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Séance en hémicycle du 8 juin 2011 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2011 (nos 3406, 3503, 3501).

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles, s'arrêtant à l'amendement n° 369 à l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 369 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame la présidente, monsieur le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, si les paroles non prononcées pouvaient être converties en euros, il y a longtemps que, grâce à François Baroin, il n'y aurait plus de déficit public. En effet, le moins que l'on puisse dire c'est qu'il est économe de sa parole. Ainsi, il n'a pas répondu au fait qu'il se faisait tirer les oreilles par la Commission européenne. Il pourrait nous donner la primeur de sa réaction par rapport aux remontrances sévères qui lui sont faites.

Par ailleurs, il n'a pas réussi à démentir de façon convaincante l'information que j'ai donnée selon laquelle Liliane Bettencourt, qui paie cette année 40 millions d'euros, n'en paiera plus que 10 millions l'année prochaine grâce à cette réforme. Sans doute le fait qu'elle ait encore des problèmes de famille explique-t-il qu'on la fasse bénéficier de nouveaux bonus !

Juste avant la levée de la séance de cet après-midi s'était engagée une discussion fort intéressante entre Gilles Carrez, notre rapporteur général, et le président de la commission des finances sur la résidence principale. Nous y revenons d'une autre manière avec cet amendement puisque le bouclier fiscal, qui constitue une cagnotte de 900 millions d'euros, est abrogé, mais vous remplacez cela par une super cagnotte.

Parlons du Perreux, de Montreuil, des Landes même pour faire plaisir à Henri Emmanuelli ! Payer l'impôt, c'est un honneur, c'est un devoir dès lors que nous avons en partage nos valeurs républicaines. Et quand on possède une maison ou un appartement de 1 million d'euros, pour faire référence aux valeurs qui étaient exposées par le rapporteur général, payer l'impôt c'est accomplir son devoir. Ce qui est le plus scandaleux d'ailleurs, ce n'est pas ce qui est acquitté au titre de l'ISF ; c'est plutôt ce qui est acquitté au titre de la taxe foncière sur le bâti, qui fait que de pauvres veuves se retrouvant seules, après cinquante ans de vie commune, sont obligées de vendre leur pavillon de banlieue parce que la taxe foncière est trop chère. Ce n'est pas l'ISF qui est en cause et vous n'avez jamais consenti d'effort pour que la charge soit moins lourde pour ces braves femmes qui ont travaillé toute leur vie et qui sont obligées de vendre leur pavillon pour pouvoir payer l'impôt. Et là ce n'est pas du tout de spoliation qu'il est question, de confiscation comme vous diriez, monsieur le rapporteur général !

Il ne faut pas manquer d'audace pour dire que la résidence principale devrait être exonérée. Je vais prendre deux exemples : un pavillon de Montreuil et un hôtel particulier au 25 rue des Saints-Pères – je dis cela au hasard ! Est-il normal que l'hôtel particulier soit exonéré ? Bien sûr que non, et je trouve que la proposition du président de la commission des finances d'instaurer un abattement plafonné à 300 000 euros est particulièrement sensée car, au-delà, il est normal d'acquitter l'impôt. Il est immoral de mettre sur un plan d'égalité le petit propriétaire qui s'est saigné à blanc avec un emprunt qu'il va rembourser une bonne partie de sa vie et le parvenu qui, après des opérations plus ou moins douteuses, a réussi à se rendre propriétaire d'un hôtel particulier et que vous voulez exonérer totalement de l'impôt sur la fortune au titre de sa résidence principale. Je sais bien que le mot « immoral » n'est pas coté à la bourse des valeurs, monsieur le ministre, mais selon moi il est coté en un autre lieu beaucoup plus précieux que la bourse : le Panthéon, là où sont nos hommes célèbres et où vous irez peut-être quand vous aurez choisi un autre chemin que celui que vous empruntez actuellement.

Madame la présidente, j'en resterai là …

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Vous avez déjà largement dépassé votre temps de parole, monsieur Brard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je le sais, madame la présidente, mais votre silence montrait combien vous étiez attentive à ce que je disais parce que c'était convaincant ! D'ailleurs, je suis convaincu que même M. le ministre, qui est économe en paroles depuis le début du débat, ne manquera pas de répondre à mes arguments à la fois sur le fait qu'il s'est fait remonter les bretelles par l'Union et qu'il n'en a rien dit pour l'instant, sur l'impôt de Mme Bettencourt et sur mon amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 369 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté cet amendement, mais vous avez satisfaction, monsieur Brard.

Cela fait dix-neuf ans que je vous entends évoquer le cas de la veuve éplorée de Montreuil qui est obligée de vendre son petit pavillon de banlieue.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Eh bien, au bout de dix-neuf ans, nous venons de régler la question de cette veuve de Montreuil. En effet, l'article 14 prévoit la mise en place, comme pour la taxe d'habitation, d'un plafonnement de l'impôt foncier pour ceux pour lesquels il représente une charge fiscale excessive.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Cela représente 7 millions d'euros ! Tout à l'heure, vous en avez lâché 130, 150, 200 !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Parmi ces 7 millions, il y aura le cas cher à votre coeur, monsieur Brard, et auquel nous sommes tous très attentifs. Donc, vous avez satisfaction sur ce point, à défaut d'avoir satisfaction sur votre amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement, pour donner l'avis du Gouvernement sur cet amendement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Je voudrais revenir sur ce que vient de dire M. le rapporteur général. Je ne parlerai pas de la veuve de la Sarthe ou de Montreuil, mais ce que dit M. Brard mérite un peu plus d'attention car cela met en évidence toute l'injustice de cette réforme, et surtout l'absence de préoccupation de nos dirigeants pour les Français les plus modestes. Nos plus hautes autorités annoncent avoir de l'argent, mais malheureusement elles le distribuent à ceux qui ont entre 1,2 et 1,9 million de patrimoine, et les autres n'ont que peu, voire rien. Celui qui dispose de 3 millions d'euros se verra appliquer un taux de 0,25 % sur tout son patrimoine, et paiera donc 5 000 euros, contre 8 000 euros, ce qui fait cinq fois le SMIC. Avec des premières tranches faibles, le taux d'imposition maximal des très riches baissera significativement, passant de 1,8 % à 0,5 %. Il est incohérent de faire cette réforme à un moment où la crise frappe fortement notre pays, notamment les plus modestes, et où la spéculation des marchés financiers rôde toujours, menaçant l'équilibre budgétaire des États. La France n'a pas les moyens de telles largesses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mme Karamanli vient de faire une remarque judicieuse qui renvoie à mon amendement : le Gouvernement fait des cadeaux aux plus riches alors que la France n'en a pas les moyens. La preuve en est, monsieur le ministre, que vous venez de vous faire rappeler à l'ordre par la Commission, et vous n'avez toujours pas répondu sur ce point. En fin de compte, on vous critique parce que vous aggravez les déficits alors que vous accordez des privilèges.

Quant à la veuve de Montreuil (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP), monsieur le rapporteur général, je pense qu'elle est beaucoup plus proche de la veuve de Troyes que de celle du Perreux. M. le ministre doit être schizophrène puisque quand il est à Paris, il oublie qu'il a des attaches à Troyes. Or, il y a là-bas, comme à Montreuil, des veuves qui ont travaillé toute leur vie et que la mort a séparé de leur compagnon. Moi, je ne parle pas de plafonnement de la taxe foncière pour les veuves en question. En 1989, j'avais fait voter un amendement, qui a été abrogé par le gouvernement Raffarin, puis rétabli par le gouvernement Jospin, pour instituer un lien entre l'impôt dû au titre de l'habitation, que ce soit pour la location ou pour la propriété, et l'impôt sur le revenu. Il ne s'agit donc pas d'un plafonnement. Il s'agit de tenir compte de l'état réel de pauvreté. Monsieur le rapporteur général, il y a une différence essentielle entre la veuve du Perreux et la veuve de Montreuil : la veuve de Montreuil est tellement réduite à la pauvreté par votre système que la vôtre a les moyens d'être joyeuse parce qu'elle est encore riche, même après le décès de son mari.

(L'amendement n° 369 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie de trois amendements, nos 37 , 36 et 35 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Il existe, dans le calcul de l'ISF, une vraie injustice qui consiste en l'imposition des contribuables ayant atteint le seuil dès le premier euro. L'aménagement d'une tranche intermédiaire de 100 000 euros pour passer d'une tranche à l'autre atténue l'injustice sans la résoudre. La seule solution est celle qui a été retenue pour l'impôt sur le revenu ou dans le barème des droits de donation ou succession, à savoir un taux progressif par tranche et non au premier euro.

Cette observation est plus sensible encore en considérant que la valeur de la résidence principale est très variable selon la localisation de ladite résidence. Une résidence principale vaut beaucoup plus à Paris que dans la majorité des villes de province compte tenu des prix énormément élevé de l'immobilier à Paris.

Ainsi, il conviendrait de préciser que l'ISF n'est pas dû au premier euro mais s'entend de 0,25 % à compter de 800 000 euros pour les patrimoines supérieurs à 1 300 000 euros et inférieurs à 3 millions d'euros, et de 0,5 % à compter de 3 millions d'euros, toujours à partir de 800 000 euros, et non dès le premier euro.

Le système choisi par le Gouvernement est donc maintenu, simplement on précise que la taxation s'entend à partir de 800 000 euros et non plus dès le premier euro.

En complément, afin de compenser les pertes de recettes par l'État, serait créée une nouvelle tranche de 0,75 % pour les patrimoines dont la valeur nette taxable dépasserait 7 millions d'euros.

Voilà pour les amendements nos 36 et 37 ; quant à l'amendement n° 35 , il est identique mais ne reprend pas la création d'une nouvelle tranche au barème de l'ISF.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté ces trois amendements. En effet, le dispositif que nous propose le Gouvernement est équilibré. Nous avons pris garde à ce qu'aucun contribuable ne paie davantage qu'auparavant, à l'exception de ceux qui bénéficiaient du bouclier fiscal.

À partir de 1,3 million d'euros, le contribuable est assujetti dès le premier euro, mais son entrée dans le barème à 1,3 million va se faire, compte tenu d'un système de décote, à un niveau d'ISF qui sera de l'ordre de la moitié de ce qu'il acquittait avant.

Beaucoup s'étaient inquiétés de cette fiscalisation au premier euro, mais il n'y a aucun cas de contribuable ne bénéficiant pas du bouclier qui se retrouve à devoir acquitter un ISF supérieur à ce qu'il payait auparavant. Dans ces conditions, un dispositif qui joue dès le premier euro est parfaitement acceptable.

L'un de vos amendements propose de compenser le manque à gagner qu'occasionnerait pour l'État le fait de ne pas appliquer le dispositif au premier euro en créant un taux supérieur de 0,75 % pour les patrimoines supérieurs à 7 millions d'euros. Mais ce n'est pas acceptable, car l'intérêt de cette réforme consiste à avoir désormais un barème de l'ISF qui soit compatible avec le rendement moyen des actifs. Or, c'est le cas pour un taux de 0,5 % ; avec un taux de 0,75 %, cela devient très difficile. Vos amendements bouleversent donc l'équilibre remarquable de cette réforme. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Nous étions évidemment informés des idées défendues par MM. Suguenot et Taugourdeau, mais il me semble que les arguments du rapporteur général sont d'une grande pertinence.

En effet, notre première idée était de supprimer le bouclier fiscal mais non sans en évaluer les conséquences pour le contribuable. Si le bouclier a été mis en place, c'est essentiellement du fait de l'ISF. Je ne reviens pas sur le plafonnement Rocard : le gouvernement de gauche en place à l'époque l'a instauré précisément pour corriger les effets confiscatoires d'une tranche marginale à 1,5 %, avec une réduction de l'accès aux obligations d'État de l'époque.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Avec la même lucidité, le Gouvernement Villepin a porté le plafonnement à 60 %, et cette majorité, sous l'impulsion du président Nicolas Sarkozy, l'a abaissé à 50 %.

Le bouclier fiscal abandonné, nous nous sommes interrogés, une fois actée la suppression de la première tranche de l'ISF, sur les imperfections du dispositif. Elles concernaient l'assiette mais aussi le caractère progressif et la multiplication des tranches.

Un examen en détail des populations concernées nous a convaincus que le plus pertinent était de limiter le nombre de tranches à deux, avec un taux d'imposition supérieur de 0,5 %. Cette solution permettait de clore le débat sur d'éventuelles restitutions ou sur la mise en place d'un nouveau plafonnement ; en outre, elle supprimait le caractère confiscatoire de l'impôt.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement souhaiterait que vous retiriez vos amendements sur lesquels il ne pourrait qu'émettre un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Je voudrais souligner l'intérêt de l'exposé des motifs de ces trois amendements et souligner qu'alors qu'aucun de leurs signataires n'est député de Paris, ils ont pointé la situation particulière des Parisiens, du fait de la flambée des prix de l'immobilier. Ces trois amendements ont également le mérite de rappeler la nécessité de cette règle de justice fiscale qu'est la progressivité.

Je regrette donc que la situation extrêmement tendue du logement à Paris n'ait pas frappé ces mêmes signataires lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2010, à l'occasion duquel le Gouvernement a, entre autres éléments baroques, imposé aux Parisiens et aux Franciliens de nouvelles taxes, alors que ces populations sont confrontées à des prix de l'immobilier sans commune mesure avec ceux pratiqués sur le reste du territoire.

Mais puisque MM. Suguenot, Straumann, Tardy, Philippe Cochet, Lefranc, Philippe Armand Martin, Gatignol et Taugourdeau sont sensibles à cette question, je ne doute pas qu'ils seront également sensibles aux autres articles de ce projet de loi de finances rectificative qui concernent le logement, premier poste de dépense des Parisiens et des Franciliens, et qu'ils seront à nos côtés sur ces questions.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je voudrais souligner un des dangers que comporte ce texte. Vous faites entrer les contribuables dans l'ISF à partir d'un seuil de patrimoine de 1,3 million d'euros, mais vous faites payer au premier euro.

C'est une méthode d'autant plus curieuse que l'impôt reste soumis au principe déclaratif : je serais curieux de connaître le nombre de ceux qui vont déclarer des patrimoines d'une valeur comprise entre 1,25 et 1,29 million d'euros. Sans doute seront-ils légions, car l'appréciation de la valeur de certains biens reste parfois approximative. J'ose espérer que les services de contrôle de Bercy cibleront particulièrement ceux dont on peut penser que leur patrimoine approche ces montants-là.

Il est absurde d'être en situation, à quelques euros près, de rentrer dans l'ISF et de devoir acquitter un impôt qui avoisine les 1 500 euros.

Une telle méthode est incompréhensible pour les Français. Dans tous nos systèmes d'imposition, nous appliquons des dispositifs de lissage, qui permettent d'établir des courbes continues d'une tranche à l'autre. Or nous avons ici une courbe parfaitement discontinue, puisque l'on passe brutalement de zéro à 1 500 euros.

Pour rejeter ces amendements – que nous ne voterons pas, mais pour d'autres raisons –, vous arguez du fait que la réforme est équilibrée. Mais je sais ce que c'est qu'un équilibre financier, et le mot dans votre bouche a plutôt un sens subjectif, moral et politique.

Les amendements en discussion sont financièrement équilibrés puisqu'ils proposent une compensation au manque à gagner de l'État, par une surtaxation au-delà de 7 millions, mais c'est une autre histoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Je me suis exprimé hier – et j'ai déposé un amendement allant dans ce sens – pour dire combien je regrettais que l'on ne supprime pas complètement l'ISF, qui est un impôt antiéconomique, qui défavorise la compétitivité, l'investissement et donc la création d'emplois dans ce pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

J'ai bien entendu le plaidoyer de Mme Mazetier, qui se plaignait de l'instauration de nouvelles taxes. Je lui renvoie la balle : dans quelques heures, nous soutiendrons, avec mon collègue Yves Vandewalle, un amendement qui tient compte des nouvelles réalités économiques, notamment en grande couronne, et qui vise à baisser les nouvelles taxes sur les bureaux en Île-de-France. J'espère donc que Mme Mazetier le votera.

Pour le reste, je suis cosignataire de l'amendement n° 35 , même si Gilles Carrez a présenté comme la merveille des merveilles une usine à gaz qui consiste à pratiquer des écrêtements tous les cent mille euros, entre 1,3 et 1,4 millions d'euros et au-delà de 3 millions… Franchement, monsieur le ministre, si l'on avait conservé le seuil des 800 000 euros, nous aurions facilité le travail des services fiscaux, sans être obligés d'embaucher de nouveaux génies de l'informatique et des finances, et nous aurions trouvé une solution pour minorer l'impact de la résidence principale de Mme Mazetier sur le calcul de son impôt !

Je propose donc à Mme Mazetier de voter l'amendement n° 35 , ainsi que l'amendement que nous défendrons avec Yves Vandewalle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur Paternotte, mettre en cause les fonctionnaires n'est pas très convenable, car ils n'y sont pour rien.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Je ne les ai pas mis en cause ; j'ai dit que je ne voulais pas de nouveaux recrutements !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Les responsables, ce sont les membres du Gouvernement, et il faut bien reconnaître que François Baroin ne s'est défaussé sur personne sinon sur lui-même.

Lorsque le ministre consent à vouloir s'exprimer, les choses deviennent passionnantes car, dès lors qu'ils ont le décodeur, les Français comprennent la politique gouvernementale. Et je m'adresse ici, non pas au ministre qui connaît tout ça par coeur, mais à nos concitoyens qui nous regardent sur internet ou sur la TNT et qui sont plus nombreux que ceux que l'on réunira jamais dans une salle de meeting.

Que nous dit le ministre ? Qu'il a décidé de supprimer le bouclier fiscal mais en évaluant les conséquences de cette décision. Et qu'a-il alors constaté avec effroi ? Que les riches et les privilégiés allaient perdre quelques sous – 600 ou 700 millions d'euros. Comme dirait Charles Amédée de Courson : « les riches vont devenir pauvres ». Et de créer une nouvelle catégorie, celle des « pauvres riches » ! Il faut du coup réagir vite, ce qui explique que vous réintroduisiez en douce 2 milliards d'euros, qu'il faut bien trouver quelque part.

Monsieur le ministre, expliquez-nous pourquoi Mme Bettencourt, qui paie 40 millions d'impôts cette année, n'en paiera plus que 10 l'année prochaine grâce à votre réforme ! Voilà un exemple concret qui parle à la France entière. La manière dont vous habillez le reste relève du magasin de farces et attrapes mais n'est pas de nature à nous convaincre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Nous ne voterons pas cet amendement même s'il présente le mérite de mettre le doigt sur une absurdité du dispositif. Dans votre volonté d'écraser complètement la progressivité de l'ISF, vous relevez le seuil d'entrée, mais, comme la perte financière serait considérable, vous imposez au premier euro, c'est-à-dire que vous créez un effet de seuil formidable dans un impôt qui était progressif et lisse avec des taux marginaux. Vous êtes obligé de construire une usine à gaz pour lisser quelque peu cet impôt et éviter que les personnes concernées ne concentrent leur déclaration juste avant les seuils de l'impôt, comme l'a très bien décrit mon collègue Christian Eckert.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cela devrait vous inviter à réfléchir sur votre réforme mais nous aurons l'occasion d'y revenir avec d'autres amendements.

Le ministre nous expliquait par ailleurs que, dès lors que le bouclier fiscal avait été créé parce que l'ISF existait, la suppression de ce bouclier imposait que soit corrigé l'ISF. Je vous demande simplement d'avoir en tête les ordres de grandeur des personnes concernées : 600 000 de nos concitoyens détiennent en moyenne plus d'1 million de patrimoine brut et sont donc concernées par l'ISF. Combien le sont par le bouclier fiscal ? 14 000 dont 10 000 paient l'ISF. Combien sont-ils dans la première tranche que vous supprimez ? Un sur mille était concerné par le bouclier fiscal. Même dans la dernière tranche où sont concentrés ceux qui bénéficient du bouclier fiscal puisque sont concernées essentiellement les personnes dont le patrimoine dépasse les 16 millions, 1000 bénéficient du bouclier fiscal et 600 non.

Résultat: vous abaissez fortement l'impôt pour 590 000 personnes et pour les 10 000 qui sont concernées par les deux dispositifs, il y a compensation ou pas. Au final, votre réforme est un véritable cadeau fiscal pour les 600 000 citoyens les plus fortunés de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Les explications du ministre m'ont davantage convaincu que celles de mes collègues socialistes. Il est certain qu'il aurait été plus simple de retirer la résidence principale de l'assiette de l'ISF, mais je pense qu'on y viendra un jour. En attendant, je retire les amendements.

(Les amendements nos37 , 36 et 35 sont retirés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie d'une série d'amendements identiques nos 444 à 463 .

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 444 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cet amendement propose de rétablir les taux originels de l'ISF. Nous ne pensons pas pour autant que ces taux sont optimaux et nous avons d'ailleurs voté en commission des finances un amendement de notre collègue Garrigue pour que toute réforme de l'ISF s'inscrive dans une enveloppe qui maintienne le résultat financier de l'ISF, soit un peu plus de 4 milliards d'euros.

Or, ce n'est pas du tout ce que vous faites. On aurait pu imaginer que vous auriez l'intelligence de supprimer un certain nombre de niches – Dieu sait si nos impôts en contiennent – et d'ajuster les taux. Pas du tout : vous réduisez les taux, par un dispositif un peu bizarre, et vous ne touchez pas aux niches. Résultat : vous faites un cadeau fiscal considérable aux plus riches, mais pas une vraie réforme de l'ISF.

Quelle réforme faudrait-il mener au contraire ?

Il conviendrait au préalable de penser à la fiscalité des revenus. Notre impôt sur le revenu est devenu tout petit, complètement mité. Vous qui adorez nous comparer avec l'Allemagne, souvenez-vous de la démonstration du Premier président de la Cour des comptes : l'impôt sur le revenu représente en Allemagne plus de 9 % du PIB, contre moins de 3 % chez nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

C'est pourquoi une vraie réforme reste à mener pour rendre progressif l'ensemble CSG et impôt sur le revenu. Le principe de justice fiscale impose de soumettre tous les revenus au barème de l'impôt sur le revenu, qu'il s'agisse des revenus du travail ou du capital, car notre fiscalité présente la caractéristique de peser bien davantage sur les revenus du travail que sur ceux du capital.

Ceci établi, l'on peut encore s'interroger sur l'impôt sur les sociétés, profondément injuste puisqu'il pèse essentiellement sur les PME, qui reversent en moyenne à l'État 30 % de leurs bénéfices, contre 8 % pour les entreprises du CAC40, voire pas du tout pour la plus grosse. C'est dire qu'il reste encore des réformes à mener et des niches à supprimer !

Ce n'est qu'à partir de ce moment-là que l'on peut se poser la question de la réforme de l'imposition du capital. C'est ainsi que doit se mener une réforme fiscale cohérente, et non pas comme vous le faites.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre l'amendement n° 445 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le rapporteur général, tout est dans votre rapport, il suffit juste de prendre le décodeur pour essayer de le comprendre.

Vous nous dites que les très gros revenus paieront plus, ce qui permettra d'équilibrer la réforme. Prenons l'exemple de l'actuelle cinquième tranche, soit les patrimoines compris entre 7,5 et 16,480 millions. En 2010, 4743 contribuables étaient concernés. Parmi eux, 40 % bénéficiaient du bouclier fiscal et devront payer un impôt supplémentaire de l'ordre de 15 000 euros. Mais les 2777 autres, soit 60 % qui ne bénéficiaient pas du bouclier, paieront en moyenne 36 000 euros d'impôts en moins.

Confondons à présent les deux – vous auriez ainsi pu rajouter une colonne dans votre tableau en fusionnant ces deux groupes pour observer les résultats sur les 4743 contribuables de cette tranche. Alors qu'ils payaient chacun en moyenne, avant votre réforme, 63 702 euros d'impôts – compte tenu du bouclier fiscal –, ils n'en paieront plus que 50 041 après, soit 13 000 euros de moins. Si vous confondez les bénéficiaires et les non bénéficiaires du bouclier fiscal par tranche, vous vous apercevrez que dans cinq tranches sur six, ils sont gagnants. Et la première tranche tire même le gros lot puisqu'ils ne paieront plus rien.

Il n'est pas honteux de se livrer à ce calcul, qui explique d'ailleurs pourquoi il vous manque 1,8 milliard. Ne nous racontez pas qu'ils paieront tous autant qu'avant si c'est pour nous avouer ensuite qu'il vous manque 1,8 milliard que vous essayez de trouver en créant de nouvelles taxes, sur lesquelles nous reviendrons tout à l'heure.

Je viens de vous faire la démonstration pour une tranche, mais tout est écrit, monsieur le rapporteur. Votre tableau est magnifique mais il y manque une colonne qui vous aurait permis de réaliser que votre présentation est une espèce d'escroquerie intellectuelle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je reconnais que le terme est un peu fort : disons une présentation qui déforme quelque peu la réalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

La réforme présentée dans ce projet de loi de finances rectificative repose, monsieur le rapporteur général, vous l'avez suffisamment précisé, sur trois principes : un relèvement du seuil d'entrée dans le barème, la réduction de la progressivité du barème puisque ne subsistent plus que deux tranches et une réduction des taux de prélèvement.

Dans la situation actuelle des finances publiques, l'abaissement des taux pouvait peut-être se discuter, être expertisée, mais à condition que l'on élargisse l'assiette de l'imposition, que l'on élimine tout ou partie des niches qui atrophient la base taxable. Alors seulement, tout en maintenant la recette perdue, une réforme aurait pu être débattue. Ce n'est pas le choix du Gouvernement et de sa majorité. Votre préoccupation, tout tend à le prouver malgré les dénégations pas toujours convaincantes ni convaincues du rapporteur général, est bien de réaliser une nouvelle baisse de l'imposition sur le patrimoine des ménages les plus riches. Ce n'est pas acceptable. Aussi proposons-nous avec cet amendement de rétablir l'entrée dans le barème de l'ISF à 790 000 euros, de maintenir à six le nombre de tranches et de conserver ainsi une certaine progressivité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Battistel

Cet amendement de repli vise à maintenir le barème actuel de l'impôt sur la fortune en conservant les six tranches d'imposition ainsi que leur taux et le seuil d'entrée. En effet, cet impôt est juste parce que progressif. Supprimer sa progressivité, c'est supprimer sa justice. Dans ces moments de crise que nous traversons, où les caisses de l'État sont mises à mal, où chaque recette est importante, est-il vraiment raisonnable de se priver de près de 1,8 milliard de recettes, essentiellement concentrées sur les plus gros contributeurs de l'ISF, soit 2 % des contribuables français qui seront globalement gagnants, comme l'ont si bien démontré mes collègues.

Ne croyez-vous pas que ces recettes seraient bien mieux placées sur des secteurs essentiels tels que l'éducation, l'emploi, le logement, où les besoins sont criants ?

C'est parce que j'en suis persuadée que nous vous proposons d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Par cet amendement, nous proposons de maintenir le barème actuel de l'ISF. Il nous semble en effet faux de prétendre que cette réforme profiterait essentiellement aux ménages modestes. Aujourd'hui, l'on paie l'ISF à partir d'un patrimoine de 790 000 euros après dérogations et exonérations. Demain, ce sera à partir de 1,3 million d'euros alors que le patrimoine médian dans notre pays s'élève à 110 000 euros.

Il est aussi faux de considérer que votre réforme bénéficierait aux plus petits contribuables assujettis à l'ISF et qu'elle ne changerait rien pour les plus gros puisque les 200 000 ménages qui détiennent un patrimoine d'1,7 millions d'euros verraient leur ISF baisser de 80 %, ce qui s'explique par la suppression de la progressivité, en passant de six à deux tranches d'imposition.

Nous nous opposons donc à votre réforme créatrice de nouvelles injustices fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

J'aimerais insister sur un aspect peu évoqué dans nos débats : le caractère générationnel de l'injustice de cette réforme.

Celle-ci est censée préparer l'avenir, mais le fossé entre générations et la crise de la jeunesse sont oubliés. Pourtant, s'il y a un domaine où les jeunes sont particulièrement pénalisés par rapport aux générations qui les ont précédés, c'est le logement. À cet égard, la baisse des taux d'imposition et le relèvement du seuil de déclenchement de l'ISF jusqu'à 1,7 million d'euros, compte tenu de la résidence principale, me semblent des mesures particulièrement graves.

N'oublions pas que les seniors sont propriétaires à 70 % de leur logement alors que les jeunes actifs, eux, sont condamnés à s'entasser dans des logements loués, souvent trop exigus par rapport à la taille de leur famille.

N'oublions pas non plus quand nous débattons de la valeur de la résidence principale que la moitié de nos concitoyens ne sont pas propriétaires mais locataires.

Debut de section - PermalienPhoto de Aurélie Filippetti

Pour ceux-là, on ne fait rien alors qu'ils devraient être pris en considération en priorité.

Certains économistes estiment que le fait d'être propriétaire d'un logement en n'ayant plus d'emprunt à rembourser induit une sorte de revenu implicite et qu'une réforme fiscale véritable consisterait à intégrer cette valeur locative dans le calcul d'impôt, après une indispensable révision des bases cadastrales. Cela aurait le double effet d'aboutir à une redistribution plus juste et de fluidifier le marché immobilier. Tout le monde évoque la bulle immobilière, mais il faut aussi pouvoir l'expliquer et analyser pourquoi les jeunes générations d'actifs sont prises dans une sorte de goulet d'étranglement qui en fait les premières victimes de la crise du marché immobilier. Or votre réforme ne contribue pas, bien au contraire, à desserrer ce goulet.

Debut de section - PermalienPhoto de David Habib

Je souhaiterais évoquer un autre aspect de cette réforme, c'est le calendrier dans lequel elle prend place. M. Paternotte l'a d'ailleurs évoqué avec une affligeante sincérité en parlant de la « future » suppression de l'ISF.

En relevant le seuil de déclenchement de l'ISF, en supprimant sa première tranche, faisant sortir 300 000 contribuables de l'assujettissement à cet impôt, en n'assurant plus sa progressivité, que faites-vous ? Vous êtes en train de préparer sa suppression.

Votre projet comporte deux étages, l'un conçu pour la période d'avant les élections présidentielles, l'autre pour celle d'après les élections présidentielles. Actuellement, vous essayez de convaincre l'opinion publique que cet impôt n'a pas le rendement fiscal attendu, qu'il ne touche que quelques contribuables et qu'il vaudrait mieux le supprimer.

Vous avez choisi de procéder par étapes pour démanteler un dispositif juste, auquel les Français sont attachés. Il permet non pas de taxer quelques-uns mais simplement de faire jouer la solidarité nationale, qui constitue une valeur qui peut, je le crois, encore trouver dans cet hémicycle toute sa résonance.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Durand

Sur l'injustice flagrante de cette réforme et le cadeau fiscal que vous faites aux 600 000 foyers les plus riches de notre pays, tout a été dit ou presque (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), mais nous continuerons à le redire dans cet hémicycle et à l'extérieur de cet hémicycle.

Toutefois, à ce moment de nos débats, c'est sur l'inefficacité de cette réforme que j'aimerais insister. Contrairement à ce que vous affirmez depuis trois jours, elle n'est pas financée : elle implique un manque à gagner de 1,8 milliard d'euros. Alors que vous faites de la réduction des déficits un véritable dogme, vous creusez l'endettement de notre pays par une réforme injuste destinée à faire des cadeaux aux plus riches.

Non seulement cet endettement constitue une hypothèque sur les générations futures, mais il se solde par une incapacité de la puissance publique à assumer des politiques régaliennes. Vous institutionnalisez un véritable désengagement de l'État.

Je ne reviendrai pas sur les arguments développés lors de la discussion générale, mais il faut que les Français sachent que si un fonctionnaire sur deux partant à la retraite n'est pas remplacé, c'est en grande partie parce que vous avez vous-même creusé les déficits.

Par cette politique injuste, vous continuez à les creuser, vous montrant dans l'incapacité de maintenir l'intervention de la puissance publique au niveau de qualité qu'elle n'aurait jamais dû quitter. Quand on voit aujourd'hui dans quel état se trouvent les services publics, en particulier l'éducation nationale, avec un ministre qui cherche des professeurs remplaçants à Pôle Emploi et qui se livre dans la presse à une campagne mensongère mettant en avant le recrutement de 17 000 enseignants alors que 16 000 postes sont supprimés (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), on mesure combien cette réforme est injuste mais aussi inefficace !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Tout a été dit (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) mais il nous faudra revenir sur la déception que suscite votre réforme chez ceux et celles qui espéraient une vaste réforme de la fiscalité du patrimoine. En fait, vous vous contentez d'une réforme de l'ISF, qui ne concerne que 2 % des contribuables et qui ne représente que 8 % de la fiscalité du patrimoine. J'ajoute – il faut le dire et le redire – que le bouclier fiscal ne sera pas supprimé cette année, contrairement à ce que vous annoncez à nos concitoyens, mais seulement en 2014.

Cette réforme contribue à réduire très fortement l'imposition des plus riches, notre collègue Christian Eckert l'a démontré. C'est donc bien un nouveau cadeau que vous faites aux plus aisés, pour une facture qui s'élèvera à près de 2 milliards d'euros.

Votre réforme ne sera pas financée. Qui va payer, monsieur le ministre ? Dites-le à nos concitoyens, à ceux qui ont tant de difficultés à boucler leur budget, qui ont peur pour l'avenir de leurs enfants, qui connaissent des problèmes de logement, de santé, parfois même de survie.

Nous souhaitons, pour notre part, le maintien du barème actuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Beaucoup a été dit mais tout n'a pas encore été dit !

Il n'a échappé à personne, madame la ministre, que cette série d'amendements vise à maintenir la situation actuelle en termes de tranches et de taux. Est-ce à dire, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, qu'il n'y a aucune réforme de l'impôt sur la fortune à faire ? Non. Il y a forcément des évolutions à mettre en oeuvre. Tout bouge : le monde, la France, l'économie, la société.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Vous, vous ne bougez pas, vous reculez, et, ce faisant, vous mettez en danger le budget de la France.

Des réformes sont nécessaires mais elles doivent obéir à quelques principes simples. Le premier d'entre eux consiste en une sanctuarisation – beau mot que j'apprécie même s'il est peu laïque – de la recette publique. Commençons donc par sanctuariser le produit de l'impôt sur la fortune et revenons sur l'ensemble de ces réformes injustes et inefficaces que vous avez introduites, en particulier avec le paquet fiscal de la loi TEPA, et qui ont contribué à réduire les recettes de l'ISF.

Partons de ce que l'ISF rapporterait si l'on se situait dans les mêmes conditions que dans les années 2000-2003 et, sur cette base, débattons entre nous des différents dispositifs possibles et faisons une réforme – proposition que défend M. Garrigue à juste titre.

Je sais, monsieur le rapporteur général, que vous avez cité un extrait d'une interview que j'ai donnée à un journal du soir. Il y a des arguments qui visent à démontrer que la tranche basse de l'impôt sur la fortune n'est pas forcément juste, arguments contestés du reste. Celle-ci concerne 300 000 personnes pour un rendement de 300 millions d'euros chaque année, soit en moyenne 1 000 euros par personne. Pensez-vous que ces contribuables vont considérer que votre réforme, qui leur fera gagner 1 000 euros par an, est adaptée à la situation économique, financière et budgétaire de la France ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Pensez-vous que ces contribuables, qui ne sont pas vraiment parmi les plus pauvres des Français, vous seront reconnaissants d'avoir défendu l'intérêt général en leur faisant gagner 1 000 euros par an ? Pour ma part, je suis persuadé qu'ils sont tout à fait à même de comprendre que lorsque les Français sont, dans leur ensemble, appelés à faire des efforts, ils peuvent eux faire l'effort de payer 1 000 euros d'impôt pour faire en sorte que le budget de l'État soit mieux équilibré. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il y a au moins un point sur lequel je serai d'accord avec Michel Sapin, c'est que tout n'a pas été dit.

Nos concitoyens, vous le savez, chers collègues de l'UMP – du moins, ceux d'entre vous qui vont de temps à autre dans leur circonscription – ne supportent plus les inégalités que vous creusez méthodiquement dans notre société depuis 2002, dressant les Français les uns contre les autres, favorisant les favorisés et stigmatisant ceux qui ont le malheur d'être dans la misère – je vous renvoie aux récentes déclarations de M. Wauquiez sur les bénéficiaires du RSA, qu'il considère comme des « assistés », dont la situation serait selon lui un « cancer » pour la société française.

Or l'un des outils qui est à notre disposition pour lutter contre les inégalités et pour les corriger est justement la progressivité de l'impôt. Prenez un instant pour réfléchir à ce que recouvre cette belle expression, cette idée toute simple que plus vous êtes riche, plus vous payez d'impôts, autrement dit plus vous contribuez au bien-être général et au bon fonctionnement de la société dans laquelle vous vivez. Vous vous exclamez, monsieur de Courson, je sais que c'est une notion qui vous est un peu étrangère, mais il faut vous y habituer.

J'aimerais maintenant revenir au barème que nous proposons de manière plus détaillée. Prenons le cas d'un contribuable détenteur d'un patrimoine de 1 million d'euro : avec le taux de 0,55 % correspondant à sa tranche, il devrait s'acquitter de 1 155 euros au titre de l'impôt sur la fortune.

Comparez cette contribution à ce que M. Wauquiez propose, au nom de l'UMP, de donner chaque mois à un bénéficiaire du RSA en échange de cinq heures de travail obligatoire, c'est-à-dire 560 euros : l'impôt dû représenterait deux mois de RSA ! Je rejoins ici Michel Sapin : croyez-vous franchement que ce soit beaucoup ? Mais c'est le moins que l'on puisse demander !

Quant au propriétaire d'un appartement d'une valeur de 1,3 millions d'euros, avec le système des abattements, il paierait 660 euros d'impôt de solidarité sur la fortune par an : un mois et demi de RSA ! Franchement, vous trouvez que c'est trop ? On ne peut pas demander cela ? Au nom de la solidarité nationale, au titre de la contribution au bien-être collectif, pour la réinsertion de ceux de nos concitoyens qui ont le malheur de pâtir de la politique économique que vous menez depuis neuf ans ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mes chers collègues, si vous songez à la situation économique et sociale de notre pays, aux mesures que vous avez adoptées pour creuser les inégalités au sein de la société française (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et aux montants réels que devraient payer au titre de l'ISF les détenteurs des patrimoines que je viens d'évoquer, vous vous rendrez compte qu'on est loin de l'impôt confiscatoire et que le maintien du barème que nous proposons dans cet amendement est le moins que l'on puisse demander à ces contribuables. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le ministre, vous venez d'émettre un avis défavorable sans argumenter.

Pour ma part, je souhaite revenir sur la polémique que vous avez déclenchée il y a quelques semaines – je veux parler des initiatives de l'UMP, et plus précisément d'un membre du Gouvernement, à propos du RSA. Car il y va de nos choix politiques et de société.

Le présent débat, qui se déroule quant à lui dans un climat assez serein, porte sur cette question fondamentale : quel effort demandons-nous à chaque contribuable de fournir, en fonction de ses capacités, pour participer à la solidarité nationale ?

Telle est la question essentielle, à laquelle vous tentez d'échapper : par la polémique sur l'assistanat, vous espérez faire oublier que vous préparez un nouveau cadeau fiscal, un cadeau de deux milliards d'euros.

Ce que viennent de dire Michel Sapin et Jean Mallot est tout à fait éloquent. Vous êtes obsédés par votre volonté de satisfaire une clientèle électorale. Mais pouvez-vous croire un instant que c'est cette clientèle qui vous permettra de gagner les prochaines élections ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Occupez-vous des vôtres, on s'occupe des nôtres !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Quelle illusion ! Ce sont 300 000 contribuables que vous voulez exonérer purement et simplement d'ISF.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Mais non, ce n'est pas affligeant, c'est la réalité quotidienne ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Croyez-vous que ce soit beaucoup leur demander que de leur faire verser à la nation 600 à 1 500 euros de contribution spécifique ? Est-ce un scandale fiscal et social ? Je vous le demande, monsieur le ministre : n'est-ce pas un manque de respect, n'est-ce pas à la limite de l'indécence de stigmatiser depuis plusieurs semaines, et aujourd'hui encore, les bénéficiaires du RSA, dont l'allocation ne dépasse pas 400 à 600 euros par mois et qui vivent souvent des situations dramatiques – chômage de longue durée, familles monoparentales –, tout en essayant de nous faire pleurer sur les détenteurs de grandes fortunes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Je vous rappelle que les cadeaux accordés aux bénéficiaires du bouclier fiscal depuis le début du quinquennat représentent trois milliards et demi d'euros. Ce sont les mêmes qui, jusqu'en 2014, ne donneront pas un seul centime pour financer le RSA.

Est-ce que vous trouvez cela juste, monsieur le ministre ? J'aimerais que vous soyez clair sur ce point. Vous esquivez le débat, vous fuyez le débat ; mais telle est la question que nous posons et que nous ne cesserons de poser tout au long de ce débat sur la suppression du bouclier fiscal,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

…mais pas avant 2014, et sur la quasi-suppression de l'ISF, laquelle revient à un cadeau de deux milliards d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Pour compléter les interventions de mes collègues, je rappellerai que, depuis quatre ans, la majorité nous répète que les caisses sont vides et l'argent rare ; mais, si les caisses sont vides, c'est parce que vous les avez vidées, délibérément et méthodiquement. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Voilà pourquoi nous avons déposé ces amendements. La raréfaction de l'argent public, vous l'avez organisée, espérant ainsi faire d'une pierre trois coups – je vais y revenir.

Aujourd'hui, vous asséchez les recettes financières. Les déficits publics que nous connaissons aujourd'hui, à l'échelle européenne, mais aussi nationale, s'expliquent non par des dépenses inconsidérées ou qui s'envoleraient, mais par un affaiblissement des recettes fiscales.

Cela, vous l'avez organisé, de trois manières. Premièrement, vous avez fait de l'État un État résiduel, par plusieurs méthodes : la révision générale des politiques publiques, le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, l'affaiblissement des mécanismes de solidarité et de protection sociale. Ainsi, vous avez volontairement affaibli les outils de la politique publique en asséchant les caisses de l'État.

Deuxièmement, vous avez transféré les charges financières aux collectivités locales. On pourrait en prendre bien des exemples.

Troisièmement – nous en revenons à l'enjeu essentiel de notre débat –, vous avez maintenu et organisé une forme d'inégalité fiscale et sociale au profit des ménages les plus riches.

On retrouve ces trois fautes dans le texte qui nous est soumis, sous la forme d'une fiscalité de classe. Voilà pourquoi nous souhaitons maintenir le barème de l'ISF.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Le Loch

Nous le savons tous, notre pays est très endetté. Il est donc nécessaire, depuis de longues années, de trouver des recettes. Or, ces dernières années, on en a au contraire beaucoup supprimé, si bien que l'on n'a plus d'argent pour financer les services publics.

Je songe naturellement à la sécurité, mais aussi et surtout à l'éducation. Notre service public de l'éducation est en danger. Or il y va de la cohésion de notre pays ; je pèse mes mots.

Pourtant, par ce texte portant notamment sur la fiscalité du patrimoine, vous choisissez de vous délester à nouveau de certaines recettes. Personnellement, je ne connaissais pas le montant du produit de l'ISF ; je l'ai découvert à l'occasion de ce texte. Ce montant me paraît très modeste, comparé à celui du produit d'autres impôts – je songe notamment aux impôts locaux, en particulier à la taxe foncière. Il ne saurait peser sur les ménages les plus riches, ceux qui sont redevables de l'ISF.

Mais vous choisissez de vous priver de recettes complémentaires, et, faute de recettes, vous devez faire des choix politiques, ce qui vous conduit à mettre en difficulté certains services publics. Je suis donc évidemment opposée aux dispositions qui nous sont soumises. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Bien que je sois déjà intervenu, il me semble naturel, puisque le président Ayrault est là, et par respect pour l'institution qu'il incarne comme pour son engagement politique, d'apporter quelques compléments propres à éclairer sa réflexion,…

Plusieurs députés du groupe SRC. Très bien !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…même si j'ai bien peu d'espoir de le convaincre.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Les quelque 1500 amendements déposés – chiffre inédit, je le rappelle, s'agissant d'un texte de nature financière – traduisent votre immense déception et le désarroi que vous inspire cette réforme équilibrée.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Votre rêve aurait été que le Gouvernement propose la suppression de l'ISF. Voilà ce qui vous manque ! (Approbation sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

C'est également vrai d'une partie de votre majorité !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Et vous vous réfugiez dans l'idée que cette réforme serait un cadeau. Il n'y a là aucun cadeau ; vous ne parviendrez pas à démontrer le contraire. Comment convaincrez-vous du fait que la suppression de l'ISF est un cadeau aux riches, pour reprendre votre vocabulaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

La suppression ! Il vient d'avouer qu'il supprime l'ISF !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Quant au financement, nous transférons la fiscalité du stock de patrimoine vers la transmission du patrimoine. C'est donc bien des mêmes qu'il s'agit : je le répète, nous ne faisons aucun cadeau.

Le maintien même d'un ISF profondément remanié, plus juste, plus équilibré, donc plus compétitif, est aussi un choix politique. Il consiste à demander à celles et ceux qui ont le plus de moyens de contribuer à l'effort collectif de réduction de nos déficits.

Par la loi de programmation des finances publiques, nous avons contracté des engagements jusqu'en 2013-2014. Nous avons donc pris rendez-vous, et nous devons accomplir un effort collectif de solidarité.

Cette réforme est juste du point de vue social, grâce au maintien de la contribution, comme du point de vue fiscal, grâce à l'amélioration de l'ISF, qui le rend plus compétitif.

Je ne sais si je vous ai convaincu, monsieur Ayrault, mais, en tout cas, je vous ai répondu.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Vous m'avez convaincu sur un point, monsieur le ministre. Vous avez dit que les socialistes rêvaient que vous supprimiez l'ISF ; vous n'avez pas tout à fait tort. Et vous savez pourquoi, car vous connaissez un peu l'histoire de la Ve République, et vous ne voulez pas refaire une erreur qui vous a coûté très cher.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Oui : vous avez gagné et nous avons perdu.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Voilà pourquoi vous avez cherché un moyen de supprimer l'ISF sans le supprimer. Et, d'une certaine manière, vous êtes sur le point d'y parvenir : si le barème que vous proposez est accepté, il n'y aura plus d'impôt de solidarité sur la fortune, mais un impôt de sauvegarde de la fortune, ou de sécurisation de la fortune.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Ainsi exaucera-t-on le voeu du rapporteur général, qui tenait tant à sauver ces malheureux qui possèdent une résidence de plus de 1,8 millions d'euros ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Mes chers collègues, je rappelle qu'une politique fiscale repose sur trois principes essentiels.

Le premier principe, c'est la solidarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Sur ce point, j'ai relu bien des déclarations de dirigeants de la Ve République. La solidarité est un principe très simple : elle consiste à demander à ceux qui ont davantage de moyens de contribuer davantage au financement des charges publiques.

L'outil qui permet à la solidarité de s'exercer est la progressivité de l'impôt. Or il faut reconnaître que le système actuel a largement remis en question la progressivité – celle de l'impôt sur la fortune aujourd'hui, celle de l'impôt sur le revenu hier, comme le démontre le récent rapport de la Cour des comptes. L'ISF ne joue absolument plus le rôle qui était le sien auparavant. Le financement des prestations sociales pose lui aussi un problème.

Le deuxième principe de la fiscalité, c'est qu'elle doit procurer à l'État les ressources nécessaires pour qu'il puisse remplir ses missions – sans pour autant être nécessairement un État tentaculaire : la RCB, la rationalisation des choix budgétaires, il y a quelques années, ou la RGPP aujourd'hui sont tout à fait justifiées ; la seconde est d'ailleurs, je le rappelle, le prolongement de la LOLF, adoptée à l'unanimité.

Mais aujourd'hui, la RGPP est pervertie par un certain nombre de règles, notamment celle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Cela, ce n'est plus de la RGPP, et cela pèse lourdement sur nos finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

La fiscalité sert aussi à assumer l'ensemble des charges publiques, notamment l'endettement, et à permettre la réduction des déficits. On a proposé il y a quelques semaines au Parlement de voter la règle d'or d'équilibre des finances publiques ; mais je voudrais pour ma part rappeler au Gouvernement et aux députés de la majorité que l'affirmation de la capacité de l'État à assumer ses missions grâce aux ressources publiques constitue quand même l'un des acquis fondamentaux de la Ve République ! Mais aujourd'hui, malheureusement, nous avons vu la destruction, dans une large mesure, de la ressource publique.

Le troisième principe, c'est la lisibilité et la simplicité de la fiscalité. Je ne sais pas si le barème proposé par l'amendement est le meilleur possible ; mais il est tout à fait sûr que si nous voulons une fiscalité lisible, alors une imposition sur le patrimoine aussi universelle que possible est tout à fait nécessaire. Cet impôt doit être moderne, fondé sur une déclaration annuelle ; la question de l'outil de travail doit bien sûre être traitée. Il faut, enfin, que les seuils rendent cette imposition aussi indolore que possible pour les citoyens, avec bien sûr une progressivité.

Je n'ai, pour ma part, pas le sentiment que le texte qui nous est proposé aujourd'hui réponde à ces trois objectifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

J'avais demandé la parole avant l'intervention du président Ayrault, mais je me trouve maintenant un peu décalé. (Sourires.)

Je voulais dire mon regret devant les amalgames et le mélange des débats. Nous parlons de budget, de réforme de la fiscalité du patrimoine : c'est un sujet complexe, sur lequel les opinions des uns et des autres sont légitimes. Cela ne justifie pas que l'on caricature ce que peut être la position des élus de la majorité dans leur ensemble à propos du RSA.

Je fais partie des élus qui ont expérimenté le RSA dans leur département. Nous nous sommes engagés totalement dans cette expérience : il existait effectivement un besoin de solidarité vis-à-vis de nos concitoyens les plus défavorisés ; il fallait aussi rompre avec l'inefficacité du RMI, tout en traitant le problème des « travailleurs pauvres » – je n'aime pas tellement l'expression, mais c'est celle que l'on utilise – en apportant un complément de revenu à ceux qui ont une activité professionnelle.

Qu'il y ait aujourd'hui un débat sur l'assistanat, certes, mais ce n'est pas le même sujet que celui de la réforme de la fiscalité du patrimoine.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Ce débat a été lancé, je ne le conteste pas ; mais les positions des élus de la majorité sur cette affaire n'ont donné lieu à aucun arbitrage, le Gouvernement n'a déposé aucun texte de loi.

Il ne faut donc pas confondre ce débat avec celui sur la fiscalité du patrimoine, qui est un débat complexe, dans lequel il ne s'agit pas du tout de faire des cadeaux à telle ou telle partie de la population.

Plusieurs députés du groupe SRC. Mais si !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je suis l'élu d'une circonscription dans laquelle le nombre d'assujettis à l'ISF est moins important que le nombre d'assujettis à l'ISF dans certaines circonscriptions d'élus de l'opposition, notamment en Île-de-France. Ce n'est donc pas un problème de clientélisme, comme cela a été dit ; c'est un problème de réalisme de la fiscalité sur le patrimoine, au regard de la situation de la France par rapport à un certain nombre de pays de l'Union européenne, au regard de l'efficacité économique de l'investissement dans les entreprises, notamment les PME, au regard du problème de la transmission des entreprises. Ce sont ces sujets qu'il est légitime d'aborder, au lieu de multiplier les amalgames.

Je le dis au président Ayrault, pour qui j'ai beaucoup d'estime et de respect, car sa ville était encore ce matin citée en exemple pour tout ce qui y est fait pour l'accueil des handicapés : je regrette ce type d'amalgames.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

Je voudrais non pas défendre le président Ayrault, il n'a pas besoin de cela… (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je ne l'attaquais pas, je ne faisais qu'exprimer un regret ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

…mais répondre à M. Bouvard, car il se trouve qu'en tant que président du conseil général du Gers, j'ai également expérimenté le RSA dans mon département. Je voudrais aussi revenir sur ce qu'a dit M. Baroin tout à l'heure, et sur ce qu'il a dit cet après-midi à l'Assemblée nationale parlant du RSA, en utilisant plusieurs fois le terme de « mensonges » à propos de ceux de nos collègues – notamment Aurélie Filippetti – qui avaient dénoncé cette politique déséquilibrée entre les riches, qui reçoivent toujours de bonnes nouvelles, et les pauvres, qui en reçoivent toujours de mauvaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Le RSA, c'est une bonne nouvelle pour les pauvres !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Martin

Mais il est un mensonge, monsieur Baroin, dont vous n'avez pas parlé, et qui pèse lourd. C'est celui de l'incapacité de l'État à compenser à l'euro près les dépenses sociales des départements, notamment celles liées au RSA. (Approbation sur les bancs du groupe SRC.)

Si nous devions interrompre le versement des allocations des bénéficiaires du RSA au moment où elles ne sont plus couvertes par les fonds versés par l'État, c'est au mois de septembre ou d'octobre qu'il faudrait interrompre le versement du RSA ! L'État doit des centaines de millions, voire des milliards, aux collectivités locales qui sont peu à peu devenues des agences sociales de l'État, à son service.

Monsieur Baroin, puisque vous parlez de la nécessité pour les bénéficiaires du RSA de donner quelques jours à la collectivité, j'ai une solution à vous proposer. Venez consacrer un mois de votre temps au conseil général du Gers, et je suis sûr que je trouverai, auprès de personnes âgées ou dans le domaine de l'environnement, de quoi vous occuper !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Comme punition, il y a pire qu'un mois dans le Gers. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le ministre, vous nous avez dit tout à l'heure – pour la troisième fois, me semble-t-il – que nous allions avoir du mal à expliquer aux Français notre refus de voter la fin du bouclier fiscal. Je veux vous rassurer : nous voterons en faveur de l'article 13, qui supprime le bouclier fiscal.

Mais s'il s'était seulement agi de supprimer le bouclier fiscal, vous disposiez de plusieurs solutions. Votre projet de loi aurait pu ne comporter qu'un seul article, qui aurait été l'actuel article 13 : nous aurions voté ce projet de loi. En vous contentant de cet article, vous auriez apporté au budget de l'État 700 millions d'euros supplémentaires environ. Nous aurions voté ce projet, monsieur le ministre, pas de souci !

Il existait même une deuxième solution, pour manifester l'équilibre dont vous ne cessez de nous parler : vous auriez pu supprimer le bouclier fiscal – c'est l'article 13 – et, dans un autre article, abaisser le montant de l'ISF d'une somme équivalente. L'effet pour le budget aurait été nul, et nous aurions peut-être même appuyé votre démarche.

Mais le Premier ministre a fait un aveu hier : il nous a dit que vous aviez fait le choix de copier ce qui s'est fait dans d'autres pays européens, et de baisser l'impôt sur le patrimoine ! Reprenez le compte rendu des débats : c'était la réponse à la question de Jean-Marc Ayrault hier après-midi. Et qu'avez-vous fait ? Vous vous apprêtez à supprimer le bouclier fiscal, et parallèlement vous allez réaménager, édulcorer, diviser par deux ou trois l'impôt de solidarité sur la fortune. Résultat : il vous manque 1,1 milliard d'euros.

C'est ce qui justifie, bien évidemment, notre présence en nombre ce soir, et la mobilisation du groupe SRC, pour dénoncer cette manipulation.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Vous ne pouvez pas sortir de la contradiction entre ce qu'a dit hier le Premier ministre, qui a reconnu que votre objectif était de diminuer la fiscalité sur le patrimoine, et vos tentatives de démontrer – ce qui n'est pas vrai – que cette réforme est équilibrée financièrement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

J'évoquais effectivement cet après-midi, lors des questions au Gouvernement, mon regret de constater que votre collègue Aurélie Filippetti était devenue une compagne d'infortune mensongère des déclarations de M. Hirsch.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Ce que j'ai contesté dans les propos de M. Hirsch, en réalité, au-delà du fait qu'il est directeur de l'Agence du service civique et qu'il n'est donc plus en charge du RSA,…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…c'est qu'il a voulu faire accroire, par une allusion hypocrite, qu'il y avait un transfert du financement du RSA vers la réforme du financement de l'ISF. Et cela, c'est tout à fait inacceptable ! Et se rendre complice de ce mensonge, c'est une attitude qui doit être dénoncée.

La réponse ferme et déterminée du modeste porte-parole du Gouvernement que je suis, comme du ministre du budget, et du secrétaire général de l'UMP, était nécessaire pour éviter qu'une confusion ne se crée dans l'esprit de gens qui pourraient être trompés par ces propos.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Pour le reste, je le dis et je le redis, 100 % de la contribution additionnelle de 1,1 % sur les revenus du capital servent à financer le RSA sous ses différentes modalités, le RSA dans les DOM, le RSA Jeunes, et le RSA.

Enfin, on peut effectivement constater que la partie « activité » du RSA n'a pas suffisamment fonctionné : c'est la raison pour laquelle la subvention d'équilibre versée par l'État a été réduite à due proportion.

L'addition de mensonges ne fera jamais une vérité, et vous m'offrez là une occasion supplémentaire de le rappeler.

Quant au financement, justement, nous avons choisi de demeurer dans le périmètre strict des assujettis à l'ISF. C'est, me semble-t-il, l'une des grandes vertus de ce texte très simple, et très lisible, même pour des non spécialistes, et même pour ceux qui ne sont pas engagés, comme vous pouvez l'être, dans sa contestation.

Ceux qui ont commencé à payer l'ISF à cause de la hausse des prix immobiliers cessent de le payer : tout le monde peut le comprendre. Ceux qui n'étaient pas à l'ISF comprennent que nous instaurons deux tranches, avec des seuils à 1,3 million et à 3 millions d'euros, avec des taux différents. Et, comme je vous le disais tout à l'heure, monsieur Ayrault, tout le monde aura compris que le Gouvernement, supprimant le bouclier fiscal et conservant l'ISF, demande aussi à celles et ceux qui disposent de moyens importants de participer à l'effort collectif de réduction des déficits.

Vous avez là toutes les réponses à vos interrogations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Notre collègue Michel Bouvard m'a interpellé tout à l'heure avec courtoisie – c'est une manière d'échanger que j'apprécie toujours. Vous dites, monsieur Bouvard, qu'il y aurait quelque abus de ma part à mélanger débat sur la fiscalité du patrimoine et débat sur le financement du RSA.

Mais il y a bien un lien, mon cher collègue. Souvenez-vous du débat sur le revenu de solidarité active, dont nous avions d'ailleurs d'autant plus facilement approuvé le principe qu'il était inscrit dans le programme de notre candidate Ségolène Royal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Effectivement, nous ne l'avons pas voté, nous nous sommes abstenus. Mais j'aimerais justement vous rappeler pourquoi.

Nous étions favorables à ce dispositif qui faisait suite au RMI, dont le volet « insertion » avait été insuffisamment réussi. Il fallait donc le faire évoluer pour rendre plus attractif le retour à l'emploi par une rémunération supplémentaire. C'est le principe du revenu de solidarité active.

Au moment du vote, nous nous sommes abstenus, tout simplement parce que les bénéficiaires du bouclier fiscal étaient exonérés de l'effort que vous venez de rappeler, monsieur le ministre, c'est-à-dire d'un prélèvement supplémentaire sur les revenus du patrimoine et du capital, qui touche – à part l'épargne populaire – l'ensemble des ménages, l'ensemble des contribuables. C'est la réalité, vous le savez bien ; il est inutile de biaiser. Ce désaccord que nous avions à l'époque demeure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le ministre, selon vous, le parti socialiste, et les députés socialistes, regrettent que vous n'ayez pas supprimé purement et simplement l'impôt sur la fortune, ce qui nous aurait permis de gagner une bataille politique.

Mais vous avez fait un aveu : c'est que votre intention est bien de le supprimer ! Mais, comme vous avez senti qu'il serait bien difficile de faire accepter une telle mesure par l'opinion, par vos électeurs, et même par un nombre non négligeable de députés de l'UMP, vous avez trouvé une astuce, que j'ai appelée une opération grossière de communication.

Vous venez de le démontrer. Dans la réalité, les prélèvements au titre de l'impôt sur la fortune représenteront bien près de 2 milliards d'euros en moins. Bilan : entre ce prélèvement en moins – donc ce gain pour les moins de 2 % de contribuables concernés – et ce que coûtera en moins le bouclier fiscal en 2014, il va manquer plus d'un milliard d'euros.

Cet après-midi, ma collègue Aurélie Filipetti a dit, au nom du groupe socialiste, avec mon accord, que le milliard d'euros non utilisé pour le financement du RSA vous permettrait de compenser le manque à gagner de la diminution de l'impôt sur la fortune.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous n'avons fait que dire la vérité, et vous ne pourrez pas démontrer le contraire, monsieur le ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(Les amendements identiques nos 444 à 463 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie d'une série d'amendements identiques nos 464 à 483 .

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 464 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Cet amendement vise à rétablir le seuil de l'ISF initial.

Selon vous, monsieur le ministre, il y aurait un rêve de suppression de l'ISF. À ma connaissance, ce rêve, c'est à droite qu'il existe. Vous n'avez cessé de vouloir supprimer l'ISF, mais comme vous avez peur de prendre cette mesure, vous avez inventé toutes sortes de démantèlements de cet impôt. Ainsi, toutes les mesures Dutreil ont complètement mité une partie de l'ISF, puis le bouclier fiscal a suivi. Aujourd'hui, vous vous engagez dans un parcours qui consiste à réduire de moitié l'ISF.

En supprimant les premières tranches, que faites-vous ? Vous dites compenser la suppression du bouclier fiscal par l'ISF. Dans la première tranche de ce dernier, qui était concerné par le bouclier fiscal ? Un contribuable sur mille. C'est donc un cadeau aux près de 300 000 contribuables de cette première tranche qui, comme le rappelait Michel Sapin, paient en moyenne 1 000 euros d'ISF. Pensez-vous qu'à ce niveau de patrimoine, et dans la situation de nos finances publiques qui demande que tous les Français fassent un effort, il soit justifié de faire ce cadeau ?

Ce n'est pas tout ! Dans les autres tranches, les diminutions sont considérables. Mon collègue Christian Eckert a rappelé que manquait, dans le rapport du rapporteur général, la colonne qui donnait l'effet global de l'ensemble de votre dispositif : une baisse de l'imposition dans toutes les tranches de l'ISF, avec des cadeaux parfois considérables. Ainsi, les 600 contribuables qui ne faisaient pas appel au bouclier fiscal dans la dernière tranche de l'ISF, eux vont toucher un chèque de 175 000 euros.

Dans la situation de nos finances publiques, dans la situation économique de notre pays où un quart des salariés ont connu une baisse de pouvoir d'achat au cours des quatre dernières années, croyez-vous qu'il soit normal de baisser l'imposition ou de faire un chèque de 175 000 euros à des contribuables qui ont plus de 16,5 millions de patrimoine ?

Vous dites prendre une mesure équilibrée ; nous ne cesserons pas d'expliquer à nos concitoyens ce qu'est cette mesure. Ce que vous avez supprimé de l'ISF revient à une quasi-suppression de l'ISF, et cela pose un vrai problème, souligné par notre collègue Daniel Garrigue.

Dans la situation actuelle, notre pays, comme le monde, a besoin de solidarité. Contrairement à tout ce que vous dites dans vos discours, la solidarité est aussi un formidable facteur de compétitivité. Vous alléguez un risque de compétitivité. La question pourrait se poser s'il s'agissait d'un impôt frappant les entreprises, mais, en l'espèce, l'impôt concerne les individus.

Mes chers collègues, qu'est-ce qui fait la compétitivité d'une nation, le développement des économies ? Des entreprises performantes, certes. Mais une entreprise moderne et performante, en ces temps de mondialisation, on peut la recréer partout dans le monde. Pour que cette entreprise fonctionne, que faut-il ? Une formation, un système éducatif, de la recherche, des infrastructures, bref des services publics. Ce n'est pas un hasard si les pays les plus développés du monde, et je vous renvoie aux données de l'ONU, sont ceux qui ont les services publics les plus efficaces et aussi des taux de prélèvements obligatoires relativement élevés.

La réalité de la compétitivité d'une nation, c'est aussi la solidarité. Ce que vous faites en démantelant l'ISF, est à l'image de toutes les mesures que vous avez prises depuis 2007, et même depuis 2002. Les 70 milliards d'allègements fiscaux offerts en grande partie aux Français les plus fortunés sont payés à crédit. Ces 70 milliards, on les retrouve très exactement dans ce que Bercy appelle le déficit structurel, qui sera payé par les générations futures. Toute votre politique, c'est la négation d'un facteur fondamental de la compétitivité : la solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Christian Eckert pour défendre l'amendement n° 465 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Pierre-Alain Muet a dit beaucoup et fort bien, notamment à propos de compétitivité. Je me souviens, et je vais vous le citer, d'un discours prononcé en juillet 2007, dont vous reconnaîtrez l'auteur : « Il suffit de se poster gare du Nord un vendredi soir, à l'arrivée de l'Eurostar et du Thalys, pour comprendre que tous ces banquiers français partis travailler à la City, que tous ces exilés fiscaux réfugiés en Belgique n'ont qu'une envie, c'est de rentrer vivre en France. À ceux-là, ainsi qu'à tous nos compatriotes qui cherchent les clés des paradis fiscaux, nous ouvrons nos portes. Nous leur disons : Revenez, ce n'est pas le purgatoire ici. Nous avons besoin de vous. » C'était le discours de Mme Lagarde défendant le bouclier fiscal comme un facteur important pour faire revenir les exilés fiscaux.

Que s'est-il passé ? Tous les éléments qui nous ont été fournis à la commission des finances ont montré qu'en matière de flux des évadés fiscaux, rien n'avait changé depuis 2007 : il en partait autant qu'avant ; il en revenait autant qu'avant.

En matière de compétitivité fiscale, mes chers collègues, je vous demande de bien réfléchir et d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Henri Emmanuelli pour présenter l'amendement n° 467 .

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je suis affligé d'entendre certaines choses. Tout à l'heure, M. Bouvard parlait du RSA. Vous n'êtes pas le seul, mon cher collègue, à pratiquer le RSA dans votre département. On le pratique ailleurs aussi, et on connaît l'ardoise. Dans mon modeste département de 380 000 habitants, depuis la décentralisation du RMI par M. Raffarin, on est à peu près à 204 millions d'euros de retard de paiement.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Elle est aussi dedans. Je ne comprends pas que nous ayons encore cette discussion ; on tourne en rond. En 2005,…

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

L'APA était à l'origine prise en charge à 50 % de part et d'autre ; aujourd'hui, elle est à 28 % et 72 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Ensuite, il y a eu la compensation de handicap. Il est inscrit dans la loi qu'elle serait payée par l'État : cette année, dans mon département, l'État intervient pour 45 % et le département pour 55 %. Ce sont des faits. Au total, avec le RMI, cela fait 204 millions d'euros pour un département de 380 000 habitants. Tous ceux qui gèrent un département, même ceux qui se réclament de votre étiquette politique, l'ont acté au congrès.

De sorte que, monsieur le ministre, lorsque vous dites que tout cela est compensé, je dis que c'est faux. En réalité, après les promesses qu'avait faites M. Copé lorsqu'il était ministre du budget, à chaque loi de finances, au nom de l'annualité budgétaire, vous avez revu le deal. De ce point de vue, on ne peut pas parler d'illégalité puisque cela a été voté par le Parlement. Mais la parole donnée a été complètement bafouée et, aujourd'hui, le solde est énorme.

Dans son rapport, le Conseil des prélèvements obligatoires constate que la capacité de transfert, plus exactement la réversibilité de l'impôt dans ce pays, a beaucoup diminué. Encore n'avait-il pas tenu compte de ce facteur. À partir de là, il va refaire les calculs et vous verrez que le résultat sera pire.

Dans un contexte où les inégalités se creusent dangereusement, où les revenus du patrimoine ont augmenté de plus de 10 % – ce qui semble avoir échappé à M. le rapporteur général – contre moins de 5 % pour les revenus salariaux, où certains revenus du patrimoine ont même augmenté de plus de 15 % depuis 2005, vous choisissez d'ouvrir à la fois le débat sur le patrimoine et le débat sur le RSA. Convenez, monsieur Bouvard, que c'est bien votre parti qui a lancé celui-là.

Tout l'après-midi, on vous a démontré que si l'on appliquait dans ce pays la fiscalité sur le patrimoine telle que la pratiquent les États-Unis ou la Grande-Bretagne à travers les taxes foncières, on aurait 10 milliards d'euros de rendement de plus avec les mêmes bases. Ne nous dites pas, comme vous nous l'avez si souvent seriné, que, dans ce pays, le patrimoine est massacré. Non, dans ce pays, le patrimoine est très privilégié, et c'est bien l'une de ses faiblesses. C'est une des raisons de son incapacité à faire face, notamment sur le plan de la compétitivité.

Chaque fois que vous avez un choix à faire, vous faites celui de la rente, de la fortune acquise contre la dynamique de l'investissement. Et vous persistez dans cette politique en refaisant un barème sur l'impôt sur la fortune qui va figer encore un peu plus les situations acquises au détriment de la dynamique.

Le plus célèbre des milliardaires américains a expliqué pourquoi il ne voulait pas laisser d'héritage à ses enfants : parce que les pays d'héritiers sont des pays qui sombrent. Vous savez cela, car vous n'êtes pas plus idiots que nous et vous savez lire les chiffres comme nous. Mais vous bloquez sur des intérêts assez médiocres, monsieur le ministre, d'ordre électoral, et aussi sur beaucoup de préjugés.

Pour toutes ces raisons, vous n'avez pas à nous faire la leçon ni sur la gestion des finances publiques, ni sur la dynamique économique et la compétitivité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. François Brottes pour présenter l'amendement n° 469 .

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

Sans être un expert en loi de finances, j'ai compris que cette loi de finances rectificative était un modèle de texte de communication politique. Là, nous avons affaire à un expert. J'ai bien compris que le discours que vous tenez est celui de la sauvegarde de la fortune, comme l'a fort bien expliqué Henri Emmanuelli, tandis que nous tenons celui de la solidarité. Vous essayez de faire croire au peuple que vous allez faire mal aux plus fortunés tout en rassurant les plus fortunés sur le fait que c'est le peuple qui va continuer à payer des impôts, des taxes à leur place pour combler le manque à gagner. Tout le monde a bien compris que les bénéficiaires du RSA étaient pris pour cible, de même que les accidentés du travail.

Je pourrais parler aussi de ceux qui payent les factures énergétiques. Le tarif va augmenter de 5 % – encore une augmentation supplémentaire, y compris pour nos entreprises, qui y perdront de la compétitivité. En effet, comme l'impôt ne rentre plus, vous demandez à nos entreprises encore un peu publiques de cracher des dividendes, et, pour ce faire, d'augmenter leurs tarifs : c'est alors le consommateur qui paie, et il paie le même tarif, qu'il soit riche ou pauvre. Vous faites donc le choix de l'injustice.

Cela dit, le tour de passe-passe est plutôt bien pensé. L'objectif est bien de vous faire pardonner le scandale du bouclier fiscal, mais discrètement. Vous construisez un nouveau fossé au pied du donjon de résidences principales qui relèvent plus du château que de l'appartement. Le magicien Baroin – le ministre me pardonnera cette formule car je sais qu'il a de l'humour –…

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

…qui ne manque pas non plus de talent, a plusieurs curseurs pour réussir le tour de passe-passe en question – ni vu, ni connu, je t'embrouille – : le niveau d'entrée dans le barème, les abattements applicables avant l'entrée, le taux appliqué, le périmètre de l'assiette d'imposition concernée, les niches complémentaires. Quand on additionne tout cela et que l'on fait bouger les curseurs sans forcément donner une explication cohérente, on a vite fait de comprendre que l'on peut embrouiller tout le monde pour faire croire que l'impôt de solidarité sur la fortune demeure alors qu'en réalité on est en train d'assister à sa mort lente.

Nous ferons donc contre mauvaise fortune bon coeur, ce qui veut dire, d'après le dictionnaire, que nous ne nous laisserons pas nous décourager par l'adversité jusqu'à ce que la justice fiscale que nous mettrons en place, après l'alternance qui est attendue par une majorité de Français, nous permette de faire bon coeur contre bonne fortune.

En réalité, vous portez l'impôt coupable parce que vous n'aimez pas la solidarité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Claude Bartolone, pour soutenir l'amendement n° 470 .

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Depuis que nous avons entamé cette discussion, on nous a accusé de ringardise. Mais au travers de la philosophie de ce texte, on retrouve une veille position de la droite, du temps de Raymond Barre. Souvenez-vous : les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après-demain. C'est cette même logique ringarde qui figure dans le texte qui nous est proposé aujourd'hui.

Avec ce texte, on retrouve le fameux théorème de la droite : il suffit de libérer l'énergie des puissants, de donner du pouvoir d'achat à ceux qui ont déjà tout, pour entraîner la reprise de l'économie, le cercle vicié et vicieux de l'investissement et de la reprise de l'activité économique.

Comme nous avons déjà eu l'occasion de le dire, ce texte est une entourloupe puisqu'il s'agit d'essayer de faire oublier à une majorité de Français le cadeau fait aux 14 443 contribuables qui ont bénéficié, en 2010, du bouclier fiscal pour 600 millions d'euros. C'est une entourloupe électorale pour faire oublier que les 925 plus grandes fortunes ont obtenu 381 000 euros par foyer fiscal. Et je ne reviendrai pas sur le chèque de 30 millions d'euros dont a bénéficié Mme Bettencourt, car cette pauvre dame a beaucoup d'ennuis aujourd'hui.

Pour faire accepter cette entourloupe, vous essayez d'intervenir sur l'ISF en ayant toujours à l'esprit cette maudite réflexion philosophique de la droite selon laquelle il suffit de donner aux plus favorisés pour sortir la France de la situation économique, sociale et financière que nous connaissons. Mais si cela fonctionnait, depuis 2002 que vous êtes là, cela se verrait ! À entendre certains de vos discours, on pourrait croire que vous êtes tels des oiseaux qui viennent de naître, que vous venez d'arriver aux affaires pour essayer de faire appliquer votre politique. Mais si cela devait marcher, on en verrait déjà aujourd'hui les résultats. Malheureusement, ce qu'on constate, c'est beaucoup plus de souffrance sociale, de difficultés, de chômage, bien plutôt que les bonnes nouvelles économiques que vous nous aviez annoncées.

Je veux aussi pointer les contradictions qui existent dans les discours tenus par la majorité et par les plus hautes autorités de l'État. En pleine crise financière des subprimes, combien de fois avons-nous entendu le Président de la République se féliciter du modèle social français, qui nous avait permis de résister à la crise et de nous en sortir mieux que les autres pays qui n'avaient pas le même filet de protection sociale ; et pourtant ce même système de protection sociale est menacé aujourd'hui par votre texte.

Quel symbole de voir le bouclier fiscal supprimé et l'ISF aménagé au moment même où des propos insupportables sont tenus sur les bénéficiaires du RSA ! Mes collègues du groupe SRC en ont déjà parlé, mais nous n'aurons de cesse d'y revenir.

Madame la présidente, permettez-moi de reprendre la remarque qui a été faite par Henri Emmanuelli…

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Monsieur Bartolone, vous avez dépassé votre temps de parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

…qui gère le département des Landes au doigt et à l'oeil. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC et sur divers bancs)…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

En matière de doigt, il s'y connaît, c'est sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

…et celle de Philippe Martin qui connaît bien le département du Gers.

En ne portant pas une plus grande attention aux collectivités locales qui doivent faire face à ces dépenses sociales, vous donnez un mauvais coup à l'emploi et à l'investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Compte tenu de la charge sociale que vous demandez aux collectivités de supporter, notamment dans le cadre du RSA, nous aboutirons, dans les semaines et les mois qui viennent, à moins d'investissements, à moins de soutien aux entreprises, et donc à moins de résultats en termes d'activité économique et d'emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

L'amendement n° 471 est défendu.

La parole est à M. Jean-Louis Gagnaire, pour soutenir l'amendement n° 472 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Vous n'aimez pas la solidarité et vous avez une vision très étriquée de l'économie et une approche assez sommaire, pour ne pas dire étriquée, de l'entreprise. Pour ma part, j'écoute les chefs d'entreprise, en tout cas ceux qui sont honnêtes. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

…on les comprend et on agit pour qu'ils puissent aller de l'avant, innover, se développer à l'internationale et investir.

Votre vision étriquée, pour ne pas dire rustique, consiste toujours à faire des cadeaux fiscaux, à alléger les taxes. Mais ce modèle est complètement dépassé aujourd'hui. Et malgré toutes vos incantations et les ministres qui se succèdent, à la Délégation au commerce extérieur, le déficit du commerce extérieur atteint un niveau record, tandis que nos voisins allemands affichent des résultats positifs insolents.

Cela fait dix ans maintenant que vous êtes aux responsabilités. On croyait avoir tout vu, mais depuis 2007 vous avez fait preuve de beaucoup d'inconséquence. Le bouclier fiscal a été le marqueur du quinquennat du président Sarkozy. Mais comme vous vous êtes rendu compte que vous étiez allé droit dans le mur, vous allez jeter le bébé avec l'eau du bain. Et vous essayez de faire croire aux Français, par un rideau de fumée, que vous travaillez dans l'intérêt de tous.

Notre amendement vise à maintenir le barème actuel de l'ISF qui est de 790 000 euros, ce qui représente un patrimoine de plus d'un million d'euros puisque la résidence principale fait l'objet d'un abattement partiel. À qui voulez-vous faire croire que tous les Français seront concernés par cet impôt ? Il n'y a malheureusement pas beaucoup de Français qui atteignent ce niveau de patrimoine. J'ajoute que lorsque l'on déclare un patrimoine d'un million d'euros, le montant de l'ISF s'élève à 1 000 euros environ, soit nettement moins que le montant de la taxe foncière dans les zones urbaines, là où il faut financer beaucoup de choses alors que les dotations de l'État sont loin d'être dynamiques.

Nous vous rappelons donc au bon sens et nous vous évitons de priver le budget de l'État de ressources supplémentaires. Je ne pense pas, en effet, que la situation de nos finances publiques nous permette de faire l'impasse sur des recettes.

C'est avec une belle inconscience que vous emmenez un peu plus vite le pays dans le mur. Vous voulez faire de la suppression partielle de l'ISF un autre marqueur de votre politique. Les Français sauront s'en souvenir. Il ne faut pas les prendre pour des imbéciles. Ils savent très bien qu'ils ne seront jamais concernés par cette réforme que vous allez probablement voter allégrement. Cette fois, on aura beaucoup moins de difficultés à leur faire comprendre que vous ne travaillez pas pour eux, mais pour une petite minorité de ce pays, pour vos amis du Fouquet's et les habitants de Neuilly où l'on paye moins de taxe foncière et de taxe d'habitation que dans des villes qui connaissent de grandes difficultés, comme à Montreuil.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Il faut conclure, car vous avez dépassé votre temps de parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Je vous suggère de ne pas modifier l'assiette parce que vous allez droit dans le mur et que vous allez priver l'État de 132 millions d'euros. Nous serons là pour vous alerter sur les erreurs que vous allez commettre.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. David Habib, pour soutenir l'amendement n° 473 .

Debut de section - PermalienPhoto de David Habib

Cet amendement vise à maintenir une entrée dans le barème de l'ISF à 790 000 euros. Vous avez décidé de relever la première tranche à 1,3 million d'euros. Tout à l'heure, M. Sapin a démontré brillamment que cette mesure n'était même pas demandée par les contribuables qui, demain, ne seront plus assujettis à l'ISF. Payer 1 000 euros par an pour un patrimoine d'un million d'euros peut sembler marginal par rapport aux revenus des foyers concernés. La solidarité nous conduit à considérer que lorsque l'on possède un tel patrimoine, on peut payer 1 000 euros d'impôt de solidarité sur la fortune chaque année.

L'intérêt d'une telle démarche ne se trouve pas, à l'évidence, au niveau de la productivité fiscale. La France va perdre des recettes, alors que l'endettement du pays est grand. Vous allez engager une marginalisation du nombre d'assujettis à l'ISF et, à terme, vous finirez par vous demander s'il est pertinent de maintenir un impôt qui ne concerne que quelques familles.

Debut de section - PermalienPhoto de David Habib

Telle est votre volonté, même si nous serons nombreux, après 2012, à modifier le système pour qu'il ne reste pas en l'état.

Nous avons évoqué la situation de ces 2 % de foyers fiscaux. Je suis le maire d'une commune qui compte 62 % de logements sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de David Habib

Il s'agit d'une ville d'où l'État s'est progressivement désengagé, où, sans le concours du rapporteur général, nous n'aurions plus bénéficié de la dotation de solidarité urbaine : selon les calculs réalisés par vos services, monsieur le ministre, le premier bailleur social, la Caisse des dépôts et consignations, ne détenait aucun logement social et n'était donc même pas en mesure de fournir à l'administration fiscale un état du nombre d'appartements susceptibles d'être conventionnés.

Laissez-moi vous dire ce qu'est la fiscalité d'un foyer tel qu'on en rencontre dans ma ville, un foyer qui gagne le SMIC. Il paye 7 008 euros au titre de la CSG, de la CRDS, des cotisations sociales…, soit 21,4 % de son revenu. Et ces foyers n'ont pas accès aux médias, ne sont pas soutenus par des associations pour réclamer une baisse de leur fiscalité. Ils réclament plus d'État, plus de solidarité. Ils veulent payer l'impôt mais en contrepartie d'un dispositif fiscal plus juste, qui suppose donc le maintien d'un impôt de solidarité sur la fortune touchant un plus grand nombre de contribuables que les quelques familles visées par votre texte. Il s'agit pour l'État d'assumer ses responsabilités.

L'amendement que j'ai l'honneur de défendre, en visant à maintenir en l'état la première tranche de l'ISF, a pour vocation de permettre à l'ensemble du pays de se faire une idée de ce qu'est la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Marc Goua, pour soutenir l'amendement n° 474 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Nous examinons ce projet de loi au moment où Bruxelles vient de demander au Gouvernement, paraît-il, de faire des efforts supplémentaires pour redresser les finances publiques. Or vous acceptez, si le présent texte est voté, de renoncer à 2 milliards d'euros.

Dans le même temps vous réduisez considérablement les dotations aux collectivités locales qui, je le rappelle, réalisent 73 % des investissements publics. Il s'ensuivra donc fatalement une baisse des investissements.

La politique de la ville, en dépit de la nécessité manifeste de fonds supplémentaires, a été amputée de 13 % de ses crédits en 2011. Combien de crédits en moins, encore, en 2012 ? Les événements récents ont pourtant montré l'insuffisance des moyens dont dispose la police : quand des maires lancent un appel réclamant l'intervention de « casques bleus », quand on sollicite la présence de l'armée, c'est que la situation est très grave.

Le nombre de contrats aidés diminue de 25 % et sont déjà à l'arrêt depuis le mois d'avril dans certains départements. Les entreprises d'insertion ne bénéficient plus des subventions leur permettant de remplir leur mission.

Ce n'est déjà pratiquement plus l'État qui finance la construction de logements sociaux. À cause de la baisse des financements, le prix des logements sociaux devient inabordable pour une partie de la population.

J'en viens à la cerise sur le gâteau. Dans mon département, 50 % de l'enseignement est privé. J'ai reçu de 500 à 600 lettres de la part d'établissements privés ! Je vous rappelle que l'enseignement privé a su, il y a quelques années, mobiliser un million de personnes dans la rue ; or, il me paraît très « remonté » et, alors qu'en général il vote plutôt pour vous, il proteste avec véhémence.

Toutes ces raisons expliquent que je soutienne cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à Mme Pascale Crozon, pour soutenir l'amendement n° 475 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Alors que les revenus du patrimoine augmentent énormément, que les salaires stagnent voire baissent, surtout pour les plus modestes, on aurait pu s'attendre, monsieur le ministre, à un rééquilibrage visant à renforcer la justice fiscale. Au lieu de quoi 300 000 contribuables vont être exonérés de l'impôt de solidarité sur la fortune.

Le manque à gagner pour l'État sera donc de 2 milliards d'euros. Je rappelle, en passant, que le paquet fiscal aura coûté, en cinq ans, plus de 50 milliards d'euros à l'État. Qui va payer ce manque à gagner, monsieur le ministre ? Les classes moyennes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Les classes populaires ? les générations futures ? Les bénéficiaires du RSA ? Nous vous posons à nouveau la question et aimerions que vous y répondiez.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Les amendements nos 476 , 477 , 478 et 479 sont défendus.

La parole est à M. Jean Mallot, pour soutenir l'amendement n° 480 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

S'il était parmi nous ce soir, le regretté Patrick Roy, en vous entendant, n'aurait pas manqué de s'exclamer : « Tout cela, ce sont des carabistouilles ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est une variante mais les deux se disent.

La réalité est tout de même très simple, monsieur le ministre : la quasi-abolition de l'impôt de solidarité sur la fortune a une conséquence arithmétique que tout le monde peut comprendre. Sans votre réforme, l'ISF produirait 4,1 milliards d'euros en 2012 ; la réforme appliquée, il en produira 2,3 ; le manque à gagner pour l'État est donc de 1,8 milliard d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Le bouclier fiscal étant de 720 millions d'euros, le manque à gagner final est de 1,1 milliard d'euros, autant de cadeaux supplémentaires pour les plus riches.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Vous pouvez prendre des notes car votre réforme se résume à ces chiffres. C'est clair et simple.

Vous voulez élever le seuil d'entrée dans le barème de l'ISF à 1,3 million d'euros alors qu'il s'établit aujourd'hui à 790 000 euros. Sachant que, comme on dit à l'école primaire, le patrimoine médian des Français est de 110 000 euros, le seuil d'entrée en vigueur représente 7,5 fois ce patrimoine médian – ce qui n'est tout de même pas rien. Vous souhaitez porter ce rapport à plus de dix fois le patrimoine médian. Nous voulons, nous, le maintenir à 7,5 fois le patrimoine médian.

Voilà la raison d'être de cet amendement. Les données sont très simples. Comme l'a dit Alexandre Vialatte dans l'une de ses chroniques : il ne suffit pas de manger des artichauts ou de mettre de l'ail dans le gigot pour faire partie d'une avant-garde politique. Monsieur le ministre, vous ne nous beurrerez pas les lunettes ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

L'intervention de M. Mallot était à la fois mathématique et littéraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à Mme Annick Le Loch, pour soutenir l'amendement n° 481 .

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Le Loch

J'ai dit tout à l'heure que je ne connaissais pas bien le montant de l'ISF et je pensais qu'il était plus élevé. Or pour une maison ou un appartement de 1,3 million d'euros, le propriétaire paie moins de 650 euros par an d'ISF. Puisqu'il s'agit d'un impôt progressif, ce sont les plus gros patrimoines qui contribuent le plus et qui verront leur impôt baisser de manière vertigineuse grâce à cette réforme.

L'un de nos collègues de l'UMP, pendant la séquence des questions au Gouvernement, m'a fait penser à nos concitoyens bénéficiant d'un contrat aidé, par exemple d'un contrat unique d'insertion dans les écoles primaires, à ceux qui accompagnent un élève handicapé et dont la durée hebdomadaire de travail – et donc le salaire – va arbitrairement être réduite de 26 à 20 heures. Ils apprécieront notre discussion puisque la réforme que vous proposez vise à exonérer 300 000 contribuables de l'ISF.

Les plus grandes fortunes, qui possèdent un patrimoine de 37 millions d'euros, verront leur ISF diminuer de 50 % par rapport à 2009, soit près de 2 milliards d'euros au total. Il s'agit de recettes en moins pour l'État avec lesquelles on aurait pu conserver les 26 heures payées 900 euros nets par mois pour les emplois de vie scolaire ou les auxiliaires de vie scolaire qui seront très mal traités à la rentrée prochaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

L'amendement n°482 est défendu. La parole est à M. Régis Juanico, pour soutenir l'amendement n° 483 .

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Il est au moins un domaine dans lequel le Président de la République aura fait preuve d'une très grande cohérence depuis son élection en 2007 : il a débuté son quinquennat dans l'indignité et l'injustice, il le terminera dans l'indignité et l'injustice, avec ce cadeau fiscal fait aux ménages les plus riches. Celui-ci est d'autant plus choquant qu'il sera accordé au moment où les Français subissent une politique d'austérité sans précédent : déremboursements de médicaments, hausses de taxes, augmentation exponentielle de charges à cause, notamment, de la hausse des prix de l'énergie. Jean-Paul Delevoye rappelait récemment dans son rapport qu'entre 12 et 15 millions de ménages peinent à boucler leur budget et terminent chaque mois avec un excédent ou un déficit de 50 euros.

Votre réforme est d'autant plus choquante que le pouvoir d'achat des Français régresse – vous leur demandez sans cesse de nouveaux efforts, de se serrer la ceinture, de consentir de nouveaux sacrifices – et que les inégalités de patrimoine explosent – les 500 000 Français les plus riches disposent d'une fortune, en moyenne, de 4,4 millions d'euros. Selon d'autres chiffres, qui viennent d'être révélés, 10 % des ménages les plus riches détiennent 62 % du patrimoine, soit un patrimoine moyen d'1,1 million d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Comme l'a souligné fort brillamment Pierre-Alain Muet, vous comprendrez qu'un cadeau de 175 000 euros en moyenne pour des contribuables qui disposent de 16 millions d'euros de patrimoine, choquera de nombreux Français en difficulté.

Je rappelle que le manque à gagner pour le budget de l'État atteindra 2 milliards d'euros. Vous imposez là une nouvelle purge aux caisses de l'État et vous vous montrez d'ailleurs très cohérents à cet égard depuis 2002. Vous ajoutez à l'inconséquence de votre politique une forme d'irresponsabilité que vous paierez. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Défavorable. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

C'est un peu court !

(Les amendements identiques nos 464 à 483 ne sont pas adoptés.)

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La séance est reprise.

Je suis saisie d'un amendement n° 326 .

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu.

Debut de section - PermalienPhoto de Apeleto Albert Likuvalu

S'agissant des problèmes que soulève ce texte, je ne reviendrai pas sur les arguments qui viennent d'être si bien exposés par mes collègues.

Le présent amendement vise à rétablir le seuil actuel d'imposition à l'ISF.

Supprimer le seuil actuel d'imposition fixé à 800 000 euros de patrimoine n'a aucune justification économique. Le nouveau seuil proposé écarterait plusieurs centaines de milliers de foyers du paiement de cet impôt de solidarité.

La révision du seuil proposée par cet amendement permettrait en outre d'assurer de nouvelles ressources fiscales à l'État. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 326 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 19 rectifié et 1405 .

La parole est à Mme Chantal Brunel, pour soutenir l'amendement n° 19 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Cet amendement tend à fixer le seuil d'entrée de l'ISF à 1 million d'euros au lieu de 1,3 million. Pourquoi ?

Si je suis favorable, comme l'ensemble de mes collègues du groupe UMP, à un aménagement de l'ISF en fonction de l'inflation, ou de l'évolution du prix du mètre carré, il me semble que 510 000 euros de plus, ce n'est pas rien. Ce saut est trop important. Il risque d'être perçu comme un message négatif à l'heure où, c'est vrai, de très nombreux Français ont encore du mal à boucler leurs fins de mois, où la France n'est pas complètement sortie de la crise, et où le chômage, même s'il baisse depuis maintenant quatre mois, reste quand même à un niveau important.

Porter le seuil d'entrée de l'ISF de 790 000 euros à 1,3 million d'euros, c'est exonérer, comme cela a été dit, environ 300 000 contribuables. En outre, si le seuil est porté à 1,3 million, compte tenu de l'abattement de 30 %, il faudra, pour être assujetti à l'ISF, avoir une résidence principale qui ait – en supposant qu'elle soit entièrement payée –, une valeur de 1,7 million d'euros, voire un peu plus, étant donné les effets du lissage.

Monsieur le rapporteur général, vous avez donné un exemple dans plusieurs journaux, et vous me l'avez opposé en commission des finances lors de la présentation de cet amendement.

Cet exemple concerne un jeune couple qui achète à Paris un logement d'une valeur de 380 000 euros en 1997. Selon l'évaluation des notaires, cet appartement vaut aujourd'hui 1,227 million d'euros. Une fois exercé l'abattement de 30 %, il ne vaut plus que 859 000 euros.

Avec l'amendement que je vous propose, ce jeune couple ne paierait pas d'ISF, puisque ces 859 000 euros sont inférieurs au seuil de 1 million que je propose.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Le seuil de 1 million permet donc à votre jeune couple de ne pas payer d'ISF. Notez que nous ferions une économie de 240 millions d'euros pour les finances de l'État, ce qui est important.

Aménageons l'ISF, mais restons mesurés. Rehausser le seuil de 510 000 euros d'un seul coup me paraît constituer un symbole fort pour les Français.

En ces temps difficiles, il convient de ne pas aller trop loin, un rehaussement de 210 000 euros me paraît plus juste, plus acceptable pour les Français qui font face à des difficultés importantes en ce moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 1405 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'argumentation de notre collègue Chantal Brunel résulte du bon sens, ce qui prouve qu'elle a les pieds dans la glèbe, ce qui n'est pas le cas de tous les collègues qui doivent marcher sur les pavés dorés des XVIe, VIIe et VIIIe arrondissements plutôt que là où habite le peuple de France.

Tout de même, un million d'euros, ce n'est pas si mal. Je ne sais pas si vous êtes dans cette situation, mais cela ne risque pas de m'arriver ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Eh oui, je sens que vous êtes envieux, et que vous avez des penchants soudains pour la modestie que vous ne recherchez pas d'habitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non, mais si vous faites confiance aux autres pour vous reconnaître comme modeste, vous risquez d'attendre longtemps, mon cher collègue !

D'ailleurs, quel est celui sur ces bancs qui pourrait dire honnêtement qu'il est modeste ? Aucun, pas même vous, monsieur Mariton, sinon vous seriez obligé d'aller vous confesser dimanche prochain ! (Sourires)

J'en reviens à mon sujet. Quelle est cette obsession de ne pas vouloir faire payer d'impôts, dès lors que l'on détiendrait un million d'euros ? Où est le problème ? Quand on a un million d'euros, c'est que l'on a des sous. Si l'on a des sous, c'est que l'on peut payer des impôts ! Pourquoi cette compassion pour les gens qui ont un million d'euros, et pourquoi ne pas avoir la même compassion pour ceux qui sont obligés de regarder le prix de la baguette quand ils sont au RSA ? On ne vous entend pas exprimer la même compassion pour ces gens qui, pourtant, méritent votre considération, et que vous oubliez.

Je vais être plus pédagogique. Pour la plupart des Français, un million d'euros, c'est tellement inaccessible que cela n'a même plus de sens. Je vais traduire cela d'une façon plus concrète. Vous savez ce que représente un million d'euros ? En francs, cela représente plus de 6 millions de francs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non, vous avez de beaux restes M. Mariton, mais vous êtes tout de même plus familier des francs issus de la réforme monétaire du général de Gaulle que des anciens francs !

Savez-vous ce que représente un million d'euros, monsieur le ministre ? Je ne sais pas si vous aimez les belles voitures, et je ne parle pas seulement des Porsche tranquilles, mais par exemple des Ferrari. Il est possible d'en acheter cinq avec un million d'euros. Ne trouvez-vous pas normal de payer l'impôt si l'on a de quoi acheter cinq Ferrari ? J'avoue que ça ne me choque pas. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement identique à celui de notre collègue Chantal Brunel, non pas pour lui nuire, mais pour montrer que dès lors que l'on fréquente les Français qui vivent de leur travail – comment disait-il ? « ceux qui travaillent dur et qui se lèvent tôt » –, c'est une marque de respect que de placer les curseurs où il faut et non pas au niveau que vous proposez.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas été sensible à cette remarquable convergence entre Jean-Pierre Brard et Chantal Brunel. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Pour reprendre l'exemple du jeune couple, qui a d'ailleurs vieilli depuis 1997…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le rapporteur général, vous vous prêtez à une démonstration qui ne résiste pas à une analyse sérieuse. Vous comparez le montant d'un investissement de 1997 à sa valeur en 2010, en actualisant le bien, mais pas le montant de l'investissement.

Un couple qui pouvait investir 2,5 millions de francs – 381 000 euros – en 1997 serait aujourd'hui, compte tenu de l'inflation, capable d'investir une somme de l'ordre de 500 000 euros. Puisque les francs de 1997 doivent être convertis en euros à la valeur de 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Mais si ! Si vous intégrez l'inflation sur 15 ans, vos 380 000 euros de 1997 deviennent 500 000 euros aujourd'hui. Votre jeune couple qui investissait en 1997 380 000 euros investirait aujourd'hui 500 000 euros du fait de l'inflation.

Concevez quand même que pour un jeune couple aujourd'hui, investir 500 000 euros, ce n'est pas une bagatelle ! Non seulement il faut considérer l'abattement de 30 %, mais en outre, comme je doute que ce jeune couple puisse payer comptant son investissement de 500 000 euros, il va s'endetter : par conséquent la valeur de son bien n'entrera dans le calcul de l'ISF que dans une dizaine ou une douzaine d'années, lorsqu'il aura amorti le capital emprunté. Votre raisonnement ne tient pas.

Mais quand bien même il tiendrait, Mme Brunel en a fait la démonstration, ce jeune couple ne paierait pas l'ISF même si l'on en descendait le seuil à un million d'euros. Pardonnez-moi de faire du travail de commission ici dans l'hémicycle, mais j'avais développé cette argumentation en commission, et vous ne l'aviez pas retenue.

Nous voterons donc bien entendu cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

M. Dumont vient de nous rejoindre, nous avons donc un très bon spécialiste du logement avec nous. Le raisonnement est très simple : on achète en 1997 un logement pour 380 000 euros…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

380 000 euros en 1997, cela veut dire 500 000 euros aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

… si j'applique à cette valeur de 380 000 euros l'indice des notaires, il m'indique que cet appartement vaut aujourd'hui un peu plus d'un million d'euros, ce qui fait que malgré l'abattement de 30 %, et du fait que vous n'avez jamais réévalué le barème de l'ISF, cet appartement rend ses propriétaires redevables de l'ISF. Cela me paraît un raisonnement totalement imparable ! Ou alors je n'ai absolument pas compris ce que vous vouliez dire.

(Les amendements identiques nos 19 rectifié et 1405 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 16 rectifié et 1403 .

La parole est à Mme Chantal Brunel sur l'amendement n° 16 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Je suis très heureuse de constater que je peux revendiquer quelques droits d'auteur sur des amendements de M. Brard. (Sourires)

Il s'agit ici d'un amendement de repli. Je propose un seuil à 1,1 million d'euros. Je ne connais personne dans ma circonscription qui ait une résidence principale d'une valeur de 1,7 million d'euros entièrement payée. Au regard de l'ensemble de la France, ce seuil est très élevé.

Ce saut de 510 000 euros exclut 300 000 personnes de l'ISF, alors qu'un seuil de 1,1 million n'en exclut que 180 000 contribuables. L'ISF a une très forte valeur symbolique, les dispositions techniques annexes à l'article 1er seront difficilement compréhensibles pour nos compatriotes, et j'espère qu'ils ne retiendront pas uniquement de ces longs débats que nous avons élevé le seuil jusqu'à 1,3 million. C'est beaucoup d'argent, et c'est pourquoi qu'un seuil de 1,1 million serait plus acceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, sur l'amendement n° 1403 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne conteste pas du tout la recherche en paternité, ou plutôt en maternité, que fait Chantal Brunel, qui est à l'origine de ces amendements, lesquels ont été largement débattus en commission des finances.

Mme Brunel a raison, vous êtes en train de vous tirer une balle dans le pied. Mais vous faites bien de continuer, il fallait montrer les choses comme elles sont, et vous apparaissez pour ce que vous êtes : vous êtes insatiables dès lors qu'il s'agit des privilégiés. Ce n'est jamais assez, il faut toujours en rajouter.

Dans ma bonne ville de Montreuil, 2 % des contribuables paient l'impôt sur la fortune.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Calméjane

Trois cent quatre-vingt-deux foyers assujettis à l'ISF !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Calméjane, député-maire de Villemomble, qui est davantage une réserve à bourgeois que Montreuil, est jaloux.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Calméjane

Trois cent vingt foyers assujettis à Villemomble !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Sur ces personnes assujetties à l'ISF, aucune n'est jamais venue se plaindre. C'est que ce sont des citoyens responsables, qui trouvent normal d'acquitter l'impôt. Acquitter l'ISF, qui est infiniment plus léger pour la part que représente le logement que la taxe sur le foncier bâti, c'est tout à fait normal pour les gens.

L'injustice ne réside pas dans l'ISF qui concerne l'habitation principale, mais dans la taxe sur le foncier bâti. Vous êtes plus inexorables que ceux qui sont assujettis à l'impôt, qui sont – pour reprendre une formule de Charles de Courson – « des petits riches ». Ils ne sont pas vraiment riches, mais aisés. Ces gens aisés, mais républicains, ne dédaignent pas, monsieur le ministre, de payer l'impôt.

Passer de 510 000 à 1,3 million d'euros c'est indécent et indigne à un moment où tellement de gens tirent le diable par la queue et où vous faites encore des cadeaux. Je note, monsieur Baroin, que vous n'avez toujours pas répondu à nos questions sur les représentations que vous a faites la Commission européenne quant aux niches et au déficit, non plus que sur la réalité des conséquences de votre projet de loi, qui fait que Mme Bettencourt ne paiera, l'année prochaine, que 10 millions contre 40 millions cette année.

Voilà la réalité de votre politique. Dès lors qu'on vous met le nez devant votre miroir, vous en perdez la voix, parce que répondre serait confirmer mes propos.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

La réforme dont nous discutons, depuis plusieurs jours, est juste et solide. Vous nous dites qu'avec cette réforme, des Français auront le sentiment qu'il y a une injustice.

Monsieur Brard, vous dites qu'aucun de vos électeurs soumis à l'ISF n'est venu vous dire qu'il fallait réformer cet impôt. Mais combien d'électeurs sont venus vous dire qu'il ne fallait pas le réformer ?

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

M. Brard a entendu beaucoup d'électeurs lui dire qu'il fallait augmenter l'assiette de l'ISF.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je voudrais, à titre personnel, monsieur le rapporteur général, faire quelque chose pour vous.

Je vous ai déjà mis en garde en commission des finances – mon propos a été repris par d'autres – contre l'exemple que vous aviez choisi. Acheter en 1997 un bien immobilier de 350 000 euros, soit plus de deux millions de francs à l'époque, c'était déjà un gros achat. Je sais bien que l'île Saint-Louis ou le VIe arrondissement sont encore plus chers. Mais ayez conscience que tout cela représente moins de 1 % de la réalité française. Les législateurs que nous sommes ne doivent pas se caler sur une réalité aussi particulière pour justifier ce qu'ils font.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

C'est très cher ! Comprenez que la France, ce n'est pas Le Perreux !

À quoi rime l'exemple que vous mettez en exergue ? À rien ! On sait qu'il y a eu des bulles sur les actifs immobiliers dans certaines zones. Doit-on légiférer pour les bulles ? Non ! il ne faut pas légiférer pour préserver les bulles ! Mais pour la majorité des Françaises et des Français, et non pour une infime minorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Non, monsieur Mariton, on ne supprime pas l'ISF !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

M. le rapporteur général prend l'exemple de l'appartement au Perreux de 350 000 euros en 1997. Cela représentait déjà un bien immobilier très cher, qui ne correspondait pas, je le répète, à 1 % de la réalité des patrimoines français.

J'ai regardé, après notre échange en commission des finances, ce qu'était à l'époque le prix moyen de la construction en France. Il s'étageait entre 80 000 et 120 000 euros. Et vous nous parlez de 350 000 ! Si vous raisonnez ainsi, vous allez évidemment trouver des justifications. Mais vous ne raisonnez que pour 1 % des Français et vous en laissez 99 % de côté. Continuez comme cela !

Je me souviens vous avoir encouragé, monsieur le rapporteur général, à reproduire cet exemple, ce que vous n'avez pas pu vous empêcher de faire. J'espère que tout ceci figurera au compte rendu, et on le fera connaître.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je voudrais faire encore une remarque sur l'exemple du jeune couple pris par M. le rapporteur général. Je vais essayer d'être plus simple.

Un jeune couple capable d'investir 2,5 millions de francs en 1997 dans une résidence principale correspondrait à un jeune couple capable d'investir 500 000 euros en 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Avec une réévaluation de l'inflation de 2 % par an, cela donne exactement cela.

Ceux qui sont capables d'investir ces sommes aujourd'hui disposent de très gros moyens.

Je voudrais reprendre des exemples qui ont été évoqués en commission des finances. Monsieur le maire du Perreux-sur-Marne, vous nous disiez que dans votre commune les maisons coûtaient très cher. Nous avons cherché sur Internet : au Perreux-sur-Marne, un pavillon de neuf pièces et de 250 mètres carrés est proposé au prix de 1,1 million d'euros ; un autre de sept pièces et de 400 mètres carrés à 1,3 million ; un troisième de dix pièces et de 225 mètres carrés à 1,135 million d'euros. Avec votre barème, monsieur le rapporteur général, et même avec celui de nos collègues Chantal Brunel et Jean-Pierre Brard réunis pour un temps sur un même amendement, si l'on intègre l'abattement de 30 % sur la résidence principale, et même en admettant que ce couple ne soit pas endetté, il ne serait encore pas assujetti à l'ISF !

Pour conclure, j'ai l'impression que l'on ne vit pas sur la même planète.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

L'analyse de M. Eckert ne tient pas. Entre 1997 et 2008, les prix de l'immobilier en Île-de-France ont grimpé de 140 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Vous n'allez pas obliger quelqu'un travaillant à Paris à habiter dans les Landes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Les prix de Paris et de la région parisienne sont ce qu'ils sont. Vous voulez pénaliser les gens parce qu'ils ont trouvé du travail à Paris et qu'ils sont obligés d'habiter dans la région. Ce n'est pas sérieux ! Vous ne pouvez pas faire cela !

C'est la raison pour laquelle le fait de relever le seuil est parfaitement approprié, parce que cela prend en compte toutes les situations de France, même celles où il existe une bulle spéculative. Les Franciliens n'y peuvent rien et subissent cette bulle spéculative.

Avec votre raisonnement, vous leur reprochez d'habiter où ils habitent. Dans ma circonscription, il existe également une croissance des prix immobiliers, comme partout en Île-de-France et à Paris. Actuellement, la croissance des prix parisiens est absolument phénoménale. Que faut-il faire ? Que tout le monde quitte Paris et qu'il ne reste plus que des étrangers pour acheter à Paris ou que les logements soient transformés en locaux professionnels ? Est-ce cela que vous souhaitez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Si l'on a envie qu'il y ait des habitants à Paris et en Île-de-France, il faut parvenir à remonter classiquement le seuil de l'ISF, pour faire en sorte que la composante « résidence principale » ne soit pas une partie discriminante. Ce sont les raisons pour lesquelles le seuil a été remonté, de façon parfaitement adaptée.

Votre raisonnement, monsieur Eckert, je le répète, ne tient pas, parce que n'est pas 2,5 millions francs pour 500 000 euros. C'est bien plus. Puisque 2,5 millions de francs, ce serait, aujourd'hui, pratiquement un million d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Je vous remercie, monsieur Chartier. Je trouve que ce débat devient très intéressant. J'espère, encore une fois, que tout figurera au compte rendu, afin que l'on puisse faire connaître tous ces propos.

Monsieur Chartier, je ne doute pas que vous sachiez tout. Mais le calcul fait par M. Eckert est parfaitement juste. S'il est faux, à la limite, c'est parce qu'il minore son raisonnement.

On a connu Paris il y a trente ans. À cette période, n'importe quel cadre qui gagnait à peu près normalement sa vie pouvait accéder à la propriété. Aujourd'hui, pratiquement aucun cadre qui gagne correctement sa vie ne peut accéder à la propriété à Paris sans le renfort d'un patrimoine extérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Comment voulez-vous qu'ils acquittent l'ISF alors qu'ils ne peuvent accéder à la propriété ?

Monsieur Mariton, vous encouragez la spéculation en épargnant les bénéficiaires de la spéculation. Quand on veut lutter contre la spéculation, vous le savez, il faut faire l'inverse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Un certain nombre de nos collègues éprouvent de réelles difficultés avec les « maths financières » et les réactualisations de prix.

Je viens de rechercher sur mon écran d'iPhone, puisque l'on peut accéder à Internet depuis l'hémicycle, les prix FNAIM des logements anciens.

En 1998, le mètre carré était à 1 410 euros. En 2007, on passe à 3 100 euros. En 1998, 370 000 euros, si l'on reprend l'exemple de M. le rapporteur général, cela représente un appartement de 296 mètres carrés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

C'est une petite bricole, qui correspond tout à fait au quotidien de nos concitoyens…

Je crois que vous devriez redescendre sur terre, afin de prendre conscience de vos propos. Mme Brunel, dans votre camp, a parfaitement raison de rappeler que vous vivez complètement hors du temps. Les chiffres que vous donnez ne correspondent pas à la réalité de ceux qui travaillent, y compris les classes moyennes supérieures de ce pays. Peut-être vivez-vous dans un autre monde, mais 99 % des Français ne vivent pas la réalité que vous décrivez.

Ces chiffres sont imparables. Revoyez les calculs de réactualisation, parce que les résultats sont erronés et donnent à peu près n'importe quoi.

Des présupposés idéologiques vous font sérieusement dériver, mais, en plus, vous ne savez pas compter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Je voudrais revenir un instant sur les chiffres. En 1997, le seuil d'entrée à l'ISF était de 720 000 euros. Un ménage qui possède dans Paris ou une grande ville un appartement de 380 000 euros n'atteint donc pas la première tranche de l'ISF.

Moins de vingt ans plus tard, au dernier trimestre 2010, en appliquant purement et simplement l'indice des notaires, qui est tout à fait objectif, l'appartement qui valait 380 000 euros en 1997 vaut désormais 1,2 million euros. Or l'entrée dans la première tranche se fait à 800 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Avec 30 % d'abattement sur la résidence principale, on n'y entre pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En appliquant les 30 % à 1,227 million d'euros, on entre dans la première tranche. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Pas avec ma proposition d'entrée à 1,1 million ou un million.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

M. Eckert, qui est agrégé de mathématiques, fait semblant de ne pas savoir déduire 30 % de 1,2 million. Rassurez-vous, chers collègues, il fait semblant.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En moins de quinze ans, le nombre de contribuables qui sont entrés dans cet impôt par la première tranche a triplé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La suppression de cette première tranche est donc une mesure de justice élémentaire, notamment à l'égard des familles qui sont obligées d'avoir de grands logements et qui ont été encore plus vulnérables à l'envolée des prix immobiliers.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En fait, nous avons pris une mesure de justice familiale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP.– Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) )

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

« On peut faire dire ce que l'on veut aux chiffres », dit-on : ce n'est pas vrai, et cette expression m'a toujours fait horreur.

Les chiffres sont têtus, monsieur le rapporteur général : avec un abattement de 30 % appliqué à un montant de 1,2 million, on arrive à 840 000 euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Entre-t-on dans la première tranche de l'ISF avec 840 000 euros si on adoptait la proposition de Mme Brunel ? La réponse est non, car elle a proposé que le seuil d'entrée soit ramené à 1,1 million. On n'y entrerait même pas avec l'ISF actuel, puisque le seuil d'entrée est à 890 000 euros. (« Mais non ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le rapporteur général, ce que nous avons voulu vous dire tout à l'heure, c'est qu'un investissement de cette nature ne concerne pas le commun des mortels.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Avec les propositions de nos collègues Jean-Pierre Brard et Chantal Brunel, on n'entre pas dans l'ISF même avec un appartement de cette valeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je vous rappelle également qu'il s'agit d'une valeur nette et qu'il faut déduire du montant de cet investissement le capital restant dû sur les emprunts nécessaires à l'acquisition de la propriété. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Le débat est intéressant et nous sommes arrivés au moins à un consensus. Si je reprends l'exemple du rapporteur général en tenant compte de la revalorisation selon l'indice des notaires, le foyer qui a acquis un appartement pour quelque 300 000 euros en 1997 paie aujourd'hui l'ISF.

Cette réforme serait donc urgente afin d'épargner ce foyer, qui – je vous laisse juge – acquitte un ISF de 300 euros par an. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Nous discutons et polémiquons pour éviter à ce foyer d'avoir à acquitter 300 euros par an. Le jeu en valait-il la chandelle, chers collègues ? Trois cents euros par an pour un patrimoine de plus d'un million d'euros constitué par la seule résidence principale…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

…étant entendu que pour les éligibles à la première tranche, la résidence principale ne constitue que 25 % du patrimoine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Pour les autres, on devine que la profession ou les gains personnels n'ont pu à eux seuls permettre l'accession à cette propriété s'il s'agit d'un jeune couple.

Nous débattons donc pour 300 euros et nous ne réussissons pas à nous mettre d'accord. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Fallait-il vraiment faire cette réforme pour éviter à ce foyer d'acquitter 300 euros par an ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Permettez-moi de prolonger le raisonnement du président de la commission des finances.

Ce serait vraiment mesquin de conserver une première tranche pour des contribuables, obligés de faire une déclaration pour payer si peu d'impôt ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) Il est donc tout à fait légitime de supprimer cette première tranche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Tout cela pour 300 euros !

Dans ma ville, personne n'est venu me voir pour protester contre l'ISF. En revanche, des personnes qui n'arrivent pas à payer 300 euros d'impôt, j'en vois tous les jours.

Monsieur Chartier, monsieur Mariton, nous n'appartenons pas à la même classe et nous ne défendons pas les mêmes intérêts. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous, vous trahissez l'intérêt des gens qui, par erreur, vous ont fait confiance alors qu'ils vivent dans les mêmes difficultés que les gens de ma bonne ville.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Voilà la réalité.

En regardant M. Bur et nos collègues d'Alsace, je me disais que si les habitants de Strasbourg écoutent ce que l'on entend aujourd'hui, eux qui sont des gens de rigueur, leur sang ne doit faire qu'un tour. Vous qui avez le sens de la justice, parce que l'histoire vous y a habitués, vous ne pouvez pas accepter cela. Votez en votre âme et conscience et ne votez pas par esprit de discipline parce que l'on vous contraint à faire un choix contraire à la morale.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Vous n'avez peut-être jamais voté par discipline !

(Les amendements identiques nos 16 rectifié et 1403 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à Mme Chantal Brunel, pour soutenir l'amendement n° 375 .

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

J'ai déjà défendu cet amendement. Il s'agit d'abaisser le seuil d'entrée à 1,1 million d'euros.

(L'amendement n° 375 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie d'un amendement n° 353 .

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu.

Debut de section - PermalienPhoto de Apeleto Albert Likuvalu

Nous poursuivons la défense de nos amendements malgré l'opposition de la droite.

Le présent amendement vise à doubler les taux d'imposition sur la valeur nette taxable du patrimoine. À la deuxième ligne de la dernière colonne du tableau de l'alinéa 6, nous proposons donc de substituer au nombre : 0,25, le nombre : 0,50. En conséquence, à la dernière ligne de la même colonne, il convient de substituer au nombre : 0,50 le nombre 1.

La raison est simple : les taux de l'ISF sont actuellement progressifs, de 0,55 % à 1,80 %. La baisse proposée est extrêmement forte, faisant passer le taux maximum en deçà de l'actuel taux minimum.

La révision du barème proposée par cet amendement permettrait en outre d'assurer de nouvelles ressources fiscales à l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas adopté votre amendement. En doublant les taux, l'impôt représenterait un poids trop élevé par rapport au rendement moyen. Aujourd'hui, le rendement moyen des actifs se situe autour de 3 %. Or un taux de 1 %, comme vous le proposez, en représente le tiers. De plus, une fois cet impôt acquitté, il faut encore y ajouter l'impôt sur le revenu et la CSG.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis que la commission.

(L'amendement n° 353 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Je suis saisie de trois amendements, nos 345 , 17 et 1404 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n°s 17 et 1404 sont identiques.

La parole est à M. Apeleto Albert Likuvalu, pour défendre l'amendement n° 345 .

Debut de section - PermalienPhoto de Apeleto Albert Likuvalu

Les signataires de l'amendement proposent d'établir une troisième tranche d'ISF pour les plus gros patrimoines, égaux et supérieurs à 16 millions d'euros en leur appliquant un taux de 0,75 %.

La création d'une troisième tranche permettrait d'assurer de nouvelles ressources fiscales à l'État.

Cela étant, je suppose, monsieur le rapporteur général, que vous allez me faire la même réponse que pour mon amendement précédent.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à Mme Chantal Brunel, pour défendre l'amendement n° 17 .

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Mon amendement, rejeté en commission des finances, me semble cependant tout à fait justifié. Je propose la création d'une troisième tranche pour les patrimoines au-delà de 16 millions d'euros avec un taux de 0,75 %.

Pour moi, il n'est pas concevable que le détenteur d'un patrimoine se situant entre 3,2 et 3,4 millions d'euros soit soumis au même taux d'ISF que celui qui détient un patrimoine de 16 millions ou plus.

Je sais bien que le rapporteur général a fait une démonstration assez percutante. Le tableau de la page 83 de son rapport indique qu'en supprimant le bouclier fiscal, l'ISF ne sera pas forcément moins lourd que le bouclier fiscal.

Pour ma part, je raisonne avec un ISF avant bouclier et un ISF après bouclier et je mets entre parenthèses la période du bouclier fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Mes chers collègues, je vois mal comment les Français vont comprendre que le taux soit identique que l'on ait un patrimoine de 3 millions ou de 16 millions d'euros ou plus.

Je me suis livrée à un certain nombre de calculs. Pour un patrimoine de 16 millions, avec un taux à 0,5 %, vous gagnez par rapport à l'ISF actuel 145 000 euros et par rapport à un ISF à 0,75 %, vous ne gagnez que 100 000 euros environ.

Cet amendement est juste. En outre, il ne coûte rien à l'État, bien au contraire. C'est pourquoi nous devrions l'adopter.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Jean-Pierre Brard pour soutenir l'amendement n° 1404 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet amendement concerne non pas les petits riches mais les gros riches : ils ont a priori plus d'argent que les précédents, il est donc normal qu'ils soient appelés à contribuer davantage.

Nous avons du mal à convaincre nos collègues de l'UMP. Pourtant, nous ne voulons que leur bien : certains sont sympathiques, nous regretterions de ne pas les retrouver dans l'hémicycle lors de la prochaine législature. (Sourires sur tous les bancs.)

Que vont penser les habitants de Saint-Jean-de-Maurienne, de Rosny-sous-Bois, de Chanteloup-les-Vignes, d'Aulnay…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

M. Brard connaît bien sa géographie électorale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…ou encore ceux de Champigny-sur-Marne ?

Habituellement les Campinois font pourtant le bon choix. Comment expliquerez-vous à ces populations modestes que vous les tondez avec la TVA quand elles désirent acheter quelques produits simples pour faire manger leur famille tandis que vous refusez de faire contribuer les plus riches à proportion de la réalité de leur fortune ?

Il s'agit d'un amendement de bon sens et de justice. Si vous refusiez de l'adopter, vous témoigneriez de votre entêtement, de votre aveuglement et de votre surdité dès lors qu'il faut aller vers plus de justice.

Je vous place devant vos responsabilités. Je comprends ceux d'entre vous qui se plongent dans la lecture de divers documents pour ne pas avoir à relever la tête, ou éventuellement la main, au moment du vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mon cher collègue, je pensais précisément à vous. Vous qui êtes habituellement un esprit rationnel et logique – même si vous n'êtes pas toujours objectif pour être parfois de parti pris –, vous pourriez cette fois aller dans le sens de la justice et penser aux habitants des faubourgs de Strasbourg qui vivent modestement…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…et que vous avez déjà malmenés depuis le début de nos discussions, sous la houlette, ou plutôt sous la férule, souriante mais intraitable, du ministre qui vous tient en laisse.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Dans le cadre du groupe de travail, nous nous étions interrogés. Fallait-il un barème à trois ou à deux tranches ? Au-delà d'un taux de 0,5 %, n'y avait-il pas un risque de disproportion entre le niveau de l'impôt et le rendement moyen des actifs ? Il nous a finalement paru plus sage, de retenir un barème à deux taux : 0,25 % et 0,5 %.

Madame Brunel, n'oubliez pas que le taux de 0,5 % s'applique aux patrimoines supérieurs à 3 millions d'euros dès le premier euro ! Jusqu'à présent le taux tout à fait excessif de 1,8 % ne s'appliquait qu'à partir de 16 millions d'euros de patrimoine.

Le choix des deux taux nous a semblé constituer l'approche la plus rationnelle, la plus simple et la plus stable sur le plan économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

L'amendement de Mme Chantal Brunel mérite que nous consacrions quelques instants à ce débat.

Mme Brunel nous fait remarquer, je crois à juste titre, qu'une fortune de deux, trois ou quatre millions d'euros n'a rigoureusement rien à voir avec une fortune de vingt, trente ou quarante millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Pourtant vous venez de vous acharner contre les détenteurs de patrimoine de deux millions d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Évidemment, ces patrimoines sont tous extraordinairement supérieurs au patrimoine médian détenu par nos concitoyens, qui, je le rappelle, s'élève à 110 000 euros. Certes, pour ces derniers, 3 ou 30 millions d'euros représentent également des montants inaccessibles ; on peut toutefois admettre que les fortunes concernées n'ont rien à voir entre elles.

En raisonnant hors bouclier fiscal, votre nouveau barème permet aux détenteurs des fortunes les plus importantes d'acquitter un ISF bien inférieur à l'impôt qu'ils payaient jusqu'alors.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Autrement dit, en refusant d'adopter l'amendement de Mme Brunel, vous démontrez que votre réforme pérennise le bouclier fiscal, et que cet effet est d'autant plus fort que le patrimoine est élevé.

Je ne veux ni raisonner à la place de parlementaires de la majorité ni intervenir dans un débat qui n'a concerné que des membres de l'UMP pour préparer cette réforme, mais si vous souhaitez expliquer qu'il est temps de supprimer le bouclier fiscal, il serait cohérent et logique d'adopter un barème qui gomme ses effets au lieu de les pérenniser.

Or le barème que vous proposez fait tout l'inverse : plus les fortunes concernées sont élevées, plus les effets du bouclier fiscal sont pérennisés.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Monsieur Carrez, votre raisonnement s'appuie sur des éléments techniques et sur des calculs : il n'est pas compréhensible pour la plupart des Français.

Chers collègues, on ne peut pas expliquer aux Français que ceux qui détiennent un patrimoine de 2 ou 3 millions d'euros subiront le même taux que ceux dont le patrimoine dépasse 18, 19, 20 millions et va même bien au-delà.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Cette fiscalité a aussi une signification symbolique.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Brunel

Le président de la commission des finances demande lui aussi la création d'une autre tranche du barème, et le taux proposé de 0,75 % reste relativement modeste. D'autres propositions allaient beaucoup plus loin.

De plus, vous constaterez à la lecture du tableau reproduit dans l'exposé sommaire de l'amendement que les grandes fortunes y gagneraient par rapport au niveau actuel de l'ISF.

Monsieur le rapporteur général, nous sommes dans le symbole. Prenons garde aux conclusions que les Français risquent de tirer de cette réforme ! Personnellement je ne peux pas voter le barème en l'état et, si mon amendement n'est pas adopté, je m'abstiendrai sur l'article 1er. Je ne peux décidément pas voter un barème qui fixe des taux d'imposition identiques que la valeur du patrimoine soit de 3,1 ou de 20 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

Monsieur le ministre, hier, lors des questions aux Gouvernement, je vous ai cité une étude récente du magazine Forbes comparant les détenteurs de très grandes fortunes en Inde, en Chine, aux États-Unis ou en France.

Quel est le profil des millionnaires français dont le patrimoine ne s'élève pas à 2 ou 3 millions d'euros mais dépasse plutôt les 20 millions ? Ce ne sont pas des créateurs ; ils n'ont pas construit eux-mêmes la fortune qui est la leur. Pour la plupart, ils bénéficient de rentes produites par d'autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

92 % d'entre eux sont des hommes qui ont en moyenne soixante-quatorze ans.

Monsieur le rapporteur général, je vous ai écouté attentivement : vous affirmez que le choix du nouveau barème est sage. Comment expliquerez-vous à nos concitoyens que dans la situation actuelle, il est sage pour notre pays d'investir des fonds en faveur de rentiers âgés de soixante-quatorze ans, masculin pour 92 % d'entre eux ? En quoi cela est-il sage ? N'est-ce pas là, au contraire, tout l'inverse de la sagesse, de la simplicité et de l'efficacité ?

Chantal Brunel a raison de vous rappeler le poids des symboles. Pourquoi notre pays doit-il payer pour des personnes qui ne représentent en rien des forces vives de la nation, qui ne sont ni des inventeurs ni des créateurs, mais qui vivent de l'effort et de la création réalisés par d'autres ?

Dans la situation financière qui est la nôtre, il n'y a aucune sagesse dans le fait de saigner notre pays à blanc ; il est incompréhensible que vous n'acceptiez pas l'amendement de Mme Brunel ou celui de M. Brard qui tentent d'atteindre à la marge les très grandes fortunes qui n'apportent rien à ce pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le ministre, de combien de personnes parle-t-on ? Aujourd'hui, après abattement, et après le jeu des niches fiscales, 1 642 contribuables déclarent un patrimoine supérieur à 16 millions d'euros.

Combien le RSA compte-t-il de bénéficiaires ? 1,2 million de personnes !

Monsieur le ministre, Mme Brunel vous tend une perche. Demain vous lirez dans un grand journal du matin une étude comparative passionnante sur les bénéficiaires du RSA et les contribuables à l'ISF. J'en ai eu la primeur grâce à l'informatique et à la gentillesse des journalistes. Si vous nous aidiez à faire adopter les amendements dont nous discutons, vous auriez, demain, de véritables éléments de réponse pour réagir à l'enquête de Libération.

Que peut-on lire en une de ce quotidien : « Sarkozy assiste les riches. Pendant que l'UMP fustige les bénéficiaires de l'allocation de solidarité, elle allège les impôts des plus fortunés. »

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Un article extraordinaire développe quatre points : combien de personnes sont-elles concernées, quel est le coût pour le budget, qu'y gagnent les bénéficiaires, la fraude et les abus sont-ils importants ?

Vous avez peu évoqué ce dernier sujet. Combien de déclarations de revenus ne sont pas conformes à la réalité ? Pourtant, vos services ont fait des évaluations ; des chiffres circulent – évidemment on ne peut jamais connaître avec précision le nombre de fraudeurs puisque, par définition, ils ne se déclarent pas. Vous stigmatisez les fraudeurs au RSA mais, en matière fiscale, vous privilégiez des systèmes déclaratifs aux contours parfois un peu flous pour les détenteurs des plus gros patrimoines : les Français vont s'empresser de faire la comparaison.

Vous avez beau dire que les mêmes paient toujours, ce n'est pas vrai. Ils paient plus tard, lors des successions, et il n'est pas certain qu'ils paient les montants dont vous nous parlez, nous y reviendrons dans le cours de la discussion, probablement samedi ou dimanche.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le ministre, avec ces amendements, vous avez l'occasion de donnez un peu d'équilibre à votre réforme. En tout cas, je vous invite à lire cette nuit les articles de Libération ; vous regretterez sans doute de ne pas avoir soutenu l'amendement de Mme Brunel.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Je veux apporter mon soutien, et celui de Philippe Folliot, à l'amendement de Mme Brunel.

Monsieur le rapporteur général, vous nous répétez depuis le début de la discussion que cette réforme doit être juste, efficace et équilibrée. Vous savez que nous vous avons toujours suivi dans cette voie. Je fais partie de ceux qui se réjouissent sans aucune malice, contrairement à certains collègues de gauche, de la suppression du bouclier fiscal et de l'aménagement de l'ISF. L'exemple que vous avez cité du couple qui ayant acheté une maison aux prix de 380 000 euros se trouve aujourd'hui assujetti à l'ISF me semble convainquant.

Cependant, nous parlons de patrimoines supérieurs à 16 millions d'euros : nous sommes très loin de l'achat de la maison qui transforme un jeune couple en contribuable à l'ISF…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Si l'on applique le barème de 0,5 % aux détenteurs de patrimoine d'une valeur de 16 millions d'euros, l'ISF s'élève à 80 000 euros ; il est de 120 000 euros si l'on applique un taux de 0,75 %. Il y a donc une différence de 40 000 euros. Ce montant mettrait-il en péril les contribuables concernés ? Je ne le pense vraiment pas. Selon vous, à ce niveau, on ne sait pas précisément quels sont les revenus du patrimoine.

Monsieur le rapporteur général, vous avez toujours tenté de convaincre qu'il fallait envoyer un signal fort, précisant que l'effort devait être partagé par tous. Eh bien, il me semble qu'en demandant à ceux qui détiennent un patrimoine de 16 millions d'euros de consentir un effort complémentaire et de contribuer ainsi à l'équilibre de la réforme, on enverrait un signal important à ceux qui ne paient pas l'ISF. Il nous paraît essentiel que ces contribuables n'en restent pas au tarif de base tel que vous l'avez fixé à 0,5 %. C'est la raison pour laquelle les députés du Nouveau Centre soutiennent ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Ainsi que l'a indiqué le rapporteur général tout à l'heure, le débat sur le barème et le nombre de tranches n'est pas illégitime. Toutefois, certaines choses qui ont été dites ce soir, sans doute par esprit sportif, méritent que l'on s'y arrête.

M. Eckert nous a expliqué en somme que, dès lors qu'une mesure concerne peu de monde, on peut faire n'importe quoi. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Il me semble qu'en démocratie, il n'est pas légitime d'agir ainsi.

Mme Mazetier a stigmatisé en des termes particulièrement peu élégants telle ou telle catégorie de nos concitoyens ; c'est, là aussi, une manière de faire qui n'est pas convenable.

Quant à notre excellente collègue Chantal Brunel, elle a tenté de nous convaincre d'adopter son amendement, au motif que ce serait une mesure symbolique. Or, si l'impôt a beaucoup de fonctions, je ne suis pas certain que la principale d'entre elles soit d'afficher des symboles.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Ce n'est pas ainsi que l'on fait les meilleures lois.

Enfin, monsieur le président de la commission, vous et vos collègues du groupe socialiste nous avez expliqué pendant de longues heures combien il était scandaleux de réformer l'ISF pour des contribuables dont le niveau de fortune se situait aux alentours d'un million d'euros, et maintenant, à l'occasion de l'examen de ces amendements, vous nous dites qu'au fond, cette question importe peu, ce qu'il faut, c'est cogner à 16 millions d'euros. Il faut savoir ce que l'on veut !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Mariton

Vous découpez le sujet en morceaux de plus en plus petits, considérant que plus les publics visés sont restreints, plus on peut dire de bêtises.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Mazetier

C'est insultant pour Mme Brunel !

(L'amendement n° 345 n'est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 17 et 1404 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Guigou

Prochaine séance, ce matin, 9 juin 2011, à neuf heures trente :

Discussion de la proposition de loi visant à ouvrir le mariage aux couples de même sexe ;

Discussion de la proposition de résolution européenne relative à l'introduction d'une taxe sur les transactions financières en Europe ;

Discussion de la proposition de loi visant à lutter contre le décrochage scolaire ;

Discussion de la proposition de loi simplifiant le vote par procuration ;

Discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer.

La séance est levée.

(La séance est levée, le jeudi 9 juin 2011, à une heure cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma