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Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Séance du 28 avril 2010 à 9h30

Résumé de la séance

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  • grec
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La séance

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La commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire entend M. François Baroin, ministre du Budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010 (n° 2452)

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd'hui pour auditionner M. François Baroin, à qui je souhaite la bienvenue, sur le deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2010. Je vous demande de bien vouloir excuser Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, qui ne peut être parmi nous aujourd'hui puisqu'elle accompagne le Président de la République dans son voyage officiel en Chine.

Monsieur le ministre, nous venons d'examiner un décret d'avance. Or ce projet de loi ne prévoit pas sa ratification, alors que les décrets d'avance doivent, aux termes de l'article 13 de la LOLF, être ratifiés par la plus prochaine loi de finances rectificative. Je crois avoir compris qu'une solution avait été trouvée. Pouvez-vous nous le confirmer ?

Le gouvernement grec ayant demandé l'activation du soutien européen vendredi, les sommes prévues dans le projet de loi et fixées en conseil des ministres antérieurement à cette demande doivent-elles rester inchangées ?

Selon vous, l'Allemagne va-t-elle effectivement assurer sa quote-part ? Dans l'hypothèse où elle ne le ferait pas, ou si elle le faisait plus tardivement que nous, la position de la France, notamment quant au volume de l'effort qu'elle pourrait consentir, changerait-elle ?

Pouvez-vous dire très clairement à la Commission que les conditions de refinancement de la dette française sur les marchés ne sont pas modifiées par les temps troublés que connaît la zone euro ? Il importe de mettre un terme, voire de prévenir, certaines rumeurs.

Comment jugez-vous le taux de 5 % qui a été décidé ? La meilleure façon d'aider est-elle de punir ? Ce taux est-il punitif ou légitime ?

S'agissant de l'exposition des banques françaises à la dette grecque, des chiffres importants circulent, dont on se demande s'ils ne sont pas assumés principalement par quelques établissements, voire un seul. Pouvez-vous nous en dire un mot ?

Enfin, avec ce projet de loi, le déficit budgétaire est dégradé de 3 milliards d'euros supplémentaires. Si la France ne devait pas aider la Grèce, notre déficit budgétaire diminuerait-il d'autant ? Pouvez-vous nous expliquer le système de décote de la dette en cours d'année, qui permet de dégager en trésorerie ces 3 milliards d'euros ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi de finances rectificative que je vais vous présenter aujourd'hui revêt un caractère particulier dans l'histoire des finances publiques de notre pays. Il marque une nouvelle étape dans la construction européenne et témoigne de la destinée commune et de la solidarité qui lient les États membres par la monnaie unique. La situation de la Grèce met en lumière son fonctionnement et l'insincérité de son gouvernement précédent quant à l'évaluation de son niveau de déficit, passé en quelques semaines de 6 % à 12 % de PIB. Mais, comme je l'ai dit hier en réponse à des questions d'actualité posées par M. Eckert et M. Lequiller, l'attaque lancée contre la Grèce est une attaque contre notre monnaie. Face à cela, la solidarité au sein de l'Union, portée par la France, est une exigence car cette instabilité générale a des conséquences immédiates sur l'Europe tout entière.

Les observateurs ont anticipé sur un éventuel défaut de paiement de la Grèce, estimant que le risque s'était accru de façon très significative, avec une accélération hier sur laquelle je reviendrai.

Les États de la zone euro ne pouvaient rester sans rien faire face à cette situation qui pouvait, à terme, porter un grave préjudice à notre monnaie commune.

C'est pourquoi, dès le 11 février, les chefs d'État et de gouvernement de la zone euro ont déclaré qu'ils prendraient les mesures coordonnées nécessaires pour préserver la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble.

Les modalités techniques d'un éventuel plan de soutien ont été précisées lors du Conseil européen des 25 et 26 mars : le soutien financier interviendrait en dernier recours, en particulier si le financement des marchés devait se révéler insuffisant. Il prendrait la forme d'un accord, comprenant une implication financière du FMI – à hauteur de 15 milliards d'euros – et une majorité de financement européen par le biais de prêts bilatéraux des pays membres de la zone.

Ces modalités d'intervention ont été une dernière fois précisées le 11 avril dernier : le montant maximal de l'aide annoncée s'élèverait, pour la première année, à 30 milliards d'euros, apportés par les États membres de la zone euro, auxquels s'ajouteraient des fonds apportés par le FMI. Les États membres de la zone euro contribueraient à cette aide sur une base reflétant leur poids économique au sein de la zone. Cette aide prendrait la forme de prêts qui seraient rémunérés à un taux non concessionnel, qui atteindrait environ 5 % pour un prêt à taux fixe sur trois ans, soit un taux nettement supérieur à celui auquel les autres États membres de la zone, notamment la France, se financent (aux alentours de 1,5 % pour ce qui concerne notre pays).

L'octroi de cette aide est naturellement conditionné à la mise en oeuvre effective du programme d'assainissement des comptes publics sur lequel le gouvernement grec s'est engagé et qui devrait permettre de réduire le déficit public de quatre points de PIB dès cette année. Les efforts demandés par le gouvernement grec à sa population sont considérables.

Vendredi dernier, 23 avril, le gouvernement grec a demandé officiellement à ses partenaires l'activation du mécanisme décidé le 11 avril. Avant qu'il ne fasse cette demande, il était convenu qu'il faudrait se tenir prêt à réagir vite dans l'hypothèse où la Grèce deviendrait incapable de refinancer sa dette sur les marchés financiers. C'est pourquoi les États membres s'étaient engagés à prendre les mesures nécessaires, au niveau national, pour être en mesure de fournir rapidement une assistance à la Grèce. Cette urgence est d'autant plus d'actualité désormais. Il appartient maintenant à la Commission, à la Banque centrale européenne, la BCE, et au Fonds monétaire international, le FMI, d'évaluer la situation.

Des mécanismes de contrôle sont absolument nécessaires : la solidarité n'exclut pas l'exigence et la fermeté – position du Gouvernement, que j'ai rappelée hier –, et nous serons bien évidemment très attentifs aux mesures prises par la Grèce et à leurs résultats.

Ce projet de loi de finances rectificative, que Christine Lagarde et moi-même présenterons en séance publique le 3 mai, répond ainsi à cette urgence et vise à mettre en place les moyens juridiques et budgétaires pour autoriser le concours de la France à la Grèce, puisqu'elle vient d'en faire la demande.

Il ouvre donc pour 2010 un total de 6,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement, sur un programme créé à cet effet : « Prêts aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro ».

Les 6,3 milliards d'euros pour 2010 correspondent à l'engagement maximal de la France sur les 30 milliards d'euros d'aide européenne annoncée pour la première année, soit 20,97 %. Le niveau de participation de chaque État membre est en effet calculé au prorata de la souscription de sa banque centrale nationale au capital de la BCE.

