Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 19 octobre 2010 à 15h00

Sommaire

La séance

Source

(Au moment où le président de l'Assemblée nationale monte au fauteuil de la présidence, les députés des groupes SRC et GDR restent assis.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du groupe d'amitié de l'Assemblée nationale de la République démocratique du Congo, conduite par son président M. François Muamba.

(Mmes et MM. les députés, ainsi que Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Patrick Roy, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. (Très vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Je vous en prie, mes chers collègues, montrez-vous tolérants !

M. Patrick Roy a la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Ma question s'adresse à Mme Alliot-Marie, ministre de la justice. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Le drame de l'amiante n'en finit pas de faire des victimes : 100 000 morts prévisibles à terme. (Les mêmes mouvements se poursuivent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Tous ces morts ne doivent rien au hasard. Ils ont été exposés volontairement par l'industrie de l'amiante (Mêmes mouvements), …

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

…une industrie qui connaissait parfaitement le danger et qui l'a caché aux salariés : 100 000 morts ; 100 000 crimes.

Les victimes réclament réparation, mais aussi justice. Un procès pénal est indispensable. C'est là que les choses se compliquent. (Les cris et huées continuent sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je vous en prie, pensez à l'image que vous donnez.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Dans cette France où la justice est de plus en plus sélective (Mêmes mouvements),…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, ne rentrez pas dans cette mécanique.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

…j'ai la conviction que ce Gouvernement fait tout ce qu'il peut pour entraver la tenue du procès.

Mme Dati, d'abord, ici même, qui, avec des trémolos au fond de la voix (Mêmes mouvements),…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

…me promettait les moyens humains indispensables à l'instruction. Promesse non tenue.

Vous-même ensuite qui, ici même, avec des trémolos au fond de la voix me promettiez les moyens humains indispensables à l'instruction. Promesse non tenue.

Ces moyens humains sont pourtant dérisoires : quelques postes d'assistants de justice.

Les veuves de l'amiante tournent depuis cinq ans autour du palais de justice de Dunkerque. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Ce soir, elles tourneront autour de l'Assemblée nationale, après avoir rencontré les députés ici, au Palais Bourbon.

Je relaie leur demande : pourquoi le Gouvernement étouffe-t-il ce procès ? La justice doit être la même pour tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, c'est sans trémolos mais avec beaucoup de sincérité et de dignité que je souhaite – comme nous tous sur l'ensemble de ces bancs, je le pense –, pour les victimes et leurs familles, que toute la vérité soit faite.

En réalité et contrairement à ce que vous dites, des moyens extrêmement importants sont consacrés à la recherche des responsabilités et aux enquêtes.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Actuellement, soixante gendarmes et quatorze policiers travaillent sur ces dossiers.

Depuis le 1er janvier 2009, les effectifs de la cellule « amiante » de l'Office central de lutte contre les atteintes environnementales ont été doublés. Onze gendarmes et policiers sont en charge, au sein de cet office, des enquêtes préliminaires et des commissions rogatoires ordonnées par les juges d'instruction du pôle de santé publique.

Avec le ministre de l'intérieur, nous nous sommes engagés à renforcer les moyens humains de l'enquête. Les effectifs de cette cellule vont passer de onze à quatorze personnes à temps plein, au cours des jours qui viennent.

Contrairement à ce que vous dites, monsieur le député, les résultats sont là : soixante-huit enquêtes sont en cours en matière d'exposition à l'amiante ; trente-huit ont déjà été retournées au juge, ce que vous semblez ignorer ; le traitement de trente autres est bien avancé.

Monsieur le député, vous et vos collègues, de la majorité comme de l'opposition, membres du groupe d'étude sur l'amiante, pouvez être assurés – d'ailleurs, vous le savez, parce que nous nous sommes vus à de nombreuses reprises – que le Gouvernement ne méconnaît pas la douleur des victimes de l'amiante, qu'il fait et fera tout pour leur donner satisfaction.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Robert Lecou, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Monsieur le Premier ministre, alors que ceux qui ont la responsabilité de décider et d'agir se sont engagés pour sauver notre régime de retraite, après une période de dialogue et de communication et en acceptant des évolutions notoires dans le cadre du débat parlementaire, certains refusent les règles du jeu démocratique. Cette situation me fait dire : « J'ai mal à la France » ! (« Oh ! » sur les bancs du groupe GDR)

Cette France des Lumières qui était regardée et qui, aujourd'hui, n'est plus comprise.

Cette France qui ne prend pas conscience que le centre de gravité du monde s'est déplacé de l'Europe vers l'Atlantique Nord au XXe siècle et se situe aujourd'hui en Asie et dans les pays dits émergents.

Cette France conservatrice qui, en s'accrochant à ses acquis, croit préparer l'avenir sans voir la marche en avant du reste du monde.

Cette France qui fait peur à sa jeunesse, qui, elle, ne voit plus son avenir qu'à Toronto ou en Chine. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Elle sera de combien, votre retraite, monsieur Lecou ?

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Lecou

Cette France qui veut faire croire que moins on travaille dans la semaine et plus tôt on part à la retraite, mieux on vivra et qui ne cesse de transformer le travail en bagne. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Cette France qui ne respecte plus ses institutions démocratiques et qui dénie à la représentation parlementaire sa noble mission.

Dans ce contexte, on ne peut pas reprocher aux syndicats de jouer leur rôle, ni à des Français de faire grève et de manifester, mais on doit aussi respecter ceux qui continuent à travailler et ceux qui savent que l'immobilisme tuera notre régime de retraite.

Dans ce contexte, un parti qui se dit prêt à gouverner a une lourde responsabilité : celle de l'irresponsabilité qui, par tactique électorale, refuse le consensus que Martine Aubry avait, à l'origine, laissé présager en acceptant l'âge de soixante-deux ans ; celle de leurrer les gens en proposant d'allonger la durée de cotisation sans toucher à l'âge de la retraite ; celle d'user de son influence politique en envoyant les jeunes dans la rue ; celle d'avoir soufflé sur les braises et de laisser croire que la rue et les sondages peuvent remplacer le pouvoir démocratique ; celle, enfin, qui nie à la majorité d'avoir le courage de ses convictions… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le député, toute la grandeur de notre démocratie réside dans notre capacité à accepter pacifiquement nos différences au travers de la confrontation des idées et au travers du débat. Cela signifie que l'intimidation, le blocage et la violence sont la négation de la démocratie et du pacte républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Le Gouvernement a plusieurs devoirs, qu'il entend bien assumer. (« Négociation ! », « négociation ! » scandé sur les bancs du groupe GDR.)

Le premier de ces devoirs est de faire respecter la légitimité du Parlement parce que c'est la base même du pacte républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Je tiens à redire devant vous, simplement mais fermement, que le projet de loi sur la réforme des retraites, qui est en cours de discussion au Sénat, iraau terme de cette discussion et sera voté par le Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Ensuite, le Gouvernement doit garantir aux manifestants la possibilité d'exercer leurs droits en toute sécurité. Je vous indique, à cet égard, que nous avons mobilisé les forces de l'ordre avec des instructions extrêmement claires pour que les manifestations puissent se passer en toute sécurité, qu'il s'agisse des organisations syndicales, des salariés ou des lycéens.

Enfin, le Gouvernement doit assurer le fonctionnement normal de notre pays parce que personne n'a le droit de prendre en otages un pays tout entier, son économie et ses emplois. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Vous ne savez pas ce que signifie le mot « otage » !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Je mesure les difficultés rencontrées par beaucoup de nos concitoyens du fait des problèmes d'acheminement de carburant vers les stations-service dans beaucoup départements. Il est injuste de sanctionner les Français par des actions de blocage. La Constitution de notre République prévoit le droit de grève et nous devons le respecter. Elle ne prévoit pas le droit de bloquer le pays, son économie et ses emplois. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Le Gouvernement continuera donc à débloquer les dépôts qui sont bloqués par des manifestants et il mettra en oeuvre un plan d'acheminement du carburant vers les stations-service. D'ailleurs, dans quelques instants, avec Jean-Louis Borloo et plusieurs membres du Gouvernement, je recevrai tous les responsables de la distribution du carburant dans notre pays pour faire en sorte que les difficultés que rencontrent nos concitoyens soient rapidement levées. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Vous rencontrez les patrons, et pas les syndicalistes !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Mesdames et messieurs les députés, quelles que soient nos appartenances politiques, nous sommes tous comptables des équilibres de notre démocratie et nous sommes tous responsables du respect des règles de la République. (Mmes et MM. les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent longuement. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Monsieur le Premier ministre, pour la sixième fois, des millions de salariés, de familles, de jeunes (Protestations sur les bancs du groupe UMP) sont à nouveau dans la rue pour exiger que vous remettiez sur la table votre mauvais ouvrage de réforme des retraites. Malgré vos discours et ceux de vos ministres sur tous les moyens d'information, plus de sept Français sur dix soutiennent la mobilisation populaire. (« Ce n'est pas vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Ils ne vous croient pas. Ils savent que votre réforme frappe les salariés, les hommes, les femmes, les jeunes, et ce au profit de milliardaires. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Votre réponse n'est qu'arrogance, mépris, mise en cause du droit de grève, provocations, répression. C'est intolérable !

Je vous accuse, monsieur le Premier ministre, de provoquer le désordre, l'affrontement, la paralysie de l'économie du pays. (Protestations et claquements de pupitre sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Les enjeux financiers de la capitalisation au profit des groupes privés, déjà sur les rangs, comme le groupe « Malakoff Mederic » de Guillaume Sarkozy, sont, il est vrai, considérables : 50 à 100 milliards d'euros ! On comprend, dès lors, votre intransigeance. Les intérêts financiers sont colossaux pour ceux que vous représentez. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

L'intérêt du pays et de notre peuple exige, monsieur le ministre, que vous retiriez votre projet inacceptable et que vous engagiez une vraie négociation avec les syndicats. (Huées sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Votre entêtement, vos provocations, votre mépris pour la démocratie risquent d'avoir de graves conséquences pour notre pays et notre peuple. Un gouvernement responsable doit savoir écouter et entendre… (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Monsieur Gremetz, je salue la sérénité, le calme, la tranquillité,…

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

…et la mesure avec lesquels vous avez posé votre question.

Parmi les torrents d'insultes que vous avez déversés, …

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

…j'ai cru comprendre que vous m'interrogiez sur la réforme des retraites en cours et que vous souhaitiez savoir où en était, entre autres, son examen au Parlement. Dans la droite ligne de la réponse que vient de faire le Premier ministre à la question précédente, je vous indique qu'avec Éric Woerth, dont je vous prie, mesdames, messieurs, de bien vouloir excuser l'absence, nous poursuivons actuellement sa discussion au Sénat : celle-ci, qui se déroule normalement, est enrichissante.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Le texte a été modifié après l'avoir déjà été à l'Assemblée nationale et nous nous employons à ajuster ses dispositions de manière qu'il réponde à la vraie question de la réforme des retraites.

Je précise, puisque vous vous intéressez, à juste raison, monsieur le député, à ce qui se passe au Parlement, que nous avons amélioré le texte sur deux dispositifs importants.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Le premier permet aux mères de famille de trois enfants de disposer d'une retraite anticipée. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Le second, si vous avez l'obligeance de m'écouter quand je vous réponds, étend cette possibilité aux personnes handicapées. (Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

J'ai cru comprendre également, monsieur le député, que vous vous interrogiez sur les conditions du bouclage financier. Je tiens à vous rassurer sur ce point : comme nous avons pris des mesures qui vont effectivement avoir un coût, nous avons également pris des mesures de financement et de recettes qui permettront le bouclage de la réforme…

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

… à horizon de 2018, par le biais de prélèvements supplémentaires.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Comme vous le voyez, monsieur le député, on peut poser des questions calmement et y répondre calmement. Je vous suggère de méditer cela, car le sujet est important. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Ma question s'adresse M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Le mouvement de grève contre la réforme des retraites touche depuis plusieurs jours les raffineries de pétrole et, ces dernières heures, ce sont près de 2 500 stations-service qui connaissent la pénurie. Ainsi que l'a dit le Premier ministre, on ne peut pas laisser prendre en otages des millions de Français en les empêchant de travailler ou, tout simplement, de se déplacer.

Nos concitoyens sont les premiers touchés par ce mouvement puisque, devant les stations dans lesquelles il n'y a pas de pénurie, on voit se former des files d'attente considérables d'usagers qui ont besoin de carburant pour exercer leur activité professionnelle au quotidien.

Dans certaines de ces stations, le prix du gasoil ou du super à augmenté, ces dernières heures, de 10 centimes, 20 centimes, voire 30 centimes d'euro par litre.

Certains distributeurs peu scrupuleux n'hésitent donc pas à faire valser les étiquettes, spéculant sur le dos des usagers qui subissent déjà les effets indirects de cette crise sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

On ne peut pas, monsieur le ministre, rajouter de la crise à la crise et demander aux usagers, qu'ils soient particuliers ou entreprises, de payer doublement la facture de ce mouvement social.

Ce comportement spéculatif de certains distributeurs de carburant ne doit pas, en plus, entraîner une baisse de pouvoir d'achat, car 20 centimes de hausse du prix du litre de carburant, c'est près de 10 euros de plus qu'il faut payer sur la facture d'un plein. De tels agissements ne doivent pas continuer !

Alors que le Premier ministre vient de nous rassurer sur l'approvisionnement des stations-service, nous vous invitons, au Nouveau Centre, à la même fermeté dans la lutte contre ces inacceptables spéculations. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

D'avance, je vous remercie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Le Gouvernement, monsieur le député Philippe Vigier, partage votre souci d'éviter que des hausses de prix injustifiées, liées aux difficultés d'approvisionnement, ne viennent amplifier les blocages et aggraver les entraves à la liberté de circulation des Françaises et des Français. C'est la raison pour laquelle, avec Christine Lagarde, nous avons demandé à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, de se livrer à des contrôles pour vérifier si, oui ou non, les hausses de prix injustifiées dont vous faites état et que l'on peut constater doivent être sanctionnées. Ces contrôles de la DGCCRF ont débuté dès ce matin.

Je demande que les comportements abusifs que vous avez éventuellement constatés puissent être rapportés à la DGCCRF. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

On ne peut pas ajouter une crise à une crise. On ne peut pas ajouter à l'entrave à la liberté de circulation des hausses de prix abusives. Il faut bien, aujourd'hui, en être convaincu.

Dans le même temps, j'ai demandé à mes services qu'une évaluation chiffrée du bilan et des conséquences financières pour les petites et moyennes entreprises soit établie. (Mêmes mouvements.) Ce sont effectivement les premières gênées par ces entraves à la circulation. Ce bilan sera disponible dans les jours qui viennent et nous verrons, encore une fois, que ces petites et moyennes entreprises souffrent de blocages injustifiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Régis Juanico, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Depuis cinq mois, monsieur le Premier ministre, vous opposez à la mobilisation sans précédent des Français contre votre plan sur les retraites un mépris et une suffisance incompréhensibles. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Vous restez muré dans vos certitudes en refusant d'ouvrir, enfin, un véritable dialogue avec les syndicats.

La contestation de votre politique est aujourd'hui globale. Au-delà de vos mesures injustes sur les retraites, nos concitoyens, notamment les plus modestes, ne supportent plus de devoir se serrer la ceinture, quand les plus riches sont systématiquement épargnés ou protégés par vos faveurs budgétaires et le bouclier fiscal.

À la crise économique et sociale, vous ajoutez la crise morale. La connivence avec les grandes fortunes est la marque de fabrique de votre gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Après l'épisode du Fouquet's, la réunion des grands donateurs de l'UMP au Bristol, la collecte de fonds de M. Wauquiez, à Londres, en faveur de son micro-parti, l'affaire Woerth-Bettencourt a révélé des conflits d'intérêt en cascade. Sept mois après avoir qualifié de « stupide » la question de mon collègue Christian Eckert sur le cumul de ses fonctions de ministre du budget et de trésorier de l'UMP, M. Woerth a fini par mettre fin à cette invraisemblable confusion des genres.

Dans un instant, nous aurons à nous prononcer sur trois propositions de loi initiées par le groupe socialiste, radical et citoyen.

Le premier texte vise à interdire à un membre du Gouvernement d'être, en même temps, un dirigeant de parti. Ce texte établit des règles claires pour prévenir les conflits d'intérêts.

Le deuxième texte vise à interdire le cumul d'un mandat parlementaire avec l'exercice d'une fonction exécutive locale.

Enfin, le dernier texte vise à renforcer la transparence financière de la vie politique.

Aveuglée par son sectarisme, la majorité a refusé ces trois propositions de loi en bloc.

Ma question est donc simple : dans un élan de lucidité, allez-vous vous…

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

…permettre l'adoption de ces textes vers… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Huées sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le député Régis Juanico, je suis un peu surpris que vous vouliez prolonger la discussion que nous avons eue très largement jeudi dernier dans cet hémicycle et au cours de laquelle vous avez pu présenter vos idées sur les trois points que vous venez à l'instant de rappeler. Je veux donc, par conséquent, vous dire que, pour ce qui nous concerne, rien n'a changé.

Nous sommes favorables – c'est probablement le cas sur tous les bancs – à l'instauration d'une République irréprochable et nous militons en ce sens, plus particulièrement depuis trois ans. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) C'est nous qui avons changé la Constitution en juillet 2008, donnant de nouveaux droits à l'opposition, qui en profite d'ailleurs très largement en présentant de curieuses propositions de loi. C'est nous qui avons permis que le président de la commission des finances soit un membre de l'opposition. C'est nous qui avons également permis que le Premier Président de la Cour des comptes aussi soit quelqu'un qui ne nage pas dans nos eaux politiques. Voilà donc ce que nous avons fait.

Nous avons dit jeudi dernier que nous étions prêts à poursuivre sur cette voie et qu'il fallait laisser le groupe de travail nommé à l'initiative du Président de la République et présidé par le vice-président du Conseil d'État aller au terme de sa mission, avant la fin de l'année 2010. D'autre part, le Président de votre assemblée a lui-même créé une commission où tous les partis sont représentés. On verra donc, le moment venu, globalement, ce qu'il convient de faire. Cela vaut mieux que de faire de la polémique au petit pied. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Claude Greff, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Greff

Ma question s'adresse à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

La réforme des retraites a un objectif : sauver notre système de retraite par répartition, pour tous les Français et pour leurs enfants.

Le rendez-vous a été pris parce qu'il le fallait ! C'est de notre responsabilité. Et, dès le début de nos travaux, nous avons voulu être clairs, cohérents et transparents.

Depuis plusieurs jours, des grévistes extrémistes bloquent les raffineries de notre pays et, de ce fait, prennent en otages les Français qui ont besoin de carburant pour se rendre sur leur lieu de travail, mais également, par exemple, pour distribuer les repas aux personnes âgées, pour dispenser, s'agissant des infirmières à domicile, des soins quotidiens aux malades, pour assurer les transports sanitaires. Ce ne sont là que quelques exemples. Le droit de grève n'a jamais voulu dire le droit de bloquer. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Une nouvelle fois, la France est pénalisée par l'archaïsme de certains syndicats.

L'État a à sa disposition, si c'est indispensable, une réponse parfaitement légale : la réquisition. Et, monsieur le ministre, les députés du groupe UMP vous soutiendront dans cette action. La pénurie d'essence inquiète aujourd'hui nos concitoyens. Les problèmes à la pompe, très étendus ce week-end, se sont encore accentués hier, entretenus par la précipitation des automobilistes.

Hier, sur les 4 800 stations gérées par la grande distribution, 1 500 étaient en rupture d'un produit. le Gouvernement a activé un centre interministériel de crise pour assurer la pérennité du ravitaillement en carburant dans notre pays, car il existe plusieurs niveaux de réserves : par exemple, entre celles qui sont alimentées par les distributeurs et les raffineurs dans leurs dépôts, et celles gérées par un comité professionnel dans des centres spécialement prévus à cet effet et répartis sur l'ensemble du territoire.

Monsieur le ministre, pouvez-vous faire le point sur la situation et nous rassurer sur les stocks de carburant disponibles dans l'Hexagone ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Madame la députée, il y a une dizaine de jours, la question était assez simple : le Président de la République et le Premier ministre voulaient que le pays soit assuré en matière de carburant. La première mission a été la suivante : assurer les stocks et les importations de carburant de notre pays.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Une cellule a fonctionné vingt-quatre heures sur vingt-quatre depuis dix jours. C'est chose faite. (« Ah ? » sur les bancs du groupe GDR.)

La deuxième mission a consisté à assurer le déblocage républicain des différentes zones de stockage de carburant. Aujourd'hui, une vingtaine sur 219 sont bloquées. Le système continue à se dérouler.

La troisième mission concerne l'approvisionnement très précis de chacune des stations-service réparties sur l'ensemble du territoire national, difficulté logistique augmentée par l'inquiétude de nos concitoyens : dimanche dernier, en effet, la consommation à la pompe a augmenté de 500 %.

Le Premier ministre réunit périodiquement cette cellule de coordination pour le plan d'acheminement. À cette heure, madame Greff, un peu moins de 4 000 stations-service sur 13 000 sont en attente d'approvisionnement et 5 000 camions sont en train de circuler.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Le Roux

Pourquoi changer de Premier ministre, alors ? Gardez-le !

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Enfin, le Premier ministre a souhaité que tous les réseaux de distribution, qui sont nombreux, mutualisent leurs stocks de façon à améliorer l'acheminement.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

À seize heures, il y aura une réunion placée sous l'autorité du Premier ministre. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Le 8 octobre dernier, le prix Nobel de la paix 2010 était attribué à Liu Xiaobo pour ses « efforts durables et non violents en faveur des droits de l'homme en Chine ». Liu Xiaobo est un intellectuel chinois de renom et une ancienne figure de proue du mouvement démocratique de Tian An Men, réprimé dans le sang en 1989. Il purge actuellement une peine scandaleuse de onze ans de prison pour « subversion du pouvoir de l'État » après avoir été l'un des auteurs de la Charte 08, un texte réclamant une Chine démocratique.

Ce prix Nobel, ainsi que la réaction caricaturale de la dictature communiste chinoise, qui a qualifié cette récompense d'« obscène », vient courageusement briser un tabou, celui de la situation des droits de l'homme dans un pays qui est la deuxième puissance mondiale.

Comme ce fut le cas, jadis, des Nobel attribués aux dissidents des Pays de l'Est, au premier rang desquels Andreï Sakharov, ce prix fera son chemin dans l'opinion publique chinoise et rendra nécessaires des changements politiques inévitables. Il jouera un rôle de justice que la diplomatie internationale ne veut pas jouer, sacrifiant les principes politiques et moraux aux intérêts financiers et économiques.

Ce prix Nobel interpelle les autorités chinoises, mais aussi nos démocraties, et en particulier la France, pays des droits de l'homme. Au-delà de la situation des dizaines de milliers de prisonniers politiques chinois, nous ne pouvons pas rester silencieux sur les conditions qui entourent la captivité du Prix Nobel de la paix et le placement en résidence surveillée de son épouse, Liu Xia.

Ma question est simple : au-delà des déclarations de principe, quelles actions concrètes la France va-t-elle engager pour que Liu Xiaobo soit libéré et puisse recevoir en mains propres à Oslo ce prix prestigieux, acquis au péril de sa liberté ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé des affaires européennes.

Debut de section - PermalienPierre Lellouche, secrétaire d'état chargé des affaires européennes

Monsieur le député, le prix Nobel de la paix, qui a été décerné cette année à M. Liu Xiaobo, est un symbole fort de la défense des droits de l'homme partout dans le monde.

Le comité Nobel a fait son choix de manière totalement indépendante et il a voulu adresser un message fort à tous ceux qui militent pacifiquement pour la promotion et la protection des droits de l'homme à travers le monde.

S'agissant de M. Liu Xiaobo, avant même l'octroi de son prix Nobel, nous avions, comme l'Union européenne, exprimé notre préoccupation après son arrestation en 2009 et appelé à sa libération à plusieurs reprises. La France vient de réitérer son appel. Nous sommes et restons attachés à la liberté d'expression partout dans le monde.

En ce qui concerne l'épouse de M. Liu, Mme Liu Xia, nous avons également exprimé notre préoccupation. Nous suivons la situation avec attention ; notre attachement au respect de la liberté d'expression et de circulation partout dans le monde reste intact.

Je veux dire avec force devant la représentation nationale que si, sur la question de la remise du prix, nous ignorons les dispositions qui seront prises par le comité Nobel, nous souhaitons la remise en liberté de M. Liu Xiaobo. Nous souhaitons également que Mme Liu Xia soit laissée libre de ses mouvements, y compris de se rendre à l'étranger si elle le souhaite.

Je veux aussi souligner l'étroite coopération européenne sur ce sujet, la vision commune qui nous anime dans les relations avec la Chine dans le domaine des droits de l'homme. La Chine est un partenaire stratégique de la France et de l'Union européenne. Nous souhaitons développer nos relations avec ce pays et nous travaillons concrètement avec elle pour améliorer la situation des droits de l'homme en Chine. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Sandrine Hurel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Hurel

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, alors que des centaines de milliers de Français sont une nouvelle fois dans la rue pour protester contre votre réforme des retraites (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Hurel

…vous et votre gouvernement restez sourds aux inquiétudes que nos concitoyens expriment depuis plusieurs semaines ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, il faut réformer notre système de retraite ! (Exclamations sur les mêmes bancs.) D'ailleurs les Français l'ont très bien compris et jugent une réforme indispensable. Mais tout comme nous, ils savent qu'une autre réforme est possible, une réforme juste, durable et efficace ! (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.) C'est ce que proposent les socialistes (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP) un projet qui contrairement au vôtre ne fait pas reposer l'essentiel de l'effort sur les salariés, assure l'équilibre au-delà de 2018, prend véritablement en compte la pénibilité et non l'incapacité et répond à la question des seniors ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Au lieu d'accepter le dialogue sur cette réforme majeure, vous préférez rester dans le déni. Le déni de la pénurie : dimanche soir, vous affirmiez qu'il n'y aurait pas de pénurie dans le pays. Force est de constater que nos concitoyens ont de plus en plus de mal à trouver de l'essence et que la paralysie guette la France ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Déni de la réalité du mouvement social : depuis la rentrée de septembre, les Français sont de plus en plus nombreux à descendre dans la rue contre votre réforme. Vous préférez ignorer la mobilisation et parier sur la lassitude ! Déni du dialogue : vous persistez à rester, coûte que coûte, sur vos positions en affirmant dans tous les médias que la réforme sera votée en l'état, alors que la reprise de la concertation est la seule issue ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Déni du débat parlementaire (Très vives exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Hurel

…vous avez interrompu ici même les députés de l'opposition lors du débat sur les retraites, pensant que les Français passeraient outre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sandrine Hurel

Enfin, déni de la dégradation de l'image de la France, faite de violences urbaines et d'absence de dialogue !

Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin mettre un terme à la violence sociale dont vous êtes, avec M. Sarkozy, les seuls responsables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Madame la députée Sandrine Hurel, après un tel effort, je vous propose d'essayer, ensemble, de retrouver un tout petit peu de calme et de sérénité (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) pour tenter, une seconde fois, de répondre sans s'énerver à la question que vous venez de poser ! (Exclamations sur les mêmes bancs.) Je vais vous répondre le mieux possible, car j'ai eu du mal, comme M. Gremetz, d'ailleurs, à vous entendre !

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

On peut rester calmes et sereins pour traiter de ces problèmes ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Premier élément d'information, madame la députée, si Éric Woerth n'est pas présent aujourd'hui, c'est parce que la discussion se poursuit au Sénat. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous avez beau affirmer qu'il n'y a eu ni discussion ni négociation, mais une centaine d'heures environ se sont écoulées au Sénat et nous avons eu à l'Assemblée nationale un long débat. Vous me permettrez de vous dire, madame la députée, que je suis assez intéressé de vous entendre nous expliquer que vous avez manqué de temps de parole quand je me souviens des heures entières que nous avons passées ici (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), quand je me souviens que le nouveau règlement de l'Assemblée nationale vous a attribué 60 % du temps d'intervention (Protestations sur les bancs du groupe SRC)…

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

…alors que la majorité, qui est bien la majorité, disposait de 40 % ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Je me permets de vous rappeler, madame la députée, qu'aux questions d'actualité, si vous êtes aujourd'hui à parité avec la majorité, c'est grâce au règlement, voulu par le président de l'Assemblée nationale ! Alors, soyez gentille, ne nous faites pas de procès d'intention sur la forme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Enfin, sur le fond, je vous répondrai, madame la députée, nous avons modifié le texte à dix-huit reprises depuis le début de la discussion et que nous avons eu plus de cinquante réunions avec les organisations syndicales ! Alors, même dans l'énervement de la question, même si beaucoup de choses se disent rapidement, je vous en conjure, restons calmes, maîtres de nous ! La discussion continue et, comme l'a dit le Premier ministre, le texte sera voté au Sénat parce que c'est la légitimité du Parlement que de le faire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bernard Debré, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Luc Chatel, porte-parole du Gouvernement.

Monsieur le ministre, les grèves perdurent. Des grévistes expérimentés bloquent les raffineries et les dépôts d'essence. La France souffre. Mais voici que certains lycéens sont dans la rue. Quelles sont leurs motivations, eux qui prendront leur retraite dans cinquante ans (« Et alors ? » sur les bancs des groupes SRC et GDR) alors que la durée de vie, à cette époque, sera de quatre-vingt-dix à cent ans ? Comment se fait-il que les lycéens soient si vieux si jeunes, pendant que la jeunesse du monde entier travaille, participe à cette compétition mondiale, à la guerre économique que se livrent tous les pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

J'ai même entendu que certains demandaient que soient prises en compte dans le calcul de leurs retraites, leurs années d'études au lycée et en faculté !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Qui paiera leur retraite si l'État les prend en charge de zéro à vingt-cinq ans, puis de soixante à cent ans ?

Ne sont-ils pas intoxiqués ou peut-être poussés par le parti socialiste en mal de solution et qui joue l'affrontement pour exister ? (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Quand on n'a rien à dire, il est préférable de jouer la diversion.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Et les dinosaures comme vous, qu'est-ce qu'on en fait ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

J'ai envie de dire à ces jeunes : « Apprenez ! Cultivez-vous ! Inventez l'avenir pour ne pas le subir ! Battez-vous pour être les meilleurs ! Vous faites partie de la jeunesse du monde ! »

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

« N'attendez pas que les autres le construisent, vous risqueriez d'être abandonnés sur le bas-côté de l'Histoire ». (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

Pendant que les jeunes sont appelés à la manifestation, sans réel motif autre que les slogans des socialistes, des « casseurs » les infiltrent, détruisent et font régner la terreur ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Debré

N'assiste-t-on pas à une action concertée entre des jeunes et la gauche pour provoquer le pire ?

Les socialistes ne sont-ils pas les pompiers pyromanes et ne se servent-ils pas des jeunes comme paravent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

Monsieur le député Bernard Debré, dans une période de crise économique comme celle que nous traversons aujourd'hui, le devoir d'un gouvernement, c'est évidemment de préparer l'avenir de sa jeunesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

C'est ce que fait le Gouvernement en investissant comme jamais dans l'université avec, par exemple, le plan campus conduit par Valérie Pécresse.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

C'est ce que fait le Gouvernement en créant les conditions de l'autonomie pour la jeunesse, en augmentant le montant des bourses ou en créant un dixième mois de bourse. C'est ce que fait également le Gouvernement, monsieur Debré, en consolidant et en sauvegardant notre pacte social entre les générations.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

Je tiens à dire à la représentation nationale que la réforme des retraites, que vous venez d'évoquer, monsieur Debré, concerne, d'abord, la retraite de la jeunesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

Nous devons, en effet, empêcher qu'une fois de plus la facture de nos dettes soit envoyée à cette jeunesse. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Aujourd'hui, nous sommes, chaque mois, contraints d'emprunter pour payer un million et demi de pensions de retraite. Qui paiera la facture ? La jeunesse de notre pays ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Il est de la responsabilité du Gouvernement de sauvegarder ce système par répartition et de préserver le système de retraite dans notre pays !

Vous avez fait référence, monsieur Debré, à des tentatives de récupération, ici ou là, des mouvements de la jeunesse. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

L'Histoire est toujours sévère avec les responsables politiques qui manquent de courage politique.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. La CADES !

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

L'Histoire ne retiendra pas que, cet après-midi, les responsables politiques – Mme Aubry en tête, pour ce qui concerne le parti socialiste – ont participé aux défilés. Elle retiendra que, sur un sujet aussi important que les retraites, c'est le parti socialiste qui s'est défilé ! (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Depuis deux ans, monsieur le Premier ministre, le taux de chômage des jeunes atteint des sommets explosifs, particulièrement dans les quartiers populaires.

Le nombre de jeunes demandeurs d'emplois a augmenté de 30 % et le nombre de ceux qui recherchent un travail depuis plus d'un an de 72 %.

À la suite des travaux de la commission Hirsch, il y a un an, le Président de la République annonçait le plan « Agir pour la jeunesse », mais il n'aura duré qu'un printemps, puisque, dès juillet, vous avez fermé le robinet des contrats aidés pour les jeunes et les personnes les plus éloignées de l'emploi, et le projet de loi de finances pour 2011 annule le petit effort budgétaire engagé en faveur des jeunes dans le cadre du plan de relance – petit effort, puisqu'inférieur par exemple au chèque prévu pour M. Tapie...

Depuis trois ans, l'encouragement du cumul emploi-retraite, l'exonération des heures supplémentaires, qui se substitue de fait à 90 000 emplois nouveaux et coûte 3 à 4 milliards à l'État – c'est-à-dire plus que n'économise le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite, lequel a privé les jeunes de 100 000 entrées dans la fonction publique – sont autant de mesures défavorables à l'accès des jeunes au travail.

Aujourd'hui, s'y ajoute votre réforme des retraites, qui les conduirait à cotiser plus avec le recul de l'âge légal et l'apurement de la dette sociale, à percevoir moins du fait de la précarité de leurs parcours, et à être spoliés des 34 milliards du fonds de réserve des retraites qui leur étaient destinés.

Si les jeunes sont dans la rue, c'est qu'ils ont compris que votre réforme ne respectait ni le principe de justice sociale ni le pacte entre les générations.

Plusieurs députés du groupe UMP. C'est faux !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Monsieur le Premier ministre, la jeunesse ne veut pas, ne doit pas, ne peut pas être réduite à une variable d'ajustement. On ne peut pas défendre notre système de retraites par répartition sans un juste partage des efforts et sans une politique de l'emploi pour la jeunesse. Quand pensez-vous ouvrir la négociation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Depuis que cette crise a commencé, monsieur le député, nous avons eu avec tous les acteurs de terrain une obsession, nous battre pour éviter que les jeunes ne soient les premières victimes de la crise, et nous l'avons d'ailleurs fait parfois avec les régions, j'y reviendrai.

Avec Marc-Philippe Daubresse, notre obsession a été d'éviter les fausses solutions, celles qui, par le passé, consistaient, dans les crises, à encourager nos jeunes à rester inutilement sur les bancs de la faculté pour les sortir des statistiques du chômage.

Nous avons au contraire tout mis en oeuvre pour trouver des solutions professionnalisantes comme l'alternance ou des partenariats avec des métiers qui embauchent et des filières telles que l'assurance. Je pense aussi aux métiers de commerciaux, ou aux professions de la santé, avec lesquelles nous avons passé des partenariats pour qu'on donne leur chance aussi à des jeunes sans expérience, car on sait que c'est souvent un barrage.

Depuis un an, le taux de chômage des moins de vingt-cinq ans a reculé, et il a commencé à reculer avant le taux général. La baisse est aujourd'hui de près de 2 %.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Pour les contrats d'alternance, cette année sera meilleure que l'année dernière.

Ces résultats, vous ne devez d'ailleurs pas les juger si mauvais que cela au fond, puisque nous avons signé il y a une dizaine de jours un partenariat avec l'association des régions de France, où les élus socialistes ne sont pas, je crois, totalement minoritaires, ce qui montre bien que vous soutenez cette politique et le travail que nous avons réalisé pour l'emploi des jeunes.

Au cours des deux ans qui se sont écoulés, quelle proposition neuve aurait fait le parti socialiste en matière d'emploi des jeunes ?

De nombreux députés du groupe UMP. Aucune !

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Il n'y en a aucune. Plutôt que d'essayer d'instrumentaliser les inquiétudes, vous seriez plus crédible si vous aviez travaillé concrètement pour l'emploi des jeunes. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Dominique Le Mèner, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Le Mèner

Ma question s'adresse à Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, et j'y associe ma collègue FabienneLabrette-Ménager.

La nuit dernière, au Mans, un collège a été entièrement détruit par un incendie volontaire avec effraction et engin incendiaire. Monsieur le ministre, vous étiez présent ce matin à nos côtés sur les lieux de ce drame. Vous avez pu constater la profonde émotion de toute la communauté éducative, des élus, des parents d'élèves et des élèves eux-mêmes, particulièrement bouleversés par cet acte criminel. Un professeur nous a d'ailleurs déclaré, les larmes aux yeux, que cet agissement de quelques cinglés portait atteinte aux valeurs fondamentales de notre république que symbolise plus que tout autre un établissement scolaire.

La réforme des retraites est une réforme difficile, mais elle est nécessaire parce qu'elle préserve le système par répartition auquel chacun de nous est attaché. Si nous concevons le fait que nous ne soyons pas tous d'accord avec le projet présenté et respectons le droit de manifester – c'est ainsi que fonctionne la démocratie –, cela ne permet pas tout. Les valeurs de notre République et, au-delà, notre pacte républicain ne peuvent pas être foulés aux pieds par quelques-uns.

Il ne s'agit pas de faire d'amalgame mais il ne faut pas non plus être naïf. Certains dans l'opposition nous parlent d'un mouvement pacifique de contestation, mais dans quel monde vivent-ils ? Depuis plusieurs jours, ce sont des scènes de violence que l'on observe un peu partout en marge des manifestations, comme hier à Nanterre. Comment s'étonner dès lors de cette montée de violence sans y voir le résultat des tentatives d'instrumentalisation des plus jeunes ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Mes chers collègues, l'ensemble des républicains de cette assemblée ont le devoir de condamner ces actes. La communauté éducative…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

Cette nuit, au Mans, monsieur le député, le collège Val d'Huisne a été incendié et totalement détruit et, à l'heure où je vous parle, il semble que cet incendie soit de nature criminelle.

Je me suis effectivement rendu ce matin au Mans, pour partager la grande émotion de la communauté éducative, profondément attachée à ce collège mais aussi, au-delà, à l'institution scolaire.

Je condamne évidemment avec la plus grande fermeté cet acte grave, inqualifiable et lâche parce que, lorsque l'on s'attaque à un collège, on s'attaque à l'école de la République, aux valeurs de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Vous avez également indiqué que, depuis plusieurs jours, des personnels de l'éducation nationale étaient agressés et que l'on s'attaquait à des établissements scolaires. À ceux qui souhaitent opposer la jeunesse au Gouvernement, à ceux qui cherchent aussi à manipuler les jeunes pour des raisons politiques,…

Plusieurs députés du groupe GDR. Arrêtez !

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

…je veux dire devant la représentation nationale que le Gouvernement ne tombera pas dans ce piège. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Le Gouvernement ne fait pas l'amalgame entre les lycéens et les casseurs. Il y a d'un côté des lycéens, qui s'interrogent sur leur avenir et, de l'autre, des casseurs, des voyous, qui s'attaquent à ce que représentent nos institutions. Cela, nous ne pouvons pas le tolérer et le Gouvernement ne le tolérera pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Les casseurs, vous les connaissez ! Ils sont tous connus de la police.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Pascale Crozon, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

Monsieur le Premier ministre, la France est une république laïque ; c'est l'article 1er de la Constitution. Elle garantit l'égalité de tous, indépendamment des convictions religieuses ou philosophiques, et elle suppose la neutralité des agents de l'État, qui ne peuvent manifester d'appartenance religieuse dans l'exercice de leur fonction. Le Président de la République ne saurait échapper à cette règle fondatrice de notre vivre ensemble.

Que le Président de la République rencontre le pape, c'est sa responsabilité de chef d'État. Que Nicolas Sarkozy pratique en privé la religion catholique, c'est sa liberté de conscience. Mais lorsqu'une visite officielle revient à faire pénitence, prévoit un « moment de prière » (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Crozon

…et que le chef de l'État se signe devant les caméras de télévision, nous sommes alors face à un dangereux mélange des genres. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Cette visite n'a d'autre objectif qu'un symbole à visée électorale. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Il est particulièrement choquant de se représenter la nation comme une juxtaposition d'électorats communautaires, comme il est particulièrement choquant de croire qu'il suffit d'instrumentaliser une foi pour recueillir des suffrages. (Mêmes mouvements.)

Mais ce qui est en cause, monsieur le Premier ministre, ce ne sont pas seulement les démonstrations de foi. Ce qui choque les Français, et pas seulement les catholiques, c'est la morale : c'est le climat des affaires, la collusion avec les milieux d'argent et, parallèlement, le sort réservé aux plus fragiles, la suspicion, surtout, qui pèse sur les étrangers, ou le traitement réservé aux Roms. (Mêmes mouvements.)

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple : comment comptez-vous faire respecter le principe constitutionnel de laïcité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe GDR. – Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Madame la députée Pascale Crozon, vous vous référez à juste titre à l'article 1er de notre constitution, mais la laïcité, ce n'est pas le rejet, ce n'est pas le refus, ce n'est pas la négation des autres religions. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Le principe de séparation des pouvoirs ne signifie pas que la République ignore les cultes et les religions. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Garantir une laïcité apaisée, c'est respecter et faire respecter ceux qui croient au ciel comme ceux qui n'y croient pas.

Plusieurs députés du groupe SRC. C'est ce qu'elle a dit !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

C'est la raison pour laquelle, en tant que ministre des cultes, j'entretiens un dialogue permanent et régulier avec les différentes autorités religieuses.

Il était normal que le Président de la République réponde à l'invitation du pape Benoît XVI à se rendre, le 8 octobre, au Vatican.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Cela s'inscrit dans la tradition suivie par les chefs d'État de la Cinquième République. Souvenez-vous que le général de Gaulle s'est rendu au Vatican en 1959 pour une visite d'État et qu'il s'est agenouillé devant le pape Jean XXIII. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Tradition poursuivie par les présidents Giscard d'Estaing, Mitterrand (« Non ! » sur les bancs du groupe SRC) et Chirac. Ils se sont tous rendus au Vatican pour s'entretenir avec le pape Jean-Paul II.

Qu'y a-t-il donc de choquant à ce que le Président de la République se soit rendu au Vatican ? Est-ce parce qu'il a effectué un signe de croix ? Lorsqu'un président, un ministre, un député ou un maire se rend dans une synagogue, ne porte-t-il pas une kippa ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Quand il se rend dans une mosquée, ne prend-il pas la précaution d'ôter ses chaussures ? (Mêmes mouvements.) Il faut éviter les polémiques d'un autre âge qui offrent le visage d'une intolérance que la France d'aujourd'hui ne peut pas accepter ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. Plusieurs députés de l'UMP se lèvent pour applaudir.)

Plusieurs députés du groupe SRC. À genoux !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Bouvard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Monsieur le ministre des comptes publics, l'Assemblée a commencé hier l'examen en séance publique du projet de loi de finances pour 2011, qui est le premier budget que nous examinerons en sortie de crise.

Il y a trois ans, le Premier ministre avait rappelé l'importance de l'équilibre des comptes publics. Il avait averti qu'un pays pouvait se trouver défaillant et en difficulté devant ses prêteurs. Aujourd'hui, le constat est fait que ce type de situation est possible y compris sur le continent européen.

La crise a asséché les recettes, elle a également conduit à mobiliser des ressources publiques pour le soutien à l'économie et à nos concitoyens les plus défavorisés.

Mais si elle a creusé les déficits, elle n'est pas seule responsable de la situation actuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Nous avons pendant des décennies, majorité comme opposition, présenté des budgets en déficit. Nous avons ajouté de la dette à la dette. Nous n'avons pas maîtrisé les dépenses de personnel.

Le constat est simple : aujourd'hui, la dette s'élève à 45 milliards d'euros. Le moindre relèvement des taux d'intérêt de 100 points de base nous coûterait 2 milliards. Les dépenses de personnel représentent 31 % du budget de l'État. Les pensions s'accroissent chaque année au rythme de 4,5 %, pour atteindre cette année 36 milliards, et elles sont versées de droit.

Monsieur le ministre, dans ce contexte, il n'y a pas d'autre solution que de réduire la dépense publique...

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Monsieur le député, je vous remercie tout d'abord d'avoir mis en lumière – parce que certains semblent l'avoir oublié – la puissance de la crise et les traces qu'elle a laissées sur les caisses de l'État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Nous avons, je le rappelle, connu un effondrement de nos recettes. L'État a perdu 54 milliards d'euros pendant l'exercice 2008-2009. Rien que sur l'impôt sur les sociétés, nous avons perdu 28 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Combien l'État a-t-il perdu à cause du bouclier fiscal ?

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Le choix du Gouvernement, à l'époque, aurait pu être différent. Il aurait pu, par exemple, augmenter les impôts, choix écarté par le Président de la République et le Gouvernement pour réaffirmer un engagement pris en 2007 et fixer une ligne conductrice jusqu'au bout de ce mandat.

C'est le sens de la matrice de la préparation budgétaire que j'ai l'honneur de défendre au nom du Premier ministre. Le choix d'une augmentation des impôts a été écarté.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Nous ne touchons ni à l'impôt sur les sociétés ni à l'impôt sur le revenu ni à la TVA. Nous intervenons en revanche de manière déterminée sur toutes les sources de réduction de dépenses.

Ainsi, pour la première fois, nous gelons en valeur, hors héritage du passé, c'est-à-dire hors dette et pensions, les dépenses de l'État. Cela signifie beaucoup d'efforts de la part de l'État, dans son train de vie, dans son organisation, sur les crédits d'intervention, sur les subventions…

De même, les dépenses sociales passeront pour la première fois l'année prochaine sous les 3 %, dans l'objectif national des dépenses d'assurance maladie. Et nous sommes crédibles car, pour la première fois depuis 1997, un ONDAM est enfin respecté.

Enfin, la troisième source de dépenses maîtrisée et tenue est celle des dotations de l'État vis-à-vis des collectivités locales, mais cela hors FCTVA, pour protéger l'investissement local, et hors Fonds de péréquation, ce qui était un engagement du Gouvernement.

Vous le voyez, monsieur le député Bouvard, nous aurons, au cours des jours et des semaines à venir, beaucoup d'occasions de parler de dépenses publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, cette nuit, mon collègue l'a rappelé, le collège Val d'Huisne, situé dans le quartier des Sablons au Mans, dans ma circonscription, a été ravagé par un incendie. Mais il est honteux de pratiquer l'amalgame avec ceux qui manifestent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Les premiers constats laissent à penser qu'il s'agit d'un acte criminel, qui comme tel sera poursuivi et dont les auteurs seront condamnés. Rien d'autre ne peut aujourd'hui être dit sur les circonstances de ce drame matériel, qui heureusement a épargné les nombreux habitants du quartier. (De nombreux députés du groupe UMP quittent l'hémicycle.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Écoutez, mes chers collègues ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Ce collège, classé en ZEP, a fait partie des établissements bénéficiant d'aides pour assurer plus de réussite aux élèves des quartiers populaires. Comme beaucoup d'autres, il a besoin d'un engagement fort de la nation pour continuer à accueillir au sein de la ville et du quartier ses 250 gamins ! L'engagement de l'équipe enseignante, que je connais bien parce que j'ai enseigné à leurs côtés, est fort ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

L'amélioration des résultats des élèves est due à une bonne coordination entre écoles et collège, et à une personnalisation de l'accompagnement que permet un établissement de proximité et de taille humaine.

Je souhaite, monsieur le ministre, comme je l'ai rappelé ce matin, que cet incendie ne soit pas le moment de la fin du collège mais le point de départ de sa renaissance. (Mêmes mouvements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Cet établissement était présenté, il y a quelques mois, comme en sursis et susceptible de fusionner. Mais nous devons aujourd'hui maintenir les élèves ensemble, conforter l'équipe pédagogique, commencer sa reconstruction là où il doit être, c'est-à-dire près des élèves et de leurs familles.

Monsieur le ministre, malgré les tensions et les difficultés, l'éducation nationale n'a pas le droit de déserter les quartiers difficiles ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et sur de nombreux bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Luc Chatel

Madame la députée, nous étions ensemble ce matin au Mans, devant les décombres du collège Val d'Huisne, et j'ai rendu hommage à la responsabilité de l'ensemble des élus, dont le maire du Mans et le président du conseil général, qui, dès cette nuit, se sont mobilisés autour des familles, des jeunes de ce quartier et de la communauté éducative. Ils ont fait preuve d'un grand sens des responsabilités et d'un esprit de corps : lorsque la République est attaquée, c'est un devoir pour tous les élus, quelle que soit leur sensibilité, d'y répondre.

Ce matin, j'ai également rencontré avec vous les membres de la communauté éducative, très touchés par ce drame parce que, pour des enseignants, c'est le projet de toute une vie qui s'en va en fumée, et, pour des familles qui veulent que leurs enfants s'en sortent grâce à l'école et au collège, c'est l'espoir de toute une vie qui, lui aussi, est parti en fumée.

Le préfet de la Sarthe doit réunir cet après-midi l'ensemble des acteurs – élus locaux, principal du collège, inspecteur d'académie – afin de trouver les meilleures solutions pour les élèves de ce collège. Ce seront des solutions de court terme pour après les vacances de la Toussaint, et solutions plus pérennes pour que le projet de ce collège, au-delà de ce drame, puisse continuer à fonctionner.

J'ai trouvé ce matin une communauté éducative très rassemblée, très unie, face à ce drame. Je tenais à lui rendre hommage. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Gaël Yanno, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaël Yanno

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la santé et des sports.

L'Organisation mondiale de la santé a décidé que le 17 octobre serait la Journée mondiale du don d'organes et de la greffe. Au surlendemain de cette journée, j'appelle votre attention sur la rupture d'égalité face aux greffes d'organes entre Français métropolitains et Français d'outremer.

En effet, à l'heure actuelle, plusieurs dizaines de Français résidant dans les collectivités du Pacifique doivent s'installer à des milliers de kilomètres de chez eux, en métropole, pour attendre, souvent plusieurs années, une greffe d'organes. En plus de la souffrance liée à la maladie, ces Français du bout du monde doivent aussi affronter l'éloignement familial et souvent la rupture professionnelle.

Si une telle situation résultait de l'absence de structures médicales adaptées ou de personnels insuffisamment formés, elle apparaîtrait humainement douloureuse mais difficilement évitable. Mais quand on sait que ces contraintes imposées à des personnes déjà éprouvées par la maladie s'expliquent par des retards incompréhensibles dans l'application de la loi, cette situation devient alors insoutenable : le décret qui définit les conditions dans lesquelles est établi le constat de mort ainsi que les modalités de fonctionnement du registre du refus en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et à Wallis-et-Futuna n'a toujours pas été publié. En l'absence d'un tel décret, il faut bien comprendre que c'est toute l'activité de prélèvement d'organes qui est rendue impossible dans les collectivités françaises du Pacifique.

Je souhaite donc connaître, madame la ministre, la date à laquelle vous comptez publier le décret nécessaire à l'activité de prélèvement d'organes dans ces outre-mer ; en d'autres termes, à quelle date ces Français déjà frappés par la maladie pourront enfin se faire soigner à proximité de leur domicile ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports

MonsieurGaël Yanno, c'est l'ordonnance du 18 décembre 2008 relative à la protection des droits des personnes en matière de santé qui encadre les pratiques de prélèvement et de greffe. Le décret que vous appelez de vos voeux et qui va permettre les activités de greffe en Nouvelle-Calédonie est maintenant rédigé, et sa parution aura lieu sous quelques jours. Cela va donc permettre l'activité de greffe, mais aussi en particulier le prélèvement de reins en Nouvelle-Calédonie. C'est extrêmement important. Vous l'avez souligné : il y a des équipes de qualité dans l'archipel.

Évidemment, l'extension de l'application du dispositif était nécessaire, mais il fallait aussi des adaptations du texte, adaptations portées par le ministère de l'outre-mer : celles-ci concernent la compétence du tribunal d'instance, chargé de recueillir le consentement des donneurs, et le comité d'experts, chargé d'éclairer leur consentement. La ministre de l'outre-mer va consulter très rapidement les collectivités territoriales, puis l'affaire va revenir devant le Conseil d'État ; Mme Penchard et moi allons tout faire pour que les décisions soient prises extrêmement vite. Je vous indique que l'Agence de biomédecine viendra en appui de toutes les décisions techniques qu'il faut prendre en ce domaine.

Le sujet que vous abordez est extrêmement important. J'ai d'ailleurs veillé, dans le cadre de la préparation des lois de bioéthique dont je présenterai demain la révision en conseil des ministres, à ce que toute disposition soit prise pour assurer le plus rapidement possible l'extension à l'outre-mer de toutes les mesures contenues dans cette législation.

Nous voilà, monsieur Gaël Yanno, au bout du chemin. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Don d'organes en Nouvelle-Calédonie

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote au nom des groupes et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la gestion de la dette sociale (nos 2781, 2825, 2821, 2819).

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Luc Préel, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, mes chers collègues, alors que notre protection sociale n'est pas financée et que les déficits s'accumulent chaque année, le projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale prévoit de transférer à la Caisse d'amortissement de la dette sociale 130 milliards d'euros, de procéder à des prélèvements nouveaux et, surtout, de prolonger de quatre ans la durée de vie de la CADES.

La CADES a été créée par Alain Juppé en 1996 pour reprendre la dette sociale, qui s'élevait à l'époque à 21 milliards d'euros. Le financement était assuré par une contribution à base large, la CRDS, au taux de 0,50 %. Cette caisse devait avoir une durée de vie limitée : le remboursement étant censé s'achever en 2009, elle ne devrait plus exister. Mais, en 1998, Martine Aubry lui a transféré 13 milliards d'euros sans augmenter les prélèvements, prolongeant ainsi sa durée de vie de cinq ans, c'est-à-dire de trois ans par année de déficit. Elle a été imitée en 2004 par Philippe Douste-Blazy, qui lui a transféré 50 milliards d'euros et a prolongé sa durée de vie de sept ans, soit pas moins de douze ans au total.

De nombreux parlementaires ont dénoncé cette dérive. C'est pourquoi, au nom de l'UDF et avec Yves Bur, nous avons soutenu, en mai 2005, l'amendement de Jean-Luc Warsmann selon lequel tout nouveau transfert de dette devrait s'accompagner d'une recette correspondante. Le Conseil constitutionnel a ensuite donné une valeur organique à cette disposition, qui constitue une mesure de saine gestion.

À ce titre, en 2009, un nouveau transfert de 34 milliards d'euros a été accompagné d'une recette de 0,2 % de CSG provenant du FSV, lequel est ainsi devenu déficitaire alors qu'il était jusqu'alors équilibré.

Depuis son origine, la CADES a donc repris 135 milliards, dont 48 ont été amortis, et l'apurement est prévu en 2021. Toutefois, hélas, les déficits de la protection sociale demeurent. Ce projet de loi prévoit donc le transfert à la CADES des déficits de 2009 et 2010 ainsi que du déficit prévisionnel pour 2011, soit 68 milliards.

Le Nouveau Centre approuve le principe de transfert du déficit à la CADES à deux conditions : premièrement, qu'il soit financé par une recette pérenne et simple, donc par la CRDS ; deuxièmement que, à l'avenir, à partir de 2012, nous votions des lois de financement de la sécurité sociale en équilibre afin de ne pas recréer des déficits.

Par ailleurs, la loi sur les retraites en cours de discussion prévoit que l'équilibre sera atteint en 2018 et, par conséquent, que, d'ici à cette date, 62 milliards de déficits seront transférés à la CADES, ce qui sera financé par le versement annuel de 2,1 milliards provenant du fonds de réserve des retraites.

Là encore, le Nouveau Centre approuve ce transfert à deux conditions : que l'équilibre financier soit effectivement atteint en 2018, ce dont nous doutons ; et qu'une réforme systémique menant à l'instauration d'un régime à points soit rapidement engagée.

Comment la reprise des 68 milliards d'euros sera-t-elle financée ?

À l'origine, trois recettes, dont deux non pérennes, étaient envisagées. À la suite de tractations de couloir, un amendement prévoit que ces recettes non pérennes seront transférées à la branche famille et que 0,2 % de la CSG jusqu'à présent affecté à la branche famille sera, lui, transféré à la CADES. Tant mieux pour la CADES ; mais la branche famille, déjà déficitaire, en sera fragilisée. Les déficits vont croître, et il faudra bien les transférer à nouveau à la CADES. Le Nouveau Centre n'approuve pas ce bidouillage.

Mais, surtout, il est prévu de prolonger de quatre ans la durée de vie de la CADES, ce que nous dénonçons.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

Quatre ans pour trois ans de déficit, c'est moins pire que ce qu'avaient fait Martine Aubry et Philippe Douste-Blazy. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Et quatre ans, ce n'est certes pas une génération. Mais, ces années s'ajoutant aux précédentes, la durée de vie de la caisse aura en réalité été prolongée de 2009 à 2025, soit seize ans au total. Et, surtout, nos dépenses de 2009, 2010, 2011 seront payées de 2021 à 2025, ce qui est inacceptable : chaque génération doit payer ses propres dépenses.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Préel

La loi organique actuelle, prévoyant une recette correspondant à tout nouveau transfert, nous satisfait. Il s'agit du reste du seul verrou vertueux qui existe dans notre législation. Et vous voulez le faire sauter, monsieur le ministre. La commission des lois et son président et rapporteur, Jean-Luc Warsmann, s'y sont opposés, de même que la commission des affaires sociales et son rapporteur, Yves Bur. La commission a rejeté à l'unanimité, lors de l'examen au titre de l'article 88, l'amendement de Marie-Anne Montchamp, qui a cependant été adopté de justesse en séance publique.

Pourtant, une augmentation modeste de la CRDS permettrait de respecter nos principes. Elle ne pèserait pas sur le pouvoir d'achat. Les services de Bercy ont estimé son incidence à 0,05 % du PIB. L'argument relatif au pouvoir d'achat serait recevable si toutes les augmentations étaient gelées, ce qui, hélas, n'est pas le cas. Les impôts locaux, les tarifs EDF, le forfait journalier, les franchises médicales, les déremboursements de médicaments, les cotisations des assurances complémentaires pèsent sur le pouvoir d'achat. Même le coup de rabot sur les niches sociales et fiscales, que le Nouveau Centre approuve, aboutit bien évidemment au versement d'impôts ou de cotisations supplémentaires.

Par conséquent, si nous approuvons le transfert des déficits à la CADES, à hauteur de 130 milliards – somme considérable –, et l'utilisation du Fonds de réserve des retraites, à condition que les prochaines lois de financement soient votées en équilibre, que la branche vieillesse soit effectivement équilibrée en 2018 et que s'engage rapidement une réforme systémique des retraites, le Nouveau Centre ne peut accepter la fragilisation de la branche famille par le prélèvement de 0,2 % de CSG. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Surtout, le Nouveau Centre désapprouve la prolongation de la durée de vie de la CADES, qui sera ainsi passée de 2009 à 2025 et qui revient, je le répète, à faire payer nos déficits de 2009, 2010, 2011 par la génération qui sera en activité entre 2021 et 2025.

C'est pourquoi, avec tristesse et conviction, le Nouveau Centre votera contre ce projet de loi organique. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe UMP, la parole est à Mme Isabelle Vasseur.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, par définition supérieur aux lois ordinaires, le projet de loi organique, d'apparence purement technique, que nous sommes appelés à voter est cependant d'une importance majeure dans la mesure où il concerne le financement de la dette sociale.

Lors de nos débats, il est un point qui a fait consensus sur tous les bancs de l'hémicycle : il est urgent d'éponger la dette et de rééquilibrer les comptes sociaux, sans transmettre aux générations futures le poids de nos dettes actuelles.

Rappelons d'abord le contexte. D'une part, la crise a entraîné une perte drastique de recettes pour la sécurité sociale ; d'autre part, les comptes sociaux sont dans le rouge : 80 milliards d'euros de déficits entre 2009 et 2011, dont 34 milliards de déficits de crise ; 62 milliards de déficit de la branche vieillesse pour la période qui va de 2011 à 2018, soit 130 milliards d'euros de déficits.

J'entends déjà l'opposition nous reprocher dix ans de politique sociale désordonnée.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

C'est se montrer quelque peu réducteur. Il est impératif de dire la vérité ; or vous oubliez de préciser que nous étions alors en pleine croissance et que l'ONDAM atteignait 6 à 7 %…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Vous reconnaissez que nous avons équilibré les comptes !

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

…, contre 3 % en 2010 – première et seule année où il a été respecté – et 2,9 % en 2011, puisque tel est le chiffre que vous nous avez annoncé, monsieur le ministre.

La gauche a donc engrangé les fruits de l'embellie économique des années 1998 à 2000, sans faire aucun effort en matière de dépenses, qu'il s'agisse de maladie ou de retraite. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Ce sont ces années d'inaction que nous devons payer aujourd'hui. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

C'est nous qui maîtrisons la dépense et nous qui faisons les réformes, précisément celle de la retraite. Vous, vous vous posez sans cesse des questions. Nous, nous cherchons et trouvons les réponses.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Ainsi, le Gouvernement assume ses responsabilités et propose une solution durable au problème de la dette sociale.

Après l'installation d'une commission de la dette sociale, qui réunissait à parité sept sénateurs et sept députés, des réflexions intenses ont été engagées et toutes les propositions ont été étudiées avec attention. Nous avons ainsi pu nous retrouver autour de trois grands principes : premièrement, pas d'augmentation des prélèvements obligatoires – ce n'est pas un dogme, mais une simple mesure de bon sens si nous ne voulons pas casser la reprise de la croissance ; deuxièmement, pas de report sur les générations futures ; troisièmement, pas d'immobilisme – nous n'attendrons pas 2012.

La solution durable et équilibrée, qui ne remet pas en cause – car nous ne l'aurions pas accepté – le principe de l'ordonnance de 1996 selon lequel il ne peut y avoir de nouveau transfert de dettes sans recettes équivalentes…

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

…cette solution consiste en trois points : d'abord, un allongement exceptionnel et limité à quatre ans de la CADES, de 2021 à 2025, pour amortir le déficit de crise de 34 milliards d'euros ; ensuite, le décaissement anticipé du Fonds de réserve pour les retraites pour les déficits à venir de la branche vieillesse 2011-2018, soit 62 milliards d'euros – l'opposition nous a accusés de piller le FFR mais ce fonds n'est-il pas destiné à cet usage ? – ; enfin, la poursuite de la réduction des niches fiscales pour couvrir les 34 milliards d'euros de déficits structurels.

Le Parlement a amélioré le texte en adoptant notamment, au Sénat, deux amendements de M. Vasselle, relatifs à la clause de garantie de ressources et de retour à meilleure fortune, et, à l'Assemblée nationale, l'amendement de Mme Marie-Anne Montchamp, rapporteure pour avis, sur la pérennité des ressources.

J'ajoute que ce projet de loi organique forme un tout très cohérent avec la réforme des retraites que l'Assemblée nationale a votée et qu'il faut désormais financer.

Monsieur le ministre, votre projet de loi apporte une réponse globale, avec un allongement très modéré de la CADES, pour prendre en charge des déficits passés, présents et à venir, dont les déficits vieillesse jusqu'en 2018, date du retour à l'équilibre.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

C'est donc avec lucidité et avec le sens des responsabilités qui anime sans cesse la majorité, et dont nous aimerions que l'opposition s'inspire, que le groupe UMP votera le projet de loi organique. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Alain Vidalies, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Le débat parlementaire donne parfois lieu à des situations singulières. Il y a quelques minutes, pendant la séance de questions au Gouvernement, M. Chatel, des trémolos dans la voix, a défendu la politique du Gouvernement en matière de retraites, expliquant que, si nous ne le suivions pas, ce serait la jeunesse de notre pays qui paierait la facture. Et voilà que la majorité s'apprête à voter un texte qui fait exactement le contraire, qui va renvoyer à la jeunesse de notre pays une facture sociale de 130 milliards d'euros. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

La représentante de l'UMP vient de déclarer que la majorité, elle, cherchait des solutions. Penser à faire un emprunt pour combler une dette, cela n'a pas dû lui demander beaucoup de réflexion. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

Nous avons été confrontés à la question de la dette sociale en 2005. À l'époque, le Gouvernement avait déjà imaginé de repousser de plusieurs années la durée d'amortissement de la CADES, c'est-à-dire, en fait, de renvoyer la facture aux générations futures. La majorité avait émis des réserves, mais le texte, qui est devenu une loi organique, avait été voté à l'unanimité – quand on lui présente des textes responsables, l'opposition n'hésite pas à les voter avec la majorité. Le texte que vous nous demandez de remettre en cause aujourd'hui est donc aussi le nôtre.

Le Conseil constitutionnel avait bien indiqué que ce texte était une application directe de la Constitution et qu'il avait valeur de loi organique. Aujourd'hui, nous devons donc modifier la loi organique. Je sais bien que faire et défaire, c'est toujours travailler, mais nous atteignons là, me semble-t-il, les limites de l'exercice.

Depuis l'origine, c'est-à-dire depuis 1996, la CADES n'a emprunté que 134 milliards, si j'ose dire. Aujourd'hui, il s'agit d'emprunter, en une seule fois, 130 milliards, et d'allonger la durée de remboursement de quatre ans, de 2022 à 2025. Le ministre affirme qu'il ne s'agit pas d'un transfert aux générations futures. Mais, monsieur le ministre, ceux qui commenceront à travailler en 2022 ont quatre ans aujourd'hui. Il s'agit bien des futures générations à qui nous allons transmettre cette dette.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

La solution que vous préconisez est totalement irresponsable. C'est vrai que nous nous retrouvons dans une situation politique très particulière pour la vie de notre Parlement : la commission saisie au fond et son rapporteur ont voté contre le texte, de même que la commission saisie pour avis et son rapporteur. Et je ne peux mieux faire, d'ailleurs, pour argumenter, que de reprendre une ou deux phrases des rapporteurs, notamment de M. Warsmann, président de la commission des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Il dit ceci – c'est exactement ce que nous pensons : « On va emprunter pour faire payer une partie du prix des boîtes de médicaments consommés actuellement par nos concitoyens, une partie des soins médicaux et des prestations sociales, par les Français qui travailleront au-delà de 2022, c'est-à-dire faire des emprunts à long terme à quinze ans pour payer des déficits de fonctionnement. Lancer des emprunts lorsque l'on sait que l'on n'a pas l'argent nécessaire pour les rembourser, cela s'appelle faire de la cavalerie. » On ne saurait mieux dire.

Quant à M. Bur, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, il disait ceci il y a quelques jours : « Je considère qu'il est de notre responsabilité morale de cesser de nous décharger de nos responsabilités financières quotidiennes sur nos jeunes. »

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Malgré cela, le Gouvernement a présenté un amendement – cela a demandé, là aussi, un travail considérable – qui consiste à envoyer des recettes plus certaines vers la CADES pour transférer à la sécurité sociale des recettes non pérennes, tant et si bien que nous savons aujourd'hui qu'il y aura un trou, notamment dans la branche famille, de 25 milliards.

Les commissions ont rejeté ces amendements, parfois à l'unanimité. Pourtant, à la demande du Gouvernement, le groupe UMP s'apprête, sans plus d'arguments, à avaliser ce qui est un mauvais coup pour les jeunes de notre pays. Pour le Parlement, voter contre ce texte est une question de responsabilité et d'honneur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Martine Billard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec ce projet de loi organique, vous cherchez à trouver des solutions pour faire face aux 130 milliards d'euros de dettes accumulées depuis huit ans que vous êtes au pouvoir.

Vous invoquez la crise pour vous disculper. Mais, sur ces 130 milliards de déficit, la crise représente tout au plus 34 milliards. Le reste, c'est du déficit structurel, pour 34 milliards, mais aussi, pour 62 milliards, du déficit prévisionnel pour le régime vieillesse de 2011 à 2018.

Vos réponses sur le déficit structurel sont indigentes. Pire, elles déséquilibrent ce qui était en équilibre fragile. Ainsi, la branche famille, tout juste à flot, va se retrouver en déficit dès l'année prochaine puisque les recettes que vous lui transférez ne sont pas pérennes.

Pour ce qui est de l'équilibre de la branche vieillesse, il repose sur des hypothèses peu vraisemblables, comme le transfert de cotisations UNEDIC, qui supposerait un taux de chômage revenu à 4,5 %, ou le transfert des excédents des régimes complémentaires, qui nécessite l'accord préalable des partenaires sociaux. Tout cela fait beaucoup de « si ».

Quant à l'assurance maladie, vous anticipez déjà le transfert du déficit 2011 et des suivants à la CADES.

À ce tableau peu réjouissant, et devant l'ampleur du désastre, s'ajoute ces dernières semaines la cacophonie dans votre camp. Certains chez vous, refusant de renvoyer toujours sur les générations futures la dette accumulée, finissent par se rendre à l'évidence. Il n'est plus possible de rester arc-boutés sur le dogme – car c'est bien un dogme, chers collègues – du « zéro impôt » ou du « zéro prélèvement supplémentaire », alors que les impôts des plus riches ne font que baisser.

Le Président de la République et le Gouvernement continuent à vouloir allonger une fois de plus la durée de vie de la CADES. C'est pourtant votre majorité qui a fait voter en 2005, dans une loi organique, le principe de l'interdiction de tout allongement de sa durée de vie. Mais les caprices présidentiels sont passés par là.

Même si vous continuez à nier l'existence de nouveaux impôts ou taxes ou prélèvements, le plan de redressement des comptes publics que vous avez présenté aux autorités européennes contient en réalité la levée de quelque 40 milliards de recettes nouvelles d'ici à 2014.

Vous proposez que les recettes des trois nouvelles taxes sur les assurances, créées à l'occasion du PLFSS pour 2011, soient affectées à la branche famille et non plus à la CADES comme prévu initialement. En retour, la CADES se voit attribuer une fraction de la CSG à hauteur de 3,5 milliards qui financent actuellement les régimes de sécurité sociale. Bref, voilà un bel amendement de passe-passe.

Mais, ainsi, la pérennité du financement de la branche famille n'est absolument pas acquise. De plus, en transférant une fraction de CSG à la CADES, vous ne faites que déstabiliser un peu plus les comptes de la sécurité sociale en leur attribuant en contrepartie des ressources dont on sait pertinemment qu'elles sont très aléatoires et non dynamiques. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle une partie de votre majorité refusait, à juste titre, de les attribuer à la CADES. Le fait de les affecter à la branche famille ne les rend pas plus pérennes.

Les comptes de la sécurité sociale risquent fort d'être dans le rouge et le déficit viendra alimenter la CADES.

Cette solution soulève d'ailleurs l'opposition résolue des six présidents de caisses – retraites, maladie, famille, recouvrement, MSA et RSI – et prive, dès 2013, le régime général de près de 1 milliard d'euros de ressources.

En définitive, il aura fallu les menaces du Premier ministre expliquant à demi-mot qu'il pourrait engager la responsabilité du Gouvernement et les rappels à l'ordre des députés par M. Copé pour que la majorité se résigne à voter les bidouillages gouvernementaux.

Cessez de vous satisfaire de palliatifs, de mesurettes d'économie. Cessez de cibler la seule « dette de crise ». Le creusement des déficits structurels est de votre responsabilité depuis huit ans que vous êtes au pouvoir. C'est l'échec de toutes vos réformes qui étaient censées ramener les comptes sociaux à l'équilibre, mais qui, en réalité, font le bonheur des marchés financiers. Sortez du dogme de la baisse à tout prix des impôts des plus riches et attelez-vous à rétablir la justice fiscale.

Les députés du groupe communiste, républicain, du parti de gauche, ultra-marins et verts, voteront contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble du projet de loi organique.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 542

Nombre de suffrages exprimés 540

Majorité absolue 271

Pour l'adoption 295

Contre 245

(Le projet de loi organique est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote communes et les votes, par scrutin public, sur l'article unique de la proposition de loi constitutionnelle et sur l'ensemble de la proposition de loi organique pour une République décente (nos 2774, 2842, 2775, 2843).

Jeudi dernier, le Gouvernement a indiqué qu'en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, il demandait à l'Assemblée nationale de se prononcer par un seul vote, d'une part, sur l'amendement et l'article unique de la proposition de loi constitutionnelle, d'autre part, sur les amendements, les articles et l'ensemble de la proposition de loi organique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Dans les explications de vote, la parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Monsieur le président, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, nous avons présenté cette proposition de loi pour une République décente en souhaitant que le débat qui l'accompagne puisse répondre, lui aussi, à ce qualificatif. Or je voudrais commencer en protestant contre la méthode qui a été retenue par le Gouvernement et qui a consisté à refuser le débat, en tout cas à empêcher l'Assemblée de se prononcer jeudi, au moment où elle était saisie de ces propositions de loi.

Pourquoi ces propositions de loi ? Parce que nous considérons qu'il ne faut pas ajouter à la crise économique, à la crise financière dont on vient de parler, à la crise sociale, une crise morale, qui serait liée aux doutes que pourraient nourrir nos concitoyens quant aux comportements de ceux qui ont les plus hautes responsabilités, c'est-à-dire celles que confère la République.

Alors que, dans cet hémicycle, nous évoquions le cumul des fonctions de ministre du budget et de trésorier de l'UMP, le Premier ministre avait répondu que rien ne l'interdisait. C'est vrai au regard des textes, mais faux au regard de la morale publique, ou même du simple bon sens. La suite l'a d'ailleurs démontré, puisque la personnalité en question a été amenée à ajuster sa situation à ce qui paraissait évident déjà à l'époque.

Puisque nous sommes dans une mandature où il faut que la loi dise ce que l'éthique ou le simple bon sens devrait dicter, nous proposons de changer la loi. Pour nous, une République décente, c'est une République dans laquelle on ne peut être ministre et avoir, en même temps, des responsabilités dans un organisme ou une association qui reçoit des avantages fiscaux. Pour nous, une République décente, c'est une République dans laquelle un ministre ne peut pas avoir, directement ou indirectement, des intérêts dans les organismes qu'il surveille. Pour nous, une République décente, au fond, c'est une République qui se rappelle les principes sur lesquels elle a été fondée, c'est-à-dire la transparence, la priorité donnée au dévouement et au bien public, et le souci qui doit nous être commun – je pense qu'il l'est – de servir l'intérêt général.

Ce qui nourrit le populisme, ce ne sont pas des propositions comme celles-ci ; c'est le refus de traiter ces questions. Ne pas prendre conscience aujourd'hui du mal que l'on peut ainsi faire dans l'opinion publique, à l'approche de la plus grande élection politique que nous connaissons, c'est encourager celles et ceux qui s'éloignent de nos institutions et ne leur font plus crédit.

C'est justement parce que nous ne voulons pas nourrir ce mouvement que nous proposons de prendre des mesures qui, en luttant contre les suspicions, en empêchant que puissent s'installer des rumeurs, permettent à la République de fonctionner dans des conditions décentes.

Mes chers collègues, vous évoquiez autour du Président de la République, pendant sa campagne, une République irréprochable. Nous avons vu que l'ambition était beaucoup trop haute pour être atteinte, en tout cas par celui qui la proclamait. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Nous nous contenterons d'une République décente et je pense que nos concitoyens seront satisfaits que l'on puisse aller jusque-là ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe GDR, la parole est à M. François de Rugy.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nos collègues du groupe socialiste nous ont proposé, jeudi dernier, un texte destiné à lutter contre les conflits d'intérêts et le cumul de fonctions que nous considérons comme incompatibles. Ils ont bien fait.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Les députés du groupe GDR voteront ces propositions de loi « pour une République décente ». Cette appellation peut d'ailleurs paraître étrange. Nous ne devrions pas avoir à accoler au beau mot de République, qui se suffit à lui-même, un quelconque adjectif qualificatif. Mais votre gouvernement, mesdames, messieurs de la majorité, a atteint un tel niveau d'indécence qu'il est malheureusement devenu nécessaire d'appeler à un minimum de décence.

Nos compatriotes sont écoeurés par ce qu'ils découvrent depuis trois ans et demi. C'est d'abord le ministre du budget qui, pendant trois ans, est aussi le trésorier du parti du Président. C'est le même ministre, toujours trésorier, qui prétend lutter contre la fraude fiscale et qui se rend régulièrement en Suisse pour collecter des fonds pour le parti du Président auprès de ceux-là mêmes qui vont en Suisse pour échapper au fisc. C'est toujours la même personne qui sollicite personnellement la première fortune de France pour de multiples dons et financements politiques alors que, dans le même temps, il lui signe un chèque de 30 millions d'euros au titre du bouclier fiscal et au nom de l'État français. C'est la lamentable affaire Woerth-Bettencourt, symbole des symboles des conflits d'intérêts et de cet insupportable mélange des genres entre l'argent et la politique.

C'est, ensuite, un homme d'affaires déchu qui poursuit de sa vindicte son ancien bailleur de fonds et qui, à de multiples reprises, a été contrecarré par les tribunaux. Il se trouve que, après avoir soutenu le candidat Sarkozy à l'élection présidentielle,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…il obtient de celui-ci, une fois élu Président de la République, que la procédure judiciaire soit arrêtée au profit – c'est le cas de le dire – d'une procédure d'arbitrage, contre l'avis même de la ministre de l'économie, procédure qui – ô miracle ! – lui attribue un chèque de plus de 200 millions d'euros. Au moment même où nous examinons le projet de loi de réforme des retraites, voilà un jeune retraité qui n'a pas de souci à se faire ! C'est l'affaire Tapie où l'indécence le dispute au dégoût. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Leonetti

Tapie, il est de votre côté ! Il n'est pas de chez nous !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est aussi le cas de celui qui, en tant que conseiller du Président de la République, conseille à celui-ci de fusionner la Banque populaire et les Caisses d'Épargne, et devient PDG de ce nouvel ensemble à peine quelques jours plus tard, comme par enchantement !

Je pourrais malheureusement multiplier les exemples, mais je citerai, pour couronner le tout, le cas de ce député UMP qui, outre ses fonctions de maire de Meaux, de président de la communauté d'agglomération de Meaux, de président de son groupe parlementaire, trouve encore le temps de travailler pour un cabinet d'avocats d'affaires. C'est l'affaire Copé ! (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Mes chers collègues, cette longue litanie finit par salir l'honneur des élus que nous sommes, de la politique, et par salir la République.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il est temps d'y mettre fin pour restaurer la République. C'est pourquoi les députés écologistes, les députés communistes et les députés du parti de gauche voteront pour cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Pour le groupe Nouveau Centre, la parole est à M. Stéphane Demilly.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

En soumettant à la représentation nationale ces deux propositions de loi, dont l'une vise, ni plus ni moins, à réviser la Constitution, nos collègues de l'opposition prétendent rechercher les voies d'un consensus.

Il s'agit ainsi, en apparence tout du moins, de participer de manière constructive à la nécessaire réflexion autour des voies et moyens de préserver la vie publique de tout conflit d'intérêt.

Preuve s'il en fallait que ce n'est définitivement pas l'état d'esprit de nos collègues socialistes, et au risque de faire une nouvelle fois le lit du populisme, le sous-entendu et la calomnie sont cette fois présents dès l'intitulé de ces deux textes, puisque ce dont il est question, c'est « de rendre décente notre République », sous-entendant qu'elle est aujourd'hui entachée d'une indécence des plus criantes.

Les députés du Nouveau Centre voient dans cette nouvelle opération politicienne une banderille supplémentaire pour affaiblir inutilement la République.

La réalité, mes chers collègues, c'est que, depuis le début des années 90, c'est bien notre majorité qui a fait adopter des textes majeurs en ce qui concerne la transparence de la vie politique et la lutte contre la corruption. Je m'en tiendrai à un seul exemple.

Il existe aujourd'hui une commission pour la transparence financière de la vie politique, instance indépendante chargée de surveiller l'évolution de la situation patrimoniale des membres du Gouvernement comme de celle des parlementaires, afin, notamment, de s'assurer qu'elle n'a pas été marquée par un enrichissement anormal.

Mes chers collègues, la moralité de la vie publique est une exigence, car c'est d'elle que dépendent in fine la crédibilité de notre démocratie et celle de nos institutions.

Il y a donc ici des gens qui plaident pour une République décente. À ce terme pour le moins subjectif et à bien des égards ambigu, nous préférons celui de République irréprochable, celle qui donne au citoyen le droit de faire valoir ses droits devant le Conseil constitutionnel, celle qui donne au Parlement la possibilité de se prononcer sur les nominations du Président de la République, celle enfin qui donne plus qu'hier à l'opposition la possibilité de voir ses propositions de loi débattues dans notre hémicycle, fussent-elles démagogiques.

Notre vision de la République, mes chers collègues, ce n'est pas celle d'une démocratie où l'opposition se complaît à manier les sous-entendus pour masquer son absence de propositions. Ce n'est pas celle d'une démocratie où le débat public se réduit à une chasse à l'homme permanente. Ce n'est pas non plus celle d'une démocratie où, foulant du pied la séparation des pouvoirs, l'opposition s'arrogerait le droit d'exiger la désignation d'un juge d'instruction dans telle ou telle affaire.

Derrière les arrière-pensées politiciennes, il est effectivement un moyen d'aborder véritablement cette question des conflits d'intérêt, c'est celui de la réflexion puis du consensus républicain, et c'est précisément ce moyen qu'ont choisi le Président de la République et le président de notre assemblée en confiant à des groupes de travail pluralistes le soin de formuler en la matière les préconisations qui s'imposent.

À ce titre, et parce que nous refusons de prêter nos voix à cette opération purement démagogique, les députés du Nouveau Centre voteront contre ces deux propositions de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Pour le groupe UMP, la parole est à M. Michel Diefenbacher.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, s'il était un texte sur lequel l'unanimité devrait se faire au sein de notre assemblée, ce serait effectivement un texte touchant les questions de moralité publique. Mais s'il est une proposition qui ne peut en aucun cas recevoir notre accord, c'est celle dont nous sommes saisis par le groupe socialiste. Il n'est en effet pas question que le groupe UMP cautionne une initiative de cette nature. Par conséquent, il ne votera pas ces textes, pour trois raisons.

Première raison : ces textes sont une véritable provocation. Cela a été dit tout à l'heure, vouloir que, demain, la République soit décente, c'est en réalité sous-entendre qu'elle est aujourd'hui indécente. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Je voudrais rappeler à cet égard à l'opposition que tous les engagements qui ont été pris en 2007 par le candidat Nicolas Sarkozy pour rendre la République plus transparente, en particulier dans sa gestion financière, ont été tenus. Jamais le contrôle financier sur l'exécutif n'a été aussi précis. Jamais l'opposition n'y a été associée de manière aussi proche. Jamais la transparence n'a été aussi totale.

J'observe que, dans ce domaine, l'exemple est venu de l'Élysée lui-même. Je ne voulais pas polémiquer sur ce sujet, mais compte tenu du ton qui a été adopté tout à l'heure par les orateurs de l'opposition, je rappellerai que, du temps de François Mitterrand, cela n'était pas le cas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Aujourd'hui, les comptes de l'Élysée sont ouverts devant la représentation nationale. Les portes de l'Élysée sont ouvertes à la Cour des comptes qui, d'ailleurs, est venue y poursuivre ses investigations l'année dernière.

La deuxième raison pour laquelle nous ne voterons pas ce texte, c'est qu'il est inapplicable. On nous le présente comme instaurant une incompatibilité entre les fonctions de ministre et celles de trésorier ou de responsable dirigeant d'une formation politique, mais ce n'est pas cela que vous avez écrit dans cette proposition de loi que vous nous proposez, messieurs de l'opposition. Vous voulez en réalité instaurer une incompatibilité totale non seulement pour les ministres, mais également pour tous leurs proches – probablement pour leur famille – avec toutes les fonctions de direction dans des entreprises, publiques ou privées, et dans des associations, dès lors que ces entreprises ou associations recevraient des fonds publics, ou seraient simplement en relation avec des administrations publiques dépendant de ces ministres. Il en résulterait, en particulier, qu'aucun membre de la famille du ministre du budget ou du ministre du travail ne pourrait être salarié dans une entreprise française, puisque toutes ont des contacts avec l'administration fiscale ou avec l'inspection du travail. Où va-t-on ? Autant il est nécessaire que des bornes précises soient établies, autant il faut éviter ce genre de caricature.

La troisième raison, c'est que, dans leur volonté apparemment moralisatrice, ces deux propositions témoignent en réalité d'une inadmissible sélectivité. On fait preuve d'une suspicion totale à l'égard des membres du Gouvernement, mais d'une tolérance totale à l'encontre des exécutifs locaux. On semble oublier que la décentralisation est intervenue il y a maintenant près de trente ans, que les présidents de conseils généraux, régionaux, les maires ont des relations quotidiennes avec le monde économique – et c'est normal. Mais là, on ne prévoit bien entendu aucune incompatibilité d'aucune nature. Une morale sélective est par nature profondément immorale. Pour toutes ces raisons, l'UMP rejettera ces deux propositions de loi.

Comme cela a été rappelé par M. le ministre tout à l'heure, un comité des sages a commencé à travailler sur ce sujet. Il remettra ses conclusions en fin d'année. Le président de l'Assemblée nationale a lui-même constitué un groupe de travail ouvert à l'opposition pour élaborer des propositions dans ce domaine. Nous y travaillerons comme il convient. Le président de la commission des lois nous a informés, lors des débats, qu'il déposerait lui-même une proposition de loi au cours du premier semestre de l'année prochaine. Nous ne voulons pas occulter ce sujet, mais nous voulons y travailler de façon sereine, objective. De grâce, n'obérons pas cette nécessaire et importante réflexion par le vote d'un texte qui est à la fois inutile et déplacé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur la proposition de loi constitutionnelle.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 530

Nombre de suffrages exprimés 527

Majorité absolue 264

Pour l'adoption 212

Contre 315

(La proposition de loi constitutionnelle n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi organique.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 524

Nombre de suffrages exprimés 520

Majorité absolue 261

Pour l'adoption 206

Contre 314

(La proposition de loi organique n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote par scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi visant à renforcer les exigences de transparence financière de la vie politique (2777, 2846).

Jeudi dernier, le Gouvernement a indiqué qu'en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution il demandait à l'Assemblée nationale de se prononcer par un seul vote sur les amendements, les articles et l'ensemble de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Dans les explications de vote, la parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Dussopt

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, mes chers collègues, la proposition de loi présentée par notre collègue Régis Juanico et l'ensemble du groupe socialiste pose des principes simples visant à améliorer la transparence des financements de la vie politique.

L'actualité politique de l'été dernier, alimentée par le scandale de l'évasion fiscale organisée par l'entourage d'une des plus grandes fortunes de France, a mis en lumière un véritable contournement de la réglementation en matière de financement de la vie politique.

Plusieurs textes avaient contribué à améliorer les conditions de financement de la vie politique, notamment les lois adoptées à l'initiative de notre collègue Michel Sapin, qui mettaient fin au financement des formations politiques par les personnes morales, en particulier par les entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Aujourd'hui, il apparaît clairement que le dispositif en vigueur doit être complété. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a souligné à plusieurs reprises ce détournement de l'esprit de la loi qui plafonne à 7 500 euros par an et par parti le don des particuliers, sans limiter le plafond global de don de chaque contribuable.

Ainsi, la faculté pour une même personne de donner plus de 7 500 euros par an en finançant différents partis politiques a des effets pervers. Elle contribue notamment à favoriser la création de micropartis. Le nombre de formations politiques enregistrées à la commission de contrôle est d'ailleurs passé en vingt ans de 28 à 296 ; depuis 2009, ce ne sont pas moins de quarante micropartis qui ont été créés.

Ces micropartis, ou partis de circonstance, peuvent être d'au moins deux types : d'abord, les micropartis « satellites », qui reversent les sommes recueillies au parti central et permettent ainsi à un même parti de percevoir indirectement de la même personne un montant supérieur à celui du plafond autorisé ; ensuite, les micropartis « prétextes », ou partis de poche, qui ont simplement pour vocation de recueillir des fonds pour financer une campagne ou l'activité politique d'un élu.

Face à ce détournement de l'esprit de la loi, nous avons le devoir de réagir, car l'image de la politique est déjà largement dégradée et souffre du lien trop souvent fait entre politique et argent, et plus particulièrement des rapports qu'entretient aujourd'hui une partie de la classe politique avec les grandes fortunes de notre pays. Trop souvent domine le sentiment qu'il suffit de payer pour avoir, de soutenir pour être servi et de financer pour pouvoir être entendu du pouvoir.

Face à cela, nous avons déposé cette proposition de loi, discutée le 14 octobre dernier lors d'une séance dite « d'initiative parlementaire », au cours de laquelle, comme à l'accoutumée, le Gouvernement a fait jouer le règlement de notre assemblée pour nous empêcher de débattre pleinement, préférant renvoyer le vote à aujourd'hui afin de garantir sa majorité, méthode qui illustre bien le grand écart entre les discours sur les droits du Parlement et la réalité, faite de mépris envers notre Assemblée.

Au cours de la séance du 14 octobre, nous avons fait trois propositions. La première vise à plafonner à 7 500 euros par an les dons d'un même contribuable, tout en le laissant libre de donner à autant de partis qu'il le souhaite dans cette limite ; la deuxième consiste à clarifier le statut et la nature des dons et des cotisations ; la troisième, modifiée après les auditions par un amendement du rapporteur, rend obligatoire la transmission des noms des plus gros donateurs à la commission de contrôle.

Par ailleurs, nous avons fait un certain nombre de propositions techniques améliorant des textes existants, sur les questions de rattachement des parlementaires, sur les dates et les modalités de dépôt des comptes de campagne.

Au cours des auditions que nous avons menées, tous les trésoriers des partis politiques représentés dans notre hémicycle nous ont dit être plutôt favorables à nos propositions. Seule voix discordante, une déclaration à la presse du trésorier de l'UMP, le 6 octobre dernier, qui se prononçait pour un déplafonnement total des dons autorisés.

Nous avons par ailleurs connaissance des travaux menés par le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, et notre collègue Étienne Blanc. Nous savons, et c'est par là que je veux conclure, que certaines des propositions que nous défendons sont identiques à celles qu'ils ont préconisées dans leur rapport. Cependant, le projet de loi inspiré de ces travaux nous semble oublié, sinon enterré. Et rien n'est inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée.

C'est pour cette raison notamment que nous avons déposé et défendu devant vous cette proposition de loi. Nous vous proposons de faire un pas de plus, de franchir une étape pour améliorer la situation en attendant ce projet si souvent évoqué par le ministre pour ne pas donner suite à nos demandes.

Ce vote est un vote important, car il témoignera aussi, aux yeux de nos concitoyens, de notre volonté de clarifier les règles de financement de la vie politique, d'y introduire de l'éthique et de remédier à ce détournement du système en vigueur.

Cette nouvelle étape ne nous exonère pas de continuer le travail sur l'ensemble des propositions et des sujets évoqués au cours du débat. Bien au contraire, elle doit être vue comme un nouvel élan vers un système de financement plus conforme aux attentes de nos concitoyens.

C'est pour cela, comme l'a fait à plusieurs reprises le rapporteur Régis Juanico, que j'appelle l'ensemble de nos collègues à dépasser les clivages partisans et les consignes de vote qui conduiraient à un statu quo insupportable, pour voter l'adoption de notre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

En préalable, je veux d'un mot, une nouvelle fois, déplorer les conditions dans lesquelles sont examinées les propositions de loi des groupes de l'opposition. L'absence du ministre en charge de la question traitée, le recours systématique à la réserve du vote et au vote bloqué démontrent le peu de cas que le Gouvernement fait des droits de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

La proposition de loi de nos collègues socialistes vise à renforcer les exigences de transparence financière de la vie politique. Depuis 1988, la France s'est dotée d'une législation sur le financement des campagnes électorales et des partis politiques, qui a contribué à rendre plus transparent leur financement en plafonnant tant le montant des dépenses électorales que les dons versés aux partis et permis ainsi de tarir l'une des sources de la corruption. Pour autant, comme l'a souligné une actualité récente, ces lois ne sont pas exemptes de faiblesses. En effet, certains partis ont trouvé le moyen de contourner les règles de plafonnement fixées à 7 500 euros, en créant des micropartis qui permettent à une même personne physique de financer des partis satellites et de bénéficier des avantages fiscaux correspondants.

Depuis plusieurs années, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques pointe régulièrement cette défaillance de notre législation. C'est pourquoi nous approuvons les deux premiers articles de la proposition de loi, qui limitent les dons consentis par les personnes physiques à 7 500 euros pour un ou plusieurs partis politiques, les cotisations versées en qualité d'adhérent étant assimilées à des dons.

Nous sommes d'autant plus favorables à de tels garde-fous qu'il ne s'agit pas ici de faire entrer les cotisations des élus dans le champ de ce plafonnement. Cette question est essentielle : en aucun cas, les partis dont les cotisations d'élus représentent une part essentielle de leurs ressources ne doivent être pénalisés, et les élus qui choisissent de verser une partie de leurs indemnités à leur formation politique pour lui donner les moyens de faire avancer leurs idées doivent être encouragés.

En revanche, nous nous sommes interrogés, lors du débat, sur l'opportunité de l'article 3, qui risquerait de décourager certains donateurs et de constituer un frein à la collecte des dons pour le développement des partis, premiers vecteurs de la mise en oeuvre de l'intervention citoyenne dans notre pays.

Nous pensons enfin que, dans le cadre des débats annoncés pour le premier semestre 2011, il conviendrait de repenser l'aide publique attribuée aux partis politiques, une aide publique qui favorise aujourd'hui le bipartisme au détriment du pluralisme, pourtant garant de la démocratie.

Dans l'immédiat, et pour toutes les raisons indiquées, les députés du groupe GDR voteront cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe NC.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Tout le monde a en mémoire les errements des années quatre-vingt et le cortège d'affaires politico-financières qui ont touché tant la gauche que la droite. Depuis une vingtaine d'années, de nombreuses mesures ont donc été prises afin d'encadrer le financement des partis politiques et des campagnes électorales. Je pense notamment à l'instauration des comptes de campagne, au financement public des campagnes électorales, à l'attribution d'une aide publique de l'État aux partis politiques ou encore à l'interdiction des financements politiques émanant de personnes morales.

Ces grandes étapes ont été régulièrement complétées par ce que l'on peut appeler des ajustements. Aujourd'hui, le groupe SRC nous propose trois nouveaux ajustements : d'une part la limitation des dons consentis par les personnes physiques à 7 500 euros pour un ou plusieurs partis politiques ; ensuite, l'assimilation des cotisations versées en qualité d'adhérent d'un parti politique aux dons ; enfin l'obligation faite aux associations de financement et aux mandataires financiers de rendre publique la liste alphabétique des donateurs ayant consenti des dons supérieurs à 3 000 euros.

Sur le fond, les parlementaires centristes ne peuvent que vous rejoindre. En effet, si la transparence du financement de la vie politique s'est beaucoup améliorée depuis vingt ans, la situation est toujours perfectible. Récusant le bipartisme et défendant le pluralisme de la vie politique, nous pensons que nous gagnerions à réformer plus avant le financement des partis.

Le Premier ministre s'en est lui-même inquiété en juillet dernier : « Je note avec intérêt, a-t-il dit, que certains voudraient que les financements soient réservés aux seules grandes formations politiques. […] Ce n'est pas tout à fait ma conception de la démocratie et de la liberté. Toute personne qui, en France, veut exprimer une opinion politique, qui veut créer une structure politique, engager une réflexion politique, a le droit de le faire et a le droit de se faire financer. »

Le groupe Nouveau Centre rejoint cette position. Il estime néanmoins qu'il aurait été plus opportun de travailler dans un cadre consensuel et de ne pas aborder la question de façon partisane. Mettons-nous, mes chers collègues, autour de la table et proposons de nouvelles voies de progression transcendant les clivages. Si cette question n'est pas illégitime, elle mérite mieux qu'une approche politico-politicienne. Nous plaidons pour une concertation de l'ensemble des groupes parlementaires et pour un échange constructif.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, si nous vous rejoignons au fond sur le besoin de perfectionner encore le financement de la vie politique, en l'attente des propositions du président de la commission des lois, nous ne validerons pas votre démarche unilatérale, non dénuée d'arrière-pensées politiciennes. Les membres du groupe Nouveau Centre ne voteront donc pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Diefenbacher, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, pendant longtemps – naïve pudeur chez certains, coupable complicité chez d'autres –, les liens qu'entretenaient la politique et les affaires sont restés flous. Il était important de mettre fin à cette situation en fixant des règles précises.

Je voudrais rappeler que la première loi sur la transparence financière a été votée par cette assemblée au printemps 1988. C'est elle qui, pour la première fois, a plafonné les dépenses électorales, limité les dons aux partis politiques, prévu le remboursement des frais de campagne, imposé enfin aux ministres, aux parlementaires et aux présidents des exécutifs locaux de déclarer leur patrimoine. Le Premier ministre en fonction à l'époque s'appelait Jacques Chirac.

D'autres lois ont ensuite été votées à l'initiative de majorités de gauche ou de droite. Il n'est pas inutile de rappeler que l'interdiction totale des dons de toute nature faits par des personnes morales, c'est-à-dire des entreprises, date de 1995, sous le gouvernement Balladur.

Si je rappelle ces éléments, c'est pour souligner que notre famille a toujours été en pointe lorsqu'il s'est agi de moraliser la vie politique.

Aujourd'hui, chacun en est d'accord, il est sans doute important d'aller plus loin. Mais je crois que le sujet est suffisamment intéressant pour qu'on évite de trancher la question à la sauvette, à partir d'un texte bâclé comme celui que propose le parti socialiste, et alors que, par ailleurs, le Président de la République vient d'installer un comité des sages qui doit traiter en particulier la question importante du conflit d'intérêts et déposer ses conclusions avant la fin de l'année, que le président de l'Assemblée nationale vient d'engager lui-même une réflexion ouverte à la majorité et à l'opposition, comme c'est de règle pour des sujets de cette nature, et que, lors de nos débats, le président de la commission des lois a rappelé que la commission se prononcerait sur cette question dans le courant du premier semestre de l'année prochaine.

Que le parti socialiste ait voulu nous griller la politesse en présentant un texte de circonstance, cela fait partie du petit jeu politique qui n'intéresse pas grand monde et ne grandit personne.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

La transparence est un sujet important. Nous voulons le traiter d'une manière sérieuse, globale, sereine. À titre personnel, je dirai que l'important n'est pas tant de limiter les dons, qui sont apportés en toute transparence aux formations politiques, que de mettre sur la table, en toute publicité, le patrimoine et les revenus de tous les élus que nous sommes. C'est cela que je plaiderai de mon côté.

Je ne veux toutefois pas aller plus vite que la musique. Nous aurons, dans les mois qui viennent, à connaître des réflexions menées au sein des différents groupes de travail que j'évoquais plus haut. Dans l'immédiat, l'UMP n'entend pas cautionner…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

…l'initiative prise par le groupe socialiste. Par conséquent, notre groupe votera contre la proposition de loi qui nous est présentée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 509

Nombre de suffrages exprimés 506

Majorité absolue 254

Pour l'adoption 198

Contre 308

(La proposition de loi n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi organique visant à interdire le cumul du mandat de parlementaire avec l'exercice d'une fonction exécutive locale (nos 2776, 2844).

Jeudi dernier, le Gouvernement a indiqué qu'en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, il demandait à l'Assemblée nationale de se prononcer par un seul vote sur les amendements, les articles et l'ensemble de la proposition de loi organique.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jacques Valax, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État à l'intérieur et aux collectivités territoriales, mes chers collègues, le texte que nous vous proposons est simple, clair, pragmatique. Il est sans parti pris et sans arrière-pensée. (Rires et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) C'est un texte transcourant et même transparti. Il porte une proposition saine, sage, qui va dans le sens d'une République revigorée, transparente et réactive. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Chers collègues, applaudissez si vous le voulez, mais évitez de crier.

Poursuivez, je vous prie, monsieur Valax.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Ce texte permettra d'ouvrir une brèche dans le mur d'immobilisme et de réaction qui menace notre institution. Il est un premier pas que je vous demande de faire, toutes opinions confondues, sans a priori ni sectarisme. Sans être une fin en soi, il est une première étape vers la revalorisation du Parlement et la modernisation de la vie politique française. Il repose sur un constat et se fixe un but.

Le constat est accablant. Jean-Jacques Urvoas évoquait récemment l'agonie de la démocratie parlementaire. Sans être aussi pessimistes, convenons et reconnaissons ensemble que le discours politique manque aujourd'hui de fraîcheur et de pertinence (« Le vôtre, oui ! » sur les bancs du groupe UMP), d'impertinence aussi peut-être. (Rires et applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Les citoyens semblent se désintéresser de la chose publique. Ils n'aiment plus leurs élus nationaux ; notre image est écornée, abîmée, fossilisée. Les discours démagogiques n'ont pas hésité à stigmatiser l'homme politique et son action. Nous payons aujourd'hui ce lent et long dénigrement de nos institutions et de notre fonction. Le temps est venu de redonner du sens et de la valeur au combat et à la parole politiques, à nos idéaux !

Lors de la discussion générale, Laurence Dumont a affirmé que le temps n'était plus aux grandes discussions et aux petits calculs, mais à l'action. Anny Poursinoff a rappelé aussi que « la fonction de parlementaire demande beaucoup de temps et un engagement total pour assurer correctement les responsabilités qu'elle entraîne. C'est pourquoi il faut s'y consacrer à plein temps. »

Plusieurs députés du groupe Nouveau Centre. Où est M. Montebourg ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Danièle Hoffman-Rispal a indiqué à juste titre que nous sommes le dernier pays européen à accepter le cumul de mandats. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Christophe Caresche a ajouté : « La proposition d'interdiction du cumul du mandat de parlementaire avec une fonction exécutive locale va dans le sens de l'histoire. Ceux qui s'arc-boutent contre cette idée mènent un combat d'arrière-garde. » Enfin, René Dosière a considéré que, en cette période de crise et de sacrifice, les cumulards – vous allez pouvoir crier – devaient être capables de montrer l'exemple. (« Ayrault ! Ayrault ! » sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

La situation actuelle ne peut plus durer : le texte vous offre l'occasion de faire preuve de courage pour retrouver la modernité, le sens de l'histoire et l'espoir de renouvellement de la classe politique. (Vives exclamations et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Si vous applaudissez, il vous faudra voter ! (Mêmes mouvements.) Je vous attends et je souhaite que vous soyez avec nous !

Ce que nous vous proposons, c'est une respiration différente, un comportement, une volonté et une attitude différents.

Certains collègues de la majorité nous ont reproché un texte insuffisant. Je rappelle à Guy Geoffroy que nous sommes ici au premier stade de l'évolution. Demain, avec vous, si vous le voulez, nous évoquerons les questions relatives au cumul des fonctions, au cumul des indemnités, au cumul dans le temps, au cumul avec telle ou telle activité professionnelle. (Exclamations et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Notre texte empêcherait aussi l'élu de rester au contact du terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Au contraire, il privilégie le contact avec la réalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

On pourra rester conseiller municipal, membre d'une collectivité, sans assumer la charge exécutive. (« Ayrault ! Ayrault ! » sur les bancs des groupes UMP et NC.) Vous continuerez donc à bénéficier de l'ancrage local, à cette nuance près que vous ne pourrez cumuler vos fonctions de député avec celle de maire ou d'adjoint, de président ou de vice-président. (« Hollande ! Hollande ! » sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Merci, monsieur Valax. Veuillez indiquer le vote de votre groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Monsieur le président, j'ai été interrompu ! Je termine (« Ah ! » sur les bancs des groupes UMP et NC) par deux phrases importantes.

À mes collègues et amis socialistes, je dis que nos militants attendent de nous ce geste citoyen. Ils exigent de nous, symboliquement, cet acte courageux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Nous n'avons pas le droit de les décevoir.

À nos collègues de la majorité, je dis que notre engagement est sincère (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC) : s'ils en doutaient encore, ils pourraient s'abstenir, nous laissant seuls responsables des résultats du vote. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, si vous pouviez écouter l'orateur et éviter de stigmatiser tel ou tel membre de notre assemblée, nos débats en seraient singulièrement relevés.

La parole est à Mme Anny Poursinoff, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'ai déjà eu l'occasion de remercier nos collègues d'avoir pris l'initiative de cette proposition de loi interdisant le cumul du mandat de parlementaire avec l'exercice d'une fonction exécutive locale. Cette proposition, quoique limitée – mais qui suscite pourtant beaucoup d'excitation chez certains –, est bienvenue.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Elle permettra de corriger un peu les déficits de représentation et de démocratie, disons-le, qui affectent notre pays. Les différentes couches sociales de notre société, dans toute sa diversité, doivent être mieux représentées. Or notre « ascenseur politique » est en panne parce que trop de parlementaires cumulent trop de mandats.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Comme la richesse, le pouvoir n'est pas correctement partagé. Sur la porte de l'ascenseur politique, il n'y a pas d'écriteau indiquant « réservé aux hommes ». Pourtant, que disent les chiffres ? Les femmes représentent 51,4 % de la population française, 52 % de l'électorat et 53 % des inscrits sur les listes électorales. Et combien sommes-nous à l'Assemblée ? Moins de 20 % ! Quel est le pourcentage de femmes présidentes de conseils régionaux ? 7,7 % ! Quel est le pourcentage de femmes présidentes de conseils généraux ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Je sais que c'est dur à entendre : elles ne sont que 6,1 %.

Dans la vie politique comme dans la vie professionnelle, les femmes sont pénalisées. Elles accèdent très difficilement aux postes de décision. Il est temps que l'égalité femmes-hommes cesse de n'être que des mots et devienne réalité, à tous les niveaux. À force d'invoquer constamment les évolutions « lentes mais positives » en matière d'égalité, les générations passent et l'injustice demeure. On ne peut que le regretter. Seuls le volontarisme et l'action positive peuvent véritablement contrecarrer la multiplicité des résistances à l'égalité femmes-hommes, tant dans le monde politique que de celui de l'entreprise ou des carrières scientifiques.

Le rôle de la loi est bien de corriger ces inégalités. Pendant les débats, notre collègue Guy Geoffroy a déclaré que « l'opinion publique a d'autres préoccupations que celle de vous voir mettre fin à ce que vous appelez le cumul, au motif que cela permettrait à nos deux assemblées de mieux travailler ! » Effectivement, ces dernières semaines, l'opinion publique a des préoccupations plus pressantes, notamment celle de se faire entendre d'un gouvernement sourd à ses revendications concernant la retraite. La France est dans la rue, pour dénoncer une loi injuste qui, une fois encore, pénalise les femmes. Pourtant, il y a longtemps qu'elles font la preuve qu'elles savent cumuler – un emploi, un mandat, la charge de leurs enfants et l'organisation de la vie familiale !

Il est temps que la loi change, car les temps changent. Il est temps que cette assemblée se féminise et rajeunisse ; temps d'élaborer un véritable statut de l'élu qui permettrait aux sortants d'envisager leur reconversion de manière plus sereine ; d'introduire plus de proportionnelle dans toutes les élections, afin que toutes les composantes de la vie politique démocratique puissent être représentées à hauteur des suffrages exprimés par nos concitoyennes et nos concitoyens.

Je viens de renoncer à mon mandat de conseillère régionale pour siéger dans cette assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Je le redis : tendre vers le mandat unique, c'est notre devoir et notre responsabilité.

Pour toutes ces raisons, les députés du groupe GDR voteront cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Stéphane Demilly, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la possibilité offerte par notre démocratie de cumuler un mandat parlementaire et un mandat local n'est ni un hasard ni une incongruité. Cette spécificité française s'explique par notre tradition politique et par notre histoire. La France, en effet, ne se résume pas à un idéal politique abstrait, c'est aussi un territoire. C'est pourquoi ses élus nationaux tirent de leur enracinement local une part importante de leur légitimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

De surcroît, le cumul des mandats, question légitime en effet, a déjà été traité à l'occasion de plusieurs lois : les lois organiques du 30 décembre 1985 et du 5 avril 2000, pour ce qui concerne le cumul d'un mandat parlementaire et d'un mandat local ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

…la loi ordinaire du 5 avril 2000 en ce qui concerne le cumul des mandats locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Ces textes ont pu voir le jour parce qu'ils ont été examinés dans un esprit de responsabilité et sans arrière-pensées opportunistes. Or je ne suis pas certain que ce soit l'état d'esprit qui ait guidé les auteurs de la présente proposition de loi du groupe socialiste, marquée du sceau d'une hypocrisie totale. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

L'interdiction du cumul des mandats, voilà un sujet à la mode ! Défendre et argumenter une position contraire, c'est prendre le risque d'être pointé du doigt et de passer pour un ringard de la politique ; et pourtant, nous allons en prendre le risque...

Avant tout, chers collègues du groupe socialiste, permettez-moi de constater que ceux qui alimentent ce débat et cette idée populaire connaissent bien le sujet, puisqu'ils sont eux-mêmes atteints de cette maladie honteuse : ils cumulent un mandat parlementaire avec une fonction exécutive locale. Ce faisant, ils ne respectent pas une valeur à laquelle je crois encore naïvement en politique : l'exemplarité. Or, en la matière, le « faites ce que je dis, pas ce que je fais » ne me paraît pas le message politique le plus cohérent ni le plus convaincant. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Ainsi donc, monsieur Ayrault – premier signataire de ce texte –, si je comprends bien, vous expliquez aux Nantais qui vous ont élu député, maire de leur ville et, indirectement, président de Nantes métropole, qu'avec le cumul de ces trois mandats, auquel il faudrait ajouter celui de président de groupe parlementaire, ce qui n'est pas rien, vous ne pouvez pas tout faire correctement. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Quel aveu ! À ce stade, si vous me permettez un peu d'humour – j'ai vu tout à l'heure des députés socialistes sourire –, après l'édit de Nantes, voici le dédit de Nantes ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Demilly

D'autre part, il est surprenant qu'il faille attendre le vote d'une loi pour mettre en adéquation ses actes et sa conscience. Vous semblez dire : « Obligez-moi car je ne me sens pas la force de le faire tout seul ! » Soyons sérieux : si vous en êtes aussi convaincus, mettez-vous en accord avec votre conscience et vous dormirez mieux. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

À l'inverse de la réforme des retraites, vous n'êtes pas obligés de faire croire à nos concitoyens que vous y reviendrez quand vous serez au pouvoir ; dans le cas présent, vous pouvez appliquer tout de suite votre programme ! (Mêmes mouvements.)

Sur ce sujet, loin du groupe Nouveau Centre l'idée de revenir à des temps assez récents où certains responsables politiques cumulaient un nombre impressionnant de responsabilités, multipliaient les indemnités et distribuaient les délégations avec probablement plus ou moins de bonheur, car, certes, on ne peut pas tout faire. Il me semble néanmoins que le cumul d'un mandat local – municipal ou départemental – et d'un mandat national est d'une parfaite complémentarité. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Je reconnais volontiers, pour le vivre personnellement, que le cumul implique beaucoup de travail, une solide organisation et le parcours de nombreux kilomètres. Mais, comme Antée, je crois que nous tirons notre force et notre bon sens du contact que nous entretenons en permanence avec la réalité du terrain, celle vécue au quotidien par nos concitoyens des villes et des villages, et que seul le mandat local nous nourrit réellement du vécu des habitants.

Si j'étais provocateur, j'irai même jusqu'à dire qu'il devrait être obligatoire d'exercer un mandat local pour être parlementaire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.) Mais, comme je ne suis pas provocateur, je ne le dirai pas.

Si, un jour, l'interdiction de cumuler un mandat local et national venait à être votée – ce dont je doute, bien entendu – et qu'à cette erreur on ajoutait l'introduction d'une dose de scrutin proportionnel disproportionnée, cela reviendrait à créer une strate de législateurs complètement déconnectés de la réalité et dont la réélection serait exclusivement liée au talent de « copinage » déployé auprès des grands décideurs des partis politiques. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Voilà ce que souhaitait vous dire très simplement un député-maire fier de l'être. Pour toutes ces raisons, le groupe Nouveau Centre votera contre ce texte. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, depuis trente ans, nos institutions ont changé de manière plutôt positive : la France centralisée s'est décentralisée, le Parlement, uniquement occupé à la fabrication de la loi, est devenu aussi le lieu du contrôle de l'activité de tous les pouvoirs publics. Dans ce cadre nouveau, moderne, s'interroger sur les conditions d'exercice des mandats et fonctions électives n'est certainement pas une incongruité. Doit-on pour autant le faire en des termes délibérément stigmatisants ? Pourquoi, en particulier, considérer la pratique du cumul des mandats comme obligatoirement mauvaise ? Pourquoi ne pas réfléchir de façon plus raisonnable, plus sereine, à la complémentarité entre un mandat national et un mandat local ?

Je voudrais vous donner deux des exemples sur lesquels nous avons réfléchi en commission et en séance, la semaine dernière. Le Parlement aurait-il été mieux avisé, au moment de se pencher sur la réforme de la fiscalité locale et, en particulier, de définir le dispositif destiné à remplacer la taxe professionnelle, s'il n'avait pas compté en son sein des élus locaux ? (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Le Parlement, qui réfléchit actuellement à un sujet fondamental, la réforme territoriale, serait-il mieux avisé s'il ne comprenait pas des élus locaux qui savent de quoi ils parlent et qui, à ce titre, peuvent élaborer une bonne loi, adaptée aux besoins de nos populations ?

Alors que nous devons insister sur cette complémentarité et réfléchir de façon sereine, approfondie et globale à ces questions, nos collègues socialistes nous proposent un avatar populiste, partiel, partial et qui, surtout, nous est présenté sous le signe d'une hypocrisie éhontée, que je veux dénoncer à mon tour. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

N'y a-t-il pas de l'hypocrisie, en effet, quand ceux qui proposent cette règle de non-cumul souhaitent en différer l'application après les élections de 2012. On rase gratis, chez vous, y compris pour la question du cumul des mandats.

N'y a-t-il pas de l'hypocrisie, encore, lorsque vous admettez qu'il se trouve bien, parmi vous, des élus cumulards, mais que là n'est pas la question. À la représentante des Verts qui vient de s'exprimer, je ferai remarquer qu'il se trouve à l'Assemblée un député-maire Vert et qu'une sénatrice-maire du même parti siège au Palais du Luxembourg.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

On doit balayer devant sa porte avant de donner des leçons aux autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – M. Noël Mamère fait un bras d'honneur en direction des députés du groupe UMP. – Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et NC. – Plusieurs députés du groupe UMP se lèvent et désignent M. Mamère du doigt.)

N'y a-t-il pas de l'hypocrisie lorsque, dans le débat en commission, nos collègues de gauche nous ont fait la démonstration de ce que l'on peut appeler le vote calibré. Nos concitoyens doivent savoir que ceux de nos collègues de gauche qui ont participé aux travaux en commission ont péroré sur le cumul des mandats avant de partir les uns après les autres afin que la proposition de loi ne soit pas votée !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Voilà l'hypocrisie à laquelle nous avons assisté.

Mes chers collègues de l'opposition, vous allez avoir l'occasion, en mars prochain, de passer à l'acte. Nous ferons connaître la situation de tous ceux qui ont signé ce texte et qui seront candidats aux élections cantonales. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Nous ne ferons pas le cadeau à l'opposition de participer au bal des faux nez.

Plusieurs députés du groupe Nouveau Centre. Des faux culs !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Réglez donc vos difficultés entre vous, gérez vos déchirements entre vous ; nous ne vous ferons aucun cadeau. La balle est dans votre camp. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, avant de passer au vote, je vous rappelle que certains gestes n'ont absolument pas leur place ici. (Vive approbation sur les bancs des groupes UMP et NC.) Si le président ne peut pas tout voir, il a le devoir de le rappeler. Il en va de la dignité de nos travaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi organique.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 476

Nombre de suffrages exprimés 466

Majorité absolue 234

Pour l'adoption 151

Contre 315

(La proposition de loi organique n'est pas adoptée.)

Vote sur l'ensemble

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Balligand)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion commune de la première partie du projet de loi de finances pour 2011 (nos 2824, 2857) et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 (nos 2823, 2840).

Hier soir, l'Assemblée à commencer d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Monsieur le président, je souhaiterais, sans trop retarder le débat budgétaire, faire un rappel au règlement concernant le déroulement de la séance.

Il y a quelques minutes, alors que j'étais en train d'intervenir au nom de mon groupe dans le cadre des explications de vote sur la proposition de loi de nos collègues socialistes visant à interdire le cumul du mandat de parlementaire avec une fonction exécutive locale, une certaine agitation a gagné l'hémicycle, dont je n'ai pas immédiatement identifié l'origine, étant concentré sur mon propos. J'ai ensuite appris que cette agitation avait été suscitée par ce que l'on appelle communément un bras d'honneur que m'aurait adressé notre collègue Noël Mamère.

Non seulement M. Mamère propose l'inverse de ce qu'il fait, puisqu'il prétend s'opposer au cumul des mandats tout en étant à la fois maire et député, mais il se comporte en véritable cumulard des gestes obscènes, puisque ce n'est pas la première fois qu'il se laisse aller, dans cet hémicycle, à de tels gestes, qui ne grandissent ni notre assemblée ni le fonctionnement de notre démocratie. Je souhaitais simplement que cela soit inscrit dans le compte rendu de nos débats. Je regrette profondément ce geste déplacé et inutile qui n'apporte rien au débat et je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir donné la parole pour le dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

M. le président de l'Assemblée nationale, qui présidait la séance lors des faits que vous rapportez, a déjà indiqué à l'intéressé ce qu'il pensait de son comportement. Par ailleurs, mon cher collègue, votre remarque ne constituant pas un véritable rappel au règlement, vous auriez plutôt dû demander la parole en fin de séance pour un fait personnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Pour ma part, monsieur le président, je souhaite effectuer un vrai rappel au règlement, non pas au sujet des postures ou des gestes de mes collègues, mais sur le déroulement de nos débats. Il s'agit en fait du rejet de trois des amendements déposés par notre groupe – l'un visant à demander un rapport, l'autre formulant une proposition de ressources nouvelles pour l'État, un troisième, enfin, visant à interdire les pratiques bancaires dans les paradis fiscaux.

De façon inexplicable, ces trois amendements – dont l'un était passé en projet de loi de finances rectificative – ont été rejetés au titre de l'article 40, qui ne saurait s'appliquer en l'occurrence. Je fais donc ce rappel au règlement afin que l'on revoie ce qui ne peut être qu'une erreur, certainement due au nombre important d'amendements déposés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

M. le président de la commission des finances et M. le rapporteur général auront sans doute l'occasion de s'exprimer au sujet de l'article 40 lors de la discussion des articles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Nous allons maintenant entendre les porte-parole des groupes.

La parole est à M. Jérôme Chartier, pour le groupe UMP, qui dispose de quinze minutes. (Faibles applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ces applaudissements sont à l'image du soutien de l'UMP dans le pays !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, la discussion générale de ce projet de loi de finances marque, une fois encore, la capacité du Gouvernement et de la majorité à prendre leurs responsabilités lorsque les exigences budgétaires le commandent.

À force de ténacité et de choix budgétaires vertueux, nous sortons de la crise une économie qui vient de vivre deux années particulièrement difficiles. La nécessité de gérer nos finances publiques en bon père de famille,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…pour reprendre une expression figurant en bonne place dans le code civil, est absolue. Souvenons-nous de la crise grecque, qui n'est pas terminée, et de la situation catastrophique de la population grecque, livrée à elle-même face à un pouvoir incapable de la protéger. Observons également la situation du Royaume-Uni, où le gouvernement de M. Cameron demande des efforts supplémentaires…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

de l'économie générale et du contrôle budgétaire. À qui les demande-t-il ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…des efforts supérieurs à ceux que le gouvernement grec a demandés à sa propre population, puisque l'effort accompli par Royaume-Uni va lui permettre de passer, en quatre ans, de onze points à trois points de déficit budgétaire. Je me rappelle qu'en 2009, de nombreux élus socialistes saluaient les mesures prises par M. Gordon Brown, notamment l'effort consenti au titre de la relance par la consommation, et je leur demande de penser à ce que ressentent aujourd'hui les Britanniques face aux mesures de restriction budgétaire sans précédent auxquelles ils sont confrontés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Qui souhaite ici le laisser-aller ? Qui souhaite ici que les fameuses notes attribuées par les agences de notation à la dette française – qui sont, finalement, le reflet de la confiance que les investisseurs portent à cette dette – soient abaissées ? Un spread supérieur…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…ou une prise de risque, si vous préférez, monsieur Brard…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Oui, je préfère : le français est la langue de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…une prise de risque supérieure à celle relative à la dette espagnole conduirait la France à payer plus de 5 milliards d'euros d'intérêts supplémentaires par rapport à ce qu'elle acquitte aujourd'hui.

Qui souhaite que la France ne puisse plus emprunter aux meilleurs taux pour financer ses politiques publiques et son endettement ? Assurément, seules des personnes irresponsables, des personnes qui ne penseraient pas à l'avenir de la France et des Français, pourraient souhaiter que des mesures de politique publique soient financées par l'endettement, ce qui aurait pour effet d'enfoncer encore un peu plus la France dans le déficit.

Il faut rappeler que le Gouvernement a su adopter les bonnes mesures à cet égard, qu'il a agi et réagi de façon responsable, dans le respect du débat démocratique, à chaque étape de cette crise. Le Gouvernement propose aujourd'hui de réduire nos dépenses publiques – ce qui a été salué par l'ensemble de la majorité, ainsi que par une partie de l'opposition – en réduisant le déficit de 7,7 % du PIB en 2010 à 6 % en 2011. Une réduction aussi massive ne s'est jamais vue dans les cinquante dernières années. Non seulement je soutiens cette démarche, mais j'encourage le Gouvernement à aller encore plus loin – la commission des finances a, me semble-t-il, des propositions à faire en ce sens.

Je vois dans la démarche de réduction de la dépense publique une double exigence. La première est de réduire véritablement nos dépenses, parce que nous ne pouvons plus continuer à vivre à crédit, c'est-à-dire à faire supporter par les générations futures nos dépenses de politique publiques ; la deuxième est de ne pas casser le frémissement d'une reprise fragile, notamment en ce qui concerne l'emploi salarié, au moment où l'on a constaté la création de 60 000 postes en 2010.

Monsieur le ministre, vous avez rappelé hier votre volonté de tourner le dos à la culture de la dépense. Si je soutiens cette idée, j'observe, après avoir entendu hier plusieurs orateurs du groupe socialiste, que l'opposition reste figée dans ses postures idéologiques, notamment sur la réforme des retraites, en soutenant que les socialistes seraient prêts à débloquer près de 40 milliards d'euros de dépenses nouvelles pour financer nos retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Essayez plutôt de trouver un peu de cohérence dans votre projet !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Mes chers collègues de l'opposition, quelles solutions crédibles proposez-vous ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Aucune, à vous entendre, si ce n'est des impôts, encore des impôts, toujours des impôts !

Rassurons-nous, jamais le parti socialiste n'a jugé bon d'engager une réforme structurelle en matière de retraite ! Même lorsqu'il a envisagé une telle réforme en 1997, il ne l'a pas menée à son terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Lorsque j'observe le débat sur l'allongement de la durée de l'âge légal, je constate que plus personne aujourd'hui ne conteste l'allongement de la durée de l'âge légal – à part l'opposition, évidemment –…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…tandis que partout en Europe, la réforme de la retraite a entraîné un allongement de la durée de cotisation. Ainsi le gouvernement britannique envisage-t-il d'augmenter de deux années la durée du travail, ce qui porterait l'âge légal de départ à la retraite à soixante-six ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On fait mieux comme modèle que la perfide Albion !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Que dire encore des agissements de nombreux élus de l'opposition ayant des responsabilités territoriales et qui, au coeur même de la crise, n'ont jamais cessé d'augmenter les impôts, de dépenser sans compter à la faveur de subventions ou de frais de personnel ? Que dire de ces élus qui ont toujours refusé d'entrer dans la logique du Gouvernement consistant à mobiliser l'argent pour la relance et à veiller à ce que les impôts n'augmentent pas, car les Français connaissent une situation difficile ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Par leur attitude, ils n'ont fait que creuser encore davantage le fossé qui, trop souvent, sépare les élus de la population française.

Mes chers collègues, je souhaite vous faire part de trois mesures de suppression d'exceptions budgétaires qui illustrent bien l'esprit de ce projet de loi de finances. J'évoquerai successivement la TVA applicable sur les offres triple play – je suis désolé de devoir utiliser ce terme anglais, monsieur Brard –,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…l'utilisation des fonds de la formation professionnelle, et la péréquation entre les HLM, trois sujets qu'il me paraît important d'évoquer, car ils ont souvent été caricaturés et nécessitent d'être expliqués une nouvelle fois.

En ce qui concerne la nouvelle TVA sur le triple play – c'est-à-dire une offre commerciale dans laquelle un opérateur de télécommunications propose à ses abonnés un ensemble de trois services, comprenant la télévision, dans le cadre d'un contrat unique – la taxation actuelle est de 12,5 %, soit 50 % au taux normal et 50 % au taux réduit. Imposer le triple play au taux normal de 19,6 %, comme le prévoit le PLF, procurera un gain estimé à 1,1 milliard d'euros. Cette mesure concernera tous les opérateurs de télécommunications…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

J'allais y venir, monsieur Eckert : les opérateurs pourront choisir de ne pas répercuter cette hausse sur les consommateurs…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il leur suffira en effet de se rappeler que lorsqu'a été instauré un taux de TVA réduite sur la téléphonie mobile, ils n'ont pas répercuté cette réduction sur leurs abonnés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

J'y viendrai également, monsieur Sapin.

Je rappelle que le coût de cette mesure d'exception fiscale a explosé : de 37 millions d'euros en 2006, elle est passée à 835 millions d'euros en 2010, et pourrait dépasser le milliard d'euros en 2011 si nous ne faisons rien. Ce n'est plus supportable, car avec le développement des smartphones, toute la téléphonie mobile bascule progressivement vers ces offres de forfait. La hausse, qui serait de deux euros sur un abonnement à trente euros, peut très logiquement être prise en charge par les opérateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

En ce qui concerne la formation professionnelle, il s'agit de mobiliser un excédent ponctuel de trésorerie du nouveau fonds de sécurisation des parcours professionnels. Il bénéficiera de 100 % de ses recettes annuelles en 2010, soit près de 900 millions d'euros, alors que ses dépenses seront très limitées pour la première année de mise en oeuvre. Il n'est pas question de « détourner » les moyens du fonds de sécurisation pour financer d'autres dépenses : les 300 millions d'euros seront bien évidemment affectés à des dépenses de formation professionnelle financées aujourd'hui par l'État – primes au recrutement en alternance, AFPA, rémunération de stagiaires de la formation professionnelle, conventions de reclassement personnalisé. Mais dans l'état actuel de nos finances publiques, serait-il responsable de conserver de la trésorerie « dormante » ? J'estime, pour ma part, qu'il faut mobiliser tous les moyens, qu'il s'agisse des moyens directement gérés par l'État ou des moyens gérés par les administrations déconcentrées de l'État – j'aurai l'occasion d'y revenir.

En ce qui concerne la péréquation entre les HLM, le projet de loi de finances propose de supprimer l'exonération de contribution sur les revenus locatifs dont bénéficient actuellement les organismes de logement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

La CRL, payée par les bailleurs professionnels, est assise sur les loyers tirés des logements de plus de quinze ans, à un taux de 2,5 %. La suppression de l'exonération rapportera 340 millions d'euros par an et financera l'Agence nationale pour la rénovation urbaine et les aides à la pierre, notamment pour la construction de logements sociaux.

Certains prétendent qu'il s'agit là d'une nouvelle taxe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Or, je le répète, il s'agit en réalité de la suppression d'une exception fiscale, et non d'une nouvelle taxe. Nous en avons déjà débattu hier : lorsque le volume des recettes diminue par rapport à l'année précédente – ce qui est le cas de ce projet de loi de finances –, on ne peut parler d'une hausse généralisée des impôts. En revanche, lorsque le volume des exceptions fiscales passe de 90 milliards d'euros à 82 milliards d'euros, il y a une réelle réduction de ces exceptions : c'est la politique mise en oeuvre par le Gouvernement et la majorité.

Il ne s'agit donc pas d'une nouvelle taxe ; c'est bien une suppression d'exonération, dont le produit ne revient pas à l'État, mais alimente un fonds de solidarité qui sera destiné au financement de la construction, de la réhabilitation et du renouvellement urbain.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Les pauvres financent la solidarité pour les pauvres !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

De surcroît, elle s'inscrit dans la continuité de la contribution créée en 2009 par la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, mais avec un degré d'ambition très supérieur. Je vous rappelle en effet que cette contribution ne rapporte aujourd'hui que 20 millions sur les 60 à 70 millions qui avaient été prévus à l'origine.

Par ailleurs – vous le savez, et c'était un élément très important – cette péréquation ne pèsera pas sur les locataires : pour éviter une répercussion sur eux, l'augmentation de loyers dans les logements sociaux sera désormais plafonnée à l'indice de référence des loyers.

Je rappelle que la situation financière du secteur du logement social est plutôt confortable. Pour donner des chiffres, il avait plus de 6,5 milliards de fonds propres à la fin 2008 et un « autofinancement » moyen de 12,5 % du chiffre d'affaires, ce qui est très loin d'être la situation de nombreuses entreprises françaises. En outre, les avantages fiscaux liés au secteur HLM, qui sont très importants, ne sont pas remis en cause.

L'exonération d'impôt sur les sociétés représente 700 millions d'euros, tandis que les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties, sur les travaux thermiques, sur les travaux d'accessibilité et sur la construction neuve représentent 800 millions. Enfin, bien sûr, la TVA à 5,5 % représente 850 millions d'euros pour l'année 2008. S'agissant du logement social, 5 milliards d'aides personnelles au logement sont versés chaque année, ce qui représente tout de même un tiers des loyers du secteur.

Voilà, monsieur le ministre, monsieur le président, mes chers collègues, deux des mesures, parmi celles présentées dans ce projet de loi de finances, qui me semblent très importantes. Avec le triple play, cela fait trois. (Sourires.) J'ajouterai tout de même, si vous m'y autorisez, quelques mots sur le crédit d'impôt recherche.

Nous avons beaucoup parlé en commission des finances de sa réorganisation. Il s'agit d'un dispositif fantastique, qui a atteint ses objectifs et continue de le faire. Les entreprises françaises en ont besoin, même s'il mérite d'être observé avec vigilance. Comme nous l'avons dit à plusieurs reprises lors du débat en commission des finances, il est souhaitable d'avoir un travail approfondi, mais ce travail ne saurait être conclu par avance avec une disposition prise dans ce projet de loi de finances qui limiterait l'ampleur du crédit d'impôt recherche. Ce dispositif doit être maintenu en l'état pour l'essentiel, même si nous pourrions, par quelques mesures bien précises, permettre de mieux cibler son périmètre et de garantir son efficacité.

Monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, ce budget pour 2011 est ambitieux, sérieux et il offre à la France une nouvelle perspective pour ses politiques publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. François Hollande, pour le groupe SRC, qui dispose d'une durée de quinze minutes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, la France affronte la plus grave crise de ses finances publiques depuis l'après-guerre.

Il n'est pas sûr que notre débat soit à la mesure de la gravité de la situation. C'est comme si, aujourd'hui, nous avions les yeux tournés vers d'autres enjeux. Mais il est un fait incontournable : nous sommes devant le plus grave défi pour les dix prochaines années.

À quoi est due cette situation ? Essentiellement au déséquilibre qui s'est manifesté à travers une crise et des choix politiques.

La crise a induit une perte de recettes et a justifié un plan de relance dont je ne suis pas sûr qu'il ait eu les effets initialement prévus.

Le choix politique, c'est celui qui a consisté, depuis dix ans, à baisser systématiquement les impôts, au point – et c'est M. le rapporteur général qui en a fait ici même la démonstration – que nous avons perdu 100 milliards de recettes depuis dix ans. Rendez-vous compte : 100 milliards, c'est-à-dire l'équivalent du déficit prévu pour l'année 2012 !

Je ne dis pas – ce serait trop simple – qu'il aurait suffi que nous ne fassions pas ces baisses d'impôt pour qu'il n'y ait pas aujourd'hui de détérioration de nos finances publiques. Mais c'est un fait que la perte de recettes fiscales est pour une large part l'explication de la situation de notre déficit et de notre dette.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

La situation – je l'ai dit et nous en convenons tous – ne peut plus être tolérée, et cela pour trois raisons.

D'abord, parce qu'elle obère toute marge de manoeuvre budgétaire, les charges d'intérêt progressant de 5 milliards d'euros par an pour atteindre 50 milliards en 2012.

Ensuite, parce que les principes mêmes de la protection sociale sont mis en cause, dès lors qu'une partie de nos dépenses sociales est financée par emprunt. Cela constitue, effectivement, la justification de réformes structurelles. À cet égard, si nous pouvons diverger sur la réalité de ce qui se fait, nous ne pouvons pas nier cette exigence.

Enfin, parce que, si cette situation perdure, elle risque de fragiliser la signature de la France sur les marchés, même si nous constatons – et c'est tant mieux – qu'il n'en est rien pour l'instant.

Vous avez décidé de réagir en présentant une stratégie pour les finances publiques dont la loi de finances pour 2011 est la première étape. Je ne remets pas en cause l'objectif et, au nom de mon groupe, je dis que je comprends l'urgence et la nécessité de réduire les déficits publics.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Comme conclusion, cette phrase serait parfaite ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Mais je conteste les moyens que vous utilisez par l'atteindre, tout comme je dénonce le caractère illusoire de vos projections.

En fait – et je prends date – vous renvoyez à l'après-2012 les décisions nécessaires et forcément courageuses qu'il faudra engager. Je veux ici en faire la démonstration.

En 2011, c'est un ajustement par la recette, bien plus que par la dépense, auquel vous procédez. En effet, sans nier les effets de la norme de progression de la dépense publique, ou plus exactement du gel de la dépense publique, hors dette et pensions, le déficit de l'État pourrait être ramené à 90 milliards d'euros au lieu de 152 en 2010. Ce déficit, en définitive, ne pourra atteindre le niveau de 90 milliards que par la disparition des éléments exceptionnels qui avaient affecté l'année 2010, c'est-à-dire le grand emprunt, la dernière tranche du plan de relance, le surcoût temporaire de la taxe professionnelle et même le plan Campus.

Si l'on considère tous ces éléments exceptionnels, l'effort de réduction du déficit se limite à 10 milliards d'euros pour le budget de l'État ; si l'on regarde le mouvement des dépenses, au mieux la dépense sera stable pour le seul budget de l'État, tandis que la dépense sociale continuera de progresser, de même que celle des administrations locales. Ainsi, l'augmentation de la dépense publique, même si son rythme se réduit, va se poursuivre.

En d'autres termes, pour arriver à réduire le déficit public, le choix que vous avez fait est de recourir aux prélèvements. Cela signifie que c'est le « rétablissement des recettes » – expression pudique que je trouve dans le rapport du rapporteur général (Sourires) – qui explique pour l'essentiel la réduction du déficit !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Ainsi, 11 milliards d'euros de nouvelles ressources sont liés – là encore, apprécions la sémantique – à des « mesures discrétionnaires ».

Qu'est-ce qu'une mesure discrétionnaire, si ce n'est une augmentation d'impôt ? Je ne parle pas là du mouvement spontané des prélèvements provoqué par la croissance, qui va rapporter à peu près 3 milliards ; je ne m'attache qu'aux 11 milliards d'euros d'augmentations d'impôts. Pour réduire de 1,7 % de PIB le déficit public, vous sollicitez donc pour près des deux tiers un effort prenant la forme de prélèvements supplémentaires. La démonstration en est faite ; elle est incontestable.

La meilleure preuve en est que le taux des prélèvements obligatoires passera, pour la seule année 2011, de 41,9 % du PIB à 42,9 %. Cela signifie qu'il y a bien eu un ajustement par les recettes, par les prélèvements, pour aboutir à la réduction du déficit.

Je ne me plains pas que vous n'ayez pas diminué la dépense, parce qu'il eût fallu pour cela toucher à des missions essentielles. Mais je veux tout de même établir ceci comme élément de vérité : la dépense publique va continuer à progresser en 2011.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Je veux donc m'arrêter à trois vérités incontournables, incontestables et qui pourraient au moins être regardées en face par tous ici.

Première vérité : les impôts vont augmenter en 2011. La moitié pèse sur les ménages, la moitié sur les entreprises. Le seul impôt sur le revenu, qui est souvent celui sur lequel le jugement de nos concitoyens est le plus aiguisé, va voir son montant progresser de 10 %, passant de 47 milliards à 52 milliards d'euros.

On nous dira que seuls sont touchés les contribuables qui n'avaient pas déjà eu recours aux avantages qui étaient jusque-là accordés. Il n'empêche, c'est bien une augmentation d'impôts que l'on constate ici.

Deuxième vérité : votre imagination fiscale – et je félicite les services de Bercy – a été une nouvelle fois particulièrement fertile. Une quarantaine de mesures ont été prises, dont le produit moyen, si je lis bien le rapport, ne dépasse pas 300 millions d'euros. Il fallait les trouver, ces quarante mesures ! J'imagine que les tiroirs étaient déjà remplis de ces dispositifs.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

C'est beaucoup de travail, en effet ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

J'espère que vous en gardez quelques-unes en réserve… (Nouveaux sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Plutôt que de prendre deux ou trois mesures fortes, d'assumer une augmentation d'impôts sur telle ou telle catégorie de contribuables, vous avez préféré disperser l'effort.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

C'est plus difficile que de faire de la TVA !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

La TVA, ce n'est pas nous qui la proposons, monsieur le ministre. Un rapport a été adressé par Jacques Attali – personnalité que je connais bien – à Nicolas Sarkozy, prévoyant une augmentation de la TVA. Celui-ci, sans doute pris par l'enthousiasme que la lecture de ce rapport a engendré chez lui, a dit qu'il en faisait, pour l'essentiel, son « inspiration ». Lors du précédent rapport de M. Attali, il avait même parlé de « Bible ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est depuis qu'il va au Latran se faire sonner les cloches ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Je vous laisse donc la TVA, et autant que vous voudrez !

Troisième vérité : l'ajustement se fait au détriment de la justice fiscale. Je n'irai pas plus loin sur ce sujet, mais je ferai remarquer que, quand on supprime les éléments d'exonération des charges pour les particuliers employant du personnel pour des services, c'est une augmentation que l'on fait peser sur les familles. De la même manière, quand vous faites en sorte de taxer davantage les contrats d'assurance maladie solidaires et responsables, c'est un prélèvement supplémentaire sur les catégories moyennes.

En ce qui concerne la TVA, en particulier sur les abonnements triple usage, j'ai bien entendu M. Chartier. Eh bien, c'est quand même un prélèvement supplémentaire qui va toucher l'essentiel des classes moyennes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Bien ! M. Hollande pourrait être ministre des comptes publics !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Quant à l'assujettissement des organismes HLM aux contributions des revenus locatifs, c'est aussi une forme de prélèvement sur les habitants des logements sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Ça, c'est du triple prélèvement ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Voilà ce qu'est la caractéristique, la marque du budget 2011. Mais je veux aller plus loin : votre stratégie de retour à l'équilibre sur la période 2011-2014 est essentiellement fondée sur un relèvement des prélèvements.

Je l'ai montré pour l'année 2011, mais c'est également vrai pour les autres. La meilleure preuve, là encore, en est que le taux de prélèvements obligatoires à la fin de la période sera de 43,9 % du PIB…

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

En effet. Vous-même, monsieur le ministre – vous voyez que j'accorde du crédit à votre parole – vous aviez dit, dans un moment de lucidité, que, selon vous, une augmentation d'impôts était inéluctable et inévitable au lendemain de 2012. Vous avez été rappelé à l'ordre, j'en conviens, et vous avez corrigé ce propos, mais c'était inscrit dans votre projet de loi de programmation !

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Vous ne faisiez qu'énoncer ce que vous aviez vous-même écrit dans ce texte, puisque l'augmentation des prélèvements obligatoires est de deux points sur l'ensemble de la période.

En 2012, le taux déficit devra être ramené de 6 % à 4,6 % du PIB. Comment faire en l'absence de mesures exceptionnelles ? Faudra-il tailler encore davantage dans la dépense – faire un effort deux fois plus important que celui consenti en 2011 – ou augmenter encore davantage la recette ?

Votre loi programmation se fonde sur une hypothèse de croissance annuelle de 2,5 % pour 2012, 2013 et 2014. Je veux croire au sérieux de cette projection, mais si, par malheur, elle n'atteignait que 1,7 %...

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

…– c'est-à-dire la moyenne réalisée au cours des cinq dernières années –, le taux d'endettement public dépasserait alors 90 % du PIB.

Si certaines théories économiques doivent être prises avec prudence, elles reposent néanmoins sur d'utiles rétrospectives des crises d'endettement vécues par certains pays, et elles montrent que nous sommes face à une situation d'alerte.

De la même manière, nous ne sommes pas sûrs que les taux d'intérêt ne vont pas reprendre leur progression. Même si ce n'était pas le cas, le rythme annuel d'augmentation des charges d'intérêt se situe à cinq milliards d'euros pour l'ensemble de la période.

Là encore, la vérité exige de dire que le redressement des comptes publics appellera une progression de l'effort fiscal d'un niveau bien supérieur à celui que vous avez affiché dans la loi de programmation.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Il y a une forme de fuite en avant et une somme d'astuces – y compris dans cette loi de programmation – pour renvoyer la charge de l'ajustement à opérer pour respecter les engagements nationaux et européens au-delà de 2012, c'est-à-dire au prochain Président de la République et à la prochaine majorité.

Au moment même où je fais ce constat sur notre probable incapacité à atteindre les objectifs inscrits, j'apprends que le Président de la République et Mme Merkel ont convenu d'un dispositif de sanctions en cas de non-respect de ces objectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Nous inscrivons des objectifs en sachant qu'ils ne seront pas tenus. En même temps, nous prenons des engagements vis-à-vis de nos partenaires de la zone euro, prévoyant des sanctions applicables à notre conduite dont nous savons d'ores et déjà qu'elle ne sera pas vertueuse.

Deux de vos décisions illustrent parfaitement cette volonté de reporter les politiques nécessaires à plus tard et sur les générations futures : l'allongement de la durée de vie de la CADES ; l'utilisation des actifs du Fonds de réserve des retraites pour financer dès maintenant les déficits des organismes de retraite.

À partir de 2012 encore plus qu'à présent, se posera le dilemme suivant : soit relever les impôts à un niveau bien supérieur à celui indiqué ; soit diminuer vraiment la dépense ; soit encourir les sanctions des autorités européennes.

L'Allemagne, notre principal partenaire, a subi une récession plus forte que la nôtre en 2009. Pour autant, son déficit a été maintenu à un niveau raisonnable. En 2010, alors qu'elle profite d'une reprise plus forte que la nôtre, elle peut annoncer un niveau de déficit public…

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

…inférieur à 3 % du PIB pour 2011 : elle a deux ans d'avance sur son plan de marche !

Alors que nous savons déjà que nos objectifs ne seront pas atteints, comment convaincre de notre bonne foi un partenaire allemand qui, lui, a réussi à se mettre dans les clous du pacte de stabilité en deux ans ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Il eût mieux valu construire une stratégie de retour à l'équilibre plus réaliste et s'y tenir. Vous avez préféré afficher des objectifs plus ambitieux ; vous ne les tiendrez pas.

Il eût mieux valu procéder à une réforme fiscale dès cette année, plutôt que de la renvoyer au-delà de 2012.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Il eût mieux valu une véritable réforme de l'État, fondée sur une évaluation de la qualité de la dépense publique, plutôt que des règles automatiques dont on constate le peu d'effet budgétaire et le grand impact sur le fonctionnement de certaines missions.

Il eût mieux valu préparer l'avenir en accentuant l'effort sur l'investissement des entreprises et de l'État, plutôt que d'opter pour une relance improvisée comme cela a été fait en 2009.

Il eût mieux valu une nouvelle étape de la décentralisation, plutôt qu'une réforme territoriale confuse, obscure et contestée.

Monsieur le ministre, ce que vous ne ferez pas d'ici 2012, il faudra que d'autres l'accomplissent dans des conditions encore plus délicates.

Vous avez perdu du temps ; vous avez accumulé des mesures sans cohérence autre que leur rendement immédiat ; vous avez affiché des objectifs hors d'atteinte ; vous avez caché l'effort qu'il faudra demander aux Français afin de redresser les comptes publics ; vous avez taxé une partie de la classe moyenne sans faire comprendre le sens de vos mesures.

Monsieur le ministre, vous avez pris des risques. Ce sont vos successeurs qui devront, finalement, les assumer. De toute manière, vos successeurs auront à prendre des responsabilités à la hauteur de vos impasses. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, dans un entretien au journal Le Monde, le 29 septembre dernier, vous avez osé qualifier ce projet de budget pour 2011 de « rupture historique », signe que la densité des mots s'évapore.

Il ne faudrait pas confondre ce projet de loi et le contexte économique et social, à savoir l'explosion du chômage, le montant astronomique du déficit et de la dette publics, la montée, partout dans notre pays et dans tous les secteurs d'activité, du mécontentement et de la colère.

Il ne faudrait pas confondre la crise dont l'ampleur et les effets sont, eux, historiques et l'action du Gouvernement qui, elle, ne l'est certes pas.

Ce projet de budget, mes chers collègues, n'a rien d'historique. Bien au contraire, il porte la marque de la continuité et de l'aggravation. Autrement dit, ce budget est celui de l'entêtement dans une voie qui a déjà détruit autour de 800 000 emplois depuis l'élection de Nicolas Sarkozy.

Quant à la notion de « rupture », elle peut effectivement s'appliquer au contexte dans lequel s'inscrit ce budget. Cependant, il s'agit d'une rupture entre le pouvoir en place et le peuple de France.

Semaine après semaine, jour après jour et aujourd'hui encore, des millions de nos concitoyens descendent dans la rue pour s'opposer à la destruction du droit à la retraite et, globalement, pour empêcher la mise en place de cette société inique que Nicolas Sarkozy appelle de ses voeux.

Désormais, l'ampleur de la contestation est telle que le Président du Fouquet's, des riches et des privilégiés n'hésite plus à envoyer les forces de police contre les salariés et les enfants, comme cela s'est produit à Montreuil la semaine dernière.

Je sais que pour nombre de policiers et de gendarmes de notre pays se pose aujourd'hui la question de savoir de quel côté de la barrière se situe leur devoir envers la nation.

Ce budget est celui de la continuité, de l'entêtement, de l'aveuglement. En agissant ainsi, vous répondez parfaitement à la situation décrite par les « économistes atterrés », dont j'ai déjà eu l'occasion de citer le manifeste à cette tribune. Monsieur Baroin, vous l'avez sûrement lu, parce que rien ne vous échappe.

Ces économistes écrivent : « La crise a mis à nu le caractère dogmatique et infondé de la plupart des prétendues évidences répétées à satiété par les décideurs et leurs conseillers. Qu'il s'agisse de l'efficience et de la rationalité des marchés financiers, de la nécessité de couper dans les dépenses pour réduire la dette publique, ou de renforcer le "pacte de stabilité", il faut interroger ces fausses évidences et montrer la pluralité des choix possibles en matière de politique économique. D'autres choix sont possibles et souhaitables, à condition d'abord de desserrer l'étau imposé par l'industrie financière aux politiques publiques.

Pourtant, vous ne cessez de répéter qu'il n'y a pas d'autre solution. Un grand sage du XIXe siècle, Friedrich Engels, disait que lorsqu'on n'est pas capable de trouver une solution, cela ne prouve qu'une chose : qu'on a été incapable de la trouver.

Monsieur le ministre, cela s'applique aussi à vous. Vous êtes dans cette situation et, si vous étiez un petit peu marxiste…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Cela ne va pas, non ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…cela vous motiverait, vous doperait pour chercher les solutions que vous n'avez pas été capable de trouver pour l'instant. Votre caractère juvénile vous laisse du temps pour approfondir vos recherches.

Jusqu'à présent, cela n'a pas été votre choix. Après avoir refusé de réformer la finance en adoptant une loi dite de régulation bancaire et financière qui ne régule rien du tout, ce Gouvernement nous propose aujourd'hui un budget qui n'est absolument pas, lui non plus, à la hauteur des enjeux.

Vous ne vous en cachez d'ailleurs pas puisque vous affirmez sans détour dans votre projet de loi qu'il s'agit de « poursuivre les réformes structurelles engagées depuis 2007 ». J'y reviendrai en détail.

Tout d'abord, j'aimerais souligner que ce budget a été construit sur des bases totalement erronées, très loin du réel.

Ainsi, vous affirmez qu'il succède à la « crise internationale majeure que nous avons connue » et qu'il « s'inscrit dans un contexte de reprise de la croissance française ».

Je laisserai les Français juges de la question de savoir si cette affirmation est le fruit de votre ignorance ou d'une affabulation concoctée dans le cabinet noir du service d'information du Gouvernement.

Quoi qu'il en soit, parler de reprise alors que la croissance française a été de 0,6 % au dernier trimestre 2009, et respectivement de 0,2 % et de 0,6 % aux deux premiers trimestres de 2010, est, pour rester convenable, une contre-vérité flagrante.

En ce qui concerne vos prévisions de croissance, tous les économistes – y compris ceux dont vous êtes proches, vos féaux – les qualifient d'irréalistes ou, pour le mieux, de très optimistes.

Ainsi le très libéral économiste Nicolas Baverez estime-t-il dans Le Point du 30 septembre dernier que « le tiers de la réduction du déficit est censé découler d'une croissance estimée par le Gouvernement à 2 %, soit nettement au-dessus du consensus des prévisions, qui table sur une progression limitée à 1,5 % en 2011, cohérente avec le ralentissement observé dans l'ensemble du monde développé ».

Voilà, monsieur le ministre, ce que disent vos propres propagandistes. Après tout, pourquoi les Baverez, Minc et consorts ne seraient-ils pas, pour une fois, dans la vérité ?

Ma deuxième remarque porte sur ce que vous appelez « un grand coup de rabot sur les niches fiscales ». En réalité, il s'agit bien plus d'un coup de « lime à ongles » pour reprendre l'excellente expression de notre collègue Gilles Carrez.

Ainsi, vous vous félicitez d'un gain estimé à 10 milliards d'euros par an. Vous qualifiez une économie de 10 milliards de « rupture historique », d'effort « hors norme », « sans précédent » et de je ne sais quel autre superlatif publicitaire.

En réalité, monsieur le ministre, la suppression de la taxe professionnelle, l'an dernier, coûte plus de 11 milliards d'euros par an et votre laxisme en matière de lutte contre la fraude fiscale prive l'État d'au moins 25 milliards d'euros chaque année.

Rien que dans ces deux domaines, la politique du Gouvernement prive la collectivité de plus de 35 milliards d'euros par an.

Parallèlement à votre fanfaronnade sur les 10 milliards économisés, vous continuez à asphyxier les collectivités territoriales, en leur imposant une véritable cure d'austérité.

Par rapport au budget pour 2010, les prélèvements opérés sur les recettes de l'État au profit des collectivités baisseront – écoutez bien, mes chers collègues de l'UMP – de presque 30 milliards d'euros cette année. Cela est d'autant plus inacceptable et irresponsable que vous vous attaquez aux collectivités uniquement parce qu'elles sont dirigées par des majorités de gauche. La matraque contre la jeunesse et l'asphyxie financière à l'égard des territoires, voilà la considération qu'a ce Gouvernement pour la contradiction et le pluralisme démocratique.

Ce « coup de rabot » n'est donc pas seulement insuffisant, pour reprendre votre formule, il est surtout très mal ciblé. En plus des collectivités, ce seront en effet les classes moyennes et l'activité économique dans son ensemble qui en paieront la note. Ainsi, vous mettez un coup d'arrêt brutal à l'essor encore fragile de l'économie verte en supprimant les aides en faveur du photovoltaïque, vous ponctionnez le pouvoir d'achat des jeunes mariés et des personnes divorcées et vous mettez un coup de frein à l'économie numérique en augmentant la TVA sans avoir exigé, au préalable, que cette hausse ne soit pas répercutée sur les consommateurs.

Monsieur le ministre, si le Président de la République avait vraiment voulu réduire les déficits de la France, il vous aurait été assez facile de nous présenter un projet de budget qui « rabote » réellement les dépenses fiscales les plus coûteuses. Le problème, c'est que ce gouvernement a besoin du déficit pour justifier ses politiques au service des privilégiés. Si vous souhaitiez vraiment réduire les déficits, vous auriez dû commencer par la suppression du bouclier fiscal, qui prive l'État de plus de 700 millions d'euros par an, sans remettre en cause, bien entendu, l'ISF. La suppression du bouclier fiscal n'est donc pas qu'une nécessité symbolique.

Certains ont parlé d'un coup de rabot, d'autres d'un coup de lime tandis que Mme Lagarde a utilisé l'image du couteau suisse.

J'ai amené un rabot, monsieur le ministre, car je pense que vous n'en usez pas souvent.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Il est très beau !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Oui, et je fais très attention.

Comme vous le voyez, un rabot comporte une lame qui, quand vous l'utilisez à bon escient, coupe vraiment. Imaginez-vous en train de raboter la fortune de Mamie Liliane : chaque copeau représenterait plusieurs centaines de millions d'euros.

Si, au contraire, comme le rapporteur général le prétend, vous ne faites que limer, vous voyez que vous ne récupérerez rien sur les grandes fortunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais si, comme Mme Lagarde l'a avancé, vous usez du couteau suisse, c'est alors très différent…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

L'hémicycle est devenu le marché aux puces ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…parce que, avec un tel couteau, vous extrayez l'os à moelle du morceau de viande, cet os à moelle que vous réservez aux privilégiés.

Monsieur le ministre, vous ne savez pas comment fonctionne un rabot et ceux qui vous ont conseillé la formule ont oublié un détail car il comporte une pièce de bois qui retient la lame : si l'on enlève cette pièce de bois, qu'on retire les lames et qu'on remette en place la pièce de bois, vous avez l'illusion du rabot et vous n'enlevez plus rien du tout sur la fortune de Mamie Liliane. C'est ce que vous pratiquez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Voilà votre politique, monsieur le ministre. Alain Rodet, qui, à ses heures de loisir, pratique le rabot, sait que j'ai raison.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous utilisez, monsieur le ministre, des formules dans les médias pour faire croire que vous avez la volonté de tailler dans les grandes fortunes. En réalité, c'est le pouvoir d'achat des petites gens que vous, non pas limez, mais rabotez carrément. Nous ne pouvons pas vous suivre dans cette voie. C'est ce que les gens vous disent tous les jours ou presque dans les rues de notre pays.

Le rétablissement du taux normal de la TVA dans la restauration rapporterait plus de 3 milliards d'euros par an. Vous qui cherchez toujours des sous, monsieur Mallié, vous n'auriez plus à le faire. Le coût de la défiscalisation des heures supplémentaires représente, selon le Conseil des prélèvements obligatoires, plus de 4 milliards d'euros chaque année. J'ai déjà mentionné la suppression extrêmement coûteuse de la taxe professionnelle et le coût annuel de la fraude fiscale. Le crédit d'impôt-recherche, quant à lui, qui sert avant tout d'outil « d'optimisation fiscale », coûte plus de 2 milliards par an, malgré les louanges adressées à ce crédit par M. Jérôme Chartier.

Beaucoup d'autres mesures restent à prendre pour rétablir les finances de la nation et remettre l'économie au service des hommes. Ainsi, qu'attendez-vous, monsieur le ministre, pour rendre effective la taxe « Tobin » – appelez-la comme vous voulez ? Vous le savez, mes chers collègues, si l'on veut mettre un frein aux mouvements spéculatifs, il faut absolument créer un taux de taxation dissuasif sur les transactions financières.

Voilà des ressources à votre disposition !

Qu'attendez-vous pour définir les critères d'une saine progression du crédit, en fonction du potentiel de croissance de l'économie réelle ? Comme vous le savez, ce sont en partie les politiques inconséquentes de crédit – d'un mauvais crédit de surcroît – qui ne visent que le profit, le plus élevé et le plus « court-termiste » possible, qui nourrissent les bulles spéculatives et provoquent, de plus en plus souvent, des crises systémiques. Quand reconnaîtrez-vous enfin la nécessité d'une nouvelle politique tendant à mettre en place un contrôle public de la dynamique de distribution des crédits par les banques ?

Enfin, qu'attendez-vous pour imposer la transparence aux acteurs de la finance mondiale ? Je vous rappelle, mes chers collègues, que la banque Lehman Brothers, prise dans son ensemble, comptait pas moins de 2 985 entités juridiques différentes.

J'aurais pu détailler davantage les dispositions que vous pourriez prendre. La liste est loin d'être complète mais la question fondamentale est de savoir pourquoi vous ne faites pas les réformes qui, pourtant, s'imposent à tout esprit sensé. La raison est tout simplement que cela ne correspond pas aux desseins du Président de la République. Dans leur excellent ouvrage « Le président des riches », les sociologues Monique Charlot et Michel Pinçon démontrent, à la page 187, que le « sarkozysme, c'est l'argent subvertissant la politique, à un degré jamais encore atteint sous la République ». Et d'ajouter plus loin que « la force de l'oligarchie est énorme », qu'« elle contrôle l'économie, la finance, les médias ». « Ses représentants, écrivent-ils, sont au coeur du pouvoir politique » – ce que vous êtes bien placé pour savoir, monsieur le ministre. Je vous recommande ce livre, que l'on ne peut pas lire en une seule fois tellement les situations qui sont décrites – et qui sont les avatars de la bande du Fouquet's – donnent la nausée.

Comme vous l'aurez compris, monsieur le président, les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine s'opposeront à votre projet de budget qui fait payer aux Français la note de la crise et les cadeaux que vous faites aux actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Venez avec une niche la prochaine fois, monsieur Brard, pour la raboter. Ce sera encore plus amusant ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Alain Rodet, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rodet

Du temps où M. Guy Ducoloné siégeait dans cet hémicycle, il aurait fait remarquer à mon ami Jean-Pierre Brard, s'il avait présidé cette séance, qu'il n'est permis d'apporter à la tribune aucuns engins ni graphiques. Il était implacable sur ce sujet. Je fais ce rappel en guise d'hommage au très grand député communiste Guy Ducoloné, qui a été vice-président de notre assemblée. (Sourires )

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Et, par là même, vous adressez une critique au président de séance. (Sourires.) Mon indulgence s'explique par le fait que M. Ducoloné était du même groupe que M. Brard. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre, qui dispose de dix minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la lecture du projet de loi de finances pour 2011 et du projet de loi de programmation des finances publiques, je ne puis que constater combien les idées du Nouveau Centre progressent. Voilà plus de trois ans, en effet, que nous ne cessons de répéter que la France ne pourra indéfiniment vivre à crédit et s'endetter toujours plus pour couvrir ses dépenses de fonctionnement. Or, le retour à un déficit de 2 % des finances publiques correspond à l'équilibre global de fonctionnement puisque les investissements publics tournent, bon an, mal an, autour de 2 % du produit intérieur brut.

Au Nouveau Centre, nous n'avons pas, comme beaucoup, attendu que des États aux indicateurs économiques comparables aux nôtres menacent de faire défaut pour défendre l'idée de l'urgence d'un retour à l'équilibre de nos finances publiques.

Aujourd'hui, l'urgence nous donne raison.

Nous n'en faisons pas un motif de satisfaction pour autant, car la question de l'endettement public n'est pas seulement une question politique, c'est aussi une question d'équité entre les générations ainsi qu'une question éthique.

Sous la pression des marchés et de la Commission européenne, force est de constater que le Gouvernement commence à prendre la mesure des enjeux auxquels notre pays est confronté.

C'est la raison pour laquelle, je vous le redis, monsieur le ministre, notre groupe vous soutiendra dans l'effort que vous avez entrepris d'accomplir.

Dans cette perspective, le groupe Nouveau Centre développera quatre messages, prouvant que les idées du Nouveau Centre progressent, bien qu'elles progressent encore insuffisamment.

Le premier message, c'est que, comme nous n'avons cessé de le dire, sans une politique volontariste de réduction de la dépense – en fait de moindre croissance de la dépense – plus rapide que celle proposée par le Gouvernement, notre pays n'atteindra jamais les objectifs dont il est fait mention dans la nouvelle loi de programmation que nous allons examiner.

Tout d'abord, le solde du budget de l'État, hors opérations exceptionnelles, se réduit, d'après les données fournies par le Gouvernement, de 13,5 milliards d'euros, passant de 98,9 milliards en 2010 à 85,4 milliards en 2011. La réduction apparente de 60 milliards, qui est considérable, s'analyse donc comme résultant pour près de 80 % de la non-reconduction de mesures exceptionnelles.

De plus, la règle retenue pour l'indexation des dépenses de l'État sur la période 2011-2014 est celle d'un gel en valeur des dépenses de l'État, y compris des concours aux collectivités territoriales et à l'Union européenne, mais hors pensions des agents publics et hors intérêts de la dette. C'est la règle du « zéro valeur restreint ».

Cette règle ne serait pas beaucoup plus contraignante, n'ayons pas peur de le dire, que la règle du zéro volume élargi, en vigueur depuis plusieurs années, qui consiste à stabiliser en volume la totalité des dépenses de l'État.

En effet, malgré cette règle, avec des dépenses globales en 2011 de l'ordre de 356,9 milliards d'euros au sens de la norme élargie, et une inflation de 1,5 %, l'augmentation des dépenses en valeur est de l'ordre de 1,3 %. Le présent budget ne retient donc, en apparence, qu'une diminution de 0,2 % des dépenses de l'État en volume, au regard du changement de règle d'indexation.

Mais, si l'on tient compte – et je vous renvoie à ce sujet au rapport – des 707 millions de ressources fiscales nouvelles dont le produit est affecté directement, hors budget général, à un certain nombre d'opérateurs, on atteint une croissance de 1,5 %. Il n'y a donc pas, globalement, de réduction au-delà de l'inflation.

Pire encore, si les deux règles semblent, à court terme, aboutir à une même hausse de la dépense publique, à moyen et long terme, il est possible que la nouvelle règle d'indexation devienne moins contraignante que la précédente, et ce pour deux raisons au moins : la faiblesse prévisionnelle de l'inflation, d'une part, l'augmentation probable de la charge de la dette, d'autre part.

Le nouveau critère, qui apparaît plus dur que le précédent, l'est en fait moins et il se peut qu'il le soit encore moins dans les prochaines années.

Je saisis l'occasion pour dire quelques mots des grands blocs de dépenses.

Premier bloc : pour obtenir le maintien de la masse salariale de l'Etat à 82 milliards d'euros, en euros courants, il faudrait, non seulement ne pas réévaluer le point de la fonction publique, mais encore limiter le GVT à 400 millions d'euros maximum – alors qu'il était à 600 millions ces dernières années – et ne redonner à la masse des primes que 200 millions à peu près des 800 millions d'économie réalisée grâce à la réduction des effectifs.

Comme le rapport de la Cour des comptes l'a montré, sans durcissement des règles en la matière, nous ne tiendrons pas le maintien en euros courants de la masse salariale de l'État.

Deuxième observation, la hausse des dépenses de fonctionnement hors masse salariale n'est pas de 5 %, mais de 1 %, comme l'explique excellemment notre rapporteur, c'est-à-dire de 100 millions d'euros, pour un total de 10 milliards d'euros de dépenses.

Enfin, les dépenses d'intervention sont en baisse de 600 millions d'euros, que l'on doit rapporter à un total de 59,5 milliards d'euros. Elles sont donc en baisse de 1 %.

Si nous nous réjouissons du gel, en valeur, des dotations aux collectivités territoriales, ce n'est pas parce que nous serions des masochistes mais parce qu'on ne peut, selon nous, redresser les finances publiques si l'on n'impose pas la même règle, le « zéro valeur », partout et pendant plusieurs années.

Deuxième message : nous ne parviendrons pas à l'équilibre budgétaire sans un effort équilibré, portant à la fois sur la réduction de la dépense, qui est prioritaire, et sur la protection de nos recettes.

Le Gouvernement admet d'ailleurs à demi-mot cette nécessité. En effet, la réduction de 1,7 point de nos déficits publics, qui passent de 7,7 % de la richesse nationale en 2010 à 6 % en 2011, se répartit entre un point de hausse des prélèvements obligatoires et 0,7 point d'effort sur la dépense. Sur la période 2011-2014, les 5,7 points de réduction des déficits publics s'expliquent, pour trois points, par une réduction du poids des dépenses et, pour deux points, par une hausse des prélèvements obligatoires, qui reviendraient sensiblement au niveau de 2007. Je n'adresse pas là une critique au Gouvernement. C'est quelque chose d'équilibré : il faut reprendre les deux points de recettes que nous avons perdus du fait de la crise, et reprendre trois points sur la dépense. Tenir un 6040, c'est équilibré. Il est dommage – je le dis au Gouvernement – de ne pas le dire comme cela, simplement, car c'est équilibré et juste.

La réduction de la dépense de l'État ne dépasse pas, à vrai dire, 14 milliards d'euros cette année, si l'on exclut les mesures liées à l'extinction des dépenses exceptionnelles, qui ne sont que des économies de constatation.

Il faut mettre un terme à une certaine contradiction dans le discours du Gouvernement, monsieur le ministre. D'un côté, celui-ci s'ingénie à dire qu'il n'augmente pas les impôts ; de l'autre, il élève le taux des prélèvements obligatoires, qui reviendra en 2012 à son niveau de 2007, alors que le Président de la République lui-même avait affirmé vouloir diminuer ce taux de quatre points durant son quinquennat. Il faut assumer ce retour, en 2012, au niveau des prélèvements obligatoires de 2007 car, un an après l'élection du Président de la République, il y a eu la crise. Il faut l'assumer, on ne peut pas la nier.

Ajoutons, enfin, que le Gouvernement table sur plus de 12 milliards d'euros de recettes supplémentaires liées à la reprise économique avec une croissance à 2 % en 2011.

Au Nouveau Centre, monsieur le ministre, nous avions alerté le Gouvernement, lors du débat d'orientation des finances publiques, sur le caractère trop optimiste de sa précédente prévision de 2,5 % de croissance du PIB en 2011. Nous avions été partiellement entendus puisque cette prévision a été ramenée à 2%, mais nous persistons à penser qu'une prévision de 1,5 %, correspondant à la croissance annuelle moyenne des dix dernières années hors crise, était raisonnable et conforme à l'estimation moyenne de l'ensemble des économistes. Si l'on avait retenu cette hypothèse pour, finalement, faire mieux, tant mieux, cela aurait réduit un peu plus le déficit.

Troisième message : si les idées du Nouveau Centre en faveur de la réduction des niches fiscales et sociales commencent à être partagées, il faut, encore une fois, monsieur le ministre, aller plus loin.

Le Gouvernement a choisi de procéder à une réduction minime d'une poignée de niches fiscales – 22 sur 360 – en lui appliquant le rabot de 10 % que nous avions préconisé. Encore faut-il préciser que ces 440 millions d'euros ne sont qu'une toute petite partie de la masse des dépenses fiscales. Pour reprendre l'expression pleine d'humour de notre rapporteur général, ce n'est plus un rabot, c'est une lime à ongles !

Globalement, le montant des niches fiscales ne se réduirait que d'un milliard et demi d'euros, passant de 66,8 milliards d'euros en 2010 à 65,3 milliards d'euros en 2011. Comme le rappelle notre rapporteur général, la sous-estimation du coût du crédit d'impôt en faveur du développement durable et une réduction spontanée de 500 millions d'euros, sans explication satisfaisante, montrent que, probablement, la réduction est pratiquement nulle. Du moins, le montant des niches fiscales n'augmentera-t-il plus de 5 milliards d'euros par an.

Au Nouveau Centre, nous avons toujours plaidé pour une réduction de l'ensemble des dispositifs fiscaux dérogatoires, y compris ceux relatifs à l'impôt sur les sociétés, purement et simplement oubliés dans ce projet de loi.

C'est aussi la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement visant à instaurer un taux plancher minimum d'impôt sur les sociétés, fixé à 15 %, c'est-à-dire le taux qui s'applique aux PME. Il n'est pas normal que de très grandes entreprises bénéficient de taux de 8 %, 10 % ou 12 %, grâce à toute une série de dispositions et de niches fiscales auxquelles nous ne nous sommes pas encore attaqués.

C'est cette même logique de limitation des effets d'optimisation des dispositifs fiscaux dérogatoires qui nous a conduits à déposer des amendements pour une meilleure utilisation du crédit d'impôt recherche. Une fois encore, la commission et la quasi-totalité de nos collègues, de gauche comme de droite et du centre, pensent qu'il faut aller plus loin. Je comprends le Gouvernement : craignant l'instabilité fiscale, il ne veut pas toucher au crédit d'impôt recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Cependant, les travaux menés par la commission des finances montrent un certain nombre de détournements dudit crédit d'impôt.

J'ajoute que, sur les 10 milliards d'euros de réduction de niches fiscales et sociales présentées dans ce budget, certaines réductions ne sont ni pérennes, ni socialement justes. En fait, une seule des trois mesures de taxation des assurances est pérenne, celle relative à la taxation des complémentaires santé. S'agissant des deux autres, c'est-à-dire la taxation au fil de l'eau des contrats multi-supports et l'application de la taxe sur les conventions d'assurance à la réserve de capitalisation, nous constatons que la première a un produit dégressif et que la seconde disparaît en 2012.

Enfin, quatrième et dernier message que nous souhaitons faire passer à l'occasion de l'examen de cette loi de finances : il est absolument nécessaire de prendre en compte la forte demande de justice sociale de nos concitoyens.

Une fois encore, il faut tempérer l'affirmation du Gouvernement, qui fait valoir que certaines mesures d'économie pèseront autant sur les entreprises que sur les ménages. Madame la ministre de l'économie nous a d'ailleurs dit, hier soir, que tout finit, un jour ou l'autre, par peser sur les ménages ; elle a raison. Je pense ici au relèvement de TVA sur les opérateurs de triple play et à la taxation des complémentaires santé, dont le coût finira par être intégralement répercuté sur les consommateurs, comme l'ont d'ailleurs d'ores et déjà annoncé les fournisseurs d'accès et les assurances. Ce coût ne sera pas supporté à parts égales entre les entreprises et les ménages. Je pense également à l'assujettissement des sociétés HLM à la contribution sur les revenus locatifs. Cette taxe, qui devrait représenter 2,5 % du montant des loyers perçus sur les logements de plus de 15 ans, suscite l'indignation des acteurs du mouvement HLM. Selon ces derniers, une telle imposition représenterait une hausse d'environ 80 euros par mois par loyer. J'ajoute que, si les HLM n'ont jamais, depuis l'origine, payé la contribution sur le revenu locatif, puisqu'elle ne pèse que sur les personnes morales privées et les bailleurs privés, nous avons proposé une solution alternative.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Donnez-moi cinq minutes, monsieur le président, et je finis.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Enfin, comment ne pas évoquer ici l'indispensable refonte de notre fiscalité ? Nous la demandons depuis un peu plus de trois ans maintenant.

Pour notre groupe, en effet, le bouclier fiscal n'est qu'une mauvaise solution apportée à un mauvais impôt qui ne réduit pas les inégalités et qui n'a que des effets pervers dont le premier est l'évasion fiscale. Tant qu'il y aura un ISF, nous serons condamnés, comme la gauche, à maintenir un mécanisme de plafonnement.

Le groupe Nouveau Centre a eu le courage de poser le problème de fond, et de proposer des solutions qui, je le rappelle, consistent, en contrepartie de l'abrogation du bouclier et de l'ISF, à créer une nouvelle tranche pour la fraction supérieure à 100 000 euros par part, et à augmenter les prélèvements sur les revenus du patrimoine, que nous avons – gauche comprise – abusivement abaissés.

En conclusion, mes chers collègues, vous l'aurez compris, c'est tout à la fois avec responsabilité et avec courage, mais aussi avec justice, que le groupe Nouveau Centre aborde ce débat budgétaire et, si ces deux projets de loi vont dans la bonne direction, ils doivent aller plus loin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je vous remercie, monsieur de Courson, mais il faut tout de même essayer de respecter le temps imparti.

Il me semble que M. le ministre souhaite répondre aux orateurs.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Répondre aux principaux orateurs des groupes, par respect pour la représentation nationale, me semble effectivement la moindre des choses, notamment sur la loi de programmation des finances publiques.

Je voudrais tout d'abord dire à Jérôme Chartier toute la reconnaissance du Gouvernement. Il a mis en lumière les grands enjeux de cette préparation budgétaire. Il a souligné l'effort puissant en matière de dépenses, le choix politique du Gouvernement de ne pas augmenter, n'en déplaise aux représentants de la gauche, les prélèvements obligatoires et nos choix justes et précis, qui ne sont pas une addition de petites mesurettes prises à l'emporte-pièce dans la solitude des bureaux de Bercy pour faire plaisir à des techniciens. C'est le fruit d'un travail minutieux, exigeant, difficile, qui se conclut par le choix politique assumé d'épargner les publics fragiles. Je me permets au passage de préciser, en m'appuyant sur les propos de Jérôme Chartier, que nous menons une réflexion sur la qualification exacte des 75 milliards d'euros de « niches fiscales » et des 45 milliards d'euros de « niches sociales ». En réalité, on peut appliquer un rabot non pas sur 75 milliards d'euros de niches fiscales mais sur 15 milliards. Prenons l'exemple de quelques catégories socioprofessionnelles, par exemple celle qui commente nos travaux. Le dispositif dont elle bénéficie s'inscrit dans une logique de modulation et de calcul des frais professionnels exonérés. Ce n'est en fait pas une niche fiscale.

Par conséquent, si nous appliquons un rabot de 10 %, c'est sur un montant de 15 milliards d'euros, non de 130 ou de 140 milliards d'euros. Et si, sur 15 milliards, nous parvenons à raboter 400 ou 450 millions d'euros, ce n'est pas si nul ou neutre, pour reprendre les expressions employées par ceux qui s'opposent au Gouvernement sur ce sujet, et cela vient en complément du puissant effort qui permet d'atteindre le montant de 10 milliards d'euros de niches supprimées.

Je suis en tout cas reconnaissant à Jérôme Chartier de son soutien.

Il a également bien mis en lumière le fait que le plan français n'avait strictement rien à voir avec le plan grec, avec le plan espagnol, qui prévoient baisse des salaires des fonctionnaires et augmentation de la TVA, ni avec le plan portugais, dont on parle peu mais qui comporte pourtant des mesures spectaculaires, très douloureuses. Or le gouvernement portugais compte, mesdames et messieurs les députés du groupe socialiste, parmi vos amis. Vous me rétorquerez que nous avons, nous, d'autres amis, qui font encore plus dur, les Britanniques. Certes, mais c'est sans comparaison possible avec nous. Vos amis prennent des mesures très douloureuses, les nôtres également, mais notre gouvernement ne prend que des mesures responsables.

Monsieur Hollande, vous produisez beaucoup d'idées, et il est bien normal que je vous réponde. Ancien premier secrétaire du Parti socialiste, vous avez une longue expérience. Pour paraphraser l'un de vos mentors, vous avez à la fois un passé et, si vous me le permettez, un certain passif. (Sourires.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Voilà qui nous ramène à l'Histoire, après les propos de M. Brard qui, évoquant la préparation du budget 2011, nous ramenait au dix-neuvième ou au vingtième siècles.

Cela dit, je vous trouve injuste. Si, du moins, nous étions sûrs que vous ne vous êtes jamais trompés lorsque vous étiez aux affaires, alors vos sombres prédictions pourraient paraître susceptibles de se réaliser l'an prochain ou les années suivantes. Je n'ai cependant pas le sentiment que vous ayez, vous et vos amis, montré de manière éclatante votre aptitude à mener une politique publique qui maîtrise la dépense – vous avez même fait tout le contraire – et qui fasse montre d'exigence s'agissant de la levée de l'impôt. Les chiffres que vous avez cités, à propos de l'augmentation des prélèvements obligatoires, d'ailleurs liée pour une large part à la relance de l'activité économique, n'atteindront jamais ceux constatés sous le gouvernement que vous-même souteniez depuis la rue de Solférino. C'est en effet sous Lionel Jospin que le taux des prélèvements obligatoires a atteint son plus haut niveau : 44,9 % du PIB. Nous n'atteindrons jamais ce taux, puisque la loi de programmation des finances publiques prévoit un point d'inflexion qui permettra, de toute façon, de réduire, à terme, le niveau des prélèvements obligatoires.

Restons cependant un instant sur ce sujet. L'immense différence entre vous et nous, c'est que nous refusons tout choix d'augmentation généralisée des impôts. Nous ne touchons pas à l'impôt sur les sociétés, nous ne touchons pas à l'impôt sur le revenu et nous ne touchons pas à la taxe sur la valeur ajoutée !

Quant aux niches fiscales, il s'agit d'une dépense de l'État, sous forme fiscale, à l'opposé d'une subvention ou d'un crédit budgétaire, certes, mais ce ne sont pas moins des dépenses de l'État, fruits d'un choix de ne pas prélever l'impôt sur telle assiette.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

C'est donc quelque chose qui ne peut pas être considéré comme un acquis social ! Un avantage, une exonération, un dégrèvement, le refus d'une imposition ne sont pas des acquis gagés sur l'éternité.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Cela nous sépare. Ce n'est pas parce que vous donnez à un instant t un coup de pouce, un élan supplémentaire pour irriguer telle partie de notre économie, pour impulser tel projet, pour accompagner tel dispositif, que l'on doit considérer que c'est pour la vie. Non, il faut avoir le courage – et c'est bien de courage que fait preuve le Gouvernement dans cette préparation budgétaire – de remettre en cause des éléments dont on considère qu'ils ne correspondent plus à l'intérêt général, à l'heure où il faut réaliser des économies.

Évidemment, dans une période d'opulence, d'abondance ou de croissance excessive, il serait beaucoup plus facile de distribuer de l'argent, y compris en augmentant l'addition des niches fiscales. Mais ce n'est pas de bonne politique et ce n'est vraiment pas le moment, car nous n'en avons plus les moyens. Nous n'avons plus les moyens d'ouvrir des guichets, nous n'avons plus les moyens de ne pas calculer les dispositifs fiscaux. Nous devons inscrire obligatoirement dans les lois de finances toutes les dispositions fiscales dérogatoires au droit commun. Cela nous évitera à tous de commettre des erreurs.

Je voudrais être certain que nous nous comprenons bien : 10 milliards de réduction en matière de niches fiscales, c'est une réduction de 10 milliards de la dépense publique – j'ajoute ce petit codicille à votre réflexion sur le maigre effort que fait, selon vous, le Gouvernement en matière de dépenses, qu'il s'agisse des sources de l'État, de la sécurité sociale ou des dotations aux collectivités territoriales.

Je m'arrêterai rapidement sur ces trois points.

S'agissant d'abord des gels en valeur, et pour vous donner un élément de réponse, monsieur de Courson, ainsi qu'à vous, cher François Hollande, le seul gel en valeur qui nous permette d'assumer le passé, les dettes, les pensions, permet mécaniquement d'économiser 700 millions. Par les temps qui courent, ce n'est pas rien ! Il n'y a pas de petites économies pour un ministre du budget, pas d'économies symboliques. Il y a une addition d'économies qui permettent, à terme, d'atteindre notre objectif de réduction de 40 milliards. C'est un effort important, qui implique, dans les trois années à venir, une réduction de 10% des crédits d'intervention.

Cet effort exige beaucoup de la fonction publique d'État afin qu'elle se modernise : elle aura moins de fonctionnaires, mais ceux-ci seront mieux payés. Là encore, c'est un choix politique qui est assumé dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

Deuxième source de dépenses : celles de la sécurité sociale. Je vous le dis à nouveau, cher François Hollande, nous nous sommes retrouvés la semaine dernière, nous nous retrouverons probablement la semaine prochaine, et ce n'est pas fini, car la route est longue. Je vous la souhaite la plus longue possible (« Pas trop tout de même ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP), compte tenu de l'audace et du courage qui vous distinguent de nombre de vos partenaires de jeu de la rue de Solferino qui, souvent, basculent dans la facilité. J'estime qu'avoir avec vous un débat qui éclairera l'opinion publique sur la fiscalité sera plus utile que d'être confronté à certains ténors du PS, lesquels tombent dans une démagogie telle que, parfois, je me demande s'ils ont un jour été aux responsabilités ! Pourtant, ils ont quasiment tous été ministres sous François Mitterrand ou lors de la cohabitation avec Jacques Chirac…

Pour ce qui est de la deuxième source, la sécurité sociale, nous respectons, pour la première fois depuis 1997, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie. Cela nous donne un peu de crédit pour assumer l'annonce d'un ONDAM à 2,9% l'année prochaine et à 2,8% les années suivantes.

S'agissant de la troisième source, le gel des dotations de l'État aux collectivités territoriales, l'effort est, me semble-t-il, assez équilibré, et je remercie le rapporteur général du budget. Nous sortons le FCTVA de l'enveloppe ; vous qui êtes un élu local, vous savez donc que la mesure de gel des dotations permettra aux collectivités territoriales de poursuivre leur logique d'investissement. S'il y a des augmentations d'impôts de la part des collectivités locales, vous ne pourrez pas dire, à gauche, que c'est de la responsabilité du Gouvernement, puisqu'elles serviront à financer vos politiques de fonctionnement, d'embauche de personnels, non vos investissements, puisque précisément ceux-ci échappent à la politique du rabot.

Voilà les quelques éléments de réflexion que je souhaitais vous livrer. Je pourrais les développer plus longuement, mais nous en aurons sans doute l'occasion dans les jours à venir. Quoi qu'il en soit, monsieur Hollande, non, ce budget n'est pas une impasse, mais au contraire une voie ouverte, vertueuse, courageuse, exigeante, historique sur le plan de la réduction des déficits budgétaires, responsable, comme je l'ai souligné à de nombreuses occasions, et équitable, dans la mesure où il vise à préserver notre modèle social français.

Monsieur Brard, je m'insurge contre le fait que vous m'ayez demandé d'être un peu marxiste ! Je souhaite que soit noté dans le compte rendu que je prends ce compliment pour ce qu'il est – je le dis avec une certaine malice !

Par ailleurs, monsieur le président, je m'insurge – je le dis encore avec malice – contre le fait que vous n'ayez rien tenté contre un orateur armé d'un couteau suisse, lame sortie, et d'un rabot, ainsi que d'une lime à ongle ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

La scène était sans doute spectaculaire, mais restons sérieux et revenons-en à l'objectif général.

Lorsque le rapporteur général avait évoqué la lime à ongle, je lui avais expliqué que j'avais le sentiment d'être un menuisier bâtissant une charpente pour une maison solide et durable plutôt qu'un fakir en train de se faire les ongles ! Les 10 milliards dont nous parlons n'ont rien à voir avec une lime à ongles, même si bien sûr on peut toujours faire plus. Jean-Pierre Brard restera dans les annales de cet hémicycle comme celui qui aura osé pointer un couteau vers le modeste ministre du budget que je suis ! Toutefois, l'effort général visant à atteindre ces économies va bien au-delà de cette stricte symbolique. Pour le reste, monsieur Brard, nous sommes en désaccord sur tout…

Monsieur de Courson, je regrette le caractère – que vous qualifierez de trop lucide, à la lumière de l'héritage budgétaire qui est le vôtre – de votre propos. Vous avez passé de si nombreuses heures dans cette assemblée à discuter de toutes ces mesures, avec tant de différents ministres du budget… Mais je veux profiter des séances à venir pour vous convaincre que la ligne directrice que nous proposons est la bonne, qu'elle est exigeante et à la hauteur de vos espérances en matière de réduction des déficits budgétaires, que ce n'est pas du vent…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

…et que non seulement cette addition de mesures est très vertueuse pour 2011, mais le fait que nous vous proposions une loi de programmation des finances publiques montre que notre objectif de réduction des déficits par rapport à notre richesse nationale est intangible. Cela devrait vous encourager à nous rejoindre sur l'essentiel de nos propositions.

Nous en débattrons sans doute et il faudra peut-être aller plus loin. Le Gouvernement affirmera ses positions ou, parfois, s'en remettra à la sagesse de la représentation nationale. Avec le rapporteur général, nous avons déjà quelques idées en tête. En tout cas, la suite de nos débats nous permettra d'éclairer mieux encore la représentation nationale et l'opinion publique sur les enjeux de demain et en particulier de ce budget pour 2011. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Nous poursuivons la discussion générale. La parole est à M. Richard Mallié.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Monsieur Balligand, je me réjouis de vous voir présider cette séance – en ce qui me concerne, c'est la première fois.

Monsieur le ministre, vous parliez tout à l'heure des XIXe et XXe siècles. Pour ma part, je citerai Turgot déclarant en 1774 : « Les temps changent, le monde évolue, mais les problèmes auxquels sont confrontés les hommes restent sensiblement les mêmes. Pour améliorer les finances d'un État, trois objectifs doivent être respectés : point de banqueroute ; point d'augmentation d'impôts et point d'emprunts. Pour remplir cette triple astreinte, un seul moyen existe : la réduction de la dépense au-dessous de la recette de l'État. Cette réduction doit être conséquente pour pouvoir chaque année rembourser d'autant les dettes anciennes. »

Sur quels postes économiser ? Chaque ordonnateur, comme le déclarait Turgot, soutiendra que toutes les dépenses particulières sont indispensables. Ils peuvent donner de bonnes raisons, mais il faut que toutes ces raisons cèdent à la nécessité absolue de l'économie. La similitude entre la vision de Turgot et notre situation actuelle est troublante et nous pousse à partager son diagnostic.

Je tiens d'abord à souligner l'ampleur de la réduction des déficits prévue par ce projet de loi de finances. Il s'agit d'un objectif intangible, non négociable, compte tenu de la situation de nos finances publiques. Cet objectif doit devenir l'alpha et l'oméga de notre pays, et ce, pour les prochaines années. L'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants en dépend.

Monsieur le ministre, vous le disiez, le budget pour 2011 fera date dans l'histoire des finances publiques parce qu'il tourne le dos à des années d'augmentation du budget de l'État. Il appelle à un véritable changement des mentalités vis-à-vis de la dépense publique et tous les acteurs seront concernés.

Les déficits ont atteint des niveaux élevés en raison, notamment, de la crise. Si nous voulons assurer à notre pays une croissance pérenne, il est de notre devoir de les réduire de façon drastique.

Le Gouvernement a fait un choix clair et courageux : celui d'agir sur la dépense plutôt que sur les prélèvements obligatoires, ce qui aurait perturbé le soutien à la croissance. Nous avons en face de nous un projet de budget responsable, car il assure un juste équilibre entre baisse des dépenses et soutien à la reprise économique.

Toutefois, je regrette qu'il ne soit pas allé plus loin. Les efforts vont dans le bon sens, à condition que ceux qui portent sur la dépense publique ne soient pas annihilés à terme. Des règles strictes doivent encadrer les dépenses des 655 opérateurs dépendants de l'État. Si chacun d'entre eux diminue ses dépenses de 200 000 euros, l'économie sera de 130 millions d'euros. Ce n'est pas rien !

Cela étant, et malgré les débats que nous avons pu avoir l'année dernière sur cette autorité, je constate que la HALDE s'octroie de nouveau une augmentation significative de plus de 340 000 euros. Dans le même temps, elle s'acquitte toujours d'un loyer de 2 millions d'euros, soit 20% de son budget. Cela fait plus de cinq ans que les parlementaires le rappellent.

Le train de vie mené par cette autorité interpelle bon nombre de nos concitoyens. À l'heure où le Gouvernement présente un budget rigoureux et courageux, elle augmente son budget de 4% chaque année sans esquisser l'ombre d'une économie. C'est pourquoi, avec un certain nombre de parlementaires, nous déposerons un amendement visant à diminuer son budget en reconduisant celui qui était le sien pour 2010.

Notre pays met actuellement en place une légitime rationalisation des dépenses publiques pour faire aussi bien avec un peu moins. La HALDE doit en prendre sa part.

Un des plus grand problème pour l'entreprenariat dans notre pays est l'insécurité juridique dans laquelle se trouvent nos entreprises, et l'article 10 concernant la taxe sur les véhicules de sociétés en est l'exemple. Cet article tend à mettre fin à une situation marginale qui permet à environ 10 000 véhicules par an d'échapper à la TVS en se faisant homologuer comme utilitaires.

Cela étant, la modification apportée par l'article 10 dans sa rédaction actuelle a pour conséquence de bloquer les véhicules actuellement en stock, de pénaliser les clients qui ont acquis ces véhicules dans les conditions fiscales en vigueur au moment de leur achat et qui devront finalement s'acquitter de la taxe ; enfin, de pénaliser les concessionnaires automobiles qui subiront un grave manque à gagner.

Cette réalité est d'autant plus dommageable que les véhicules ayant bénéficié de la modification des règles techniques sont majoritairement fabriqués en France.

Comme le souligne fort justement notre collègue Trassy-Paillogues dans son amendement, pour l'administration, les véhicules qui échappent à la TVS sont « les plus luxueux et les plus polluants », ce qui est faux : ces véhicules ne sont pas plus polluants que d'autres !

Afin de respecter les contraintes des constructeurs automobiles, d'une part, celles des clients et des entreprises, d'autre part, il serait souhaitable que cette mesure ne s'applique qu'aux véhicules immatriculés à compter du 1er avril 2011. Ce délai de latence permettrait une meilleure transition : c'est le sens du sous-amendement que j'ai déposé.

Monsieur le ministre, vous avez tout mon soutien pour ce PLF. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Giacobbi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans un contexte de crise économique qui ne fait que commencer, il nous faut être réalistes sur la croissance, nous persuader que le déficit public massif et l'accroissement de la dette publique sont, à moyen terme, des facteurs de récession, et qu'enfin, la seule chose qui vaille la peine budgétairement aujourd'hui, c'est l'investissement de long terme, et plus particulièrement celui qui favorise la recherche.

Depuis trois ans, je m'évertue à dire ici que la crise va durer longtemps et que ce n'est pas l'année, mais la décennie qui en donnera la vraie mesure.

Je ne fais d'ailleurs que refléter un certain consensus académique et l'opinion des observateurs attentifs de l'économie mondiale. Je m'insurge en particulier contre le vocabulaire absurde et déplacé, typiquement français, qui évoque « l'après-crise », « la sortie de crise », voire, quand on se laisse aller, « la nouvelle économie de l'après-crise »…

Je voudrais seulement rappeler que le consensus des économistes est que la croissance sera en 2011 nettement plus faible qu'en 2010 à peu près partout, sauf dans les pays émergents ; que, nonobstant le léger mieux de la croissance en 2010, cette amélioration n'a eu nulle part un effet significatif, durable, structurel en termes d'emplois ; que, d'ailleurs, cette amélioration de 2011 n'est pas due à un mouvement de fond de l'économie, mais seulement à certains effets à court terme et très marginaux de la relance budgétaire, au rebond technique que l'on observe toujours par la reconstitution des stocks et à une certaine aisance monétaire qui est la moindre des choses quand on sait que les banques centrales ont à peu près toutes doublé leur bilan depuis deux ans et prêtent massivement aux banques sans vraies contreparties et à un taux d'intérêt réel nul ou négatif. Je rappelle tout de même que l'ordre de grandeur de la création monétaire des dernières années s'estime en milliers de milliards de dollars à l'échelle planétaire. Cela a pu avoir un petit effet…

L'accroissement de la dette publique est, à moyen terme, un facteur de récession. Je dois dire, monsieur le rapporteur général, que j'ai été interpellé et intéressé par le fait que vous ayez cité à ce titre une étude économique qui avait échappé à ma vigilance. Cette étude a été publiée fin décembre 2009 par les professeurs Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff sous le titre Growth in a Time of Debt. Il est incontestable qu'elle montre que, sur des périodes de l'ordre du siècle et quel que soit le pays ou le groupe de pays, les périodes de forte croissance correspondent à celles où le ratio dettes publiques-PIB est plutôt inférieur à 30 % et les périodes de faible croissance, voire de récession, sont celles où ce ratio dépasse les 90 %. Je voudrais tout de même nuancer les résultats de cette étude, d'abord, parce que, sur le plan académique, elle n'a vraiment rien d'original ou de nouveau. On rappellera, à ce titre, l'analyse très ancienne et maintenant classique de Milton Friedman et Anna Schwartz A Monetary History of the United States 1867-1960. C'est, de plus, une étude globale, de longue période et purement statistique en ce qu'elle relève une corrélation sans jamais démontrer une causalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Giacobbi

Nous devons beaucoup nous méfier de ces analyses extrêmement sommaires. Nous observons cependant, à court terme, que les politiques de relance budgétaire n'ont pratiquement pas d'effet significatif sur la conjoncture et c'est particulièrement frappant aux États-Unis sur les dernières années, où les plans de relance, de l'ordre de 700 milliards de dollars, pour le dire sommairement, ont été très loin de produire les effets prévus par l'administration américaine du budget – dont je remarque d'ailleurs qu'entre-temps, et peut-être pour cette raison, à peu près tous les dirigeants ont donné leur démission ; ce fut une véritable hémorragie.

En définitive, dans une période économique difficile, voire troublée, la seule chose qui puisse avoir un certain effet et qu'il ne faut jamais regretter, c'est l'investissement de long terme, en particulier celui qui favorise la recherche. Je voudrais, à ce titre, souligner l'excellence de notre dispositif de crédit d'impôt-recherche. Sa qualité est reconnue dans le monde entier. Il est cité en exemple, y compris par les meilleurs experts aux États-Unis. Il constitue un des fondements de l'attrait de notre pays pour l'investissement étranger et il est générateur de croissance durable. Rien ne serait plus dommageable, surtout dans une période de difficultés économiques majeures, de sacrifier, si peu que ce soit, un tel dispositif auquel on ne peut reprocher qu'une chose, c'est qu'il a effectivement fonctionné. Pour dire les choses plus simplement, il coûte certes plusieurs milliards d'euros, mais il a permis un retournement de tendance historique en France où la recherche et le développement dans les entreprises augmentent de nouveau significativement, tandis que des investisseurs étrangers à haute valeur ajoutée choisissent à nouveau la France pour localiser leur recherche et développement.

Outre qu'il serait absurde de modifier un dispositif presque aussitôt après son institution, comme l'a fait remarquer très justement, et modérément, une excellente étude de l'Inspection générale des finances, le rabotage rapporterait quelques dizaines de millions d'euros et serait un très mauvais signal pour les entreprises, notamment à l'international, parce que l'effet négatif se révélerait beaucoup plus important que l'économie escomptée. Je suis d'ailleurs même réservé sur les modestes coups de rabot que l'on va faire ou que l'on se propose de faire. J'interviendrai, sur ce point, lors de la discussion des amendements. Si vous voulez raboter à tout prix dans ce pays où l'on évoque toujours le budget en termes de menuiserie et parfois de sylviculture – j'ai d'ailleurs craint tout à l'heure que notre collègue Brard ne brandisse la hache pour pratiquer des coupes claires, pour parler français ! – supprimez, je vous en prie, la réduction de TVA sur la restauration qui coûte presque autant que le crédit d'impôt-recherche et qui n'a pratiquement créé aucun emploi, pas plus qu'elle n'a contribué à alléger l'addition des clients dans nos restaurants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je vous demande, mes chers collègues, de respecter le temps qui vous a été imparti.

La parole est à M. Jean-François Mancel, pour cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je décernerai, tout d'abord, deux satisfecit. Premier satisfecit, je redirai, et je crois qu'on ne le répétera jamais assez, à quel point le Président de la République, son gouvernement et notre majorité ont parfaitement bien affronté et maîtrisé la crise. Je suis persuadé que nos concitoyens le mesureront petit à petit et nous en remercieront le moment venu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Je ne suis, pour ma part, ni concerné ni intéressé !

Second satisfecit, ce budget n'a pas été facile à élaborer…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

…puisqu'il convenait de réduire un déficit considérable tout en évitant d'entraver la reprise de la croissance économique. Vous y parvenez avec efficacité, ce qui mérite d'être également souligné.

Je me contenterai, pour ma part, d'évoquer la dépense. Je suis convaincu qu'il faut aller beaucoup plus loin en la matière. Je sais parfaitement que ce n'est pas facile dans un pays comme le nôtre qui, depuis trente ans, est drogué à la dépense publique ! Disons les choses comme elles sont ! Reconnaissons-le, des habitudes ont été prises, sur les bancs de la gauche comme de la droite…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

…et nous avons parfois fait preuve de beaucoup de laxisme à cet égard.

J'évoquerai, si vous me le permettez, trois pistes que nous devrons suivre un jour, même si ce n'est pas pour demain matin.

S'agissant, tout d'abord, de la fonction publique, si l'on établit une comparaison avec beaucoup d'autres pays, les fonctionnaires d'État, incontestablement de qualité, sont trop nombreux. Le Président de la République a eu le grand courage de décider du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux. Cela étant, nous devons aller plus loin et nous n'échapperons pas, même si cela peut faire trembler ou hurler ici et là, à une réforme en profondeur du statut de la fonction publique. Je déposerai prochainement une proposition de loi tendant à définir quelques orientations dans ce domaine.

J'évoquerai, ensuite, deux points concernant les collectivités territoriales. Tout d'abord, l'emploi : un rapport récent de l'Observatoire de l'emploi fait état d'une augmentation des emplois. Les communes se sont bien tenues, mais l'emploi dans les régions et les départements a considérablement augmenté. Ainsi, de 2004 à 2008, les départements sont passés de 198 000 agents à 281 000 et les régions, de 14 000 à 74 000. Il se pose vraiment un problème majeur. On ne peut pas continuer à ce rythme, car ce serait compenser à l'échelon local les emplois supprimés au niveau de l'État. La solution n'est pas simple, mais je pense qu'il convient d'y travailler. J'ajoute, par ailleurs, que je regrette beaucoup que, lors de l'examen de la réforme des collectivités territoriales, nous n'ayons pas suffisamment insisté sur les financements croisés, lesquels sont indéniablement à l'origine de dépenses publiques supplémentaires souvent improductives et totalement inutiles !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

J'en viens, enfin, à ma dernière observation qui va provoquer davantage encore mon collègue Emmanuelli ! Je suis convaincu qu'il est nécessaire de réduire les dépenses sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Il est facile d'affirmer que l'on veut s'en prendre aux plus fragiles ou aux plus modestes d'entre nous. Or tel n'est pas le cas. Il faut simplement rechercher si nos dépenses sociales considérables – un de vos collègues du gouvernement a écrit que nous étions, en 2007, les champions du monde de la dépense sociale par rapport au PIB ! – sont véritablement efficaces. Une statistique récente m'a semblé préoccupante. Le taux de pauvreté en France serait, selon un certain nombre de critères sur lesquels je ne reviendrai pas, de 13 %, donc identique à celui des États-Unis. Comment peut-on expliquer ce phénomène, alors que notre pays est le champion du monde de la dépense sociale et que les Américains sont quasiment champions du monde du libéralisme ? Nous devrions, si nos dépenses sociales étaient efficaces et pertinentes, avoir un taux de pauvreté largement inférieur à celui des États-Unis. Cela me conduit donc à dire qu'il faut dépenser moins, mais mieux, au profit des plus fragiles d'entre nous.

Voilà, mon cher ministre, les quelques réflexions que je voulais faire dans le laps de temps qui m'est imposé et que j'ai respecté, monsieur le président ! Sans doute est-ce par respect pour le président picard que vous êtes ! Pour mener ces réformes, il faut du courage et de la persuasion, monsieur le ministre. Vous ne manquez ni de l'un ni de l'autre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Je vous remercie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Je ne suis pas député picard, mais tout simplement député de la nation, mon cher collègue. Ce n'est toutefois pas grave, si cela fait plaisir à M. Jean-François Mancel !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je tenais simplement à évoquer, pour ma part, les collectivités locales et leur budget.

Les maires, les élus locaux, sont extrêmement conscients que l'État a fait beaucoup pour les collectivités locales. Nous nous souvenons qu'en 2009, les dotations aux collectivités locales ont été maintenues, en dépit de la chute de près de 15 % des recettes de l'État. L'aide apportée grâce au remboursement anticipé de la TVA leur a permis de participer au plan de relance. Cet effort de l'État à l'égard des collectivités locales s'est alors élevé à 3 milliards d'euros. L'ANRU bénéficie également d'aides, afin de rénover les quartiers sensibles. C'est un effort considérable de la part de l'État dans une période difficile. Les élus locaux sont parfaitement conscients qu'il est indispensable de restreindre, cette année, les dépenses publiques. Il est tout à fait normal que les collectivités participent aussi à cet effort et que les financements de l'État soient simplement maintenus.

Je dirai un mot des communes et de la réforme de la taxe professionnelle. Même si l'année dernière, beaucoup sur ces bancs ont essayé de faire peur aux élus locaux en leur disant que ce serait une catastrophe, chacun a pu s'apercevoir que cette très bonne réforme a permis de sauver l'économie, de développer notre industrie et donc de bénéficier de recettes dans le futur. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

Nous allons aussi parler de la taxe d'habitation ! On verra cela à l'article 59 !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La réforme de la taxe professionnelle pose toutefois un problème, s'agissant notamment du transfert de la part départementale de taxe d'habitation à l'intercommunalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

En effet, il arrive que les abattements votés soient plus importants dans les départements que dans les communes, lesquelles ont une valeur locative moyenne inférieure à celle du département. En pareil cas, soit l'intercommunalité ne reçoit pas les recettes attendues, soit le contribuable est pénalisé et voit sa taxe d'habitation augmenter. L'Association des maires et moi-même avons appelé votre attention sur cette difficulté qui touche plusieurs millions de contribuables. Vous nous proposerez, si j'ai bien compris, un amendement afin de remédier à ce problème. J'attends une réponse de votre part.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Un nouveau potentiel financier devra, de plus, être recalculé à l'échelon des communes.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Les riches d'avant la réformes ne sont plus forcément les mêmes aujourd'hui.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Les bases fiscales peuvent se révéler très importantes, notamment dans les intercommunalités touristiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Nous devons les revoir et créer un fonds de péréquation. Nous disposons de suffisamment d'argent pour les collectivités locales dans notre pays, mais il est très mal réparti. Nous devons avoir le courage de procéder à des péréquations horizontales.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Baert

Et pas des riches vers les pauvres, comme d'habitude !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Je vous soumettrai, à ce titre, des amendements.

Le Congrès des départements de France se tiendra demain. Selon la presse, on réclamerait 4 à 5 milliards... Il est vrai que des problèmes se posent, s'agissant notamment de la dépendance. La réforme prévue, à cet égard, doit être mise en oeuvre le plus vite possible. La demande des départements en la matière est forte. Toutefois, quand on dit qu'il manque 4 à 5 milliards, on oublie évidemment comme toujours que, cette année, les droits de mutation vont croître de 2,5 à 3 milliards d'euros. Mais cette augmentation est très mal répartie, monsieur le ministre ! Ainsi, cinq départements connaîtront plus d'un milliard d'euros d'augmentation des droits de mutation. Une mesure a été votée dans la loi de finances de 2010. Peut-être convient-il de la revoir. Le Gouvernement, pour sa part, propose, dans sa copie, de diminuer le fonds de compensation. Or, concernant les droits de mutation, un tel fonds est non seulement nécessaire, monsieur le ministre, mais il doit être puissant ! Le projet de loi de finances divise par quatre le fonds de péréquation qui avait été prévu dans la loi de finances de 2010. Il faut absolument revoir ce dispositif. Il n'est pas acceptable que des départements touchent 350 euros par habitant et d'autres seulement 40.

Quelques efforts sont nécessaires, notamment sur la CNSA, dont on pourrait prendre une partie des excédents. Je déposerai des amendements pour aider les départements cette année, notamment sur la dépendance, en attendant la réforme qui sera réalisée.

Lorsque des enfants sont retirés de leurs familles par décision de justice et élevés par les départements, leurs familles perçoivent toujours les allocations familiales et l'allocation de rentrée scolaire. Je pense qu'on peut faire quelque chose à ce sujet.

Dernier point, les espaces naturels sensibles. Il existe une taxe sur les permis de construire qui permet aux départements de financer leur politique d'environnement. Un grand nombre d'entre eux n'arrivent pas à tout dépenser. Il faut pouvoir l'élargir et je ferai des propositions pour qu'elle permette notamment de financer l'assainissement.

Je pourrais parler beaucoup plus longuement des collectivités locales mais j'aimerais bien, monsieur le ministre, que vous nous répondiez sur ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Je savais que le docteur Laffineur était anesthésiste ; je me demande s'il n'a pas employé ce soir la méthode Coué pour se persuader que les collectivités vont bien et que la loi de finances de 2011 va améliorer leur situation. Il y a peut-être d'autres choses à faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Ce n'est pas un banquier qui va m'expliquer ce qu'il faut faire ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Monsieur le ministre, vous nous présentez un projet de loi de finances que vous qualifiez vous-même d'austère et d'historique.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'état

Je n'ai jamais dit qu'il était austère !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

La situation catastrophique de nos comptes publics et notre endettement imposent effectivement une remise en ordre de nos finances.

Nous sommes d'accord sur le constat mais nous divergeons sur les remèdes qu'il convient d'appliquer et sur vos propositions.

Vous tentez de faire croire que les dérèglements sont entièrement dus à la crise que nous subissons. Or la Cour des comptes a démontré que l'aggravation de nos déficits vous était largement imputable, l'impact des mesures prises par le Gouvernement représentant plus des deux tiers de la détérioration du déficit structurel de notre budget.

Cadeaux aux plus fortunés, notamment à travers les niches fiscales et sociales, suppression de la taxe professionnelle insuffisamment préparée expliquent en fait la plus grosse partie de nos difficultés.

Votre ambition est de réduire notre déficit à 6 % du produit intérieur brut en 2011. Cette ambition est louable, mais vous ne vous en donnez pas les moyens.

Tout d'abord, votre hypothèse de croissance à 2 % n'est pas en phase avec les prévisions des instituts et des organismes internationaux, qui se situent plutôt aux alentours de 1,5 %. Il semble effectivement que nous ayons une croissance en cloche et que nous soyons en train de descendre, de sorte que l'effet report sur lequel vous comptez pour arriver à 2 % me paraît problématique.

Comme le précise la Cour, il est indispensable de faire jouer deux leviers pour réduire les déficits, une baisse des dépenses et une augmentation des recettes. La Cour note que, sans cette action simultanée, l'objectif de réduction ne pourra être atteint.

Enfermés dans le dogme présidentiel, vous n'avez pas les coudées franches. Vous craignez pour la croissance et vous avez raison si vous vous attaquez sans discernement aux niches fiscales et sociales. Par contre, si des mesures sont prises qui permettent de réinjecter des capitaux dans l'économie réelle, génératrice de richesse, vous accélérerez la croissance.

Attaquez-vous aux dispositifs qui coûtent très cher, sans effet sur l'économie, générateurs d'effets d'aubaine et contre-productifs. Sans parler du néfaste bouclier fiscal et sans que je sois exhaustif, vous avez le choix. Le Conseil des prélèvements obligatoires vous a donné quelques pistes. Pour ma part, je citerai la TVA à 5,5 % dans la restauration, pour 3 milliards, sans résultat apparent ; l'exonération des heures supplémentaires, pour 4 milliards ; la niche Copé, dont le coût serait de 8 milliards par an et le coût cumulé de 19 milliards depuis sa création ; enfin le régime d'imposition des sociétés mère-fille, qui permet une réduction astronomique de l'impôt sur les sociétés, dont le coût est estimé à 30 milliards.

Par contre, vous vous attaquez sans vergogne aux classes moyennes et aux plus démunis. C'est par exemple la suppression du taux réduit de TVA pour les abonnements télé dans le cadre des offres composites, ce qui est un mauvais coup pour le pouvoir d'achat des Français. C'est encore la suppression de l'exonération de taxe dont bénéficient les contrats d'assurances maladie solidaires et responsables. La conséquence de cette dernière mesure sera le renforcement de la tendance constatée depuis quelques années : hausse des tarifs et nouvelle exclusion de nos concitoyens les plus modestes de la couverture sociale, donc de l'accès à des soins de qualité.

Quant à votre désormais célèbre rabot des niches fiscales et sociales, c'est devenu, on l'a dit, une lime à ongles pour les riches. Ce coup de rabot est bien doux pour certains et vous maintenez votre bouclier fiscal en dépit de l'amicale pression de certains députés de votre majorité. Vous refusez également un durcissement du plafonnement global des niches.

En dépit de votre timidité vis-à-vis des plus fortunés, les mesures proposées feront remonter les prélèvements obligatoires en 2012 au niveau de 2007, ce qui est la plus forte hausse depuis 1995. Or l'objectif affiché en 2007 par le Président de la République était une baisse de quatre points. Quel échec ! Cette hausse n'est pas un simple retour en arrière car elle se fait pour sa plus grande partie en préservant les plus fortunés et en taxant les classes moyennes et populaires.

Mais vous allez encore plus loin et vous accentuez votre politique néfaste.

Après avoir fait main basse pendant quelques années sur le 1 % logement pour financer la construction de logements sociaux et l'agence nationale de renouvellement urbain, vous imposez maintenant les plus démunis à travers une taxe de 2 % sur les loyers des logements sociaux. Ce sont donc nos concitoyens les plus en difficulté, ceux qui vivent dans le parc social, qui pallieront la carence de l'État à hauteur de 340 millions d'euros par an. Il fallait oser ! Au passage, vous vous privez de 60 000 logements nouveaux sur trois ans. De plus, les aides à la pierre, qui représentaient 716 millions en 2010, tomberont à 500 millions en 2011, 450 millions en 2012, 400 millions en 2013.

Vous renforcez encore cette politique en diminuant le financement de la politique de la ville à travers l'ACSE, de 12 % en 2011.

Par ailleurs le nombre de contrats aidés pour favoriser l'emploi et l'insertion, des jeunes notamment, sera en baisse globale de 25 %.

En fait, vous ne dérogez pas à vos dogmes et vous accentuez même les choix politiques mis en place depuis 2007.

Le toilettage modeste des niches n'est pas à la hauteur. Vous aviez l'occasion de donner des signes forts à nos concitoyens pour plus de justice fiscale tout en vous attaquant au redressement des comptes publics. Le rendez-vous est manqué.

Vous nous annoncez un grand soir fiscal avant juin 2011. Si vous persistez dans les tendances actuelles, je crains que vous ne mettiez en péril le pacte social qui est le fondement de notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Balligand

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 et du projet de loi de finances pour 2011.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma