PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2009
SANTÉ
La réunion de la commission élargie commence à neuf heures.
Madame la ministre de la santé, Jean-Luc Préel, qui va coprésider cette réunion en attendant le président Méhaignerie, et moi-même sommes heureux de vous accueillir au sein de cette commission élargie qui doit examiner les crédits de la mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2009. La procédure de la commission élargie veut privilégier les échanges directs entre les ministres et les députés et donne donc toute leur place aux questions et aux réponses plutôt qu'aux exposés généraux. Les deux projets de rapport sont déjà disponibles mais je rappelle que le travail de nos rapporteurs, M. Bapt et M. Rolland, ne s'arrête pas là et qu'ils exercent leur mission de suivi et de contrôle de l'action gouvernementale tout au long de l'année, en liaison étroite avec le ministère.
Pour ma part, je rappellerai seulement combien les crédits du ministère peuvent paraître limités lorsqu'on vient de discuter une semaine durant d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui atteint les 157 milliards. Par ailleurs, ce budget sera probablement profondément remanié l'an prochain, puisque, dans quelques semaines, sera examiné au Parlement le projet de loi « Bachelot » qui revoit l'organisation générale du système, en créant notamment un responsable unique de la santé au niveau régional.
La maquette budgétaire de la mission a déjà été très largement remaniée cette année, avec un élargissement de son périmètre. Si, en effet, le programme « Drogue et toxicomanie » a été transféré vers la mission « Direction de l'action du gouvernement », rattachée au Premier ministre, la mission « Santé » a gagné le programme « Protection maladie » ainsi que les crédits alloués à la veille et à la sécurité sanitaires. Le tout aboutit à un budget supérieur à 1,1 milliard, qui peut certes paraître bien limité face au budget de l'assurance maladie mais qui contient toutefois des volets bien spécifiques concernant l'organisation des soins. Je salue notamment l'augmentation des crédits consacrés à la formation initiale, notamment aux stages, si importants pour la médecine générale. L'an prochain, ce budget sera marqué par les profonds changements résultant des deux réformes législatives concernant, l'une, l'hôpital et, l'autre, la mise en place des agences régionales de santé.
Je vous ai déjà fait connaître, madame la ministre, mes principales questions. La première concerne le budget de la prévention. L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé s'est vu conférer des missions supplémentaires, à commencer par le projet de développement des soins palliatifs auquel tient beaucoup le Président de la République. Comment va-t-il les financer : par redéploiement ?
Par ailleurs, sur le plan des recettes, que faut-il penser de la taxe sur les messages sanitaires, qui n'a permis de collecter que 140 000 euros cette année alors que les prévisions tablaient sur deux à trois millions ?
Enfin, quelle assurance a-t-on que les nouvelles agences régionales de santé prendront mieux en compte les priorités de santé publique, à commencer par la prévention, à laquelle le Président de la République est très attaché ?
J'en viens à la Haute Autorité de santé, à laquelle la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 a conféré une dimension médico-économique et des charges nouvelles, et qui doit, entre autres, définir des protocoles de bon usage des soins. La HAS vient de traverser des difficultés de trésorerie que son budget pour 2009 ne lui permettrait pas de surmonter, même si elle n'avait pas à assumer ces missions nouvelles.
De nombreuses réformes ont affecté le dispositif de la couverture médicale universelle complémentaire, notamment celle, majeure, qui vient d'être adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale. Quelle pourrait être l'incidence, sur le nombre de bénéficiaires de la CMUc, de l'alignement du forfait logement sur les forfaits en vigueur pour le RMI ?
Quant à la revalorisation du montant de l'aide à l'acquisition d'une mutuelle pour les plus de soixante ans, sera-t-elle financée par un abondement lors de la discussion du PLFSS au Sénat ou jugez-vous que la réforme des retraites qui vient d'être adoptée en première lecture y suffira ?
Je tiens à exprimer mon inquiétude face à la chute considérable – de 20 % à 25 % – des crédits relatifs au SIDA, aux infections sexuellement transmissibles et aux hépatites, alors même que le nombre de primo-infections au VIH reste supérieur à 1 200 cas recensés par an et que les engagements pris en 2007 en matière d'appartements de coordination thérapeutique n'ont pas encore été tenus en 2008, aucune des places prévues à ce titre n'ayant en effet été créée sur le budget 2008.
Enfin, plus généralement, qu'en est-il du calendrier retenu pour l'élaboration de la prochaine loi relative à la santé publique et pour certains plans de santé publique parvenus à échéance, comme les plans consacrés au cancer, aux maladies rares ou à la santé mentale ?
Je tiens tout d'abord, madame la ministre, à remercier de leur diligence les services de votre ministère, qui nous ont fourni en temps voulu 98 % des réponses aux questionnaires.
La progression du budget de la mission « Santé » répond à la volonté de moderniser notre système de santé. Les changements de périmètre évoqués par M. Bapt sont positifs, car l'ensemble des moyens consacrés aux actions de santé publique, y compris les dotations aux agences sanitaires, apparaissent clairement dans le budget de cette mission.
La Haute autorité sanitaire, s'est vu confier par le PLFSS 2008 la responsabilité des bonnes pratiques et de la mission d'évaluation médico-économique, qui est un critère important de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Quel est, madame la ministre, votre sentiment sur cette mission ?
Je tiens aussi à souligner la revalorisation de la dotation au titre de la formation médicale, destinée notamment à la formation initiale et à la sensibilisation à l'exercice de la médecine générale par les stages de sensibilisation destinés aux futurs médecins généralistes. Ces crédits permettent une augmentation du nombre de stagiaires.
Les questions qui relèvent de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, ou AFSSA et l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, ou AFSSET, sont au centre des préoccupations de nos concitoyens. La création de ces agences a permis de renforcer la qualité et l'indépendance de l'évaluation des risques sanitaires, avec des conceptions et des organisations très différentes : si l'AFSSA est une agence de moyens l'AFSSET est plutôt une tête de réseau. Quelles sont les perspectives de coordonner ces agences, d'en améliorer encore la performance et d'en renforcer le pilotage ? Dans mon rapport, je suggère de limiter le nombre de tutelles, en confortant la vocation naturelle du ministère de la santé d'être chef de file de ces tutelles, car la vocation initiale des agences est d'assurer la protection de la santé humaine.
Le rapport propose également un rapprochement de l'AFSSA et de l'AFSSET pour obtenir une agence de l'alimentation et des milieux, afin de renforcer l'évaluation des risques sanitaires, de favoriser les synergies, de simplifier le dispositif actuel, relativement complexe, du fait notamment de tutelles qui peuvent apparaître trop nombreuses. Il me semble nécessaire, afin d'améliorer l'efficacité du dispositif, de mieux organiser l'interministérialité, de resserrer le nombre de tutelles, de prendre en compte la diversité des statuts des agents entre les agences, de conserver une large représentation des acteurs, notamment des associations qui interviennent au niveau des conseils d'administration, et de planifier à moyen ou court terme un rapprochement des agences sur un site unique dans le cadre d'une stratégie immobilière et en tenant compte de l'évolution naturelle des missions attribuées à ces agences.
Pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire, la parole est à M. Jean-Pierre Door.
La première de mes cinq questions se pose chaque année et porte sur le nombre excessif d'agences, à propos duquel un rapport sénatorial a déjà noté que trop d'agences tue les agences et qu'une réflexion s'imposait en la matière.
En deuxième lieu, il me semble très positif d'avoir mis en rapport la prévention et la sécurité sanitaire par la fusion des programmes « Santé publique et prévention » et « Veille et sécurité sanitaire ». Cependant, le budget me semble un peu limité, compte tenu des risques à venir, dont chacun sait qu'ils se concrétiseront inéluctablement, comme l'émergence de nouveaux virus. Cette remarque me semble d'autant plus justifiée que ce budget s'annonce stable pour les années à venir.
Où en est le plan national de la tuberculose ? En effet la tuberculose tue des centaines de milliers de personnes, y compris en France. Dans le rapport que j'ai fait avec Mme Blandin, sénatrice, deux points importants se dégageaient, qui ne figurent pas très clairement dans le budget de la prévention des risques : le dépistage des formes contagieuses et une meilleure prévention des multirésistances.
En quatrième lieu, un sondage a révélé que 92 % des Français estimaient que le nombre des crises sanitaires va augmenter et que 78 % s'en inquiétaient. Notre collègue Bruno Le Maire a évoqué récemment, à propos de la mission « Agriculture », les questions liées à la grippe aviaire et au virus H5N1. L'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires – EPRUS –, après quelques difficultés, semble à nouveau sur la bonne voie. Les budgets non utilisés sont renouvelés. Des foyers importants demeurent aux portes de la France, notamment en Saxe, en Allemagne, et semblent prêts à redémarrer en Thaïlande après plusieurs années de calme. Quel est l'état des stocks de médicaments et de masques, compte tenu notamment des délais de péremption des produits ?
Face, enfin, à tous ces risques d'épidémies, la demande de recherche est importante. L'Institut Pasteur, qui est le bijou national de la France en matière de recherche sur les virus et les microbes, est-il en bonne santé, compte tenu notamment de ses besoins d'investissement et de son souhait d'agrandir ses locaux ?
En complément des propos de M. Gérard Bapt, je voudrais insister sur les infections, HIV et hépatite C, liées aux pratiques d'injection des toxicomanes.
L'article 47 du PLFSS pour 2008 a prévu, de façon apparemment vertueuse, de faire détecter les hépatites dans les centres d'accueil pour toxicomanes, afin que ces derniers soient mis sous Interféron si nécessaire. Or, à mon avis, le nombre de cas d'hépatite C chez les toxicomanes devrait exploser dans les prochaines années. Au reste, les associations nous interpellent à ce sujet.
La difficulté est, non de placer les toxicomanes sous Interféron – ils disposent en général d'une couverture sociale par l'intermédiaire de la CMU – mais de mettre en oeuvre les traitements, qui sont très lourds. Or les associations n'ont pas les capacités d'hébergement nécessaires. Les personnes en grande précarité sociale atteintes d'hépatite C sont confrontées aux mêmes difficultés que celles relevées par M. Gérard Bapt pour les individus atteints du VIH. Le budget consacré à ces actions diminue de 20 %. Et si les associations mettent sous traitement les toxicomanes atteints, les traitements ne sont pas observés du fait de l'insuffisance de moyens d'hébergement. Je m'interroge donc sur le sens d'articles de loi tels que l'article 47 du PLFSS pour 2008, qui ne peuvent pas être appliqués sur le terrain.
Une réflexion d'abord : le budget du ministère de la santé est de l'ordre de un milliard d'euros, tandis que la loi de financement de la sécurité sociale, qui porte sur les dépenses remboursables par le régime général, est dotée, elle, de 157 milliards d'euros. Je souhaiterais donc que puisse être organisé un débat annuel sur la santé du pays, incluant les problématiques de la prévention, de l'éducation à la santé, du soin, du régime général, des mutuelles complémentaires et des montants qui restent à charge.
Les agences sont très nombreuses. Pourrait-on mieux les coordonner ? Surtout, quel est leur devenir dans le cadre de la réforme que vous allez nous proposer, avec la création d'agences régionales de santé ? On sait déjà qu'il y aura des difficultés dans les relations entre la CNAM, le ministère de la santé et la coordination des ARS. Est-il prévu une coordination avec les agences de la santé ?
Les contrats de projet État-régions semblent diminuer de moitié. Pouvez-vous nous donner une explication ?
La loi relative à la politique de santé publique de 2004 identifiait 104 objectifs prioritaires quantifiés. Elle prévoyait qu'un bilan serait réalisé en 2009. Qu'est-il prévu pour évaluer la réalisation de ces objectifs ?
Notre pays est très en retard en matière de vaccination contre l'hépatite B. Est-il prévu de la relancer ?
Enfin, le périmètre du budget de la santé changeant chaque année, cela rend certaines comparaisons difficiles.
Je regrette aussi que la drogue et la toxicomanie échappent au périmètre du ministère de la santé.
Les crédits du ministère de la santé et ceux de l'assurance maladie sont en effet sans commune mesure. Cependant, les crédits du ministère ont un rôle essentiel : ils marquent l'implication de l'État et constituent un levier fort en matière de santé publique et d'exercice de la solidarité nationale.
La mission « Santé » regroupe désormais l'intégralité des crédits de l'État consacrés à la santé publique, à la prévention sanitaire et à l'accès aux soins – hormis les crédits relatifs aux personnels. Ce regroupement permet une meilleure visibilité de l'action publique. Il résulte d'une demande expresse du Parlement. Sont désormais regroupés les crédits de la mission « Santé », ceux de la mission « Solidarité, intégration » et ceux de la mission « Sécurité sanitaire ».
M. Jean-Louis Préel a regretté l'absence d'un vrai débat annuel sur la santé. J'ai le sentiment, sortant de l'examen du PLFSS, que cet examen a été l'occasion, pour chacun de ceux qui y ont participé, de donner sa vision sur l'ensemble des politiques de santé.
Il est toujours possible d'organiser, de surcroît, des débats thématiques. Le Sénat le fait ; j'y serai demain pour un débat sur l'hôpital. Je suis à la disposition de l'Assemblée nationale ; la balle est dans votre camp.
Monsieur le rapporteur spécial, le budget de l'Institut national de prévention et d'éducation à la santé, l'INPES, est en cours de finalisation et il sera examiné par son conseil d'administration le 26 novembre prochain. Il est prévu un montant de dépenses de 113 millions d'euros, en hausse de 5 millions d'euros par rapport à la prévision d'exécution pour 2008, qui est de 107 millions d'euros. Ces crédits permettront de prendre en compte les priorités du ministère pour 2009, y compris une campagne pour les soins palliatifs.
Quant aux recettes de l'INPES pour 2009, elles sont composées, outre la subvention pour charge de service public versée par le ministère de la santé, d'une dotation de 66,2 millions d'euros versée par la CNAM en application d'une convention triennale 2007-2009, et de 2 millions d'euros d'autres ressources : taxe sur les messages sanitaires, convention signée avec la Caisse nationale solidarité autonomie, ventes de produits – abonnement, inscriptions à des journées de formation, de prévention – , et produits financiers.
Quant à la taxe frappant les annonceurs ne diffusant pas de messages de prévention sanitaire, son faible produit montre que les annonceurs ont joué le jeu. Fin 2008, le produit de la taxe s'élevait à 140 000 euros seulement, en provenance pour l'essentiel de deux départements : le Rhône et la Seine-Saint-Denis. Le produit de la taxe a donc été évalué de façon plus réaliste dans le budget pour 2009 : 300 000 euros. Nous le réviserons à la baisse en cours d'année si nécessaire. L'équilibre du budget est assuré par un prélèvement sur un fonds de roulement qui reste extrêmement important à ce jour.
Les politiques de santé et de protection contre les maladies ont été orientées vers le curatif. Nous avons encore en France trop de décès avant 65 ans qui auraient pu être évités, ainsi que des inégalités liés à la géographie, à l'appartenance à une classe sociale, ou au sexe. Une telle situation est contraire à l'égalité républicaine.
Le Président de la République a fait de la prévention une de ses priorités en matière de santé. Dans le discours qu'il a tenu à Bletterans, dans le Jura, il a fixé l'objectif ambitieux que les crédits consacrés aux politiques de prévention soient augmentés de près de 50 %, soit 10 % des dépenses de santé au lieu de 7 %.
La prévention et la promotion de la santé font partie du projet de loi « hôpital, patients, santé, territoires », que nous allons examiner dans les prochaines semaines.
Le projet régional de santé fixera les objectifs et les orientations à atteindre dans une période donnée, et comprendra un schéma régional de prévention. Sa mise en oeuvre pourra faire l'objet de contrats locaux de santé, conclus notamment avec les collectivités locales. Celles-ci, et je les salue, ont anticipé la démarche du projet de loi, qu'il s'agisse de promotion de la santé, de prévention, ou des politiques de soin et d'accompagnement médico-social.
Deux instances régionales seront spécifiquement en charge des questions de prévention : la conférence régionale de santé, qui participera à la définition de la politique régionale de santé et comportera une commission spécialisée de prévention ; la commission de coordination, qui associera les services de l'État et les organismes compétents de prévention pour assurer la cohérence et la complémentarité des actions de prévention dans chaque région. Il s'agit d'un dispositif novateur.
La Haute Autorité de santé disposait à la fin de 2006 d'un fonds de roulement de 48,2 millions d'euros, ce qui correspondait à plus de huit mois de fonctionnement de l'année 2007. Vous connaissez mon aversion pour les fonds de roulement non utilisés. Le fonds de roulement a donc légitimement été apuré par une diminution de la subvention de l'État, qui est passée de 10 millions d'euros environ en 2006 à 1 million d'euros en 2007, et à 2,5 millions d'euros en 2008. Cette opération permettra au fonds de roulement d'atteindre un niveau raisonnable à la fin 2008.
En parallèle, la ressource essentielle de la Haute Autorité de santé, c'est-à-dire la taxe sur les dépenses de promotion des laboratoires, devrait baisser de 5 millions d'euros environ sur la période 2009-2011 sous l'effet de l'efficacité de la politique gouvernementale de diminution de la consommation de médicaments. À cet égard, les résultats obtenus il y a quelques jours sur la consommation des antibiotiques sont très encourageants. Au regard de cette nouvelle donne, la subvention de la Haute Autorité a été fixée à 6 millions d'euros pour l'État, et – en vertu du principe du un euro par l'État, pour deux euros par l'assurance maladie – à 12 millions d'euros pour l'assurance maladie. Cette dotation apparaît équilibrée, et comme je m'y étais engagée l'an dernier, nous allons modifier le calendrier de perception de la taxe sur les dépenses de promotion des laboratoires pharmaceutiques, qui est versée aujourd'hui en fin d'année. L'article 14 du PLFSS prévoit qu'elle le sera désormais pour moitié le 1er juin, et pour moitié au plus tard le 1er décembre. Si la subvention de l'État se révélait insuffisante, nous y remédierions dans le cadre de la fongibilité interne du programme.
Trois d'entre vous m'ont interrogée sur le nouveau plan VIH. La présentation fusionnée du programme améliore apparemment la lisibilité des dépenses, ce qui faisait partie des objectifs visés : faire en sorte que chacun puisse mieux comprendre la synergie entre les différentes dépenses. En 2009, les projets de santé publique relatifs aux virus de l'immunodéficience humaine, les VIH, seront financés sur trois lignes budgétaires. Toutefois, c'est une source de confusion, ce qui est regrettable.
Au total, outre les 23 millions d'euros consacrés au SIDA par l'INPES, les crédits disponibles pour conduire les projets de prévention en matière de VIH seront en légère hausse par rapport à 2008 : ils s'élèveront à 37,5 millions d'euros, soit 200 000 euros de plus environ, après avoir été augmentés, à ma demande, de près de 1 million d'euros en 2008 par rapport à 2007. Plus précisément, les dotations à la sous-action « Lutte contre le VIH-SIDA » seront en baisse avec 30,1 millions d'euros, dont 23,3 millions mis en oeuvre principalement dans le cadre des groupements régionaux de santé publique. Mais les crédits de la sous-action « Soutien à la territorialisation des politiques régionales de santé publique » passeront de 4,3 millions d'euros à 11 millions d'euros en 2009, notamment pour financer les ateliers santé-ville. Au sein de l'action « Accès à la santé et éducation à la santé », la sous-action « Santé des populations en difficulté » sera dotée de 11,2 millions d'euros, contre 7,3 millions en 2008. Cette répartition des financements traduit la mutualisation d'une partie des crédits destinés à la lutte contre les VIH et les infections sexuellement transmissibles dans le cadre des groupements régionaux de santé publique pour les publics précaires et vulnérables à plusieurs titres en matière de santé. Il s'agit par exemple des actions en faveur des migrants, des toxicomanes, des jeunes, des personnes prostituées, des détenus.
Cela étant, si la nouvelle présentation, faite à votre demande, dans un souci de transparence, devait semer le doute sur le montant des crédits consacrés à la lutte contre le SIDA, je demanderais à revenir à l'ancienne présentation. Ce serait un comble que des crédits stables, voire en augmentation, apparaissent en baisse uniquement parce qu'ils sont répartis autrement.
Vous m'avez également interrogée sur l'élaboration de la prochaine loi de santé publique. La loi du 9 août 2004 a introduit une véritable culture de la santé publique et de la prévention. Elle tendait à réduire la mortalité et la morbidité évitables, de même que les inégalités de santé, en impliquant le Parlement. Selon cette loi, le Gouvernement doit présenter tous les cinq ans l'impact de sa politique sur l'état de santé de la population.
La mise en place des agences régionales de santé et l'évolution du contexte national de pilotage des politiques de santé impliquent de définir une nouvelle architecture de la planification régionale de santé. C'est ce que nous avons prévu dans le cadre de la loi que M. le président Préel a bien voulu appeler la « loi Bachelot ». La révision de la loi de 2004 interviendra en complément de ce projet de loi, pour tenir compte de l'évaluation en cours, par le Haut conseil de la santé publique, des objectifs, des indicateurs et des principaux plans de santé publique : maladies rares, santé mentale, cancer…
S'agissant du calendrier, le rapport intermédiaire relatif à l'évaluation des 100 objectifs – on peut s'interroger sur la pertinence de définir 100 objectifs – sera publié fin 2008, celui sur le plan « Cancer » fin janvier 2009, celui sur le plan « Maladies rares » en mars 2009, et l'avis du Haut Conseil de santé publique sur la révision des 100 objectifs en juin 2009. Le projet de révision de la loi sera préparé pour la fin 2009, ce qui est cohérent avec la mise en place des agences régionales de santé.
Autre question de M. le rapporteur spécial sur la CMUc, le décret d'application du projet de loi de finances pour 2008 concernant la suppression du tiers payant et la non-prise en charge du ticket modérateur si le bénéficiaire de la CMUc est hors parcours de soins n'est pas encore paru. Mes services travaillent de concert avec ceux de l'assurance maladie pour établir le dispositif fonctionnel le plus efficace possible et pour éviter toute contestation, notamment entre les professionnels de santé et les caisses.
En ce qui concerne l'alignement du calcul du forfait d'allocation logement pour les bénéficiaires de la CMUc avec celui du RMI, l'économie attendue est de 14 millions d'euros, et le nombre de bénéficiaires concernés est évalué entre 40 000 et 50 000 personnes.
Vous avez regretté, monsieur le rapporteur spécial, que je ne vous pas réservé l'exclusivité de mon annonce sur la majoration de 25 % de l'allocation d'accès à la complémentaire santé, qui passera de 400 à 500 euros, mais, au cours du débat du PLFSS, j'ai eu l'occasion de dire que je souhaitais augmenter de façon significative l'accès à la complémentaire santé. C'est un des axes forts de ma politique d'égalité dans l'accès aux soins des plus démunis. J'ai un peu avancé sur le sujet. Les 10 millions d'euros supplémentaires nécessaires seront supportés sans difficulté par le fonds CMU.
Les comités régionaux d'éducation à la santé, les comités départementaux d'éducation à la santé sont des acteurs importants des politiques de promotion de la santé, qui remplissent des missions de documentation et de formation. Ils sont financés par les directions régionales des affaires sanitaires et sociales, mais aussi par le biais d'appels à projet de l'État, de l'assurance maladie, de l'INPES, des villes ou des conseils généraux, et, depuis 2007, des groupements régionaux de santé publique. Les relations entre l'INPES et les CRES sont bonnes, mais il faudrait structurer ce réseau et les services qu'il offre. Il importe ensuite de définir un mode de financement des ARS pour permettre à ces organismes d'exister au plan régional. La fédération nationale de ces comités a entamé une réflexion pour mieux structurer son soutien et développer de véritables pôles de compétence. Je soutiens totalement ce projet.
M. le rapporteur spécial, M. le rapporteur de la Commission des affaires sociales, M. Jean-Pierre Door m'ont interrogée sur la multiplicité des agences intervenant en matière de santé. Ils souhaitent qu'une réflexion soit menée à ce sujet. Cela a été le cas avec la révision générale des politiques publiques, et il est ressorti d'un certain nombre de réflexions qu'une fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, l'AFSSET, pourrait opportunément aboutir à la création de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, de l'environnement et du travail. Cette réforme serait d'autant plus facile que les deux agences sont voisines à Maisons-Alfort et que les points de convergence entre les deux agences sont nombreux. L'AFSSET a pour mission de protéger l'homme des risques de l'environnement, y compris dans le contexte professionnel – c'est donc une agence de sécurité sanitaire –, tandis que l'AFSSA a une compétence en ce qui concerne les OGM et en matière d'évaluation des pesticides. L'AFSSA couvre aussi pour partie la protection des travailleurs agricoles en procédant à l'évaluation des risques pour les utilisateurs des intrants végétaux et contribue en outre à l'évaluation des biocides, qui relèvent de la compétence de l'AFSSET, par l'intermédiaire de son laboratoire de Fougères. Le trait d'union pourrait être la contamination de la chaîne alimentaire. Cette fusion aurait donc toute sa légitimité et elle permettrait un renforcement mutuel, surtout de l'AFSSET qui pourrait bénéficier ainsi de la puissante maîtrise d'ouvrage de l'AFSSA. En matière d'efficience, une partie des laboratoires de l'AFSSA pourraient travailler sur des politiques de santé environnementale, ce qui permettrait d'aller plus vite pour l'expertise d'urgence.
En revanche, tout scénario visant à toucher au périmètre de l'Institut national de veille sanitaire me paraît à proscrire. L'INVS, conçu sur le modèle des centres de prévention et de contrôle des maladies d'Atlanta, remplit des missions de surveillance et d'alerte universelles, non seulement sur les maladies transmissibles, mais sur l'état de santé des populations et sur l'ensemble des menaces sanitaires. Il doit rester au centre du dispositif de sécurité sanitaire.
Le pilotage des agences sanitaires, sur lequel Jean-Luc Préel m'a interrogé, a été conforté par les travaux de la Révision générale des politiques publiques. En ce domaine, nous souhaitons stabiliser l'organisation du dispositif des agences et nous diriger vers la notion « d'État stratège », en dépassant la conception classique de la tutelle et en clarifiant le positionnement des agences dans le cadre des nouveaux référentiels de gestion publique induits par la LOLF.
Dans ce but, deux grands leviers sont mobilisés. Le premier est la construction progressive d'un système d'agences liées à l'État par des contrats pluriannuels. Ainsi, 2008 aura été la première année pleine de fonctionnement des contrats pluriannuels Étatagences signés courant 2007. La généralisation de la couverture contractuelle, un moment suspendue à cause de la RGPP, est prévue pour 2009.
Deuxième levier, le renforcement de la coordination et des approches partagées entre la Direction générale de la santé et les agences, grâce à un dispositif complet de rencontres périodiques. J'ai moi-même installé, sous la direction du directeur général de la santé, Didier Houssin, le premier comité d'animation du système d'agences, le CASA, qui réunit les directeurs généraux sur des sujets « métiers ». Par ailleurs, le comité des secrétaires généraux traite des sujets de gestion pour optimiser les fonctions « support ».
Jean-Pierre Door m'a interrogé sur la lutte contre la tuberculose, qui est de la compétence de l'État depuis le 1er janvier 2006. Nous devons rester extrêmement vigilants face à cette maladie, dont l'incidence augmente chez les populations les plus vulnérables : personnes âgées, sans domicile fixe, migrants, notamment en Île-de-France et dans les grands centres urbains, où se développent des souches multi et ultra-résistantes. Pour répondre à cette préoccupation de santé publique, j'ai lancé en 2007 un programme de lutte contre la tuberculose en France, organisé en six axes et orienté vers deux objectifs généraux : consolider la diminution progressive de l'incidence de la tuberculose maladie et réduire les disparités. Vous connaissez les actions entreprises, puisqu'elles ont été élaborées avec vous.
Un comité de suivi de ce programme, qui accompagne et évalue sa mise en oeuvre, a été installé en avril 2008. Des crédits déconcentrés, à hauteur de 28 millions d'euros, financent soixante-quinze établissements publics de santé et neuf centres de santé dans cinquante-trois départements dont les conseils généraux ont renoncé à cette compétence.
En ce qui concerne l'amélioration de la lutte contre les résistances, les équipes qui prennent en charge les patients s'assurent en général de l'observance du traitement. Votre préoccupation rejoint toutefois la politique que je souhaite mener en matière d'éducation thérapeutique du patient. Dans ce domaine, la mission que j'ai confiée à MM. Saout, Bertrand et Charbonnel recevra une concrétisation dans le cadre de la loi « Hôpital, patients, santé et territoires », et un programme sera spécialement dédié à la tuberculose.
Vous connaissez mon implication s'agissant de la préparation à une éventuelle pandémie grippale. Elle a fait de notre pays l'un des mieux préparés au monde selon l'OMS. Sur ce sujet, je laisse la parole à Didier Houssin, délégué interministériel à la lutte contre la grippe aviaire, afin qu'il fasse le point sur les stocks et sur l'EPRUS, l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires.
La conférence de Charm el-Cheikh, qui s'est tenue il y a quelques jours, a permis de faire le point sur l'évolution de l'épizootie. La situation semble en légère amélioration, selon les données de l'Office international des épizooties. Malgré tout, le virus paraît aujourd'hui bien installé dans au moins cinq pays : l'Indonésie, l'Égypte, le Nigeria, le Vietnam et probablement la Chine. L'apparition récente d'un nouveau foyer en Allemagne montre que la vigilance ne doit pas être relâchée.
S'agissant de la santé humaine, la menace de pandémie reste tout aussi importante, et il est évidemment hors de question de baisser les bras, que ce soit au niveau international, européen ou national. La préparation de la France se poursuit activement : pour la quatrième fois, le plan national va être révisé afin de tenir compte du résultat des derniers exercices, de l'évolution des connaissances, de la nouvelle organisation de l'État en matière de gestion de crise – à la suite de la publication du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale –, des préconisations du plan OMS – lui-même en cours de révision –, et de la mise en place du Règlement sanitaire international.
La France a constitué au cours des trois dernières années un stock important de différents produits. Avec 33 millions d'antiviraux, nous pouvons traiter un nombre de personnes atteintes dépassant les plus fortes estimations. Ces médicaments sont composés pour partie d'oseltamivir et pour partie de zanamivir. S'agissant du Tamiflu, il est exact que les doses les plus anciennement acquises vont bientôt arriver à date de péremption. Un travail a été engagé avec l'Agence française de sécurité des produits de santé pour étudier – comme le font d'ailleurs les Américains – la possibilité de prolonger les délais de péremption de certains de ces produits, sous réserve, bien sûr, de tests qui en vérifieraient la qualité.
La France dispose également d'un stock d'environ 2 millions de vaccins H5N1, achetés chez deux producteurs. Les progrès importants réalisés ces derniers mois chez deux industriels vont conduire à réviser notre stratégie en ce domaine, afin de savoir s'il y a lieu ou non, en tenant compte des stocks de médicaments antiviraux qui ont été constitués, d'acquérir une quantité plus importante de vaccins. Le Haut conseil de santé publique vient de suggérer que cela pourrait être utile, notamment pour les professionnels les plus exposés, c'est-à-dire les professionnels de santé et les personnels de secours.
Comme vous le savez, la France a également constitué un stock de un milliard de masques chirurgicaux destinés aux malades afin de limiter le risque de contagion. Pour l'instant, ces produits n'ont pas besoin d'être renouvelés. La question est plus délicate s'agissant des masques FFP2, acquis par les ministères de la santé, mais aussi par d'autres ministères et par des opérateurs, et destinés aux professionnels. On en a stocké environ 600 millions, pour la plupart sur des sites zonaux – même si, par précaution, certains ont été stockés dans des sites hospitaliers. Un protocole est en cours d'élaboration pour apprécier la manière par laquelle on pourrait tenter de prolonger les délais de péremption de ces masques. Les tests effectués à deux niveaux par les organismes qualifiés montrent en effet qu'ils sont encore de très bonne qualité et qu'il n'y a pas lieu, à ce stade, de les renouveler.
Je terminerai en disant quelques mots de la poursuite de la mobilisation en direction des collectivités locales et des entreprises, ainsi qu'au niveau européen. La conférence ministérielle sur la sécurité sanitaire, organisée par la présidence française de l'Union, a été en grande partie consacrée à la préparation à des menaces de grande ampleur. La ministre a également inauguré, il y a quelques jours, un site intitulé « grippeaviaire.gouv.fr », comprenant un guide pratique pour la préparation de chaque citoyen à une éventuelle pandémie.
Comme l'a rappelé Didier Houssin, j'ai en effet décidé de consacrer le dernier conseil des ministres européens au thème de la sécurité sanitaire et de la préparation à une pandémie. Par ailleurs, la question de la veille et de la sécurité sanitaires est une des trois priorités de la présidence française en matière de santé.
J'en viens aux questions de Catherine Lemorton. Sur le VIH, je vous ai déjà répondu : la diminution des crédits n'est qu'apparente, c'est une simple question de présentation.
Pour éviter toute confusion, il serait souhaitable que nous puissions connaître le fléchage des crédits en fonction des changements de nomenclature.
Certainement. Cela montrera de façon claire que les crédits consacrés au VIH ne baissent pas, bien au contraire. Vous connaissez d'ailleurs mon implication quasi militante sur ces sujets.
Catherine Lemorton m'a également interrogée sur les mesures relatives aux usagers de drogue. Si la population de ces usagers a été décimée jusqu'au milieu des années 90, des politiques de santé publique novatrices, dont nous observons aujourd'hui les résultats, ont permis d'améliorer la surveillance, la prévention, la prise en charge et la réduction des risques. Ainsi, depuis dix ans, la proportion des usagers de drogue infectés par le VIH a été divisée par quatre et le nombre d'overdoses mortelles par cinq. De même, le nombre d'interpellations pour usage d'héroïne a été diminué de 75 % et, surtout, le nombre des usagers de drogues par injection a considérablement diminué. Cependant, je suis loin de prétendre que tous les problèmes sont réglés. Nous constatons ainsi une aggravation de la contamination des usagers de drogues par les virus des hépatites B et C et un usage dévoyé de ce traitement de substitution qu'est la buprénorphine. En outre, des publics de plus en plus jeunes et de plus en plus précaires s'adonnent à ces pratiques.
Mon prédécesseur, Xavier Bertrand, avait annoncé en 2005 une série de mesures visant à diminuer la diffusion de l'épidémie du VHC parmi les usagers de drogues. Le plan de prise en charge et de prévention des addictions 2007 – 2011 a notamment prévu un renforcement de l'offre de soins. Enfin, la commission « addictions » est désormais en ordre de marche pour proposer des mesures permettant d'améliorer la prise en charge des personnes souffrant d'addictions.
En ce qui concerne la politique de réduction des risques, la mission interministérielle dispose de crédits pour créer quatre – et peut-être même six – communautés thérapeutiques, qui améliorent l'hébergement et le suivi de la prise en charge.
Vous m'avez interrogée sur les appartements de coordination thérapeutique. Ces lieux d'hébergement, où le patient est suivi par une équipe aussi bien médicale que sociale, étaient initialement dédiés aux porteurs du VIH. Ces appartements accueillent depuis 2002 toute personne en situation de précarité et touchée par une pathologie chronique.
Je rappelle que le plan national 2005-2008 avait programmé l'ouverture de 150 nouvelles places par an pendant trois ans. À ce jour, plus de 1 000 places sont recensées, et il est prévu que leur nombre soit porté à 1 800 places d'ici à la fin de 2011. Il nous faut toutefois évaluer le dispositif avant d'aller plus loin.
S'agissant des hépatites, un plan actuellement en préparation devrait être lancé au début de l'année 2009. Comme nombre d'entre vous, je suis très préoccupée par la faiblesse de la couverture vaccinale contre l'hépatite B en France, et je crois que le moment est venu de redonner confiance aux professionnels de santé dans ce domaine. Le plan « Hépatite 2008-2011 » prévoira donc une relance de la vaccination.
J'en viens au plan « Psychiatrie et santé mentale 2005-2008 », qui a permis de renforcer les moyens de la psychiatrie en France. À la fin de l'année 2007, plus de 120 millions d'euros de crédits avaient déjà été alloués au titre de l'ONDAM hospitalier sur les 129 millions prévus, ce qui témoigne d'une bonne consommation des crédits. J'ajoute que 90 % des financements nouveaux ont servi à la création de postes hospitaliers – 2 177 au total, dont 250 de médecins, 228 de psychologues et 1022 d'infirmiers et d'infirmières. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de m'exprimer à ce sujet lors d'une récente question au Gouvernement.
Le bilan de ce plan est en cours, mais chacun connaît bien les difficultés démographiques et les problèmes d'organisation de la psychiatrie. Cela étant, je rappelle que la France compte le nombre de psychiatres le plus élevé d'Europe, voire du monde entier. Nous ne souffrons donc pas d'un déficit quantitatif, mais d'un problème de répartition des professionnels.
C'est précisément pour répondre à ces difficultés que j'ai installé, le 7 juillet dernier, la commission présidée par M. Édouard Couty, qui devra me remettre ses recommandations en matière de psychiatrie d'ici à la fin de l'année.
Un comité de pilotage, présidé par M. David Le Breton, sociologue à l'université Marc Bloch de Strasbourg, a également été installé le 30 juin dernier. Ce comité est chargé d'élaborer des pistes pour l'amélioration de la politique de prévention du suicide en vue de la prochaine stratégie pluriannuelle nationale d'actions. Vous savez que c'est un sujet qui me tient particulièrement à coeur, notamment quand il s'agit de jeunes.
Une attention particulière portera sur les populations en situation de grande vulnérabilité : les personnes âgées, les jeunes homosexuels, les personnes détenues, les personnes souffrant d'addictions, les proches de victimes de suicide. Je précise que le rapport du comité de pilotage doit m'être remis en décembre.
J'ai également souhaité impliquer notre jeunesse elle-même dans la prévention du suicide chez les jeunes en situation de vulnérabilité, en particulier les jeunes homosexuels et bisexuels, qui présentent trois fois plus de risques d'idées suicidaires et de tentatives de suicide que les jeunes hétérosexuels, bien souvent à cause des discriminations et des réactions homophobes de notre société, réactions que je condamne formellement. Sur ce dernier thème, j'ai d'ailleurs demandé à un cinéaste de renom de présider le jury d'un concours de scripts, lancé en octobre 2008. Les quatre premiers scripts seront tournés sous forme de courts-métrages. Cette nouvelle façon d'aborder cette question de santé m'a semblé particulièrement adaptée au public auquel nous souhaitons nous adresser.
Je n'ai pas encore eu l'occasion de vous remercier, madame la ministre, pour le taux de réponses à mes questions. Il est de 100 %, ce qui contraste singulièrement avec les années précédentes.
Je veux tout d'abord saluer la volonté manifeste du Gouvernement de mener une politique de santé répondant à nos attentes, qui concernent notamment la lisibilité de notre organisation sanitaire. Dans son excellent rapport, notre collègue Jean-Marie Rolland s'est en effet demandé comment améliorer la qualité, l'efficacité et la lisibilité de notre système d'agences. Même si vous avez déjà apporté un certain nombre de réponses, je répète que nous attendons des améliorations notables dans ce domaine.
Ma première question portera sur la santé mentale, préoccupation essentielle dans chacune de nos circonscriptions. Le suicide étant la première cause de mortalité chez les jeunes âgés de 25 à 34 ans, nous avons besoin de mesures permettant d'améliorer la formation au repérage de la crise suicidaire – et cela, en vue d'accroître le nombre de professionnels sur le terrain. Le suicide est un véritable fléau.
S'agissant du plan « Psychiatrie et santé mentale », vous avez déjà dressé un premier bilan, qui nous permettra de dégager des priorités, et vous avez également évoqué l'installation de deux commissions, mais j'aimerais plus de précisions sur les objectifs retenus.
Une seconde série de questions portera sur les actions que vous envisagez pour la prévention des risques liés à l'environnement, au travail et à l'alimentation. Les crédits de paiement du second programme national « Nutrition santé » (PNNS) devraient augmenter de plus de 30 %, mais j'aimerais savoir quelles mesures concrètes seront appliquées sur le terrain.
Le développement des activités sportives étant également une priorité, vous allez inaugurer en fin de matinée le programme de prévention « Bouge, une priorité pour ta santé » au Stade de France. Pouvez-vous nous indiquer les objectifs concrets de ce programme ? Comment « bouger » davantage au niveau local ?
J'aimerais enfin savoir quels objectifs vous avez assignés à l'Observatoire de la qualité des produits alimentaires, nouvellement créé.
Une troisième série de questions portera sur les pathologies liées au vieillissement, qui font l'objet de plusieurs plans : plan « Vieillissement et solidarité », plan « Solidarité grand âge », plan « Alzheimer », plan du développement de la bien-traitance », plan « Bien vieillir ». Je fais tout à fait mien le souhait de notre rapporteur spécial, M. Gérard Bapt, de favoriser une meilleure articulation entre ces différents plans. Sur le terrain, on se rend compte que les plans se chevauchent, qu'il y a des financements croisés pour les mêmes actions. Tous ces plans ont leur place, et il n'est pas forcément nécessaire d'instaurer un plan unique, mais nous gagnerions à développer une plus vision globale.
Nous avons également besoin de moyens très concrets pour améliorer l'hospitalisation à domicile des personnes âgées, pour les inciter à l'activité physique, pour former aux métiers du grand âge, ou encore pour créer des unités de soins spécifiques pour les personnes atteintes par la maladie d'Alzheimer.
Cela m'amène à une question connexe : quel prolongement comptez-vous donner au plan « Alzheimer », auquel 3,14 millions seront consacrés ?
Pouvez-vous également nous apporter quelques précisions sur les objectifs du futur plan « Cancer » ? Le plan actuel, dont les bienfaits sont connus de tous, arrive en effet à échéance. Sur les 70 mesures initialement prévues, j'aimerais également savoir combien d'entre elles ont été effectivement appliquées.
En dernier lieu, quel regard portez-vous sur le rapport de la Cour des comptes. Ses observations méritent-elles d'être prises en compte ?
C'est toujours le cas !
Elles ne sauraient pourtant occulter l'importance du plan « Cancer », notamment toutes les actions de dépistage qui ont été menées. Au demeurant, j'aimerais savoir de quelle façon vous entendez les renforcer. Nous avons aujourd'hui besoin d'un second souffle.
Dans son rapport, notre collègue Jean-Marie Rolland évoquait la nécessité de mieux coordonner notre politique de santé, et en particulier de mieux piloter l'offre de soins, la planification hospitalière et l'organisation du secteur médico-social. Je sais que vous travaillez sur tous ces sujets, madame la ministre, et que nous allons examiner dans quelques semaines le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires ».
Cela étant dit, je souhaiterais savoir comment vous comptez améliorer l'organisation de la médecine de premier recours et la permanence des soins. Je pense en particulier aux maisons médicales de garde : chacun connaît le parcours du combattant que constituent, pour les médecins, mais aussi pour les élus, leur financement et leur fonctionnement.
En outre, lorsque ces maisons ferment leurs portes, vers minuit ou une heure du matin, il n'y a plus de médecins sur le terrain pour faire face aux besoins élémentaires, aux procédures d'internement, ou bien aux décès. Quelle politique pourriez-vous engager afin qu'il existe une véritable permanence des soins dans ce domaine ?
En décembre dernier, le Premier ministre m'a confié une mission sur l'hébergement d'urgence et sur le logement social. À cette occasion, j'ai pu réaliser la précarité dans laquelle se trouvent de nombreuses personnes souffrant de troubles du comportement ou de troubles psychiques – 60% de ceux qu'on appelle les « sans domicile fixe » en font partie. La fermeture des lits hospitaliers en psychiatrie, qui permettaient d'héberger de nombreux malades, ainsi que la fermeture de nombreux asiles, a conduit un certain nombre d'entre eux à la rue. Il est vrai que d'autres structures ont été créées, notamment dans le secteur médico-social, notamment les maisons d'accueil, ainsi que des dispositifs particuliers, tels que les appartements de coordination thérapeutique. Mais ces structures sont en nombre réduit et ne concernent pas nécessairement ce type de population.
Dans ces conditions, le problème de l'hébergement stable des personnes en situation de fragilité, mais dont l'état ne requiert plus de soins actifs, n'est pas réglé à l'heure actuelle. Il est donc indispensable de trouver de nouvelles solutions.
Mon rapport contient un certain nombre de propositions à cet effet : développer davantage les équipes mobiles de psychiatrie ; mieux coordonner leur action avec celle des centres d'hébergement d'urgence (CHU) et celle des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) ; multiplier les « lits halte soins santé », après une évaluation des besoins ; maintenir les permanences d'accès aux soins de santé (PASS) dans les hôpitaux et élargir leur accès aux patients relevant de la psychiatrie ; définir des objectifs précis à atteindre en matière d'hébergement et de logement hors du milieu hospitalier pour les personnes présentant un trouble ou un handicap psychique.
Compte tenu du manque d'études sur tous ces sujets, j'ai également suggéré que les services du ministère de la santé veuillent bien produire des informations sur l'impact de la diminution des lits en psychiatrie.
Des études sont également nécessaires sur les modalités d'hébergement et de logement des personnes suivies dans les établissements de santé spécialisés et dans les services psychiatriques.
Il faut en outre poursuivre les expériences innovantes, telles que les groupes d'entraide mutuelle, ou les CHRS d'urgence dédiés aux personnes vivant dans la rue ou souffrant de troubles graves, comme celui de l'association Notre-Dame des sans-abri à Lyon.
Au début du mois de janvier, lors d'un point d'étape, le Premier ministre avait annoncé le déblocage de 10 millions d'euros supplémentaires pour financer dès 2008 de nouveaux programmes sanitaires en faveur des exclus : 3 millions pour le renforcement des équipes mobiles psychiatriques, 4 millions pour celui des permanences sociales en hôpital psychiatrique et 3 millions pour la création de lits pérennes en soins santé. À ce jour, ces crédits n'ont toujours pas été engagés. Pour 2009, seuls 4 millions sont inscrits pour les PAS et 3 millions pour les équipes mobiles de psychiatrie ; en outre, la création des lits pérennes vient d'être refusée par la direction de la sécurité sociale. Madame la ministre, si des efforts ont été faits, ils restent insuffisants : l'État ne peut se désengager de la prise en charge de ces personnes.
Je terminerai par trois questions précises.
Tout d'abord, pourquoi les contrats d'objectifs et de moyens des hôpitaux, attendus depuis un an et demi, n'ont-ils toujours pas été signés ?
Ensuite, le plan « Hôpital 2012 » prévoyait l'extension du service des urgences et du SAMU de l'hôpital Mignot à Versailles. À sa création en 1982, celui-ci avait une capacité d'accueil de 25 000 patients en urgence et de 70 000 appels pour le SAMU ; or, aujourd'hui, on en est à 56 000 et 500 000 ! Le financement de la première tranche d'agrandissement et de rénovation de l'hôpital Mignot a-t-il bien été décidé au cours de la réunion qui s'est tenue ces jours-ci ?
Enfin, les crédits de financement des missions d'intérêt général et de recherche sont encore insuffisants, si bien que les hôpitaux – dont beaucoup se trouvent dans une situation financière difficile – se font en quelque sorte les banquiers du ministère de la santé.
De l'assurance maladie, surtout !
Et de l'assurance maladie, en effet. Tant qu'ils ne disposeront pas des fonds nécessaires, ils resteront financièrement fragiles, ce qui affecte leurs programmes et affaiblit leur crédibilité.
Madame la ministre, je joins mes félicitations à celles de mes collègues : la mission « Santé » se caractérise par sa grande ambition et répond, comme vous l'avez rappelé, à l'objectif annoncé par le Président de la République. Je remercie également nos rapporteurs, Jean-Marie Rolland et Gérard Bapt, dont les travaux ont éclairé notre réflexion.
Madame la ministre, je voudrais vous interroger sur l'aide médicale de l'État. Dans son rapport, Gérard Bapt rappelle que les crédits affectés à ce dispositif sont en forte augmentation, soulignant toutefois le problème de la dette accumulée – auquel il faudrait trouver une réponse. Le nombre de bénéficiaires ne cesse de croître, atteignant aujourd'hui quelque 180 000 personnes, la condition étant de justifier d'une résidence de plus de trois mois en France. A-t-on mené une réflexion sur la ventilation des pathologies prises en charges au titre de l'AME et les mouvements migratoires que cela génère, dans l'hexagone et outre-mer ?
L'aide médicale d'État s'adosse à un système de santé particulièrement efficace – même si l'on peut toujours trouver matière à critique. Certains ont pu dire que la France ne pouvait accueillir toute la misère du monde ; en tout cas, compte tenu des 6,5 milliards d'êtres humains qui vivent sur cette planète, il est possible que notre dispositif sanitaire nourrisse des mouvements migratoires. Une analyse sanitaire de l'aide médicale d'État permettrait de s'adapter aux besoins et de promouvoir une politique de coopération et de co-développement ambitieuse.
Veuillez excuser mon retard, madame la ministre, dû aux aléas de la circulation depuis Amiens.
Je ferai plusieurs observations générales sur la mission « Santé ». L'autorisation de dépenses demandée au Parlement tient compte de la progression des crédits consacrés à la formation médicale, avec l'augmentation du numerus clausus – mais je souligne que le problème des formateurs en médecine générale reste entier : il en faudrait un par université, on en est très loin ! Elle intègre également l'effort particulier fourni en 2009 pour acquérir des produits de santé afin de lutter contre une pandémie ; la progression de 77 millions d'euros des crédits pour l'aide médicale d'État ; le renforcement de l'agence de pilotage du système d'information hospitalier et du centre national de gestion des corps dirigeants administratifs, de manière à améliorer la gestion des hôpitaux ; ainsi que la consolidation des agences sanitaires, dont les crédits augmentent de 3 % en 2009.
La mission « Santé » regroupe désormais l'ensemble des interventions du ministère chargé de la santé. La fusion des programmes « Santé publique et prévention » et « Veille et sécurité sanitaire » au sein d'un nouveau programme « Prévention et sécurité sanitaire » est présentée comme une volonté de rationaliser les moyens. Par ailleurs, suite à la RGPP, le ministère est engagé dans une profonde action de modernisation. La mise en place, dès 2010, des agences régionales de santé constitue un axe majeur du déploiement de la politique de santé publique, qui amplifiera les effets de la politique de prévention. Enfin, dans le domaine de la solidarité nationale, l'effort financier en faveur de l'AME s'accompagnera de la poursuite de la dépense, de la lutte contre la fraude et de la rationalisation de la gestion. Voilà, en bref, le contenu du rapport.
Pour l'ensemble de la mission, les crédits s'élèvent à 1,134 milliard d'euros en autorisations d'engagement, soit une progression de 1,02 % par rapport à 2008 – ce qui est loin des besoins en ce domaine – et à 1,156 milliard d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 1,06 %.
Cette mission comporte trois programmes. Le programme 103, « Prévention et sécurité sanitaire », opère la fusion des programmes « Santé publique et prévention » et « Veille et sécurité sanitaire » ; ses moyens connaissent une diminution de 3,31 % en autorisations d'engagement, mais une progression de 5,63 % en crédits de paiement.
Dans ce programme, les crédits alloués à la plupart des actions, comme « Pilotage de la politique de santé publique », « Accès et éducation à la santé », « Prévention des risques liés à l'environnement, au travail et à l'alimentation », « Qualité, sécurité et gestion des produits de santé et du corps humain » sont en augmentation. Mais ceux de l'action 13, « Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins », diminuent de 0,34 % en autorisations d'engagement et de 1,02 % en crédits de paiement. Ceux de l'action 14, « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » augmentent de 1,91 % en AE, mais diminuent de 1,28 % en CP. Quant à ceux de l'action 16, « Réponse aux alertes et gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises sanitaires », ils augmentent de 32 % en CP mais diminuent de 39 % en AE.
Le programme 171, « Offre de soins et qualité du système de soins », voit ses crédits augmenter de 11,72 % en AE et de 13,54 % en CP. Si les moyens affectés à l'action « Niveau et qualité de l'offre de soins » augmentent, en revanche ceux de l'action « Modernisation du système de soins » diminuent de 19,46 % en AE et de 15,81 % en CP.
Lors de la discussion du PLFSS, nous avions dénoncé le gel de 100 millions d'euros de la dotation du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés pour 2008. Le Gouvernement l'a justifié en raison d'un décalage croissant entre les montants engagés annuellement par les agences régionales de l'hospitalisation et les montants effectivement décaissés par le gestionnaire du fonds, c'est-à-dire la Caisse des dépôts. Compte tenu des besoins de certains établissements en matière de modernisation, de mise aux normes et d'achat de matériel nouveau, ce gel est inadmissible.
Les crédits du programme 183, « Protection maladie », augmentent de 5,6 % en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ceux de l'accès à la protection maladie complémentaire diminuent de 50 millions, en raison de la privatisation du financement du fonds CMU complémentaire par l'augmentation de la taxe sur le chiffre d'affaires « santé » des organismes complémentaires, portée de 2,5 % à 5,9 %. Lors de la discussion du PLFSS, nous avions également dénoncé cette augmentation qui sera, pour certaines mutuelles, répercutée dès l'année prochaine sur leurs associataires et leurs adhérents, faisant ainsi supporter la charge du financement de la CMU par ceux-ci, au risque qu'ils renoncent purement et simplement à souscrire à une mutuelle.
Enfin, scandale des scandales, les crédits du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante stagnent. Vous savez que je suis moi-même amianté, mais nous sommes des centaines de milliers, et des milliers de nouveaux cas se révèlent chaque année. Par ailleurs, l'évolution du financement de ce fonds est inéquitable : il est désormais alimenté par une contribution due par toutes les entreprises au lieu d'une contribution spécifique versée par les entreprises responsables, que l'on connaît fort bien mais que l'on se refuse donc à faire payer seules.
S'agissant des agences régionales de santé, vous étatisez tout en décentralisant puisque les préfets qui, par le biais des ARH, avaient déjà la maîtrise de la décision au sujet de l'hôpital, l'auront désormais pour tout ce qui concerne la politique de santé. Je partage à ce sujet l'opinion des directeurs de l'assurance maladie : il est anormal que l'État décide de l'allocation des ressources versées par les salariés. Cela ne peut se passer ainsi, et la bataille à ce sujet n'est pas close.
Je ne conclurai pas sans un mot à propos du CHU d'Amiens, auquel la Cour des comptes s'est intéressée. Avec un déficit cumulé de 46 millions, sa situation est catastrophique. Une pétition qui a déjà réuni 12 000 signatures demande le sauvetage du CHU d'Amiens, ainsi que le maintien de l'hôpital Nord, qui répond aux besoins de quelque 50 000 habitants des quartiers populaires.
Certaines de vos questions relevaient de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Il faudra donc toujours trois mois de présence en France avant de pouvoir prétendre à l'AME. Sachant la prévalence particulièrement forte du VIH-sida, des hépatites et de la tuberculose parmi la population concernée et alors que l'on s'inquiète de la résistance croissante de certains germes, cette disposition pose un problème. Est-il raisonnable de laisser des tuberculeux trois mois sans traitement et de s'inquiéter ensuite de la résurgence de la tuberculose en France ?
Dans un autre domaine, des doutes subsistent sur l'innocuité du vaccin contre l'hépatite B. Aussi massive soit la campagne d'incitation à la vaccination lancée par le ministère, la population ne suivra pas et nombre de médecins non plus. Comment en serait-il autrement ? Le budget destiné à l'indemnisation des professionnels de santé qui, obligés de se faire vacciner, ont été victimes d'accidents vaccinaux, augmente ; mais qu'en est-il des autres victimes de ces accidents, dont les tribunaux ne prévoient pas qu'ils soient indemnisés ? La jurisprudence qui s'étoffe accentue le clivage entre les professionnels de santé malheureusement atteints après une vaccination obligatoire, et les assurés sociaux qui, par une démarche citoyenne, se sont fait vacciner après la campagne lancée par M. Douste-Blazy en 1994. Il y aurait vraiment beaucoup à dire sur cette campagne visant à vacciner 30 millions de personnes en quatre ans. Aussi longtemps que l'on ne débattra pas publiquement de cette initiative ministérielle et de ses conséquences, aussi longtemps que l'indemnisation des accidents vaccinaux se fera sur la base du « deux poids, deux mesures », le ministère pourra faire toutes les campagnes qu'il voudra, il ne sera pas raisonnable de le suivre.
J'aimerais enfin avoir connaissance du rapport sur le fléchage du produit de la franchise médicale, qui nous avait été promis.
Ce rapport a été mis à la disposition des parlementaires, et j'en ferai tenir un exemplaire à Mme Lemorton puisqu'elle ne l'a pas eu.
Je vous remercie, monsieur Perrut, de votre soutien. Je pense vous avoir répondu pour ce qui concerne les agences et la santé mentale. Vous avez aussi évoqué l'obésité, qui touche 17 % de la population adulte française et 3,5 % des enfants âgés de 3 à 17 ans. Que cette proportion soit moindre que celle relevée dans d'autres pays est d'un faible réconfort. Il y a en effet là un problème de santé publique mais aussi un problème social ; l'obésité est en effet devenue un marqueur social, sa prévalence étant inversement proportionnelle aux revenus des ménages.
L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé consacrera 10,9 millions à une campagne relative à la nutrition. Le Programme national nutrition santé, auquel le ministère contribue à hauteur de 4,4 millions, permettra de poursuivre l'amélioration de la qualité des productions alimentaires grâce à la signature de chartes nutritionnelles avec les industriels, les producteurs et les restaurateurs – j'en signerai plusieurs, le 24 novembre, en partenariat avec le ministère de l'agriculture.
Nous mettrons l'accent sur le dépistage précoce de l'obésité et sa prise en charge, et nous lancerons des campagnes particulièrement ciblées sur les populations à risque ; nous insisterons notamment sur le rôle bénéfique de l'allaitement maternel. D'autre part, l'Institut national de veille sanitaire lancera en 2009 une étude épidémiologique prévue pour durer cinq ans et visant à établir la nature du lien entre comportement alimentaire et prévalence de la mortalité par cancer et par maladies cardio-vasculaires. Enfin, l'Observatoire de la qualité de l'alimentation remettra chaque année un rapport sur l'évolution de la qualité nutritionnelle de l'offre alimentaire.
Je ne me hasarderai pas à critiquer le rapport de la Cour des comptes, et je n'aurais d'ailleurs aucune raison de le faire. La Cour a analysé de manière documentée l'application du Plan cancer par l'Institut national du cancer, l'INCa ; tout en notant les effets positifs de la création du nouvel opérateur de l'État et les progrès réalisés, elle a relevé certaines carences dans le suivi des mesures du plan. Nous tiendrons évidemment compte de cette évaluation pour la mise en oeuvre du prochain plan cancer dont, le 21 octobre, le Président de la République a confié la préparation au Pr Jean-Pierre Grünfeld. Dans sa lettre de mission, M. Sarkozy lui demande de retenir plusieurs priorités : la recherche, la prévention, l'extension des campagnes de dépistage et la correction de l'inégalité d'accès à des soins de qualité. En effet, bien que le dépistage du cancer du sein soit gratuit, les femmes des catégories sociales défavorisées ne se font pas assez dépister ; il y a, là encore, un marqueur social.
Je lance donc des actions tendant à ce que les campagnes de dépistage profitent à ceux qui ne s'y prêteraient pas spontanément.
Vous vous êtes aussi inquiété, monsieur Perrut, de la lisibilité d'ensemble des plans. Il est vrai que les actions que nous menons peuvent être envisagées sous leur aspect sanitaire et sous leur aspect social.
C'est pourquoi le Président de la République a voulu que les questions sanitaires, sociales et de recherche fassent toutes ensemble partie intégrante du plan Alzheimer par exemple, pour pouvoir être coordonnées au mieux, même si par ailleurs l'essentiel des crédits est consacré à la création de places. La politique de planification en santé, pour récente qu'elle soit, nous a permis de progresser en méthode et en résultats, et la future loi « Hôpital, patients, santé, territoires », qui met sur pied toute une architecture dans laquelle les politiques de prévention sanitaire et médicosociale se retrouveront liées dans la main des agences régionales de santé, développera encore cette coordination. Au niveau national, la direction générale de la santé s'est livrée à un important travail de recensement et a élaboré le livre des plans, qui permet d'en faciliter la lecture.
M. Pinte, comme M. Gremetz, a posé de nombreuses questions qui relèvent du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je reviendrai pourtant volontiers sur les trois types de mesures qu'il avait proposées dans son rapport fondateur mais dont on ne trouve pas trace dans le présent budget puisqu'elles sont financées dans le PLFSS, à hauteur de dix millions. Quatre millions sont ainsi consacrés aux permanences d'accès aux soins de santé, destinées aux personnes en situation de vulnérabilité et de précarité – l'objectif étant d'en établir dans tous les établissements qui ont un service d'urgence. Trois millions sont prévus pour les équipes mobiles de psychiatrie, chargées d'aller au-devant des sans-abri. Ce dispositif novateur fonctionne depuis 2006 et vingt-trois nouvelles équipes ont été financées en 2008. Enfin, trois millions sont consacrés aux lits halte soins santé, ces structures médico-sociales qui permettent aux personnes sans domicile fixe de recevoir les soins médicaux et paramédicaux qui sont généralement dispensés à domicile.
La question de M. Pinte concernant l'avenir du centre hospitalier de Versailles, comme celle de M. Gremetz sur celui d'Amiens, est quelque peu embarrassante puisqu'il n'est pas coutume d'aborder ces sujets particuliers en commission élargie, mais j'y répondrai volontiers. Ce centre connaît des difficultés. Or, dans le cadre du plan Hôpital 2012, il est essentiel de vérifier la capacité des établissements à assurer la part de financement qui leur revient – et qui est en moyenne de 50 % – sur leurs ressources propres. Le projet des urgences et de la réanimation, dont le montant dépasse 33 millions, ne pouvant être validé sans une bonne visibilité, j'ai décidé de reporter la décision, sachant que pour l'instant 17 % seulement des crédits du plan Hôpital 2012 sont attribués. Deux nouvelles salves de financement sont encore prévues, et ce dossier très structurant pour le département des Yvelines sera examiné à nouveau une fois que les expertises auront été réunies. J'espère pouvoir me prononcer avant la fin de l'année.
M. Morange et Mme Lemorton m'ont interrogée sur l'aide médicale d'État. Elle constitue un dispositif sanitaire – et évidemment pas un outil de contrôle de l'immigration – consacré aux étrangers en situation de grande précarité, dont l'état de santé est en général mauvais : les maladies infectieuses graves, comme les hépatites virales, le VIH ou la tuberculose sont quinze ou vingt fois plus répandues parmi eux que dans la population autochtone. L'AME remplit donc des objectifs à la fois humanitaires et de protection de la santé globale du pays. Le nombre des bénéficiaires a connu un pic en 2006, atteignant 190 000 personnes, avant de retomber à 180 000 – ce qui reste inférieur au nombre supposé de personnes en situation irrégulière. À périmètre constant, le coût de l'AME sera stable en 2008 et baissera très légèrement en 2009. Le coût moyen par bénéficiaire, 700 euros, est tout à fait comparable à celui des assurés sociaux, autant qu'il soit possible de faire des comparaisons. L'AME est un système évaluatif qui doit être piloté et observé très soigneusement mais qui est désormais bien maîtrisé. Une mission d‘audit a conclu que ses dépenses correspondaient à des soins effectivement dispensés, aux bonnes personnes et avec des possibilités de fraude extrêmement limitées. Conformément à ses recommandations, la direction de la sécurité sociale a été confortée dans son rôle de pilote du dispositif – elle réunit un comité de suivi interministériel tous les deux mois – et un titre d'admission sécurisé, testé en 2008, sera généralisé en 2009 pour éviter la fraude. Enfin, le projet de loi de finances pour 2008 a prévu l'extension des contrôles médicaux aux bénéficiaires de l'AME et l'obligation d'accepter les génériques.
Les soins urgents, qu'a évoqués Mme Lemorton, sont depuis 2003 soumis à une condition de résidence de plus de trois mois en France. Mais les personnes qui ne la remplissent pas sont prises en charge par le biais du nouvel article L. 254-1 du code de l'action sociale en cas d'affections qui mettraient en jeu le pronostic vital ou conduiraient à une altération grave et durable de leur état de santé. Sont notamment pris en charge tous les soins destinés à éviter la propagation d'une pathologie à l'entourage, les soins aux mineurs, à la femme enceinte et au nouveau-né, les examens de prévention durant et après la grossesse et les interruptions de grossesse, médicales ou volontaires. Les frais sont intégralement couverts, y compris le forfait journalier, et les bénéficiaires sont dispensés de l'avance des frais. Les médicaments sont pris en charge s'ils ont été prescrits lors de l'hospitalisation et sont indispensables au succès du traitement. Ce dispositif donne lieu à un remboursement forfaitaire de 40 millions à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, mais avec un reste à charge puisque la dépense réelle s'est élevée à 67 millions en 2007. Vous voyez donc que les soins urgents sont très bien assurés, malgré la condition de résidence, ce qui correspond à notre vision éthique et humanitaire de la santé.
M. Gremetz a posé plusieurs questions auxquelles j'ai déjà répondu largement, en particulier sur l'EPRUS, l'AME et les fusions de programmes, et je n'y reviens pas. En ce qui concerne la formation médicale, les crédits d'État financent différents dispositifs de stage – non seulement la rémunération des internes ou des étudiants de deuxième cycle concernés, mais aussi les indemnités des maîtres de stage. La formation médicale connaît une augmentation sans précédent de 26,7 %, en raison de l'évolution du numerus clausus et de l'extension des stages de deuxième cycle des études médicales. Quant à la résorption de la dette, les efforts entrepris depuis 2006 devraient être poursuivis. Enfin, la formation des formateurs se voit consacrer 135 000 euros.
C'est suffisant.
D'autres questions relevaient du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Je me suis longuement exprimée lors de son examen à propos de la taxe sur les organismes complémentaires, mais je serai plus complète sur son impact financier : le schéma d'affectation de la taxe additionnelle sur le chiffre d'affaires permet à la fois de répondre à une demande de la mutualité française et d'en garantir le rendement pour la CNAMTS. Il ne s'agit évidemment pas d'une privatisation.
Avec le transfert de la charge de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé au fonds CMU, l'affectation des taxes du fonds CMUC à la CNAMTS, la revalorisation du forfait CMU à 370 euros pour les organismes et le transfert à la CNAMTS des droits alcool et tabac, ainsi que des excédents cumulés du fonds CMU, le gain net pour la CNAMTS est de 1,15 millions d'euros pour 2009. Il s'agit plutôt d'assurer une meilleure lisibilité et il me semble que nous pourrions être d'accord sur ce point.
L'augmentation du reversement demandé aux organismes complémentaires correspond à la dynamique de la prise en charge par l'assurance maladie dans le cadre de la progression constante des malades pris en charge pour des affections à longue durée. Compte tenu des marges très confortables dégagées par ces organismes complémentaires – M. Yves Bur a chiffré à 10 milliards d'euros les fonds de réserve dont ils disposent – un reversement d'un milliard d'euros ne devrait pas entraîner d'augmentation des cotisations demandées aux assurés. La Fédération nationale des mutualités françaises s'y est d'ailleurs engagée et je l'en remercie.
Pour le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante – le FIVA –, les crédits inscrits au PLF sont de 50 millions d'euros, qui s'ajoutent aux 315 millions de la branche ATMP prévus au titre de la loi de financement. Ces crédits sont stables, mais l'excédent cumulé de ce fonds sera de 403 millions d'euros en 2008, ce qui est tout à fait suffisant pour indemniser les victimes au cours de l'année 2009. Je suis ce sujet avec une grande attention, et ces crédits seront augmentés si nécessaire. L'indemnisation des victimes de l'amiante est indispensable. Il ne s'agit pas d'une indemnisation forfaitaire, car elle relève de l'évaluation.
Si les réserves de ce fonds s'accumulent, c'est parce que les procès avec les entreprises durent des années et que certains ne s'ouvrent que lorsque le plaignant est déjà mort.
Sur la vaccination contre l'hépatite B, à propos de laquelle m'a interrogée Mme Catherine Lemorton, l'évaluation bénéfices-risques vient d'être encore réaffirmée par les autorités sanitaires, auxquelles j'ai demandé de se prononcer clairement. Pour l'indemnisation des professionnels de santé, il existe une commission, placée aux côtés de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, qui examine cas par cas s'il doit être établi un lien entre la vaccination et la survenue de certaines pathologies, telles que la sclérose en plaques. Il faut rappeler que l'obligation vaccinale chez les professionnels de santé, qui payaient le plus lourd tribut à la maladie avant l'arrivée des vaccins, a fait chuter le nombre d'hépatites B dans leurs rangs et permet également de protéger les patients : c'est une stratégie gagnant-gagnant. J'engage en outre tous les téléspectateurs qui nous regardent à recourir à cette vaccination.
Voilà, je crois avoir répondu…
Pas sur le CHU d'Amiens : vos services ont-ils lu le rapport de la Cour régionale des comptes ?
Tous les rapports de la Cour des comptes concernant le secteur sanitaire, et en particulier le secteur hospitalier, sont étudiés avec beaucoup de soin par les services de mon ministère. La capacité d'expertise et d'analyse de la Cour des comptes est très précieuse et complète celle des agences régionales de l'hospitalisation, ainsi que l'entretien confiant que nous avons avec les directeurs d'établissements et les présidents de commissions médicales d'établissement. Il convient en effet de prendre en compte tous les aspects – financiers, sociaux et, plus globalement, humains. J'ai longuement évoqué la question hospitalière à propos du PLFSS, dont elle relève clairement. Je répondrai bien évidemment à toutes les questions particulières sur les hôpitaux, mais il ne me semble pas que ce soit ici le lieu.
Mon cher collègue, Mme la ministre vient d'indiquer que votre question relative à l'hôpital d'Amiens recevrait, comme celle qui a été posée sur l'hôpital de Versailles, une réponse écrite.
Madame la ministre, je vous remercie.
La réunion de la commission élargie s'achève à 11 heures 25.
Le Directeur du service des comptes rendus des commissions, Michel KERAUTRET
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