d'intérêt en France n'a pas beaucoup diminué, celui de l'inflation a augmenté. Une partie de la dette étant indexée sur l'inflation, ce qui est d'ailleurs de bonne gestion, le prix de la dette a donc augmenté. Dans ces conditions, le respect de la norme ne peut être que le signe d'une bonne performance.

L'équilibre de fonctionnement devrait, en ce qui concerne l'État, être à l'équilibre en 2012. Il ne faudrait pas, en tout cas, qu'en matière de dépenses d'investissement, des normes mal définies aboutissent à des concepts manipulables.

Les budgets des collectivités locales ne se comparent pas à celui de l'État, même si la logique est finalement la même. Si la proposition de loi constitutionnelle, déposée par le Nouveau Centre, permet de réfléchir un peu plus avant au problème, ce n'est qu'à la condition d'une juste adéquation entre les recettes et les dépenses que l'on pourra comparer la collectivité locale et l'État, même si la norme de dépense est différente.

Quand au dynamisme des recettes, il existe. Sinon, l'État compense et même au-delà de ses obligations comme il l'a fait pour le RMI. Peut-être les 2 milliards d'euros alors versés n'ont-ils pas compensé totalement les dépenses de RMI à quelques centaines de millions près, mais l'obligation légale n'existait qu'au moment du transfert de compétences. Qui vote d'ailleurs les transferts de compétences si ce n'est le Parlement, certes sur proposition de l'exécutif, mais après de nombreux débats ?

PermalienÉric Woerth, ministre du Budget, des comptes publics et de la fonction publique

a ajouté, s'agissant du programme de stabilisation, que l'objectif est toujours « zéro déficit » et 60 % d'endettement à l'horizon 2012, sauf, selon la formule qui a été durement débattue avec la Commission « si les circonstances de la croissance le permettaient en 2010 ».

Le Président Didier Migaud a remercié chacun des participants à la réunion pour les échanges francs et denses qui ont eu lieu.