Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 15 février 2011 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • MDPH
  • accessibilité
  • bâtiment
  • départementale
  • handicap
  • handicapée
  • livre
  • numérique
  • personnes handicapées

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative au prix du livre numérique (nos 2924, 3140).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles, s'arrêtant à l'article 5 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La commission a supprimé l'article 5 bis.

Je suis saisi de deux amendements, nos 6 rectifié et 7 rectifié , qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. Marcel Rogemont.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Monsieur le président, monsieur le ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, je vais défendre successivement ces deux amendements.

L'amendement n ° 6 rectifié vise à faire en sorte que soit inscrite dans le texte sur le prix unique du livre à l'ère du numérique la notion même de rémunération de l'auteur.

Nous proposons donc de rétablir l'article 5 bis dans une nouvelle rédaction, afin qu'il y ait des minima par secteur.

L'amendement n° 7 rectifié est en quelque sorte un amendement de repli.

Dans un avis du 18 décembre 2009, l'Autorité de la concurrence évoquait la question de la rémunération des auteurs dans le monde numérique. Elle pensait que la question serait réglée d'ici un à deux ans. Plus d'une année s'est écoulée sans que l'amorce d'un accord voie le jour. Je souhaitais souligner ce fait.

Il nous sera probablement objecté que ces questions doivent être réglées dans le cadre de négociations entre éditeurs et auteurs, comme le rapporteur l'a rappelé à plusieurs reprises.

La Société civile des auteurs multimédia – la SCAM –, dans son baromètre des relations auteurs-éditeurs publié en 2010, pointait l'usage abusif qui serait fait par certains éditeurs de la rémunération forfaitaire des auteurs. Elle soulignait que l'obligation de réédition de comptes faite à l'éditeur qui consiste à remettre à l'auteur « au moins une fois l'an […] un état mentionnant le nombre d'exemplaires fabriqués et le nombre d'exemplaires vendus » ne serait pas systématiquement respectée.

Des tensions récurrentes existent donc entre auteurs et éditeurs, que l'ère du numérique a naturellement ravivées. C'est pourquoi nous vous avons proposé ces deux amendements.

Qui a dit : « Ce texte permettra également de garantir une assiette stable pour la rémunération des auteurs, condition essentielle pour préserver la diversité de notre création éditoriale et littéraire, à laquelle, vous le savez, je suis extrêmement attaché » ? Le ministre Frédéric Mitterrand, le 26 octobre dernier au Sénat.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir réitérer vos paroles et donner un avis favorable à l'un de ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Hervé Gaymard, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

La commission n'a pas adopté ces amendements.

J'ai entendu l'argumentation de notre collègue Marcel Rogemont. Nous sommes tous – en commission et sur tous les bancs de cet hémicycle – très attachés à la défense du droit des auteurs, du droit d'auteur, et à l'évolution de ce droit d'auteur dans le contexte du développement de l'économie numérique.

Mais la proposition de loi porte sur la fixation du prix du livre numérique et n'emporte pas réforme de la loi de 1957 sur le prix d'auteur. Elle n'a pas vocation à légiférer sur les relations contractuelles entre les éditeurs et les auteurs.

La commission des affaires culturelles et de l'éducation aura à connaître de cette question – je le dis devant le vice-président de la commission – dans les mois qui viennent. Des discussions sont en cours entre les éditeurs et les auteurs.

Pour toutes ces raisons, sans nier l'importance de la question, il me semble que le présent texte n'est pas le véhicule législatif adapté.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Pour les raisons développées par M. le rapporteur — et sans reprendre les termes qu'a utilisés M. Rogemont – le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je suis désolé de la position adoptée par M. le ministre, alors même, que, il y a quelques instants, je saluais ses propos attentifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Attentifs, simplement.

Vous avez eu raison de rappeler certains arguments, monsieur le rapporteur. Néanmoins, vous savez que les relations auteurs-éditeurs posent une vraie question. Cet élément revient sur le devant de la scène à l'ère du numérique, et nous devons le traiter.

Le Sénat, qui avait adopté un dispositif salué à l'époque par le ministre, reviendra, je le pense, sur cette position. C'est pourquoi l'Assemblée devrait adopter l'un ou l'autre des amendements que je viens de présenter.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Christian Kert, vice-président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

J'ai été interpellé d'abord en qualité de vice-président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation. Vous avez raison, monsieur le rapporteur : il y matière à réfléchir pour notre commission. Je pense que cette question est incontournable.

Ensuite, en qualité de porte-parole du groupe UMP, je souhaite une suspension de séance de cinq minutes.

Article 5 bis

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt et une heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est reprise.

(Les amendements nos 6 rectifié et 7 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 8 , 18 et 30 , tendant à introduire un article additionnel après l'article 5 bis.

La parole est à Mme Monique Boulestin, pour défendre l'amendement n° 8 .

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Boulestin

L'amendement n° 8 propose de supprimer, au e) du 2° de l'article L. 122-5 du code de propriété intellectuelle, les mots : « et des oeuvres réalisées pour une édition numérique de l'écrit ».

En 2006, une exception au droit d'auteur a été introduite dans le code de la propriété intellectuelle pour permettre d'utiliser des extraits d'oeuvres protégées par le droit d'auteur à des fins d'illustration de l'enseignement et de la recherche. Une restriction a cependant été ajoutée afin que les oeuvres déjà numérisées n'entrent pas dans le champ de cette exception.

Puisqu'une part croissante des oeuvres existe désormais sous une forme numérique et que le livre numérique est appelé à jouer un rôle déterminant dans l'enseignement et la recherche, il est anormal que l'exception pédagogique et de recherche ne porte pas aussi sur les livres numériques. Cette restriction est par ailleurs susceptible de faire obstacle au développement de la recherche en France et à l'adoption du livre numérique dans l'enseignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Lionel Tardy, pour défendre l'amendement n° 18 .

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

En 2006, la loi DADVSI avait instauré une exception au droit d'auteur afin de permettre d'utiliser des extraits d'oeuvres protégées à des fins d'illustration, de recherche et d'enseignement, mais les oeuvres numériques avaient été explicitement exclues. Cela ne peut pas tenir, alors qu'un nombre sans cesse croissant d'oeuvres ne sera plus disponible que sous la forme numérique. Il faut donc ouvrir le champ de l'exception pédagogique aux oeuvres numériques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour défendre l'amendement n° 30 .

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

En 2006, une exception au droit d'auteur a été introduite dans le code de la propriété intellectuelle pour permettre d'utiliser des extraits d'oeuvres protégées par le droit d'auteur à des fins d'illustration de l'enseignement et de la recherche. Une restriction a cependant été ajoutée afin que les oeuvres déjà numérisées n'entrent pas dans le champ de cette exception.

Puisqu'une part croissante des oeuvres existe à présent sous une forme numérique et que le livre numérique est appelé à jouer un rôle déterminant dans l'enseignement et la recherche, il est anormal que l'exception pédagogique et de recherche ne porte pas aussi sur les livres numériques. Cette restriction est par ailleurs susceptible de faire obstacle au développement de la recherche en France et à l'adoption du livre numérique dans l'enseignement.

La suppression des termes « et des oeuvres réalisées pour une édition numérique de l'écrit » dans l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle permettra d'utiliser également des extraits de livres numériques à des fins d'enseignement et de recherche, sous réserve des autres conditions posées par cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Pourquoi ? Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas vous contenter de dire : « La commission a rejeté ces amendements. » Vous devez nous expliquer sur quels arguments elle s'est fondée.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 8 , 18 et 30 . En 2006, le législateur a souhaité exclure du champ de l'exception pédagogique les oeuvres réalisées pour une édition numérique de l'écrit, afin d'encourager le développement d'une édition numérique. Cet objectif est toujours d'actualité. Le livre numérique est appelé à jouer un rôle fondamental dans l'enseignement et la recherche. Des modèles économiques devront donc être mis en place pour permettre l'utilisation de ces livres numériques dans un cadre pédagogique sans avoir recours à une exception au droit d'auteur. Ces modèles économiques adaptés aux usages collectifs développés par les établissements d'enseignement et de recherche peuvent facilement être développés dans le cadre de l'alinéa 2 de l'article 2.

Par ailleurs, les conditions d'utilisation des oeuvres réalisées pour une édition numérique de l'écrit font l'objet de discussions entre le ministère de l'éducation nationale et les ayants droit destinées à préciser la définition de ces oeuvres et à encourager le développement d'études d'usage permettant d'approfondir la connaissance des nouvelles pratiques liées aux outils numériques en matière d'utilisation des oeuvres protégées.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous avons commencé ce débat en pensant que la proposition de loi pouvait être consensuelle – pour reprendre le mot du rapporteur – et que, à propos de bien des amendements, une majorité d'idée pourrait s'exprimer à l'Assemblée nationale. Des députés siégeant des deux côtés de l'hémicycle ont signé les amendements identiques dont nous discutons et qui sont d'intérêt général, puisqu'ils concernent l'enseignement et la recherche. Il s'agit de conforter, pour le livre numérique, une exception au droit d'auteur, comme il en existe dans bien d'autres domaines. Ne pas voter ces amendements, c'est pérenniser, de manière extraordinaire, une disposition qui interdit que des extraits d'oeuvres protégées par le droit d'auteur soient utilisés, sur le mode numérique, à des fins d'enseignement et de recherche.

Au-delà de nos divergences sur une proposition de loi à propos de laquelle les clivages habituels ne s'expriment guère, nous pourrions nous retrouver sur ces trois amendements identiques, pour l'enseignement et pour la recherche.

(Les amendements identiques nos 8 , 18 et 30 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 9 .

La parole est à M. Marcel Rogemont.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

J'avoue ma déception : les arguments d'intérêt public qui sous-tendaient ces amendements identiques étaient forts.

Avec l'amendement n° 9 , nous voulons apporter une réponse au rapport Patino – commandé par Christine Albanel, alors ministre de la culture –, qui avait établi le constat de la nécessité d'adapter le droit d'auteur – le contrat d'édition – au numérique. Il faut admettre qu'à ce jour aucun accord n'est en vue entre les auteurs et les éditeurs.

Il s'agit de faire en sorte que les cessions d'exploitation numérique fassent l'objet d'un contrat distinct, adapté au numérique. L'amendement tend donc à modifier le code de la propriété intellectuelle dans ce sens. En effet, certains éditeurs ne font pas de distinction entre l'édition imprimée et l'édition numérique d'une oeuvre, considérant que l'une et l'autre pourraient être exploitées sous un contrat unique, alors que les auteurs, qui considèrent que le modèle économique sur lequel repose actuellement le marché encore embryonnaire du livre numérique est très instable et, en tout état de cause, inadapté aux évolutions technologiques prévisibles, ne souhaitent pas céder leurs droits pour une exploitation numérique de leurs oeuvres dans les mêmes conditions que pour le papier.

Cela vaut non seulement pour le taux de rémunération mais aussi, et surtout, pour la durée de cession. Il est fréquemment prévu, par exemple, que les auteurs de bandes dessinées récupèrent automatiquement leurs droits lorsque l'édition de l'un de leurs ouvrages est épuisée. Avec le numérique, une édition n'est jamais épuisée. Il faut donc bien matérialiser un contrat particulier pour l'ère du numérique, afin de défendre les auteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Peut-on considérer, monsieur Rogemont, que vous avez également défendu l'amendement de repli n° 10 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur Rogemont, je vous ai laissé parler plus longtemps sur l'amendement n° 9 en pensant que vous défendiez les deux en même temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

La commission n'a pas adopté cet amendement, mais il est bien entendu que nous devons réfléchir à l'avenir du système français des droits d'auteur à l'ère numérique. Les auteurs doivent pouvoir bénéficier des retombées économiques générées par l'économie du livre numérique, mais effectuer de telles modifications parcellaires au détour d'une proposition de loi qui traite du prix du livre numérique n'est pas adapté, car les enjeux sont trop importants pour ne pas être considérés dans leur ensemble.

Par ailleurs, chacun le sait, des négociations sur la question des droits numériques sont engagées entre le Conseil permanent des écrivains et le Syndicat national de l'édition. Un projet d'accord avait même été évoqué, qui prévoyait l'inclusion de clauses d'exploitation numérique au sein des nouveaux contrats d'édition, plutôt que des contrats distincts – solution que propose votre amendement – et la généralisation de la rémunération proportionnelle de l'auteur pour l'exploitation numérique à un taux au moins égal à celui proposé pour l'exploitation papier. Les discussions n'ont pas abouti. Elles se poursuivent. Laissons-leur une chance.

En outre, vous préconisez un contrat séparé pour encadrer les cessions portant sur les droits d'exploitation d'un livre numérique. Pourquoi recourir à un contrat séparé si l'on considère que le livre est la même oeuvre, qu'il soit imprimé ou numérique ? Les contrats séparés se justifient pour des adaptations de l'oeuvre, non pour des manifestations différentes de la même oeuvre. En effet, dans le cas contraire, il faudrait par exemple des contrats séparés pour les éditions au format de poche.

Il est bien évident que le monde numérique offre des conditions d'exploitation complètement différentes de celles de l'univers du papier, et que ce sujet doit être abordé de manière sereine avec les auteurs, les éditeurs, le ministère de la culture et notre commission.

Laissons-nous, mes chers collègues, quelques mois pour réfléchir à ces questions de manière consensuelle plutôt que de prendre, au détour de l'examen d'un texte dont l'objet principal n'est pas celui-là, des décisions parcellaires, alors que le sujet demande un traitement global.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Les arguments développés par M. le rapporteur sont dignes de la plus grande attention.

L'avis du Gouvernement est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je comprends le sentiment du rapporteur, qui argue que ce n'est pas à proprement parler la thématique de la PPL et qu'il vaut mieux reporter le débat sur ce point.

Je rappelle toutefois que les fenêtres de tir des textes qui touchent à cette question sont extrêmement restreintes. Aussi, lorsqu'on a l'opportunité de pouvoir régler des questions connexes au prix unique du livre à l'ère du numérique, il faut s'en saisir.

Monsieur le rapporteur, même s'il faut toujours légiférer d'une main tremblante, à force de trembler, on risque de ne rien faire !

(L'amendement n° 9 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 10 .

La parole est à M. Patrick Bloche.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

De quoi parlons-nous sinon de l'équilibre général du texte ? Nous avons déjà vu à l'article 3 qu'il y avait un élément de déséquilibre en ce qui concerne les plateformes de vente en ligne, puisqu'il y aurait une discrimination entre celles qui sont établies en France et celles qui ne sont pas établies en France. Or la chaîne du livre numérique, ce sont des plateformes de vente en ligne et des éditeurs, mais aussi des auteurs. Car, pardonnez-moi cette banalité, sans auteurs, il n'y aurait pas de livres !

Si la proposition de loi ne parvient pas à cet équilibre, auquel visent nos trois amendements nos 9 , 10 et 13 concernant la rémunération des auteurs, je crains qu'à l'arrivée, si le texte de la commission n'est pas modifié, on qualifie ce texte comme étant destiné aux éditeurs de livres numériques, alors qu'il devrait, portant sur le prix unique, concerner tous les acteurs de la chaîne du livre numérique.

Avec nos trois amendements, nous proposons de modifier le code de la propriété intellectuelle. Ils ne relèvent pas d'une vision parcellaire puisqu'ils concernent l'objet même de cette proposition de loi. Pour ne pas être trop long, monsieur le président, je ne prendrai qu'un exemple.

Lorsqu'un livre papier est épuisé, qu'il faut le réimprimer et le remettre dans les circuits de distribution pour qu'il figure à nouveau dans les librairies, le travail réalisé par l'éditeur est visible. Le livre numérique, lui, n'est jamais épuisé, puisqu'il s'agit d'une mise à disposition permanente sur les réseaux. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, la rémunération des auteurs ne nous semble pas suffisamment assurée.

Nous avons notamment auditionné des auteurs de bandes dessinées. Je vous alerte, chers collègues, sur le fait qu'en ce domaine particulier, si nous n'adoptons pas ces trois amendements, il n'y aura bientôt plus d'auteurs professionnels de bandes dessinées en France.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Monsieur Bloche, n'en doutez pas, nous aimons et nous défendons les auteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Alors, monsieur le ministre, il faut des preuves d'amour !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Décidément, quel climat ce soir ! (Sourires.) Non, il n'est pas nécessaire d'aller jusque-là pour donner des preuves d'amour.

L'avis du Gouvernement est défavorable.

(L'amendement n° 10 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous en arrivons à l'amendement n° 13 .

La parole est à M. Marcel Rogemont.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Je persiste. Cet amendement complète les deux précédents.

Je reviens sur l'exemple des auteurs de bandes dessinées, rappelé à l'instant par Patrick Bloche. Il est évident que la notion d'épuisement d'une édition disparaît complètement à l'ère du numérique. Cela va donc poser des problèmes majeurs pour ce qui est de l'édition des bandes dessinées. Je pourrais évoquer d'autres types d'éditions qui seront confrontées à ce problème, mais j'appelle mes collègues à la réflexion sur le seul exemple des bandes dessinées. Il est très important pour les auteurs que le contrat qui les lie à l'éditeur précise la durée déterminée et précise de cession des droits.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous engage à la réflexion et à voter notre amendement – de repli par rapport aux deux précédents – afin de prendre en compte cette réalité. Ce n'est pas trop demander que la durée de cession des droits soit inscrite dans un contrat !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Défavorable.

Pour l'instant, il n'est pas souhaitable de modifier les clauses relatives aux contrats d'édition qui figurent dans le code de la propriété intellectuelle. Il y a actuellement des négociations entre les auteurs et les éditeurs, qui se sont mis d'accord sur certains points. Ces négociations se poursuivant, je ne vois pas pourquoi nous interviendrions à ce stade.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Les trois amendements de nos collègues socialistes nous amènent au coeur du débat. Fallait-il faire une proposition sur le livre numérique ou sur le prix du livre numérique ? À mon avis, il y avait véritablement matière à faire une proposition sur le livre numérique, d'abord pour réfléchir à sa définition, comme l'a souligné Lionel Tardy. La définition du livre numérique, c'est l'hypertexte, la profondeur que lui donne l'hypertexte. La restriction au livre homothétique lui fait perdre de la valeur.

Ensuite, nous sommes passés à la mobilité de la distribution. À partir du moment où le livre est numérisé, la distribution sera mobile et vous n'arriverez pas à l'encadrer comme nous avons pu le faire pour le livre papier.

Les trois amendements socialistes montrent qu'il y a des problèmes de spécificité dans les relations contractuelles.

Chers collègues du groupe SRC, vous essayez de nous convaincre. Nous sommes à l'écoute, car nous étions pour le moins réservés sur ce sujet. Monsieur le rapporteur, vous l'avez dit, avec beaucoup d'humilité d'ailleurs, c'est une loi minimaliste. C'est honnête de votre part. Mais c'est une loi qui a été voulue par les éditeurs dans leur rapport de force avec les distributeurs. À mon avis, le problème du livre était beaucoup plus complexe. Vous nous dites, monsieur le ministre, qu'il y a des négociations entre auteurs et éditeurs, que nous devons attendre qu'elles aboutissent, sans intervenir au niveau législatif. Nous vous entendons, mais nous pourrions vous demander s'il faut vraiment intervenir avec les éditeurs et les distributeurs. Là est le sujet ! Et ce soir, nous n'avons pas obtenu de réponse. Sur le fond, c'est peut-être une loi sur le livre numérique qui nous manque.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

Si nous voulons modifier le code de la propriété intellectuelle, c'est parce que nous considérons, en ce domaine comme dans d'autres, qu'il faut adapter le droit d'auteur, droit moral et patrimonial auquel nous sommes toutes et tous attachés, aux réalités du modèle du mode numérique de diffusion. D'où la cohérence de nos trois amendements.