À titre conventionnel, l'estimation du montant global de prêt effectif par la zone euro à la Grèce correspond à environ deux tiers du besoin de financement global de l'État grec estimé jusqu'à la fin de l'année. Le montant des crédits de paiement ouverts en France s'élève donc à 3,9 milliards d'euros pour 2010. Le tiers restant du prêt de la zone euro à la Grèce est supposé couvert par des ressources levées par les autorités grecques, soit directement sur le marché, soit via le FMI.

Il s'agit d'une hypothèse haute, car la mise en place du plan de soutien et sa traduction concrète dans chacun des États membres ont véritablement pour objectif un retour rapide de la Grèce sur les marchés financiers et non une mise sous perfusion durable.

Je précise que ces ouvertures de crédits n'ont pas d'impact sur le déficit public de notre pays, puisqu'il s'agit d'une opération financière – un prêt – et non d'une dépense définitive pour le budget de l'État.

Quel que soit le montant décaissé au titre des prêts à la Grèce, la prévision de déficit public pour 2010 reste donc inchangée par rapport au montant notifié il y a quelques jours à la Commission européenne, à savoir huit points de PIB.

En revanche, le déficit budgétaire se doit de refléter l'ensemble des crédits budgétaires autorisés, même si leur décaissement n'est pas à ce stade certain et qu'il ne s'agit pas d'une dépense définitive. C'est la raison pour laquelle le déficit budgétaire s'établit, dans le projet de loi de finances rectificative, à 152 milliards d'euros, en dégradation de 3 milliards par rapport au chiffre du collectif sur l'emprunt national.

La dégradation n'est pas de 3,9 milliards, mais de 3 milliards d'euros, car l'ouverture de 3,9 milliards de crédits de paiement est en partie compensée par une réévaluation à la hausse des recettes de TVA, environ 900 millions d'euros. Cette nouvelle estimation traduit simplement, dans l'équilibre du budget de l'État, le surcroît de recettes de TVA, que nous avons notifié à Bruxelles le 8 avril.

Ces ouvertures de crédits n'ont pas non plus d'impact sur la charge de la dette et ne supposent pas de modifier le programme d'émission de la dette française – ni pour la dette à moyen et long terme, ni pour la dette à court terme –, qui reste donc identique à celui présenté à l'occasion du collectif « Grand emprunt ». Le financement du surcroît de déficit lié aux prêts ainsi autorisés serait en effet couvert par 2,4 milliards d'euros d'apport net en trésorerie des primes enregistrées sur les émissions de titres à moyen et long terme réalisées depuis début janvier et par un ajustement de 600 millions d'euros de la contribution du compte du Trésor.

Pour conclure, je tiens à souligner le caractère particulier de ce collectif.

Comme je vous l'ai dit, cette démarche est avant tout l'aboutissement d'une décision concertée et collective. L'ensemble de nos partenaires fait ou s'apprête à faire de même. Ainsi, le gouvernement néerlandais a-t-il déjà saisi son Parlement de la question. De la même manière, les autres pays de la zone euro sont en train de franchir ou franchiront rapidement dans leur droit interne les étapes nécessaires à la mise en oeuvre du dispositif.

Le Gouvernement demandera au Parlement que ce projet de loi de finances rectificative soit examiné en urgence pour que le dispositif d'aide à la Grèce puisse être activé sans délai. Aussi, pour s'assurer que ce projet de loi reste bien concentré sur son unique objet, il ne contient que cette unique disposition. C'est d'ailleurs pourquoi d'autres dépenses urgentes – aide à Haïti, suites de la tempête Xynthia – font l'objet, comme c'est l'usage à ce stade de l'année, d'un décret d'avance qui a été transmis en début de semaine aux commissions des finances des deux assemblées.

Le Gouvernement compte donc sur l'esprit de responsabilité de l'ensemble des parlementaires pour que, à l'image de la loi de finances rectificative d'octobre 2008 sur le financement de l'économie, les débats se concentrent sur l'objet du projet de loi et permettent son adoption dans les plus brefs délais. Je vous remercie de l'esprit dans lequel nous avons pu préparer cette réunion, d'autant plus que la situation est sérieuse et très exigeante.

Concernant les engagements des banques françaises, le niveau de l'ensemble des actifs des groupes bancaires les plus internationaux ayant des positions en Grèce est d'un demi pour cent, pas plus. On est donc loin d'un risque systémique, comme lors de l'affaire Lehman Brothers où l'effet domino et la position de l'administration américaine avaient provoqué la crise que nous connaissons. D'après nos informations, ce n'est ni le même risque, ni la même ampleur, ni les mêmes positions.

Quant à la position de l'Allemagne, les hésitations de la chancelière, dues à ce temps de latence lié à des élections régionales importantes pour la coalition allemande, ont incontestablement nourri les raisons du doute. Mais ce qui importe, ce sont ses propos, avant-hier, selon lesquels « l'Allemagne apportera son secours lorsque les préalables seront réunis ; nous y apporterons notre contribution ; je fais confiance aux négociations menées par le FMI et la Commission européenne avec la Grèce ».

La chancelière allemande a tenu compte de l'accélération de la spéculation des marchés. En réalité, il s'agit d'une course de vitesse.

Je crois que le message est passé. Cette annonce confirme les échanges que nous avons avec le gouvernement fédéral allemand : elle reflète la claire conscience qu'a l'Allemagne de son rôle dans le déclenchement du processus de soutien aux Grecs. Nous n'avons donc aucun doute sur la volonté de ce pays – malgré les hésitations et l'état d'esprit de l'opinion publique allemande – d'entrer dans ce dispositif de soutien. Cela se fera.

J'en viens au taux de 5 %. On ne peut pas, d'un côté, annoncer une aide à un pays en difficulté, qui a mené des politiques inappropriées et menti sur ses déficits et, de l'autre, se voir reprocher que cette aide revête la forme d'un prêt. Ce prêt est relativement avantageux puisque nous empruntons à environ 1,5 %.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Ce dispositif est l'expression de notre soutien, assorti d'un haut degré d'exigence sur le suivi des engagements pris par l'actuel gouvernement grec pour réduire de manière drastique son déficit : moins 4 % en un an. L'effort demandé est considérable mais il nous paraît être de bonne politique.

PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le ministre, les 900 millions d'euros de recettes de TVA supplémentaires inscrits dans ce collectif sont une bonne nouvelle. Grâce à sa politique économique et budgétaire conduite en 2009, la France s'est comportée relativement mieux que la plupart des autres pays européens, même si son déficit public a atteint 7,5 points de PIB – 8 points étant prévus pour 2010, le réglage entre mesures d'investissement et de soutien à la consommation s'étant révélé judicieux. Mes collègues du Bundestag m'ont d'ailleurs interrogé sur la mise en place, dans notre pays, de procédures telles que la médiation du crédit, le soutien aux banques et à la consommation. Je profite de ce collectif pour rappeler la règle, introduite par la LOLF en 2005, selon laquelle tout surplus de recettes, fût-il modeste, doit être utilisé selon des modalités prévues par la loi de finances initiale, en l'occurrence, en 2010, impérativement affecté à la baisse du déficit.

Monsieur le ministre, les Grecs doivent être refinancés au titre d'une échéance de 8 milliards d'euros le 19 mai. Peut-on espérer une accélération du calendrier, car attendre le 10 mai – lendemain des élections allemandes – pour prendre des dispositions est risqué si l'on veut freiner la spéculation dont sont déjà atteints d'autres pays ?

Ce projet de loi crée un nouveau programme intitulé « Prêts aux États membres de l'Union européenne dont la monnaie est l'euro », mais les crédits sont évaluatifs aux termes de la LOLF. Le Gouvernement s'engage-t-il à revenir devant le Parlement si les 6,3 milliards d'autorisations d'engagement et les 3,9 milliards de crédits de paiement venaient à être dépassés ?

Les prêts – 30 milliards d'euros au titre de la zone euro et une quinzaine au titre du FMI – seraient mis en place par tranches, avec vérification de la réalisation des conditions, assez dures, demandées à la Grèce : hausse de deux points de la TVA, baisse de 10 %, voire de 20 % des salaires des fonctionnaires, mesures de régulation sur l'assurance maladie, baisse des budgets de défense, d'investissement, etc. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur les modalités de mise en place des tranches de prêts à la Grèce ?

Enfin, la question de la gouvernance économique de la zone euro est une nouvelle fois posée, quand on constate de grandes divergences entre les soldes commerciaux des États. La réflexion sur ce sujet avance-t-elle ? Êtes-vous optimiste ? Va-t-on enfin dépasser les simples intentions ou les études académiques ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Sur le calendrier, Herman Van Rompuy a annoncé une réunion du Conseil européen pour le 10 mai. La négociation avec le FMI, la Commission et la BCE doit normalement se conclure dès la semaine prochaine. L'évolution de la position allemande, l'action de la France, les déclarations de M. Van Rompuy et les positions du directeur général du FMI démontrent une volonté ferme de déclencher ce plan dans les meilleurs délais.

Les Allemands sont techniquement capables de répondre à l'objectif du 19 mai : leur procédure parlementaire le leur permet, nous ont-ils fait savoir.

Sur les éléments de conditionnalité, la Grèce devra, à partir du 15 mai, soumettre au Conseil et rendre publics des rapports trimestriels qui feront état de mesures concrètes et d'une quantification de leur impact budgétaire. L'effort demandé à la population grecque est considérable, car la situation l'exige : non-paiement du quatorzième mois des fonctionnaires, réduction de 10 % des dépenses au titre des rémunérations, gel des embauches en 2010, réduction des coûts opérationnels, des dépenses militaires, médicales, d'éducation, d'investissement, etc. Nous devons adresser un message de soutien à la population grecque, mais aussi d'exigence pour que les conditions du prêt soient réellement remplies : la Grèce sera accompagnée pendant plusieurs années vers un rééquilibrage de ses comptes. Nous devons être confiants mais aussi lucides sur ce qui est demandé en termes d'efforts à la population grecque.

La question de la gouvernance économique est au coeur des discussions et fera clairement partie des éléments du débat du G20 sous présidence française, à la lumière de la crise grecque et du début de la crise portugaise, d'une autre nature. Si les crises prennent de l'ampleur, si l'attaque contre l'euro se poursuit, est-ce le FMI qui sera majoritaire dans le soutien aux pays de l'Union européenne, ou est-ce l'Union européenne qui, prenant conscience de ses responsabilités, se mettra réellement en situation de conserver un dispositif capable de protéger sa monnaie et, partant, son économie, ses investissements, ses emplois, et donc une certaine idée de son identité et de son organisation ? Les Américains ont beaucoup de mal à comprendre notre fonctionnement et notre incapacité à répondre aussi rapidement qu'ils l'ont fait en leur temps. Le manque de gouvernance européenne associée à une perte de temps accélère le processus de déstabilisation et de spéculation de la part des marchés. La gouvernance européenne sera donc au premier rang des priorités dans les semaines et les mois qui viennent.

Enfin, sur les crédits évaluatifs, monsieur le rapporteur général, je prends l'engagement de revenir devant la Commission et de faire des rapports d'étape sur l'évolution de la situation.

PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Le taux de 5 % à trois ans me paraît assez logique car, le 29 mars, la dernière émission grecque de 5 milliards d'euros à sept ans était à 6 %.

Les autorisations d'engagement de 6,3 milliards d'euros seront-elles suffisantes si le Portugal, voire l'Irlande, se retrouvent également en difficulté ?

Si, dès le mois de novembre – au moment où le Premier ministre grec a annoncé la révision du déficit de 6 à 12 points de PIB –, la gouvernance de la zone euro avait été efficace et mis sous surveillance la Grèce, les marchés auraient-ils sanctionné ce pays ?

Ce collectif appelle donc beaucoup de questions, alors même que le groupe UMP le soutiendra.

Le plus urgent est sans doute de donner un signe très fort avant le 10 mai. Chacun a bien compris les enjeux du calendrier et la raison pour laquelle le président de l'Union européenne provoque la réunion de l'Eurogroupe après le 9 mai. Mais les marchés vont-ils attendre cette date ? Que fera-on si la note de l'Irlande est dégradée ? Que fera-t-on si la situation du refinancement des obligations d'État, de la dette souveraine sur le marché secondaire, devient de plus en plus tendue ?

Vous l'avez dit, monsieur le ministre : dans les négociations en cours, le FMI n'a pas encore acté son engagement pour un versement de 15 milliards d'euros de financement. S'il décidait d'accorder une somme inférieure, qui se chargerait du refinancement de la différence ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur Chartier, les marchés peuvent fondre un matin comme une volée de moineaux sur un sac de grains, et revenir comme eux dans les nids le soir si les bonnes réponses ont été apportées. L'évolution de la Bourse au cours de l'année 2009 nous amène à avoir le recul nécessaire et, en même temps, à faire preuve de rigueur et de transparence.

Les situations portugaise et espagnole ne sont pas comparables à la situation grecque. C'est le mensonge du précédent gouvernement grec qui a accéléré la spéculation des marchés sur notre monnaie. La sanction n'est donc pas illogique. Mais ce que nous devons contrer, c'est l'attaque qui s'est produite à travers la sanction. C'est pourquoi la solidarité européenne est indispensable. S'il y a eu des hésitations allemandes en termes de calendrier, nous nous retrouvons quant au degré d'exigence sur la contrepartie du prêt.

Le Portugal et l'Espagne n'ont pas menti, et s'ils ont une dette à peu près égale à la nôtre, leur chômage est plus élevé et leur situation beaucoup plus tendue. En Espagne, l'élément spéculatif autour de la bulle immobilière est menaçant. Nous devons être attentifs à la position des agences de notation. La dégradation d'une des notes concernant le Portugal a accéléré la spéculation, mais c'est aussi à l'Union européenne, à la Banque centrale, au FMI, de mettre en place la coordination. La fermeté politique, avec le sang-froid nécessaire pour ne pas créer de catastrophisme, sera la ligne que Christine Lagarde et moi-même tiendrons auprès des marchés et de nos partenaires.

Sur la position du FMI, la meilleure réponse sera la mise en place d'une gouvernance européenne, et donc une avancée des positions de la Commission en la matière. Van Rompuy fera une communication en mai sur cette question. Dans le cadre de la préparation du G20, un important groupe de travail sera mis en place avec l'objectif d'offrir, d'ici à la fin de l'année, des réponses concrètes, techniques, sur le détail desquelles nous reviendrons régulièrement. C'est l'un des enjeux majeurs des mois qui viennent.

PermalienPhoto de Jérôme Chartier

S'agissant d'un dispositif de prêt du FMI sous conditions, la situation de la Grèce est très différence de celle d'autres pays, car nous avons la même monnaie qu'elle. Que ferons-nous si la Grèce ne respecte pas le plan ? Nous ne pouvons pas nous permettre de voir un pays « dévisser » une monnaie parce qu'il ne respecte pas les conditions fixées dans le pacte du prêt solidaire. Voilà pourquoi il y a urgence à déterminer les modalités de la gouvernance !

Enfin, nous ne sommes pas sous le coup d'une réaction subite des marchés : la situation du marché secondaire des obligations se dégrade depuis plusieurs mois. Certes, il est très bien de mettre les bouchées doubles après avoir traîné pour la prise de décision, mais la perspective du 10 mai me semble un peu lointaine du fait de la réactivité des marchés.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La crise grecque est la démonstration de l'impossibilité, comme nous l'avons toujours dit, de construire une union monétaire sans solidarité politique et financière. Dans cette affaire, l'important est d'agir vite et de le dire : notre groupe fera tout pour que la France puisse exprimer clairement son soutien financier.

Cette crise se développe en raison d'une totale dissymétrie entre la façon dont on a réagi à l'échelle du monde pour sauver le système bancaire et la lenteur avec laquelle des pays européens, pourtant dans l'union monétaire, ont réagi face à une crise touchant l'un des leurs.

Certes, il faut des conditions, mais les traités contiennent des critères. M. Chartier fait de grandes déclarations sur la rigueur budgétaire, mais la France, qui a abordé avec un déficit excessif cette période de crise majeure et connaît, de ce fait, aujourd'hui un déficit de 8 %, pourrait s'appliquer ces leçons à elle-même. Enfin, quand la maison brûle, en cas de crise, il faut faire vite.

Les conditions du prêt à la Grèce sont assez choquantes. Dans l'Union monétaire sans crise, les taux d'intérêt étaient les mêmes dans tous les pays, quel que soit leur niveau d'endettement. Est-il normal de prêter à un taux de 5 % à la Grèce quand la plupart des pays se refinancent à 1,5 % ? Une union monétaire fonctionnant normalement devrait prêter à ce taux-là. Pour régler le problème et éviter l'effet domino, l'Union monétaire doit affirmer clairement qu'elle peut soutenir un pays en difficulté avec les taux d'intérêt les plus favorables du marché monétaire. Pour se désendetter, la Grèce devrait bénéficier de taux faibles, contrepartie normale des conditions exigées.

Sur son temps de réaction et les taux d'intérêt, l'Europe ne s'est pas comportée comme devrait le faire une union monétaire.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Je remercie le groupe socialiste de l'esprit de responsabilité dont il fait preuve. Il est précieux que la position française s'exprime de manière unanime. Cela dit, s'il importe de témoigner notre solidarité envers la Grèce, il faut aussi faire accepter par l'opinion publique les conditions dans lesquelles elle s'exprime. Si nous avions retenu une logique de dépense budgétaire, un tel choix, compte tenu de notre niveau de déficit et d'endettement, aurait probablement soulevé des interrogations parmi les Français.

Les conditions de prêt s'inspirent de deux idées simples : d'une part, il faut adresser à la Grèce un double message de solidarité et d'exigence, la confiance n'excluant pas le contrôle ; d'autre part, le dispositif de soutien a été calqué sur les règles appliquées par le Fonds monétaire international. Je ne crois pas que l'on puisse contester cette position, qui semble suffisamment stable sur le plan politique pour nous permettre d'avancer vers un projet de gouvernance européenne et apporter à la Grèce un soutien pendant les trois années à venir.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La position allemande a coûté très cher à l'Europe et à l'euro. Le Gouvernement l'a-t-il indiqué aux Allemands, au moins dans le cadre de relations bilatérales ?

PermalienPhoto de Charles de Courson

Je poserai six questions à M. le ministre.

Premièrement, ne faudrait-il pas conditionner le versement de chaque tranche du prêt à la réalisation effective du plan de redressement ? S'il le souhaite, nous sommes disposés à aider le Gouvernement en déposant un amendement à cette fin. On ne peut demander aux vertueux de financer le vice. N'oublions pas que les sommes versées à la Grèce seront levées sur les impôts des Français ! C'est pourquoi je me garderai bien de critiquer la position de l'Allemagne. Si l'on peut mutualiser les risques en demandant aux bons élèves de financer les mauvais, c'est seulement à condition que les efforts des seconds soient réels.

Deuxièmement, le plan de redressement adopté par le Parlement grec est-il socialement soutenable par le peuple grec ? À titre de comparaison, je rappelle que le gouvernement français sait fort bien quelles mesures il faudrait prendre pour redresser nos finances publiques ; ce n'est pas pour autant qu'il les met en oeuvre.

Troisièmement, les caractéristiques du prêt – un taux de 5 % et une durée de trois ans – sont-elles soutenables ? Au fond, nul ne croit que la Grèce redressera ses finances publiques dans un tel délai. Je ne serais donc pas choqué qu'on lui octroie un prêt sur quinze ou vingt ans, selon le modèle des plans de redressement du FMI.

Enfin, puisqu'on ne peut demander à un peuple dont les élites politiques ont menti de se réformer en trois ans, pourquoi ne pas prévoir d'emblée des conditions réalistes en fixant au prêt une durée plus longue et un taux d'intérêt plus raisonnable ? En ce moment, l'Allemagne se finance autour de 3,25 %, alors que le taux auquel emprunte la Grèce augmente chaque jour. Pourquoi ne pas offrir à ce pays un taux avantageux, afin de l'aider, tout en conditionnant le versement d'une prime au redressement de son économie ? En d'autres termes, pourquoi ne pas prévoir un prêt intéressé afin de l'inciter à la vertu ?

Quatrièmement, la mutualisation du risque grec, avant celle du risque irlandais, portugais, voire espagnol, a déjà entraîné une augmentation des taux d'intérêt dans différents États. En a-t-on évalué le surcoût sur les emprunts de l'État français ou des autres pays de l'Union monétaire ?

Cinquièmement, la crise révèle qu'il n'existe pas d'outils cohérents au sein de la zone euro. Lorsque le Conseil des ministres se réunit ou que les membres du Gouvernement s'expriment devant le Parlement, les politiques perdent un temps précieux que les spéculateurs mettent à profit minute après minute. Pourquoi le Gouvernement ne créerait-il pas un fonds monétaire européen, qui lui permettrait de gérer les crises ? Si le FMI mettait autant de temps à réagir, il ferait lui aussi le jeu de la spéculation.

Enfin, pourquoi ne restructure-t-on pas la dette publique grecque ? Quand on redresse une entreprise en très grande difficulté, c'est bien ainsi qu'on procède : on commence par rééchelonner la dette, en allongeant la durée des emprunts et en abaissant les taux, avant de prévoir des plans sociaux.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

À la dernière question, je réponds tout de suite de manière négative. Les marchés ne cherchent rien d'autre qu'une restructuration de la dette grecque, qui produirait à terme une explosion de l'euro. Ils doivent savoir que ni la France ni le président du Conseil européen n'envisagent une restructuration de la dette grecque.

La clause que vous proposez d'introduire par le biais d'un amendement figure déjà dans le mécanisme mis en place. Dès lors que certains décaissements sont conditionnés au respect du programme associé, mieux vaut ne pas ajouter de nouveaux mécanismes de contrôle. La mise sous surveillance d'un pays indépendant, auquel sont imposés des efforts considérables, est déjà suffisamment délicate.

Vous m'avez demandé si les conditions du prêt sont socialement soutenables. Seule l'Histoire permettra de le dire. Cependant, si elles sont exigeantes, précises, douloureuses, et préoccupantes pour bien des familles grecques, elles sont incontournables.

Je confirme que le programme du Fonds monétaire et de la zone euro sera pluriannuel, ce qui fait actuellement l'objet d'une négociation.

Bien que le prêt ne soit pas intéressé, son taux augmentera s'il n'est pas remboursé au terme des trois ans prévus, ce qui introduit une forme de progressivité. Quoi qu'il en soit, il n'est pas possible de délivrer aux Grecs deux messages contradictoires. Si nous leur demandons d'apporter une réponse rapide à la situation, nous ne pouvons pas prévoir en même temps sur vingt ou trente ans – autant dire l'éternité – un programme qui, faute de créer la dynamique d'un retour rapide à l'équilibre, ne répondra pas aux inquiétudes des marchés.

Enfin, la France n'a pas à craindre un surcoût du crédit lié à la crise grecque. Vous connaissez trop bien ces matières, monsieur de Courson, pour ignorer que toute interrogation qui se fait jour sur un papier de mauvaise qualité s'accompagne d'un report de la demande sur les autres. C'est à la bonne catégorie qu'appartient le spread français. Il n'y a donc pas lieu de craindre une hausse.

PermalienPhoto de Charles de Courson

Vous ne m'avez pas répondu sur la création d'un FME.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

La question du FME, c'est-à-dire de la gouvernance, sera abordée par la France dans le cadre de la préparation du G20, dont elle assurera la présidence.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Si le Dr Baroin est un excellent clinicien percevant parfaitement bien les symptômes, sa pharmacopée se réduit à de la poudre de perlimpinpin. Peut-être gagnerait-il à écouter davantage M. de Courson, qui a fort bien décrit les risques que nous courons.

Avec la prudence qui sied à sa fonction, M. le ministre a évoqué en filigrane le peuple grec. Or, nous savons que le peuple grec a montré au cours du XXe siècle qu'il pouvait réagir durement à certaines situations. S'il descend dans la rue, qu'adviendra-t-il des propositions de l'Union qui prévoit de réduire les déficits publics dès 2010 dans une proportion tout à fait irréaliste ?

Analysons mieux la position de l'Allemagne. La situation du FDP à l'égard de la CDU est loin d'être celle de notre Nouveau Centre assis, pour ainsi dire, sur le porte-bagages de l'UMP. La position de M. Westerwelle, président du FDP, est plutôt celle du passager d'un side-car, qui essaierait de dévisser les boulons de la moto conduite par Angela Merkel : la seule chose qui compte à ses yeux est son électorat. C'est pourquoi l'après-9 mai ne me semble guère plus rassurant que l'avant-9 mai.

Monsieur le ministre, envisagez-vous vraiment de contraindre les malheureux paysans grecs à remplir sous astreinte les poches des prêteurs ? Mieux vaudrait modifier le dernier traité pour permettre à la Banque centrale européenne de consentir un prêt sans intérêt. Au moment où le système fait faillite, on ne nous propose pas d'autre politique que celle qui nous a conduits dans l'impasse. Avez-vous prévu une seule mesure pour freiner la spéculation et contraindre les mouvements du capital ?

Le Gouvernement est-il favorable à la création d'un « FMI européen », dont les décisions dépendraient du politique et non d'une sphère financière totalement autonome ? Faute de prendre une telle initiative, nous risquons de nous enfoncer dans une grave crise sociale. Enfin, je me demande comment les Français, jamais indemnes d'arrogance, peuvent accepter celle de l'Allemagne envers le peuple grec, auquel l'histoire de l'Europe doit tant.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Je ne suis pas persuadé que M. Brard m'ait posé une véritable question. Peut-être prépare-t-il déjà les échanges que nous aurons dans l'hémicycle. C'est par conséquent dans ce cadre que je lui répondrai.

PermalienPhoto de Michel Bouvard

Monsieur le ministre, je commencerai par saluer la bonne nouvelle que vous nous avez annoncée à propos de la TVA.

En ce qui concerne la crise grecque, j'aimerais savoir si les pays de l'Union ont envisagé des stress scenari sur la problématique de la dette souveraine. Disposons-nous d'une vue d'ensemble qui permettrait de calibrer nos décisions à venir ou faut-il considérer que l'hémorragie s'arrêtera quand le cas de la Grèce aura été traité ?

Au-delà de la défiance de la communauté financière, une des causes de la crise est le défaut de la Banque centrale de Russie, prêteur historique de l'État grec, laquelle s'est avérée incapable de renouveler ses prêts. Son retrait pourrait-il avoir des conséquences sur d'autres dettes souveraines, hors zone euro, dans les anciens pays du bloc soviétique ?

Comme M. de Courson, je doute de la soutenabilité des mesures de redressement. Peut-on compter sur des recettes apportées par les taxes sur les produits pétroliers qui s'avèrent particulièrement volatils ? Comment croire que le problème de la fraude et de l'évasion fiscale pourra être résolu rapidement, quand on sait qu'il est structurel et n'a pu être traité pendant des années ? Que se passera-t-il si les mesures prévues à cet égard ne peuvent être mises en oeuvre ?

Reste à examiner le taux du prêt consenti à la Grèce. Si la différence entre celui-ci et le taux auquel nous empruntons nous-mêmes ne me choque pas, puisqu'il faut bien financer le risque, on ne peut éluder la question du différentiel entre le taux des prêts consentis par les États européens et par le FMI. L'image de l'Union européenne et la logique de solidarité qu'elle met en oeuvre seraient gravement atteintes s'il s'avérait que le FMI propose à la Grèce de meilleures conditions que les État membres de l'Union.

PermalienPhoto de Michel Bouvard

Si les Grecs préfèrent se réfugier sous le parapluie américain plutôt que sous le nôtre, cela posera un problème réel.

Puisque nous sommes encore dans la phase préparatoire de budget, je rappelle au Gouvernement que la Commission des finances souhaite être étroitement associée aux éventuelles propositions de révision de la maquette. En 2007, les ministres avaient profité des congés électoraux du Parlement pour ne plus nous en faire part, mais nous souhaitons qu'ils reviennent désormais aux bonnes pratiques anciennes.

Enfin, nous aimerions disposer d'un état des prêts consentis aux pays étrangers soit par l'État lui-même, soit par certains de ses satellites, notamment par l'Agence française de développement. Il nous serait ainsi plus facile d'apprécier le contexte dans lequel intervient le prêt à la Grèce.

PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je suis très sceptique à l'égard de la solidarité rémunératrice que le Gouvernement vient d'inventer. Quand l'opinion grecque comprendra que ses sacrifices contribuent à enrichir ceux qui sont venus à son secours, la situation politique sera intenable. Qui a décidé que, pour voler au secours d'un pays, il fallait en même temps le punir ? Je comprends qu'il faille décourager le laxisme, mais un tel procédé ne peut qu'encourager ceux qui spéculent contre l'euro à continuer de plus belle !

Un Conseil européen des finances est-il prévu à brève échéance pour éviter que la situation ne s'aggrave en Grèce, mais aussi au Portugal, sinon dans toute l'Europe, compte tenu des écarts de taux que l'on constate ?

PermalienPhoto de Hervé Mariton

M. le ministre a affirmé que la restructuration de la dette ferait exploser l'euro. Par quel mécanisme ? Son raisonnement appelle quelques explications. Que se passera-t-il si la Grèce ne tient pas ses engagements en matière de politique économique ou budgétaire ?

J'aimerais également qu'il nous confirme que les modalités de présentation des 900 millions d'euros dans le collectif respectent parfaitement les règles de la LOLF relatives à l'affectation des surplus de recettes. Ma demande n'a bien entendu qu'un caractère technique.

La gouvernance européenne étant aussi la nôtre, nous sommes quelques-uns à avoir éprouvé un certain malaise sur la manière dont les engagements de la France sont présentés dans le cadre du programme de stabilité. À l'occasion de la crise grecque, il serait bon que le Gouvernement prenne des engagements au sujet du débat et du vote de ce programme.

Enfin, en ce qui concerne notre relation avec l'Allemagne, j'hésite entre l'analyse de M. Muet, la réponse feutrée de M. le ministre et la position de M. de Courson. Mais le Gouvernement français n'a-t-il pas lui-même changé de position au vu de la détérioration rapide de la situation en Grèce et au Portugal ?

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Puisque le gouvernement grec va tenter d'assainir ses finances sous le contrôle de ses partenaires européens, ceux-ci pourraient-ils l'inciter à obtenir le rapatriement de certaines sociétés maritimes florissantes qui, actuellement, ne lui rapportent pas un euro de recette fiscale ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le taux du prêt tient compte de l'opinion française comme des discussions que nous avons eues avec les autres États, avec le FMI et avec la Banque centrale européenne. Notre but est d'obtenir que la Grèce mette en place des dispositifs de sincérité budgétaire ainsi que des réformes permettant un retour à l'équilibre. À défaut, le plan n'a aucune chance de fonctionner. Loin de nous l'idée de nous enrichir aux dépens d'un pays en difficulté, mais nous devons créer un système de référence international. Si le taux retenu produit à terme quelque 150 millions d'intérêts, ce qui, à tout prendre, n'est pas démesuré, je rappelle qu'il nous est imposé par la situation.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Nous en reparlerons. Les discussions de la Commission des finances sont vertueuses, au sens où elles permettent d'avancer. Mais si la discussion en séance publique remettait en cause le taux d'intérêt, le débat n'aurait sans doute plus la même forme.

Monsieur Bouvard, n'entrons pas dans la politique-fiction. Que vont faire le Portugal, l'Espagne et l'Irlande ? Comment se comporteront les agences de notation ? Comment réagiront Fitch, d'inspiration plutôt européenne, et Moody's, d'inspiration anglo-saxonne ? Ces questions ne peuvent être tranchées et rappelons que le pire n'est jamais sûr. Notre objectif aujourd'hui est d'éteindre l'incendie, en coordonnant au niveau international les modalités d'intervention budgétaire et bancaire, et en levant les dernières réticences allemandes.

Je vous rappelle, monsieur Emmanuelli, que le président du Conseil européen a proposé de réunir les chefs d'État et de gouvernement européens le 10 mai.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le taux proposé par le FMI est de 3,75 % en variable, alors que celui de la zone euro est de 5 % en fixe, ce qui est pratiquement équivalent. Il n'y a donc pas lieu d'ouvrir un débat sur le différentiel.

Concernant les prêts aux États étrangers, je vous renvoie au rapport rédigé chaque année dans le cadre du projet de loi de finances. Les comptes de l'AFD sont publics. Des parlementaires siègent d'ailleurs à son conseil, comme dans toutes les grandes institutions bancaires, et leur participation y est appréciée. M. Bouvard en sait quelque chose.

Monsieur Mariton, la restructuration de la dette grecque n'est pas en discussion. La position des responsables européens et du Gouvernement français est ferme et définitive à ce sujet. Une restructuration de la dette grecque comporterait le risque d'une fermeture du marché avec une contagion massive de la crise dans la zone euro. Qui prêterait à un pays dont le remboursement est incertain ? Il faut savoir qu'en vingt ans, le mode de financement des États a considérablement évolué. Aujourd'hui, moins de 20 % des emprunts s'effectuent auprès des banques, contre 80 % au début des années quatre-vingt. Nous ne prendrons pas le risque d'une fermeture des marchés. C'est pourquoi la question de la restructuration de la dette ne se pose pas.

Le prêt à la Grèce ne modifie pas la règle d'affectation des surplus de recettes. Il n'ajoute pas à notre programme d'emprunt. Il ne fera donc pas augmenter notre dette. Il s'agit d'une opération purement financière, non d'une dépense budgétaire définitive.

Le Gouvernement respecte la règle qui veut que les surplus fiscaux soient affectés à la réduction des déficits.

Je confirme par ailleurs l'amélioration de 900 millions d'euros par rapport au dernier collectif. De ce fait, l'évolution du déficit par rapport aux critères de Maastricht tient dans l'épaisseur du trait.

PermalienPhoto de François Hollande

Chacun mesure qu'au-delà de la situation de la Grèce, le vrai problème qui se pose est celui de la stabilité, sinon de l'avenir de la zone euro. C'est pourquoi la position exprimée par M. Muet sur le vote du collectif relève de l'évidence.

Ces dernières semaines, la spéculation a mis à profit le temps que perdait la zone euro. Il est dramatique que celle-ci ne dispose pas de mécanismes lui permettant d'agir au moment opportun. À présent, c'est aux États de le faire. Pourquoi attendre le 10 mai, si le principe d'une intervention est acquis ? On laisse ainsi penser qu'un doute demeure sur la solidarité due à la Grèce. Dès lors, nous nous exposons à connaître une période d'instabilité, au cours de laquelle les agences de notation peuvent dégrader la note de certains pays, tandis que la Grèce serait affectée par la spéculation. Si tel était le cas, nous risquerions d'avoir à prêter une somme supérieure aux 6 milliards d'euros inscrits au collectif en autorisations d'engagement. Plus le risque d'ajouter des nouvelles conditions au prêt sera grand, plus forte sera la spéculation, et plus sûre sa victoire sur les États.

Que se passera-t-il jusqu'au 10 mai ? Une réunion des ministres de l'économie et des finances se tiendra-t-elle avant cette date ? Comment l'Union affirmera-t-elle sa position en attendant ? Enfin et surtout, à quoi cette réunion servira-t-elle ?

PermalienPhoto de Daniel Garrigue

L'un des facteurs essentiels de la crise est l'absence de gouvernance économique dans la zone euro, mais cette gouvernance doit-elle prendre la forme d'une surveillance ou celle d'une véritable coordination des politiques économiques ? Les propositions précises formulées avant la crise par le président de l'Eurogroupe, M. Jean-Claude Juncker, sont demeurées sans suite. Où cette gouvernance doit-elle s'exercer : au sein du Conseil européen, dans l'Eurogroupe ou dans une autre instance spécifique qui reste à créer ? Doit-elle pouvoir disposer d'un fonds monétaire européen ou de garanties systématiques ?

Enfin, que pensez-vous de la proposition de certains régulateurs qui souhaitent la suspension des transactions sur les CDS souverains ?

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

À mon tour, monsieur le ministre, j'aimerais vous interroger sur la crédibilité des instances de contrôle, qu'elles émanent de l'Union – comme Eurostat –, de la BCE ou du FMI.

Vous avez rappelé que les agences de notation avaient évolué récemment sur la dette souveraine des États. Je m'étonne cependant que les instances de contrôle n'aient pas cherché plus activement des informations dans ce domaine. Si l'on peut comprendre que le précédent gouvernement grec ait cherché à dissimuler les dérives anciennes de ses finances publiques, il est plus étrange que les instances européennes aient à ce point manqué de vigilance. Dès lors, est-il pertinent de conforter leurs missions ?

La date du 10 mai nous rappelle certains souvenirs, en matière de plan de rigueur et de dévaluation. Au moment de la création de l'euro, aucun mécanisme d'ajustement n'a fonctionné à l'égard de la drachme, dont la conversion en euros a été fixée sans tenir compte de certaines réalités. Il existait alors un billet de 100 drachmes, correspondant à 20 centimes d'euros. Ce simple exemple montre l'écart entre le niveau de vie des Grecs et le niveau de la nouvelle devise. La création d'un billet d'un euro me semble indispensable pour aider les habitants de certains pays à comprendre la transformation quantitative qu'a opérée le passage à la monnaie commune.

Pouvez-vous nous confirmer que l'exposition de la France au risque souverain grec est supérieure ou équivalente à celle de l'Allemagne ?

J'aimerais également que M. le président de la Commission nous indique s'il a prévu d'inviter le directeur général du FMI, dont le rôle est particulièrement sensible en ce moment, à s'exprimer devant la Commission.

Enfin, autre sujet, l'aide à Haïti, dont vous avez indiqué qu'elle prenait la forme d'un transfert de crédits, est-elle assurée et dans quelle mesure sera-t-elle consolidée par l'apport des collectivités locales qui ont voté des subventions à cette fin ?

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

M. Hollande s'inquiète du choix qui a été fait de la date du 10 mai. Il sait cependant quel est le poids de l'Allemagne non seulement dans le budget, mais aussi dans les engagements de l'Union européenne, notamment pour la fixation du calendrier de négociation. Faut-il rappeler qu'elle figure au premier rang de nos voisins, amis et partenaires de l'Union ?

Cela dit, nous ne pouvons que nous réjouir de la position adoptée avant-hier par Mme Merkel, qui a ainsi pris un peu d'avance sur le calendrier électoral. La France, qui a honoré tous ses rendez-vous, souhaite rapprocher les échéances. Par ailleurs, les ministres des finances, qui sont régulièrement en contact, se retrouveront prochainement pour une réunion prévue dans l'accord du 11 avril. Tout ce qui vise à hâter le calendrier va dans le sens de la position que nous défendons.

Monsieur Garrigue, la France porte sur les CDS souverains un projet de réforme ambitieux, visant à garantir la transparence du marché et à doter le régulateur d'un pouvoir d'urgence. Une directive interviendra fin juin sur la question.

Monsieur Giscard d'Estaing, vous avez émis des doutes sur la crédibilité des instances de contrôle, mais je rappelle que c'est Eurostat qui a révélé certaines erreurs des comptes publics grecs. Cette instance a joué un rôle dans la découverte de l'insincérité des chiffres qui avaient été présentés. La situation invite donc à renforcer ses pouvoirs.

J'en viens aux règles du pacte de stabilité et de croissance. Si l'Espagne est actuellement en difficulté, c'est en raison non d'une dérive budgétaire, mais d'un surplus d'endettement de la sphère privée. La bulle spéculative immobilière est un point d'interrogation, qui appelle sans doute de nouveaux modes de contrôle. Nous sommes à un carrefour de notre histoire tant pour la gestion de la défense de notre monnaie que pour les modalités de gouvernance ou la mise en place de nouvelles formes de surveillance. C'est pourquoi, pourvu que nous agissions avec rigueur et sang-froid, il y a lieu d'être optimiste, puisque nous allons vers davantage de contrôle, de gouvernance économique et de coordination.

L'Europe est face à un grand rendez-vous monétaire, budgétaire et politique. Fidèle à une ligne qu'elle défend depuis des années, la France usera de toute son influence pour atteindre ses objectifs, notamment dans le cadre du G20.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Il me semble à propos d'Eurostat qu'il faut un renforcement de ses moyens mais surtout de son indépendance. On a pu constater que cette instance dépend aujourd'hui d'une direction qui la rend moins productive qu'on ne l'espérait.

Concernant le FMI, ce dossier est une question d'État, ce qui justifie en grande partie, me semble-t-il, ce que s'apprête à être l'attitude de l'opposition. Je me rapprocherai donc des deux ministres concernés. Si, par leur voix, le Gouvernement manifeste le souhait d'être aidé notamment par le directeur général du FMI, je me ferais une joie de le solliciter, en accord avec le Bureau de la Commission.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Le directeur général du FMI se rend bien au Bundestag !

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

J'ignore la nature de ses contacts avec les autorités allemandes, mais je souhaiterais pour ma part, avant de l'inviter devant notre Commission, en parler aux autorités françaises.

PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le ministre, mon interpellation d'hier ne portait pas spécialement sur la crise grecque, mais sur le rôle des agences de notation. Certaines d'entre elles ont récemment dégradé le Portugal, dont vous nous avez dit que la situation est comparable à celle de la France.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Ce n'est pas vraiment ce que j'ai dit !

PermalienPhoto de Christian Eckert

Une agence peut ainsi dégrader la notation d'un pays, alors que nombre d'organismes – Eurostat, la BCE, le FMI – concourent déjà à la bonne information des marchés. Comment pensez-vous agir dans le cadre du G20, si tant est qu'on puisse attendre jusque-là, pour contrer le rôle de ces agences, dont l'indépendance n'est pas toujours avérée ?

Par ailleurs, êtes-vous favorable à l'organisation d'un marché de ces objets volatils non identifiés que sont les CDS, ou penchez-vous plutôt pour leur interdiction ?

PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Mes questions sont peut-être iconoclastes, mais je pense qu'elles doivent être posées.

La Grèce est-elle en capacité de rembourser la somme qui va lui être prêtée ? Compte tenu des mensonges qu'on lui reproche et de la difficulté d'établir une parité entre la drachme et la zone euro, est-il envisageable, est-il prévu qu'elle sorte de la zone euro et, le cas échéant, pourra-t-elle la réintégrer ?

PermalienPhoto de Marc Goua

Nous avons beaucoup parlé de crédibilité, mais c'est sur la procédure que j'aimerais vous interroger.

Permettez-moi de citer le projet de loi de finances rectificative : « Les États membres de la zone euro décident à l'unanimité de l'activation du plan de soutien. Un État membre peut néanmoins choisir de ne pas participer au versement d'une tranche du programme sans que cela empêche le soutien par les autres États membres. » Or, il est précisé ensuite que la clé de répartition, qui est de 20,97 % pour la France, serait recalculée en cas de non-participation d'un État membre au versement d'une tranche. Cette disposition me semble assez inquiétante.

PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur Eckert, si j'ai pu comparer la situation de la France et du Portugal, c'est pour distinguer la situation des différents pays. La dette publique de l'Espagne représente 75 % de sa richesse nationale, et celle du Portugal est comprise entre 75 % et 80 %. C'est en ce sens que l'on peut comparer ces pays avec la France, mais la comparaison s'arrête là. La dette de la Grèce correspond à 115 % de sa richesse nationale.

La France a le privilège commun avec l'Allemagne, les Pays-Bas et le Luxembourg de disposer d'un triple A stable, attribué par les trois agences de notation. Cette situation est structurante, au sens où elle conditionne l'attitude des marchés et l'accès des États au financement.

Les agences de notation ont déjà fait l'objet d'un règlement communautaire, qui prévoit l'application de règles spécifiques. Mme Lagarde souhaite en confier le contrôle à l'Autorité des marchés financiers, l'AMF, ce qui représente une évolution importante.

La décision visant à fixer le cadre des CDS, qui sont des assurances sur les prêts, interviendra fin juin, conformément au calendrier communautaire.

Je vous répondrai d'un mot, monsieur Cousin : il n'est pas envisageable que la Grèce sorte de l'euro.

Enfin, monsieur Goua, le projet de loi offre aux États une faculté juridique qui ne correspondra pas nécessairement à la situation. L'Union a manifesté la volonté d'accompagner la remise à flot de la Grèce. Les gouvernements seront en relation étroite à ce sujet, et les parlements seront associés au suivi de leur décision. Nous arrêterons donc nos décisions ensemble, dans le respect de la représentation nationale de tous les pays membres.

PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir répondu à nos questions.

Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 28 avril 2010 à 9 h 30

Présents. - M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Gérard Bapt, M. Jean-Marie Binetruy, M. Pierre Bourguignon, M. Michel Bouvard, M. Jérôme Cahuzac, M. Thierry Carcenac, M. Gilles Carrez, M. Yves Censi, M. Jérôme Chartier, M. Alain Claeys, M. René Couanau, M. Charles de Courson, M. Jean-Yves Cousin, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Flory, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Marc Goua, M. François Goulard, M. David Habib, M. Laurent Hénart, M. François Hollande, M. Marc Laffineur, M. Jean-François Lamour, M. Marc Le Fur, M. Patrick Lemasle, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Jean-Claude Mathis, M. Pierre Moscovici, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, Mme Béatrice Pavy, M. Jacques Pélissard, M. Alain Rodet, M. François de Rugy, M. Jean-Claude Sandrier, M. Michel Sapin, M. François Scellier, Mme Isabelle Vasseur, M. Michel Vergnier, M. Philippe Vigier, M. Gaël Yanno

Excusés. - M. Claude Bartolone, M. Nicolas Forissier, M. Jean-Pierre Gorges, M. Jean Launay, M. Victorin Lurel

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Pierre Brard, M. Lionnel Luca, M. Lionel Tardy