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Commission élargie

Séance du 29 octobre 2008 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • asile
  • demandeur
  • immigration
  • intégration

La séance

Source

PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2009

IMMIGRATION, ASILE ET INTÉGRATION

La réunion de la commission élargie commence à seize heures quinze.

PermalienPhoto de Didier Migaud

Monsieur le ministre, je suis heureux, avec Axel Poniatowski, président de la Commission des affaires étrangères, et Sébastien Huyghe, vice-président de la Commission des lois, de vous accueillir ici pour cette commission élargie portant sur les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » et sur les articles 62 et 63 rattachés du projet de loi de finances pour 2009. Les commissions élargies ont pour objet de permettre un dialogue vivant et direct entre le Gouvernement et les députés. Nos rapporteurs, qui travaillent tout au long de l'année en liaison étroite avec vous, ont déjà mis leurs projets de rapports à la disposition de leurs collègues.

PermalienPhoto de Axel Poniatowski

Je commencerai par vous féliciter, monsieur le ministre, pour l'adoption dans quelques jours du pacte européen sur l'asile et l'immigration, qui sera une des réussites importantes de la présidence française de l'Union.

Pour ce qui est du budget, le Président de la République a fixé un objectif ambitieux de 50 % d'immigration professionnelle d'ici 2012. Des progrès importants ont déjà été enregistrés, puisque l'immigration professionnelle a augmenté de 35 % sur les sept premiers mois de l'année par rapport à la même période de l'année précédente. Elle représente aujourd'hui d'environ 20 % de l'immigration totale. Quelles sont les professions les plus représentées, et quels besoins ce type d'immigration doit-il satisfaire ?

D'autre part, le taux d'accord du statut de réfugié politique est proche de 17 % pour les huit premiers mois de l'année, contre 11,6 % pour la même période en 2007. Quels sont les nouveaux bénéficiaires : sont-ils principalement menacés pour leur appartenance à une minorité, ou pour des sujets plus politiques ? Par ailleurs, vous avez annoncé en juin que la France allait accueillir cinq cents réfugiés irakiens essentiellement issus de la minorité chrétienne, qui continue à être persécutée, comme l'ont encore montré les récents massacres de Mossoul. Les demandeurs d'asile issus de cette minorité sont-ils plus nombreux qu'auparavant, et une procédure accélérée est-elle prévue en leur faveur, comme c'est le cas en Suède ?

Par ailleurs, avec notamment la création de l'Office français de l'immigration et l'intégration, opérateur unique doté de ressources plus élevées qu'auparavant, et les transferts de crédits de votre budget vers la mission « Ville et logement », la politique d'intégration est pleine réorganisation. Quel est l'objet de cette réorganisation et quels sont les moyens qui y sont associés ? En d'autres termes, le budget est-il en diminution ?

Enfin, si la politique des visas est une compétence que vous partagez avec le ministère des affaires étrangères, sa mise en oeuvre ne relève que de vos services. Où en est-on de l'un de ses principaux enjeux, le développement des visas biométriques, qui devraient être délivrés dans 107 consulats d'ici la fin de l'année ?

PermalienPhoto de Sébastien Huyghe

Je vous demande tout d'abord d'excuser l'absence du président Warsmann, qui a dû rejoindre les Ardennes cet après-midi.

L'Assemblée a examiné l'an dernier pour la première fois, les crédits de l'immigration, de l'asile et de l'intégration, c'est-à-dire les crédits concernant une des politiques majeures du Président de la République. Ce dernier a d'ailleurs fait des questions migratoires l'une des priorités de la présidence française de l'Union européenne, et les objectifs stratégiques de cette mission sont indissociables du pacte européen sur l'immigration et l'asile présenté à l'initiative de la France. La Commission des lois suit cette politique avec vigilance, comme en témoignent vos auditions régulières, monsieur le ministre, et la création d'une mission d'information sur les centres de rétention administrative et les zones d'attente.

J'aimerais connaître l'évolution des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » dans le contexte général de la révision générale des politiques publiques, et savoir comment seront rationalisés les moyens et optimisées les ressources.

Par ailleurs, j'aimerais savoir dans quelles conditions a été passé l'accord selon lequel un repenti des FARC, qui a permis la libération d'un ancien député colombien, doit obtenir l'asile en France.

PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Vous avez, monsieur le ministre, réussi depuis moins d'un an à mettre en place une administration efficace, agissant selon trois axes : le principe de souveraineté, avec une gestion concertée des flux migratoires ; le principe de justice, grâce au respect des règles de droit, qui rend possible l'égalité des chances ; et le principe de légalité qui vise à mettre fin à toute situation irrégulière par la reconduite à la frontière, de préférence volontaire. L'année 2009 verra deux réformes importantes : la création d'un nouvel opérateur, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, et la déconcentration de l'instruction des demandes de naturalisation vers les préfectures afin de réduire les délais d'instruction tout en garantissant l'égalité de traitement et en améliorant l'accès au statut de citoyen français.

Monsieur le ministre, pourriez-vous présenter les principales actions conduites par la présidence française de l'Union européenne en matière d'immigration et indiquer les grands axes du pacte européen sur l'immigration et l'asile ?

Il semble que la mission « Immigration, asile et intégration » prenne plus que sa part de l'effort de maîtrise des dépenses publiques. Quels sont les facteurs de la baisse de 15 % des crédits de paiement ?

Le projet d'installation des services parisiens de votre ministère au 103, rue de Grenelle, dans le 7e arrondissement, a fait l'objet de critiques de la part de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances. En conséquence, ils devraient être logés ailleurs, mais toujours dans le 7e arrondissement. Une implantation en banlieue, dont j'avais souligné l'intérêt dans mon précédent rapport, a-t-elle été étudiée ?

J'ai visité en septembre la zone d'attente des personnes en instance – ZAPI – et la salle d'audience flambant neuve qui y a été aménagée. Celle-ci reste pourtant inutilisée. Pourriez-vous nous indiquer le coût de cette salle et son devenir ?

PermalienPhoto de Philippe Cochet

Monsieur le ministre, je souhaite vous féliciter pour l'efficacité de votre administration.

Le Conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008 a décidé que la mise en oeuvre opérationnelle de la politique des visas – compétence que vous partagez avec le ministre des affaires étrangères – serait désormais de votre seule responsabilité. À ce titre, les crédits relatifs au déploiement du système d'information Réseau mondial visa – RMV – seront transférés en 2009 de la mission « Action extérieure de l'État » vers la mission « Immigration, asile et intégration ».

Le Conseil a également décidé que les affectations de personnels dans les services consulaires feraient l'objet d'une concertation entre votre ministère et le département en charge des affaires étrangères. Pensez-vous que d'autres mesures, comme le transfert des personnels vers la mission « Immigration, asile et intégration » soient nécessaires ?

La demande d'asile, qui avait diminué de 45 % entre 2004 et 2007, a augmenté de 12,6 % sur les neuf premiers mois de l'année, rendant insuffisants les crédits destinés à l'aide temporaire d'attente et à l'hébergement d'urgence. Quel sera le besoin de financement pour ces deux postes à la fin de l'exercice 2008 et quelle partie pourrait être couverte par des redéploiements de crédits au sein de votre mission ? La tendance à la hausse de la demande d'asile va-t-elle se confirmer en 2009 ?

L'exécution des mesures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière s'améliore et devrait dépasser l'objectif de 26 000 en 2008, mais elle se heurte encore au manque de diligence des pays d'origine ou de provenance. Des progrès ont-ils été obtenus sur ce point ?

PermalienPhoto de Éric Diard

Monsieur le ministre, je vous félicite d'avoir réussi à mettre sur pied en moins d'un an une administration d'état-major et obtenu en parallèle des résultats tangibles.

Les crédits inscrits pour la mission « Immigration, asile et intégration » ne reflètent que partiellement les moyens engagés par l'État en vue de la maîtrise des flux migratoires et de l'immigration concertée, mais leur cohérence se trouve renforcée par la décision de transférer 40 millions destinés à la politique de la ville vers le programme 147 de la mission « Ville et logement ».

Des progrès pourraient être recherchés du côté de l'enveloppe prévue en faveur de l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile. En effet, il semble que les crédits de la mission participent indirectement au financement d'une politique de solidarité qui ne relève pas des compétences de votre ministère. Une clarification, monsieur le ministre, est nécessaire.

Pour renforcer la cohérence voulue par le Gouvernement, l'Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations est transformée en nouvel opérateur – interlocuteur unique du ministère pour l'intégration des étrangers. Il est satisfaisant de constater que le Gouvernement a tiré les enseignements des remarques formulées par les trois rapporteurs sur les ambiguïtés liées à l'imbrication de l'ANAEM et de l'Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances – ACSÉ. Pourriez-vous nous apporter des précisions sur les modalités juridiques de cette transformation ?

La mise en oeuvre de l'autonomie budgétaire de la Cour nationale du droit d'asile est une autre clarification bienvenue. L'allongement des délais d'instruction – de 11 mois en 2007 à 13,5 mois en juin 2008 – montre l'urgence d'une réforme de son fonctionnement. La décision de lui affecter à titre permanent une dizaine de magistrats est louable mais qu'en est-il, Monsieur le ministre, des modifications législatives ?

S'agissant du coût de la rétention administrative des étrangers, je note qu'il n'est fait que très peu recours aux audiences délocalisées et à la visioconférence. La Cour de Cassation a jugé le 16 avril que les audiences délocalisées ne pouvaient avoir lieu dans des salles situées au sein des centres de rétention administrative. Outre le centre de Coquelles, seul celui de Marseille répond aux critères de la Cour. La non-utilisation de la salle d'audience de la ZAPI – qui échappe à cette jurisprudence – n'en est que plus choquante. Quelles mesures comptez-vous prendre pour remédier à cette situation ?

Quant à la visioconférence, seul le CRA de Lyon y a recours pour les audiences de l'OFPRA. Pourtant, la généralisation d'une telle procédure permettrait des économies d'environ 1,2 million d'euros, selon l'estimation de la police aux frontières. Quelles initiatives comptez-vous prendre dans ce domaine ?

Les accords sur la gestion concertée des flux migratoires et le développement solidaire intéressent de nombreux États partenaires et ont un effet réellement incitatif. Mais à ce jour, seul l'accord avec le Gabon est en vigueur. Les accords passés avec le Bénin et le Congo attendent d'être inscrits à l'ordre du jour du Sénat. Qu'en est-il des autres accords ?

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Sur le fond, nous ne partageons ni vos objectifs, ni votre volonté d'éviter l'immigration subie, ni votre souhait de rééquilibrer l'immigration de travail et l'immigration familiale. Mais nous nous contenterons aujourd'hui d'examiner si votre budget est de nature à vous permettre d'atteindre vos objectifs, ou si le flou qui le caractérise ne risque pas d'aggraver les crises déjà observées dans les centres de rétention. Nous attendons également avec intérêt les décrets d'application de la loi de novembre 2007 et espérons qu'ils ne subiront pas le même retard que les décrets de la loi de 2006.

L'intégration est un enjeu très important. Or, nous ne pouvons que constater que les crédits destinés à l'intégration et à l'accès à la nationalité sont en baisse, alors que ceux consacrés au contrôle des flux migratoires augmentent.

L'ACSÉ, créée en 2006, n'a été mise en place que l'année dernière. Et voici que la création d'un nouvel opérateur entraîne encore des bouleversements, alors que la mission d'évaluation de la loi de 2006 n'a pas encore rendu ses conclusions. Pourquoi le Parlement voterait-il des crédits si c'est pour se demander ensuite s'il est opportun de créer une nouvelle structure ?

Il est par ailleurs curieux de vouloir que l'immigration s'autofinance moyennant l'augmentation des taxes sur les étrangers et les entreprises qui les emploient. A priori, les personnes qui viennent travailler dans notre pays sont pauvres. Leur travail est utile à notre économie. Alourdir les taxes sur les immigrés en situation légale ne fait qu'encourager l'emploi de ces mêmes immigrés sans formalités légales. On s'est aperçu l'année dernière que des personnes travaillaient ainsi depuis de nombreuses années dans certaines entreprises. Après les mesures très fermes que vous avez prises, celles-ci se sont trouvées en difficulté et il a fallu procéder à des régularisations.

Autre sujet d'inquiétude, la diminution des crédits consacrés à l'asile alors que les demandes sont en augmentation. Considérez-vous, au rebours du droit international, que l'asile est une forme d'immigration comme une autre ? Pensez-vous qu'il est possible de planifier les catastrophes naturelles ou les crises politiques qui poussent les personnes à quitter leur pays ?

La France accueille les demandeurs d'asile avec beaucoup de réticence. Parfois, elle les renvoie chez eux. Et voilà qu'on s'apprête à faire venir dans notre pays des guérilléros d'Amérique latine qui n'avaient rien demandé à personne !

Enfin, la fermeture de neuf plateformes associatives d'accueil supplémentaires rendra l'accès à l'asile encore plus difficile et contribuera à engorger encore plus les régions frontalières et l'Île-de-France, qui reçoit déjà un nombre considérable de demandeurs dans des conditions très difficiles pour les collectivités territoriales.

Le groupe SRC se préoccupe également de la diminution des crédits affectés à l'allocation temporaire d'attente. À la suite d'une décision jurisprudentielle du Conseil d'État, il a fallu modifier le code du travail sur ce point. Pourtant, par un tour de passe-passe, vous avez réintroduit une restriction de même nature que celle qui avait été condamnée en exigeant un récépissé que les demandeurs issus des pays « sûrs » ne peuvent obtenir.

Malgré les drames survenus en 2008 dans les centres de rétention, notamment à Vincennes, vous persistez à vouloir construire des centres de grande taille alors que nous savons que c'est dans les structures de ce type que se posent les problèmes les plus graves, comme la mission d'information l'a constaté sur le terrain.

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Je regrette que nous ayons à expédier un sujet aussi important en si peu de temps !

PermalienPhoto de Michel Bouvard

Vous parlez depuis dix minutes. Je ne pense pas que vous auriez eu plus de temps en séance publique.

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Il me semble naturel, au vu des drames relatifs à l'immigration depuis un an, que la représentation nationale prenne le temps d'aborder le sujet !

Je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, sur l'appel d'offres que vous avez passé et qui met en péril les actions de soutien et d'information dans les centres de rétention. La restriction à une seule personne morale par centre est tout à fait inadaptée.

Enfin, nous ne disposons pas d'informations fiables sur le coût réel des reconduites à la frontière. Mme Pavy avait mis en doute les chiffres qui nous avaient été fournis l'année dernière car ceux-ci ne prenaient pas en compte les coûts très élevés de personnel.

PermalienPhoto de Éric Ciotti

L'an dernier, alors que le ministère nouvellement créé de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire présentait son premier budget, beaucoup d'interrogations pesaient sur l'avenir de cette initiative. La France arriverait-elle à mettre sur pied en si peu de temps un grand ministère régalien doté d'une administration propre ? Comment la nouvelle politique d'immigration et d'intégration voulue par le Président de la République serait-elle mise en oeuvre ? La coordination des politiques migratoires des pays membres de l'Union européenne serait-elle enfin possible ?

Dix-sept mois plus tard, les résultats sont là. Pourriez-vous, monsieur le ministre, dresser un premier bilan de l'action de votre administration ?

La France a su, en un temps record, élaborer et conduire une politique migratoire cohérente et équilibrée reposant sur trois piliers : la lutte contre l'immigration clandestine ; l'amélioration de l'intégration de tous les immigrés régulier ; la conclusion d'accords de gestion concertée des flux migratoires et de développement solidaire avec les pays sources d'immigration.

Le programme « Immigration et asile », doté de 436 millions d'euros, vise à mettre en oeuvre la politique d'immigration volontariste sur laquelle le Président de la République s'était engagé devant les Français au printemps 2007. Quels sont les moyens nécessaires à la poursuite de cette politique et à la mise en oeuvre des objectifs du pacte européen sur l'immigration et sur l'asile ? Ce pacte a été adopté à l'unanimité par le Conseil européen du 16 octobre, et ce résultat en tous points remarquable est à porter à votre crédit : vous avez su convaincre tous les États membres de construire ensemble le socle d'une véritable politique commune. Grâce à vous, les engagements qui étaient ceux de la France depuis mai 2007 sont désormais ceux de l'Europe.

Premier pilier, la lutte contre l'immigration clandestine. Il y va là de la dignité des individus et du respect de la personne humaine. Les 42 millions d'euros prévus dans ce budget permettront de lutter efficacement contre les filières clandestines et de sanctionner les marchands de sommeil qui exploitent le désarroi et la misère humaine. Les indicateurs du projet annuel de performance attestent le succès des actions menées dans ce domaine, et le Gouvernement prévoit de nouvelles améliorations grâce à la généralisation de moyens modernes tels que la biométrie en matière de visas et la création d'un titre de séjour électronique.

Il est désormais inscrit dans le pacte européen que l'on n'aura plus recours aux régularisations massives et générales qui ont créé par le passé de véritables appels d'air. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

La dotation prévue pour les centres de rétention administrative est élevée : 28,8 millions d'euros. Il est démontré une fois encore que la réalité est très éloignée des approches démagogiques et caricaturales de certains. On a créé 116 places supplémentaires en 2008. L'année 2009 verra l'ouverture de deux CRA de 120 places chacun. L'heure n'est donc plus aux polémiques. En matière de conditions et de durée de rétention, notre pays est en tous points exemplaire.

Le second pilier de ce budget repose sur le respect de notre tradition nationale d'accueil des réfugiés. Avec plus de 287 millions, la garantie de l'exercice du droit d'asile en constitue le premier poste ; la création de 500 places en centre d'accueil pour demandeur d'asile en 2010 et de 500 places en 2011 est d'ailleurs explicitement réaffirmée tout comme la réduction des délais de procédure dans l'examen des demandes. La mise en place, dès 2009, d'un bureau d'appui européen témoigne également de notre volonté commune de protéger les étrangers victimes de persécutions.

Le second programme, « Intégration et accès à la nationalité française », vise à réussir l'intégration d'émigrants légaux. À ce titre, ses 77,8 millions permettront d'appliquer les mesures édictées par la loi du 20 novembre 2007 s'agissant en particulier des tests et de l'apprentissage de la langue française, des contrats d'accueil et d'intégration pour la famille et de la généralisation du bilan de compétences.

Ce budget nous donne non seulement tous les moyens nécessaires afin de poursuivre la grande politique d'immigration dont la France a besoin mais il témoigne de la détermination du Gouvernement à défendre une nouvelle politique migratoire juste, humaine et cohérente. Le Groupe UMP le votera avec enthousiasme !

PermalienPhoto de Jean-Paul Lecoq

Le droit d'asile est désormais considéré comme une composante quelconque des crédits relatifs à l'immigration et appréhendé comme un simple instrument de régulation des flux migratoires alors que la situation des demandeurs d'asile en France, mais également en Europe, est de plus en plus préoccupante, notamment en raison de nombreux conflits. Alors que les demandes ont augmenté de 5 % pendant les six premiers mois de l'année, les crédits diminuent de 12 millions. La France envisagerait-elle donc de dénoncer un certain nombre de traités ?

La dotation visant à soutenir des actions d'accompagnement des demandeurs d'asile « dans un contexte de régionalisation et de rationalisation des procédures d'accueil » diminuera quant à elle de 45 % : trois millions seulement sont prévus, dont 2,6 pour le financement des plateformes d'accueil et 400 000 euros pour le financement d'associations. À ce propos, le financement d'associations visant à prendre en charge un soutien médico-psychologique des demandeurs d'asile victimes de tortures ou des demandeurs d'asile hors CADA est dérisoire.

En ce qui concerne l'hébergement, les crédits prévus s'élèvent à 195 millions mais la création de nouvelles places de CADA n'est en rien envisagée. Les crédits attribués à l'hébergement d'urgence destinés à accueillir les demandeurs d'asile placés en procédure prioritaire ou en « procédure Dublin » qui ne disposent pas d'un titre de séjour provisoire n'augmentent pas et le maintien d'un financement en année pleine de 1 500 places prévu au titre du PLF 2009 demeure quant à lui insuffisant.

En outre, pouvez-vous apporter des précisions s'agissant de la baisse annoncée de 60 % du financement du pré-CADA de l'ADDSEA, celle-ci risquant de provoquer de surcroît des suppressions d'emplois qui ne manqueront pas d'aggraver les difficultés des demandeurs d'asile.

Six ans après la fermeture du camp de Sangatte, la Coordination française pour le droit d'asile (CFDA) a réalisé une enquête publiée sous le titre « La loi des jungles » dans laquelle il apparaît clairement que cette fermeture n'a en rien réglé le problème des « exilés » en transit dans le nord-ouest de la France. Dans un contexte de durcissement des contrôles aux frontières, les campements informels se sont multipliés sur les littoraux de la Manche et de la Mer du Nord. La CFDA a évalué à 1 500 le nombre de clandestins présents dans cette zone – certes dispersés, ce qui rend le phénomène moins visible. Pendant ce temps, les « exilés » se heurtent à quantité d'obstacles administratifs et juridiques qui les condamnent à l'irrégularité et à la misère. Que comptez-vous faire pour remédier à cette situation désastreuse ?

En ce qui concerne la lutte contre l'immigration irrégulière, votre politique est irresponsable : les contrôles au faciès existent toujours – et sans doute ne sont-ils pas étrangers à l'attitude de certains jeunes dans les stades quand retentit notre hymne national. Il faut abandonner la course aux chiffres !

La dotation prévue pour les centres de rétention administrative (CRA) s'élève à 28,8 millions. À la mi-année, 1 538 places étaient gérées par la police et 434 par la gendarmerie, 2 030 places étant prévues au total pour 2009, et le coût moyen d'une place en rétention s'élevant à 38 euros par jour. La politique du chiffre, là encore, ne fait qu'augmenter les tensions ; je rappelle qu'en 2007, plus de 35 000 étrangers, dont 2 500 femmes et 240 enfants ont séjourné dans nos 24 CRA. Vous assurez que des solutions d'urgence sont en cours d'étude pour pallier le manque de places et que 60 places provisoires devraient être créées dans le courant de 2009 en région parisienne. Pouvez-vous apporter des précisions à ce sujet ? Les conditions élémentaires d'hygiène seront-elles assurées ?

Vous avez souhaité, monsieur le ministre, mettre fin au « monopole » de la CIMADE, seule association habilitée à entrer dans les CRA. Un appel d'offres a été lancé mais, pour qu'un organisme soit accepté, il devra désormais « s'engager à faire preuve de discrétion et à ne pas divulguer, en sa qualité de prestataire de l'État, des faits ou des informations sur les situations individuelles qu'il aurait à connaître ». Or, en démocratie, il ne faut pas avoir peur de la transparence ! Si, suite à l'arrêt rendu par le tribunal administratif de Paris, cet appel d'offres a été suspendu, le ministère est-il prêt pour autant à organiser une vraie concertation sur ce sujet ?

Quid, enfin, de la diminution considérable des crédits dédiés à l'intégration et à l'accession à la nationalité ?

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Je remercie M. le président de la Commission des affaires étrangères, M. Sébastien Huyghe, représentant de la Commission des lois, ainsi que M. Ciotti, d'avoir rappelé l'adoption du pacte européen sur l'immigration et l'asile mais je suis un peu chagriné que Mme Pau-Langevin ne se soit pas associée à cet enthousiasme. Le vote a été en effet quasi unanime au Parlement européen, seuls deux socialistes français ayant voté contre.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Je rappelle également que mon administration a été créée récemment et que le ministère n'est pleinement actif que depuis le 1er janvier dernier. C'est en effet un ministère d'état-major avec ses 609 agents, les autres personnels relevant d'autres administrations.

Je m'appuie sur deux opérateurs : l'ANAEM – laquelle n'a reçu en 2008 aucune subvention puisqu'elle dispose d'environ 80 millions de ressources propres, son fond de roulement s'élevant à 50 millions – et l'OFPRA –, qui bénéficie d'une subvention de 40 millions d'euros.

Comme l'ont noté Éric Ciotti et Axel Poniatowski, ce ministère obtient déjà des résultats, dont le premier concerne le rééquilibrage entre l'immigration au titre du regroupement familial et l'immigration professionnelle. Il existait en effet un profond déséquilibre entre les deux formes d'immigration. On peut être d'accord ou non sur la nécessité de le corriger, mais cette politique résulte de la lettre de mission qui m'a été adressée par le Président de la République.

Le rééquilibrage est donc en cours, même si les chiffres cités à ce sujet par Axel Poniatowski sont un peu optimistes. Sur les huit premiers mois, les visas de long séjour accordés pour motif professionnel ont enregistré une progression de 20,6 % par rapport à l'année précédente, tandis que l'immigration au titre du regroupement familial connaissait une amorce de chute : moins 3,4 %. Ces chiffres sont naturellement fondés sur les visites médicales de l'ANAEM. Je rappelle qu'en 2006, seulement 7 % des étrangers étaient admis au titre de l'immigration de travail. Ce taux atteint 17 % sur les huit premiers mois de l'année 2008. Il s'agit donc d'une tendance lourde.

Nous luttons également sans répit contre l'immigration irrégulière. Dans ce domaine aussi, il est inutile de pousser des cris d'orfraie : tous les pays d'Europe, sans exception, ont engagé une politique de cette nature. À cet égard, je signale aux députés socialistes que les ministres en charge de l'immigration en Espagne et au Royaume-Uni sont ceux qui expriment le plus de fermeté : ce dernier a même parlé de « fermeture ». Les partis au pouvoir dans ces pays font partie de l'Internationale socialiste : rien ne vous empêche donc de confronter vos points de vue au sein de cette sympathique association. De toute évidence, tout le monde n'a pas la même position que vous.

Le résultat de notre action, c'est que sur les huit premiers mois de l'année, 21 263 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits – c'est naturellement le chiffre que la presse a tendance à retenir. Je précise que si nous fixons des objectifs chiffrés, c'est pour rendre le message compréhensible. Quand une autorité dit : « Attention, si vous venez sans y être autorisé, sans respecter notre législation, cela risque de mal se passer », le message est inaudible. Mais si elle dit : « Si vous venez sans nous demander l'autorisation, 25 000 d'entre vous repartiront », alors, le message est compris ; non seulement ici, mais aussi dans les pays d'origine – où je me rends fréquemment pour discuter avec les associations et expliquer pourquoi nous agissons ainsi.

Par ailleurs, il est intéressant de noter – car ce fait coupe court à toutes les tentatives de polémiques – que la part des retours volontaires est passée de 7 % à environ un tiers. Cela signifie que moins des deux tiers de ces étrangers reconduits le sont de façon contrainte : non seulement le message est lisible et compris, mais l'exigence de solidarité, qui nous préoccupe tous, trouve une concrétisation dans un accompagnement financier dont il ne faut pas négliger la portée. En effet, un certain nombre d'étrangers en situation irrégulière ont pu franchir nos frontières grâce à des concours financiers familiaux. Il convient donc d'éviter pour eux un retour humiliant. L'accompagnement financier permet à l'intéressé de se justifier auprès de ses proches. Le pécule permettra de démarrer une activité économique et de donner un nouvel espoir. Bien entendu, il peut se cumuler avec d'autres aides destinées à accompagner des projets, qu'il s'agisse de commerces ou de reconversions agricoles. Ainsi, ceux qui s'apprêtaient à faire un grand numéro sur les reconduites à la frontière vont devoir modérer leur discours : l'évolution actuelle montre que notre politique fonctionne et qu'elle est davantage comprise.

J'en viens à la lutte contre le travail illégal, un combat majeur, symbolique. Il faut lutter contre les patrons qui emploient des travailleurs en situation irrégulière. Quelles que soient nos tendances partisanes, nous connaissons tous un petit employeur de BTP ou un restaurateur qui aimerait bien nous voir fermer les yeux sur de telles pratiques, mais je le dis clairement : il n'en est absolument pas question. Il n'y aura pas deux poids, deux mesures. Je comprends les démarches engagées par certains, mais je n'y répondrai pas favorablement. Et si nous devons faire un exemple – je pense notamment aux restaurateurs –, nous le ferons, même si cela doit prendre une connotation spectaculaire.

Dans ce domaine également, les chiffres sont clairs : 2 171 employeurs d'étrangers en situation irrégulière ont été interpellés, soit une augmentation de 27 %.

Enfin, nous restons fidèles à la tradition d'accueil des réfugiés politiques. Par rapport à l'année dernière, nous observons deux changements surprenants. D'une part, on assiste à une forte augmentation du nombre global de demandeurs de statut de réfugié ; et d'autre part, le pays d'où viennent le plus grand nombre de demandeurs est, de façon inattendue, la Russie. Dans le cadre de la Troïka, j'ai dîné avec le ministre de l'intérieur et le ministre de la justice russes, de passage à Paris, et ces chiffres n'ont pas suscité un enthousiasme délirant de leur part. Un haut fonctionnaire a même pris la parole pour s'étonner de la situation, jugeant que s'il y avait un berceau des droits de l'homme, c'était bien son pays.

Nous avons admis près de 7 000 réfugiés sur les huit premiers mois de 2008, sachant que le nombre total de bénéficiaires de ce statut se situe autour de 135 000.

En ce qui concerne les outils d'intégration, le nombre de diplômes initiaux de langue française, que les étrangers passent en arrivant dans notre pays, a progressé de 400 % en une seule année. Fin juillet 2008, 6 691 diplômes avaient déjà été délivrés, contre moins de 3 000 pour toute l'année 2007. Il s'agit donc d'une véritable explosion.

Concernant le développement solidaire, nous n'avons pas signé moins de six accords depuis juin 2007, avec le Gabon, le Bénin, le Congo, le Sénégal, la Tunisie et l'Île Maurice. C'est un exploit, sachant à quel point la conclusion de telles conventions peut prendre du temps. Même avec des pays où les flux migratoires représentent un vrai défi – comme le Sénégal, qui dans un premier temps refusait de signer –, nous y sommes parvenus sans grandes difficultés.

J'en viens aux crédits du ministère. S'agissant de la mission « Immigration, asile et intégration », à périmètre constant, les autorisations d'engagements sont en baisse de 6,9 % et les crédits de paiement de 5,1 %. À l'inverse, le budget consacré au programme « Immigration et asile » augmente de 7,3 %.

Il est vrai que le programme « Intégration » diminue de 34 %. Mais tous ceux qui ont exercé des fonctions ministérielles le savent : on a trop souvent la tentation de lier la qualité d'un budget à son augmentation. Que s'est-il passé en l'espèce ? Fadela Amara est venue me voir pour que nous nous mettions d'accord sur une répartition de nos compétences, afin d'éviter les chevauchements. Elle a proposé que le ministère de l'intégration se préoccupe des primo-arrivants – ceux qui sont présents depuis moins de cinq ans sur le territoire, et pour lesquels il faut mettre en place des circuits de formation et d'apprentissage, etc. Puis au-delà de ce délai, que les immigrés relèvent de la compétence de son secrétariat d'État. J'ai accepté, et c'est ce qui explique un premier transfert de 40 millions d'euros.

Par ailleurs, on a transféré 17,5 millions d'euros au Conseil d'État afin d'assurer le fonctionnement de la Cour nationale du droit d'asile.

Enfin, on a choisi de recourir à des ressources extra-budgétaires. Nous avons ainsi décidé de réduire fortement la dotation versée à l'ANAEM en mobilisant son fonds de roulement – soit 50 millions d'euros – et en réformant les taxes qui lui sont affectées, ce qui rapportera l'année prochaine entre 18 et 20 millions. Autant de crédits qui ne sont pas inscrits au programme « Intégration » mais n'en serviront pas moins à financer l'intégration.

Grosso modo, la capacité d'action du ministère en matière d'intégration reste donc sensiblement équivalente à ce qu'elle était en 2008 : elle représente environ 78 millions d'euros. Je suis fidèle au principe fixé par le Président de la République et le Premier ministre : non pas dépenser plus, mais dépenser mieux.

Le cadre général ainsi présenté, passons au détail des questions. M. le président Poniatowski m'a interrogé sur l'accueil des minorités persécutées en Irak. Dans ce domaine, nous avions de grandes ambitions, de même que l'Allemagne. Le ministre de l'intérieur allemand, M. Schaüble, souhaitait accueillir près de 30 000 réfugiés irakiens. Mais une première difficulté provenait de la structure administrative de l'Allemagne, cette question relevant en réalité des Länder. Par ailleurs, le premier ministre irakien, en visite à Berlin, a instamment demandé aux autorités allemandes – qui nous ont transmis le message – de ne pas désespérer ces populations. Il comprenait que l'on accueille les personnes pour lesquelles tout retour est impossible, parce qu'elles sont victimes de persécutions ciblées, de terrorisme, etc. Mais pour les autres, qui se trouvent souvent en Syrie et en Jordanie, il jugeait nécessaire d'attendre, l'intérêt des Irakiens étant que ces diverses populations puissent à nouveau concourir au redressement du pays.

Nous avons choisi de conserver un objectif de mille entrées, et 568 visas ont déjà été délivrés. Mais la question s'inscrit désormais davantage dans un cadre européen. Ainsi, Jacques Barrot, vice-président de la Commission, organise en novembre une mission destinée à rencontrer les réfugiés irakiens situés en Syrie et en Jordanie et à déterminer, avec d'autres pays européens, ceux que l'on peut accueillir.

Il y a, en France comme dans les autres pays d'Europe, deux catégories de professions concernées par l'accroissement de l'immigration professionnelle : les professions qualifiées, voire très qualifiées, comme celles d'ingénieur, d'informaticien, de cadre de la mécanique ou du BTP, et les professions moins qualifiées, notamment dans le secteur des services à la personne. N'est-il pas naturel, si l'on sait que 93 % des femmes qui arrivent en France dans le cadre du regroupement familial ne travaillent pas, de les encourager à aller vers l'emploi, et notamment vers ces métiers de service à la personne ? On leur donne ainsi des possibilités d'intégration, tout en répondant aux besoins de la société.

Or, il existe des listes de métiers ouverts aux étrangers, qui distinguent entre les différentes origines. Il y a d'abord les ressortissants de l'Union européenne, auxquels l'ensemble du marché du travail est désormais ouvert, selon la volonté du Président de la République. À l'autre extrémité, il y a la catégorie des pays tiers : 30 métiers leur ont été ouverts. Enfin, j'ai imposé une troisième catégorie, celle des pays avec lesquels nous avons des liens historiques – coloniaux –, mais aussi affectifs et amicaux : je ne comprenais pas que leurs ressortissants soient confondus dans la masse des pays tiers. Ce signal a été reçu avec enthousiasme par nos interlocuteurs du Maghreb et de l'Afrique subsaharienne. La liste des métiers ouverts n'est pas fixée de façon unilatérale, mais par des accords bilatéraux, au terme de négociations parfois difficiles. Ainsi, l'accord avec le Sénégal prévoit l'ouverture de 108 métiers et celui avec la Tunisie de 77 métiers.

Pour la biométrie, monsieur Poniatowski, l'idée est d'arriver à 100 % en 2010. L'an dernier, la proportion n'était que de 16,5 %, cette année elle devrait atteindre 35 %, et 78 % en 2009. Il faut bien sûr qu'un partenariat européen se développe. Tous nous partenaires n'avancent pas au même rythme ; cependant, on doit pouvoir développer le dispositif sur le modèle de ce qui a été mis en place pour la présidence slovène de l'Union européenne : celle-ci a utilisé notre réseau diplomatique, des conventions ont été conclues et la Slovénie nous a remboursé – modérément. Il n'y a pas de raison qu'on ne puisse pas appliquer de telles solutions à la biométrie. Il faut aller très vite. L'objectif est que l'affaire soit réglée à l'échelon européen en 2012.

S'agissant de la question, posée notamment par M. Huyghe, relative aux FARC, s'il s'agit de la délivrance d'une autorisation d'admission au séjour, je vous renvoie aux déclarations du ministre des affaires étrangères. Tout au plus puis-je vous dire ici que les conditions de son séjour sont examinées de façon ouverte (Sourires).

Mme Pavy et d'autres députés ont appuyé sur un point difficile en évoquant la situation invraisemblable de la salle d'audience de Roissy. C'est en juillet 1992 qu'a été promulguée la loi permettant sa création, mais le décret n'a pas été publié aussitôt. La salle a été construite en 2001 ; des travaux immobiliers supplémentaires ont été réalisés à la demande des magistrats et des avocats : une salle d'audience de 50 mètres carrés, trois bureaux pour le magistrats, deux pour les avocats. En 2007, nouveaux travaux pour 28 millions d'euros, avec la création d'une deuxième salle d'audience, l'amélioration d'un certain nombre de bureaux et la création de deux salles pour les magistrats, une salle de repos et une salle de restauration. Or, malgré tout cela, les magistrats du tribunal de Bobigny refusent toujours de s'y rendre. Cela n'est pas acceptable. Il appartient à l'autorité judiciaire d'utiliser cette salle d'audience seize ans après le vote de la loi qui a permis sa création.

J'en arrive au plan immobilier du ministère. Je voulais à l'origine installer les agents au plus près, dans le 7e arrondissement, mais le prix du mètre carré y est élevé, et vous nous avez suggéré de nous installer en banlieue. Au fait, l'Assemblée nationale ne pourrait-elle montrer l'exemple ? Mais on a commencé à lire dans la presse que Brice Hortefeux aimait le luxe… Je fais pourtant observer que, 42 % des agents se trouvant à Nantes, où l'immobilier est beaucoup moins cher qu'à Paris, le prix du mètre carré moyen par agent du ministère restait très raisonnable (Sourires). Finalement, une autre solution, domaniale, a été trouvée. Elle coûtera 3,3 millions d'euros, contre 3,5 pour la solution initiale. L'Assemblée nationale a donc parfaitement joué son rôle et je l'en remercie.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Monsieur Cochet, le nombre de demandes d'asile a chuté de 40 % entre 2005 et 2007 mais, fin septembre 2008, cela était reparti à la hausse – plus 12,6 %. Pour l'année en cours, il a fallu un décret d'avance de 36 millions et, pour 2009, j'ai engagé une concertation avec le ministre du budget. Plusieurs solutions sont possibles – remise à niveau des dotations de gestion ou levée de la réserve de précaution du programme 303 – mais il est certain que le besoin de crédits excédera les estimations.

À propos de la délivrance des laissez-passer consulaire, je dirai simplement que des difficultés se posent mais j'aurais été plus loin si la réunion s'était tenue à huis clos. Le taux global est en baisse : 31 % contre 37 % au premier semestre 2007. Les liens avec les ambassadeurs et les consuls mettent un peu de liant et d'humanité mais cela ne suffit pas.

Il convient d'abord de continuer à signer des accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement – qui organisent l'immigration légale mais aussi le retour des personnes en situation irrégulière – et de se montrer très vigilant quant à leur application. Je note cependant que le rythme de ratification de ces accords est beaucoup trop lent, et que d'autre part, il importe de faire aboutir au plus vite les négociations en cours, notamment celles avec le Cap-Vert, petit pays de diaspora – la population émigrée est plus nombreuse que celle vivant sur le territoire –, où la langue française progresse – elle est devenue obligatoire en seconde depuis le 1er septembre. La signature d'accords informels avec les pays les moins coopératifs est également envisageable.

Je n'entre pas dans le détail mais il faut aussi parfois avoir une discussion un peu virile avec le personnel diplomatique des pays d'origine, notamment au regard de leur train de vie, et prendre les décisions qui s'imposent… Avec le Maroc, pays ami et de bonne volonté, les résultats sont très inégaux d'une ville à l'autre.

Monsieur Diard, l'hébergement d'urgence constitue un sujet de préoccupation. Je rappelle qu'il relève des CADA, les centres d'accueil pour demandeurs d'asile, dont le nombre de places a été multiplié par quatre depuis 2002. Nous poursuivrons l'effort en créant 1 000 places supplémentaires en 2010 et 2011, ce qui implique naturellement une large concertation avec le ministère du logement et de la ville ainsi que d'autres partenaires.

Quel calendrier sera suivi pour la création effective de l'OFII, l'Office français de l'immigration et de l'intégration ? Le Sénat a adopté le 22 octobre un amendement du Gouvernement tendant à transférer du personnel de l'ACSE vers l'ANAEM. Le changement de dénomination de l'ANAEM en OFII sera traité par voie réglementaire.

Pour que des magistrats administratifs puissent être présents à la CNDA, la Cour nationale du droit d'asile, il faut modifier le code de la justice administrative. Le Premier ministre m'a confirmé qu'il entendait rattacher cette disposition au projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

Madame Pavy, s'agissant du recours aux audiences délocalisées, la loi votée en 1992 n'a fait l'objet d'un commencement d'application qu'en 2005. Des salles d'audience ont été aménagées à Coquelles, à Cornebarrieu et au Canet. À Coquelles, 250 audiences se sont tenues en 2007 et 130 au premier semestre 2008. À Marseille, un bâtiment actuellement en rénovation accueillera courant 2009 une nouvelle salle à proximité du centre de détention.

Je suis tout à fait favorable à la visioconférence, autorisée par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Une discussion a été engagée avec le cabinet de la ministre de la justice et je pense que nous pourrons mettre ce dispositif en place courant 2009. Ce sujet pourra être abordé par le CICI, le Comité interministériel de contrôle de l'immigration.

Monsieur Diard, je trouve très regrettable que les projets de ratification des accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement ne soient soumis au Parlement que plusieurs mois après leur signature : sur les six que j'ai signés, un seul a été ratifié.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Cela met en cause notre crédibilité. Néanmoins, le Conseil des ministres a validé ce matin les projets de loi concernant la Tunisie et le Sénégal.

Madame Pau-Langevin, sans doute avez-vous lu une mauvaise traduction du rapport Mazeaud. Premièrement, il est très favorable à des contingents d'immigration professionnelle, précisément dans le cadre des accords de gestion concertée des flux migratoires. Deuxièmement, il encourage fermement la politique d'immigration européenne, ce qui correspond parfaitement à la position française et à l'orientation qu'elle a fait valider – du reste, le dirigeant européen qui a manifesté le plus d'enthousiasme face à cette proposition a été le ministre de l'intérieur de la République chypriote, qui est communiste, suivi de près par ses collègues espagnol et britannique, que personne ne songerait à taxer de « social-traîtres ».

Vous être très impatiente de voir publiés tous les décrets d'application de la loi de novembre 2007. Sur les neuf décrets nécessaires, cinq sont déjà parus, ce qui permet d'appliquer treize articles. Un sixième, relatif aux tests de français, vient d'être approuvé par le Conseil d'État et sera publié le 1er novembre. Les trois derniers sont en cours de préparation.

Je n'écarte pas d'un revers de main votre remarque concernant l'ANAEM, qui aura fait l'objet d'évolutions importantes sur un laps de temps assez court, puisqu'elle a été créée en 2005 afin de fusionner l'Office des migrations internationales, l'OMI, avec le Service social d'aide aux émigrants, le SSAE. Cette fusion a été succès.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Le moment est venu de passer à une autre étape pour clarifier la répartition des compétences entre l'ANAEM et l'ACSE, mais aussi dans un souci d'économies, ces deux organismes entrant manifestement en concurrence pour la formation linguistique des migrants. L'ACSE sera recentrée sur un autre sujet important, qui ne dépend pas de moi : le plan banlieue, placé sous l'autorité de Mme Boutin et de Mme Amara.

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Quand on restructure des organismes, il faut penser aux personnels.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Bien sûr ; la concertation est engagée depuis quelque temps.

S'agissant de la réforme des taxes, le Conseil de modernisation des politiques publiques a décidé, pour des raisons d'efficacité, que le nouvel opérateur devait être autofinancé par des ressources liées à l'immigration. Nous appliquons également un principe d'équité : il existe trop d'exceptions et de niches dans le système actuel, qui est d'une grande complexité. Nous devons être plus justes.

Sur le fond, la question est de savoir si le coût de l'immigration doit être supporté par le demandeur lui-même ou par le contribuable français. C'est un vrai sujet de débat.

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

C'est à celui qui profite de l'immigration de payer !

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Il me semble que cette charge revient plutôt au candidat à l'immigration.

Je précise également que la diminution des crédits affectés à la politique d'asile – 287 millions d'euros, contre 299 cette année – n'est qu'une conséquence du rattachement de la Cour nationale du droit d'asile au Conseil d'État. En réalité, la dotation de fonctionnement accordée à l'OFRA est en hausse.

Les crédits affectés aux CADA augmentent aussi : ils seront de 195,6 millions en 2009, contre 192,9 millions en 2008. Le nombre de places disponibles – 20 410 à ce jour – augmentera par ailleurs de 1 000 unités en 2010-2011.

Pour ce qui est de la réforme de l'allocation temporaire d'attente, nous tirons tout d'abord les conséquences de l'annulation partielle du décret de 2006 par le Conseil d'État : ainsi, elle sera désormais versée aussi aux ressortissants des pays sûrs. Conformément à la directive communautaire de 2003, l'ATA n'est versée que pour la première demande.

J'en viens à la question des centres de rétention administrative. Avant de nous jeter la pierre, il faudrait commencer par observer ce qui se passe chez nos voisins européens. En Grande-Bretagne, par exemple, des centres de 500 places ont été créés, et la moitié d'entre eux est concédée au secteur privé. Nous sommes très loin de mener une telle politique en France : à Vincennes, nous reconstruisons trois centres de 80 places chacun – le premier devant ouvrir le 10 novembre.

Par ailleurs, et contrairement à ce que l'on croit parfois, le phénomène de surpopulation ne concerne pas les CRA. Lors de l'incendie du centre de Vincennes, le taux d'occupation ne dépassait 87 %, alors que nous étions dans un pic de population !

Concernant les coûts d'éloignement, la plus grande transparence règne : au 31 juillet dernier, le total des frais de billetterie, d'hébergement et de déplacement s'élevait à 22,9 millions d'euros pour 17 212 éloignements, soit 1 331 euros par opération.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Le rôle de la police est de lutter contre les infractions, ce qui inclut bien sûr les cas de séjour à titre irrégulier. On ne peut donc pas isoler ce coût.

Nous continuerons à subventionner les plateformes d'accueil, à l'exception toutefois de celles qui accueillent moins de deux demandeurs d'asile par semaine. Notre objectif est d'organiser l'accueil au sein des chefs-lieux de région, comme c'est déjà le cas en Basse-Normandie et en Bretagne.

Je voudrais remercier M. Éric Ciotti d'avoir insisté sur la totale cohérence de notre politique. On peut certes être en désaccord sur le fond, mais c'est un point incontestable.

Je reconnais qu'il subsiste des imperfections au sein de mon administration, mais il faut se souvenir que nous n'avons disposé que de quelques mois pour la mettre en place. Je rappelle également que nous avons reçu le Trophée de l'innovation à l'occasion des premières « rencontres de la modernisation de l'État », organisées par le magazine Acteurs publics, et que le Centre Thomas More a attribué une note de 9 sur 10 à la politique que nous avons instaurée.

Pour répondre à M. Lecoq, je répète que le budget de la politique d'asile augmente, et je conteste l'idée selon laquelle nous nous placerions en dehors de la Convention de Genève. Vous devriez plutôt admettre que nous avons remporté un succès sans précédent en parvenant à mettre d'accord des pays qui ont une véritable tradition en matière d'asile, comme la France, des pays qui n'en ont pas, notamment en Europe centrale, et d'autres qui ont l'impression d'être submergés. Le taux de demandeurs d'asile est ainsi de 7 pour mille habitants à Chypre. Autre exemple des différences actuelles : pour l'accueil des demandeurs d'asile d'origine tchétchène, le taux d'accord était de 5 % en Pologne contre 58 % en France.

Le résultat obtenu à la faveur de la conférence organisée par la France n'est sans doute pas la panacée en matière d'harmonisation, mais la création d'un bureau d'appui à Bruxelles est déjà un succès formidable. Nous avons mis un pied dans la porte ! Il est regrettable que seule France Culture ait fait état de ce beau résultat, car c'est une preuve que l'Europe ne peut se résumer à un processus de nivellement par le bas. Il y a aussi des cas d'ajustement par le haut – je le dis à l'intention de M. Jacques Myard. Nous pouvons être fiers de ce que nous avons obtenu.

Pour ce qui est des étrangers qui se trouvent concentrés dans la communauté d'agglomération du Calaisis, vous savez bien qu'ils ne demandent ni l'asile ni le droit de séjourner en France : ils se souhaitent se rendre en Grande-Bretagne en dépit du peu d'enthousiasme de ce pays à leur égard. Le problème n'est certes pas entièrement réglé, mais il ne concerne plus qu'environ 500 personnes, alors qu'on en comptait plus de 3 000 à Sangatte. Nous avons renforcé le dispositif de sécurisation, et les autorités britanniques ont fait preuve d'une grande implication dans ce dossier. Je n'ai pas encore rencontré le nouveau ministre en charge de l'immigration, M. Phil Woolas, mais je sais qu'il est ferme et souhaite, lui aussi, que nous travaillions ensemble. La solution, c'est naturellement de renforcer la coopération avec le Royaume-Uni, notamment en matière de financement. J'ai pu constater, au cours de récentes discussions, que les autorités britanniques n'y étaient nullement hostiles.

En ce qui concerne enfin la CIMADE, la création des centres de rétention, en 1982, a été une très bonne chose, et j'en félicite le gouvernement de l'époque. Mais ce l'était moins d'autoriser la présence d'une seule association. Beaucoup d'autres pays ne le font pas : l'Espagne refuse toute présence associative. Dans notre pays, non seulement la CIMADE peut accéder aux centres, mais aussi les parlementaires français et européens, sans compter le nouveau contrôleur général des lieux de privation de liberté. On ne peut donc pas nous accuser de chercher à cacher quoi que ce soit ! Vous vous y êtes rendue vous-même, madame Pau-Langevin, et vous êtes trouvée aux prises avec des gens qui se sont comportés de façon scandaleuse. Il ne faut pas cautionner de telles personnes, dont les objectifs réels sont bien éloignés de la défense des droits des étrangers.

Mais pour revenir à la CIMADE, et bien que ce soit une association très respectable, avec les dirigeants de laquelle j'entretiens des liens étroits, il ne me paraît pas sain qu'elle soit la seule à intervenir. Personne n'envisagerait qu'il n'y ait qu'une formation politique pour défendre les électeurs, et un seul syndicat pour les salariés ! C'est sans doute pour cela que, malgré les deux recours qui ont été déposés, cinq autres associations ont répondu à l'appel d'offres que nous avions lancé – dont Forum réfugiés et France Terre d'asile par exemple, dont les dirigeants ne sont pas réputés chercher à me faire plaisir.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

On le prétend proche de l'UMP, bien que je ne le connaisse pas… Et alors ? La candidature de deux associations proches de la gauche, et même de la gauche de la gauche, n'a rien de problématique à vos yeux, mais celle de ce collectif est prétexte à lancer un débat ? Lancez-le, nous n'avons rien à craindre.

PermalienPhoto de Michel Bouvard

Juste un mot sur ce sujet. Je suis sensible à votre souci d'éviter les superpositions de compétences des opérateurs, mais il faudra évaluer les taxes affectées, selon les conclusions unanimes de la commission des finances.

PermalienPhoto de Jacques Myard

Pour ma part, je suis bien certain que ce ministère aura longue vie : il n'est qu'à lire le rapport de l'OCDE sur les flux migratoires pour comprendre qu'il s'agit d'un problème primordial, qui ne peut être traité que dans une approche globale.

En matière de décrets de naturalisation, il arrive que les avis des préfectures, qui mènent les enquêtes sur les candidats, ne soient pas suivis et que la nationalité soit accordée à des personnes problématiques. Il faut être attentif à cette question. Je voudrais par ailleurs savoir s'il existe des statistiques sur les pays d'origine des candidats et sur la durée de traitement des dossiers, et si les procédures de demande d'asile ont été accélérées.

Est-il par ailleurs opportun de n'attribuer nos cartes d'étudiant qu'à des gens ayant une bonne connaissance du français ? Nous venons encore de recevoir une délégation irakienne qui se plaignait de la difficulté d'envoyer des étudiants en France à cause de ce problème. Les Anglo-Saxons, eux, font venir les bons étudiants et leur donnent des cours intensifs de langue. Nous devrions, dans l'intérêt de notre stratégie d'influence, nous montrer plus souples pour pouvoir continuer à former dans nos écoles les élites des pays étrangers.

PermalienPhoto de Étienne Pinte

Quelques observations. Les crédits du programme d'intégration et d'accès à la nationalité n'atteignent que 78 millions pour 2009, contre 195 cette année. Même si l'on prend en considération les transferts qui ont eu lieu, le compte n'y est pas.

Quant à l'après-Sangatte, vous nous dites que la Grande-Bretagne serait prête à apporter une aide financière – mais laquelle ? Je trouve proprement scandaleux que l'étude au cas par cas des dossiers ne soit pas gérée par les Britanniques. C'est nous qui faisons le sale boulot : nous ne laissons pas partir ces gens, dont certains ont de la famille en Grande-Bretagne alors que selon nos propres règles, le regroupement familial devrait s'appliquer.

Lorsqu'un étranger est régularisé, mais que le dossier de ses enfants, qui sont en France, prend un peu plus de temps, les organismes sociaux refusent de verser les prestations familiales. Cela est anormal, et contraire aux directives de la HALDE.

Il arrive par ailleurs que des décisions de l'OFPRA soient remises en cause, soit par les commissions départementales du titre de séjour, soit par des mouvements associatifs. Les préfets sont alors amenés, dans le cadre de leur pouvoir discrétionnaire, à régulariser des situations qui auraient pu l'être autrement.

Enfin, les derniers événements dont ont été victimes les chrétiens d'Irak ne doivent pas inciter ceux qui se sont réfugiés en Jordanie ou en Syrie à regagner leur pays. Les autorités irakiennes ont donc beau jeu de nous inciter à ne pas les accueillir alors qu'elles ne font par leur travail !

PermalienPhoto de Christophe Caresche

À l'examen de votre budget, Monsieur le ministre, c'est-à-dire de l'adéquation entre vos objectifs et les moyens qui vous sont confiés, il semble qu'on vous ait chargé d'une mission impossible. Des moyens de plus en plus importants sont consacrés à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, pour des résultats qui restent très limités : le taux d'exécution des décisions de reconduite à la frontière, qui elles-mêmes ont augmenté, est passé de 29 % en 2006 à 20,7 % en 2007, pour les raisons que vous avez évoquées. Ces sommes sont donc utilisées pour une action sans grand résultat, mais qui crée des tensions importantes sur le plan humain et social. Peut-être seraient-elles mieux employées à améliorer les actions d'intégration ou à augmenter l'aide aux retours. Ces dernières paraissent plus nombreuses – sans doute moins à cause de la crainte qu'inspire votre politique que parce que ces gens ne trouvent pas en France ce qu'ils y cherchaient. Il faudrait donc réorienter les crédits vers d'autres pistes.

À vrai dire, votre politique semble parfois ubuesque. Les CRA ont été modernisés, des places ont été créées, les étrangers sont de plus en plus nombreux à y séjourner, mais ils en ressortent aussi plus rapidement puisqu'on ne parvient pas à les expulser.

Cette politique d'affichage coûte cher. L'un des intérêts du rapport de Mme Pavy est de demander une évaluation précise du coût complet d'une reconduite à la frontière. L'indicateur donné dans le bleu n'est pas satisfaisant puisqu'il ne couvre qu'une partie du processus et ne tient pas compte des moyens humains mis au service de cette procédure. Il n'est pas normal que le fonctionnement des CRA ne soit pas compris et que seuls les billets d'avion et de train, ou la location de deux avions, soient décomptés. Une évaluation précise aboutirait à un coût peut-être dix fois supérieur aux 1 500 euros annoncés.

Il faut aborder ces questions de manière pragmatique et réaliste. Ce n'est pas ce qui caractérise votre politique, trop inspirée par un certain affichage idéologique.

PermalienPhoto de Marc Goua

Je ne partage pas l'optimisme de certains de mes collègues sur le fonctionnement de votre politique. Dans le Maine-et-Loire, la préfecture a décidé depuis le 24 juillet de suspendre sine die les domiciliations, faute d'hébergement. Que comptez-vous faire pour remédier à cet état de fait ?

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Monsieur Myard, nous avons accru le pouvoir des préfets concernant les naturalisations par souci de simplification : l'avis du préfet sera retenu s'il est positif ; s'il est négatif, l'étranger pourra effectuer un recours auprès du ministre. Nous expérimenterons cette procédure en 2010. La priorité, en 2009, sera la résorption des dossiers en instance, pour laquelle nous avons recruté des vacataires. Je pose systématiquement la question aux personnes à qui je remets un décret de naturalisation et il me semble que le délai d'obtention est désormais compris entre dix-sept et dix-huit mois.

Monsieur Pinte, mon cabinet a reçu à deux reprises Mme Natacha Bouchard, maire de Calais. Estimant, à raison, subir une forte pression, elle demande un renfort budgétaire. Les Britanniques, de leur côté, sont prêts à financer les moyens techniques visant à empêcher l'entrée d'étrangers sur leur territoire. Il est vrai que nous sommes contraints de subir les inconvénients d'une politique qui n'est pas la nôtre.

Vous avez cité la HALDE. Mais je vous invite à lire la décision du Conseil constitutionnel – seule autorité qui vaille en la matière – qui a validé, en 2005, sur le rapport de Simone Veil, la réforme des allocations familiales versées aux étrangers en situation régulière. N'en déplaise à la HALDE, j'applique la loi, toute la loi et rien que la loi.

En réalité, monsieur Caresche, vous êtes très gêné. La baisse du taux d'exécution des mesures d'éloignement n'est que de 2 %. Vous occultez en outre la progression très sensible du nombre des éloignements mis à exécution. Fin septembre, nous étions déjà au-dessus du nombre total d'éloignements pour l'année 2007 tout entière.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Bien sûr ! Vous voudriez que je fasse une différence entre le Noir et le Roumain ? Pour moi, cela ne change rien !

PermalienPhoto de George Pau-Langevin

Il y a une différence entre les ressortissants européens et les autres.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Les ressortissants de l'Union européenne ont le droit de circuler librement à deux conditions : le respect de l'ordre public et la justification de revenus réguliers. Lorsqu'ils ne respectent pas ces règles, ils sont reconduits comme les autres. Sur ce sujet, je ne fais pas de racisme à l'envers : je veux l'égalité totale pour tous !

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Concernant les aides au retour volontaire, j'en appelle à votre sens des responsabilités : elles sont un facteur de justice, d'équité et d'efficacité. N'oubliez pas non plus que certains de nos compatriotes sont dans des situations très précaires et ne saisissent pas forcément toutes les subtilités d'une générosité à laquelle, par ailleurs, je souscris totalement.

PermalienPhoto de Christophe Caresche

C'est pour cette raison que vous ne donnez pas le coût exact de l'éloignement ?

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

J'ai doublé le montant de l'aide au retour, qui s'élève maintenant au niveau de celle qui est délivrée par les Britanniques.

Vous dénoncez une politique d'affichage. Or, pour la première fois depuis une génération, le nombre d'étrangers en situation irrégulière sur notre territoire a baissé.

PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Il est très simple de le savoir ! Premier élément : le nombre de bénéficiaires de l'aide médicale d'État a baissé de 6,2 %. Deuxième élément : les reconduites ont augmenté. Troisième élément : l'augmentation du nombre de personnes bénéficiant du statut de réfugié a pour effet mécanique la baisse du nombre de déboutés, et l'on sait très bien que les déboutés constituent une partie importante des étrangers en situation irrégulière. À partir de ces indicateurs, je puis affirmer que la baisse se situe aux alentours de 8 %.

Je suis favorable à l'organisation de l'immigration légale mais je veux aussi désorganiser l'immigration illégale car c'est celle-là qui est injuste. En fermant les yeux, on accompagne les personnes en situation irrégulière vers la clandestinité et donc vers l'indignité.

Vous avez évoqué des situations individuelles, monsieur Goua. Sachez que, dès lors qu'un parlementaire ou une association reconnue nous saisit, nous étudions chaque dossier à fond. Si le parlementaire se porte garant de la personne, je lui donne presque toujours satisfaction car je sais qu'il prend ses responsabilités. C'est également le cas pour la quasi-totalité des grandes associations.

Pour terminer, je vous rappelle que le nombre de places en CADA a quadruplé depuis 2002 et continuera de croître.

La réunion de la commission élargie s'achève à dix-huit heures quarante-cinq.

Le Directeur du service des comptes rendus des commissions, Michel KERAUTRET

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