Le rapport Patino, commandé par Mme Albanel il y a deux ans, concluait à la nécessité de modifier le code de la propriété intellectuelle. Deux ans après, toujours rien ! Deux ans après, les discussions entre éditeurs et auteurs n'ont abouti à aucun résultat. L'objectif est que le dividende numérique du livre – si j'ose ainsi m'exprimer – soit équitablement réparti dans toute la chaîne du livre et que les auteurs y trouvent leur compte. Si nous prenons cette initiative, c'est que ces négociations piétinent depuis deux ans et que le rapport Patino demandant au législateur de modifier le code de la propriété intellectuelle n'a pas eu de suite. N'attendons pas, sinon il sera trop tard ! Les auteurs ne doivent pas être les victimes des mutations en cours. Il s'agit pour nous, en tant que législateurs, de prendre nos responsabilités et de créer le cadre dans lequel se développeront des négociations entre auteurs et éditeurs, négociations entre personnes privées qui, évidemment, ne nous concernent pas. Mais créons le cadre.

(L'amendement n° 13 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Philippe Folliot, inscrit sur l'article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Pour une fois, j'exprimerai une position différente de celle de mon collègue Jean Dionis du Séjour. En effet, je suis favorable à ce texte, et plus particulièrement à l'article 7.

La création d'un comité de suivi me semble être un point important, car, de part et d'autre de cet hémicycle, des interrogations portent sur la notion de livre numérique au regard de la nature même du problème.

Ce texte doit donner un signal fort. Nous sommes tous d'accord sur le fait que la loi Lang a été une bonne loi. Elle a permis la diffusion la plus large possible de nombre d'écrits tout en faisant obstacle à une certaine logique économique qui aurait favorisé un nombre d'auteurs minimal et une diffusion maximale. Grâce à cette loi, la richesse de la production littéraire a perduré dans notre pays. Dans ce cadre, cette loi a été un succès.

Deuxième succès : la loi Lang aura permis le maintien d'un réseau de libraires indépendants irriguant l'ensemble du territoire national.

Le livre numérique n'est pas en opposition avec le livre papier. Il y a quelques semaines, Le Monde 2 a publié un dossier très intéressant qui explique tous les schémas de complémentarité entre le livre numérique et le livre papier et qui montre, en décrivant les différents mécanismes, comment le livre numérique va « tirer » l'édition et le livre papier pour l'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Entre l'ère Gutenberg et l'ère Apple, il n'y a pas de contradiction, mais une complémentarité. Il faut soutenir ce texte qui apporte des éléments importants pour l'avenir. C'est ce que je ferai à titre personnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

L'article 7 prévoit un comité de suivi composé de deux députés et deux sénateurs, désignés par les commissions chargées des affaires culturelles.

Mes chers collègues, il est dommage que seuls des députés chargés des affaires culturelles siègent dans ce comité de suivi.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Je prends un exemple analogique, celui de la commission du dividende numérique. Elle était composée de quatre députés et quatre sénateurs – deux députés de la commission des affaires culturelles, deux députés de la commission des affaires économiques.

La commission des affaires culturelles a naturellement un leadership indéniable en la matière, mais il me paraît également essentiel que la commission des affaires économiques puisse être associée, considérant qu'elle est compétente, s'agissant d'internet, sur l'évolution des modèles économiques dans le monde numérique. Je trouve tout à fait dommage que, dans cet article 7, la présence de députés de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale et de membres de la commission des affaires économiques du Sénat ne soit pas envisagée.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Je tenais à faire cette remarque.

Je voterai en conséquence contre l'article 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

L'observation de Laure de la Raudière est d'autant plus pertinente qu'il y a, au sein de notre assemblée, deux missions d'information en activité. L'une d'elles, présidée par M. Warsmann, présent ce soir dans l'hémicycle, – et j'ai l'honneur d'en être un des deux corapporteurs – conduit une réflexion sur les droits de l'individu à l'ère numérique. Laure de la Raudière est, quant à elle, corapporteure d'une mission d'information sur la neutralité du net. La mission d'information sur les droits de l'individu à l'ère numérique est commune à la commission des affaires culturelles et à la commission des lois. Trois commissions sont ainsi directement concernées par ce dont nous parlons : les lois, les affaires culturelles et les affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Et la commission des affaires sociales n'est pas concernée ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

L'amendement présenté par nos collègues MM. Tardy et Dionis du Séjour se justifie. Laissons à l'Assemblée nationale la possibilité de se saisir de ces questions à travers toutes les commissions qui la composent et qui font sa diversité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 14 .

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Je partage, tout comme Lionel Tardy, le point de vue de Laure de la Raudière et de Patrick Bloche. Pourquoi créer un comité ad hoc alors qu'il existe une mécanique de droit commun de l'Assemblée nationale qui fonctionne bien ? La commission des affaires culturelles peut être saisie au fond et la commission des affaires économiques peut demander à être saisie pour avis. Cela marche. Il est tout à fait légitime, à notre avis, de nous en tenir au droit commun de l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Il ne peut s'en remettre qu'à la sagesse de l'Assemblée, car c'est un problème qui lui est propre !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Un dispositif formalisé de suivi de l'application de la présente loi paraît tout à fait utile et justifié. Il permet non seulement de répondre à un souhait de la représentation nationale, mais il apporte de plus une garantie devant une crainte exprimée par la Commission européenne quant à la capacité de ce texte à répondre aux objectifs de diversité culturelle et de rémunération de la création. Ce dispositif est en conséquence absolument indispensable. Le Gouvernement donne donc un avis défavorable à l'adoption de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Christian Kert, vice-président de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

Le plaidoyer pro domo de notre collègue Laure de La Raudière et le secours que lui a apporté notre collègue Patrick Bloche nous ont émus. Il se trouve toutefois qu'il convient de rétablir le droit. Vous faites référence à des missions qui sont l'objet de compétences partagées. Or, dans ce cas précis, il s'agit du livre et du droit d'auteur, lesquels relèvent de la compétence exclusive de la commission des affaires culturelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Je ne peux pas laisser dire cela ! J'ai été l'un des seuls à m'exprimer au nom de la commission des affaires économiques à ce sujet en commission. J'avais d'ailleurs demandé l'une des deux places dans ce comité de suivi.

Comme un certain nombre de mes collègues, je suis opposé à ce comité de suivi. En effet, lorsque nous examinons des projets de loi de simplification du droit, nous adoptons des dispositions tendant à limiter les comités de suivi et, donc, à restreindre le nombre de rapports qui doivent être rendus par le Gouvernement et qui, très souvent, ne le sont pas, comme vous pourrez le constater en vous rendant, et je vous y invite, à la distribution.

Le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, a rendu en 2009 un rapport dans lequel il préconise une remise à plat des manières de travailler. Je souscris pleinement à cette démarche, mais je dois malheureusement constater que ses préconisations ne sont pas mises en oeuvre.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée par l'article 7 pour soulever de nouveau ce sujet. Si nous changions nos pratiques, nous n'aurions pas forcément besoin de recourir à des lois de simplification. Aux termes de cet article, un comité de suivi est créé et le Gouvernement présente chaque année un rapport au Parlement. Est-ce vraiment utile ? Telle est la véritable question. Nous devons contrôler l'application des lois et l'action du Gouvernement. Il est inutile qu'un comité de suivi soit explicitement prévu dans une loi pour qu'il soit créé. La commission des affaires économiques, par exemple, a chargé un binôme, composé d'un rapporteur et d'un député de l'opposition, de rendre un rapport d'application un an après la promulgation d'un texte. Il en va de même du rapport. Rien ne nous empêche d'auditionner le ministre sur l'application de ce texte en lui posant des questions très précises. La commission des affaires culturelles organise de nombreuses auditions de ce genre, qui sont toujours très intéressantes et instructives.

Mes chers collègues, cessons donc d'inscrire dans la loi des dispositions inutiles, alors que nous disposons déjà de tous les outils en termes de suivi !

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

La loi n'en sera que plus simple et plus claire !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

J'ai en mémoire qu'une table ronde passionnante, organisée conjointement par la commission des affaires culturelles et par la commission des affaires européennes, nous a permis de préparer cette discussion parlementaire. Les intervenants y ont été nombreux.

Vous estimez, monsieur le ministre, que ce comité de suivi est indispensable, considérant notamment la crainte exprimée par Bruxelles. Nous aurions pu dès ce soir, en votant certains amendements, exprimer la volonté de la représentation nationale française en ce domaine, ce qui nous aurait permis d'élaborer une proposition de loi beaucoup plus équilibrée qu'elle ne le sera. Il revient, je le pense, à l'Assemblée nationale, à travers ses différentes commissions, d'assurer un contrôle permanent et, de ce fait, de procéder à l'évaluation nécessaire et de prendre des initiatives, s'agissant de l'étude d'impact que nous pourrons être amenés à réaliser. Nous sommes au coeur d'un sujet qui doit nous amener à prendre des initiatives non restrictives.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Je ferai trois brèves remarques.

Premièrement, comme l'a rappelé Christian Kert, c'est un fait, suite à la réforme des commissions et de leurs attributions, le livre et le droit d'auteur sont de la compétence de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Deuxièmement, il est évident que nous ne sommes pas, je l'espère et chaque jour le démontre, dans une assemblée balkanisée où les commissions ne se parlent pas. Nous sommes tous membres d'une commission permanente, mais, par définition, nous nous intéressons à tous les thèmes. Donc, nous sommes tous les bienvenus pour travailler sur l'ensemble des sujets, ce que nous faisons déjà.

Troisièmement, si cet amendement était adopté, la clause de rendez-vous législatif serait supprimée. Or ce qui est essentiel sur ces sujets numériques en perpétuelle évolution, c'est que nous ayons un véritable suivi et que nous légiférions, chaque année, si besoin est, sur des sujets qui auraient évolué.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Avant de passer au vote, je tenais à rappeler que l'adoption de cet amendement supprimerait, de fait, la clause de rendez-vous législatif et ferait tomber l'amendement suivant, à savoir celui de notre collègue Rogemont pour lequel nous avons beaucoup de bienveillance !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

J'avais demandé la parole, monsieur le président. Pourquoi ne me l'avez-vous pas donnée ? Est-ce que cela va durer ?

(L'amendement n° 14 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Vous pourriez tout de même, monsieur le président, me regarder et me donner la parole – je ne la demande pas souvent – quand je lève la main ! Je demanderai donc à m'exprimer à chaque fois. Et je demande une suspension de séance !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Ce n'était pas un rappel au règlement, monsieur Gremetz. De plus, je vous précise que j'ai donné la parole à six orateurs sur cet amendement, alors que deux seulement peuvent en théorie intervenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Et alors ? Vous donnez toujours la parole aux mêmes !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai permis que le débat se tienne et chacun a pu s'exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Vous avez choisi les six intervenants ! Il est regrettable que vous soyez incapable de regarder dans ma direction !

Je demande une suspension de séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Vous n'avez pas de délégation de votre groupe à cet effet.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Vous allez vivre une soirée agitée, monsieur le président !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi d'un amendement n° 11 .

La parole est à M. Patrick Bloche, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Bloche

L'article 7 subsiste donc et il y est précisé que le Gouvernement doit remettre un rapport au Parlement. Ce rapport tend à évaluer la rémunération des auteurs. Nous avons souhaité, par cet amendement, que cette évaluation ne consiste pas seulement à savoir si les auteurs sont rémunérés, car nous l'espérons dans ce vieux pays de culture qu'est la France, mais que ce rapport soit plus précis et qu'il indique si cette rémunération a été juste et équitable. Cette évaluation nous permettra en effet de prendre de nouvelles initiatives parlementaires et, cette fois-ci, peut-être, d'avoir une majorité à l'Assemblée nationale pour modifier le code de la propriété intellectuelle comme nous vous l'avons en vain proposé tout à l'heure.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Qui pourrait être opposé à une rémunération « juste et équitable » ? Le Gouvernement est donc bien sûr favorable à cet amendement !

(L'amendement n° 11 est adopté.)

(L'article 7, amendé, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1 et 12 , portant article additionnel après l'article 8.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 1 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Marcel Rogemont, pour soutenir l'amendement n° 12 .

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je m'en remets à la sagesse des députés.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Nous allons finir en fanfare !

Cet amendement, je dois le dire, me surprend beaucoup. Il n'a d'abord strictement aucun lien avec ce texte, comme l'a dit Jean Dionis du Séjour. Il s'agit d'un cavalier législatif à l'état pur ! Je vous invite, mes chers collègues, à écouter mes propos.

Ce genre de disposition particulière me dérange. On fait la loi pour qu'elle s'applique de manière générale. Or on nous propose en l'occurrence de valider un permis de construire annulé par le tribunal administratif. L'amendement est extrêmement précis, mais il aurait pu, à la limite, être plus bref en précisant le numéro du permis de construire et en nous demandant de le valider, parce que c'est bien de cela qu'il s'agit. En effet, un seul permis de construire répond aux conditions posées dans cet amendement. Je ne me prononcerai pas sur le fond du dossier, mais je constate tout de même qu'une décision au fond a été rendue par un juge administratif, lequel a décelé une faille juridique qu'il a estimée suffisamment substantielle pour annuler ce permis de construire. Or on vient aujourd'hui nous demander, au nom de l'intérêt général, de casser purement et simplement cette décision, certes non définitive, mais juridiquement argumentée. Si nous le faisions, mes chers collègues, cela signifierait que tous les projets suffisamment soutenus pour se voir délivrer le label « projet d'intérêt général » pourront prendre quelques libertés avec la loi, notamment avec le droit de l'urbanisme. Si un tribunal annule le permis de construire, on votera une loi pour « rattraper le coup ».

Cela ne me paraît pas acceptable. Si ce permis de construire n'est pas conforme au PLU de la ville de Paris, que l'on commence par modifier le PLU. Si c'est le droit de l'urbanisme qui est en cause, il ne tient qu'à nous d'apporter des solutions.

Cette décision du pouvoir législatif, destinée explicitement à favoriser un projet privé,…

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

…me gêne énormément, et que le groupe socialiste y prête la main me surprend encore plus.

(Les amendements identiques nos 1 et 12 sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans les explications de vote, la parole est à M. Marcel Rogemont, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Aujourd'hui, l'ère du numérique est marquée par la présence d'opérateurs en situation d'oligopole qui rejettent les biens culturels au rang de produits d'appel. Il s'ensuit naturellement une dévalorisation très forte des biens culturels concernés.

Face à une telle situation, et pour ce qui concerne le livre, tout un travail a été réalisé, et d'abord au sein de notre commission, je pense notamment à la mission sur le livre numérique pilotée par Hervé Gaymard, à laquelle je me suis associée. Quant au Sénat, il avait commencé à répondre à des questions, notamment sur l'extraterritorialité mais aussi sur la reconnaissance d'une rémunération équitable pour les auteurs.

Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, et la dernière table ronde du 26 janvier dernier laissait augurer que ce texte pourrait être adopté par l'ensemble de l'Assemblée nationale.

Malheureusement, nous avons rangé des réponses apportées par le Sénat au rang de simples questions qu'il n'était pas utile d'aborder, et les interrogations sont fortes. D'abord, revenir sur certaines positions du Sénat va nécessairement affaiblir la position de la France en faveur de la reconnaissance de l'exception culturelle. Par ailleurs, le fait de ne pas avoir légiféré sur une reconnaissance de la rémunération des droits d'auteur n'est pas un bon signe dans les négociations entre les éditeurs et les auteurs.

Par notre vote, nous dirons tout simplement non à cette timidité régressive. Nous aurions voulu que la question des plates-formes de vente en ligne soit abordée, que l'accès public des oeuvres soit renforcé. Nous nous abstiendrons donc, en attendant que les réflexions de notre assemblée se prolongent, que celles du ministère s'affirment et que, après la discussion au Sénat, nous ayons un texte que nous pourrons approuver.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Lors du travail qu'a mené notre groupe ce matin, de nombreuses réserves se sont exprimées sur ce texte, et les débats ont apporté des éclaircissements.

Vous pouviez élaborer une proposition de loi sur le livre numérique ; vous avez choisi de présenter une proposition sur le prix du livre numérique. C'est un choix de fond. Vous l'avez fait parce que vous estimez que, dans le rapport de force entre éditeurs et distributeurs, il est utile d'aider les éditeurs à obtenir des accords convenables. Cela peut être honorable, mais c'est très partiel, et nous avons pointé des questions lourdes sur le prix du livre, sur le livre numérique.

Il y a d'abord sa définition. Vous n'échapperez pas à un grand débat sur ce qu'est le livre numérique, et le fait d'avoir à l'article 1er renvoyé à un décret ce qu'est le livre numérique est tout de même une faiblesse congénitale de ce texte.

Lorsque vous vous heurtez au problème de la construction juridique, de façon à ne pas heurter de front le problème du droit européen, vous prévoyez un prix unique sur le territoire national et un contrat de mandat à l'intérieur des frontières nationales, ce qui est tout de même un petit peu surprenant.

Telles sont nos réserves sur cette question. Quand nos collègues socialistes évoquent les spécificités et les modifications qu'implique le livre numérique au niveau contractuel entre les auteurs et les éditeurs, vous leur répondez que ce n'est pas le moment parce que vous êtes dans votre logique d'une proposition de loi concernant uniquement les éditeurs et les distributeurs.

Vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, c'est une loi minimaliste et, pour être plus précis, c'est une loi pour les éditeurs et les distributeurs. Honnêtement, nous sommes très critiques, mais nous ne voulons pas gêner outre mesure le rapporteur et le ministre. Notre groupe s'abstiendra donc, en émettant de fortes réserves, et nous verrons comment évolue le débat. Je signale que Philippe Folliot, lui, a décidé de soutenir le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Christian Kert, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

…travail sérieux, travail de concertation, qui trouve sa concrétisation ici ce soir.

Si le groupe UMP vote ce texte, c'est d'abord parce qu'un texte était nécessaire, et vous ne rejetez pas cette idée. Nous ne vous mentons pas : l'objectif, c'est le prix unique du livre. Face à la montée en puissance du livre numérique, qui est passé à 1,5 % du chiffre d'affaires alors qu'il n'était que de 0,1 % en 2008, nous devions réagir si nous voulions un équilibre en ce domaine.

C'est un texte d'équilibre, équilibre entre le livre écrit et le livre en ligne, équilibre par rapport aux auteurs, aux éditeurs, aux libraires, et je ne peux pas vous laisser dire qu'il est fait seulement pour les éditeurs et les distributeurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Kert

C'est faux, c'est un texte d'équilibre général.

Un vrai travail de fond a été conduit pas la commission. Il n'y a pas de surprise particulière, tous les sujets que nous avons abordés ce soir ont été traités en profondeur au cours des travaux de la commission.

J'entendais dire que nous avions travaillé différemment du Sénat. Encore heureux. Nous sommes à l'Assemblée nationale. Le Sénat a travaillé, étudié, tranché, nous avons une autre vision sur certains problèmes et c'était notre fonction essentielle de faire valoir nos arguments.

Enfin, c'est un texte qui n'est pas fait pour l'éternité, il sera appliqué quelques années, le temps de mettre de l'ordre dans le domaine du numérique. À cet égard, nous avons parfaitement balisé le chemin. C'est la raison pour laquelle le groupe UMP le votera, avec enthousiasme je crois.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Je m'exprime ici au nom des députés communistes, républicains, citoyens, du parti de gauche, et vous annonce que nous nous abstiendrons sur cette proposition de loi relative au prix du livre numérique. (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Nous avions pourtant salué, lors de sa venue en commission, un texte poursuivant un objectif légitime, la régulation du secteur en plein essor du livre numérique, dans la continuité de la loi de 1981 sur le prix unique du livre, qui avait permis de maintenir la diversité de l'édition, la qualité de son offre et le maillage des librairies sur l'ensemble du territoire ; mais force est de constater, à l'issue de son examen par notre assemblée, que cette proposition de loi a quasiment perdu toute portée protectrice.

L'extraterritorialité, qui permettait d'empêcher les géants commerciaux de s'emparer du livre numérique dans le seul but de dégager des profits, a été supprimée par la majorité. Or, comme nous l'avons dit, en assujettissant seulement les éditeurs établis en France à l'obligation de fixer un prix de vente pour les livres numériques diffusés, on rend la loi inopérante. Aucun des géants du secteur n'est établi en France et, surtout, en matière d'échange immatériel, les frontières physiques ne sont pas pertinentes.

Pour le reste, vous vous retranchez derrière l'actuel contrat de mandat, qui s'inscrit très profondément dans le droit communautaire et, notamment, dans les directives services et la directive sur le commerce électronique, avec tout ce que cela suppose comme soumission aux lois du marché.

Sous la pression du rapporteur, vous avez supprimé l'article 5 bis, issu des travaux sénatoriaux, qui devait garantir une rémunération juste et équitable pour les auteurs. De notre côté, nous continuerons de proposer que la rémunération de l'auteur d'une oeuvre commercialisée ou diffusée sous forme numérique ne puisse être inférieure à celle obtenue pour l'édition papier première du même ouvrage.

Il s'agirait aussi de trouver une solution au prix du livre numérique, qui reste trop élevé, notamment en créant une plate-forme publique de téléchargement avec un mécanisme de financement public qui prenne en charge tous les coûts liés à la rémunération des auteurs, des intermédiaires, et tous les frais afférant à la production, à la diffusion ou au stockage des oeuvres.

Ce texte offre des positions minimalistes et ne prend pas plus en compte la fracture numérique et la crise de la lecture. Or, comme l'a écrit le grand poète Edmond Jabès : « Le livre n'est pas. La lecture le crée, à travers des mots créés, comme le monde est lecture recommencée du monde par l'homme ».

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures quarante, est reprise à vingt-deux heures quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi adoptée par le Sénat, tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap (n°s 2924, 3 146).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, cher Paul Jeanneteau rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je suis particulièrement heureuse de vous retrouver dans cet hémicycle, avec Roselyne Bachelot, pour débattre de cette proposition de loi sénatoriale, relative aux maisons départementales des personnes handicapées et à divers aspects de la politique du handicap.

Avant d'évoquer plus précisément les dispositions de la proposition de loi, permettez-moi de saluer la très grande qualité du travail de la commission des affaires sociales et de son rapporteur ainsi que l'état d'esprit dans lequel ce travail a été réalisé par tous ses membres, quels que soient les bancs sur lesquels ils siègent.

Les maisons départementales des personnes handicapées constituent l'un des apports majeurs de la loi du 11 février 2005, que j'ai eu l'honneur de porter devant vous, il y a six ans.

Voilà donc six ans qu'a été adoptée la loi pour l'égalité des droits, des chances, la participation et la citoyenneté de nos compatriotes handicapés. Un pas vers la République des solidarités, un pas pour associer chaque Français, à l'école, dans l'entreprise, dans la cité, à la vie ensemble avec nos différences, nos capacités, nos compétences et nos limites.

Avec le recul, il faut bien reconnaître que le législateur n'a été ni frileux ni inhibé. Il a en effet voté l'accessibilité de tous à tout, le principe de scolarisation de l'enfant handicapé, par l'inscription de droit à l'école de son quartier, l'obligation pour l'employeur public comme privé de respecter un taux de 6 % de collaborateurs handicapés dans son entreprise, la reconnaissance du handicap psychique et des groupes d'entraide mutuelle, la reconnaissance de la langue des signes française, la mise en oeuvre du projet de vie de la personne handicapée comme fondement de son droit à compensation, apprécié par une équipe pluridisciplinaire au sein d'une maison des personnes handicapées, dans son département.

Avec les maisons départementales des personnes handicapées, nous avons créé un lieu de proximité permettant d'éviter ce fameux parcours du combattant auquel sont confrontées tant de familles.

Je voudrais souligner en premier lieu les nombreux progrès réalisés grâce à la création des MDPH et à leur montée en charge depuis 2005.

Le premier progrès est d'avoir changé le regard porté sur les personnes handicapées et fait reconnaître leurs droits par l'installation des guichets uniques dans chaque département. Parce que les MDPH coordonnent l'ensemble des interventions en faveur du handicap, parce qu'elles sont de véritables lieux d'accueil, d'information, d'orientation et d'évaluation de leurs besoins, elles jouent aujourd'hui un rôle central et reconnu dans l'intégration sociale pleine et entière des personnes handicapées.

Les avancées réalisées dans l'information et l'accueil des personnes handicapées grâce à l'implication toujours plus grande des acteurs – personnels et agents des MDPH, responsables départementaux ou d'organismes financeurs – qui confine parfois au militantisme, sont unanimement reconnues.

L'instruction des démarches s'est elle aussi largement améliorée grâce à un effort important de simplification et à la suppression de mécanismes aujourd'hui quasi archaïques comme la dissociation des organismes de prise en charge selon l'âge : les CDES pour la scolarisation des enfants, les COTOREP pour les adultes.

Notons également à quel point s'est améliorée la continuité de la prise en charge du handicap à tous les âges en même temps que diminuaient les effets de rupture entre les régimes enfants et adultes.

Cela étant, si les MDPH se sont toutes mises en place, sous l'égide des conseils généraux, dans les délais prévus par la loi, leur situation est inégale selon les départements. Certains traits communs de fonctionnement ou de dysfonctionnement se sont rapidement fait jour.

Fort de ce constat, les parlementaires se sont emparés de cette question, produisant des rapports particulièrement soignés, dont la présente proposition de loi est d'ailleurs le prolongement.

Le Président de la République lui-même, à l'occasion de la conférence nationale du handicap du 10 juin 2008, a affirmé qu'il fallait « améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées pour que toutes soient enfin à la hauteur des attentes des familles ».

Vous l'avez souligné, cher Paul Jeanneteau, les MDPH rencontrent des difficultés.

Tout d'abord, elles manquent de visibilité financière, comme le souligne le rapport que l'IGAS nous a récemment remis à Roselyne Bachelot et à moi-même.

De cette visibilité financière dépend la mise en oeuvre des programmes et des projets. Pour répondre à la demande des acteurs, cités par l'IGAS, de disposer « d'un système aussi simple, global et lisible que possible, assurant au moins une visibilité budgétaire à six mois », le Gouvernement soutiendra l'article 5 de la proposition de loi qui prévoit la mise en place d'une convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens d'une durée de trois ans entre chaque maison départementale, l'État, le conseil général et, le cas échéant, les autres membres du groupement.

Ainsi, outre la convention constitutive, qui reste l'acte fondateur du GIP, la convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens sera un outil de programmation triennal, fixant les objectifs assignés aux MDPH et les moyens dont elles disposent pour les remplir. Chaque année, un avenant financier précisera les modalités et le montant de la participation des membres du groupement. Il mentionnera le montant du concours versé par la CNSA au conseil général et destiné à contribuer au fonctionnement de la MDPH.

Ensuite, la gestion des personnels des MDPH est particulièrement complexe. Les équipes manquent de stabilité, du fait notamment d'une grande disparité de statuts, en raison de la diversité des origines des personnels. Les solutions que vous préconisez vont dans le bon sens, que ce soit l'assouplissement des mises à disposition ou le versement par l'État d'une subvention de fonctionnement « globalisée », en début de période.

Ainsi, les MDPH percevront une subvention d'État, qui permettra soit de rembourser les dépenses relatives aux postes occupés par un agent mis à disposition, soit de procéder à un recrutement extérieur si la mise à disposition due n'est pas effective.

Parallèlement, il va sans dire que l'État continuera de verser les crédits de rémunération de ces agents mis à disposition. Ainsi, le dispositif que vous proposez garantira une réelle stabilité du personnel mis à disposition par l'État et la visibilité financière dont les MDPH ont tant besoin pour assumer les missions qui leur sont confiées.

Enfin, je voudrais saluer les initiatives de votre commission et de son rapporteur Paul Jeanneteau, qui a pris soin d'amender le texte pour favoriser une sécurisation réelle de l'échange d'informations entre intervenants soumis au secret professionnel au sein des MDPH. Nous y reviendrons au cours du débat.

Comme il l'a dit au Sénat à l'occasion de la première lecture, le Gouvernement, est favorable à la proposition de faire du groupement d'intérêt public une structure à durée indéterminée. Le statut des MDPH s'en trouvera consolidé. Roselyne Bachelot et moi-même ne pouvons que nous en féliciter.

S'agissant de la politique de l'emploi des personnes handicapées, nous nous félicitons également des mesures de clarification que cette proposition de loi opère.

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Tout d'abord, le rôle de l'État est réaffirmé dans le pilotage de la politique de l'emploi des personnes handicapées, qui fait intervenir une pluralité d'acteurs et renforce la gouvernance de cette politique.

Ensuite, cette proposition de loi élargit le champ des bénéficiaires potentiels des aides financières du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, le FIPHFP, et donne à ce dernier la capacité d'initiative qui lui faisait défaut. Cet assouplissement du cadre juridique était unanimement souhaité par l'ensemble des acteurs : il permettra au FIPHFP de développer plus largement ses actions.

Allant au-delà de ces propositions, votre rapporteur a souhaité étendre le débat en proposant d'instituer l'obligation d'élaborer tous les cinq ans un plan régional pour l'insertion des travailleurs handicapés et la reconnaissance automatique de la qualité de travailleur handicapé pour les étudiants handicapés bénéficiant d'une convention de stage. Nous y reviendrons tout à l'heure.

S'agissant de l'accessibilité, je sais que vos débats en commission ont été riches. Je ne doute pas qu'ils le seront tout autant lorsque nous aborderons les articles concernés.

Sur cette question, entendons-nous bien : pour moi, comme pour Roselyne Bachelot, l'accessibilité est un principe intangible.

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Cependant, l'interprétation restrictive ou intégriste de ce principe conduit à des incompréhensions fâcheuses. La question ne saurait se résumer à l'édification de rampes d'accès ou d'ascenseurs partout et dans n'importe quelles conditions, ni à une simple obligation de moyens sans résultats. Ne tombons pas dans l'excès du renchérissement inutile !

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

C'est le confort d'usage et l'effectivité des parcours de nos compatriotes handicapés qu'il faut viser, dans l'esprit d'inclusion sociale affirmé par la loi du 11 février 2005. Naturellement, il faut prévoir l'accessibilité des lieux et services à tous les types de handicaps,…

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

… le handicap moteur, évidemment, mais aussi les handicaps sensoriels, le handicap mental et le handicap psychique, bien souvent « parents pauvres » de l'accessibilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Voilà une femme qui tient ses promesses. C'est rare.

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Sur cette question, je ne voudrais pas anticiper sur le débat qui ne manquera pas de nous animer tout à l'heure.

Mesdames et messieurs les députés, je vous sais autant que nous déterminés à faire vivre l'esprit de la loi du 11 février 2005. Par cette proposition de loi, vous y concourez pleinement. Soyez en remerciés.

Je ne voudrais pas achever mon propos sans rendre hommage aux associations représentatives des personnes handicapées, présentes dans les tribunes.

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Force de mobilisation, elles sont aussi force d'innovation, force de proposition. Au-delà des constats, elles apportent des solutions de terrain, en accord avec les nécessités qu'elles observent. C'est l'honneur du Parlement de se saisir de ces nécessités, afin de mettre en lumière le rôle fondamental des associations dans le fonctionnement social et démocratique de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Paul Jeanneteau, rapporteur de la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, nous examinons ce soir la proposition de loi adoptée par le Sénat tendant à améliorer le fonctionnement des maisons des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap.

Cette proposition de notre collègue Paul Blanc est issue d'un long travail parlementaire qui a commencé par un rapport d'information de M. Blanc et de Mme Jarraud-Vergnolle présentant un premier bilan de la loi du 11 février 2005.

À l'issue de ce travail a été rédigée une proposition de loi, examinée d'abord au Sénat, par la commission des affaires sociales en juin dernier, puis en séance publique le 24 juin et, après une longue interruption, le 25 octobre. Cette proposition de loi entend aménager à la marge la loi du 11 février 2005 afin, en particulier, d'améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées. Cette loi a constitué une avancée considérable pour la reconnaissance des droits des personnes handicapées. Elle a notamment donné une définition du handicap et des réalités qu'il recouvre, avec en particulier la prise en compte du handicap mental et psychique, apporté une amélioration des revenus d'existence des personnes handicapées grâce à la revalorisation progressive de l'allocation aux adultes handicapés – l'AAH – et à la mise en place d'un système plus avantageux de rémunération des travailleurs handicapés, prévu la reconnaissance d'un droit à la compensation des conséquences du handicap par la prestation de compensation du handicap – la PCH –, enfin, la loi a permis un indéniable progrès vers une intégration sociale pleine et entière des personnes handicapées grâce à la priorité donnée à la scolarisation des enfants handicapés en école ordinaire,…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Arrêtez ! Savez-vous combien il y en a en Picardie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

…à l'accompagnement vers l'emploi, y compris dans la fonction publique, et à l'accès à la cité à travers l'obligation de mise en accessibilité des bâtiments, de la voirie et des transports d'ici à 2015.

Constituées sous la forme de groupements d'intérêt public, les maisons départementales des personnes handicapées, guichet unique dans chaque département – vous l'avez rappelé, madame la secrétaire d'État –, ont été créées pour être des lieux d'accueil, d'information, d'orientation et d'évaluation des besoins des personnes handicapées. Lors de la Conférence nationale du handicap du 10 juin 2008, le Président de la République a réaffirmé son engagement à poursuivre l'effort entrepris en faveur des personnes handicapées, et ce dans un contexte budgétaire particulièrement contraint. Cet effort financier significatif traduit clairement la volonté de préserver le financement des interventions sociales en faveur des personnes handicapées et de poursuivre la dynamique impulsée par la loi de 2005. C'est particulièrement vrai de l'engagement, pris et tenu, de revaloriser l'allocation adulte handicapée de 25 % sur la durée du quinquennat. Je ne doute pas que la Conférence nationale du handicap qui se tiendra en juin confirmera et relancera cet effort particulièrement important voulu par le Président de la République, le Gouvernement et notre majorité en faveur des personnes handicapées.

Venons-en maintenant aux principaux points de cette proposition de loi.

L'article 2 modifie les conditions dans lesquelles les maisons départementales des personnes handicapées peuvent recruter leurs personnels afin de mettre un terme au contentieux qui oppose encore trop souvent l'État et les départements sur ce sujet.

L'article 5 constitue un autre point essentiel de la proposition de loi : il prévoit la signature, tous les trois ans, d'une convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens entre chaque maison départementale, le conseil général et l'État. Cette convention devra préciser en particulier les modalités de compensation des postes que l'État s'est engagé à transférer à la MDPH dans la convention constitutive. Cela donnera à cette dernière une visibilité financière à moyen terme, ce qui en facilitera grandement le pilotage.

L'article 6 adopté par le Sénat fixait la durée minimale d'ouverture des MDPH et de leur service d'accueil téléphonique à trente-cinq heures hebdomadaires. Il a semblé plus sage à votre commission de renvoyer à la nouvelle convention pluriannuelle le soin de fixer cette durée.

La proposition de loi entend également réformer le pilotage des politiques publiques en faveur de l'emploi des personnes handicapées. L'objectif est double : réaffirmer la place du service public de l'emploi et de l'État dans le pilotage des politiques d'insertion professionnelle ; redonner une existence légale aux Cap Emploi, qui ont démontré leur compétence spécifique en termes de placement et d'orientation professionnelle en ce domaine. Tel est le sens de l'article 11, qui prévoit la signature d'une convention pluriannuelle d'objectifs et de moyens entre Pôle emploi, l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées – l'AGEFIPH – et le Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique. L'article 12 définit le rôle des organismes de placement spécialisés et les conditions dans lesquelles ils contribuent, en complémentarité avec Pôle emploi, à l'insertion professionnelle des personnes handicapées.

Autre sujet : l'article 12 bis, ajouté par la commission des affaires sociales du Sénat, modifie les critères de versement de la subvention spécifique et des aides au poste aux entreprises adaptées et aux centres de distribution de travail à domicile en supprimant la notion discutable et discutée d'efficience réduite.

Dernier sujet important qui a donné lieu à de très intéressants débats en commission, celui de l'accessibilité des bâtiments, qui constitue, rappelons-le, l'une des principales avancées de la loi de 2005.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Ah ! Cette avancée n'est pas intangible pour vous !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Économisez vos efforts, monsieur Gremetz !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Mais ça me met en colère, madame la ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Cette loi a prévu une accessibilité absolue pour les bâtiments neufs, éventuellement assortie de dérogations pour les bâtiments existants. Néanmoins, l'absence totale de dérogations pour le bâti neuf a pu poser certaines difficultés pour la construction de bâtiments confrontés à des contraintes techniques très particulières. C'est pourquoi l'article 14 bis de la proposition de loi prévoit qu'un décret en Conseil d'État, pris après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées,…

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

…définisse les conditions dans lesquelles le préfet peut autoriser, après avis conforme de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité, des mesures de substitution quand est démontrée l'impossibilité technique de respecter les exigences de mise en accessibilité de bâtiments neufs.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Hunault

Vraiment nul ! Ce ne sont pas des sous-hommes !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

C'est déroger à la loi de 2005 ! On nous avait pourtant dit que c'était intangible !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

Très attaché à cette exigence d'accessibilité, qui traduit l'engagement concret et pratique de notre société en faveur de l'intégration pleine et entière des personnes handicapées, je considère néanmoins que le dispositif proposé est équilibré et strictement encadré : premièrement, le maître d'ouvrage devra apporter la preuve de l'impossibilité technique avérée de respecter les normes en matière d'accessibilité et doit obligatoirement proposer une solution alternative ; deuxièmement, le décret en Conseil d'État prévoyant les cas où ces mesures de substitution pourront être prises sera soumis à l'avis, sans nul doute particulièrement vigilant, du Conseil national consultatif des personnes handicapées ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Relisez plutôt la loi de 2005 ! Vous êtes dans l'illégalité la plus totale !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

…troisièmement, les souplesses accordées ne pourront être de portée générale – par exemple, une mesure de substitution prise pour permettre le passage de personnes en fauteuil roulant n'exonérera pas de l'application rigoureuse des normes concernant l'accessibilité aux malvoyants – ; quatrièmement, la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité aura à se prononcer sur les mesures de substitution…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

À vous entendre, on croirait presque que ce sont des drogués !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

…proposées par le maître d'ouvrage, et le Sénat a souhaité que cet avis soit conforme, c'est-à-dire que le préfet soit tenu de le suivre ; il s'agit là d'une garantie supplémentaire.

Voilà mes chers collègues, en quelques mots, le texte qu'il nous est demandé d'examiner. Je pense que nous aurons des débats particulièrement riches…

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Jeanneteau

…qui permettront de nous retrouver, bien au-delà de nos clivages politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

J'ai reçu de M. Yves Cochet et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement.

La parole est à M. Maxime Gremetz.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Monsieur le président, comme j'ai du temps, je vais le prendre. Cela fait longtemps que je n'en ai pas eu autant. Je ne vais donc pas me presser, je vous le dis.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

On ne se lasse pas de vous entendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Je vous remercie, vous êtes bien aimable.

Tout d'abord, félicitations, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Je le dis sérieusement. Enfin une femme de parole, enfin un ministre qui respecte la loi de 2005 et qui ne vise pas à la remettre en cause, comme certains ici, en faisant adopter un amendement de dérogation à l'accessibilité !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

En ce cas, c'est une contradiction majeure et elle a changé. Madame la ministre, êtes-vous d'accord avec cet amendement proposant de déroger à l'accessibilité alors que votre secrétaire d'État a dit que c'est « un principe intangible » ? On ne peut pas déroger à ce qui est intangible.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

C'est une des questions essentielles quand on aborde le problème du handicap : il faut créer toutes les conditions pour que ces gens soient traités comme les autres, en tenant compte de leur situation particulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Nous aurons l'occasion d'y revenir très vigoureusement, parce que c'est un des points les plus importants, et celui sur lequel les associations, que vous avez sans doute reçues, sont les plus déçues et insistent auprès de nous en disant : « Ne lâchez jamais là-dessus, parce que tout le reste, c'est du pipeau si on lâche sur ce principe fondamental. » Cela me paraît tout à fait évident. C'est une affirmation importante de la loi de 2005 qu'elles ont prise au pied de la lettre. Si on acceptait une telle dérogation, on remettrait en cause un texte important qui a marqué un progrès incontestable : la loi de 2005 sur le handicap.

Voilà plus de cinq ans, notre pays se dotait d'une loi dont l'ambition, selon les propres termes du Président de la République d'alors, Jacques Chirac, était de réunir « les conditions pour que les personnes handicapées puissent vivre leur vie et la réussir ». Aujourd'hui, si la situation a quelque peu évolué, notamment grâce à l'implication régulière et continue des associations de personnes handicapées et de leurs familles, ainsi que de l'immense majorité des départements, le chantier, chacun en conviendra, est loin d'être achevé. Alors que tous nous placions nos espoirs dans la loi du 11 février 2005, notre société n'a pas réellement et fondamentalement changé de regard sur le handicap et sur les personnes qui le vivent. Un important travail d'information, de formation professionnelle et citoyenne, de sensibilisation, reste à faire. Vous avez évoqué, madame la secrétaire d'État, « le regard changé » ; je dirai que le regard a commencé à changer, mais mesurons bien tout ce qui reste à faire pour qu'il change véritablement. Cela exige évidemment la mobilisation de tous les acteurs publics pour que l'action menée par le secteur associatif soit valorisée, que les personnes handicapées soient reconnues dans l'intégralité de leurs droits, qu'enfin nous fassions en sorte qu'elles trouvent leur place, toute leur place, dans la société.

Nous aurions d'ailleurs tous à y gagner. Le président de la Fédération des associations pour adultes et jeunes handicapés – que j'ai déjà cité – déclarait à l'occasion du débat sur l'application de la loi de 2005 sur le handicap : « Chaque fois que l'on améliore les choses pour les personnes en situation de handicap, cela sert à toute la société. Chaque fois que l'on intègre une rampe d'accès dans un bâtiment, on facilite non seulement la vie des personnes handicapées mais aussi celle de la mère ou du père de famille qui sort ses enfants en poussette et celle de la personne âgée qui peine à monter les marches. »

En pensant dès la phase de construction à l'accessibilité pour tous, on prépare notre pays aux mutations sociologiques qui se profilent.

À cet égard, monsieur le rapporteur, vous avez très intelligemment retenu le seul amendement que vous avez présenté, repoussant tous ceux de l'opposition. Évidemment, on n'est jamais mieux servi que par soi-même. Charité bien ordonnée commence par soi-même, n'est-ce pas ? Cela fait trente-deux ans que je suis ici…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Trente-deux ans, c'est trop !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

… mais je n'avais encore jamais vu cela ! Maintenant j'ai tout vu ou presque !

C'est vrai, je le répète : charité bien ordonnée commence par soi-même. Tel est votre principe en l'occurrence, puisque vous n'avez présenté qu'un amendement, le seul qui ait été accepté ! On ne peut pas dire qu'il y ait une grande diversité de choix, mais c'est bien : en tant que rapporteur, vous marquerez l'histoire de la loi sur le handicap avec cet amendement. Il faut bien mettre les choses importantes à son nom.

D'ailleurs, monsieur le rapporteur, madame la ministre, je vous le dis avec force : nous ne pouvons qu'être frontalement opposés à l'article 14 bis qui a été inséré à votre initiative dans le texte de la commission, par voie d'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Effectivement, ce n'est pas vous qui l'avez inséré mais le rapporteur du Sénat. Vous l'avez repris et vous en avez rajouté une petite couche, c'est pire.

Selon la formule utilisée par la Fédération nationale des accidentés du travail et handicapés et par l'Association des paralysés de France, il s'agit d'un « chèque en blanc pour les promoteurs et les lobbies ».

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Ce sont les associations qui le disent ; moi, j'irai plus loin.

Pour vous dire franchement mon sentiment, j'ai l'impression que cette disposition est le fruit d'un compromis entre les obligations imposées par la loi et l'action des différents groupes de pression.

Ce n'est guère acceptable car les personnes handicapées qui ne parviennent pas à se loger ou à gravir les marches d'un escalier ne font pas de compromis avec leur handicap. C'est d'autant moins acceptable que l'on ajoute ainsi des difficultés supplémentaires alors que nos décisions devraient au contraire les réduire.

Monsieur le rapporteur, notre groupe a déposé un amendement de suppression de cette disposition qui, évidemment, n'a pas trouvé grâce à vous yeux ni à ceux de la majorité de la commission. Je ne vais pas tout vous mettre sur le dos…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

De toute façon, si vous avez proposé cette mesure, c'est parce qu'on vous avait demandé de le faire. Vous étiez assuré de votre coup ! Vous aviez peut-être le sentiment que vous pouviez en proposer d'autres, mais on vous a dissuadé de le faire. Vous êtes pour le moins discipliné, pour ne pas employer le mot qu'on utilise chez nous et qui risquerait de vous vexer.

Vous irez loin. Je ne sais pas où, mais loin, contrairement à quelqu'un d'indiscipliné comme moi. Pour ma part, je m'en tiens à mon avis personnel, mais je suis fier de moi…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

C'est bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

… parce que je ne me contredis pas et que tout le monde sait à quoi s'attendre.

Ainsi donc, nous avons proposé de supprimer cette disposition, sans succès. Je le regrette d'autant plus que nous étions prêts à soutenir des dispositions de ce texte dont nous ne nions pas l'importance, comme celles qui concernent les maisons départementales des personnes handicapées.

Nous partageons votre souci de pérenniser, au titre 1er, le statut des MDPH. Le choix que vous avez retenu nous semble le meilleur – voyez que nous sommes capables de le dire quand c'est bien ! La structure actuelle permet l'association de la pluralité des acteurs, ce qui est incontestablement un gage de qualité. Par ailleurs, elle permet, du moins en théorie, de garantir la dimension nationale de la politique du handicap.

À ce titre, je tiens à exprimer notre forte opposition à la tentation que certains pourraient avoir d'intégrer les MDPH dans les services des conseils généraux. Le fait que les départements suppléent trop souvent l'État, particulièrement sur le plan financier, ne doit pas servir d'argument en ce sens.

Nous ne devons pas partir du constat d'une anomalie pour adopter des mesures qui auraient pour effet de décentraliser complètement la politique du handicap et de rompre avec le principe de solidarité nationale. Or vous savez qu'il existe d'ores et déjà de grandes différences entre les départements, que ce soit sur le plan financier, géographique ou autre.

Toutefois, il faudra bien que les financements des MDPH soient assurés de manière pérenne. Vous savez qu'actuellement c'est loin d'être le cas, chers collègues, car la compensation financière promise par l'État en 2005, au titre des emplois mis à disposition par ses directions départementales, n'a pas toujours été assurée.

Parlons de la dette, toujours mise en avant pour prendre des mesures antisociales. Selon une enquête réalisée par l'association des directeurs des maisons départementales des personnes handicapées, la dette cumulée de l'État à l'égard de l'ensemble des MDPH s'élève à 34 millions d'euros. Certains établissements ont introduit des recours contre l'État. Ils ont eu raison, mais cette judiciarisation de notre système de solidarité n'est pas souhaitable. L'État devrait prendre les mesures nécessaires pour s'appliquer à lui-même les lois qu'il décide.

L'État doit par exemple éviter que se multiplient les contentieux, à l'image de celui qu'a engagé et gagné le département de Saône-et-Loire, obligeant l'État à créer et à abonder le fonds de protection de l'enfance.

Ceux d'entre vous qui sont présidents de conseil général savent que les départements dont la situation financière est intenable ne peuvent supporter l'absence de financement de l'État, d'autant moins que le Gouvernement et la majorité ont décidé de tarir les ressources des conseils généraux, et que Nicolas Sarkozy comme François Fillon affirment vouloir appliquer aux collectivités locales la politique de rigueur menée à l'échelon national.

Comment des départements jugés en situation de faillite par le président du Sénat lui-même feront-ils pour continuer à payer toutes les prestations sociales individualisées – allocation personnalisée d'autonomie, prestation de compensation du handicap, revenu de solidarité active –, qui tendent à s'accroître ?

Un autre sujet nous préoccupe particulièrement… Tout va bien, là-bas ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Certains de nos collègues parlent entre eux, je ne vais pas les interrompre ! Vous savez que je suis un homme très poli, n'est-ce pas madame Bachelot ? Quand les ministres parlent, je m'interromps pour les laisser s'entretenir et finir leur importante conversation.

Écoutez le silence…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

J'ai le temps, pour une fois que le président ne peut pas m'interrompre !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Justement, je vais la prendre cette demi-heure !

Je vous l'ai dit, monsieur le président, il y a des choses qu'il ne faut pas me faire, si on ne veut pas le payer au centuple. Les plus anciens le savent : je respecte tout le monde mais il faut aussi me respecter quand je demande la parole, sinon vous paierez pendant la nuit. Et la nuit, je suis bon, croyez-moi !

Un autre sujet nous préoccupe particulièrement mais que n'aborde malheureusement pas – ou si peu – cette proposition de loi : la scolarisation des enfants handicapés.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Madame la ministre, je vous le dis comme je le pense : les discours sur l'augmentation de la scolarisation des enfants handicapés me font bondir.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Laissez-les s'agiter un peu, parce qu'ils s'endormaient. Allez-y, messieurs, enfoncez-vous ! Vous prétendez que la scolarisation des enfants handicapés augmente ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Quels chiffres, quelles références avez-vous ? Voulez-vous que je sorte les miens ?

Un seul ministre a joué à cela avec moi en trente-deux ans : un ministre du travail qui n'avait même pas lu les statistiques de la DARES, un service du ministère de l'emploi ! Vous savez, on ne me la fait pas deux fois. Je vous prends au mot : montrez-moi vos chiffres, allez-y !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Vous m'interrompez, puis vous me dites que nous ne pouvons pas instaurer de dialogue ! Moi, je suis pour le dialogue. Si vous avez des chiffres, citez-les.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Allez-vous les sortir ces chiffres ? Si vous ne le faites pas, c'est que vous en êtes incapables !

Moi, je vais vous donner les chiffres de la Picardie, parce qu'il faut être sérieux quand on parle des handicapés, qui plus est des enfants handicapés !

Nous avons actuellement un cas national, la petite Chloé, qui est passée à la télévision. Lorsqu'elle était scolarisée, elle progressait énormément. Mais on a dit à sa mère, qui est policière d'ailleurs – mais peu importe –, qu'il n'était plus possible de la scolariser. Nous avons été obligés de nous battre comme des chiens, et même de faire un scandale, pour obtenir qu'elle soit à nouveau scolarisée ! Et vous trouvez cela normal ?

Quand j'ai demandé à connaître les chiffres de la région, on m'a répondu qu'ils étaient confidentiels. Comment le Président de la République fait-il, alors, pour donner des chiffres au niveau national ? Il les invente ? Si on ne peut pas me les donner aux niveaux départemental et régional, comment fait-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

…mais très léger. Car la population a augmenté, et le nombre d'enfants handicapés aussi. Il suffit de regarder combien sont scolarisés grâce à l'aide d'un auxiliaire de vie scolaire et le nombre d'AVS pour être fixé !

Or, madame la ministre, dans le texte qui nous est soumis, on n'en parle pas. C'est pourtant une des grandes questions. Si ces enfants ne sont pas scolarisés en milieu scolaire normal en bénéficiant de l'aide d'un AVS, ils ne progressent pas comme il convient. On a fait des expériences qui le prouvent. Vous le savez aussi bien que moi, madame la ministre.

Donc, sur ce plan, on ne peut considérer la situation comme satisfaisante. Or, dans le texte qui nous est présenté, il n'y a rien de prévu à ce sujet. On a l'air de se satisfaire de la situation actuelle.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

C'est une proposition de loi !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Oui, c'est une proposition de loi. Mais, quand nous proposons des amendements pour remédier à cette lacune, ils sautent ! Alors, puisque je vous vois si attentive et puisque vous reconnaissez que j'ai raison,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je n'ai pas dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

…je compte sur vous pour nous aider à faire adopter nos amendements !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Mme la ministre et Mme la secrétaire d'État ont toujours montré un attachement particulier pour les handicapés.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

C'est vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Nous devrions donc trouver en elles un renfort pour balayer les barrières qui se dressent devant nous. « Niet ! niet ! niet ! », nous est-il répondu ! Pour un « oui », nous entendons cent « niet » !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Le militant du parti communiste ressurgit en vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Vous aussi, vous employez le mot « niet ». De Gaulle l'employait souvent.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

C'était un grand homme !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Absolument, par la taille et par l'esprit ! Il était tellement grand qu'il avait compris qu'il ne fallait pas rester seul face aux Américains. Et il était allé à Moscou, où il a prononcé un discours historique. Pas bête !

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Je suis passionné par l'histoire, car elle nous fait réfléchir !

De Gaulle avait vu loin et avait vu juste. C'est le premier chef d'État –on a souvent tendance à l'oublier – à avoir reconnu la Chine et à avoir parlé d'un monde multipolaire, et non plus bipolaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

J'y reviens. Nous avons pris acte de la signature par cinq associations nationales d'un accord relatif à la reprise, par leurs soins, des auxiliaires de vie scolaire. La précédente convention avait été dénoncée par l'ensemble des signataires, face au constat, d'une part, de l'impossibilité de trouver une définition satisfaisante du métier d'auxiliaire de vie scolaire et, d'autre part, d'apporter une réponse convenable à la question du financement, en particulier des temps extrascolaires et périscolaires.

Cette situation ne peut nous satisfaire car elle est beaucoup trop précaire. Elle repose sur la capacité des associations et sur le respect par l'État des engagements financiers qu'il a pris à leur égard. La substitution du secteur associatif à l'État souligne une nouvelle fois la « déresponsabilisation » des pouvoirs publics.

Les associations, y compris celles qui ont signé la nouvelle convention, ont fait savoir qu'elles regrettaient la précipitation dans laquelle celle-ci avait été conclue. Cette hâte n'a permis ni de solliciter le Conseil national consultatif des personnes handicapées et le Comité national de l'organisation sanitaire et sociale, ni de s'entourer de garanties quant au financement.

Nous estimons possible de trouver une solution nationale permettant d'associer pleinement à cette démarche le ministère de l'éducation nationale ainsi que d'autres ministères, comme ceux du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Nous avions même cru que l'examen de la proposition de loi avait été reporté pour cette raison. Hélas, tel n'est pas le cas.

Pour terminer, j'aborderai une autre revendication importante des associations : la compensation intégrale. Nous considérons que c'est un principe légitime et qui ne souffre aucune discussion. Nous avions déposé un amendement en ce sens. Mais le rapporteur n'a même pas eu besoin de le commenter. L'article 40 lui a tout de suite tranché la tête !

Pour résumer, la proposition de loi qui nous est proposée constitue un progrès, mais on est loin du compte et les deux questions essentielles – accessibilité intangible et compensation intégrale – ne sont pas abordées. Tel est l'objet de la réflexion un peu générale que je vous ai livrée sur ce texte et tel est le sens des dispositions que nous aurions souhaité y voir inscrites.

Je me réjouis de vous voir si attentives, madame la ministre et madame la secrétaire d'État. Nous sommes encouragés par votre implication en faveur de cette cause. Vous l'avez montré par le passé. J'espère que, comme moi, vous n'avez pas changé. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mesdames, messieurs les députés, j'aurais aimé répondre aux attentes de Maxime Gremetz en vous invitant à voter sa motion de rejet préalable, mais c'est au contraire que je vais vous convier. Je crois en effet qu'il y a une confusion. Le texte soumis à notre examen est d'origine parlementaire. Il comporte un certain nombre de points à trancher, mais ce n'est pas une loi-cadre sur le handicap. Peut-être faudra-t-il en envisager une à l'avenir, même si la loi du 11 février 2005 qu'a portée Marie-Anne Montchamp abordait tous les sujets relatifs au handicap.

Marie-Anne Montchamp et moi-même sommes très attachées à la question de l'accessibilité. Le procès que nous a fait M. Gremetz n'est donc pas justifié.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Nous pourrons, au cours de la discussion, donner des chiffres très précis concernant le nombre d'enfants handicapés scolarisés et le nombre d'AVS. Ces chiffres sont évidemment…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

prouvés : ils figurent dans les budgets de l'éducation nationale. Il est très facile de les retracer.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Quant au droit à compensation, il mérite, bien entendu, de progresser. Il nécessite qu'un effort soit réalisé de la part, non seulement des pouvoirs publics, mais également de tout un chacun afin que notre société soit plus accueillante aux personnes en situation de handicap.

Pour tous ces motifs, mesdames, messieurs les députés, je vous invite à ne pas voter la motion de rejet préalable.

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Martine Carrillon-Couvreur.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Carrillon-Couvreur

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je tiens, en premier lieu, à souligner l'intérêt du travail parlementaire réalisé sur les maisons départementales des personnes handicapées.

Quoique récents, ces organismes sont devenus incontournables car ils remplissent le rôle indispensable de guichet unique destiné à faciliter les démarches des personnes handicapées. Mais ils rencontrent de grandes difficultés dans leur fonctionnement et ont du mal à rendre le service légitimement attendu.

Ces dysfonctionnements résultent d'une construction administrative complexe et d'une instabilité financière qui a déstabilisé ces structures.

Nous avions mis en garde contre ce risque lors des débats de 2005 sur le handicap, où a été notamment décidée la création des MDPH. Nous avions insisté sur la nécessité qu'au-delà des articles de loi soient prévus des moyens financiers pérennes suffisants pour que le service rendu soit à la hauteur des objectifs politiques annoncés.

Il aura fallu attendre que les associations d'usagers, les directeurs des MDPH et les conseils généraux fassent part de leurs difficultés – et ce à plusieurs reprises – pour que des collègues parlementaires puissent s'emparer de ce sujet.

L'initiative qui nous est proposée est importante car elle peut permettre de corriger les dysfonctionnements des MDPH, aujourd'hui reconnus par tous.

Malgré le professionnalisme des équipes de direction et leurs efforts pour structurer leur MDPH, celles-ci ont souffert de l'instabilité des personnels d'État et la diversité des statuts a entraîné des difficultés de gestion des ressources humaines.

À cela s'est ajoutée une insuffisance de garanties de financement, du fait de la non-compensation des postes d'État devenus vacants, surtout en 2008 et en 2009.

Il y a donc lieu de revoir ces points afin que l'État réponde à ses obligations en apurant ses dettes et en respectant ses engagements inscrits dans la loi.

Nous aurions pu penser que la proposition de loi qui nous est soumise – laquelle est issue d'un rapport d'information très argumenté quant aux préconisations qui y sont formulées – apporte les réponses attendues. Hélas, après un examen attentif, il apparaît qu'il n'en est rien, ce que nous ne pouvons que regretter.

Quel constat pouvons-nous dresser ?

Les difficultés des maisons départementales des personnes handicapées s'accroissent. Certaines sont au bord du dépôt de bilan.

La dette de l'État envers ces maisons est estimée à 34,3 millions d'euros. Jusqu'à présent, les collectivités locales ont accepté de se substituer à l'État pour financer les postes. Mais la situation financière des conseils généraux risque de mettre à mal leur capacité de maintenir ces avances budgétaires. Il devient donc urgent de trouver une solution de compensation non seulement pour les exercices passés, mais également pour l'année en cours. Or aucune mesure concrète n'est prise pour le moment par l'État.

Il faut aussi prévoir l'avenir et assurer une compensation totale et pérenne de ces charges financières car le montage actuel du financement des postes d'État ne peut perdurer, et la situation s'aggrave d'année en année.

Les solutions visant à stabiliser les salariés des maisons départementales des personnes handicapées correspondent à de réelles avancées. En revanche, nous sommes beaucoup plus réservés quant à la politique du handicap évoquée dans cette proposition.

Ces dernières années ont vu la création du fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, la mise en place de Pôle emploi et la réforme de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH. Ces évolutions nécessitent une adaptation permanente des acteurs et engendrent un surcroît de travail. La non-reconnaissance de cette situation a été préjudiciable à la politique de l'emploi des personnes handicapées. De plus, de nombreux moyens ont été réduits en ce domaine, j'ai déjà eu l'occasion de le souligner au sein de notre assemblée.

C'est donc avec attention que nous avons analysé votre proposition de rapprochement et de mutualisation de l'ensemble des acteurs de l'emploi. Nous partageons cet objectif, même si nous regrettons la disparition des programmes départementaux d'insertion des travailleurs handicapés, véritables outils de proximité dont les résultats étaient reconnus par tous. Nous souscrivons à cette mutualisation, mais nous craignons que les moyens financiers ne soient pas à la hauteur de l'enjeu.

Enfin, votre texte propose des mesures de substitution aux règles de mise en accessibilité dans les constructions neuves. Ce débat n'est malheureusement pas nouveau, mais vous récidivez alors même que le Conseil constitutionnel a déjà censuré les mesures législatives que vous proposiez en 2009 pour déroger à la loi en vigueur.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Carrillon-Couvreur

En agissant ainsi, vous niez l'esprit de la loi du 11 février 2005. Nous avons été alertés par les associations, qui avaient largement contribué à enrichir les propositions qui ont fondé cette loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Carrillon-Couvreur

Pour nous, il n'est pas question de revenir sur ce texte pour en limiter la portée. Il convient plutôt d'en mesurer les effets positifs et de prendre toutes les mesures nécessaires pour qu'il soit réellement appliqué. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite évoquer la place que notre société réserve aux personnes handicapées et m'interroger sur leur intégration dans la vie et dans la ville.

Les personnes handicapées doivent franchir de nombreux obstacles au quotidien pour avoir une vie la plus proche possible de celle des personnes qui ne le sont pas. Pourtant, nous le savons, les améliorations apportées aux personnes qui ont des difficultés à se déplacer ou à s'orienter sont profitables à tout le monde. Enfants, parents avec poussettes, personnes victimes d'une incapacité temporaire, personnes âgées : tous et toutes à un moment de notre vie, même si nous ne vivons pas avec un handicap, nous profitons de l'amélioration de l'habitat, de la signalétique urbaine, de l'accessibilité. Les urbanistes, les architectes ont là une lourde responsabilité, les élus aussi.

Ces améliorations ne peuvent être efficaces que si les personnes concernées sont conviées à participer à la conception des aménagements prévus pour elles. À cet égard, je voudrais saluer la création, en 2004, du conseil régional consultatif des citoyens handicapés. Créée en Île-de-France à l'initiative d'une élue écologiste, Francine Bavay, ce fut la première assemblée de ce type. Son objectif vise à améliorer la prise en compte des situations de handicap en assurant une participation active des citoyens handicapés à la vie de la région. Ici comme ailleurs, il ne s'agit pas de décréter, mais d'associer les personnes aux décisions qui les concernent et leur conviennent le mieux. Les représentants de l'État ne peuvent, en effet, avoir la majorité des voix dans les commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées.

Pour toute décision et dans toute instance concernant les personnes handicapées, leurs associations et les collectivités concernées, notamment les conseils généraux, doivent être représentées de manière équilibrée. Il ne faudrait pas déroger à ce principe. Pourtant, l'article 3 du projet de décret concernant l'accès à l'emploi d'un demandeur de l'AAH prévoit de donner la majorité des voix aux représentants de l'État pour l'attribution de cette allocation, ce qui remettrait en cause le principe participatif de ces commissions. Cela semble vous étonner, madame la ministre…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Pas du tout.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Il y a beaucoup d'ironie à nous faire voter des lois dont l'esprit est détourné ensuite par décret !

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Par ailleurs, cette proposition de loi, qui devrait améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées, doit s'accompagner des financements nécessaires pour que les personnels puissent assurer les meilleurs services possibles.

L'élargissement des horaires d'ouverture des MDPH doit s'accompagner d'une augmentation proportionnelle de la contribution de l'État aux conventions d'objectifs et de moyens.

Les personnels doivent faire face à des dossiers de plus en plus nombreux. Il convient donc que les moyens financiers soient adaptés à l'augmentation des besoins en personnel. C'est l'un des sujets que j'aborderai lors de la discussion des amendements.

S'agissant de l'emploi, je voudrais dire avec force que les contraintes de rentabilité doivent être désolidarisées de l'accompagnement médico-social. Faire respecter la loi sur l'intégration des personnes handicapées dans la vie économique est indispensable. Faire croire qu'on peut, quel que soit son handicap, « travailler plus pour gagner plus », cela n'est pas possible.

Or je constate que, dans le domaine de l'insertion par l'activité économique au sens large, les consignes du Gouvernement tendent à demander toujours plus de rentabilité à des structures qui existent d'abord pour accueillir des personnes ayant besoin de temps et d'accompagnement. En outre, le travail n'est pas la solution adaptée à toutes les formes de handicap !

Autre sujet important à mes yeux : l' article 14 bis, ajouté par le Sénat à la proposition de loi, n'y a pas sa place. Maxime Gremetz l'a dit avec une grande force, que j'ai beaucoup appréciée, mais que je ne saurais imiter. C'est pourquoi je préfère le citer : « Prendre le risque d'affaiblir la loi de 2005, qui prévoit la mise en accessibilité des bâtiments, serait un recul inacceptable, cadeau aux promoteurs, et trahison envers des personnes déjà très en difficulté sur les questions de logement d'emploi et de mobilité. »

Il est périlleux de demander au maître d'ouvrage de faire « la preuve de l'impossibilité technique » de l'adaptation des locaux là où une expertise extérieure et spécialisée serait utile pour trouver des solutions d'accessibilité.

Enfin, la proposition de loi, lorsqu'elle a été présentée au Sénat, avait été enrichie d'un amendement prévoyant d'élargir le bénéfice de la prestation de compensation du handicap à la prise en charge des aides humaines dans leur ensemble, notamment pour soutenir les personnes souhaitant rester à leur domicile.

Cela me semblait aller dans le bon sens. En effet, il faut repenser le système national de la compensation de la perte d'autonomie. Les arguments purement comptables ne peuvent se substituer à la nécessité de cette compensation de la perte d'autonomie. Un véritable service public, non délégué à l'assurance privée, doit voir le jour. Or les déclarations gouvernementales concernant la réforme de la dépendance peuvent nous laisser craindre le contraire. J'en viens donc tout naturellement au sujet dont le Président de la République nous entretient beaucoup. Et vous ne serez pas étonnés si je vous dis que je suis résolument contre les propositions étudiées par le Gouvernement en vue de rendre obligatoire une assurance privée dès cinquante ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Je suis également contre l'idée de réduire le bénéfice de l'APA aux seules personnes très dépendantes. En revanche, je suis favorable à un droit universel pris en charge par le financement public et, au-delà des seuls enjeux de moyens, je suis pour une société insérant véritablement les personnes, quel que soit leur âge, dans la vie sociale et citoyenne.

Notre objectif est de donner les moyens à toutes et à tous d'avoir le libre choix entre le soutien à domicile et la vie en établissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Pour cela, il faut offrir des services de qualité à domicile comme en établissement, développer les formations sanitaires et sociales pour les professionnels du handicap et de la dépendance, soutenir les aidants professionnels et familiaux, développer les actions de prévention et de santé au travail, faciliter l'accessibilité de toutes et tous aux espaces publics, aux loisirs, à la culture, aux sports.

Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour y parvenir. La solidarité nationale doit être à même de répondre équitablement aux besoins de chacune et de chacun. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, , mes chers collègues, six ans après l'entrée en vigueur tant attendue de la loi du 11 février 2005, qui comportait des avancées majeures tant pour la reconnaissance du handicap que pour la prise en charge par l'ensemble de notre société, force est de constater que le bilan de son application est plutôt positif. Cette loi ambitieuse a modifié notre regard sur les personnes en situation de handicap. Au rang des grandes avancées figurent la définition légale du handicap et la reconnaissance du handicap mental et psychique ; la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés et la création de la prestation de compensation du handicap ; l'installation dans chaque département d'une maison des personnes handicapées pour faciliter leurs démarches ; enfin, l'objectif d'une véritable intégration sociale des personnes handicapées, avec l'affirmation d'un droit d'accès à l'école et à l'emploi, mais aussi à la cité, grâce à la mise en accessibilité effective des bâtiments, voiries et transports d'ici à 2 015.

La loi a permis à près de 80 000 personnes de bénéficier aujourd'hui de la prestation de compensation du handicap pour un montant mensuel moyen de 980 euros. L'allocation aux adultes handicapés atteint près de 700 euros. M. Gremetz s'étant interrogé sur le nombre d'enfants scolarisés, je lui rappelle que 197 000 enfants handicapés ont été accueillis par l'éducation nationale en 2010 contre 133 000 en 2004. Tels sont les chiffres, cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

D'où les tenez-vous ? Quelles sont vos références ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Il faut aussi rappeler que 57 000 enfants font l'objet d'un accompagnement individuel.

Les maisons départementales des personnes handicapées constituent l'un des apports majeurs de la loi du 11 février 2005. Il s'agit de lieux uniques destinés à faciliter les démarches des personnes handicapées, quels que soient leur âge, leur situation personnelle et professionnelle, et à leur offrir un accès unifié aux droits et prestations auxquels elles peuvent prétendre.

Constituées en groupement d'intérêt public et placées sous la tutelle administrative et financière des conseils généraux, les MDPH regroupent les associations d'usagers, les partenaires du handicap ainsi que l'État, dont la présence doit garantir une certaine équité territoriale entre les départements. Il s'agit d'organismes de proximité aidant les personnes handicapées et leurs familles dans leurs démarches, et leur offrant une véritable possibilité d'insertion dans un monde qui, jusqu'à présent, ne les prenait pas en compte.

La forme juridique – le groupement d'intérêt public – constitue également un atout. Elle a du reste été adoptée par la quasi-totalité de ces établissements. C'est d'autant plus intéressant que cette structure est désormais constituée pour une durée indéterminée.

Les maisons départementales des personnes handicapées ont donc contribué à garantir une indéniable efficience, mais aussi, et plus encore, une véritable humanisation du dispositif, une authentique proximité avec la personne en situation de handicap.

Pour autant,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Ah ! Ça se gâte ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

…ce premier bilan, positif, ne doit pas masquer les difficultés qui subsistent dans plusieurs domaines. Les surmonter est précisément l'objectif de cette proposition de loi.

Si les MDPH se sont progressivement installées sous l'égide des conseils généraux, leur situation varie selon les départements. On a pu noter certains points communs dans leur fonctionnement – ou leur dysfonctionnement.

Le fonctionnement des MDPH s'est heurté à trois types de difficultés : des lourdeurs administratives ; des moyens financiers insuffisamment garantis à court terme ; l'instabilité des personnels, liée à la diversité de leurs statuts.

Les membres du personnel des MDPH relèvent en effet de statuts multiples, parfois bien différents : fonctionnaires mis à disposition par l'État ou par le conseil général, personnels de droit public ou de droit privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

En particulier, les personnels de l'État mis à la disposition des MDPH ont la possibilité de réintégrer leur administration d'origine au terme d'un simple préavis de trois mois. Aujourd'hui, sur 1 600 postes d'agents de l'État, près de 600 sont vacants.

Le dispositif prévu dans la proposition de loi constitue une solution efficace, car il porte de trois à cinq ans la durée de mise à disposition des fonctionnaires de l'État et de trois à six mois celle du préavis, de façon à mieux anticiper le retour des agents.

Par ailleurs, un système de mise à disposition contre remboursement a été instauré, ce qui conduit l'État à verser une subvention de fonctionnement en début d'année, et non a posteriori, pour compenser des postes qui ne seraient pas transférés. En outre, le recrutement des agents pour une durée indéterminée ouvre des perspectives de carrière. Enfin, la proposition de loi améliore la formation des agents.

Sur le plan financier, la signature d'une convention triennale entre chaque maison départementale, l'État, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et le conseil général clarifiera les relations financières entre ces différents acteurs et donnera une meilleure visibilité budgétaire aux maisons départementales.

Deux des autres points abordés par ce texte font partie des préoccupations principales des personnes en situation de handicap ; je veux parler de la compensation et de l'accessibilité.

Sur la compensation, d'abord, nous nous félicitons, avec tout le groupe Nouveau Centre et apparentés, de la mesure visant à mieux prendre en considération les aides ménagères.

Nous nous réjouissons également de la création d'un budget annexe pour le fonds de compensation, désormais individualisé au sein des MDPH ; il devrait permettre de remédier aux dérives qui ont été constatées et qui relèvent d'une confusion sinon des genres, du moins des caisses.

Par ailleurs, nous sommes tout à fait favorables aux dispositions tendant au rapprochement et à la mutualisation entre tous les acteurs de l'emploi – Pôle emploi, le réseau national des Cap emploi, les programmes régionaux d'insertion des travailleurs handicapés, l'État, l'AGEFIPH, les services de placement spécialisés dans l'insertion professionnelle des personnes handicapées –conformément aux préconisations du rapport Busnel.

Enfin, la question de l'accessibilité suscite l'inquiétude des associations représentatives. Alors que les assouplissements de réglementation existants concernent le bâti ancien, l'article 14 bis s'applique au bâti neuf. Or une telle disposition ne saurait contrevenir à la loi qu'à deux conditions : d'une part, qu'il ne s'agisse que de mesures de substitution, et non de dérogations ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

…d'autre part, que l'on n'ouvre pas une brèche dans laquelle tous pourraient s'engouffrer.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Voilà pourquoi nous serons très attentifs à l'encadrement de ces mesures de substitution. De ce point de vue, les trois garde-fous proposés – avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées, avis de la commission consultative départementale de sécurité et d'accessibilité, accord du préfet – nous rassurent. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Ainsi, cinq ans après la promulgation de la loi de 2005, on a dressé le bilan de son application, ce qui a permis d'identifier les dysfonctionnements du système et les attentes des publics concernés. C'est précisément la volonté d'y remédier et d'améliorer le dispositif existant qui semble avoir animé les auteurs de la proposition de loi – laquelle constitue, à n'en pas douter, une avancée significative.

Pour nous, et conformément à l'esprit de la loi de 2005, il convient de s'appuyer sur deux piliers : le pilier humain, c'est-à-dire les moyens humains mis au service des personnes en situation de handicap ; le pilier législatif et réglementaire, qui consiste à fixer des normes et des objectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

Vous oubliez le troisième, le pilier dérogatoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

À titre personnel, j'appelle votre attention sur l'échéance de 2015. Car, s'il faut continuer d'accroître et de déployer les moyens humains et financiers permettant d'accompagner les personnes en situation de handicap, cette échéance sera difficile à tenir, notamment en ce qui concerne le bâti ancien.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Toutefois, l'allègement, la simplification et la rationalisation des procédures prévues par le texte devraient permettre de réduire les délais, et surtout de résorber les stocks de dossiers accumulés, pour le plus grand profit des usagers.

Pour toutes ces raisons, le groupe centriste et apparentés soutiendra ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, six ans après la promulgation de la loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, nous pouvons être fiers du travail accompli : il s'agit d'une avancée considérable pour la reconnaissance des personnes handicapées que compte notre société.

Du reste, le budget consacré aux personnes handicapées, qui était de 32,6 milliards en 2005, a augmenté de 25 %, pour dépasser 41 milliards aujourd'hui. Cela atteste que les droits de ces personnes qui vivent à nos côtés et le respect que nous leur devons sont pris en considération.

Le droit à la compensation était l'un des principes fondamentaux de la loi : la personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. C'est le projet de vie de la personne concernée qui est mis en avant. Ce droit est concrétisé par la prestation de compensation, la PCH, dont le montant moyen atteint aujourd'hui 850 euros, contre 400 en 2005 : il faut le rappeler.

La volonté du législateur était de changer le regard que la société, et chacun d'entre nous, porte sur nos concitoyens handicapés. À cette fin, le droit à compensation s'est accompagné de la revalorisation de l'allocation pour adulte handicapé – de 25 % d'ici à 2012. Cela aussi, il faut le souligner.

Nous pourrions encore évoquer la mise en accessibilité des bâtiments et des voiries, les outils renforçant l'insertion des handicapés dans la vie professionnelle, l'accueil des enfants dans les écoles. Sur ce dernier point, un effort très soutenu a été consenti dans toutes les communes de France.

L'obligation d'emploi est toujours de 6 %, mais les entreprises qui ne la respectent pas encourront des sanctions plus sévères qu'auparavant. Dans la fonction publique a été créé le fonds pour l'insertion des personnes handicapées, dont la mission est similaire à celle de l'AGEFIPH.

Enfin, la loi a créé une maison des personnes handicapées dans chaque département, sous la direction du conseil général. Ce guichet unique est investi d'une mission d'accueil, d'information, d'accompagnement et de conseil des personnes handicapées et de leurs familles, ainsi que de sensibilisation de tous les citoyens au handicap.

L'application d'une réforme d'une telle ampleur fait l'objet d'un suivi attentif du Gouvernement – de vous, mesdames les ministres –, du Parlement et des associations. La présente proposition de loi est justement issue d'un rapport du sénateur Paul Blanc, qui dressait un premier bilan de l'installation des maisons départementales du handicap, quatre ans après le vote de la loi.

Car, malgré la forte implication des conseils généraux et de la CNSA, qui ont contribué à leur installation, le fonctionnement des MDPH demeure entravé par une certaine instabilité des personnels, par le fait que les moyens financiers dont elles disposent sont insuffisamment garantis à court terme et par la subsistance de quelques lourdeurs administratives dans l'instruction des demandes, qu'il convient de corriger.

On note également des dysfonctionnements dans le pilotage des politiques d'insertion professionnelle des personnes handicapées. Certes, on a réduit le nombre d'entreprises n'employant aucun travailleur handicapé, on a augmenté le nombre d'accords collectifs portant sur l'emploi de personnes handicapées, mais la situation reste contrastée suivant les secteurs, et nous pouvons encore progresser.

Voilà pourquoi, en ce qui concerne la fonction publique, le Premier ministre a signé en décembre dernier une circulaire comprenant, pour chaque ministère, des plans pluriannuels opposables de recrutement de personnes handicapées et fixant des objectifs chiffrés jusqu'au 31 décembre 2012.

Enfin, et alors qu'aucune dérogation ne devait concerner la mise en accessibilité des bâtiments neufs, le Sénat a souhaité ajouter à l'article 14 bis un dispositif prévoyant des mesures de substitution en cas d'impossibilité avérée de satisfaire les exigences réglementaires et légales.

En effet, et bien que le neuf ne doive faire l'objet d'aucune dérogation, un décret de 2006 relatif à l'accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d'habitation en a prévu plusieurs. Ce décret permettait au préfet de département d'accorder ces dérogations en raison d'une impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment, notamment des caractéristiques du terrain, de la présence de constructions exigeantes ou de contraintes liées au classement de la zone de construction, en particulier au regard de la réglementation de prévention contre les inondations – ce n'est pas rien.

Or ce décret a été annulé par le Conseil d'État, alors que plusieurs permis de construire avait été accordés sur son fondement.

Le rapporteur du Sénat explique très bien la situation à laquelle il a été confronté : « L'éthique de conviction m'inclinerait au maintien des principes sans prendre en compte les dommages que causeront ces destructions ; l'éthique de responsabilité, autrement dit le principe de réalité, m'a conduit à rechercher une solution qui permette de concilier le principe que nous nous sommes fixé d'une accessibilité sans faille pour le neuf…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

…et la poursuite des projets de construction déjà autorisés. »

C'est donc dans cette optique, et uniquement dans cette optique, que nous pouvons accepter l'article 14 bis. Nous y reviendrons. Il ne s'agit nullement de changer de philosophie sur cette question ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

…le volontarisme réaffirmé lors de la dernière conférence du handicap, dans le cadre du Grenelle, et les importantes avancées obtenues sur ce point le certifient.

Mes chers collègues, l'accessibilité ne doit pas être vécue comme une contrainte. Des solutions existent, si l'on aborde la question suffisamment tôt, en amont de tout projet. Mais je reconnais qu'il est parfois difficile de respecter toutes les règles, toutes les normes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Au demeurant, suffit-il de se satisfaire de ces règles et de ces normes ? Assure-t-on ipso facto l'accessibilité aux personnes handicapées ?

Je mesure chaque jour, sur le terrain, les difficultés auxquelles sont confrontées les personnes qui se retrouvent en situation de handicap à la suite d'un accident, de l'évolution d'une maladie ou du fait du vieillissement, et qui sont contraintes de déménager parce que leur logement ne peut être adapté à leur état.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Je sais aussi l'impossibilité de se déplacer pour se rendre chez des amis ou dans sa famille. Trop de personnes handicapées disent combien il leur est difficile de prendre part à la vie sociale.

Je mesure enfin, mes chers collègues, que l'accessibilité ne dépend pas uniquement de normes, de règles d'aménagement applicables aux bâtiments. Ce serait trop simple de crier : « Accessibilité ! Accessibilité ! » Cela suffirait-il à résoudre tous les problèmes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

L'accessibilité dépend aussi de la disposition de chacun de nous, de tous nos concitoyens, à aider, accompagner et soutenir celles et ceux qui, en raison de leur différence, de leur faiblesse, de leur handicap, en ont besoin. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Aider quelqu'un à monter la marche qui l'empêche d'accéder à un bâtiment, c'est cela, l'accessibilité. Aider une personne malvoyante à traverser la rue, c'est aussi de l'accessibilité. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Je voudrais que l'on introduise de l'humain dans cette accessibilité.

J'ai dans mon équipe municipale un élu handicapé en fauteuil roulant. Eh bien, cet élu considère que l'accessibilité aux podiums des salles des fêtes ou des kermesses, rarement équipés de rampes, ne lui a jamais fait défaut, car il a toujours bénéficié d'un coup de main, d'un geste de solidarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

En outre, si l'on pose le principe de l'accessibilité pour tous, qu'en est-il des personnes handicapées mentales ? Nous devons envisager cette question. Comment prendre en compte les difficultés liées à la nature de leur handicap et leur permettre d'accéder à une véritable citoyenneté ?

Battons-nous par ailleurs pour que le pictogramme « S3A », symbole d'accueil, d'accompagnement et d'accessibilité des personnes handicapées, puisse leur permettre de repérer des personnes à même de les aider, des lieux et des activités qui leur sont destinés.

Cette proposition de loi, mes chers collègues, vient réaffirmer la volonté, je dirai même le volontarisme, du législateur et du Gouvernement – nous savons votre détermination en ce domaine, mesdames les ministres – : il s'agit de favoriser une toujours plus grande intégration des personnes handicapées dans notre société.

Lever les difficultés d'application de la loi de 2005, c'est redonner du souffle à cette réforme d'envergure qui n'a pas encore fini de porter tous ses fruits, c'est dire et apporter tout notre soutien aux parents, aux accompagnants et aux associations qui mènent un travail remarquable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, le texte de loi qui nous est proposé ne manque pas d'intérêt : il permet d'apporter à la loi du 11 février 2005 des adaptations et ajustements nécessaires, des sécurisations même, si je me réfère aux articles permettant de mieux asseoir le statut juridique des MDPH ou d'encadrer les spécificités des personnels.

Certains insisteront probablement sur le problème posé par les délais d'instruction incroyablement longs des dossiers transmis aux MDPH. D'autres ne manqueront pas de dénoncer les difficultés encore rencontrées pour la scolarisation en milieu ordinaire des enfants en situation de handicap. D'autres enfin diront nos interrogations sur les moyens réellement affectés aux outils d'insertion permettant de définir de vrais projets de vie.

Pour ma part, je consacrerai mon intervention à un élément placé totalement en dehors du processus vertueux qui consiste à améliorer la situation de ceux de nos concitoyens confrontés à un handicap, je veux parler de l'article 14 bis, ajouté à la proposition de loi à la suite d'un amendement sénatorial.

De quoi s'agit-il ? Ni plus ni moins d'une remise en cause des acquis de la loi du 11 février 2005, qui faisait déjà suite aux engagements de la loi du 30 juin 1975 imposant la mise en accessibilité des bâtiments – quarante ans qu'il est question de l'améliorer !

Il est proposé une nouvelle fois d'assouplir les règles de dérogation aux obligations d'accessibilité, car il ne s'agit pas de la première tentative. Ainsi, en 2006, la loi portant engagement national pour le logement a élargi à des dispositions spécifiques les motifs de dérogation à l'accessibilité – je pense en particulier aux logements temporaires.

Lors de l'examen de la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, le sénateur Dominique Braye a proposé une dérogation aux règles d'accessibilité dès lors que les travaux sont réalisables ultérieurement.

En décembre 2009, l'article 53 du projet de loi de finances rectificative pour 2009 a étendu les dérogations aux règles d'accessibilité en exonérant les logements saisonniers ; heureusement, il a été censuré par le Conseil constitutionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

L'année dernière, au moment du Grenelle de l'environnement, le Gouvernement avait à nouveau souhaité établir des dérogations mais y avait renoncé sous la pression des associations.

Avec cet article 14 bis, ce n'est pas aux bâtiments anciens ou à rénover que vous vous attaquez mais aux logements neufs, auxquels vous voulez voir appliquer de nouvelles dérogations. Il s'agit d'une brèche et, comme on le sait, lorsqu'il y a une brèche dans une digue, celle-ci ne tient pas très longtemps.

Pourquoi cette tentation incessante ? Ce n'est pas votre volonté de faciliter la vie des personnes en situation de handicap que je mets en cause mais votre hypocrisie. Ce n'est pas l'accessibilité en elle-même qui pose problème, ce sont les surcoûts financiers qu'elle engendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Sirugue

Il n'y a pas de honte à dire ces choses-là, mais il y a scandale à tenir des discours tonitruants sur l'accessibilité à l'horizon de 2015 tout en cherchant, par des dérogations, à en limiter la réelle mise en oeuvre.

Oui, la mise en accessibilité a un coût. Oui, elle a des incidences sur les prix de journée en établissement et donc sur le reste à charge. Dites-le de cette manière plutôt que d'essayer de développer des arguments visant à nous faire croire que l'on ne serait pas capables de construire des bâtiments neufs qui seraient accessibles.

De qui se moque-t-on ?

Cet après-midi, en commission, le président Méhaignerie a précisé que, dans d'autres pays européens, l'accessibilité s'appliquait à 10 % des logements et non 100 % comme chez nous. Poussons le raisonnement plus loin, monsieur le président de la commission : cela implique-t-il que, pour les députés de la majorité, l'heure n'est plus à l'accessibilité généralisée des bâtiments aux personnes handicapées, principe pourtant inscrit au coeur de la loi du 11 février 2005 ?

Si tel est le cas, il faut en conclure que nous ne nous situons plus dans le cadre d'une loi d'adaptation ou de correction mais d'une nouvelle politique qu'il vous faut dès lors énoncer clairement.

Cela me conduit à deux réflexions de conclusion.

Les personnes en situation de handicap ont droit à une vie sociale qui passe par des logements adaptés, mais aussi par la possibilité de se rendre chez d'autres personnes non-handicapées, leur famille, leurs amis, sinon leur vie sociale se limitera à la possibilité de côtoyer d'autres handicapés.

Au nom de quoi les personnes en situation de handicap devraient-elle se voir condamnées à n'habiter que des rez-de-chaussée ou des bâtiments adaptés réservés à leur usage ?

Enfin, chacun sait que cette question de l'accessibilité des bâtiments ne se limite pas aux personnes en situation de handicap. Une récente table ronde consacrée à la question de l'habitat et du maintien à domicile dans le cadre de la réforme de la dépendance s'est tenue au sein de notre commission le 2 février dernier. Elle a conclu à la nécessité d'anticiper les problèmes d'accès au logement pour une population vieillissante confrontée à la dépendance. Conclusion claire, mais visiblement pas pour tous.

Ce débat est essentiel et vous voyez bien qu'il n'a rien de technique. Il ne devrait pas susciter d'arguties mais de vrais et nobles échanges. Peut-être les aurons-nous au cours de cette séance. À défaut, nous ne pourrons cautionner une remise en cause de l'esprit même de la loi du 11 février 2005. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bérengère Poletti

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, les maisons départementales des personnes handicapées ont constitué un progrès incontestable. La loi du 11 février 2005 les a mises au coeur de nos politiques et a permis des avancées majeures.

Pour avoir écrit un rapport sur la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, dont les missions s'exercent à la fois au service des personnes handicapées et des personnes âgées, je peux dire que le suivi des personnes handicapées donne davantage satisfaction, grâce notamment aux MDPH. En revanche, la manière dont leur gouvernance a été conçue a placé ces maisons face à de multiples dysfonctionnements.

Le statut juridique retenu a été le groupement d'intérêt public, solution de compromis permettant de préserver l'autonomie des départements, de garantir la présence de l'État et d'associer à la gouvernance les multiples partenaires qui concourent au fonctionnement des MDPH, notamment les associations de personnes handicapées, la direction et la tutelle de ces établissements étant confiées aux présidents de conseil général. Ce statut permettait de rassembler les énergies, les compétences et les financements pour constituer des structures innovantes d'accueil et d'accompagnement des personnes handicapées.

Les MDPH ont repris les missions des COTOREP, des CDES et des sites pour la vie autonome, mettant ainsi fin au parcours du combattant souvent dénoncé.

Le choix a été laissé au personnel de l'État d'aller ou non dans ces maisons – choix irréversible. Lorsque les fonctionnaires désirent conserver leur statut sans s'engager envers ces établissements, l'État n'a pas obligation de compenser les salaires. C'est ainsi qu'on a vu apparaître dans certains MDPH des directeurs devant gérer jusqu'à huit statuts différents. La proposition de loi devrait permettre de résoudre ces problèmes de gouvernance.

L'article 14 bis précise les conditions dans lesquelles des mesures de substitution peuvent être prises pour répondre aux exigences d'accessibilité des personnes handicapées lors de la construction d'un bâtiment.

L'assouplissement, pour les bâtiments neufs, des règles de mise en accessibilité prévues dans le code de la construction et de l'habitation n'est, à mon sens, pas acceptable. Il est impensable de revenir en arrière. Invoquer les impossibilités techniques et urbanistiques ne me semble pas être un bon argument. Si les constructeurs veulent réduire certains coûts, qu'ils s'intéressent donc à la définition de nouveaux standards dans la construction. Je pense pour ma part que si nous réduisons les contraintes sur la construction, nous exonérerons les professionnels d'une réflexion qui serait pourtant bénéfique pour tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Bérengère Poletti

Adapter un logement ou adapter un espace public, c'est rendre la mobilité plus facile pour tout le monde : pour les personnes handicapées, pour les personnes âgées, dont le nombre augmente, pour les parents avec leurs nouveau-nés, pour les personnes malades, pour les blessés. Nous avons tous à gagner d'une société plus adaptée. Il nous faut dégager un consensus entre tous les partenaires afin de définir de nouvelles normes à des prix plus compétitifs.

J'ai donc déposé un amendement de suppression de l'article 14 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de Bérengère Poletti

Par ailleurs, il me semble évident qu'il faut prévoir une disposition tout aussi importante pour l'aménagement des espaces publics classés.

L'opposition de l'architecte des Bâtiments de France à l'accessibilité du patrimoine ancien classé aux personnes handicapées en fauteuil roulant est dans certains cas révoltante.

Debut de section - PermalienPhoto de Bérengère Poletti

Comment expliquer, de nos jours, aux personnes à mobilité réduite que nos chefs-d'oeuvre d'architecture ne leur sont pas accessibles ?

Comment expliquer qu'avec les moyens modernes dont nous disposons, l'architecte des Bâtiments de France puisse, de façon souveraine, refuser de mettre en oeuvre des moyens d'accessibilité, arguant du fait qu'ils dénatureraient le patrimoine ?

Comment expliquer que le souci de préserver le bâtiment ancien s'efface lorsqu'il s'agit d'art – la pyramide du Louvre – mais pas lorsqu'il s'agit d'accessibilité aux personnes à mobilité réduite ?

J'ai donc déposé un amendement à ce sujet.

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, la question de l'accessibilité est entrée par la porte des MDPH pour nous permettre d'échanger et de produire, je l'espère, un texte qui nous placera dans la modernité et non dans le repli sur soi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Pinville

Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, certes, beaucoup de progrès ont été enregistrés dans le domaine de l'accompagnement des personnes handicapés depuis la mise en place des MDPH, et je m'en félicite. Un point noir demeure, celui de la scolarisation et la formation. En effet, 83 % des personnes handicapées ont un niveau scolaire inférieur au baccalauréat.

Un problème criant se pose, celui des décisions d'orientation scolaire, qui représentent près de 40 % des demandes concernant des enfants soumises à la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ; je rappelle que chaque enfant bénéficie d'un projet personnalisé de scolarisation, qui doit être réévalué chaque année.

La réussite de ce projet personnalisé de scolarisation est en réalité entravée par la difficulté de trouver et de conserver des auxiliaires de vie scolaire.

Le 4 juin 2010, le tribunal administratif de Pau a tranché en faveur de sept familles d'enfants handicapés et a condamné le ministère de l'éducation nationale à revoir son « refus implicite » d'attribuer des auxiliaires de vie scolaire à ces enfants et à payer 300 euros à chaque famille pour les frais de procédure engagés.

Il faut le dire, le ministère de l'éducation nationale ne joue pas le jeu et cette décision doit nous alerter sur la nécessité de mettre en oeuvre un vrai statut des auxiliaires de vie scolaire. Le mode de recrutement, la précarité, l'absence de formation et le changement fréquent AVS ne sont pas propices à une bonne intégration scolaire des enfants handicapés.

Quelles peuvent être les solutions ?

Avant d'évoquer les critères qui pourraient conduire les enfants handicapés à bénéficier d'un suivi efficace, je voudrais vous faire part d'un exemple significatif des difficultés rencontrées par les familles. Il s'agit en l'occurrence d'une famille à qui la MDPH a accordé douze heures de présence d'une auxiliaire de vie scolaire en octobre 2009. Le petit garçon a pu bénéficier de l'accompagnement de cette auxiliaire d'avril à juillet 2010, date à laquelle elle a démissionné pour convenances personnelles. À la rentrée 2010, personne n'a été nommé pour la remplacer et cette situation perdure jusqu'à ce jour. Quand on fait le bilan de l'accompagnement, on ne peut être qu'interpellé par le fait que cet enfant n'a bénéficié d'une AVS qu'un peu plus de deux mois depuis le début d'octobre 2009.

Cet exemple montre que la MDPH, après avoir attribué des heures d'AVS, ne dispose pas de moyens pour contrôler l'application de ses décisions. Si les services de l'éducation nationale, comme dans le cas que j'évoquais, sont peu enclins à effectuer un recrutement, quels sont les moyens réels d'action pour les familles ? C'est proprement insupportable !

M. le ministre de l'éducation nationale a beau prétendre avoir l'intention d'accueillir dans les écoles 10 % d'enfants handicapés en plus, la vraie question est de savoir quels moyens il compte mettre en oeuvre pour y parvenir.

Il est donc nécessaire de mettre fin aux dysfonctionnements qui pénalisent ces enfants, de définir des critères de recrutement, de mettre en place des plans de formation et d'assurer un avenir professionnel aux auxiliaires de vie scolaire.

J'estime que la solution doit émaner des pouvoirs publics : elle permettrait d'associer pleinement le ministère de l'éducation nationale et les ministères du travail, de la solidarité et de la fonction publique. Cela doit être possible s'il y a une réelle volonté politique.

Je pense qu'il faut dépasser les conventions signées par cinq associations nationales pour la reprise, par leurs soins, des auxiliaires de vie scolaire. Nous devons envisager une professionnalisation des métiers de l'accompagnement et conforter les emplois d'AVS, en un mot donner une définition du métier d'auxiliaire de vie scolaire et apporter une réponse satisfaisante à la question du financement, particulièrement pour ce qui relève des temps extrascolaire et périscolaire.

La situation actuelle n'est pas satisfaisante car elle est beaucoup trop précaire. Elle repose sur la capacité des associations et sur le respect par l'État des engagements financiers qu'il a pris à leur égard. Cette substitution du secteur associatif à l'État souligne une nouvelle fois le manque de volonté politique du Gouvernement.

Les enfants, leurs familles, les associations attendent des réponses claires. Mesdames les ministres, essayons de ne pas les décevoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Binetruy

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, notre législation en faveur des personnes en situation de handicap repose sur deux textes fondamentaux : la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées du 30 juin 1975 et la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qu'avait portée avec conviction Marie-Anne Montchamp dans une précédente fonction ministérielle.

Tout le monde s'accorde à reconnaître les avancées considérables qu'ont apportées ces deux textes.

La loi de 1975 a institué l'allocation aux adultes handicapés, financée par l'État, que le Président de la République a voulu majorer de 25 % en cinq ans lors de la conférence nationale sur le handicap du 10 juin 2008.

Alors que l'on ne cesse d'évoquer le désengagement de l'État, la dépense d'AAH a progressé de 53 % en dix ans. Cette progression est imputable à parts quasi égales à l'augmentation de 22,75 % du nombre de bénéficiaires et à celle de 24,44 % de l'allocation moyenne. Cette dépense est ainsi passée de 4 milliards d'euros en 2000 à 6,1 milliards en 2010, et la progression risque de se poursuivre selon les prospectives du rapport de la Cour des comptes sur l'évolution du coût de l'AAH présenté aux commissions des finances et des affaires sociales à l'automne dernier.

La loi du 11 février 2005 a reconnu d'autres droits à la personne handicapée, comme la compensation du handicap et le droit à l'accessibilité, et créé les maisons départementales des personnes handicapées, lieux uniques d'accueil en charge de l'information, de l'orientation et de l'évaluation des personnes handicapées.

Le principe même des MDPH, guichet unique pour répondre aux besoins des personnes handicapées, est particulièrement apprécié. Mais force est de constater que nombre de difficultés subsistent pour permettre un fonctionnement optimal de ces structures.

Je soulignerai d'abord le dévouement exemplaire des personnels et de leur encadrement ; ils m'ont fait part d'un sentiment de frustration, regrettant de ne pouvoir être plus disponibles pour apporter des réponses totalement satisfaisantes à la difficulté de certaines situations individuelles.

La proposition de loi du sénateur Paul Blanc apporte des précisions utiles sur le fonctionnement des MDPH. Elle fige le statut de GIP, qui semble le mieux adapté compte tenu de la multiplicité des acteurs intervenant dans ces politiques : l'État, les conseils généraux, l'assurance maladie, la CAF, les mutuelles, mais aussi des associations particulièrement puissantes et efficaces dans le domaine du handicap, que je tiens à saluer.

Une autre disposition bienvenue vise à stabiliser les personnels des MDPH pour éviter les mouvements préjudiciables à leur fonctionnement qui ont prévalu jusque-là. Il faut souligner l'effort de l'État en faveur du programme 157 en matière de dotation aux MDPH, programme dont les crédits passent de 21,7 millions en 2010 à 47,2 millions en 2011, auxquels il faut ajouter les 60 millions versés par la CNSA.

La disposition ouvrant aux commissions des droits à l'autonomie des personnes handicapées la possibilité de siéger en formation restreinte devrait permettre un traitement plus rapide de certains dossiers.

Le texte précise, par ailleurs, le pilotage et le financement de la politique de l'emploi des personnes handicapées par la conclusion de conventions d'objectifs et de moyens entre les différents partenaires.

L'article 14 bis, qui fait débat, aborde la délicate question de la mise en accessibilité des lieux publics pour 2015. Quand l'échéance arrive, quand les adaptations sont complexes, parfois impossibles, et que par conséquent les coûts sont très élevés, on peut comprendre l'inquiétude des élus, notamment. Sans aller jusqu'à des dérogations, il ne me paraît pas choquant de prévoir des mesures de substitution bien encadrées. C'est facile de tenir un discours à la tribune, c'est plus difficile quand on est aux responsabilités sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Binetruy

La proposition soumise à notre examen est un texte utile élaboré par des parlementaires qui ont une connaissance concrète du monde du handicap et qui ont souhaité apporter quelques précisions nécessaires aux lois fondamentales qui régissent la politique du handicap. Je vous invite, mes chers collègues, à la voter sur tous les bancs de l'hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, la maison départementale du handicap a représenté une véritable avancée pour les personnes en situation de handicap : amélioration de l'accueil, de l'instruction des dossiers, de la prise en charge dans la continuité et à tous les âges.

Six ans après leur création par la loi sur l'égalité des chances de 2005, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui se donne pour objectif d'améliorer leur fonctionnement.

À l'échelle nationale, d'importantes disparités ont pu être enregistrées entre les MDPH. Elles sont préoccupantes en termes d'équité territoriale. Une étude établie par la CNSA souligne la corrélation entre le potentiel fiscal des départements et les ressources qui leur sont allouées, contribuant ainsi à ces inégalités. La CNSA, reconnue comme tête de réseau, chargée de les résorber n'a pas réussi à accomplir sa tâche, faute d'harmonisation des informations.

De plus, l'État n'a pas assumé la compensation du personnel initialement mis à disposition. Il s'est défaussé de ses responsabilités financières et a accumulé une dette de près de 19 millions d'euros envers les MDPH.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Vos chiffres ne sont pas à jour !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Tels sont les deux principaux problèmes que rencontrent ces structures. Nous nous attendions à ce que la proposition de loi s'y attaque. Peine perdue, puisque nous avons affaire à un texte dépourvu d'ambition, qui ne s'attelle pas à ces questions majeures. En ne considérant pas le fonctionnement des MDPH dans sa globalité, la loi ne résout rien.

De plus, elle ne répond pas aux attentes des personnes en situation de handicap. Ces attentes, six ans après la loi de 2005, sont pourtant fortes.

La première de leurs aspirations est de vivre librement au milieu de tous et de pouvoir évoluer dans la cité. C'est ainsi qu'en 2005 nous avions inscrit dans la loi un principe d'accessibilité aux bâtiments et équipements publics existants, mais également aux constructions neuves. Or voilà que la proposition de loi, dans son article 14 bis, revient sur la norme que nous avions édictée. Ce n'est pas la première fois que la majorité tente d'écorner ce principe. Lors du Grenelle de l'environnement et dans le cadre d'une loi de finances rectificative pour 2009, vous aviez déjà tenté d'introduire des dérogations, sans succès. Aujourd'hui, vous nous assurez que cet article est équilibré et prudent. Mais comment parler d'équilibre lorsqu'une dérogation est prévue en cas de difficulté technique ? De quelle difficulté technique parlons-nous concernant le bâti neuf ? La maîtrise technique permet aujourd'hui de satisfaire à ces exigences, même en montagne.

À moins que ces dérogations ne cachent en réalité le problème financier des surcoûts. Dans ce cas, quelles propositions faites-vous pour respecter la loi que vous avez votée en 2005 ?

Les personnes handicapées ont d'autres attentes, tout aussi importantes. Un enfant atteint par un handicap doit pouvoir être scolarisé en milieu ordinaire et bénéficier du soutien d'un auxiliaire de vie scolaire. Comment un texte portant sur la politique du handicap fait-il l'impasse sur la situation des AVS ? Sur le terrain, nous savons que le pilotage du dispositif est catastrophique. Il est indispensable de pérenniser ce métier essentiel et d'intégrer les AVS dans l'éducation nationale.

Les personnes handicapées espèrent également une évolution de leurs conditions d'existence. La prestation compensatrice d'autonomie est reconnue par l'ensemble des acteurs comme mal définie et mal adaptée. Alors que la version initiale de la proposition de loi s'attelait à ce problème, le Sénat a supprimé cette disposition à l'initiative du Gouvernement.

Enfin, les personnes handicapées réclament une évolution du calcul de l'AAH et la suppression de la prise en compte des revenus du conjoint dans son attribution.

Je le répète, nous ne retrouvons rien de tout cela dans cette proposition de loi. En l'état, elle n'améliorera pas le quotidien de nos millions de concitoyens atteints d'un handicap. Pire, en acceptant de faire machine arrière pour l'exigence d'accessibilité, vous leur envoyez un signal terrible, celui du renoncement. Ce n'est pas acceptable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, les maisons départementales des personnes handicapées sont une indéniable avancée que l'on doit à la loi handicap du 11 février 2005. Je rappelle que ce texte, porté par Mme Montchamp, avait été voté par la droite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Dalloz

La création des MDPH, de même que leur constitution en groupement d'intérêt public placé sous la tutelle administrative et financière des conseils généraux, avait été motivée par la nécessité d'offrir aux personnes handicapées un accès unifié pour l'ensemble des démarches afférentes à leur situation.

À l'occasion de l'examen de ce texte, je souhaite aborder trois points.

Tout d'abord, les disparités territoriales de répartition des dossiers, question que l'article 8 entend régler. S'il est louable de ne pas pénaliser les départements les plus investis, la proposition initiale n'est pas cohérente. Il serait plus logique de conserver le dispositif actuel – la règle de compétence de la MDPH est celle du lieu de résidence de la personne demandeuse – mais en l'amendant, d'une part, pour les personnes handicapées résidant dans un département différent de leur domicile de secours et, d'autre part, pour les personnes handicapées changeant de département de résidence. Cette mesure de bon sens permettrait de régler les difficultés identifiées par les auteurs de la proposition.

S'agissant de l'article 12, qui concerne l'insertion professionnelle des personnes handicapées, s'il me paraît indispensable de recourir à l'expertise des Cap Emploi dans les domaines de l'accompagnement, du placement et du maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés, il serait toutefois bon de mettre en place des éléments d'évaluation de ces organismes dans les conventions passées avec Pôle emploi.

Enfin, je salue l'article 14 ter, qui représente une avancée significative de la prise en compte par tous les distributeurs des problèmes d'accessibilité des programmes audiovisuels aux personnes aveugles et malvoyantes.

Dans la mesure où ce texte réalise des avancées notables et se met, avec pragmatisme, au service des personnes handicapées, je le voterai. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'État, cela fait six ans, presque jour pour jour, que la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a été adoptée par le Parlement. Ce texte avait suscité beaucoup d'espoir parmi les associations, les personnes handicapées et leurs familles. Il a surtout eu le mérite de prévoir la création des maisons départementales des personnes handicapées, forme de guichet unique ayant pour objectif premier de faciliter les démarches de ces personnes et d'éviter de fragiliser encore davantage celles qui ont besoin d'une aide privilégiée dans leur vie quotidienne.

Cette loi était donc très ambitieuse et, comme souvent, son application a rencontré de nombreuses difficultés, à commencer par la mise en place même des MDPH. Le présent texte, examiné en première lecture par le Sénat, dresse donc opportunément le bilan du fonctionnement de ces établissements et, à la lumière de ce constat, tend à apporter quelques aménagements, certes insuffisants mais qu'on ne peut pas pour autant refuser.

Globalement, si les MDPH s'acquittent de leurs missions, force est de constater qu'elles souffrent de plusieurs dysfonctionnements et sont en particulier pénalisées par l'instabilité de leurs moyens financiers et de leurs personnels, ce qui constitue bien évidemment une menace pour la pérennité de leur activité.

Les personnels sont soumis à des statuts, des rythmes de congé et des horaires très variables. En outre, les départs spontanés ou imprévus ne donnent lieu à aucun remplacement ni aucune compensation financière. C'est une carence que tous les départements ont dénoncée. Je rappelle aussi qu'un certain nombre de postes n'ont pas été pourvus. Tous ces paramètres ont entraîné inexorablement un retard dans l'examen des dossiers et l'ambition initiale s'en est trouvée considérablement réduite.

En ce qui concerne les moyens financiers, tous les acteurs concernés s'accordent à dénoncer les inégalités existant entre les départements, puisque la part de l'État dans le financement des MDPH varie de 12 à 70 %, ce qui conduit nécessairement les conseils généraux à compenser, une fois de plus, les insuffisances. Les financements sont très en deçà des engagements pris par l'État – beaucoup d'entre nous l'ont déjà souligné.

Quand on sait que l'État n'a que très partiellement compensé les défections de personnels mis à disposition des MDPH, on ne peut que regretter, là encore, son désengagement aux dépens des collectivités locales.

Le montant de la prestation de compensation du handicap ne recouvre pas entièrement celui de l'allocation compensatrice pour tierce personne. Comment les départements parviendront-ils à trouver un équilibre ? Quelles seront les sources de financement ?

C'est donc aujourd'hui le fonctionnement même des établissements qui est mis en péril. Il est grand temps que le Gouvernement respecte ses engagements. Les collectivités territoriales ne pourront éternellement se substituer à l'État.

Personne ne remet en question les maisons départementales des personnes handicapées, qui font la preuve de leur pertinence puisqu'elles ont concouru non seulement à l'efficience comptable mais plus encore à l'humanisation du dispositif et à une véritable proximité avec la personne handicapée, et c'est bien là l'essentiel !

Face à ces difficultés financières et au manque de moyens en personnels, il convient de reconnaître des avancées certaines dans le dispositif qui nous est proposé. Même si elles sont insuffisantes, elles permettront en particulier de stabiliser la situation des personnels, dont la formation sera également améliorée.

Une convention cadre pluriannuelle d'objectifs et de moyens sera conclue, en conformité avec la loi organique relative aux lois de finances. S'il est utile de prévoir des objectifs et des moyens, encore faut-il en effet pouvoir les évaluer et s'assurer régulièrement de leur mise en oeuvre.

Or, si sa défaillance n'est plus à démontrer, comment l'État sera-t-il sanctionné demain ? Le texte ne prévoit pas, me semble-t-il, de mesures suffisamment contraignantes pour l'obliger à payer ses dettes, que l'on évalue à près de 35 millions d'euros pour les postes vacants non compensés.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Mais non !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Enfin, pour ce qui est de l'accessibilité, comment ne pas regretter le maintien de l'article 14 bis, qui prévoit des dérogations à l'accessibilité du cadre bâti neuf ?

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Alors pourquoi les sénateurs socialistes l'ont-ils voté ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Orliac

Tous les jours, des personnes handicapées et leurs familles sont confrontées aux problèmes d'accessibilité.

Madame la ministre, mes chers collègues, pour toutes ces raisons, les députés radicaux de gauche s'abstiendront sur ce texte qui apporte des solutions à des problèmes concrets rencontrés par les MDPH mais qui ne va pas assez loin, en particulier sur les questions du financement et de l'accessibilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dupont

Comme en 2005, lors des débats passionnants que nous avons eus sur le projet de loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées – texte défendu par Marie-Anne Montchamp –, c'est avec conviction que je prends la parole aujourd'hui pour défendre la cause de nos concitoyens handicapés et continuer d'améliorer leur quotidien.

Les lois du 30 juin 1975 et du 11 février 2005 ont permis des avancées majeures avec, entre autres, la définition du handicap et des réalités qu'il recouvre, la prise en compte du handicap mental et psychique, l'instauration de la prestation de compensation du handicap ou la scolarisation des enfants handicapés en milieu ordinaire.

Ces avancées ont été rendues possibles grâce à l'installation dans chaque département des maisons départementales des personnes handicapées, guichets uniques destinés à faciliter les démarches des personnes handicapées et de leurs familles.

Si les MDPH, déployées sur le terrain depuis 2006, présentent dans leur grande majorité un bilan positif, elles ont aussi, à l'usage, révélé des faiblesses. Pour toujours mieux accompagner la personne handicapée, il est donc aujourd'hui indispensable d'améliorer leur fonctionnement en procédant, à court terme, à des ajustements. C'est l'objectif poursuivi par l'excellente proposition de loi qui nous est soumise par nos collègues sénateurs.

Je souhaiterais m'attarder plus particulièrement sur deux articles du texte.

L'article 1er consolide le statut des MDPH en faisant du groupement d'intérêt public une structure à durée indéterminée. Voté à l'unanimité en 2005 sur la base d'un amendement que j'avais déposé, le GIP apparaissait alors comme une solution de compromis présentant l'avantage de garantir à la fois la représentation de l'État et la tutelle administrative et financière des conseils généraux. Je constate aujourd'hui que ce statut a fait ses preuves puisque le texte propose de le pérenniser en autorisant le GIP à recruter des agents en contrat de droit public à durée indéterminée, afin d'offrir à ces personnels des perspectives de carrière au sein des MDPH. Je ne peux donc que me féliciter de cette évolution qui sera, de façon évidente, la clé du bon fonctionnement de ces établissements.

La seconde disposition qui retient mon attention est l'article 2, qui modifie les conditions dans lesquelles les MDPH peuvent recruter leurs personnels, afin de mettre un terme aux contentieux qui opposent trop souvent l'État et les départements à ce sujet. En allongeant la durée du régime de mise à disposition des fonctionnaires de l'État de trois à cinq ans, on s'attaque à l'un des problèmes récurrents de la gestion des établissements : l'instabilité et le turnover du personnel trop souvent dénoncés par les agents des MDPH.

Permettez-moi par ailleurs quelques observations plus générales fondées sur ce qui se pratique dans mon département, la Corrèze, et dont les conséquences ne sont pas traitées par la présente proposition de loi mais seront sans nul doute l'objet de préoccupations à venir. J'appelle votre attention en particulier sur deux points.

Le premier est la nécessité pour les départements de se doter d'un logiciel commun régissant l'instruction de toutes les mesures des MDPH. Actuellement, trois opérateurs se sont partagé le marché au niveau national, si bien que, d'une MDPH à l'autre, instructions, courriers, procédures d'admission ou de notification sont différents. Cette diversité de l'offre de logiciels crée des difficultés pour les familles qui s'adressent à plusieurs MDPH ou pour la gestion des situations interdépartementales. Outre le travail important qui a été demandé aux agents des MDPH pour adapter le logiciel choisi au traitement des dossiers, pour mettre d'accord agents instructeurs, travailleurs sociaux et, surtout, médecins sur les procédures à suivre, enfin pour finaliser l'outil informatique, il apparaît de façon assez unanime qu'un seul logiciel national aurait permis d'uniformiser les procédures, aurait été plus fidèle à l'esprit des textes et aurait certainement permis de faire remonter à la CNSA des informations plus fiables et plus claires.

Le second point que je souhaite aborder concerne les expérimentations en cours pour la création des maisons de l'autonomie. La Corrèze, qui a toujours été un département d'avant-garde dans ce domaine, a été choisie avec deux autres départements pour mettre en place ces nouveaux établissements. Elle doit maintenant accompagner l'évolution de la MDPH vers une maison de l'autonomie.

Cette réorganisation semble malheureusement trop précoce, le concept des MDPH ne s'étant pas encore suffisamment solidifié dans le temps. En effet, sous l'appellation « maison de l'autonomie » se regroupent sans distinction les personnels de la MDPH et ceux du conseil général – aide sociale, APA, aide ménagère. Paradoxalement, chacun conserve ses attributions et sa spécialité mais doit travailler par missions. Le GIP MDPH, qui reste malgré tout une entité à part entière, est totalement fondu dans cette organisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dupont

Il n'existe plus, pour ainsi dire, qu'à travers son papier à lettres pour notifier les décisions et par la COMEX, qui entérine les décisions prises par le conseil général.

Cette situation n'est pas sans poser problème au personnel de la MDPH, qui a du mal à se repérer dans cette organisation. Ce rapprochement ne s'effectue-t-il pas trop tôt ? C'est la question que je me pose et qui se posera à nous de toute façon.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

N'étant pas membre de la commission des affaires sociales,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Personne n'est parfait !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Dufau

…j'ai lu avec beaucoup d'intérêt les comptes rendus des débats en commission, tant au Sénat qu'à l'Assemblée, concernant la proposition de loi tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap.

Ce sujet intéresse les députés et les élus locaux, tout comme l'ensemble de la population. Même si beaucoup de choses ont été dites, je voudrais donc faire à mon tour quelques remarques sur ce texte, qui constitue assurément une avancée en faveur de l'insertion des personnes handicapées, même si, parfois, il aurait pu aller plus loin. La discussion a aussi permis d'écarter les propositions qui n'avaient pas lieu d'être, mais pas toutes, hélas.

J'insisterai en premier lieu sur la compétence générale de l'État au regard du handicap et donc sur la nécessité pour lui de pérenniser les financements afférents, même s'il faut aussi reconnaître la mise en oeuvre de ces politiques localement dans les MDPH et la compétence des départements en matière de solidarité. C'est pourquoi confier à un GIP – pérennisé – la gestion des MDPH représente une solution de compromis qui intègre également les associations.

Il faut néanmoins qu'il y ait un pilote dans l'avion et, les départements étant les premiers opérateurs et les premiers financiers, il appartient au président du conseil général de continuer à assumer ses responsabilités, eu égard, notamment, à la nomination à la direction de ces établissements. Je me réjouis que le débat ait été tranché.

Les dispositions relatives aux politiques en faveur de l'emploi des personnes handicapées – prévues aux articles 11 et 12 notamment – vont dans le bon sens. Encore faut-il qu'au-delà des intentions les objectifs soient atteints, ce qui est loin d'être le cas. C'est pourquoi le fonds d'insertion de la fonction publique, les missions de Cap Emploi et les aides aux entreprises adaptées constituent des éléments centraux, et chacun sait qu'il reste beaucoup à faire en ce domaine.

Or les évolutions budgétaires en la matière ne rendent pas optimiste. Les réserves que nous avions émises en 2005 sur ce point restent hélas pertinentes. Souhaitons que cette proposition de loi soit l'occasion d'un engagement réel et pérenne de l'État. Il ne s'agit pas d'afficher une année du handicap, il vaut mieux assurer l'insertion et la dignité des handicapés tous les ans.

Enfin, comme bon nombre de mes collègues, j'estime que l'article 14 bis, relatif aux conditions dans lesquelles il peut être dérogé aux exigences de mise en accessibilité des constructions neuves, est inacceptable.

À titre d'exemple, nous avons travaillé avec les associations sur l'accès aux plages dans le cadre d'une opération intitulée « handi-plage ». Elle a bien fonctionné, en particulier grâce à l'utilisation de tiralos – ces fauteuils roulants qui permettent d'amener des handicapés dans l'eau afin qu'ils puissent se baigner normalement. Il en fut de même pour l'accès aux postes de secours.

La mise en accessibilité pour tous les handicapés constitue par conséquent la bonne voie, et le recours à un décret en Conseil d'État ne suffit pas à me rassurer. Il faut donc supprimer cet article 14 bis. Toute autre solution serait hypocrite et s'apparenterait à un recul contredisant l'esprit du texte. Il faut que la règle soit claire pour les constructions neuves.

Ainsi, cette proposition de loi va dans le bon sens puisqu'elle reprend notamment les préconisations du rapport sénatorial. Mais il reste un verrou : l'article 14 bis. L'insertion des handicapés dans notre société est une priorité. Elle témoigne de notre volonté d'égalité à l'égard de ceux qui sont « différents ». Qu'il me soit permis d'élargir mon propos et de rêver que l'exigence de valeurs universelles concerne aussi tous ceux qui sont différents – c'est-à-dire ceux qui sont nos semblables. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La discussion générale est close.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, cher Paul Jeanneteau, mesdames, messieurs les députés, permettez-moi, pour commencer, de vous dire ma joie d'être parmi vous pour l'examen de cette proposition de loi d'initiative sénatoriale, qui permet tout à la fois d'améliorer le fonctionnement des MDPH, et donc la qualité de service rendu par ces maisons aux personnes en situation de handicap, et de favoriser la citoyenneté et la participation sociale de ces personnes.

Ne nous y trompons pas, c'est bien le défi posé par la loi du 11 février 2005. C'est aussi le défi qu'avec Marie-Anne Montchamp nous entendons relever.

Je ne rappellerai pas les améliorations que la proposition de loi apporte réellement au fonctionnement des MDPH. Marie-Anne Montchamp en a parlé. Jean-Pierre Dupont a salué cet effort : je veux aussi saluer en lui le militant inlassable des personnes en situation de handicap. Je veux également rappeler à ce propos l'action de l'ancien Président de la République, Jacques Chirac, à qui nous devons les trois grandes lois qui leur sont destinées : celles de 1975, 1987 et de 2005. Il serait injuste de ne pas évoquer au moins une fois son nom dans ce débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

L'allongement de la durée de mise à disposition des agents de l'État dans les MDPH, cinq ans au lieu de trois, et du délai de préavis, six mois au lieu de trois, contribuera à mettre fin à l'instabilité des personnels.

La signature d'une convention triennale d'objectifs et de moyens, avec l'instauration d'un système de mise à disposition contre remboursement, permettra d'apporter plus de visibilité aux MDPH sur leurs moyens.

Les possibilités de délégation de la décision à des commissions restreintes mettra fin à certaines lourdeurs, que plusieurs d'entre vous ont justement dénoncées, concernant l'instruction des demandes.

Ces propositions sont d'ailleurs conformes à celles que l'inspection générale des affaires sociales a formulées dans le rapport sur les MDPH qu'elle vient de me remettre.

À cette occasion, je voudrais apporter un certain nombre de précisions, en particulier à l'attention de Dominique Orliac, de Martine Carrillon-Couvreur ou encore de Marie-Renée Oget, qui ont accusé l'État de s'être désengagé. Ce sont 1 550 postes qui sont mis à disposition par l'État dans les MDPH ou compensés financièrement ; 26,4 millions d'euros leur ont ainsi été versés en 2010 au titre de la compensation financière des postes vacants. À ces crédits, s'ajoute le concours de la CNSA, soit 60 millions d'euros versés chaque année. Vos chiffres dataient donc de 2009, ils n'étaient pas actualisés. Et je voudrais vous dire qu'en 2011, l'État sera irréprochable sur le plan financier.

Vous l'avez vu, le projet de loi de finances rectificative pour 2010 prévoit des crédits supplémentaires pour couvrir la totalité de la dette de l'État au titre des années 2006-2009 et éteindre les contentieux. Le PLF 2011 prévoit également la compensation des postes vacants : 23,5 millions d'euros, correspondant au stock des postes vacants depuis plus d'un an. Ils vont faire l'objet d'une délégation aux MDPH dans les prochaines semaines.

Je veux saluer le travail de votre commission et de son rapporteur, Paul Jeanneteau. Grâce à lui, grâce à vous, le texte a été très sensiblement amélioré, dans un sens toujours plus favorable aux personnes en situation de handicap. C'est ensemble que nous pourrons relever le défi posé par la loi de 2005.

Par exemple, ainsi que l'a indiqué Marie-Christine Dalloz, l'article 14 quater, ajouté par la commission des affaires sociales à l'initiative du rapporteur, facilitera l'accès aux fichiers sources que les éditeurs déposent dans un établissement public, en supprimant la condition selon laquelle la demande doit intervenir dans les deux ans qui suivent le dépôt légal.

Vous avez, monsieur le rapporteur, déposé un amendement qui permettra aux jeunes en instituts médico-éducatifs, en instituts médico-professionnels, ou encore en instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques, de manier un certain nombre de machines et d'outils qui constitueront plus tard leur quotidien dans le monde professionnel qu'ils veulent intégrer. C'est un élément indispensable au développement de leur technicité et de leur employabilité. Vous réglez là, enfin, un problème ancien. Je vous en remercie. Bien évidemment, j'émettrai un avis favorable.

Un mot sur la scolarisation, dont plusieurs d'entre vous ont parlé.

Tout d'abord, il ne faut pas se focaliser uniquement sur les auxiliaires de vie scolaire. Tous les enfants n'en ont pas besoin, loin de là !

Pour les AVS, qu'il y ait localement des difficultés, nous le concevons. Qu'il faille améliorer les dispositifs, nous l'entendons. Mais je ne peux accepter que l'on dise que l'État se désengage alors que le nombre d'AVS a triplé en quatre ans – 24 000 ETP en 2011 – et que chaque année ce sont plus de 10 000 enfants supplémentaires en situation de handicap qui sont scolarisés : ils étaient plus de 200 000 à la dernière rentrée. Bernard Perrut a validé ces chiffres, ainsi que Thierry Benoit. Je regrette que Maxime Gremetz ne soit plus là, mais je lui aurais volontiers donné les sources de ces chiffres, qui sont parfaitement vérifiables.

Néanmoins, vous avez raison, nous avons connu des difficultés au début de l'année scolaire. Martine Pinville en parlait. Ces difficultés devraient très rapidement se régler grâce aux moyens supplémentaires – 20 millions d'euros – votés dans le PLF 2011.

Pour l'avenir, je souhaite que nous avancions sur le statut des auxiliaires de vie scolaire. Marie-Anne Montchamp y est très sensible. Il y a plusieurs solutions, par exemple le recrutement par des associations, et nous devons encore effectuer un travail d'évaluation.

Nous devons également améliorer les pratiques d'attribution, notamment en créant un référentiel d'attribution pour garantir une meilleure équité de traitement et faire en sorte que l'AVS bénéficie vraiment à celles et ceux qui en ont besoin.

Comme le Président de la République l'a annoncé, ce sujet sera à l'ordre du jour de la prochaine conférence nationale du handicap, qui se tiendra à la fin du premier semestre.

Pour nous aider à avancer, nous avons d'ailleurs décidé de confier une mission au sénateur Paul Blanc.

Quelques mots, avant de conclure, sur l'accessibilité. Beaucoup d'entre vous en ont parlé, de manière d'ailleurs très différente. Je pense en particulier à l'intervention de Christophe Sirugue.

Plusieurs amendements ont été déposés pour supprimer l'article 14 bis, adopté à l'unanimité au Sénat, tous groupes politiques confondus, à la faveur d'un amendement de Sylvie Desmarescaux.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

Je vous en prie, monsieur Gremetz. Je ne vous ai pas interrompu, laissez-moi poursuivre mon propos, c'est la moindre des politesses. Vous y êtes très sensible.

D'autres amendements veulent assouplir ce dispositif, afin de permettre la mise en place de quotas dans des situations ciblées, pour les résidences de tourisme par exemple – je pense à l'amendement de Michel Bouvard – ou au contraire pour en restreindre le champ : c'est le cas de l'amendement de Paul Jeanneteau, qui a été adopté en commission.

Je voudrais le dire très clairement aux personnes en situation de handicap : la loi du 11 février 2005 nous a lancé un défi formidable et ambitieux, celui de garantir la pleine intégration et la pleine citoyenneté des personnes handicapées. Pour atteindre cet objectif, elle implique des exigences fortes en matière d'accessibilité à tous les types de handicap. À cet égard, l'ambition du Gouvernement, celle de Marie-Anne Montchamp et de moi-même, est intacte.

Je veux rappeler, d'ailleurs, que celles et ceux qui veulent limiter cette question aux seules personnes en situation de handicap se trompent : comme beaucoup l'ont dit ce soir, l'accessibilité concerne toutes les personnes fragiles et, d'une manière plus globale, l'ensemble de nos concitoyens.

L'article 14 bis, adopté à l'unanimité au Sénat, garantit pleinement leurs droits. Il n'autorise pas de dérogations. Il prévoit l'obligation de mettre en oeuvre des solutions de substitution – rendre accessible autrement – lorsque les normes ne pourraient pas être pleinement respectées. Mais l'article 14 bis ajoute que seules des contraintes techniques peuvent justifier la mise en oeuvre de mesures de substitution. Avec Marie-Anne Montchamp, nous avons essayé d'imaginer les bâtiments qui pourraient être concernés. Nous avons peut-être trouvé la construction d'un refuge neuf en haute montagne,… c'est à peu près tout.

En outre, c'est au promoteur de prouver l'impossibilité technique. Et les mesures de substitution ne pourront être accordées qu'après avis conforme de la commission départementale de sécurité et d'accessibilité. C'est dire que nous avons vraiment prévu dans cet article toutes les protections requises,…

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre

…et je salue à cet égard le travail de Sylvie Desmarescaux.

Le Gouvernement souhaite que l'équilibre adopté au Sénat soit préservé à l'Assemblée nationale. J'émettrai donc un avis favorable à l'amendement n° 4 de Michel Bouvard, qui permet de revenir à cette rédaction.

Je m'engage par ailleurs, au nom du Gouvernement, comme je l'ai fait devant le CNCPH, à ce que la concertation se poursuive avec les représentants des personnes en situation de handicap, sous l'égide du secrétaire général du CIH. Cela va nous permettre de parfaire ce nouveau dispositif juridique, et ainsi de garantir la primauté du respect des règles d'accessibilité dans la construction.

Je voudrais également m'adresser aux auteurs de l'amendement n° 34 , dont a parlé Jean-Marie Binetruy. Le Gouvernement n'est pas insensible à leurs préoccupations. Certaines associations de personnes en situation de handicap ne sont d'ailleurs pas opposées à l'idée d'un pourcentage de logements plus accessibles que les autres. Ce qui compte, c'est qu'une personne handicapée puisse disposer d'un logement qui lui convienne quand elle se présente.

Je suis consciente des difficultés que suscite la mise en oeuvre de cet article 14 bis. C'est pourquoi, en accord avec Nathalie Kosciusko-Morizet et Frédéric Lefebvre, j'ai confié, le 11 février dernier, une mission au vice-président du conseil général de l'environnement et du développement durable, au chef de service de l'inspection générale des affaires sociales et au chef de service du contrôle général économique et financier. Cette mission vise à évaluer la réglementation technique existante en matière d'accessibilité et à formuler des propositions pour définir le champ et la nature des mesures de substitution envisageables.

Je veillerai personnellement à ce que les logements à occupation temporaire soient bel et bien traités dans le cadre de cette mission. Je peux donc comprendre votre souhait de prévoir des règles spécifiques pour ces projets de résidence saisonnière, par exemple des règles obligeant à un quota de logements réellement accessibles. Je trouve d'ailleurs que la rédaction proposée par le sous-amendement de M. Cherpion est plus juste : s'agissant des logements saisonniers ou temporaires, nous ne sommes pas en présence d'une problématique majeure de mesures de substitution. Nous sommes devant une problématique d'adaptation des règles d'accessibilité. Compte tenu, néanmoins, du souci d'équilibre recherché par les auteurs de cet amendement, je m'en remettrai à la sagesse de votre assemblée.

Je laisserai Marie-Anne Montchamp parler des questions de dépendance – évoquées par Anny Poursinoff – ainsi que d'emploi.

Je voulais remercier l'UMP et le Nouveau Centre qui, par les voix de Bernard Perrut et Thierry Benoit, ont dit ce qu'il convenait de dire. Et je voulais quand même, à la fin de cette réponse aux orateurs, citer quelques chiffres. Parce que, vraiment, il y a des choses que je ne peux pas laisser passer ! Je ne peux accepter que l'on parle, de façon récurrente, de désengagement de l'État, alors que jamais autant n'a été fait pour les personnes en situation de handicap que par le Président de la République depuis 2007.

Ces chiffres, je les destine en particulier au dernier orateur, Jean-Pierre Dufau. En quatre ans, le budget dévolu aux personnes en situation de handicap a augmenté de 27 %, passant de 32,6 à 41,3 milliards d'euros, et ce dans la situation financière que nous connaissons. À l'école, 133 000 enfants étaient scolarisés il y a quatre ans ; ils sont maintenant 201 406. Il y a deux ans, les AVS représentaient au total 12 000 équivalents-temps plein, contre 23 000 aujourd'hui, soit plus du double. Quant aux ressources, à la fin de ce quinquennat, l'AAH aura augmenté de 25 %. En 2005, l'allocation compensatrice pour tierce personne était de 400 euros : l'APCH, qui la remplace, était en 2009 de 850 euros. Nous avons créé 34 490 places nouvelles, et engagé 1,9 milliard d'euros d'investissement en créations de services et de places.

Mesdames, messieurs les députés, je vous demande, en examinant cette proposition de loi, de garder ces chiffres en mémoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienMarie-Anne Montchamp, secrétaire d'état auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je m'exprimerai brièvement, en complément de l'intervention de Roselyne Bachelot, à laquelle, inutile de vous le dire, je souscris totalement, en particulier pour ce qui concerne le dernier point.

S'agissant de la scolarisation des enfants handicapés, il faut quand même regarder le chemin parcouru, et en particulier le chemin parcouru par l'éducation nationale. Une institution complexe, mobilisant des personnels très nombreux, s'est mise en capacité de comprendre la situation particulière des enfants handicapés accueillis à l'école, d'entrer dans des démarches personnalisées et de soutenir le principe d'accessibilité. Il fallait le redire, même si, naturellement, nous soutenons dans ce domaine un effort constant et en constante progression, et si nous sommes résolus à aborder de manière extrêmement volontariste la question des auxiliaires de vie scolaire, que plusieurs d'entre vous ont évoquée.

Mme Poursinoff a évoqué la dépendance. Pour lui répondre, j'indique que la question de la personne handicapée vieillissante fera l'objet d'une attention toute particulière dans le cadre du débat voulu par le Président de la République. Avec Roselyne Bachelot, nous sommes absolument déterminées à ce que, par la contribution particulière du CNCPH et par la présence des associations de personnes handicapées dans le cadre des différents ateliers conduits par les experts sur l'ensemble du champ de la dépendance, cette question spécifique soit abordée comme elle le doit. Il est indispensable de prendre en compte tout ce que le monde du handicap peut apporter, notamment en ce qui concerne l'offre, qui bénéficiera à n'en pas douter de l'expérience associative, particulièrement importante en ce domaine.

S'agissant de l'emploi, la commission, à l'initiative de votre rapporteur, a adopté l'article 12 ter, qui est de nature à faciliter l'accès des étudiants handicapés aux stages, en prévoyant la reconnaissance automatique de la qualité de travailleur handicapé aux jeunes qui disposent d'une convention de stage et qui, soit sont titulaires de la PCH ou de l'allocation compensatrice pour tierce personne, soit ouvrent droit à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé. Le Gouvernement émettra un avis favorable à cet amendement, tant ces dispositions nous semblent importantes.

L'article 12 quater, ajouté par la commission des affaires sociales, toujours à l'initiative de son rapporteur, prévoit que, pour s'exonérer de leur surcontribution à l'AGEFIPH, les entreprises dites « à quota zéro », celles qui n'ont consenti aucun effort en matière d'emploi des personnes handicapées, devront réaliser un montant minimal d'achats, fixé par décret, dans le cadre d'un contrat conclu avec une entreprise adaptée ou un service d'aide par le travail. Aujourd'hui, un achat d'un faible montant, de l'ordre de 300 euros, leur permet de s'exonérer de cette surcontribution. C'est une situation anormale et tout à fait injuste. Là encore, le Gouvernement sera favorable à l'amendement de la commission.

Enfin, je l'indique en particulier à Marie-Christine Dalloz, qui a évoqué la question des Cap Emploi, ainsi qu'à Jean-Pierre Dufau, la réaffirmation du rôle de l'État dans le pilotage de la politique de l'emploi des personnes handicapées, qui fait intervenir une pluralité d'acteurs, renforce la gouvernance de cette politique. Il était déterminant d'y veiller dans cette proposition de loi, et nous nous en félicitons naturellement.

Je voulais également vous remercier, particulièrement Jean-Pierre Dupont, Bernard Perrut, Marie-Christine Dalloz, Jean-Marie Binetruy, Bérengère Poletti, Martine Carrillon-Couvreur et Marie-Renée Oget, pour l'évocation des débats que nous avions eus en 2004 et 2005, et dont je garde le souvenir. Ils n'étaient pas toujours faciles, mais ils ont été fructueux, et je crois qu'ils ont intéressé ceux de nos compatriotes qui ont bien voulu se pencher sur ce que pouvait être la politique du handicap. Je me réjouis d'avance que les débats que nous aurons dès demain sur les amendements se déroulent dans les mêmes conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Rappel au règlement : Mme Bachelot a menti, jamais les sénateurs communistes n'ont voté l'article 14 bis !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

…je crois que vous serez d'accord pour interrompre la discussion de ce texte et pour la poursuivre demain après les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, mercredi 16 février à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Suite de la proposition de loi tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées ;

Deuxième lecture des projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 16 février 2011, à une heure vingt.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma