La séance est ouverte à dix heures.
Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président
La Commission examine le rapport de la mission d'information sur l'optimisation de la dépense publique (M. Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur).
Mes chers collègues, le rapport que je vous présente et qui vient d'être adopté par la mission d'information commence par un constat sur l'état de nos finances publiques. Les trente-six personnalités que nous avons auditionnées ont toutes insisté sur le caractère historique de la dégradation de nos comptes publics.
Ainsi, en 2009, le déficit des administrations publiques atteindra 8,2 % du PIB et le coût des intérêts de la dette publique s'élèvera à 2,8 % du PIB. Celui-ci pourrait même s'élever à 3,7 % du PIB en 2012. Dès lors, la situation pourrait devenir problématique en cas de remontée des taux d'intérêts.
Le rapport de la mission d'information traite d'un second aspect qui porte sur la dette sociale. Je vous rappelle que, ces dernières années, la dette sociale a été transférée à la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), qui doit achever son amortissement en 2021. Depuis sa création en 1996, ce sont 134,5 milliards d'euros qui ont ainsi été transférés et, à ce jour, 40 milliards d'euros ont, d'ores et déjà, été amortis.
Or, le déficit de la sécurité sociale en 2009 s'élèvera à 24 milliards d'euros, le déficit attendu pour 2010 étant de 30 milliards d'euros. Lorsque nous avons interrogé le directeur de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), celui-ci nous a indiqué que la sécurité sociale avait frôlé la cessation de paiement à l'été 2008 du fait de la faible activité des banquiers à cette période. L'ACOSS avait alors éprouvé des difficultés à placer ses billets de trésorerie.
Mais à ce rythme, du fait de l'ampleur du déficit annoncé pour l'année prochaine, le plafond de découvert de l'ACOSS devra être relevé à 60 milliards d'euros.
La deuxième partie du rapport de la mission d'information concerne les propositions. Une première série de propositions porte sur l'État et les ministères suivis par la Commission des Lois.
Notre première proposition est relative à l'amélioration des conditions de collecte de l'impôt sur le revenu grâce au prélèvement à la source. Nous sommes, en effet, le dernier pays à ne pas prélever cet impôt à la source. Une telle réforme permettra de simplifier les procédures et de mettre fin, par exemple, à la ressaisie des déclarations papier. Le prélèvement de l'impôt à la source permettra ainsi de réduire ces coûts de fonctionnement.
Notre deuxième proposition vise à raboter les « niches fiscales » : le montant de chacune des niches serait ainsi diminué de 10 %, à l'exception du crédit d'impôt recherche. Certaines niches fiscales ont été signalées à notre attention au cours de l'audition du Premier Président et du Président de la quatrième chambre de la Cour des comptes. Il s'agit des dispositifs dits « Girardin immobilier » et « Girardin industriel ». Au cours de cette audition, l'inclusion des bateaux de plaisance dans le « Girardin industriel » a été pointée du doigt.
La troisième proposition consiste à taxer l'économie grise, dès le premier euro. Actuellement, les services fiscaux peuvent reconstituer le niveau de revenus à partir du train de vie d'une personne, mais la taxation de ces revenus n'intervient qu'à partir de 40 000 euros. Nous proposons de les taxer dès le premier euro.
Une deuxième série de propositions vise à stimuler l'investissement en France et à sanctionner les comportements abusifs.
Tout d'abord, nous proposons que soient adoptées des règles favorisant un amortissement plus rapide, afin d'inciter les entreprises à investir davantage.
Ensuite, nous avançons des mesures visant à conditionner le versement des aides directes aux entreprises au respect de certains critères. Nous suggérons, pour ce faire, que soit mis en place un groupe de travail chargé de définir les critères d'une « entreprise citoyenne ». Seules ces entreprises dites « citoyennes », c'est-à-dire respectant l'ensemble des critères ainsi définis, pourront alors recevoir des aides publiques. Ces critères seront à la fois sociaux et environnementaux et les commissaires aux comptes devront indiquer, dans leur rapport annuel de certification des comptes, si l'entreprise a satisfait au respect de ces critères.
Une troisième série de propositions vise à faire de l'État un acteur exemplaire, ce thème de l'exemplarité étant apparu, de manière récurrente, tout au long de nos auditions.
La première de ces propositions consiste à obliger l'État, à l'instar de ce qui se pratique aux Pays-Bas, à élaborer le budget de l'année sur la base de l'hypothèse de croissance économique la plus prudente, afin d'éviter toute perte de recettes budgétaires en cours d'exercice par rapport aux prévisions initiales.
La seconde de ces propositions consiste à taxer, de manière forfaitaire, les logements et véhicules de fonction, dont l'État est propriétaire, toujours dans ce souci d'exemplarité.
Une quatrième série de propositions cherche à optimiser l'organisation de l'État et à réduire le coût de l'action administrative.
La première proposition que je tiens à citer à ce titre porte sur les normes, qui sont en nombre considérable et qui les collectivités locales doivent appliquer au prix de coûteux travaux, notamment en matière d'équipements sportifs. Il existe aujourd'hui une commission consultative d'évaluation des normes, qui accomplit un travail remarquable sous la présidence d'Alain Lambert. Il faut encourager ce travail et, au-delà d'un état des lieux, franchir une nouvelle étape. Notre proposition est double : d'une part, assouplir 1000 normes d'ici le 31 décembre 2010, et, d'autre part, établir un moratoire de cinq ans sur les nouvelles normes techniques, dont les coûts induits ne seront pas intégralement compensés au profit de la collectivité en charge de les appliquer. Il faut en effet que soit repensé le rapport qualité-prix de chaque norme. Ainsi, on nous a cité l'exemple de l'élévation exigée des protections des murs des dojos, de quelques centimètres, qui n'aurait apporté qu'un très faible gain en termes de sécurité, mais aurait généré de nouvelles dépenses considérables.
La deuxième proposition en la matière consiste à reprendre une mesure que les ministères n'ont pas pleinement mise en oeuvre à ce jour, à savoir chiffrer le coût de chaque procédure administrative et réduire la charge des 1 000 procédures les plus lourdes pour les entreprises, dans l'esprit du programme de l'Union européenne défini par le commissaire Günter Verheugen.
Nous proposons également que les pouvoirs publics poursuivent la mutualisation, au niveau régional, des fonctions supports de tous les services déconcentrés de l'État, à l'exception toutefois de ceux de la Justice afin d'en respecter l'indépendance.
Nous proposons la création d'une prime positive d'assiduité dans la fonction publique. Comme l'ont souhaité certains de nos membres, la mission estime qu'il convient également de rechercher les causes de cet absentéisme dans certains services de l'administration.
Dans le cadre de la politique d'achats de l'État, je propose d'appliquer aux dépenses de l'État le mécanisme de l'escompte. Si le paiement est réalisé dans un délai inférieur à cinq jours, l'État devrait ainsi pouvoir obtenir une réduction du prix payé de 1,5 %.
La mission a également souhaité faire des propositions concrètes pour les ministères de la Justice, de l'Intérieur, de l'Immigration, suivis par la commission des Lois.
S'agissant du ministère de la Justice, nous proposons le développement de la médiation familiale. Dans le cadre des précédents travaux de la Commission, nous avons pu constater que beaucoup de litiges, relatifs au paiement des pensions ou aux droits de garde, pouvaient être réglés rapidement dans le cadre de la médiation alors que les procédures devant les tribunaux demeurent souvent très longues et compliquées.
Nous proposons de fusionner, et non pas de supprimer, la juridiction de proximité avec la justice de première instance. Ainsi, les juges de proximité seront toujours associés aux formations collégiales dans les tribunaux d'instance ou les tribunaux correctionnels. Leur intervention ne serait supprimée que dans certaines procédures.
Une autre des propositions concernant le ministère de la Justice vise à développer plus encore la visioconférence, afin de réduire le nombre des extractions judiciaires qui ne sont pas absolument nécessaires et qui ont un coût certain pour les finances publiques. La prudence est de mise pour les extractions médicales. Nous proposons seulement d'encourager, chaque fois que possible, le recours à la télémédecine et à la vidéo-consultation, ce qui pourrait d'ailleurs permettre l'intervention plus simple de médecins spécialistes.
Nous proposons, par ailleurs, de simplifier la procédure du permis de conduire. La procédure actuelle donne lieu à une suspension administrative puis à une suspension judiciaire du permis, ce qui peut conduire à des décisions contradictoires, que ne comprennent pas nos concitoyens, avec un coût là encore tangible pour nos comptes publics. La mission propose donc que soit mise en place une procédure judiciaire unique de suspension du permis de conduire plus simple et plus compréhensible.
S'agissant des étrangers en situation irrégulière sur le territoire national et commettant une infraction de faible gravité, la mission propose de donner la possibilité au Procureur de la République de suspendre les poursuites lorsque la personne concernée s'engage à quitter le territoire volontairement. Si cette personne revenait sans autorisation sur le territoire, alors les poursuites s'appliqueraient. Dans le même esprit, lorsque la gravité de l'infraction est telle qu'elle nécessite l'engagement de poursuites par le Procureur de la République, nous proposons que la juridiction de jugement, après avoir reconnu le prévenu coupable, puisse ajourner, pendant un mois, le prononcé de la peine, afin de permettre, pendant cet ajournement, l'exécution effective de la mesure d'éloignement par un départ volontaire du prévenu.
Le rapport comporte également plusieurs propositions concernant l'organisation des collectivités locales.
Tout au long des auditions, les personnes que nous avons entendues ont souligné le coût qu'avait pu engendrer la mise en place des structures intercommunales, car, dans les faits, l'intercommunalité est souvent apparue comme un nouveau niveau d'administration, venu se greffer aux structures existantes. Nous avons interrogé les magistrats de la Cour des comptes sur ce sujet, mais ils n'ont pas été en mesure de nous fournir d'indicateurs permettant de mesurer le degré actuel de mutualisation des structures communales et intercommunales.
Aussi, la mission présente une proposition selon laquelle la mutualisation des services sera désormais une compétence obligatoire des structures intercommunales, compétence qui sera exercée à la suite d'un vote à la majorité simple de l'assemblée délibérante. Ainsi, par exemple, la mutualisation des services d'achats au niveau de l'intercommunalité permettra que le nouveau service mutualisé soit ensuite facturé aux communes qui sont membres de la structure intercommunale, ce que reconnaît désormais possible le droit européen.
Dans le rapport de la mission d'information, nous avons également mis en lumière le fait que l'État n'avait pas tiré toutes les conséquences de la décentralisation. C'est pourquoi nous proposons la réduction des doublons qui existent entre l'État et les collectivités locales.
Le rapport avance aussi une proposition destinée à lutter contre les abus en matière de dépenses de communication des collectivités territoriales. Ces dépenses sont tout à fait légitimes pour assurer le développement économique de la collectivité et promouvoir celle-ci au-delà de son territoire. Mais certaines collectivités font également de la communication dans leur propre ressort, ce qui s'apparente davantage à de l'autopromotion qu'à une action en faveur du développement local. C'est pourquoi, nous proposons de taxer ces dépenses au bénéfice de la CADES au nom de l'exemplarité.
Nous faisons également une proposition visant à encadrer les subventions versées aux associations, en interdisant aux collectivités de verser une subvention de fonctionnement de plus de deux cents euros à une association, dont les réserves financières sont supérieures à son budget de fonctionnement d'une année.
La mission appelle en outre à mettre fin aux financements croisés entre collectivités, comme l'avait proposé la mission d'information sur la clarification des compétences des collectivités territoriales dans le rapport de MM. Didier Quentin et Jean-Jacques Urvoas.
Enfin la mission a voulu dans son rapport faire un ensemble de propositions sur la dette sociale. Aujourd'hui, parce qu'on n'a cessé de lui donner de nouvelles dettes à amortir, la CADES doit perdurer jusqu'en 2021.
Je vous rappelle que c'est la Commission des Lois qui a pris l'initiative de faire voter en 2005 un amendement de nature organique destiné à assurer le transfert à la CADES de ressources nouvelles en cas de transfert de toute nouvelle dette. La situation actuelle impose de nouvelles mesures.
Le déficit de la sécurité sociale s'est élevé à 10 milliards d'euros en 2008 et doit atteindre 24 milliards d'euros en 2009. S'il atteint 30 milliards d'euros en 2010, le plafond pour le découvert de l'ACOSS devra être relevé à 60 milliards d'euros. C'est pourquoi nous présentons les propositions suivantes : transférer de droit tout déficit constaté au titre d'un exercice achevé à la CADES et lui affecter une ressource nouvelle propre à en assurer l'apurement, d'une part, et prévoir que si le montant du déficit prévisionnel inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale dépasse 10 milliards d'euros, le déficit au-delà de ce montant sera de droit transféré à la CADES avec une recette nouvelle propre à assurer la couverture de ce déficit, d'autre part.
En effet, l'ACOSS n'a pas vocation à garder de tels déficits dans ses comptes. Par ailleurs, au cours de nos auditions, on a attiré l'attention des membres de la mission sur le fait que, compte tenu de l'évolution des dépenses, il était nullement certain que le seul retour de la croissance permette le rétablissement de l'équilibre des finances sociales.
Le rapport fait enfin plusieurs préconisations concernant les recettes de la sécurité sociale : étendre l'assiette de la contribution sociale généralisée (CSG) afin de l'aligner sur celle de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), concernant la vente des métaux précieux et les jeux ; retirer la CRDS du « bouclier fiscal », dans la mesure où la CRDS est une contribution qui sert au financement de la dette sociale, identifiée et cantonnée, et non pas une imposition ordinaire ; taxer les stock-options et les retraites chapeaux.
S'agissant de l'assurance maladie, la mission propose une rationalisation du réseau des caisses primaires d'assurance maladie ainsi que la possibilité de s'affilier à la caisse la plus proche de son domicile en cas de difficultés d'affiliation. En effet, M. Rémi Pellet, professeur à Sciences Po, a évoqué devant la mission la complexité de certaines situations et la charge que pouvait représenter, pour les personnels, le contrôle des droits ouverts entre les différents régimes.
Le rapport évoque enfin des mesures plus ponctuelles comme le développement de modes de garde des jeunes enfants plus économes et les changements de comportement des assurés, face aux dépenses de santé, toujours dans le souci de maintenir à terme la pérennité de ces droits sociaux.
Le rapport se conclut sur une proposition, qui découle du constat posé au départ : celle d'organiser, avant la fin du premier semestre 2010, un « Sommet national de la dette publique ». L'objectif de ce sommet serait de réunir l'ensemble des forces politiques et sociales, afin de parvenir à la définition d'un agenda partagé de retour à l'équilibre des comptes publics, à charge pour chaque force politique de proposer ensuite aux Français les moyens qu'elle choisira pour respecter cet objectif commun. Il est, en effet, nécessaire de définir une position commune dans notre pays, au moment où le déficit public de l'Allemagne représente 2,75 % du PIB cette année, contre 8 % en France.
Le rapport de la mission d'information est le fruit d'une démarche exceptionnelle dans laquelle nous nous sommes engagés à la demande du Président de l'Assemblée nationale. Nous, parlementaires, ne pouvons pas dire que nous ne connaissons pas l'état de la situation. Nous avons un devoir de lucidité à l'égard de nos concitoyens. Parce que la dette et les déficits s'accumulent depuis 1974, chacun doit prendre ses responsabilités.
Je souhaite, tout d'abord, saluer le travail de la mission. S'agissant des objectifs ayant guidé le travail de cette mission, M. le président Jean-Luc Warsmann a parfaitement rappelé le contexte d'aggravation de la dette publique et la nécessité d'agir pour la réduire. À cet égard, je rappellerai que le groupe Nouveau centre avait proposé, au moment de la révision constitutionnelle, d'adopter la règle selon laquelle les budgets devraient obligatoirement être votés en équilibre dans un délai de cinq ans.
Pour autant, je ne soutiens pas les propositions de la mission. En effet, certaines d'entre elles, notamment celles relatives à l'absentéisme dans la fonction publique, à la garde d'enfants ou encore à la suppression des financements croisés, ne sont pas évaluées. En conséquence, je souhaite interroger M. le président Jean-Luc Warsmann sur la portée du vote qui nous est demandé. S'agit-il de voter sur la totalité des propositions, étant précisé que je m'abstiendrai sur l'autorisation de publication du rapport ? Selon moi, ce rapport doit rester un simple document de référence. Par ailleurs, il aurait pu être souhaitable que les membres de la commission aient la possibilité de formuler des propositions écrites, qui auraient pu enrichir le contenu du rapport.
Je vais vous répondre en quelques points.
Premier point : il s'agit d'une réponse à l'appel à contribution demandée par le Président de l'Assemblée nationale aux présidents de commissions permanentes et j'ai souhaité, pour ce faire, constituer une mission d'information ouverte à l'opposition.
Deuxième point : il a fallu réaliser ce travail dans un délai très court afin que le rapport puisse être présenté avant le début de l'examen du projet de loi de finances pour 2010. Il aurait été curieux que nous déposions nos conclusions que le 31 décembre de cette année !
Troisième point : la mission a eu à se prononcer ce matin sur le rapport. Sur sa partie « constat », le rapport a recueilli l'unanimité. La partie consacrée aux propositions a été adoptée par la majorité, l'opposition s'étant abstenue. Il revient à la commission de se prononcer sur la publication du rapport et non sur le rapport lui-même. Les parlementaires peuvent cependant demander à la mission d'apporter des précisions et faire parvenir des contributions.
Je serais tenté de dire : n'allons pas trop vite. Nous avons eu récemment des exemples d'affaires traitées trop rapidement, par exemple en matière de lois de simplification. Les membres de la commission des Lois n'ont eu connaissance des propositions qu'au début de la présente réunion, tandis que les membres de la mission n'ont pas eu le temps de discuter de façon approfondie chacune des propositions dans le temps imparti à la réunion de la mission. Cela est d'autant plus regrettable que certaines de ces propositions sont intéressantes et se rapprochent de propositions formulées par les députés du groupe SRC.
En revanche, parmi les 53 propositions, certaines suscitent des réserves exprimées au cours de la réunion de la mission, mais que nous n'avons pas eu le temps de formaliser par des propositions de rédaction alternative.
Les contributions des commissaires sont bienvenues et nous pourrions, par exemple, prévoir une clause de rendez-vous.
M. le président, nous savons que vous êtes un « bulldozer » et que vous écrasez les obstacles. Or nous ne pouvons pas vous donner un blanc-seing sans analyser les propositions formulées. Certes, vos collègues de la majorité semblent aimer être brusqués régulièrement ; mais ce n'est pas notre cas.
Le rapport que vous nous présentez pose un problème de méthode et des problèmes au fond. Or les réserves que nous avons formulées ne pourront pas être intégrées dans le rapport qui sera publié. En conséquence, le vote autorisant la publication sera interprété dans les médias comme un vote fustigeant par exemple les collectivités territoriales ou les fonctionnaires absents.
Enfin, je ne sais pas si la collectivité à laquelle vous faisiez allusion au sujet des campagnes de communication était bien le département dont je suis élu et qui a choisi de parrainer le bulletin météo sur France 3 ; mais il se trouve que le département du Nord a effectivement subventionné ce programme, ce qu'il n'aurait peut-être pas été obligé de faire si la majorité actuelle n'avait pas coupé les crédits de la télévision publique.
Ayant participé à certaines réunions de la mission, je constate que le travail qui a été fait est remarquable et conséquent. Cependant, je regrette que le travail qui a suivi les réunions de la mission ait été réalisé unilatéralement. Au final, le rapport qui nous est présenté donne une impression de saupoudrage, de superficialité, d'amoncellement de lieux communs et de clichés. Parmi ces clichés, on peut citer la question de la communication des collectivités territoriales, l'absentéisme dans la fonction publique, le droit des étrangers, la suppression des financements croisés, la garde des enfants par les grands-parents…
Malheureusement, aucune ligne de force ne se dégage. L'une de ces lignes de force aurait pu être une véritable détermination à lutter contre les niches fiscales. S'agissant de l'une de ces niches visées par le rapport, le dispositif « Girardin », je m'étonne que le rapport propose une rationalisation, alors que M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, avait plutôt proposé lors de son audition une suppression de ce dispositif.
En conclusion, je considère que la mission d'information devrait revoir sa copie et admettre qu'elle a été dans l'erreur avec le rapport qu'elle nous propose aujourd'hui.
Je me dois de relever des contradictions dans votre propos.
Premièrement, concernant la fin des financements croisés, cette proposition a été faite et adoptée à l'unanimité par la mission d'information sur la clarification des compétences des collectivités territoriales, co-rapportée par MM. Jean-Jacques Urvoas et Didier Quentin. Deuxièmement, concernant le dispositif « Girardin », le rapport ne fait que reprendre le constat posé par la Cour des comptes lors de leur audition.
Les propositions résultent donc soit des travaux antérieurs de la Commission des Lois, soit des propositions émanant des auditions.
Je remercie le Président Warsmann pour la présentation qu'il a faite des conclusions de la mission, mais je tiens à souligner que ces propositions ne me semblent pas correspondre à la situation de notre pays : l'endettement de la France atteint aujourd'hui des niveaux qu'aucun d'entre nous n'aurait imaginé il y a seulement cinq ans !
Notre pays s'installe, tout comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne, dans une situation de fort endettement, contrairement à l'Allemagne, notre principal partenaire économique, qui prépare déjà la sortie de crise. Du fait des fluctuations des taux de change entre le dollar et l'euro, la situation de notre pays n'est appelée qu'à empirer dans les prochaines années… En matière de déficits publics, il faut faire la part entre les conséquences de la crise mondiale que nous subissons et la tendance générale de notre pays à l'absence de maîtrise de la dépense publique.
En matière de finances sociales, je suis bien placé - moi qui siège au nom de l'Assemblée nationale au conseil de surveillance de l'ACOSS - pour savoir que, jusqu'en 2002, l'ensemble des quatre branches était encore excédentaire ! La situation s'est, depuis lors, grandement aggravée, si bien que nous payons aujourd'hui les charges de fonctionnement à crédit.
S'agissant des finances de l'État, je rappelle que nous nous apprêtons à examiner au cours des prochaines semaines deux budgets : la loi de finances initiale et, sans doute en janvier, un collectif budgétaire portant grand emprunt national qui pourrait s'élever à vingt milliards d'euros par an pendant cinq ans. Or je voudrais vous poser une question, mes chers collègues : notre pays peut-il encore s'endetter davantage ? Je rappelle que l'endettement géré par la CADES s'élève déjà à 150 milliards d'euros et qu'il faudra encore cette année augmenter la CRDS. Depuis le 1er septembre, l'ACOSS ne dispose plus de fonds en trésorerie et doit une fois de plus compter sur une avance de la Caisse des Dépôts…
Si je partage un certain nombre des points de vue que vous avez exprimés dans votre présentation, je regrette l'absence d'étude d'impact des propositions que vous formulez. Je pense que leur effet global sur les finances publiques n'est pas élevé et qu'il est en tout état de cause bien moindre que le cadeau fiscal récemment fait aux restaurateurs… Si je partage certaines de vos propositions – je pense notamment à celles relatives au bouclier fiscal, aux stocks options ou au seuil d'alerte de la Sécurité Sociale et je vous invite à co-signer des amendements avec nous – j'estime que d'autres posent, en revanche, problème : vous suggérez ainsi de soumettre les dépenses de communication des collectivités locales à la CRDS alors que rien n'est prévu s'agissant de ces mêmes dépenses réalisées par l'État. Je serais très intéressé qu'une mission soit menée en la matière pour comparer le niveau de ces dépenses…
Lorsque vous expliquez que la dérive des finances publiques dans notre pays est un mouvement ininterrompu, vous faites erreur : je vous rappellerai que la tendance a cessé de 1997 à 2002, sous l'égide de Lionel Jospin et Dominique Strauss-Kahn, preuve qu'il est des politiques publiques qui favorisent la dérive des déficits tandis que d'autres la soldent ! Il n'y a aucune fatalité en la matière.
Certaines des propositions que vous faites sont intéressantes, mais on aurait pu mieux faire. Les propositions sur les gardes d'enfants me semblent ainsi bien limitées.
Je souhaiterais, M. le Président, que vous proposiez aux présidents des autres commissions permanentes l'ouverture des auditions menées par les rapporteurs budgétaires à l'ensemble des commissaires : c'est ce que font les rapporteurs pour avis de la Commission des Lois, mais tel n'est pas le cas notamment à la Commission des Finances et nous le regrettons.
En tout état de cause, j'analyse les conclusions de la mission comme un soutien par avance aux amendements sur la taxation du secteur bancaire que le Président de la Commission des Finances s'apprête à défendre lors de la discussion budgétaire. Nous notons que si la clause de meilleure fortune avait été prévue lorsque l'État a prêté de l'argent aux banques mises en difficulté par la crise, c'est l'équivalent du budget de la Justice qui serait aujourd'hui rentré dans les caisses de l'État !
Je tiens à saluer le travail accompli par la mission : ses propositions, bien évidemment, mais plus encore la démarche courageuse et responsable qui l'a animée. Je crois que le titre même du rapport « Finances publiques : la France au pied du mur » résume parfaitement la situation actuelle. L'effet de ciseaux qui est attendu prochainement rend urgent que nous nous préoccupions de la question et je salue tout particulièrement la dernière des préconisations qui appelle à un sommet national de la dette publique.
Je tiens à faire part de ma grande déception à l'égard d'une initiative pourtant intéressante au regard des faibles marges de manoeuvre et d'initiative dont disposent les parlementaires en matière budgétaire.
Je vous invite à la concision, car je dois remettre le rapport de la mission dans les prochaines minutes au Président de notre Assemblée.
Je ne peux accepter que notre commission devienne une simple chambre d'enregistrement où les commissaires n'auraient pas le droit de s'exprimer ! Le débat sur ce sujet aurait mérité d'être plus long pour qu'il soit possible d'échanger sur les différentes propositions que nous venons de découvrir.
Je souhaite expliquer les raisons de mon abstention sur le vote de ce matin. Pourquoi suggérez-vous que le Gouvernement devrait procéder lui-même à certaines évaluations alors que c'est au Parlement de le faire : on ne peut pas continuer de demander au Gouvernement de s'auto-évaluer ! Je regrette aussi l'absence de propositions en matière d'exonérations de charges sociales sur les grandes entreprises, dont la Cour des Comptes nous a dit qu'elles étaient tout à la fois dispendieuses et inefficaces ! Dans un autre domaine, vouloir taxer les dépenses de communication des collectivités locales me semble porter gravement atteinte à la liberté de gestion de ces collectivités ! Les propositions en matière de bouclier fiscal semblent frileuses et auraient pu inclure d'autres impôts.
Nous ne saurions fermer le dossier sous prétexte de devoir communiquer le rapport au Président de notre Assemblée ! Ce rapport ne doit être vu que comme la première pierre de la réflexion et non comme l'aboutissement d'une simple opération de communication.
Je m'étonne de cette précipitation dans nos travaux. Je lis à la page 22 du Feuilleton de ce jour que vous allez remettre dès 11 heures 15 le rapport au président de l'Assemblée nationale en présence de la presse.
Pourtant, il est de tradition dans les missions d'information de la Commission des Lois de permettre aux représentants de l'opposition de faire valoir leur point de vue par l'intermédiaire de contributions écrites. C'est par exemple ce qu'avait permis M. Philippe Houillon sur la mission d'information sur les nouvelles régulations de l'économie relatifs aux rémunérations des dirigeants mandataires sociaux et des opérateurs de marchés.
Dans ces conditions, nous demandons de différer la publication du rapport.
M. Vuilque, le rapport doit être remis à 11 heures 15 au Président de l'Assemblée nationale. Je vais donc maintenant mettre aux voix l'autorisation de le publier.
Il y a des pistes intéressantes dans ce rapport mais il serait raisonnable de différer le vote, sinon nous serons contraints de voter contre la publication du rapport. J'ai bien compris que vous vouliez aller présenter votre rapport à la presse, ce qui permettra la publication de quelques articles rappelant l'état de nos finances publiques, mais ne fera pas vraiment avancer le débat. Alors qu'une réforme d'ampleur des collectivités territoriales se profile, que la taxe professionnelle va être supprimée, il aurait été utile d'étudier les nombreuses interrogations qui se développent. Ce rapport n'est pas à la hauteur de ces enjeux et il faut encore en discuter entre nous. Je regrette le passage en force auquel vous allez procéder.
Vous connaissez la procédure. C'est une contribution que je dois remettre au Président de l'Assemblée nationale à sa demande. Nous aurons la possibilité de poursuivre le débat politique ultérieurement.
La Commission autorise le dépôt du rapport d'information en vue de sa publication.
La séance est levée à onze heures quinze.