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Séance en hémicycle du 18 mai 2011 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Duron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Duron

Monsieur le Premier ministre, la loi portant réforme des collectivités territoriales a été promulguée le 16 décembre dernier. Je ne reviendrai pas sur la création du conseiller territorial, avec laquelle nous sommes en complet désaccord. Non, ce qui interpelle aujourd'hui, c'est l'application du volet intercommunal de la loi.

Votre avez souhaité achever et renforcer l'intercommunalité. Rien de choquant, bien au contraire !

Vous avez voulu faire émerger des métropoles de niveau européen. C'était souhaitable, mais difficile !

Mais c'est sur le plan de la méthode que les choses ne vont pas.

Tout d'abord, parce que des pouvoirs excessifs sont donnés aux préfets, qui prônent, en moyenne, la suppression d'un EPCI à fiscalité propre sur deux, avec des variations qui tiennent sans doute à leur tempérament.

Ensuite, parce que le calendrier est trop resserré, ce qui rend illusoire la possibilité d'un dialogue approfondi avec les élus. Comment les élus auraient-ils pu, en l'espace de quelques semaines, évaluer précisément les incidences des fusions d'EPCI en matière de compétences, en matière patrimoniale, en matière financière et fiscale ? C'est en toute logique que les propositions préfectorales se sont heurtées à l'incompréhension ou à l'opposition des élus, y compris de votre propre majorité !

Dans mon département, ce sont les parlementaires de droite, ceux qui ont voté la loi, qui font aujourd'hui obstacle à son application, au point que vous avez dû « censurer » la copie, pourtant très mesurée, du préfet et suspendre l'application de la loi, dans notre département comme dans une dizaine d'autres.

Monsieur le Premier ministre, existe-t-il deux France dans la République : une où la loi s'applique avec le plus grand volontarisme et l'autre où on en suspend l'application ? Comment entendez-vous sortir de cette situation insensée ? Êtes-vous disposé à donner du temps au temps et à rétablir une réelle concertation entre l'État et les élus, comme l'avait fait Lionel Jospin pour la mise en oeuvre de la loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Monsieur le député, la réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 comporte un volet important sur les collectivités intercommunales qui a été voté, vous le savez, dans un très large consensus.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Les délais ont été très rapprochés, comme le souhaitait notamment l'Association des maires, pour écarter la phase d'application de 2014.

Les projets de schémas départementaux ont été présentés en avril et en mai par les préfets, dans des conditions tout à fait convenables, sans difficultés majeures dans la plupart des cas.

Les communes, les EPCI et la commission départementale disposent maintenant de sept mois pour discuter, débattre et proposer un schéma, que nous souhaitons le plus consensuel possible, à partir du projet élaboré par le préfet.

Avec mon collègue Claude Guéant et sous l'autorité du Premier ministre, nous avons demandé aux préfets que la volonté de travail en commun, la volonté de débattre soit le signe commun dans l'ensemble des départements afin de proposer des schémas qui puissent être partagés par la plupart, sinon l'ensemble, des élus.

Dans le cas où ce schéma ne serait pas adopté le 31 décembre 2011, il sera possible de proposer une prorogation que nous pourrons examiner avec les préfets pour parvenir au consensus le plus large possible.

Debut de section - PermalienPhilippe Richert, ministre chargé des collectivités territoriales

Voilà, monsieur le député, mesdames, messieurs, les précisions que je souhaitais, une nouvelle fois, vous donner et que nous avons à porter auprès des préfets.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Yanick Paternotte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Madame la ministre, l'économie française connaît une réelle embellie en ce début d'année avec 1 % de croissance au premier trimestre et la création de près de 59 000 emplois nets.

Lundi, les ministres des finances de la zone euro se sont retrouvés à Bruxelles pour parler de la situation budgétaire toujours difficile en Grèce où se profile un deuxième plan d'aide associant l'Europe et le FMI après les 110 milliards d'euros de prêts déjà débloqués il y a un an.

Encore engluée dans la crise, la Grèce a désormais un délai supplémentaire pour rembourser ses dettes tout en s'engageant à prendre des mesures supplémentaires pour tenir ses objectifs de réduction de déficit en accélérant notamment son programme de privatisation.

Mais, lors de cette réunion, la situation délicate du Portugal a également été abordée. Aussi les ministres des finances se sont-ils mis d'accord, à l'unanimité, pour accorder à ce pays une assistance financière avec un plan de sauvetage de 78 milliards d'euros sous forme de prêts.

Ce programme s'attaquera aux défis budgétaires, financiers et structurels auxquels est confrontée l'économie portugaise.

Madame la ministre, ébranlée par le krach financier de 2008, contrainte de surmonter toutes ces crises à rebonds, l'Union européenne a apporté la preuve de sa capacité à retrouver un second souffle.

En revanche, nous aimerions connaître, concrètement, les conséquences de ces mesures sur la crise que traverse la zone euro et savoir si ces nouvelles aides n'auront pas d'impacts négatifs sur la croissance française en plein rebond en ce premier trimestre 2011. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Monsieur le député, la crise financière, vous l'avez dit, a ébranlé toutes les économies du monde. La France y a plutôt mieux résisté, mais la zone euro, qui est une zone monétaire, a été soumise à de rudes chocs. Face à cette situation, nous avons pris deux grandes séries de mesures.

La première série de mesures était destinée à renforcer une solidarité conditionnelle au sein de la zone euro. La seconde série de mesures visait à renforcer le gouvernement économique qui est le pendant naturel d'une zone monétaire.

S'agissant de la solidarité conditionnelle, il a fallu inventer. Pour la Grèce, on a inventé les mécanismes des prêts bilatéraux en contrepartie d'engagements très puissants de ce pays dont une partie a été mise en oeuvre et une autre reste à faire. Nous attendons de la Grèce qu'elle accélère certaines des mesures qu'elle s'est engagée à mettre en oeuvre.

Pour le Portugal, autre État en difficulté, nous avons utilisé le mécanisme européen de stabilité financière et conclu à l'unanimité, hier, la mise en oeuvre d'un plan de soutien de 78 milliards d'euros financé pour un tiers par le Fonds monétaire international, pour un tiers par le mécanisme européen de stabilité et pour un tiers par le Fonds européen de stabilité. En contrepartie, c'est toujours la même mécanique : des conditionnalités, c'est-à-dire des pays qui s'engagent à restaurer la situation de leurs finances publiques et à engager des réformes structurelles importantes.

J'en viens au second volet que nous avons dû mettre en place : le gouvernement économique. Là aussi, hier, à l'occasion du conseil ECOFIN, les États membres ont décidé à l'unanimité de donner mandat à la présidence pour qu'elle négocie avec le Parlement européen l'ensemble des textes qui mettra en place une véritable forme de gouvernement économique à la fois sur le pacte de stabilité et de croissance renforcé et sur le cadre macro-économique, ainsi que sur des mécanismes de financement qui soient solides, mieux équilibrés pour renforcer non pas l'euro qui est une monnaie solide, mais la zone euro et limiter la crise aux trois pays de périphérie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, à l'instar du collège Romain Rolland d'Ivry-sur-Seine, enseignants, parents et élèves de toute la France sont vent debout contre votre politique. Ils s'élèvent contre la suppression annoncée de 16 000 postes dans l'éducation nationale.

De fait, nous assistons à une véritable saignée, notamment dans les régions les plus en difficulté : 577 postes supprimés dans l'académie de Créteil, 822 dans celle de Metz-Nancy, 806 dans le Nord.

Semaine après semaine, les députés d'opposition vous interpellent et relaient le mécontentement populaire. Vos réponses invariables enfilent contrevérités sur contrevérités.

Vous ne cessez de répéter que le budget de l'éducation nationale est en augmentation de 1,6 %. C'est vite oublier qu'avec une inflation à 2 % cette augmentation est nulle ! Vous déclarez que le taux d'encadrement des élèves est meilleur aujourd'hui que dans les années 90, et pourquoi pas depuis Charlemagne ! Pourtant, le rapport de l'OCDE démontre que la France a un taux d'encadrement des élèves qui se situe loin derrière l'Allemagne, l'Espagne ou l'Italie. Et vous ne mentionnez pas les 40 000 élèves supplémentaires à accueillir l'an prochain.

Vous vous targuez d'augmenter de 10 % les salaires des professeurs en début de carrière, mais ne dites rien du gel du point d'indice dans la fonction publique, qui affecte le pouvoir d'achat de tous les enseignants ! Sans parler du sort de dizaines de milliers de précaires !

Enfin , le comble, vous arguez que l'éducation nationale est le premier employeur de France alors que vous organisez le plus grand plan social du pays !

Monsieur le ministre, vos contrevérités ne passent plus. Vous êtes à créditer d'un zéro pointé ! Alors, quand allez-vous revoir votre copie, sachant que vous n'aurez pas le droit au redoublement l'an prochain ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Monsieur le député, je voudrais juste citer un chiffre : cette année, l'État va emprunter 180 milliards d'euros pour boucler son budget (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), c'est-à-dire trois fois le budget de l'éducation nationale ! Cela signifie que nous allons envoyer la facture de leurs études aux 12 millions d'élèves qui sont dans nos classes (Protestations sur les bancs du groupe SRC) et qu'ils devront payer 20 000 euros de dette alors que vous êtes attaché comme moi, monsieur le député, à la gratuité du système éducatif.

Donc, vous voulez continuer, vous voulez augmenter la facture de la dette ! (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Nous avons choisi un autre chemin. Nous avons choisi, autour du Président de la République, avec le Premier ministre, de maîtriser la dépense publique. Et nous avons choisi de le faire avec discernement, monsieur le député.

Regardez la situation d'autres pays européens, que Christine Lagarde évoquait à l'instant ! Voyez la situation de la Grèce, de la Grande-Bretagne, de l'Italie !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Dans ces pays, on licencie des enseignants, on baisse leur rémunération. Nous n'avons pas choisi ce chemin. Nous avons choisi d'agir avec discernement en ne remplaçant pas la moitié des fonctionnaires qui partent en retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Et les 3 milliards pour la baisse de la TVA sur la restauration !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Je le redis devant vous : il y aura plus de professeurs à la rentrée prochaine qu'il n'y en avait il y a quinze ou vingt ans dans le système éducatif.

Monsieur le député, à votre diktat des moyens nous répondons par l'innovation pédagogique. Je suis désolé de vous le dire, mais vous êtes dans l'obsession du chiffre là où nous sommes dans l'attention à chacun. La majorité a fait son choix pour l'avenir de l'école. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Claude Leteurtre, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Leteurtre

Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture et concerne les conséquences de la sécheresse.

En effet, depuis le début du printemps, la situation s'aggrave : les niveaux des pluies sont très en dessous de la normale saisonnière – -35 % –, une chaleur exceptionnelle s'est emparée de notre pays – +4°C par rapport à la normale saisonnière –, les nappes phréatiques sont basses et le président Santini ne dort plus ! (Sourires.) Aussi, le Nouveau Centre tient-il à vous alerter sur les difficultés qui attendent les agriculteurs.

Avril a été le mois le plus aride depuis 1959. Le manque d'eau se fait déjà cruellement sentir pour les agriculteurs de nos régions. Certaines récoltes sont déjà perdues, comme le lin ou l'orge de printemps ; d'autres, comme le blé, auront des rendements en baisse de 50 %. Si la pluie n'arrive pas en quantité suffisante dans les jours qui viennent, les autres cultures, les productions de fruits et légumes et les élevages vont se trouver dans une situation délicate alors qu'il y a déjà des restrictions d'eau dans trente départements.

Traditionnellement les agriculteurs prennent une assurance climat pour leur récolte. Mais ceux qui le font pour la première fois cette année se la voient refusée ou proposée à des prix exorbitants.

Les prochaines semaines vont être décisives. Monsieur le ministre, le Nouveau Centre vous pose donc trois questions. Premièrement : qu'en est-il des assurances ? Deuxièmement, les agriculteurs n'ayant pas de trésorerie pour acheter et stocker le fourrage, ne faudrait-il pas dès maintenant réaménager leur dette ? Enfin, ne faut-il pas donner la priorité de l'alimentation en eau aux agriculteurs et, pour l'avenir, leur assurer une visibilité sur les ressources en eau dont ils pourront disposer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire

Monsieur le député Claude Leteurtre, nous avons un devoir de solidarité nationale envers toutes les filières agricoles touchées aujourd'hui par la sécheresse.

Avec le Premier ministre et Nathalie Kosciusko-Morizet, nous sommes pleinement mobilisés pour leur apporter les réponses concrètes qu'ils attendent. Nous avons autorisé l'utilisation des jachères pour nourrir les animaux ; nous organisons la mise à disposition des pailles pour l'alimentation des élevages qui connaissent les situations les plus graves.

En matière de contrats d'assurance, j'ai écrit aux compagnies d'assurance il y a quelques jours pour leur demander de tenir leurs engagements. Tous les contrats seront honorés.

Je demande également à toutes les banques et au médiateur du crédit de se mobiliser pour apporter des réponses concrètes à tous les exploitants agricoles qui connaissent les difficultés les plus graves. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.) Il ne serait pas normal que nous ayons été aux côtés des banques lors de la crise financière et qu'elles ne répondent pas présent lorsque nous avons besoin d'elles pour aider les éleveurs et les exploitants agricoles. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Mais, au-delà de la solidarité nationale, les agriculteurs peuvent compter sur la solidarité européenne. J'ai demandé hier à ce que la sécheresse soit inscrite à l'ordre du jour du Conseil des ministres de l'agriculture. J'ai obtenu que douze états membres de l'Union européenne soutiennent la France sur la demande d'un versement anticipé de la prime à la vache allaitante aux éleveurs français. Nous avons obtenu gain de cause : 80 % de la prime à la vache allaitante sera versée début octobre au lieu d'être versée en décembre. Ce sera une bouffée d'oxygène considérable pour les éleveurs français. Nous sommes aux côtés de tous les éleveurs et de tous les agriculteurs confrontés à la sécheresse.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Gaubert, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Ma question s'adresse au Premier ministre. François Brottes a interrogé le Gouvernement, hier, sur les manoeuvres autour de GDF-Suez. Faute, sans doute, d'éléments de réponse, M. Besson s'en est tiré par une réponse de diversion, mais j'imagine qu'au bout de vingt-quatre heures il peut en être autrement.

Je rappelle rapidement les faits. Il y a dix ans, le Gouvernement avait doté Gaz de France des réseaux de transport. Quoi de plus normal, puisque Gaz de France était une société nationale publique ? En 2006, nous nous sommes battus en vain contre la fusion entre Gaz de France et Suez. Il s'agissait de conforter Suez, qui risquait, disait-on, une opération hostile, preuve que, déjà, l'on était davantage concernés par les intérêts privés que par l'intérêt général.

Mais nous n'imaginions pas la suite : il se trouve que ces jours-ci, on envisage – à moins que cela ne soit déjà fait – de vendre 25 % de ces mêmes réseaux, quasiment donnés à l'époque, pour la somme d'un milliard d'euros. Et à qui ? À la Caisse des dépôts et consignations, organisme d'État. En d'autres termes, l'État va racheter quarante fois plus cher ce qu'il a cédé il y a dix ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Gaubert

Chacun comprendra bien que cela ne peut pas ne pas émouvoir nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) D'où mes questions : Qui est à l'initiative de cette vente ? Quelle est la position de l'Agence des participations de l'État dont je rappelle qu'elle gère les 34 % que détient l'État dans GDF-Suez, ce qui lui confère une minorité de blocage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Monsieur le député Jean Gaubert, vous semblez indiquer que l'opération concernant GRTgaz aurait été menée de manière discrète, avec des méthodes de valorisation curieuses, qui ne seraient pas dans l'intérêt des Français. (Approbations sur les bancs du groupe SRC.)

De quoi s'agit-il en réalité ? GRT, ce sont les réseaux de transport du gaz, actuellement détenus par GDF-Suez.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

L'opération annoncée lors des conseils d'administration du 14 avril prévoit en effet l'acquisition de 25 % de la filiale des réseaux de transports par la Caisse des dépôts et consignations, CNP Assurances et CDC Infrastructure, organismes d'État. Cette opération renforce donc le caractère public du réseau de distribution du gaz. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) C'est mathématique !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

Vous semblez insinuer par ailleurs que la valorisation a été curieusement définie. Je rappelle qu'en 2008 la valorisation a été effectuée sous l'autorité de la Commission des participations et des transferts et qu'elle se fonde, selon les recommandations de la CRE, sur la valeur des actifs. C'est la même méthode qui est aujourd'hui retenue : valorisation des actifs et examen des investissements effectués depuis. En 2008, GRTgaz était valorisé 5,6 milliards d'euros ; deux ans plus tard, après investissement de deux milliards d'euros par GDF-Suez, il est valorisé 6,5 milliards d'euros. C'est une valorisation mécanique sur la base des actifs.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

J'ajoute enfin que cette opération correspond à la stratégie de l'État, qui consiste à renforcer de grands acteurs. En l'espèce, nous donnons des moyens financiers à un grand acteur qui pourra dorénavant intervenir ailleurs qu'en France. (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Auclair, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Auclair

Ma question, que je pose au nom de tous les députés UMP des départements d'élevage touchés par la sécheresse, s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.

Monsieur le ministre, vous connaissez parfaitement les difficultés actuelles de l'élevage allaitant ou laitier. D'ailleurs, hier, à Bruxelles, lors du conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne, vous avez âprement défendu le monde de l'élevage. Il est utile de rappeler que c'est à votre demande que la question de la sécheresse et des difficultés qui en découlent, a été inscrite à l'ordre du jour.

Les cours de la viande ne sont pas en adéquation avec la forte volatilité de ceux des matières premières et ce sont les éleveurs, hélas, qui en sont les premières victimes. La sécheresse que nous subissons est une catastrophe supplémentaire qui ne fera qu'aggraver ce problème. Les récoltes d'ensilage et de foin s'annoncent catastrophiques et il est à craindre que la situation ne soit pire que celle de 1976.

Les cours de la paille sont d'ailleurs en train de s'envoler car de nombreux céréaliers préfèrent la broyer plutôt que de la commercialiser. Pourtant, la paille sera bientôt le seul moyen de nourrir les animaux, et ce jusqu'à l'année prochaine.

Je vous demande, pour toutes ces raisons, de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que les préfets interdisent le broyage de la paille. Mieux, face à la catastrophe qui se profile, il serait utile d'aller jusqu'à réquisitionner la paille et plafonner son prix.

Monsieur le ministre, la solidarité nationale entre céréaliers et éleveurs doit jouer et je vous demande d'en organiser les conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire

Monsieur le député Jean Auclair, nous connaissons tous votre attachement à la cause de l'élevage français et vous savez que je suis totalement à vos côtés pour défendre l'élevage français et chacun des éleveurs français, où qu'ils se trouvent sur notre territoire, en particulier face à la crise très grave qu'ils subissent, du fait de la sécheresse.

La sécheresse, cela signifie un manque de fourrage, un manque de paille pour nourrir les animaux. Cela signifie encore la hausse du coût de l'alimentation de 30, 40 voire 60 % dans certaines régions. La sécheresse, cela signifie des éleveurs, que j'ai rencontrés, comme en Poitou-Charentes, qui sont obligés d'abattre trente, quarante, cinquante animaux pour pouvoir payer l'alimentation du reste de leur élevage. Chacun doit avoir conscience de la gravité de la situation et de la détresse dans laquelle se trouvent des milliers d'exploitants agricoles aujourd'hui, en France.

Nous avons pris un certain nombre de mesures que j'ai déjà précisées, sur les jachères, à l'échelle européenne. J'en appelle à la solidarité de tous les exploitants agricoles, notamment des céréaliers, pour qu'ils ne broient pas leur paille mais qu'ils la mettent à la disposition de tous les éleveurs qui doivent nourrir leurs bêtes.

Je veux dire ici avec beaucoup de gravité que si d'ici quinze jours nous n'observons pas, de la part de tous les exploitants agricoles, un niveau de solidarité conforme à celui que nous sommes en droit d'attendre d'eux, je prendrai les dispositions règlementaires nationales qui interdiront de broyer la paille sur l'ensemble du territoire pour la mettre à la disposition des éleveurs touchés par la sécheresse. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Anny Poursinoff, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Anny Poursinoff

Ma question s'adresse aussi à M. le ministre de l'agriculture.

Poussés depuis des décennies, à privilégier des systèmes de production intensive, à investir dans des cultures nécessitant une irrigation massive, les agricultrices et les agriculteurs se retrouvent en difficulté dès qu'un épisode de sécheresse se produit. C'est le cas encore cette année.

La responsabilité politique devrait enfin vous conduire à dessiner une autre politique agricole, une politique qui développe la polyculture et soutient les petites exploitations, plutôt que de maintenir un système qui consacre la moitié de nos ressources en eau à l'irrigation.

Le système économique et énergétique dans lequel vous enfermez la France ne fait qu'aggraver la crise climatique.

Alors que la sécheresse menace la survie de très nombreuses exploitations agricoles, faudra-t-il demain choisir entre le refroidissement des centrales nucléaires et l'irrigation ?

La mise en place des zones de répartition des eaux a été repoussée, ce qui retarde d'autant les concertations sur les captages et la gestion de l'eau.

Nous le savons, les solutions miracles n'existent pas.

Ni les réserves collinaires, ni le fauchage systématique des jachères consacrées à la biodiversité, ne régleront le problème d'une sécheresse, dont les effets n'ont rien de conjoncturel mais sont structurels !

En revanche, les propositions concrètes pour que notre agriculture réponde aux défis du changement climatique ne manquent pas.

Qu'attendez-vous par exemple, pour interdire les agro-carburants ? Qu'attendez-vous pour soutenir la recherche pour l'agriculture biologique plutôt que pour les OGM ? Qu'attendez-vous pour soutenir l'agriculture paysanne, plutôt que l'industrie agro-alimentaire, quoi qu'en pense le nouveau président de la FNSEA? (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le ministre, quelle sera votre contribution au plan national d'adaptation au changement climatique qui vient d'être annoncé par votre collègue de l'environnement ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire

Madame la députée Anny Poursinoff, je ne suis pas sûr que ce soit au beau milieu de la grave crise que traversent tous les exploitants agricoles français qu'il faille poser la question des grands changements climatiques ou des évolutions fondamentales qui peuvent se poser à l'agriculture française. La première réponse que nous avons à apporter est une réponse concrète sur l'alimentation du bétail, sur le soutien aux agriculteurs et sur la production agricole de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe NC.)

Vous me permettrez également d'observer que, quoi que l'on veuille, quoi que l'on dise, il faut bien de l'eau pour faire pousser les cultures ou nourrir les bêtes. Quel que soit le modèle agricole que nous retiendrons, nous devrons en revenir à ces évidences.

Nous avons fait avec l'ensemble du Gouvernement le choix d'une agriculture durable, d'une agriculture qui respecte davantage les ressources, d'une agriculture qui réduit l'utilisation des phytosanitaires de moitié d'ici 2018, d'une agriculture moins consommatrice de terres agricoles, moins consommatrice d'antibiotiques, moins consommatrice d'engrais minéraux qui reviennent trop cher aux producteurs.

Nous avons fait le choix d'une agriculture responsable, d'une agriculture qui tient compte du changement climatique mais aussi de la nécessité de produire une alimentation à la hauteur de la demande mondiale. Nous avons fait le choix d'une agriculture qui tient compte du prix que les consommateurs sont prêts à payer pour leur alimentation. Nous avons fait le choix d'une agriculture diversifiée. Nous avons fait le choix d'une agriculture qui reste présente partout sur le territoire grâce au maintien des aides agricoles européennes. Nous reposerons quand vous le voudrez la question des grands choix stratégiques que nous avons fixés pour l'agriculture française, mais, je vous en supplie, aujourd'hui, concentrons-nous sur les réponses concrètes que nous pouvons apporter aux paysans en détresse. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Houillon, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Houillon

Ma question s'adresse à Monsieur Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Pour le premier trimestre 2011, la croissance s'élève à 1 % : l'économie française semble marquer un tournant dans la reprise économique qui a suivi la récession de 2009. La France réalise ainsi sa meilleure performance depuis près de cinq ans.

Portée par l'investissement des entreprises et la production industrielle, cette croissance est a priori saine et créatrice d'emplois, comme l'atteste la diminution régulière du chômage depuis quatre mois consécutifs.

En effet, la création d'emplois dans le secteur marchand s'accélère : au premier trimestre 2011, 58 800 postes ont été créés, contre 37 600 au quatrième trimestre 2010 et 22 200 au troisième trimestre.

Pour la première fois depuis dix ans, on constate une création nette d'emplois dans l'industrie, et les créations de postes au premier trimestre 2011 sont près de trois fois supérieures à celles enregistrées au premier trimestre 2010.

Monsieur le ministre, afin de conforter et d'accentuer ces résultats très encourageants, la majorité ne relâche pas sa mobilisation. Notre priorité est que les effets de la croissance continuent à se traduire par une baisse du chômage et par une hausse du pouvoir d'achat des salariés.

Je sais que la mobilisation du Gouvernement sur l'emploi est totale. Pouvez-vous nous donner votre analyse sur ce que ces chiffres permettent d'espérer pour atteindre ces objectifs et sur votre stratégie pour y parvenir ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Le retour de la croissance va en effet contribuer à faire reculer le chômage – contribuer, car pour le faire, je ne compte pas seulement sur le retour de la croissance, mais aussi sur les moyens que nous mettons sur la table. C'est par exemple un demi-milliard d'euros de crédits pour permettre aux demandeurs d'emploi qui le sont depuis longtemps et ont besoin de « sur mesure » d'entrer en formation. Nous comptons aussi sur les contrats aidés, qui sont des contrats de travail : il vaut mieux avoir une fiche de paye à la fin du mois qu'un bulletin d'allocation sans avoir eu d'activité.

À ce propos, je me suis entretenu hier soir avec le nouveau président du conseil général du Val d'Oise pour lui demander d'accompagner la volonté du Gouvernement de signer des contrats aidés cofinancés par le Département et par l'État pour permettre à des chômeurs de longue durée au RSA de revenir vers l'emploi. Il m'a donné un avis favorable. C'est important également pour le Val d'Oise.

Nous croyons aussi au développement de la formation en alternance, aux contrats de professionnalisation, à l'apprentissage. Hier, avec Nadine Morano, nous avons signé avec Alain Griset, président de la chambre des métiers et de l'artisanat, un accord sans précédent : les chambres de métiers formeront 10 000 apprentis de plus chaque année, soit 50 000 de plus qu'actuellement en 2015, afin de faire reculer le chômage des jeunes. Depuis novembre, il a d'ailleurs reculé de 23 % dans votre département et de 20 % au niveau national. Ces chiffres sont le résultat du volontarisme du Gouvernement et du choix pragmatique de mesures adaptées pour faire reculer le chômage.

Nous nous sommes fixés un premier objectif, qui est de repasser sous la barre des 9 %. C'est une bonne nouvelle pour l'emploi des Français, et reprendre un emploi c'est bon aussi pour le pouvoir d'achat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Yves Durand, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Durand

D'abord, madame la ministre de l'économie, je vous précise que ce que nous contestons, ce n'est pas la légalité de l'opération EDF-Suez, mais la légitimité de faire cadeau d'un milliard aux actionnaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Monsieur le ministre de l'éducation nationale, depuis des semaines – tout à l'heure encore –, les députés de l'opposition vous interrogent sur les conséquences désastreuses de la suppression de 16 000 postes dans l'éducation nationale, alors que le nombre d'élèves augmente et que toutes les enquêtes internationales montrent une dégradation sans précédent de notre système éducatif. Je crains que dans votre réponse, comme vous l'avez fait tout à l'heure, vous vous obstiniez à mépriser la réalité en dépit de la colère des enseignants et des parents.

Il est urgent de changer de politique éducative et c'est ce que les socialistes proposent dans leur projet. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Quand vous sacrifiez l'école maternelle en ne comptabilisant même plus les enfants de deux ans, nous proposons d'accueillir les enfants dès trois ans à l'école obligatoire et dès deux ans si les parents le souhaitent. Quand vous supprimez massivement des postes, nous voulons concentrer les moyens dans les premiers cycles d'apprentissage en mettant deux enseignants par classe là où il le faut, (Murmures sur les bancs du groupe UMP.) car il est intolérable que l'école aggrave les inégalités. Quand vous sacrifiez la formation professionnelle des maîtres, nous allons revaloriser la formation pédagogique, car enseigner, c'est un métier.

Monsieur le ministre, au lieu de multiplier les annonces sans lendemain et sans moyens comme vous le faites, allez-vous enfin accepter de voir la réalité en face ? Nous, nous proposons aux Français un véritable pacte éducatif pour leurs enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Monsieur Durand, c'est, je crois, la vingt-deuxième question que pose le groupe socialiste depuis janvier sur les moyens de l'éducation.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Forcément !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

Cette obsession des moyens tourne au harcèlement et surtout à l'aveuglement.

Vous venez de le démontrer encore en énumérant vos propositions : On a le sentiment que depuis 25 ans, la seule réponse éducative du parti socialiste, ce sont des moyens, toujours des moyens…

Plusieurs députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Eh oui, des moyens !

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative

…toujours des postes.

Mais, monsieur Durand, cette politique a échoué. Ces élèves évalués dans l'enquête internationale PISA, dont vous dénoncez les faibles résultats, avaient quinze ans en 2009 : ils sont donc entrés à l'école en 1997, monsieur Durand, et ont connu les pratiques pédagogiques que vous aviez mises en place ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Alors, cessez plutôt de vous cacher derrière vos dogmes !

À ces dogmes, nous opposons une vision pragmatique et une approche qualitative. Qui a mis en place une aide personnalisée de deux heures en primaire en faveur des élèves qui ont des difficultés de lecture ? Ce gouvernement. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Qui a créé les internats d'excellence qui permettent aux enfants issus de milieux défavorisés d'accéder à l'excellence grâce à l'éducation ? Ce gouvernement. Qui permet à 200 000 enfants handicapés – 45 % de plus qu'il y a cinq ans – de fréquenter l'école en milieu ordinaire ? Cette majorité et ce gouvernement.

Monsieur Durand, décidément, vous restez enfermé dans vos dogmes. Vous ne cessez de dire que l'école est en danger. Le danger qu'elle court, c'est le retour du parti socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Isabelle Vasseur, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Vasseur

Madame la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, en 2007, vous avez mené une des principales réformes du quinquennat voulue par le Président de la République : celle des universités.

Cette réforme majeure a permis de transformer nos universités en profondeur au bénéfice de tous : étudiants, personnels et enseignants-chercheurs.

Elle a permis un transfert de compétences sans précédent. Plus de 125 000 emplois et 7 milliards d'euros de masse salariale sont désormais aux mains des présidents des universités afin qu'ils puissent mener à bien leurs projets.

Vous l'avez rappelé à plusieurs reprises, nous sommes en avance sur le calendrier prévu par la loi. Aujourd'hui soixante-douze universités françaises sont autonomes, soit près de 90 % d'entre elles. Cette réforme constitue donc un véritable succès. Et si le désir d'autonomie ne se dément pas, c'est parce que les résultats sont là.

L'État est au rendez-vous de cette réforme historique. Depuis quatre ans, il a augmenté de plus de 22 % les dotations aux universités ; il a versé 5 milliards d'euros en moyens exceptionnels pour l'opération « Campus » ; il a affecté 22 milliards aux investissements d'avenir.

À l'évidence, nos universités sont devenues des acteurs incontournables de nos territoires. Nous le vivons au quotidien dans nos circonscriptions. En Picardie, nous avons ainsi obtenu plus de 37 millions d'euros au titre des investissements d'avenir pour deux projets d'équipements d'excellence relatifs à la chirurgie du visage et la robotique, et deux projets de laboratoires d'excellence consacrés à la voiture électrique et aux batteries.

Madame la ministre, à l'heure où le parti socialiste présente son projet (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC), pouvez-vous revenir sur le bilan de l'autonomie des universités que le parti socialiste semble redécouvrir ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Madame Isabelle Vasseur, hier, j'ai eu un choc (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) en lisant le programme du parti socialiste pour l'université en 2012. En effet, il vise à conforter l'autonomie des universités. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Comprenez ma surprise, mesdames, messieurs les députés socialistes ! Vous avez voté contre la loi d'autonomie des universités et, pis, vous avez gardé un silence complice pendant les deux mouvements anti-autonomie qui, en 2007 et en 2009, ont été particulièrement violents. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Huées sur les bancs du groupe SRC.) Je suis donc très heureuse de vous voir aujourd'hui soutenir cette réforme !

Mais il y a encore mieux dans la suite du programme du parti socialiste. Les socialistes veulent augmenter le budget des universités (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ; pour notre part, nous leur aurons donné 9 milliards d'euros supplémentaires en cinq ans. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ils veulent augmenter les bourses des étudiants ; nous les aurons augmentées de 26 % en cinq ans ! (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ils veulent augmenter le nombre de logements pour les étudiants ; nous aurons construit sept mille logements supplémentaires tous les ans, pendant cinq ans ! (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Ce n'est pas vous : ce sont les collectivités locales !

Debut de section - PermalienValérie Pecresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche

Ils veulent rapprocher l'université et l'entreprise ; c'est ce que nous avons fait en créant des fondations d'entreprises et des chaires industrielles ! (Mêmes mouvements.) Le parti socialiste veut aussi mieux orienter les lycéens ; nous le faisons, dès la classe de seconde, avec Luc Chatel.

La vérité, mesdames, messieurs les députés, c'est que le programme du parti socialiste est un bel hommage au bilan de Nicolas Sarkozy. (« Bravo ! » et très vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Maquet

Monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, l'accès aux soins ne cesse de se dégrader et de plus en plus de territoires ruraux se transforment en déserts médicaux, comme certains quartiers défavorisés.

Ce constat inquiétant marque la fin de la médecine de proximité et l'apparition d'une médecine à deux vitesses. Les populations vivant dans ces territoires ne disposent plus de la même qualité de soins. On constate une dégradation générale de l'état de santé de nos concitoyens dans ces espaces périphériques, en raison par exemple de l'arrêt d'un traitement, de l'absence de consultations ou tout simplement d'épidémies saisonnières contre lesquelles les médecins, trop peu nombreux, ne peuvent plus lutter efficacement.

Sans oublier le service médical d'urgence, le « 15 », qui arrive parfois trop tard – quand il se déplace –, par manque d'organisation et faute de moyens. Or vous le savez, monsieur le ministre, il faut prendre en charge un AVC, un infarctus ou un traumatisme crânien en moins de deux heures.

La loi Hôpital, patients, santé et territoires votée par votre majorité, qui devait pallier les inégalités des Français devant l'accès à une offre de soins de qualité, est un échec. Les mesures prises ne sont pas à la hauteur des enjeux et de la réalité quotidienne du terrain.

Vous me direz que nous ne proposons rien ; c'est faux !

Le projet des socialistes (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP) propose précisément de rétablir l'égalité devant la santé en instaurant un pacte avec les professionnels afin d'assurer l'accès aux soins sur l'ensemble des territoires,

Notre projet propose le déploiement sur tout le territoire, en coopération avec les collectivités locales, de maisons de santé animées par des équipes pluridisciplinaires.

Notre projet incite les jeunes médecins libéraux à exercer en début de carrière dans les zones qui manquent de praticiens.

Notre projet remet l'hôpital au coeur du système.

Oui, monsieur le ministre, nous sommes fiers de notre projet ! Nous le présentons aujourd'hui, nous le défendrons demain et nous l'appliquerons en 2012. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Madame la députée, il n'est pas nécessaire de s'interroger longtemps pour savoir que la question que vous venez de poser émane des bancs du groupe socialiste.

En effet, en matière de santé, vous oubliez que s'il existe, bien évidemment, une médecine hospitalière, la médecine en France est aussi libérale. En fait, soit vous n'acceptez pas cette réalité, soit vous voulez y mettre un terme ! Ayez donc le courage de vos opinions et dites-nous donc qu'avec vous, c'en sera fini de la médecine libérale ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.) Ce sera plus clair !

Le programme socialiste tourne autour du pot. Vous proposez tout simplement de limiter, de réglementer, et d'interdire l'installation des médecins dans certains territoires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ayez le courage de l'assumer ! Si vous le faisiez, au moins le débat devant les Français serait clair !

Nous savons parfaitement que vous tenez un double langage dans de nombreuses régions. Vous êtes bien souvent les premiers à assister à l'inauguration d'une maison de santé pluridisciplinaire financée grâce aux crédits de l'État votés par cette majorité mais jamais par vous. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous êtes bien contents de trouver les outils que le Gouvernement met en place. (« Menteur ! » et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Nous avons, par exemple, créé le contrat d'engagement de service public destiné aux étudiants et aux internes en médecine ; jamais vous n'en aviez fait autant. (Mêmes mouvements.)

Dans votre région, madame la députée, on compte aujourd'hui neuf maisons de santé pluridisciplinaires. Quarante-cinq dossiers sont en cours pour l'ouverture de nouvelles maisons de santé, mais croyez-vous qu'elles verront le jour si vous mettez en place des obligations qui ne correspondent en rien à la réalité de notre système de santé ? Vous pourrez construire tous les bâtiments que vous voulez : vous n'aurez personne à mettre dedans parce que, ce que montre votre projet, c'est que vous n'avez rien compris aux professionnels de santé ! Je me demande même si vous savez ce qu'attendent les Français en la matière.

Sur tous ces points, il faut que vous ayez le courage de vos opinions. Si vous voulez mettre un terme à l'exercice libéral de la médecine, assumez ce choix !

Cependant, laissez-moi vous dire que l'ordonnance rédigée par le parti socialiste pour le système de santé français n'est bonne ni pour les médecins ni pour les patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Georges Colombier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Colombier

Madame la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, notre société doit répondre à un formidable défi démographique. Aujourd'hui, un Français sur cinq a plus de 60 ans ; en 2020, cette proportion sera d'un Français sur quatre et, en 2050, d'un sur trois. Il s'agit d'une évolution inexorable dont il faut prendre dès aujourd'hui toute la mesure. La prise en charge de nos aînés, tout particulièrement celle des personnes dépendantes, constitue pour notre société un véritable défi, qu'il est de notre responsabilité d'anticiper.

C'est pourquoi le Président de la République a lancé, en début d'année, le débat national sur la dépendance. Dans ce cadre, vous avez installé quatre groupes de travail et initié des débats dans chaque région sur des thèmes essentiels, tels que l'accompagnement des personnes âgées, les enjeux financiers de la dépendance ou la société et le vieillissement.

Vous le savez, les attentes de nos concitoyens, confrontés à la dépendance d'un de leurs proches, sont nombreuses. Je pense notamment aux familles qui doivent faire face à des restes à charge très élevés en établissement et aux aidants, fortement mobilisés et souvent sujets à l'épuisement.

Vous le savez aussi, madame la ministre, les inquiétudes sont fortes. En effet, certains redoutent que la réforme ne se traduise par la privatisation de notre système de prise en charge et le recul de la solidarité nationale. Pouvez-vous faire le point sur l'avancement du débat et nous indiquer quelles sont les premières pistes qui se dégagent s'agissant de cette réforme très attendue par nos concitoyens ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Monsieur le député Colombier, oui, le débat sur la dépendance est très attendu par les Français. Chacun d'entre nous connaît des familles en plein désarroi qui prennent en charge un des leurs, dépendant. C'est le courage du Président de la République que d'avoir voulu ce débat et d'apporter des solutions extrêmement concrètes aux problèmes des Français.

Nous avons voulu que les décisions soient précédées d'un débat citoyen. Ainsi, avec Marie-Anne Montchamp, nous allons à la rencontre des Français. À chaque fois, plusieurs centaines de participants viennent nous faire part de leurs préconisations et de leurs solutions. D'ores et déjà, un certain nombre de pistes se dégagent.

Elles concernent l'aide aux aidants – ces personnes qui passent plusieurs heures au chevet de leur parent dépendant et qui sont souvent épuisées, en état de burn-out –, le montant du reste à charge – que ce soit dans les établissements ou dans le cas des personnes les plus gravement dépendantes qui restent à domicile, en particulier pour les classes moyennes modestes – et, enfin, les questions de coordination et de prévention. Dans le même temps, quatre groupes de travail se réunissent au ministère, dont l'un, animé par Jean-Michel Charpin, a fixé l'enveloppe nécessaire à la prise en charge de la dépendance.

L'objectif est à notre portée. L'effort national en faveur de la prise en charge de la dépendance, qui représente actuellement 1,22 point du PIB, représentera 1,7 point du PIB à l'horizon 2040.

Je veux vous redire très solennellement que le socle de solidarité qui est le nôtre – 80 % des dépenses sont prises en charge par la solidarité nationale – sera préservé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marie-Renée Oget, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Renée Oget

Monsieur le président, avant de poser ma question, je souhaiterais préciser à M. Chatel que les jeunes qui ont quinze ans aujourd'hui sont entrés en CP en 2002, c'est-à-dire l'année où la droite est arrivée au pouvoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Madame la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, le 6 mai dernier, l'Association des paralysés de France tenait son congrès annuel. Dans un discours en forme de réquisitoire, son président a brossé le tableau d'une politique du handicap en situation de faillite. Vous avez bien tenté de le rassurer, mais sans succès.

Vous avez notamment déclaré que l'objectif de l'accessibilité des bâtiments accueillant du public était maintenu pour 2015 et affirmé que « l'objectif fixé par la loi de 2005 [n'était] pas négociable » . Mais quel crédit accorder à votre parole, alors qu'il y a quelques semaines, lors du débat portant sur les MDPH, vous avez introduit des dérogations concernant l'accessibilité pour les constructions neuves ? Du reste, vous n'en êtes pas à votre coup d'essai, puisque, déjà en 2006, la loi portant engagement national pour le logement élargissait le champ des dérogations et que vous avez récidivé, heureusement sans succès, en décembre 2009, en proposant, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, des mesures concernant les logements saisonniers.

L'accessibilité est fondamentale pour que les personnes en situation de handicap puissent évoluer librement dans la cité, sortir de l'exclusion et entrer dans une société d'inclusion. Le projet du parti socialiste s'inscrit dans cette perspective et prend des engagements forts sur l'application de l'agenda 22.

Madame la ministre, votre politique ne vous permet pas de tenir vos engagements en matière d'accessibilité. Aussi ma question est-elle simple : allez vous changer de cap ou entériner le renoncement de ce gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale

Madame la députée, j'ai participé, vendredi dernier, au congrès de l'Association des paralysés de France, qui se tenait à Bordeaux. J'y ai rappelé de façon forte les principes de la politique du handicap auxquels nous sommes attachées, Marie-Anne Montchamp et moi : l'objectif d'accessibilité, qui a été fixé par la loi du 11 février 2005 et qui doit être atteint en 2015, n'est pas négociable.

Des mesures de dérogation seraient totalement inacceptables, ainsi que je l'ai rappelé devant l'Association des paralysés de France. Il est d'ailleurs étonnant que le Conseil national consultatif des personnes handicapées ait accepté, dans un premier temps, de telles mesures, qui ne me paraissent pas conformes à l'esprit de la loi du 11 février 2005. Dans la proposition de loi de votre collègue, le sénateur Paul Blanc, amendée par Sylvie Desmarescaux, il est prévu des mesures de substitution. Il s'agit, non pas de revenir sur la notion d'accessibilité, mais de lui substituer, en cas de difficultés, d'autres mesures qui permettent l'accessibilité complète aux bâtiments neufs.

J'ai redit aux associations de personnes handicapées que, bien entendu, tous les textes réglementaires seraient pris en concertation avec elles. Je veux en effet que la démocratie de la politique du handicap soit complète. Je le répète, l'accessibilité, c'est la citoyenneté. Ce n'est pas négociable ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Morel-A-L'Huissier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Monsieur le président, à titre liminaire, je voudrais saluer, au nom de tous les éleveurs, l'excellent travail accompli par Bruno Lemaire en tant que ministre de l'agriculture. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Un accord-cadre européen sur le télétravail a été élaboré par les partenaires sociaux en 2002 et transposé en France sous la forme d'un accord national interprofessionnel en 2005. Le secteur public n'était pas cosignataire de cet accord.

La fonction publique française est indéniablement en retard en matière de télétravail, comme nous avons d'ailleurs pu le constater lors de votre déplacement dans l'Orne lundi dernier. Actuellement, les expériences de télétravail dans la fonction publique sont encadrées par des conventions conclues au cas par cas.

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez participé à un colloque au Sénat, lors duquel vous avez pu mesurer l'impact du télétravail et l'émergence des technologies de l'information et de la communication – les TIC. Par ailleurs, vous savez qu'en 2010, j'ai souhaité intégrer la thématique du télétravail à la loi sur le dialogue social dans la fonction publique dont j'ai été le rapporteur.

Vous avez accompagné ce mouvement avec les syndicats et le 7 janvier dernier, en liaison avec le ministre du budget, François Baroin, vous avez confié au conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies, une mission tendant à développer le télétravail dans la fonction publique.

Le CGIET, chargé de dresser un état des lieux du télétravail et d'identifier les conditions de la réussite du développement de celui-ci, a rendu un pré-rapport et rendra son rapport à la fin du mois. Il formulera un certain nombre de recommandations afin de créer une dynamique en faveur du télétravail dans la fonction publique.

Monsieur le secrétaire d'État, quelle suite envisagez-vous de donner à ces recommandations, selon quelles modalités et dans quel délai ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

Debut de section - PermalienGeorges Tron, secrétaire d'état chargé de la fonction publique

Monsieur le député, vous connaissez sur le bout des doigts la thématique du télétravail et comme vous l'avez dit, en juin 2010, vous avez été à l'origine d'un colloque qui a permis de relancer la question du télétravail dans la fonction publique.

Je rappellerai quelques chiffres de nature à nous permettre de mesurer l'enjeu auquel nous devons faire face. Dans les pays à économie comparable, on compte environ 15 % de télétravailleurs, contre 7 % en France – et seulement 1 % dans la fonction publique. Nous étions pourtant des précurseurs dans ce domaine, puisque dès 1998, un rapport avait été commandé en vue de développer le télétravail dans la fonction publique.

Les agents des administrations sont très demandeurs de télétravail. Ainsi, 90 % des agents de la fonction publique territoriale souhaitent que l'on mette en oeuvre des techniques leur permettant de télétravailler. En effet, ce mode de travail est économe en matière de transports, donc de pollution ; il permet de mieux concilier la vie professionnelle et la vie familiale, ce en quoi il constitue un facteur de réduction des inégalités entre les hommes et les femmes ; il réduit le stress au travail ; enfin, il permet d'offrir, grâce à une plus grande concentration, de meilleures conditions de travail.

Comme vous l'avez dit, nous attendons le rapport définitif du conseil général de l'industrie, de l'énergie et des technologies, avant de tirer des conclusions. Je terminerai en disant, avec Roselyne Bachelot et Marie-Anne Montchamp, que le télétravail peut trouver une application particulière dans le domaine du handicap. Il est évident qu'en atteignant l'objectif de 7 % de télétravail dans les collectivités territoriales – ce qui nous placera au même niveau que le secteur privé –, nous permettrons à des travailleurs handicapés et à leurs parents de mieux concilier leur vie professionnelle et leurs obligations familiales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Berthelot, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Berthelot

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Les statistiques de l'Observatoire national de la délinquance publiées le 16 mai, c'est-à-dire lundi dernier, révèlent une augmentation de l'insécurité sur l'ensemble du territoire français. Malheureusement, c'est en Guyane que l'on relève la plus forte hausse de la délinquance, avec une augmentation de 17,7 % des atteintes aux biens et de 6 % des atteintes physiques.

La situation est particulièrement dramatique dans l'ouest guyanais, notamment dans le secteur de Saint-Laurent-du-Maroni. Le samedi 14 mai, la ville a été déclarée ville morte afin de protester contre la violence quotidienne. Le 18 avril, la communauté éducative manifestait pour dénoncer les agressions dans les enceintes scolaires par des éléments extérieurs aux établissements.

À l'insécurité s'ajoute la situation de justice virtuelle, dénoncée dans un rapport d'information du Sénat. Malgré la nomination d'un vice-procureur et d'un vice-président du tribunal à Saint-Laurent, la justice ne fonctionne pas, faute de personnel administratif et de locaux adaptés. Les audiences sont donc renvoyées au tribunal de grande instance de Cayenne, lui-même engorgé et situé à 250 kilomètres. Ce sont, bien sûr, les justiciables qui font les frais de cette situation, ainsi que la sécurité, puisque les gendarmes sont obligés d'accompagner les prévenus.

Monsieur le ministre, les droits essentiels à la sécurité et à la justice, qui relèvent de la compétence de l'État, ne sont plus assurés en Guyane. Que comptez-vous faire pour assumer vos responsabilités afin que nos concitoyens ne soient plus les abandonnés de la République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Madame la députée, la délinquance évolue effectivement de façon préoccupante en Guyane. Vous auriez pu, du reste, également citer l'incident grave survenu dimanche dernier, à savoir le mitraillage d'un convoi, qui a occasionné la mort de six personnes. Il s'agissait d'un guet-apens organisé contre des orpailleurs illégaux, qui transportaient une quantité d'or assez importante.

L'orpaillage illégal est une activité extrêmement nuisible en ce qu'elle génère elle-même de la délinquance, mais également par les dommages qu'elle cause à la faune et à la flore de Guyane. Le Gouvernement est donc lourdement engagé dans le combat contre cette activité. En 2008, le Président de la République a décidé de mettre en oeuvre une opération alliant les compétences des gendarmes et des militaires afin de détruire les camps d'orpaillage, casser les approvisionnements logistiques et démanteler les réseaux. Les résultats sont là, dans la mesure où il n'y a plus d'augmentation de l'orpaillage clandestin. Il a été procédé à environ 1 500 interpellations et 2 000 relevés d'infraction, et nous continuerons à agir.

Si j'ai commencé par évoquer l'orpaillage, c'est qu'il est générateur de beaucoup de délinquance. Cela étant, vous avez raison, il y a d'autres actes de violence. En plus des statistiques que vous avez citées, vous auriez pu dire que les initiatives de la police et de la gendarmerie sont en très forte croissance. S'il y a augmentation des chiffres de la délinquance, c'est aussi le fait de l'activité de la police et de la gendarmerie, qui révèle de la délinquance. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Cette augmentation de l'activité des forces de l'ordre est de 19 % depuis le début de l'année.

Vous auriez également pu dire que les violences aux personnes sont non pas en hausse, mais en diminution de 6 %. Cela étant, il nous reste beaucoup à faire et c'est ce à quoi le Gouvernement s'emploie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Sécurité en Guyane

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi de MM. Jean-Marc Ayrault, François Pupponi, François Brottes et plusieurs de leurs collègues visant à prendre des mesures d'urgence en faveur des villes et des quartiers en difficulté. (nos 3297, 3394)

Jeudi dernier, le Gouvernement a indiqué qu'en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, il demandait à l'Assemblée nationale de se prononcer par un seul vote sur les articles et l'ensemble de la proposition de loi, à l'exclusion de tout amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Dans les explications de vote, la parole est à M. François Pupponi, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de François Pupponi

Monsieur le président, monsieur le ministre de la ville, mes chers collègues, le groupe SRC a déposé une proposition de loi visant à prendre des mesures d'urgence en faveur des villes et des quartiers en difficulté. Cette proposition n'a pas l'ambition de réformer l'ensemble de la politique de la ville – ambition qu'il nous faudra pourtant un jour avoir car, à l'évidence, les politiques publiques conduites depuis quarante ans n'auront pas réussi à sortir les quartiers défavorisés et leurs habitants de la situation dramatique dans laquelle ils se trouvent toujours aujourd'hui. Mais, face à l'urgence, elle préconise des mesures fortes, immédiates et cohérentes, qui ciblent les principaux symptômes de ces quartiers.

En premier lieu, nous souhaitons élever cette politique au rang de priorité nationale. Nous sommes convaincus que changer profondément l'image de ces quartiers nécessite de reconnaître enfin l'enjeu national qu'ils représentent.

Pour cela, nous proposons, d'une part, que cette politique soit directement rattachée au Premier ministre, afin qu'il conduise l'ensemble des grands ministères de notre pays à se réinvestir dans ces territoires. D'autre part, il faut réformer les outils de cette politique pour la rendre plus lisible et plus efficace. Il faut en terminer avec les ZUS, les ZFU, les ZEP, les ZRU, qui la complexifient et la stigmatisent. Nous proposons donc un unique périmètre, pour un unique contrat signé entre le maire ou le président de l'agglomération et le préfet. Ce contrat souple, adapté à la réalité des territoires, doit associer dans une démarche contractuelle les acteurs locaux, les associations, le milieu économique et les habitants.

C'est encore la cohérence que nous recherchons quand nous proposons la fusion de l'Agence nationale de la rénovation urbaine et de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances. Réunir ces deux agences, c'est résoudre la contradiction entre l'urbain et l'humain, c'est croire que doivent se construire conjointement les immeubles et le lien social dans ces quartiers.

En second lieu, nous vous appelons à une véritable solidarité financière à l'égard des communes en difficulté qui ont des populations en grande souffrance. Répondre à cet enjeu, c'est s'attaquer durablement aux inégalités territoriales. Comment accepter que, dans notre pays, le pouvoir d'achat de 1 % des communes les plus riches soit quarante-cinq fois plus élevé que celui de 1 % des plus pauvres ?

La péréquation est aujourd'hui insuffisamment dotée et fléchée, même si, bien entendu, des avancées sont intervenues – il faut le reconnaître et le signaler. Pour en réformer le système, il faut d'abord nous fixer un objectif annuel de réduction des inégalités de ressources entre collectivités. Pour atteindre cet objectif, chaque commune devrait disposer d'un SMIC communal, c'est-à-dire d'une ressource par habitant suffisante pour conduire les politiques essentielles dont nos concitoyens ont besoin et auxquelles ils sont en droit de prétendre.

La péréquation doit ensuite avoir les moyens de ses ambitions. Nous proposons que son montant actuel de 3,8 milliards soit quasiment doublé. Affecter 3 milliards d'euros supplémentaires pour la solidarité dans notre pays permettrait de régler les déséquilibres budgétaires les plus importants des communes les plus pauvres. Nous proposons qu'ils soient répartis entre le futur Fonds national de péréquation, le Fonds de solidarité de la région Île-de-France et un rééquilibrage de la dotation globale de fonctionnement en faveur des dotations de péréquation. L'État, sur ce point, devra réaffirmer son rôle de garant de la solidarité nationale et territoriale.

En troisième lieu, l'urgence sociale commande une véritable politique de l'emploi à destination des habitants de ces quartiers, notamment des jeunes.

Tout d'abord, il est essentiel de continuer à créer des emplois à l'intérieur de ces quartiers. Sur ce point, la fin du dispositif des zones franches urbaines est une erreur. Grâce aux ZFU, des dizaines de milliers d'entreprises et d'emplois durables ont été créés dans ces quartiers. Nous proposons donc de prolonger ce dispositif incitatif, en corrigeant, bien entendu, les effets d'aubaine auxquels il a parfois pu conduire. Nous attendons d'ailleurs le rapport de la commission Raoult pour prendre position et exprimer plus précisément notre point de vue.

Cela n'est toutefois pas suffisant. Il faut également désenclaver ces territoires par l'emploi, en favorisant l'embauche de leurs habitants à l'extérieur des quartiers. Nous proposons donc que de nouveaux dispositifs permettent de faciliter le recrutement, en particulier par les grandes entreprises situées dans le bassin d'emploi. Un accompagnement individualisé du demandeur d'emploi – en termes de logement, de permis de conduire, d'achat d'une voiture ou de garde d'enfants – permettrait notamment de sécuriser les employeurs.

Enfin, il faut s'attaquer au fléau des discriminations liées à l'origine, dont ces habitants sont trop souvent victimes. La mise en place du CV anonyme et l'obligation d'intégrer une clause d'insertion sociale dans tout projet subventionné par la puissance publique sont des propositions concrètes et immédiatement applicables.

Dernier axe : la rénovation urbaine. Le programme national de rénovation urbaine transforme profondément la physionomie de ces quartiers et le cadre de vie de ceux qui y habitent et y travaillent. Cette réussite ne sera complète que si un nouveau programme est lancé pour rénover les quartiers n'ayant aujourd'hui pas pu bénéficier du premier. Nous proposons donc le lancement d'un PNRU 2, qui étende ses compétences aux copropriétés, à l'habitat indigne, insalubre et informel, à la rénovation des groupes scolaires et au désenclavement physique de ces quartiers par les transports en commun.

Pour cela, évidemment, l'État devra se réengager financièrement, lui qui a aujourd'hui préféré assécher nos partenaires traditionnels que sont Action logement et les bailleurs sociaux pour financer le premier PNRU.

Enfin, nous proposons de lever deux obstacles majeurs à l'objectif de mixité sociale. Il s'agit, d'une part, de renforcer le pouvoir des préfets quand est constatée une carence des maires en matière de construction de logements sociaux. Nous obligerons ainsi les communes hors-la-loi à participer à l'effort national de construction de logements sociaux plutôt que de préférer payer des amendes pour maintenir l'entre-soi. D'autre part, nous interdirons le recours au droit au logement opposable dans les ZUS, qui a pour effet pervers de ghettoïser un peu plus les ghettos existants et conforte de surcroît la stratégie des communes qui ne respectent pas la loi SRU.

Ces premières mesures, mes chers collègues, aussi symboliques qu'essentielles, seront le prélude à une prise de conscience partagée des enjeux de cohésion sociale et nationale qu'implique la reconnaissance de ces territoires marginalisés. En effet, se joue dans nos banlieues l'effectivité d'une promesse républicaine qui n'a jamais été tenue.

Les députés du groupe SRC veulent porter haut cette exigence, c'est pourquoi ils voteront évidemment cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'apprécie pour l'essentiel la proposition de loi présentée par nos collègues du groupe SRC, et cela d'autant plus que, en tant que député et maire d'une ville de la banlieue parisienne, je constate les conséquences désastreuses de l'action du Gouvernement dans nos communes et dénonce la baisse de 40 % des crédits d'État à la politique de la ville.

Le « plan Marshall 2 » pour les quartiers populaires, annoncé par Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle, n'a en réalité jamais vu le jour. Le plan banlieue, magnifié par Fadela Amara, est un cuisant échec. Et pour cause : depuis 2007, tous les exercices budgétaires ont été l'occasion de coupes claires dans les programmes ville et logement.

Il n'est donc pas étonnant que le dernier rapport de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles tire la sonnette d'alarme. En matière d'emploi, nous avons largement dépassé le stade critique : 43 % des jeunes hommes et 37 % des jeunes filles sont au chômage. Un tiers des cinq millions d'habitants des quartiers populaires vit sous le seuil de pauvreté. Le revenu moyen des populations des ZUS est inférieur de 56 % à celui du reste des habitants du reste du territoire.

Est-ce un échec ou une politique délibérée ? De fait, vous avez abandonné les banlieues, laissant la misère croître au même rythme que la ghettoïsation et les stigmatisations, organisant, comme mentionné dans le rapport Pupponi-Goulard, l'« impuissance de la République ».

Oui, il faut un plan d'urgence pour les banlieues françaises ; c'est un enjeu de cohésion nationale. À cet égard, les députés communistes, républicains et du parti de gauche saluent, comme je viens de le dire, la proposition de loi déposée par nos collègues du groupe SRC. Je pense notamment à l'article 1er, qui rappelle le droit à l'égal accès au service public, et à l'article 2, qui consacre la politique de la ville comme priorité nationale. Je suis tout à fait d'accord avec l'exposé des motifs du texte, qui rappelle que la politique de la ville doit venir en complément d'une politique de droit commun d'envergure, et qu'à aucun moment elle ne doit en suppléer les carences.

Pour les députés communistes, républicains et du parti de gauche, il ne peut y avoir d'amélioration de la situation des quartiers populaires dans un contexte de réduction des crédits et de rigueur budgétaire. Il faut un investissement public massif. C'est pourquoi les articles concernant le renforcement des différents fonds de péréquation et le lancement d'un PNRU 2 bénéficient de tout notre soutien. Il en va de même pour la création d'un plancher minimum des ressources communales, ainsi que pour l'inscription dans le projet de loi de finances d'objectifs chiffrés et financés en matière de réduction des inégalités.

Je regrette cependant quelques imprécisions du texte concernant la refonte de la DGF, qui se traduisent par certaines incertitudes quant à l'engagement réel de l'État.

Enfin, s'agissant de la géographie prioritaire, tout le monde sur ces bancs s'accorde à reconnaître la nécessité de son évolution. Les députés du groupe SRC proposent un seul périmètre reposant sur un interlocuteur et un contrat uniques. Si l'effort de rationalisation de la géographie prioritaire est louable, le texte, imprécis, laisse planer quelques doutes. Il ne faudrait pas que l'effort de l'État en faveur des villes les plus pauvres s'effectue au détriment de villes jugées un peu moins pauvres. Il nous faut, au contraire, mettre à contribution l'État, mais aussi ces villes aux ressources conséquentes qui refusent de jouer le jeu de la solidarité. En termes de péréquation comme de géographie prioritaire, nous serons très vigilants sur la prise en compte des critères dits de charges, qui mesurent la capacité des villes à assumer les besoins de leurs habitants.

Pour conclure, et malgré ces quelques remarques, je confirme que les députés communistes, républicains et du parti de gauche voteront cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je fais d'ores et déjà annoncer le scrutin dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Pascal Brindeau, pour le groupe NC.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

C'est de bon augure, monsieur Mallot !

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette proposition de loi a le mérite de rouvrir le débat sur la politique de la ville et sur les préoccupations, que nous partageons sur l'ensemble des bancs de cet hémicycle, en faveur des quartiers sensibles. Mais la façon dont ce débat a été abordé, et les propositions qui, il faut bien le dire, sont un étalonnage d'un projet électoral pour 2012, laissent à penser que vous jetez complètement à l'eau la politique qui est menée par le Gouvernement et par le ministre de la ville. Malgré tout, nos discussions ont été riches et, de très bonne tenue.

Vous réclamez un acte II du PNRU. Or vous avez d'ores et déjà obtenu satisfaction, puisque, comme vous le savez, le ministre de la ville est mandaté par le Premier ministre et un rapport sera rendu à l'automne, qui définira ce que sera le périmètre de ce nouveau plan national de rénovation urbaine.

Vous voulez réformer les contrats urbains de cohésion sociale. Vous en changez le nom, mais vous ne dites pas comment vous souhaiteriez rationaliser le périmètre et les critères de la politique de la ville et de la géographie prioritaire sur laquelle ils s'appuient.

Un certain nombre d'autres propositions sont louables mais ne correspondent pas à un approfondissement ou à une remise en cause complète de la politique de la ville telle que nous la concevons aujourd'hui. En réalité, cette proposition de loi est pour vous l'occasion, encore une fois, de procéder à une critique un peu trop systématique de la politique gouvernementale. De plus, il s'agit seulement de quelques ébauches de propositions électorales pour 2012, que nous vous proposons de remettre le métier. C'est la raison pour laquelle les députés du groupe Nouveau Centre ne voteront pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Gérard Gaudron, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Gaudron

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l'initiative du groupe SRC, notre assemblée a examiné, la semaine dernière, une proposition de loi visant à prendre des mesures d'urgence en faveur des villes et des quartiers en difficulté.

Notre majorité, c'est une évidence, est tout entière déjà mobilisée pour lutter contre les inégalités, notamment dans les quartiers en difficulté. Cette volonté politique claire se traduit dans les actes. Ainsi, le ministère de la ville est un ministère de plein exercice. Le comité interministériel des villes témoigne également de cet intérêt. Il s'est d'ailleurs réuni le 18 février dernier, sous la présidence du Premier ministre, ce qui montre tout l'intérêt du Gouvernement pour ce sujet.

Cette proposition de loi n'est pas opportune, malgré la qualité du travail des rapporteurs, et elle est plus un catalogue qu'un corpus de mesures applicables immédiatement pour des résultats rapides.

Comme vous l'avez dit, monsieur le ministre, « Soit on est dans la com, soit on est dans l'action ». Nous, nous sommes déjà dans l'action !

Il n'est pas acceptable de prétendre, comme vous le faites, chers collègues socialistes, que nos quartiers sont abandonnés. Contrairement à vos affirmations, l'État ne se désengage pas. Il suffit de rappeler les 12 milliards d'euros de fonds publics pour le financement du programme national de rénovation urbaine, qui ont drainé plus de 43 milliards d'investissements. Il en est ainsi, d'ailleurs, depuis 2003.

À ce titre, votre proposition de loi contient peu de propositions novatrices. La majorité n'a pas attendu ce texte pour faire des constats, préciser une dynamique et lancer, avec le concours des collectivités locales, des opérations concrètes que chacun peut constater sur le terrain.

En matière de solidarité financière et de réduction des inégalités territoriales notamment, des mesures importantes ont été décidées par le Gouvernement. Le principe visant à garantir la proximité et l'égal accès des citoyens aux services publics est déjà reconnu comme un principe général de droit à valeur constitutionnelle et a, dès le départ des opérations, été confirmé comme un élément constitutif de notre politique de la ville. Le comité interministériel des villes de février dernier a prévu la préparation de la réforme de la géographie prioritaire et de la nouvelle génération des CUCS. Quant à la création de contrats de promotion sociale et territoriale, vous oubliez que ces CUCS sont prolongés jusqu'en 2014 et que des CUCS expérimentaux vont être testés sur trente-trois sites.

D'autre part, vous omettez manifestement de reconnaître que l'emploi dans les quartiers prioritaires est et a toujours été une priorité pour la majorité, même s'il nous faut, naturellement, faire encore des efforts pour les banlieues.

Enfin, vous souhaitez que l'insertion sociale et professionnelle soit prise en compte dans le cadre de la commande publique. Ce principe est déjà intégré dans le code des marchés publics.

Pour agir dans l'urgence, comme le prétend le titre de votre proposition de loi, il faudrait que celle-ci apporte des solutions concrètes et nouvelles avec des effets immédiats, ce qui n'est malheureusement pas le cas. C'est pourquoi, vous l'aurez compris, elle ne nous paraît pas opportune et le groupe UMP ne la votera pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 481

Nombre de suffrages exprimés 479

Majorité absolue 240

Pour l'adoption 163

Contre 316

(La proposition de loi n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur l'ensemble de la proposition de loi de MM. Jean-Marc Ayrault, Jean-Yves Le Bouillonnec, François Brottes et plusieurs de leurs collègues visant à prendre des mesures urgentes et d'application immédiate en faveur du logement. (nos 3294, 3393)

Jeudi dernier, le Gouvernement a indiqué qu'en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, il demandait à l'Assemblée nationale de se prononcer par un seul vote sur les articles et l'ensemble de la proposition de loi, à l'exclusion de tout amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Dans les explications de vote, la parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour le groupe SRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Le Bouillonnec

Monsieur le président, monsieur le ministre de la ville, mes chers collègues, la proposition de loi présentée par le groupe SRC visant à prendre des mesures urgentes et d'application immédiate en faveur du logement a été examinée dans des conditions, de temps et de déroulement des débats, qui ne correspondent pas à l'esprit des séances d'initiatives parlementaires. Ces séances ont pourtant été invoquées comme l'affirmation d'un accroissement des possibilités d'initiatives des députés et, singulièrement, de l'opposition. Notre groupe le regrette vivement, en exprimant la crainte que l'absence d'anticipation dans l'organisation de ces séances ne provoque un désintérêt et une désaffection de notre assemblée. De là à considérer que telle était bien l'intention réelle, il n'y a qu'un pas que nous serons bien obligés de franchir si cette situation perdurait. Il nous semble que la conférence des présidents doit se pencher sur cette sérieuse difficulté.

Aujourd'hui, le logement figure parmi les premières préoccupations des Français, avec l'emploi et le pouvoir d'achat. Les chiffres de la crise du logement et du mal-logement nourrissent légitimement les peurs de ne pas pouvoir se loger, de perdre son logement ou de continuer à vivre dans des conditions indignes, insalubres pour soi et sa famille.

Ces craintes, cette grave insécurité sociale, sont amplement justifiées par toutes les données qui, mois après mois, année après année, viennent confirmer que la crise du logement en France atteint un niveau sans précédent. Après les rapports successifs de la Fondation Abbé Pierre, ceux de l'INSEE, de l'OCDE, du Défenseur des enfants sont implacables. Ils mettent en évidence, par exemple, la dégradation des conditions d'accès à un logement abordable et la hausse exorbitante des loyers et du foncier.

Même l'accession à la propriété, votre priorité depuis 2007, n'a pas progressé plus significativement qu'au cours des dernières décennies, malgré les cadeaux fiscaux, les moyens budgétaires colossaux que vous y avez consacrés sans contreparties sociales ; l'accession sociale à la propriété elle-même est de moins en moins ouverte aux ménages les plus modestes et régresse pour la période 2001-2010.

Votre gouvernement a non seulement échoué à résorber la crise du logement, mais, plus encore, il a manifestement contribué à l'aggraver, comme tous les indicateurs le confirment, et cela au détriment de la grande majorité de nos concitoyens.

Nous avons proposé à plusieurs reprises un vrai changement de cap, qu'impose cette situation sans précédent qui affecte profondément notre pacte républicain et social, car elle signe l'exclusion croissante de nos concitoyens. Aujourd'hui, nous vous invitons une nouvelle fois à rejoindre nos propositions pragmatiques et de bon sens.

Ainsi, cette proposition de loi prévoit de mettre un terme à la hausse des loyers du secteur privé en rétablissant le dispositif de la loi de 1989 prévoyant le plafonnement des augmentations de loyer lors des relocations, mesure plébiscitée par 86 % des Français.

Nous proposons de renforcer l'effectivité des dispositions de l'article 55 de la loi SRU en fixant à 25 % le quota de logements sociaux à construire, en étendant le champ des communes concernées aux communes rurales avec un quota de 10 %, en développant la construction de logements très sociaux par l'affectation d'un coefficient différent selon les types de logements, PLS, PLUS et PLAI, en renforçant les pouvoirs du préfet en cas de carence des communes ; en interdisant le logement des « demandeurs DALO » dans les communes comprenant plus de 50 % de logements sociaux, et en faisant appliquer par l'État une décote sur les terrains qu'il cède pour la réalisation de logements dont un quart au moins sont des logements sociaux.

Nous vous proposons d'assouplir le droit de l'urbanisme pour combler les « dents creuses » en autorisant le rehaussement des immeubles afin de coordonner l'alignement du faîtage sur les fronts bâtis.

Nous vous proposons de créer, dans chaque région, un établissement foncier régional, mais un seul.

Nous vous proposons d'adopter quatre mesures destinées à diminuer la tension sur le parc privé en décourageant la vacance : la majoration de la taxe d'habitation sur les logements vacants ; l'obligation de transmission par l'administration aux collectivités locales de la liste des logements vacants ; la création d'une taxe annuelle, progressive en fonction de la durée de cette vacance, sur les locaux à usage professionnel inoccupés depuis plus d'un an en Île-de-France ; l'exonération d'impôt sur les plus-values réalisées lors de la cession de bureaux dans les zones tendues, lorsque le cessionnaire s'engage à les transformer en logements sociaux.

Nous vous proposons de programmer, sur cinq ans, la construction de 750 000 logements sociaux réellement adaptés aux besoins et financièrement aidés.

Nous vous proposons de sacraliser, dans le budget de l'État, ses engagements dans les opérations de renouvellement urbain.

Nous vous proposons de renforcer les dispositifs de la loi SRU, avec la possibilité pour le préfet, après avoir constaté la carence d'une commune, de conclure une convention avec des organismes agréés pour mettre à la disposition de demandeurs jugés prioritaires au titre de la loi DALO des logements appartenant à des propriétaires privés, avec le concours des communes concernées.

Nous vous proposons de sécuriser les rapports locatifs par un fonds de garantie universel et mutualisé.

Nous vous proposons, enfin, de recentrer le prêt à taux zéro, qui doit rester l'instrument de l'accession à la propriété pour les gens les plus modestes, en plafonnant son accès en termes de revenus.

Le présent texte ne peut, à lui seul, aborder toutes les questions ni apporter toutes les réponses à la crise du logement. Résoudre cette crise suppose en effet une refonte de notre politique du logement. Reste que les mesures proposées sont pragmatiques et nous paraissent de bon sens face à l'ampleur de la crise. D'application immédiate, elles posent les jalons d'une autre politique privilégiant l'efficacité et la justice sociale.

Je vous invite donc à rejoindre le groupe SRC en votant pour cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Pierre Gosnat, pour le groupe GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Gosnat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par le groupe SRC décline une série de mesures d'urgence pour le logement. Elle se présente comme une réponse à court terme face à l'ampleur de la crise du logement et aux conséquences néfastes de la politique gouvernementale.

Les député-e-s communistes, républicains, du Parti de gauche et verts partagent le constat de l'aggravation d'une crise généralisée du logement, à l'ampleur jamais égalée. La situation est plus que problématique, et nos concitoyens en ont bien conscience : 80 % d'entre eux déclarent qu'il est difficile de trouver un logement, et 56 % affirment avoir peur de devenir un jour SDF.

Depuis 2007, le Gouvernement n'a jamais apporté les réponses adéquates à la crise ou, plus exactement, s'est appliqué à déconstruire méthodiquement les financements du logement social et à alimenter la spéculation privée : baisse cumulée des aides à la pierre de près d'un milliard, siphonage des fonds du 1 %, abandon du financement de l'ANRU, acharnement dans la politique du « tous propriétaires », aussi coûteuse qu'inefficace.

Loin d'apporter des solutions à la crise, la politique du Gouvernement a, en fait, contribué à l'alimenter. À cet égard, la proposition de loi des député-e-s socialistes s'inscrit clairement dans une dynamique de rupture. Nous en approuvons l'économie générale. D'ailleurs, sur certains points, ce texte se rapproche de la proposition de loi des député-e-s communistes établissant un programme d'urgence pour le logement et la lutte contre la spéculation immobilière, déposée le 15 mars dernier. Je pense notamment au renforcement de la loi SRU, à l'affirmation de l'engagement financier de l'État, au lancement d'un plan massif de construction de logements sociaux, à la création d'un système de garantie du risque locatif et à la mobilisation des logements vacants.

Autre point soulevé par cette proposition de loi : la fixation des loyers à la relocation, une des mesures phares de ce texte. Face à l'augmentation exponentielle des prix à la location – hausse de 146 %, en dix ans, des loyers sur Paris –, il nous faut développer des dispositifs qui sortent le logement des lois du marché et de la spéculation. Un des grands écueils, mais un écueil pour ainsi dire volontaire, de la politique gouvernementale est d'avoir fait du logement une marchandise comme les autres. Les député-e-s communistes, républicains, du Parti de gauche et verts affirment, au contraire, qu'il est un bien de première nécessité et qu'à ce titre, l'État se doit d'en organiser l'accès.

C'est pourquoi la proposition des déput-é-s socialistes visant à encadrer les loyers à la relocation va dans le bon sens. Il est cependant dommage que cette proposition de loi ne s'attaque pas au niveau actuel des loyers, pourtant prohibitif. Je crois qu'une baisse générale des loyers du parc privé est aujourd'hui devenue indispensable.

En matière de foncier, les député-e-s du groupe SRC proposent la création obligatoire dans chaque région d'un établissement public foncier, et la vente en deçà de la valeur vénale de terrains appartenant à l'État ou à des entreprises à capitaux publics. Ces dispositions recueillent notre soutien, tant la maîtrise du foncier nous semble être consubstantielle à toute sortie de crise.

Je regrette cependant qu'à aucun moment ne soit abordée la question de la mobilisation du foncier privé. Le foncier, tout comme le bâti, doivent être retirés des lois du marché. Cette proposition de loi apporte une réponse certes indispensable mais partielle cependant aux problèmes posés.

Par ailleurs, dans une proposition de loi d'urgence, nous aurions aimé trouver des articles abrogeant les principales dispositions de la loi MOLLE votée en 2009. Je pense notamment au conventionnement obligatoire, à la vente du patrimoine HLM, à la réforme du l %, à la baisse des plafonds de ressources, et à la remise en cause du droit au maintien dans les lieux.

Enfin, nous regrettons que nos collègues socialistes ne soient pas revenus sur la décentralisation du livret A, actée dans la LME.

Je l'ai dit précédemment, les député-e-s communistes, républicains, du Parti de gauche et verts adhèrent à l'économie générale du texte. C'est pourquoi ils voteront en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Le scrutin public est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Pascal Brindeau, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Brindeau

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une fois encore, nous a été donnée l'occasion d'examiner une proposition de loi concernant des mesures urgentes pour le logement. Mais, là encore, celle-ci a plus la valeur d'une valise électorale que d'un plan cohérent en faveur du logement.

Certes, la situation du logement en France connaît des tensions. Tout le monde en est conscient. Le Gouvernement s'attelle depuis quatre années à résoudre ce problème, et les choses avancent. Un certain nombre de résultats positifs peuvent être constatés.

Jamais autant de logements sociaux n'ont été financés, dans ce pays, que sous cette majorité présidentielle. Bien sûr, certaines situations sont encore préoccupantes. Bien sûr, des choses peuvent être améliorées. Mais les solutions que vous proposez ne nous paraissent pas les bonnes.

Un des articles de cette proposition de loi qui a fait le plus débat est celui qui marque votre volonté d'encadrer les loyers. J'ai déjà eu l'occasion de souligner la vision très francilienne de cette mesure. Dans un certain nombre de grandes villes de province, nous avons connu une baisse des loyers. Vouloir remettre en cause la rentabilité des investissements des propriétaires, c'est bien prendre le risque de les voir se détourner de leurs investissements, et, au final, de les faire fuir les zones où l'offre de logements est déjà en tension.

En outre, s'attaquer aux conséquences ne permettra pas de résoudre les causes du problème, au premier rang desquelles figure la faiblesse de l'offre de logements.

Au sein du groupe Nouveau Centre, nous considérons qu'il faut optimiser le parc existant puisque les besoins se situent là où les habitants sont concentrés. En ce sens, le programme national de rénovation urbaine apporte des résultats très encourageants.

Vous souhaitez renforcer la loi SRU, et en particulier porter le pourcentage de logements sociaux obligatoires dans certaines collectivités de 20 % à 25 %. Au-delà de la volonté des élus locaux de se mettre en conformité avec les dispositions actuelles de la loi SRU, j'attire votre attention sur les difficultés que cela pourrait représenter pour un certain nombre de communes, notamment des villes moyennes entourées de territoires ruraux, du fait de l'obligation d'offrir aux populations nouvelles des services et équipements nouveaux, notamment en matière de transports, problème qui devient particulièrement préoccupant dans les zones rurales, ainsi que dans les villes moyennes, telle que la ville de Vendôme dans le Loir-et-Cher.

Par ailleurs, en ce qui concerne l'aspect financier des mesures proposées, l'absence d'étude d'impact nous conduit à nous interroger sur l'évaluation de leur coût et sur la possibilité de les financer.

Nous pensons que la majeure partie de l'arsenal législatif est en place et qu'il convient de mieux articuler et approfondir certaines des actions entreprises par le Gouvernement. C'est pourquoi les députés du Nouveau Centre ne voteront pas cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Piron

Monsieur le président, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous discutons, en partant d'un diagnostic, propose quelques outils. Je dois dire mon étonnement quant au diagnostic, car, alors que nous avons admis, sur tous les bancs et depuis longtemps, que la politique du logement, si elle se fonde sur un socle national, est aussi faite de politiques territoriales extraordinairement diverses ; alors que je croyais acquise l'idée d'une territorialisation nécessaire pour avoir des réponses adaptées à des contextes très divers, je viens d'entendre énoncer l'idée qu'il y aurait une seule crise générale du logement. Ce diagnostic totalement faux donnerait lieu à des solutions uniformes, qui ne résoudraient certainement pas le surplus de logements existant dans certaines régions pas plus que le manque de logements dans d'autres, notamment en Île-de-France, dans le Genevois français, en Rhône-Alpes et en Côte d'Azur. Ne mélangeons donc pas tout, et surtout gardons-nous d'une vision uniforme du territoire national.

Le diagnostic m'a un peu étonné, comme j'ai eu l'occasion de le dire lors du débat la semaine dernière. Je me suis même demandé s'il ne s'agissait pas d'un certain parisiano-centrisme, pardonnez-moi le néologisme.

Par ailleurs, je souhaite évoquer quelques-uns des outils proposés. Cela a déjà été largement signalé, la réponse majeure à la pression qui existe sur les loyers, c'est d'abord l'augmentation de l'offre. C'est l'insuffisance de l'offre qui alimente la hausse des loyers, notamment sur Paris et la région parisienne, ainsi que dans les régions précédemment évoquées. Face à une offre insuffisante, l'encadrement des loyers ne suffira pas pour loger ceux qui attendent et ne trouvent pas de logement, quel que soit le montant des loyers. Ne nous leurrons pas, la question essentielle est celle-là.

Vous proposez de porter le pourcentage de logements sociaux à 25 % plutôt qu'à 20 %. Alors que des progrès incontestables ont été réalisés, notamment grâce à l'article 55 de la loi SRU, dont j'ai eu l'occasion de défendre le maintien, votre proposition aboutirait à doubler des objectifs que nous avons déjà du mal à atteindre. Permettez-moi de douter d'une proposition qui me semble peu réaliste.

À cela vous ajoutez, dans un autre article, une idée qui, théoriquement, peut paraître séduisante. Elle consiste à distinguer entre les types de logements sociaux, et à les affecter de coefficients selon le montant du loyer qu'ils proposeraient, créant ainsi un coefficient très dégressif du PLAI jusqu'au PLS.

Cette idée me semble receler plus d'inconvénients que d'avantages. Tout d'abord, elle compliquera énormément les modes de calcul concernant le total des 20 % demandés. Ensuite, elle pourrait mener, si l'on faisait exclusivement des PLAI, à se situer très en deçà des 20 % de logements sociaux que vous souhaitez, tout comme nous. En réalité, vous avez posé une bonne question, mais vous proposez un outil qui produirait les effets inverses de ceux que vous souhaitez.

Par ailleurs, pour ne reprendre qu'une des mesures, vous avez évoqué la mobilisation de la taxe sur les logements vacants. Merci de nous rappeler que l'outil existe déjà. C'est un hommage à la mesure que nous avons déjà prise, et qui a relevé considérablement cette taxe. Le seul reproche que l'on puisse faire, c'est que cet outil n'est pas suffisamment utilisé. Je lisais récemment que quelques maires avaient eu le courage d'utiliser cette taxe, qui avait alors produit des effets. Commençons donc par utiliser les outils existants avant de réinventer l'eau chaude.

Enfin, vous visez l'objectif de 150 000 logements sociaux. On peut toujours fixer un objectif théorique : pourquoi pas 180 000 ou 200 000 ? Je rappelle simplement que c'est ce gouvernement et cette majorité qui ont permis d'atteindre cette année le nombre inégalé depuis longtemps de 135 000 logements sociaux financés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Les effets se verront dans le temps, car une politique du logement s'inscrit dans la durée. On peut toujours faire de la surenchère, mais ce qui a été fait mérite un minimum de considération, et même un peu mieux lorsque l'on voit cela de manière rétrospective ou perspective.

Les intentions sont sans doute au rendez-vous de cette proposition de loi, mais les outils n'y sont pas. C'est la raison pour laquelle nous voterons contre cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l'ensemble de la proposition de loi.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 484

Nombre de suffrages exprimés 482

Majorité absolue 242

Pour l'adoption 169

Contre 313

(La proposition de loi n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle le débat sur la mise en oeuvre des décisions du conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre 2009 organisé à la demande du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

La parole est à M. Victorin Lurel.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais commencer mon propos en présentant à la ministre chargée de l'outre-mer mes condoléances pour le deuil qui a frappé sa famille. Je tiens à la remercier particulièrement d'avoir fait l'effort d'être parmi nous aujourd'hui. Nous n'ignorons pas le sacrifice qu'elle a dû faire.

L'exercice auquel nous allons nous livrer aujourd'hui ne consiste pas à nourrir des polémiques. Outre celui de voter la loi, la Constitution donne au Parlement le pouvoir de contrôler et d'évaluer les politiques gouvernementales. C'est ce travail, désormais très classique dans notre assemblée, que les parlementaires du groupe SRC ont patiemment conduit durant de longues semaines pour évaluer la mise en oeuvre des mesures annoncées le 6 novembre 2009 par le chef de l'État.

Il y a déjà plus de deux ans, une crise sociale de grande ampleur se faisait jour dans les outre-mer et singulièrement en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane, à La Réunion et à Mayotte. Après la tenue, dans chacun de nos territoires, des états généraux – que nous avions d'ailleurs été quelques-uns à proposer pendant la crise –, le chef de l'État avait annoncé des mesures, qualifiées à l'époque d'historiques, au cours d'un conseil interministériel de l'outre-mer, une instance intergouvernementale créée spécialement, avec solennité, pour répondre à l'ampleur de la crise.

Dix-huit mois après ces annonces, l'heure n'est certes pas encore aux bilans définitifs. Mais, compte tenu de l'urgence des situations auxquelles ce CIOM prétendait répondre, il nous est apparu possible, mais plus encore nécessaire, de mettre dès aujourd'hui en regard les promesses et les actes, afin de comprendre pourquoi, en dix-huit mois, un si faible nombre de mesures a été effectivement mis en oeuvre.

Nous avons noté que le Gouvernement avait très tôt perçu le risque de voir critiquer le rythme d'exécution des mesures annoncées par le chef de l'État. En effet, le 6 novembre 2009, lors de la réunion du CIOM, les « fiches action » publiées par le Gouvernement recensaient en tout 639 mesures : 539 spécifiques à chaque territoire, et 100 qualifiées de transversales. Sept mois plus tard, lors d'un premier bilan d'étape, la communication gouvernementale ne retenait plus que 137 mesures globales qui, dès lors, ne représentaient plus l'intégralité des décisions du CIOM.

Certains croient encore que fausser le thermomètre peut suffire à faire baisser la fièvre et, au prétexte de rationaliser sa communication pour la rendre plus avantageuse, le Gouvernement a ainsi fait passer à la trappe plusieurs dizaines de mesures annoncées en novembre 2009. L'une d'entre elles était si importante pour nos territoires qu'elle figurait en bonne place dans le discours du chef de l'État : la mise en oeuvre dans les DOM d'un fonds d'investissement de proximité, un FIP-DOM, afin de fixer sur nos territoires l'épargne locale au profit de nos petites et moyennes entreprises, principales pourvoyeuses d'emplois dans nos économies. Oublié, enterré sans bruit : tel est le sort qui a hélas ! été réservé au FIP-DOM.

Pour que notre regard ne soit pas influencé par la rationalisation de la communication gouvernementale, une fois l'orage de la crise passée, nous avons fondé notre analyse sur les « fiches action » directement issues du CIOM, remises le 6 novembre aux ministres, aux élus locaux et à la presse. Ces fiches ont été mises en ligne sur le site du ministère et elles sont toujours consultables.

À partir de ces fiches, nous pouvons aujourd'hui affirmer, avec regret, que le meilleur taux d'exécution des mesures du CIOM est atteint à La Réunion avec 25,6 % et le pire à Saint-Martin avec moins de 6 %. En Guadeloupe, il atteint 19,8 % ; en Guyane, 22,2 % ; en Martinique, 18,3 % ; à Saint-Pierre-et-Miquelon, 11,8 %. Dans l'hexagone, il est d'à peine 16 %. Pour ce qui relève des mesures transversales, seul un quart de celles-ci a été véritablement mis en oeuvre. Après dix-huit mois, ces chiffres parlent d'eux-mêmes, serais-je tenté de dire. Mais rien ne remplace les exemples précis, même si je ne peux, et vous le comprendrez, en dresser ici une liste exhaustive.

Cela figure dans notre rapport. Je vous ferai remettre, dans un instant, une fiche synthétique des mesures non mises en oeuvre par le Gouvernement.

Parmi les mesures transversales, il était prévu de lutter contre la fracture numérique en favorisant le lancement d'offres attractives pour l'accès à internet des populations à faibles revenus. Rien n'a été fait en ce sens, et ce sont les régions de Guadeloupe, Martinique et Réunion qui ont fait baisser sur leur territoire le prix de gros du haut débit afin de permettre aux opérateurs de baisser leurs tarifs.

Il était prévu de relancer les prêts participatifs pour les entreprises : aucun prêt n'a été octroyé par l'AFD. En Guadeloupe, c'est la région qui a créé un fonds d'investissement pour renforcer les fonds propres des entreprises locales qui veulent investir pour se développer. Même chose en Martinique.

Il était prévu de rendre l'outre-mer autonome sur le plan énergétique d'ici à vingt ans et de revaloriser le tarif de rachat de l'électricité « propre » de 20 %. Or c'est le moment qu'a choisi le Gouvernement pour baisser ce tarif et pour supprimer dans le budget 2011 les dispositifs fiscaux soutenant le développement de l'énergie photovoltaïque.

Il était prévu un grand plan contre l'illettrisme, qui touche 25 à 30 % de la population chez moi. Cette compétence d'État, c'est la région qui l'a incluse dans son plan d'urgence de 6,5 millions d'euros pour la jeunesse en difficulté.

Il était prévu de sanctuariser la LBU pour financer le logement : elle a, au contraire, perdu 22 millions en crédits de paiement cette année.

Pour lutter contre les pratiques abusives en matière de prix, il était prévu la création d'un groupe d'intervention régional « concurrence ». Ce GIR a été créé mais, faute de moyens supplémentaires, il n'a mené à ce jour aucune action significative. Même chose pour le plan séisme dont nous nous épuisons à pointer, avec la Cour des comptes, les retards d'exécution et l'insuffisance des moyens, alors que la Guadeloupe et la Martinique sont en grand danger.

Il en est de même pour les ressources nouvelles promises aux communes, pour le sommet des chefs d'État annoncé pour relancer la coopération régionale dans la zone Caraïbe, pour la création d'un système d'échanges universitaires entre l'outre-mer, l'hexagone et l'environnement régional, pour le renforcement des chambres d'agriculture, pour la reconnaissance du fait syndical outre-mer, pour la reconnaissance de la pharmacopée antillaise dans la pharmacopée française, et j'en passe : ces mesures-là sont au point mort.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Oui, monsieur le président.

Le sont également les actions promises en faveur du développement de l'agriculture en Guyane, mais aussi l'étude de l'INSEE sur les prix, les revenus et le pouvoir d'achat en Martinique, les mesures favorisant l'emploi local dans la fonction publique à La Réunion ou encore les mesures proposées, retenues et annoncées relatives à l'organisation des filières pêche et aquacole à Saint-Pierre-et-Miquelon. Contrairement aux engagements du CIOM, aucune construction de prison n'est prévue à Saint-Martin dans le dernier programme immobilier pénitentiaire. La prison de Basse-Terre, cette honte de la République, ne sera pas fermée.

Bien sûr, vous nous direz que votre copie n'est pas blanche et que nous avons choisi de décrire un verre au trois quarts vide. En vérité, la ligne de fond de la politique du Gouvernement, c'est la RGPP, y compris en matière d'évolution institutionnelle.

Nous vous faisons deux propositions : d'une part, de demander au chef de l'État de réunir à nouveau le CIOM afin de remobiliser le Gouvernement autour des problématiques ultramarines, d'autre part, de l'assortir d'une nouvelle évaluation réalisée par un cabinet indépendant ou confiée à la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée.

Au terme de mon propos, madame la ministre, je vous adresse les salutations respectueuses, mais combattantes, d'un ultramarin qui refuse la stigmatisation. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, vous le savez, le conseil interministériel du 6 novembre 2009 a été l'aboutissement d'une large concertation dans les outre-mer. Les décisions prises lors de ce comité interministériel sont directement le fruit de ces larges discussions auxquelles ont participé les élus, les forces économiques et de nombreuses associations.

Le CIOM a entendu nos concitoyens d'outre-mer qui estimaient que la concurrence était insuffisante et les mécanismes de formation des prix peu transparents. Les premières décisions du CIOM sont allées en ce sens.

Le développement économique de l'outre mer doit aussi être mis au service de l'emploi, de l'insertion, tout particulièrement des jeunes et globalement de l'égalité des chances.

Quel bilan peut-on tirer aujourd'hui de la mise en oeuvre du CIOM ? Je voudrais vous faire partager un constat simple : le Gouvernement fait clairement son travail. Ce sont aujourd'hui près de 85 % des 137 décisions du CIOM qui sont réalisées ou en cours de réalisation.

L'État a dégagé des moyens humains – cinq sous-préfets à la cohésion sociale et trois commissaires au développement endogène ont été nommés – et des moyens financiers conséquents dans un contexte budgétaire souvent difficile. Deux exemples parmi les plus significatifs : l'abondement du programme POSEI par des crédits nationaux à hauteur de 40 millions d'euros par an, et la sanctuarisation des crédits de la LBU.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Permettez-moi de profiter de l'occasion qui m'est donnée pour répondre à certaines allégations mises en avant par votre collègue Victorin Lurel.

La méthode retenue pour effectuer le bilan du CIOM est connue. Les décisions sont regroupées dans un panel de 137 mesures réparties en huit thèmes correspondant aux ateliers des états généraux et en mesures spécifiques à chaque territoire. Cette méthode n'a jamais été contestée. Elle évite simplement les doublons puisque de nombreuses mesures identiques sont mises en oeuvre simultanément dans plusieurs territoires.

Lorsque M. Lurel indique que le CIOM comporte 640 mesures, je ne peux que constater qu'il s'agit là d'un moyen pour majorer artificiellement le dénominateur qui va servir à rendre compte du taux effectif de réalisation...

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…et minimiser ainsi l'action du Gouvernement. Mais, je suis sûre que cet artifice n'aura pas échappé à tous les parlementaires de bonne foi.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Je voudrais en venir plus précisément au taux d'exécution des mesures du CIOM dans plusieurs territoires.

Si l'on prend en compte les mesures à ce jour réalisées ou en cours de mise en oeuvre, les résultats obtenus sont de 62 % en Guadeloupe, malheureusement, mais de 85 % en Martinique, de 85 % en Guyane et de 75 % à La Réunion. À Mayotte, parmi les sept mesures territorialisées, deux sont réalisées et cinq ont trouvé un début d'exécution.

S'agissant des mesures transversales dont j'ai pu lire que seules 25 % étaient appliquées, je voudrais m'inscrire en faux : sur soixante et onze mesures transversales, trente et une sont réalisées, trente-cinq sont en cours d'exécution et seulement cinq sont dites « en panne ». Je précise aussi que parmi les mesures classifiées dans la catégorie « en cours de réalisation », beaucoup s'inscrivent dans des politiques publiques complexes et de long terme. Dans ces conditions, il est facile de les faire basculer dans la catégorie des mesures qui n'avancent pas alors même que des actions précises ont été déployées pour rendre leur réalisation irréversible.

Je reviens maintenant sur deux critiques infondées qui ont été formulées à la hâte.

S'agissant du fond exceptionnel d'investissement, je ne peux pas laisser dire que seuls 3 millions de crédits sont disponibles pour de nouveaux projets en 2011. C'est confondre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement. S'il est exact que sur les 20,4 millions de crédits de paiement 2,8 millions d'euros sont destinés à couvrir les engagements 2011, il n'est pas honnête de passer sous silence les 10 millions d'euros de nouvelles autorisations d'engagement prévues en 2011. Depuis sa création en 2009, le FEI a permis de financer vingt-sept opérations en 2009 et plus de soixante en 2010, pour un total d'engagements de 76 millions d'euros auxquels s'ajoutent 125 millions au titre du plan de relance. Au total, ce sont environ 200 millions d'euros qui ont été injectés dans l'économie des outre-mer ces deux dernières années.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Une critique particulièrement injuste a été formulée à l'endroit du service militaire adapté dont chacun s'accorde à louer les réussites. Affirmer que la montée en charge du SMA se traduit par une diminution de moitié de la durée de formation est un travestissement de la réalité.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Vous le savez bien, nous avons voulu permettre à des jeunes non diplômés qui restent au chômage de bénéficier de ce dispositif.

Mesdames et messieurs les députés, le groupe socialiste a demandé avec force un débat sur la mise en oeuvre du CIOM. C'est parfaitement légitime. Malgré des circonstances personnelles douloureuses, je suis là aujourd'hui devant vous. Débattre avec la représentation nationale est pour moi plus qu'un devoir, c'est un honneur.

Ce qui se joue aussi, c'est à l'évidence une certaine vision de l'outre-mer. Si l'on retient une approche purement comptable, il est très facile de montrer que les choses ne se passent pas bien. Si, en revanche, l'on regarde nos outre-mer du point de vue de leurs atouts et de leurs richesses humaines, on comprend que l'approche du Gouvernement est fondée sur la confiance, le respect et la responsabilité partagée.

La vérité, c'est que jamais un gouvernement n'a donné, avec le CIOM, une telle impulsion pour l'outre-mer.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Jamais un Gouvernement n'avait réussi à traiter avec succès et courage politique des sujets aussi sensibles, voire tabous, et aussi différents que la promotion des ultramarins aux postes de responsabilité,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…la réforme des indemnités de retraite, l'assouplissement des visas ou les réformes institutionnelles.

Avec l'année des outre-mer, jamais un Gouvernement n'avait autant mis à l'honneur nos outre-mer, leurs cultures, leurs histoires, leurs grands hommes. L'hommage solennel de la nation à Aimé Césaire puis le dévoilement d'une stèle en l'honneur, pour la première fois, du combat des esclaves pour la liberté,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

sont des gestes dont la portée symbolique résonnera longtemps dans la mémoire collective de nos outre-mer.

Oui, mesdames et messieurs les parlementaires, ce bilan du Président de la République et du Gouvernement, je suis fière de le porter en tant que ministre et, je dois le dire aussi, en tant qu'ultramarine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je rappelle que la conférence des présidents du 3 mai 2011 a décidé que ce débat serait organisé sous forme de questions. La durée des questions et des réponses est de deux minutes. La réponse du Gouvernement sera donnée après chaque question. Il n'y aura pas de droit de réplique.

Nous prendrons successivement les trois premières questions du groupe SRC, les deux questions du groupe GDR, les deux questions du groupe Nouveau Centre, les trois premières questions du groupe UMP, les trois dernières questions du groupe SRC et nous terminerons par les deux dernières questions du groupe UMP afin d'observer une alternance.

Nous en venons aux questions du groupe SRC.

La parole est à M. Patrick Lebreton.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Lebreton

Madame la ministre, vous avez visiblement des difficultés à mettre en oeuvre votre feuille de route – car le CIOM, c'est la feuille de route de votre gouvernement après les tragiques événements et les manifestations qui ont eu lieu au début de l'année 2009. Rejeter la faute sur les collectivités ou sur la comptabilité faite par les auteurs du présent rapport est difficilement acceptable. Les autorisations d'engagement du FEI ont bien diminué de 18 millions d'euros entre 2010 et 2011. Il faudrait vraiment que nous portions les mêmes lunettes !

Notre débat s'inscrit dans le contexte déplorable de la politique de désengagement et de stigmatisation de l'outre-mer menée par Nicolas Sarkozy depuis quatre ans.

Je ne reviendrai pas sur le désengagement permanent de l'État dans les budgets d'intervention, ni sur la saignée des dispositifs de contrats aidés, ni sur une LODEOM vidée de son contenu ou encore sur l'abandon des services publics. À l'heure du bilan, de votre bilan, madame la ministre, on ne peut que déplorer le véritable saccage économique et social dont nos territoires sont l'objet depuis 2007.

Le CIOM était censé être la réponse aux revendications des ultramarins de mettre un coup d'arrêt au racket dont ils sont victimes, de dire stop à la vie chère et d'abattre l'oligarchie qui règne en maître dans nos territoires. Or je constate avec regret que le taux d'inexécution des mesures décidées est de 75 % en moyenne. J'ai bien peur que votre CIOM ne se soit transformé en un véritable marché de dupes.

Pourtant, certaines mesures auraient pu avoir un impact positif sur le quotidien des ultramarins. Ainsi, je déplore que la décision de sanctuariser – terme lourd de sens – les crédits de la LBU ait été trahie, avec l'amputation de 22 millions de crédits dans le dernier budget pour livrer la politique du logement social à la défiscalisation. De même, les fonctionnaires ultramarins dans l'hexagone, qui pensaient que leur retour dans leur département d'origine serait facilité, ont été trompés. Je veux porter à votre connaissance le cas des gardiens de la paix à La Réunion : en 2010, sur cinquante-deux postes ouverts, seuls onze ont été pourvus par des Réunionnais. On est très proche du scandale.

Aussi, madame la ministre, je souhaite connaître les mesures que vous allez prendre très prochainement pour rendre aux ultramarins une copie un peu plus présentable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Décidément, nous n'avons pas la même lecture des chiffres, monsieur Lebreton ! Vos questions appellent une analyse point par point.

S'agissant du FEI, je regrette, je viens d'indiquer que 200 millions d'euros d'autorisations d'engagement ont été notifiés aux collectivités en outre-mer. Le CIOM n'est pas l'alpha et l'oméga qui va régler tous les problèmes en outre-mer. Ces dotations sont aujourd'hui dans les mains des collectivités à qui il revient de réaliser les équipements publics : l'État n'a jamais été maître d'ouvrage. Mais peut-être voulez-vous remettre en cause les compétences transférées ?

En matière de logement, jamais un gouvernement n'a fait autant pour le logement social.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

J'en veux pour preuve que nous avons dépassé les 4 000 logements prévus entre 2007 et 2009 : nous en sommes à 7 000 logements financés. Je peux vous communiquer les chiffres. Les opérateurs, c'est vrai, ont eu du mal à réaliser ces logements mais l'État a toujours eu une démarche d'accompagnement afin d'aplanir les difficultés. Je vous renvoie à la réunion que j'ai organisée avec les opérateurs pour permettre à la défiscalisation de jouer son rôle.

Il est trop facile de prétendre que l'on a saccagé l'économie des ultra-marins.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Dois-je rappeler l'engagement du Premier ministre de maintenir la dotation du protocole de Matignon ? Nous sommes même allés au-delà puisque l'enveloppe est passée de 840 millions à 870 millions d'euros. Même s'il y a eu changement de majorité, l'effort de l'État est resté inchangé : il a voulu conserver cet investissement important, notamment en raison du choix de passer du tram train à la route du littoral.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Nous ne vivons pas les mêmes réalités ! Ce n'est pas une affaire de lunettes mais de vécu.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Il n'y a pas absence de volonté d'agir mais, à un moment donné, chacun doit prendre ses responsabilités. L'État n'est pas maître d'ouvrage, et le CIOM a donné lieu à des décisions voulues par les élus mais aussi par les associations. Que faites-vous du travail mené par les associations,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…par tous les acteurs économiques qui, à un moment donné, ont considéré que le développement endogène était prioritaire ? Il faut s'adresser aux ultramarins pour faire en sorte, aux côtés de l'État, que le développement économique de ces territoires connaisse un nouveau départ. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Girardin

Madame la ministre, à l'instar de mes collègues du groupe SRC, je n'aurai pas un discours positif à l'égard du CIOM. Avant de commencer mon propos, j'aimerais indiquer que dans le PLF 2011, les dotations du FEI correspondent à 10 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 21 millions en crédits de paiement.

Dans l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, le taux d'exécution est très faible et certaines des mesures mises en oeuvre se sont soldées par un fiasco.

Nous sommes décidément bien loin du compte, notamment en ce qui concerne les mesures proposées pour les secteurs pêche et aquaculture, dont la situation s'est considérablement détériorée depuis le CIOM, au point d'aboutir récemment à la fermeture de la plus grosse usine de traitement du poisson à Saint-Pierre.

On ne peut que déplorer l'absence d'amélioration concrète sur plusieurs dossiers.

C'est le cas tout d'abord de l'Observatoire des prix et des revenus : les quelques mesurettes prises n'ont pratiquement rien changé localement pour alléger le coût de la vie des ménages.

C'est aussi le cas en matière de coopération régionale avec le Canada : les dossiers peinent à avancer sans que le renforcement promis des contacts avec l'ambassade de France au Canada et la mission économique de Montréal se soit concrétisé.

Même constat de stagnation en ce qui concerne l'accompagnement par l'État du développement économique. Nous attendons toujours la création d'un poste adapté de commissaire au développement endogène, que j'ai réclamé à maintes reprises. À l'heure où l'Union européenne se prépare à finaliser son accord de libre-échange avec le Canada, la réflexion sur le cadre européen est loin d'être satisfaisante. Ce n'est pas le système de compensation que vous envisagez qui saura nous satisfaire. Ce n'est pas non plus la perte des moyens et des compétences engendrée par la mise en oeuvre de la RGPP qui nous aidera à avancer dans ce domaine comme dans d'autres.

Deux ans après, nous ne pouvons constater aucune avancée concrète : au-delà de quelques tables rondes, l'État a certes apporté un soutien financier massif mais avec des sommes bien mal investies dans des dossiers montés à la hâte pour répondre à l'urgence et préserver à court terme une paix sociale toute relative.

Le CIOM avait pourtant suscité une attente importante à Saint-Pierre-et-Miquelon, comme dans les autres outre-mer. Les forces vives de l'archipel ont largement joué le jeu en participant aux débats et les élus, notamment les parlementaires, pensaient avoir été entendus lorsqu'ils demandaient à l'État d'aider le territoire à jeter les bases d'un développement économique par l'identification et la consolidation de secteurs porteurs, notamment la remise à niveau des infrastructures portuaires.

Bref, autour de ce CIOM, il y a eu beaucoup de bruit pour pas grand-chose, à l'instar de la LODEOM dont les mesures – passeport mobilité, aides au logement ou encore dossier des retraites – tardent à s'appliquer ou se révèlent inadaptées au territoire.

Que d'attentes déçues !

Ma question sera simple, madame la ministre : compte tenu de l'échec de la mise en oeuvre du CIOM et des politiques publiques dans une collectivité de 6 000 habitants comme Saint-Pierre-et-Miquelon, comment espérez-vous répondre aux besoins de plus de 2,6 millions d'ultramarins avant avril 2012 ?

Pour finir, je vous prie, chers collègues, de bien vouloir m'excuser de ne pas participer à la suite de ce débat : je partirai juste après la réponse de Mme la ministre pour le Sénat afin de soutenir la position de Saint-Pierre-et-Miquelon dans l'accord de libre-échange UE-Canada. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Madame la députée, vous avez vous-même fourni une réponse à propos de l'accord de coopération, je n'y reviendrai donc pas.

Vous ne pouvez pas considérer que le Gouvernement n'accompagne pas fortement le territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui a fait le choix de ne plus relever de l'article 73 mais de l'article 74 de la Constitution. Toutes les dispositions ne sont donc pas applicables. En matière de desserte maritime, la délégation de service public est certes à revoir mais il faut rappeler que l'intervention de l'État s'élève à 4 millions d'euros par an.

S'agissant de la filière pêche, je connais aussi bien le dossier que vous. L'usine Seafood n'a pas forcément été à la hauteur pour maintenir son activité. L'État, quant à lui, a consacré près de 38 millions d'euros à cette filière entre 1992 et 2011, ce qui montre l'ampleur de son effort. Vous ne pouvez pas considérer que nous n'avons pas la volonté de soutenir le développement économique. Rappelons que cette collectivité, régie par l'article 74, a de réelles compétences en la matière. Il importe que chacun assume ses responsabilités.

Nous sommes même allés plus loin en matière de pêche puisque nous avons accepté d'engager un audit pour aider la filière à sortir de cette situation.

Vous avez fait allusion à la désignation d'un commissaire au développement endogène. Il est vrai que pour un territoire comme celui de Saint-Pierre-et-Miquelon, la question se pose. Mais il faut bien voir que le correspondant d'UBIFRANCE expert de la filière halieutique au sein de la chambre d'agriculture, de commerce, d'industrie et de métiers et d'artisanat, remplit parfaitement ces missions puisqu'à Saint-Pierre, c'est essentiellement la filière pêche qui est concernée.

Je n'entrerai pas trop dans le détail du régime de retraite. Nous avons beaucoup travaillé ensemble sur ce dossier et nous avons pu obtenir une revalorisation des pensions de 6,6 %, alors que ce régime est différent du régime national. D'ailleurs, en matière de solidarité, il faudra peut-être aligner ces deux régimes si vous voulez que les revalorisations à Saint-Pierre-et-Miquelon suivent le même rythme qu'au niveau national.

Vous le voyez, Saint-Pierre-et-Miquelon ne peut pas considérer aujourd'hui que le Gouvernement ne lui accorde pas une attention particulière. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Madame la ministre, sachez que je partage la douleur qui est la vôtre. Il se trouve que je suis dans le même cas que vous, je sais ce qu'il en est. Je m'abstiendrai donc de faire une intervention comptable sur un enjeu aussi important. J'estime que l'organisation de ce débat est une excellente initiative mais j'aurais aimé que les conditions de son déroulement soient différentes : deux minutes pour pouvoir poser des questions me semblent être un cadre extrêmement réducteur. Nous ferons toutefois avec.

Nous sommes confrontés à une situation difficile. Le constat d'échec des politiques de développement outre-mer, quelle que soit la méthode suivie, est clair. Quelques chiffres récurrents s'imposent : 25 % de chômeurs dans la plupart des départements et territoires d'outre-mer, 30 % à La Réunion et 57 % des jeunes de moins de vingt-cinq ans au chômage.

Je dois reconnaître que je n'ai pas été un adepte des états généraux tels qu'ils ont été conçus. J'ai toujours considéré que dresser des listes de mesures ne correspond pas au besoin de réformes profondes de ces pays. Tant qu'on n'allouera pas des moyens suffisants pour sortir d'une économie de rente et de consommation, tant qu'on ne cessera pas de stigmatiser systématiquement la situation budgétaire des outre-mer, tant qu'on ne consentira pas un effort financier exceptionnel pour soutenir une mutation économique permettant un partage des richesses dans un contexte de croissance économique insuffisante pour créer l'activité et les emplois nécessaires, nous risquons de rester dans une situation difficile. Des réformes de fond sont indispensables.

Qu'en est-il du soutien des TPE et des PME ? L'un des objectifs était l'amélioration de l'accès aux marchés locaux et la consolidation de leur structure financière. Où en est le FIP, qui constitue un outil fondamental ?

Qu'en est-il de la modification du code des marchés publics en vue de privilégier l'approvisionnement local ? Comment peut-on développer l'économie locale si la réforme des marchés publics ne permet pas des interventions de proximité ? La loi de modernisation de l'agriculture donne la possibilité de créer des contrats entre producteurs et consommateurs, y compris pour les cantines. Il faut agir vite en ce domaine.

Qu'en est-il de la filière pêche ? Mme Damanaki a déclaré que l'Union européenne ne financera pas le renouvellement de la flotte, y compris celui de la flotte côtière, parce que l'Europe est en surproduction. Or nos territoires sont en sous-production en matière de prélèvements.

Qu'en est-il de la non-reconnaissance du fait syndical en Martinique et en Guadeloupe ? Il s'agit d'un vrai problème de démocratie sociale : les syndicats martiniquais et guadeloupéens ne peuvent pas siéger dans des instances comme la CAF ou la caisse générale de la sécurité sociale. Plusieurs promesses ont été faites, aucune n'a été tenue.

Qu'en est-il de la fragilisation de l'article 349 du traité de Lisbonne, aujourd'hui laminé, ce qui risque de conduire l'ensemble des régions ultrapériphériques dans une situation extrêmement difficile, jusqu'à l'approche du budget de 2013 et de l'objectif 20-20-20 de 2020 ? Aujourd'hui, le débat budgétaire au sein de l'Union européenne ne nous permet pas d'inscrire ces régions ultrapériphériques dans une dynamique de développement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le député, vous avez raison, il ne faut pas centrer notre débat autour des chiffres, sur lesquels chacun pourra avoir sa propre analyse. Ce n'est pas au regard des données financières que l'on peut mesurer le niveau d'implication d'un État dans l'accompagnement du développement économique de ses territoires.

Je reconnais avec vous que le taux de chômage outre-mer est insupportable. Il faut tout faire pour traiter socialement cette question. C'est tout l'effort du Gouvernement en matière de formation, avec notamment les plans de lutte contre l'illettrisme. À cet égard, je signale à M. Lurel que nous avons d'ores et déjà signé deux plans de ce type et que je m'apprête à en signer un autre pour la Martinique lors d'un prochain déplacement.

C'est aussi au travers de l'emploi que l'on doit agir. C'est pour cela qu'il faut soutenir l'investissement par le plan de relance mais aussi assurer un soutien à nos PME. C'est ce que nous avons fait dans le cadre du plan de soutien.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Je ne vais pas rentrer dans les détails du Small Business Act, il serait trop long de dresser la liste des mesures d'exonération. Toujours est-il qu'il a prouvé son efficacité : il a permis de sauver des millions d'emplois au moment de la crise de 2009.

S'agissant du FIP, monsieur Lurel, j'ai pris mes responsabilités. Il s'agissait d'une décision très importante du conseil interministériel de l'outre-mer. Dès le mois de décembre 2009, dans le cadre du PLF 2010, nous avons déposé un amendement à ce sujet. La représentation nationale ne l'a pas adopté et je suis respectueuse des décisions du Parlement. Reste que vos amis socialistes n'ont rien fait pour m'aider à faire en sorte que la réduction d'impôt passe de 25 % à 50 %. Toutefois, nous reviendrons sur cette question, car il faut trouver une solution.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

S'agissant du code des marchés publics, il est vrai que la question de sa révision se pose. Simplement, la directive européenne nous conduirait à entrer dans une procédure trop complexe, c'est la raison pour laquelle nous avons préféré la voie de la circulaire pour inciter à avoir recours à la production locale, notamment pour les marchés publics passés par l'État.

Enfin, la question de la pêche et de l'Europe mériterait à elle seule un débat. Je suis d'accord avec vous, nous devons agir pour que l'article 349 soit plus utilisé. Il faut toutefois souligner qu'il a permis quelques avancées, notamment pour ce qui est des 40 millions venus en complément du POSEI. Il faut souligner aussi que l'Union européenne a accepté l'intervention du POSEI à La Réunion : nous avons pu soutenir un projet de l'Association réunionnaise interprofessionnelle de la pêche avec les crédits européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous changeons de groupe.

Pour le groupe GDR, la parole est à Mme Huguette Bello pour poser deux questions successives.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Madame la ministre, lors du discours qu'il a tenu le 6 novembre 2009 à l'occasion du CIOM, le Président de la République s'est longuement attardé sur la nécessité de promouvoir une véritable égalité des chances.

Plusieurs actions ont été identifiées comme devant y contribuer, parmi lesquelles la relance du logement social. Le diagnostic est établi ; les besoins sont connus ; ils demeurent très importants et requièrent des investissements nettement supérieurs à ceux que le Gouvernement a prévus au titre de la ligne budgétaire unique.

L'une des mesures destinées à faciliter la production de logements sociaux et d'équipements collectifs est la cession gratuite par l'État de terrains qu'il n'utilise pas. Le dispositif et ses modalités d'application sont inscrits dans la loi de finances pour 2011. Pourtant, cette mesure, présentée comme exceptionnelle, n'a pas encore été appliquée. À La Réunion, où les besoins en logements sociaux sont les plus importants, aucun terrain n'a jusqu'à présent été cédé. Dans quel délai le Gouvernement compte-t-il rendre cette mesure effective ?

Une autre disposition destinée à contribuer à l'égalité des chances consiste à favoriser l'émergence d'une fonction publique plus représentative du bassin de vie où elle intervient. Cet objectif, que nous avons salué, passe notamment par une meilleure organisation de la mobilité dans les emplois publics et par la constitution d'un vivier de talents ultramarins. Une circulaire en ce sens a été publiée en juillet dernier.

Mais son application est bien timide, pour ne pas dire hésitante. La mesure suscite pourtant une forte attente, étant donné le nombre de plus en plus élevé de jeunes qui, malgré leurs diplômes, accèdent toujours plus difficilement au marché du travail. À quand la bourse régionale de l'emploi public et la plate-forme en ligne ? À quand la concrétisation des mesures destinées à faciliter l'affectation et la promotion des agents de catégorie B et C originaires d'outre-mer dans leur département ?

Je veux enfin dire quelques mots de l'intégration de l'histoire et des cultures des outre-mer dans les enseignements scolaires. Les éditeurs nationaux refusent d'intégrer l'océan Indien aux chapitres consacrés à l'histoire de l'esclavage, au motif que l'intitulé retenu par les programmes parle de « traites transatlantiques ». Merci de mettre un terme à cette interprétation restrictive, madame la ministre.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Madame la députée, vous me fournissez l'occasion de m'exprimer sur le logement social. Jamais un gouvernement n'en a fait autant dans ce domaine. Vous ne voulez pas l'entendre ; je citerai néanmoins quelques chiffres.

Dans votre seul département, le nombre de logements sociaux financés est passé de 5 188 à 7 085 ; à La Réunion, il a été porté de 2 164 à 3 471.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Notre objectif pour 2011 est de 8 850 logements.

Si les opérateurs sociaux qui détiennent les autorisations d'engagement ne procèdent pas à ces opérations, je n'y peux rien ! Il faut donc se poser certaines questions. Nous l'avons fait et nous continuerons de le faire…

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Seigneur ! Allez inaugurer les logements, et on verra !

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…afin que les logements nécessaires soient construits outre-mer, parce que le besoin s'en fait sentir et parce qu'il s'agit d'une priorité du Gouvernement et de mon ministère.

Vous avez mentionné les cessions gratuites. En effet, le chef de l'État s'est engagé sur ce point ; nous avons tenu cet engagement, puisqu'il a été inscrit dans le projet de loi de finances. Permettez-moi toutefois de vous dire que son application nécessite un décret ; nous le préparons ; il sera publié avant la fin de l'année.

Quant à la fonction publique, je l'ai dit, aucun gouvernement n'avait osé défendre cette idée ; c'est le Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui l'a fait le premier. Nous avons rédigé une circulaire, vous l'avez dit : cela ne pouvait se faire autrement, car il faut respecter les organismes paritaires. Dans cette circulaire, nous avons défini des obligations qui s'imposent à chaque ministère afin que des efforts soient faits et que, à compétence équivalente, les ultramarins accèdent aux mêmes responsabilités que les autres. Un bilan sera conjointement dressé, madame la députée, par le ministère de la fonction publique et par mon ministère ; j'en rendrai compte.

Mais ne croyez pas que le ministre de l'outre-mer puisse seul agir en la matière. Au demeurant, vous n'avez pas parlé du contreseing, alors que, pour la première fois, le ministre de l'outre-mer en dispose, notamment pour la nomination des chefs de service de l'État. Vous le savez, cela nous a permis de nommer cinq sous-préfets délégués à la cohésion sociale, dont quatre ultramarins,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…et, depuis la réorganisation des services de l'État au niveau local dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, cinq directeurs de service ont également été nommés grâce à l'action du ministre de l'outre-mer. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous évoquez, par ailleurs, la place à donner à l'océan Indien à propos de la circulaire qui invite les éditeurs à prendre davantage en considération les cultures des outre-mer. Je sais que mon collègue Luc Chatel a adressé un courrier à tous les éditeurs afin qu'ils tiennent compte de l'histoire de nos territoires. Quant au problème particulier que vous évoquez, je n'en connaissais pas l'existence ; je vous répondrai sur ce point après m'être renseignée auprès de lui.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Huguette Bello, pour poser sa seconde question.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

La lutte contre la vie chère a été le moteur d'impressionnants mouvements sociaux en 2009. Le Conseil interministériel de l'outre-mer en a fait l'un de ses axes prioritaires. Mais, trois ans plus tard, la réalité prend le pas sur les discours. Selon les derniers chiffres de l'INSEE, la hausse des prix à La Réunion a atteint 3 % au cours des douze derniers mois. C'est du jamais vu depuis octobre 2008 ; c'est le pire résultat depuis trente mois.

Ce taux d'inflation élevé est surtout dû aux augmentations de deux postes : les produits pétroliers et les produits alimentaires.

Les premiers ont augmenté de plus de 20 % au cours des douze mois qui viennent de s'écouler. La mesure n° 9 du CIOM visait à réformer le mode de fixation des prix des carburants et les conditions d'approvisionnement. Son application est manifestement insuffisante puisque, pour le consommateur réunionnais, rien n'a véritablement changé : le prix à la pompe continue d'augmenter.

L'évidente corrélation entre l'augmentation du prix des carburants et la hausse de l'inflation devrait pourtant inciter l'État – qui, rappelons-le, a compétence exclusive en la matière – à intervenir auprès des compagnies pétrolières afin que le prix de vente des carburants diminue pour tous les usagers de la route. Il est d'autant plus urgent d'agir que les récentes mesures gouvernementales ont mis à mal le secteur des énergies renouvelables, que le Gouvernement avait pourtant défini comme un secteur prioritaire du développement durable.

Les prix des produits alimentaires, notamment les fruits et légumes, subissent également une forte hausse. Cette évolution nous renvoie aux mesures prévues pour soutenir la production locale et à la question des sources d'approvisionnement. Or le code des marchés publics n'a pas été modifié afin de faciliter l'achat de produits locaux. Quant aux différents dispositifs destinés à favoriser la diversification, ils sont jusqu'à présent restés eux aussi lettre morte.

La lutte contre la cherté de la vie est plus que jamais d'actualité. La nouvelle hausse des prix touche tous les Réunionnais, mais pénalise particulièrement les plus modestes. Leur pouvoir d'achat est d'autant plus malmené que cette poussée inflationniste concerne des prix déjà élevés : à La Réunion, les produits alimentaires sont près de 37 % plus chers qu'en France continentale.

Madame la ministre, au-delà des diagnostics et des déclarations de principe, le Gouvernement va-t-il enfin passer aux actes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Oui, madame la députée, le Gouvernement va passer aux actes !

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Quelles sont les mesures qui ont été décidées par le CIOM ? Relisez le document : toutes celles qui ont été arrêtées dans le cadre de l'atelier 1, consacré à la formation des prix, au fonctionnement du marché et à la concurrence, ont été appliquées, qu'il s'agisse de l'abaissement du seuil de notification des opérations de concentration dans le secteur de la distribution, de la création d'un groupement d'intervention régional de la concurrence dans les quatre départements d'outre-mer ou de l'installation par l'État d'un observatoire des prix dont le président est indépendant et peut saisir l'Autorité de la concurrence.

Je rappelle que cette dernière a de fait été saisie, ce qui a permis de condamner des opérateurs de télécommunications à des amendes particulièrement lourdes. L'État a donc joué son rôle de régulateur. Je pourrais citer d'autres exemples.

Quant aux carburants, il est exact que les prix sont élevés outre-mer, mais ils le sont maintenant aussi en métropole. Aujourd'hui, en Martinique et à La Réunion, les prix sont même un peu inférieurs à ceux de la métropole ; la situation est plus difficile en Guadeloupe et en Guyane.

Dans ce secteur, j'ai procédé, vous le savez, à une refonte complète de la formule des prix, qui a permis de faire preuve de bien plus de transparence, d'équité et de justice, de sorte que la situation est mieux comprise et mieux acceptée par la population.

Certes, le pouvoir d'achat de nos compatriotes ultramarins en est affecté, parce qu'ils n'ont pas de solution de repli, contrairement aux habitants de la métropole. Cette fluctuation du prix du baril n'est pas le fait du Gouvernement français : le problème se pose au niveau international.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Il n'y a pas de volonté politique ! Le code du commerce permet d'agir !

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Il n'y a pas de solution de repli,…

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Si ! C'est la volonté politique qui fait défaut !

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

…sinon dans le transport collectif ; c'est dans ce domaine qu'il faut agir. J'espère donc que les autorités organisatrices de transports seront installées, car il faut trouver une solution.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Pourquoi la plate-forme logistique n'a-t-elle pas été créée ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Je ne peux laisser dire que nous n'avons pas agi en faveur du pouvoir d'achat.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Nous l'avons fait, et nous continuerons de le faire, mais nous sommes dans une économie de marché : nous ne pouvons pas réglementer les prix et n'appliquer que des prix administrés,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

… c'est la concurrence qui fera baisser les prix.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Souvenez-vous, madame la députée, qu'en accompagnant une enseigne, notamment à La Réunion, nous avons fait considérablement baisser les prix. Je vous rappelle en outre qu'en soutenant l'agro-alimentaire dans le cadre du programme Défi, nous avons fait baisser les prix de 8 à 20 % dans la filière viande.

Je le répète, l'État agit et continuera d'agir pour défendre le pouvoir d'achat de nos compatriotes ultramarins.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Merci, madame la ministre.

Nous en venons aux questions du groupe Nouveau Centre.

La parole est à M. Philippe Folliot.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur l'installation d'une antenne de service militaire adapté à Wallis-et-Futuna.

L'augmentation du nombre de places offertes aux jeunes ultramarins par les différents centres de SMA constitue sans doute l'une des mesures les plus emblématiques du conseil interministériel de l'outre-mer qui s'est tenu en novembre 2009.

Ce dispositif vise à offrir aux jeunes ultramarins en échec scolaire une formation et, plus largement, des perspectives d'insertion professionnelle. Il est donc essentiel au développement de territoires marqués, pour la plupart, par des taux de chômage bien plus importants que ceux que l'on observe dans l'hexagone. J'ai pu mesurer sur place la pertinence du dispositif et la qualité de son application, d'abord en Guyane, il y a quelques années, puis à Koumac, en Nouvelle-Calédonie, il y a quelques mois.

Un regret seulement : l'outre-mer a donné l'exemple à la métropole, où le dispositif « Défense deuxième chance » devait transposer le SMA ; malheureusement, pour diverses raisons, notamment budgétaires, il n'a pu être appliqué comme il méritait de l'être.

S'il ne s'agit pas de nier les contraintes géographiques qui s'imposent à certains territoires, il importe que le développement du SMA profite, autant que possible, à tous les jeunes ultramarins, quel que soit leur territoire d'origine.

À cette fin, répondant à une demande répétée des Wallisiens et Futuniens, le Gouvernement avait, dès décembre 2008, annoncé la création, à Futuna, d'une antenne du SMA. En effet, actuellement, les jeunes de cette collectivité souhaitant bénéficier du SMA sont contraints de rejoindre les unités installées dans les communes de Koné et de Koumac, en Nouvelle-Calédonie, alimentant l'exode inquiétant de nombreux jeunes de Wallis-et-Futuna vers la Nouvelle-Calédonie et l'hexagone.

Si les travaux d'installation de l'antenne ont pris du retard, en raison notamment du passage du cyclone Tomas, le projet doit être mené à son terme. Pouvez-vous, madame la ministre, nous préciser son état d'avancement et ses perspectives d'avenir ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le député, cette question est très importante, car il s'agit d'une opération-phare du Gouvernement. Le chef de l'État a en effet annoncé une phase de montée en puissance visant à atteindre l'objectif du plan dit « SMA 6000 ».

Il s'agit d'une solution pertinente aux difficultés actuelles d'une partie importante de la jeunesse. Nous en sommes aujourd'hui à 2 900 volontaires par an, et nous comptons bien atteindre l'objectif. Il ne s'agit pas de revenir sur les éléments fondamentaux du SMA, notamment sur son coeur de cible, qui resterait d'environ 3 600 personnes.

Avant de vous répondre plus précisément, j'indique que le « SMA 6000 » voulu par le Président de la République représente 90 millions d'euros d'investissement en infrastructures et en équipement sur quatre ans. Ce n'est pas négligeable, étant donné les difficultés économiques que connaissent nos territoires.

Ce « SMA 6000 » conservera les points forts du SMA : la formation au comportement dans un environnement militaire, c'est-à-dire le développement du savoir-être, du savoir-vivre, du respect d'autrui et de l'autorité chez ces jeunes très éloignés de l'insertion professionnelle ; la qualité même de la formation, dont atteste un taux d'insertion plus qu'honorable, qui dépassait 75 % en 2010.

En ce qui concerne le projet d'antenne de SMA à Futuna, sa faisabilité a été étudiée dès 2007, mais, vous l'avez rappelé, le cyclone Tomas est passé en 2010, et les moyens budgétaires alloués au SMA ont en effet été prioritairement affectés à l'aménagement des sites existants, afin que ceux-ci continuent de fonctionner. Il a donc été décidé, dans un premier temps, de différer l'intéressant projet de Wallis-et-Futuna.

Mais je tiens à vous rassurer : le projet n'est pas abandonné, bien au contraire. Nous faisons en sorte que les jeunes Wallisiens puissent rejoindre le SMA de Nouvelle-Calédonie, où une formation leur est délivrée dans d'excellentes conditions. Lors du passage du cyclone Tomas au mois de mars 2010, c'est d'ailleurs le SMA qui est intervenu pour apporter les premiers secours.

Le projet sera donc bien réalisé, mais seulement dans un deuxième temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Philippe Folliot, pour poser sa seconde question.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

À l'heure où l'Europe et plus particulièrement la France se sont engagées, dans le double cadre du paquet énergie-climat et du Grenelle de l'environnement, à développer les sources d'énergie renouvelables, il importe de ne négliger aucune filière.

Ces problèmes sont d'autant plus pressants outre-mer que ces territoires ne bénéficient pas de l'énergie électrique d'origine nucléaire et que leur potentiel hydroélectrique reste dans la plupart des cas très faible. L'essentiel de l'énergie, et de l'électricité en particulier, y est donc issu de ressources fossiles, ce qui pose un double problème : sur un plan économique, le renchérissement du prix des hydrocarbures, sur un plan écologique, l'émission de gaz à effet de serre.

Il importe donc de faire de l'outre-mer un laboratoire de nos savoir-faire en matière de maîtrise et d'exploitation des énergies marines. En effet, les départements et collectivités d'outre-mer présentent, par leur situation géographique, un important potentiel de développement de ces filières, qu'il s'agisse du photovoltaïque, dont il a été longuement question dans cet hémicycle, de l'éolien et plus particulièrement de l'éolien offshore, mais également et surtout de l'ensemble des énergies marines : énergie marémotrice, des courants marins, des vagues et de la houle, énergie thermique maritime et énergie osmotique – fabriquée à partir des échanges entre eau salée et eau douce – qui constitueront peut-être demain des filières industrielles d'excellence de nos territoires ultramarins.

Dans le cadre des conclusions du Grenelle de la mer, le Gouvernement a annoncé le lancement du plan « Énergies bleues », lequel comprend notamment un projet pilote d'énergie thermique des mers, trois sites pour des hydroliennes, un projet d'éoliennes flottantes, et plusieurs dispositifs de pompe à chaleur chaud-froid.

À ce stade, pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer l'état d'avancement de ces projets et les perspectives que le Gouvernement entend offrir au développement de chacune de ces filières dans nos départements et collectivités d'outre-mer ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Vous avez raison de rappeler, monsieur le député, l'importance de l'autonomie énergétique des territoires ultramarins : c'est une priorité du Gouvernement. Vous rappelez à juste titre que les énergies marines présentent un double avantage : ce sont des énergies stables, et elles correspondent à de forts besoins au niveau mondial. Le marché, en la matière, est colossal : l'outre-mer a donc une carte à jouer. Cela représente pour nos territoires un potentiel de développement et d'exportation majeur.

L'outre-mer peut constituer une plate-forme de développement et de recherche privilégiée : l'initiative GERRI – « Grenelle de l'environnement à La Réunion, réussir l'innovation » – en sera l'illustration. Je serai à la fin de cette semaine à La Réunion pour donner à ce projet une nouvelle impulsion, par la mise en place d'une structure pérenne, avec le groupement d'intérêt public chargé de l'accompagnement, du développement et de la valorisation de ces différentes initiatives.

Il existe aussi un projet de démonstrateur de l'énergie thermique des mers, également financé par le Gouvernement. Il sera installé, d'ici à la fin de l'année, à La Réunion. Le groupe DCNS a d'ailleurs déposé, dans le cadre d'un appel à projets européen, un projet de démonstrateur en Martinique, que nous soutenons fortement.

Plusieurs autres projets sont en cours de développement : ils utilisent l'énergie mécanique des vagues, le potentiel énergétique des algues, et d'autres technologies encore.

Je souligne également l'importance de la demande en énergie : là encore, l'outre-mer est en avance, avec des projets de climatiseurs par eau ; ceux-ci existent depuis plusieurs années en Polynésie française. J'ai ainsi eu l'occasion de visiter un hôtel qui utilisait ce système. D'autres systèmes sont développés à l'échelle d'une commune, comme le projet SWAC – Sea Water Air Conditioning – envisagé à La Réunion.

Enfin, vous le savez, l'ADEME intervient en tant qu'opérateur des investissements d'avenir pour soutenir, dans le cadre de ses différents appels à projets, le développement de technologies marines. L'outre-mer est et restera l'une de ses cibles principales.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en arrivons aux questions du groupe UMP.

La parole est à M. Michel Diefenbacher.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Madame la ministre, je souhaite évoquer la question de la coopération régionale. Il y a bien longtemps que l'ouverture des départements et collectivités d'outre-mer sur leur environnement international n'est plus un sujet tabou. Bien au contraire, cette ouverture est aujourd'hui regardée comme une opportunité, à la fois pour ces collectivités et pour le pays tout entier.

Reste à trouver, concrètement, des domaines d'application, et c'est là que les choses sont un peu plus compliquées. Du point de vue économique, il est évident que ces pays voisins sont plus souvent concurrents que complémentaires. Du point de vue commercial, leurs charges sociales et fiscales sont inférieures, ce qui leur apporte un évident avantage de compétitivité. Du point de vue culturel, ce sont souvent des pays anglophones ou hispanophones, et nous savons que la barrière de la langue est difficilement franchissable, en outre-mer comme en métropole.

Malgré toutes ces difficultés, le conseil interministériel a tracé un certain nombre de voies, et adopté dix mesures majeures. Je voudrais en citer quatre en particulier, qui me paraissent importantes : la première consiste à permettre aux collectivités d'avoir elles-mêmes une véritable action internationale, en ouvrant des délégations non diplomatiques dans les États de la zone, en systématisant les commissions de coopération transfrontalière, en associant les élus locaux à la négociation des accords internationaux qui ont un impact local. La deuxième grande orientation consiste à faciliter la circulation des personnes, grâce à des mesures d'assouplissement des délivrances de visas. La troisième consiste à assouplir les normes communautaires, et plus généralement des règles de droit applicables notamment aux entreprises, pour les rapprocher de celles en vigueur, non pas en métropole, mais dans les pays de la zone, et cela dans les domaines les plus divers – douanier, commercial, fiscal, agricole. La quatrième orientation, enfin, est d'ouvrir plus largement les possibilités pour les ultramarins de participer à des actions de formation dans les pays voisins.

Madame la ministre, comment ces mesures, que je crois tout à fait intéressantes et prometteuses, seront-elles appliquées ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le député, en la matière, nous pouvons, je crois, être fiers du bilan de notre action d'insertion régionale, même s'il faut aller encore plus loin. Nous avons, je crois, pris des décisions précises, articulées autour de deux axes très importants.

Je pense d'abord au développement de la capacité d'action et de la visibilité des outre-mer dans leurs régions. Vous le savez, les collectivités peuvent intégrer les organisations régionales de leurs zones ; je serai sans doute amenée prochainement, dans le cadre de la loi relative aux collectivités de Martinique et de Guyane, à évoquer ce sujet. Elles sont aussi consultées sur les engagements internationaux les concernant. Elles sont systématiquement associées aux délégations françaises ; elles peuvent ouvrir des représentations à l'étranger. Nous sommes enfin en train de donner une traduction législative à ces engagements ; nous serons, à l'été, à même de signer sur ce sujet une circulaire commune avec le ministère des affaires étrangères.

Dans le cadre de la coopération régionale, il faut aussi faciliter la relation de voisinage, y compris dans le domaine des échanges commerciaux. Des commissions mixtes, vous le savez, ont déjà été mises en place ; nous en avons créé deux, l'une en 2009 avec le Suriname, l'autre avec le Guyana en 2010 ; une troisième, avec les Pays-Bas, est en cours de création, pour traiter notamment les problèmes qui concernent Saint-Martin. D'autres initiatives s'inscrivent dans le même mouvement : nous avons ainsi créé un Conseil du fleuve pour le Maroni, et 150 mesures d'assouplissement du régime des visas ont été prises dans le cadre de ce rapprochement. Tout cela facilite les liens avec les pays voisins de nos territoires, afin notamment de favoriser le tourisme. Des mécanismes d'information sur les marchés potentiels régionaux ont été instaurés, notamment en prévision de la reconstruction d'Haïti.

Mais il faut aussi, je crois, quand on parle de coopération régionale, faire une large place à la défense des intérêts de l'outre-mer à Bruxelles. C'est la raison pour laquelle je mène une action très importante en direction des commissaires ; nous avons ainsi pu obtenir le changement du statut de Saint-Barthélemy en PTOM – Pays et territoires d'outre-mer – et la Commission a approuvé notre rapport d'étape sur l'octroi de mer, assorti d'une extension à plus d'une cinquantaine de produits pour la Guyane, valable dès 2011. Voilà une mesure attendue par les Guyanais depuis de très nombreuses années : c'est aujourd'hui une réalité.

Pour nous aider, nous disposons, depuis dix-huit mois, d'un conseiller pour l'outre-mer à la représentation permanente de la France à Bruxelles.

Deux grandes conférences de coopération régionale sont prévues, d'ici à la fin de l'année, afin de dynamiser encore l'insertion des collectivités d'outre-mer. Je me rendrai d'ailleurs à La Réunion, pour assister à la conférence « Océan Indien », et j'organiserai, à l'automne prochain, une grande conférence de coopération régionale aux Antilles-Guyane, en espérant que, d'ici là, nous aurons encore avancé sur les points que je viens d'exposer.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Victoria

Madame la ministre, avant de poser ma question, je voudrais vous présenter, ainsi qu'à votre famille et belle-famille, mes condoléances et celles de tout mon groupe. J'aurais admis et compris que le débat soit reporté ; cela vous aurait permis de vivre pleinement la cérémonie de l'enterrement de votre belle-mère, mais aussi de commencer votre deuil dans de bonnes conditions. Vous avez malgré tout souhaité être présente. Cela vous honore. Soyez-en remerciée, comme il faut vous remercier de votre engagement et de votre soutien aux outre-mer.

Je reviendrai, pour ma part, sur une question chère au Président de la République, et très chère aussi à l'ensemble des élus de nos différents territoires : celle de l'émergence d'une classe de hauts responsables, notamment dans le cadre de la fonction publique, issus de nos territoires. C'est un voeu fort du Président de la République que de créoliser les postes de responsabilité.

Je voudrais donc, tout simplement, vous demander où en est ce projet. Comment ferez-vous pour développer ce processus, afin que demain nous ayons de plus en plus de fonctionnaires de catégories A et B en poste dans nos différents territoires ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

L'un des objectifs du CIOM était effectivement de permettre l'émergence d'une fonction publique plus représentative : c'est une question très vite apparue lors des états généraux de l'outre-mer.

Nous avons décliné cet objectif de trois façons différentes. Il fallait d'abord mieux organiser la mobilité dans les emplois publics ; il fallait renforcer les chances pour nos compatriotes ultramarins d'accéder à des postes de responsabilité, aussi bien en outre-mer qu'en métropole ; il fallait enfin confier aux responsables de l'action publique outre-mer un rôle dans le développement de la diversité des recrutements.

Je reviens sur la circulaire que je viens de mentionner, en date du 23 juillet dernier, afin de mieux l'expliquer. Une première circulaire d'application porte sur l'organisation des concours ; c'est un point très important, qui se révélait très pénalisant pour nos compatriotes.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Il est maintenant possible de composer sur place, à des horaires respectant le rythme de travail et le décalage horaire.

La seconde circulaire – essentielle pour la visibilité de l'outre-mer – insiste auprès de l'ensemble des directions des ressources humaines des ministères pour favoriser l'affectation des ultramarins dans leur territoire d'origine, et leur accès aux postes de responsabilité, dans le cadre, bien évidemment, de l'organisation paritaire. Cette circulaire a été notifiée à tous les ministres. Nous serons prochainement amenés à en faire le bilan avec le secrétaire d'État chargé de la fonction publique.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Si la Commission nationale d'évaluation des politiques de l'État outre-mer souhaite le faire, elle pourra évidemment le faire très tranquillement : je lui fournirai tous les éléments nécessaires.

Concernant les postes de chefs de service de l'État outre-mer, je cosigne désormais, vous le savez, tous les actes de nomination : cela permet de veiller à ce qu'à compétences égales, la candidature d'un ultramarin soit favorablement étudiée.

D'ores et déjà, ce volontarisme républicain a permis à des cadres ultramarins d'occuper plusieurs postes à responsabilité dans l'administration de l'État ; j'en veux pour preuve la nomination, depuis le début de l'année, de sept chefs de service ultramarins à la tête de nouvelles directions interministérielles mises en place dans le cadre de la RGPP.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Enfin, plusieurs sous-préfets à la cohésion sociale nommés dans les DOM sont des ultramarins.

Les lignes bougent, même s'il faut encore aller plus loin. Mais il faut aussi privilégier la compétence, dans le respect des organismes paritaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

Si peu de compétences parmi 800 000 habitants ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Vous pouvez vous renseigner, et vous obtiendrez la liste par territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Je commence par m'associer aux condoléances présentées par René-Paul Victoria, comme par d'autres de nos collègues.

Sauf erreur de ma part, je serai le dernier orateur ; je voudrais donc dresser un court bilan de ces échanges pour me réjouir, contrairement à ce que j'ai pu entendre sur certains bancs, d'un bilan globalement positif, même si en effet certains aspects sont à parfaire.

Les moyens humains commencent à être largement en place ; les moyens financiers, me semble-t-il, sont là aussi. L'État prend, je le pense très sincèrement, toute sa part de responsabilité. Dix-huit mois après le CIOM, le bilan ne mérite pas le jugement en indignité que certains veulent bien lui faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Huguette Bello

52 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Gosselin

Je rappellerai que l'État n'est pas nécessairement maître d'ouvrage et que les collectivités doivent aussi prendre leur part de responsabilité. Si certaines mesures sont encore à parfaire – je reconnais bien volontiers que quelques-unes sont en panne –, l'État n'est pas nécessairement seul en cause.

J'en arrive à ma question. Lors du CIOM de 2009, le constat avait été fait à nouveau de la nécessité de diversifier la clientèle qui se rend aux Antilles. Actuellement, 80 % de la clientèle provient de la France métropolitaine, ce qui est un facteur de fragilité. De même, la saisonnalité est un handicap.

La création d'un groupe de travail avait été annoncée à l'époque, afin de définir les conditions de mise en place d'une liaison aérienne depuis Roissy-Charles-de-Gaulle, ce qui devait permettre l'accès au marché européen. Madame la ministre, où en sommes-nous sur ce dossier ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Lors de son dernier déplacement aux Antilles, le Président de la République a demandé que soit améliorée la desserte aérienne des Antilles, afin de rendre attractif ce territoire. Je vous annonce que je me rendrai aux Antilles, la semaine prochaine, avec mon collègue Frédéric Lefebvre, ainsi que le directeur général d'Atout France, M. Mantéi, pour signer avec les acteurs locaux ce contrat de destination et rendre possible l'ouverture de la desserte aérienne des Antilles depuis Roissy-Charles-de-Gaulle dès novembre prochain.

À cette occasion, je tiens à souligner l'écoute du Gouvernement par rapport à une demande forte des professionnels pour l'utilisation du hub de Roissy…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

ainsi que des élus pour faire en sorte que cette desserte soit aujourd'hui une réalité, et la rapidité de sa mise en oeuvre puisque cette desserte aérienne sera ouverte dès novembre 2011, ce qui constitue un bref délai pour l'industrie du tourisme et du transport aérien.

Si l'ouverture d'une desserte aérienne est un moyen, cela ne suffit pas. Il faut s'inscrire dans une stratégie plus globale de négociation pour accompagner l'effort de rénovation hôtelière, ce que nous faisons, de formation ou encore de commercialisation. À cet égard, j'ai décidé de réorienter le budget de promotion du tourisme de mon ministère sur des marchés européens voisins. Cette année, nous allons renouveler l'opération en partenariat avec les comités du tourisme de la Guadeloupe et de la Martinique. Lors de mon prochain déplacement à la Martinique, je serai amenée à travailler sur cette question, notamment dans le cadre d'un projet de développement autour des activités touristiques.

Le tourisme doit rester un levier déterminant de l'activité. C'est la raison pour laquelle il fait partie des zones franches globales d'activité.

Monsieur le député, je souhaite réagir à vos propos. Aujourd'hui, nous avons un débat, nous pouvons discuter des mesures qui ont été prises, dresser un bilan, faire une évaluation. Vous avez raison, certaines mesures sont en panne, d'autres ont avancé.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Aujourd'hui, je suis dans l'incapacité, notamment sur certains territoires, de savoir quelles mesures ont été mises en place par les collectivités et lesquelles sont complémentaires de celles de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en revenons aux questions du groupe SRC.

La parole est à Mme Jeanny Marc.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Marc

Madame la ministre, j'ai adressé un télégramme à votre belle-famille, et je vous renouvelle, de vive voix, toutes mes condoléances.

Un peu plus de dix-sept mois après le premier Conseil interministériel de l'outre-mer, les espoirs suscités par les annonces du Président de la République contrastent fortement aujourd'hui avec le sentiment ambiant d'abandon des populations d'outre-mer par le Gouvernement.

Dix-sept mois après, en Guadeloupe, le taux de chômage a atteint 40 % de la population active et le chômage des jeunes a doublé, passant de 30 à 60 % des jeunes actifs.

Le RSMA forme une main-d'oeuvre qui, malheureusement, comme au temps du BUMIDOM, est poussée à l'exil. La restructuration de LADOM tarde à prouver son efficacité, les entreprises, handicapées par le tarissement des sources de financement, défilent au tribunal de commerce lorsqu'elles ne sont pas confrontées à l'âpreté des huissiers. Ces entreprises peuvent du reste difficilement jouer leur rôle social auprès des jeunes demandeurs d'emploi.

Le pouvoir d'achat des ménages est fortement touché par les hausses successives du prix des carburants et par l'immobilisme des services devant les situations de position dominante en matière de formation des prix.

La Guadeloupe continue à être en marge de la construction de la Caraïbe.

Le plan « Santé outre-mer » n'existe que par sa dénomination, alors que la démographie médicale soulève de nombreuses problématiques pour l'avenir de notre système de santé, et l'avenir de la faculté de médecine reste encore hypothétique.

160 postes seront supprimés au sein de l'académie de la Guadeloupe à la prochaine rentrée scolaire alors que le taux de personnes frappées par l'illettrisme est cinq fois plus élevé que dans l'hexagone.

Debut de section - PermalienPhoto de Jeanny Marc

Voilà, madame la ministre, quelques exemples parmi tant d'autres que j'ai souhaité mettre en évidence.

Et je continue encore à chercher en quoi les mesures du CIOM ont pu changer de façon sensible le quotidien de nos concitoyens d'outre-mer.

Malgré l'année qui leur a été consacrée, les outre-mer ont aujourd'hui surtout besoin d'une nouvelle logique partenariale avec l'État, permettant de répondre immédiatement à nos retards structurels et à nos urgences conjoncturelles.

En ce qui me concerne, vous comprendrez bien que ma déception est tellement importante que je poserai avec désenchantement une question, d'autant plus que j'ai fait partie de ceux qui, en Guadeloupe, ont joué le jeu des états généraux, malgré un contexte social et politique particulièrement difficile.

Madame la ministre, quel est l'état d'avancement du plan d'urgence pour la jeunesse et quels sont les engagements de votre Gouvernement pour assurer l'égalité des chances de réussite des jeunes ultramarins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Avant de vous répondre, madame la députée, permettez-moi de rétablir la vérité. Il ne faut pas aggraver la situation en citant des chiffres qui ne correspondent pas à la réalité. Le taux de chômage ne se situe pas aux alentours de 40 %, mais plutôt entre 22 et 29 % en fonction des territoires.

C'est vrai, l'on ne peut pas se contenter d'un taux de chômage aussi important. Il faut donc agir pour maintenir la cohésion sociale au sein de nos territoires. Il faut oeuvrer en direction de la jeunesse, parce que, et vous avez raison, le taux de chômage est inacceptable. On ne peut pas, en effet, se satisfaire d'un taux de chômage qui frappe un jeune sur deux en outre-mer.

Il faut agir pour l'emploi, au niveau de la formation. En ce domaine, l'État a pris un certain nombre de dispositions. Je vous rappelle que le plan « Agir pour la jeunesse », qui avait été décliné par Martin Hirsch, est applicable en outre-mer. Par ailleurs, le ministre de l'éducation nationale, Luc Chatel, a pris un certain nombre de mesures,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

notamment pour lutter contre le décrochage scolaire, qui est un vrai fléau et qui requiert, pour les jeunes qui en sont victimes, un accompagnement. Il a fait la réforme des lycées de manière à permettre une orientation qui corresponde aux besoins.

Il faut enfin agir en direction de nos universités. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons avoir une université à caractère international…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

et qui soit ouverte au monde des entreprises et dispense des formations qui correspondent aux besoins de l'économie. À cet égard, je souhaite que le plan déployé par Valérie Pécresse, qui vise à parvenir à l'autonomie des universités, puisse aboutir en outre-mer. Actuellement, seule la Nouvelle-Calédonie a ce statut d'autonomie.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

L'État a poursuivi son effort, notamment pour soutenir l'emploi,…

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

c'est-à-dire soutenir l'économie, et ce en passant notamment par un soutien aux petites et moyennes entreprises. Plus de 10 000 emplois ont été sauvés aux Antilles après la crise de 2009 grâce aux plans d'apurement qui ont été mis en place, aux moratoires.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Nous savons bien que si nous n'avions pas soutenu l'économie, le taux de chômage aurait encore augmenté de manière considérable.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

D'ailleurs, les collectivités nous ont accompagnés dans cet effort.

Sur des sujets aussi sensibles, il ne faut pas simplement se renvoyer la balle au sujet des chiffres ou de la responsabilité.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

L'État a une part de responsabilité au regard de ses compétences. Mais les collectivités peuvent s'engager dans le développement économique. C'est dans un travail partenarial que nous pourrons agir, et non en se posant sans cesse la question de la gouvernance.

À cet égard, je me félicite aujourd'hui que nous avancions sur la question du fonds à capital-risque qui permet de soutenir l'économie réunionnaise. En effet, ce fonds va être mis en place en lien avec la Caisse des dépôts et consignations et l'Agence française de développement. Mais ce n'est pas possible dans d'autres territoires parce que nous devons pouvoir nous appuyer sur des structures existantes.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Pouvoir concevoir des mesures ensemble et ne pas se contenter de verser des subventions sans aucun contrôle : voilà ce que j'appelle le bon partenariat. Il faut pouvoir partager, discuter. C'est de cette manière que nous réussirons, ensemble, à régler le problème du chômage en outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Joseph Manscour

Madame la ministre, je tiens, à mon tour, à vous exprimer toute ma sympathie face à l'épreuve que vous traversez.

Je pense qu'il est inutile que je vous livre une bataille de chiffres ou de pourcentages. Après les événements de février 2009, le CIOM avait fait naître un formidable espoir pour les populations ultramarines, et singulièrement pour celles de la Martinique. Mais après vérification sur le terrain, et en interrogeant aussi de nombreux organismes, ainsi que les services de l'État, nous constatons avec amertume que, dix-huit mois après le Conseil interministériel de l'outre-mer, le taux d'exécution des mesures annoncées par le Président de la République est loin d'être satisfaisant.

Parmi toutes les mesures annoncées par le chef de l'État, nous regrettons que les plus significatives n'aient pas été mises en oeuvre ou n'aient pas abouti – M. Letchimy en a cité quelques-unes.

À mon tour, je souhaite obtenir quelques éclaircissements sur certaines mesures considérées comme prioritaires. Où est l'étude sur l'octroi de mer et son impact sur les économies ultramarines ? Je regrette tout particulièrement que la mesure visant à conforter les ressources pérennes des collectivités n'ait pas été mise en oeuvre. Le projet de loi de finances pour 2011 en a même gelé les dotations.

Vous avez promis d'améliorer la connaissance de l'assiette d'imposition, le recouvrement des taxes et de développer de nouvelles ressources, notamment d'augmenter la taxe sur les tabacs au profit des communes. Qu'en est-il ?

Madame la ministre, vous connaissez la situation particulièrement préoccupante à laquelle sont confrontées les collectivités locales, notamment celles de la Martinique où vingt-quatre communes sur trente-quatre sont dans le réseau d'alerte.

Nous savons ce que valent les promesses du Président de la République. Pourtant, aujourd'hui il est plus que nécessaire de respecter les engagements pris auprès de nos populations. Il y va de votre crédibilité mais aussi de celle de votre gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le député, il est bon de rappeler que ce ne sont pas les décisions du Conseil interministériel de l'outre-mer qui régleront tous les problèmes qui s'y posent.

Il faut avoir un discours de vérité et resituer le contexte dans lequel ces décisions ont été prises. Elles ont été prises à partir d'une crise. Des états généraux de l'outre-mer ont eu lieu qui ont permis de décliner un certain nombre de mesures. Mais cela ne veut pas dire que ces dispositions vont tout régler. Et les chiffres annoncés par Victorin Lurel ne sont pas les mêmes que les miens.

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Si vous examinez de plus près le document, vous verrez que ces décisions ont été mises en oeuvre et que nous avons tenu nos promesses.

Vous avez parlé de l'octroi de mer. Vous le savez, c'est l'une des préoccupations de l'État puisqu'il s'agit d'une recette essentielle de nos collectivités. À cet égard, vous pouvez rendre hommage au Gouvernement d'avoir avancé sur le rapport d'étape de la Commission européenne qui nous a été demandé pour 2014. Et nous avons obtenu cette liste complémentaire pour la Guyane, ce qui veut dire que l'Europe reconnaît la spécificité outre-mer et que nous avons bon espoir de conserver cet avantage pour nos territoires.

C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité associer toutes les collectivités qui ont participé à l'élaboration du cahier des charges. L'étude est en cours, le cabinet a été choisi et nous disposerons de ses conclusions à la fin de l'année. Nous pourrons ainsi définir notre stratégie vis-à-vis de la commission. Je souhaite que nous puissions, à cette fin, réunir le consensus le plus large.

La décision du gel des dotations, qui s'inscrit dans le cadre de la politique gouvernementale de maîtrise des dépenses publiques, a été prise au niveau national, il est donc logique qu'elle concerne aussi l'outre-mer. Reste que nous avons le souci d'accompagner les territoires en difficulté. J'en veux pour preuve les cas de la Guyane ou de Mayotte, qui ont bénéficié de dotations supplémentaires.

Nous sommes d'accord pour améliorer le recouvrement des taxes. Nous nous en occupons. La mission d'études que nous avons engagée pour la Guyane a permis à certaines communes de disposer de recettes complémentaires. Nous devons certes aller beaucoup plus loin. Nous en reparlerons quand il s'agira d'évoquer d'autres territoires.

En ce qui concerne la question des tabacs, un rapport sera remis très prochainement qui me permettra de revenir devant la représentation nationale pour que nous en discutions.

Nous nous efforçons en tout cas de prendre en compte la situation financière des collectivités locales, qu'elles relèvent du droit commun ou bien de l'article 74 de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Berthelot

À mon tour, madame la ministre, de vous présenter toutes mes condoléances et de vous remercier pour votre présence et d'assumer ainsi vos fonctions.

On peut faire dire beaucoup aux chiffres et si je ne disconviens pas que le taux d'exécution des décisions du comité interministériel de l'outre-mer est de 22 % pour la Guyane, il s'agit des mesures appliquées dans toute leur plénitude. Sans doute d'autres mesures sont en cours d'exécution, encore faut-il faire preuve de clarté dans l'exposition des données.

Permettez-moi, monsieur le président, avant de poser ma question, de revenir sur un point que je ne peux taire : au cours de la séquence des questions au Gouvernement, j'ai interrogé le ministre de l'intérieur sur la situation de la délinquance à Saint-Laurent-du-Maroni. J'imagine, madame la ministre, puisque vous connaissez les faits, que votre sensibilité sera d'autant plus touchée que la réponse qui m'a été donnée était indigne d'un représentant de la République française. Il est indigne en effet d'imputer la délinquance au seul orpaillage. Invitez donc vos collègues à manifester davantage de respect pour nos populations.

J'en viens à l'atelier sur les productions locales et le développement endogène, que j'ai présidé. Il nous importait de stimuler le développement économique tant il est vrai que l'une des particularités de nos territoires est le taux élevé du chômage.

Je concentrerai mon propos sur les chambres d'agriculture. La nécessité pour celles-ci de renforcer leurs recettes propres a paru importante à l'atelier. Il s'agit de leur donner une quasi-autonomie de fonctionnement et de leur donner la possibilité de mettre en oeuvre des actions de développement agricole décidées par la profession. En effet, dans tous nos territoires, le secteur agricole est important.

La seule réponse, me semble-t-il, que vous êtes en passe de nous proposer pour équilibrer le budget des chambres d'agriculture est la contractualisation entre l'État, la région et les dites chambres. Je ne perçois dans un tel dispositif aucun effort d'imagination ni aucun réalisme. Ce n'est pas ainsi que nous allons stabiliser et asseoir les financements, conforter les ressources propres des chambres. Il s'agirait surtout, par là, de faire en sorte que l'implication facultative des collectivités locales pour financer les chambres d'agriculture devienne une charge obligatoire sans compensation de ressources.

Or, si 70 % du financement des chambres d'agriculture provient de la taxe foncière sur le non bâti, il n'atteint que 30 % en Guyane et interdit donc toute stabilité des ressources.

Vous savez, madame la ministre, que 90 % des terres appartiennent à l'État. J'ai deux propositions à vous faire dont la réalisation répondra aux attentes des Guyanais. La première consiste pour l'État à cadastrer les terres, opération qui a commencé pour les collectivités locales mais pas encore pour la chambre d'agriculture. Ensuite, il convient de procéder à la rétrocession des terres afin d'augmenter la base fiscale. C'est le seul moyen d'améliorer les finances des chambres d'agriculture.

Êtes-vous prête, madame la ministre, à reprendre ces deux propositions à votre compte afin que la chambre d'agriculture de la Guyane dispose des financements nécessaires pour remplir sa mission ? À l'instar de ce que vient de proposer notre collègue Lurel, nous pourrions y revenir au cours d'un nouveau comité interministériel de l'outre-mer. Je souhaite que le Gouvernement réponde favorablement à notre demande afin que le vrai débat soit lancé et que soit établi l'état réel du niveau de réalisation des décisions de novembre 2009, décisions dont l'application est très attendue par les Guyanais. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Madame la députée, je n'ai malheureusement pas pu assister à la séquence des questions au Gouvernement car j'étais en train de revenir de Guadeloupe. J'ai bien conscience, en tout cas, au regard des chiffres relatifs à la délinquance, qu'on ne peut rester sans agir, raison pour laquelle une mission a été diligentée afin d'établir les moyens nécessaires à l'amélioration de la situation. J'espère, en attendant, vous rassurer en vous rappelant que nous enregistrons de bons résultats pour les quatre premiers mois de l'année.

Il avait été décidé, dans le cadre des décisions du CIOM, de diligenter une mission afin de définir dans quelles conditions renforcer le rôle et le financement des chambres d'agriculture. Je n'y reviendrai pas dans le détail puisque vous avez déjà mentionné la contractualisation. Reste, et vous avez raison, que nous devons aller plus loin : nous devons régler la question des recettes de la chambre d'agriculture, la taxe foncière ne suffisant pas.

En même temps, en ce qui concerne les terres de l'État, nous devons pouvoir travailler avec les établissements publics fonciers chargés de procéder au recensement des recettes. Les chambres d'agriculture jouent un rôle essentiel pour stimuler le développement endogène que nous appelons de nos voeux et qui passe forcément par le développement de la production agricole.

La Guyane recèle à cet égard des potentialités considérables dans des domaines insuffisamment exploités. Ainsi que le suggère avec justesse votre collègue sénateur Georges Patient : il faut revenir à un développement de la filière du riz ? qui contribuera à régler le problème de l'emploi. Dans cette perspective, la chambre d'agriculture doit jouer tout son rôle aux côtés des instituts techniques agricoles que nous souhaitons implanter sur place dès cette année.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Pour le groupe UMP, la parole est à M. René-Paul Victoria.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Victoria

L'arrêt de la défiscalisation pour les investissements de production d'énergie photovoltaïque en outre-mer, décidé dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011, avait déjà suscité une forte incompréhension parmi les acteurs de la filière concernée. Les nouvelles conditions tarifaires, après la fin du moratoire sur le rachat par EDF de l'électricité produite par des installations photovoltaïques, marquent un coup d'arrêt pour la filière en outre-mer.

Madame la ministre, ces décisions ne s'opposent-elles pas aux conclusions retenues lors du conseil interministériel de l'outre-mer qui avait fixé un objectif ambitieux : aboutir à l'autonomie énergétique d'ici à vingt ans, grâce au développement des énergies renouvelables ?

Debut de section - PermalienMarie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer

Monsieur le député, le Gouvernement a clairement affiché ses ambitions en faveur du développement des énergies renouvelables et a fait de l'outre-mer un territoire d'expérimentation pour atteindre l'objectif d'autonomie énergétique. Si ce principe n'est pas remis en cause, il est vrai que l'énergie photovoltaïque a été victime de son succès au niveau national puisque les tarifs d'achat étaient très avantageux, grâce à des dispositifs fiscaux qui ont créé des effets d'aubaine auxquels il fallait mettre un terme. Le Premier ministre a par conséquent procédé à une inévitable remise en ordre.

En outre-mer s'ajoute le problème des zones qui ne sont pas interconnectées puisque les réseaux électriques ne peuvent pas, techniquement, accueillir plus de 30 % d'énergie intermittente. Ce seuil est presque atteint à la Réunion et le sera à partir de 2012 dans les autres départements d'outre-mer. Il faut tenir compte de cette situation.

Les modalités du soutien à la filière, effectives, doivent être adaptées. Le Gouvernement s'y est engagé parce que l'énergie photovoltaïque reste un élément déterminant du développement des énergies renouvelables. En collaboration avec mon collègue François Baroin, j'ai mis en place la commission présidée par Michel Diefenbacher et à laquelle vous appartenez, pour soutenir ce secteur en outre-mer à la suite de la décision prise au plan national.

Nous devons par ailleurs trouver des moyens stables de production d'énergie. Le potentiel en outre-mer est important. Des expérimentations sont menées pour les énergies marines à la Réunion et à la Martinique. Un projet d'houlomoteur à Saint-Pierre-et-Miquelon – que nous allons soutenir financièrement – est lancé. Je vous annonce enfin que le Gouvernement a décidé de créer un comité national de la géothermie – activité que nous devons développer au même titre que l'énergie éolienne. Un appel à projet spécifique pour l'outre-mer sera lancé à cet effet.

L'outre-mer doit conserver son avance en matière d'énergies renouvelables puisque son indépendance énergétique représente 56 % en Guyane, 34 % à la Réunion, 25 % en Polynésie. Cette avance sera maintenue grâce à l'action du Gouvernement : je suis confiante quant aux décisions qu'il prendra pour soutenir cette filière.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle le débat sur la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques.

L'organisation de ce débat ayant été demandée par le groupe de la gauche démocrate et républicaine, la parole est au premier orateur de ce groupe, M. Daniel Paul.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, mes chers collègues, après quatre ans sous votre majorité, il n'est pas inutile d'examiner votre bilan, en particulier celui qui touche aux services publics. Les chiffres sont éloquents : suppression de 178 tribunaux d'instance, de 55 tribunaux de commerce, de 62 conseils des prud'hommes, de 2 tribunaux de grande instance, de 60 établissements pénitentiaires, de 180 blocs opératoires, de 2 065 postes de douaniers, de 10 000 postes hospitaliers en 2009 – dont près de 5 000 postes de personnels soignants –, de 4 000 postes de policiers, de 40 centres territoriaux de Météo France, de 542 emplois pour la sécurité sanitaire de l'alimentation, de 65 000 postes d'enseignants entre 2007 et 2011, de 10 laboratoires de qualification biologique touchant les dons de sang, sans compter la menace sur 4 000 emplois au CNRS.

Cet inventaire non exhaustif est certes moins poétique que celui de Prévert mais c'est votre bilan, celui de la révision générale des politiques publiques, que d'aucuns nomment restriction générale des politiques publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Et tout cela au nom de la modernisation et de la réforme.

Oui, notre pays a besoin de réformes. La France compte 2 millions de travailleurs pauvres. un salarié sur quatre gagne moins de 750 euros par mois. Huit millions de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, dont près d'un million de retraités. La protection sociale se dégrade. La précarité énergétique touche 3,4 millions de personnes. Alors, oui, il y a besoin de réformes pour plus d'égalité et de justice sociale dans notre pays. Mais la RGPP ne remet pas en cause cette situation inacceptable, au contraire. Je dis bien au contraire, car en réduisant et en éloignant les services publics des citoyens, cette politique pénalise surtout ceux qui ont le plus besoin d'eux.

Monsieur le ministre du budget, vous affirmez qu'il est temps de « tourner le dos à la culture de la dépense ». Alors soyons clairs : nous souscrivons pleinement au principe selon lequel chaque euro doit être utilisé efficacement, en ayant toujours en tête l'intérêt général. Mais il y a des dépenses utiles, celles qui préparent l'avenir, celles qui confortent le lien social, et il y a des dépenses inutiles, celles qui nourrissent les bas de laine des nantis, font exploser les niches fiscales et creusent les inégalités. Chaque choix est porteur d'une vision différente de la société et du rôle de l'État.

La volonté de la droite et du MEDEF de mettre en cause le secteur public n'est pas nouvelle. Comme Mme Thatcher et M. Reagan, des idéologues libéraux français ont porté cette démarche. Vous l'avez mise en oeuvre dès votre arrivée, aux prétextes officiels d'une politique libérale européenne et de la réduction du déficit public. Pourtant, la Cour des comptes vient d'indiquer que le déficit budgétaire actuel est dû pour un tiers à la crise économique et financière et pour deux tiers aux cadeaux fiscaux et aux niches dont profitent les plus riches.

Mais, en fait, pour des raisons idéologiques, la droite la plus libérale et le MEDEF n'ont jamais accepté que le secteur public puisse afficher son efficacité et même sa supériorité face au privé. L'histoire sociale et économique de notre pays depuis la Libération est éloquente à ce sujet.

Concrètement, votre politique a un double effet : d'une part, elle réduit les services publics, avec des effets dévastateurs en matière de qualité de services à la population, d'égalité d'accès des citoyens, de conditions de travail et de statut des agents ; d'autre part, elle privatise des missions, ce qui répond, par exemple, aux demandes des cliniques à but lucratif qui veulent faire main basse sur les missions stratégiques qui relevaient jusqu'à présent des hôpitaux.

On ne supprime pas des postes de policiers, de douaniers et de gendarmes sans toucher à la sécurité ; on ne réduit pas l'emploi dans les CAF sans impact sur les usagers ; on ne ferme pas des bureaux de poste ou des services hospitaliers sans risques, comme le montrent plusieurs exemples récents.

M. le ministre de l'éducation nationale a reconnu que 170 000 jeunes quittaient en échec le système scolaire chaque année. Or, si vous prônez les vertus de l'accompagnement scolaire personnalisé et des stages de rattrapage pour soutenir les élèves les plus en difficulté, c'est pour les mettre à la charge des parents etou des collectivités locales, tout en maintenant la suppression de 16 000 postes en septembre et en suggérant le recours au Pôle emploi pour trouver des enseignants.

Alors, oui, il faut dresser le bilan de cette politique et dire ce qu'elle coûte à nos concitoyens, à notre pays. Il faut entendre tous ceux qui refusent et dénoncent la mise en cause des principes fondateurs de notre pacte républicain. Et puisque, monsieur le ministre, vous êtes également le maire de Troyes, permettez-moi de vous rappeler cette belle devise inscrite sur le frontispice de votre mairie, dont vous m'avez dit qu'elle ne figurait que dans deux mairies en France : « Liberté, égalité, fraternité » – mots que l'on trouve partout – « ou la mort ». En tuant les services publics, ce sont aussi les liens qui sont nécessaires pour garantir cette devise républicaine que vous mettez à mal.

Pour ce qui me concerne, je pense qu'il faut que la gauche redonne tout son sens à un secteur public rénové et élargi, afin qu'en France, comme en Europe, la perspective ne soit pas la loi du marché, la concurrence libre et non faussée, les privatisations de ce qui rapporte, synonymes d'appauvrissement et d'inégalités accrues entre les habitants et les territoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Mesdames et messieurs les députés, je suis très heureux de venir parmi vous ce soir pour débattre de la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques. Plus de trois ans après son lancement, cette politique s'inscrit pleinement dans le paysage administratif français.

Cher Daniel Paul, puisque c'est à l'initiative du groupe auquel vous appartenez que ce débat a lieu, je voudrais d'abord vous remercier d'apporter votre contribution, votre regard, dont j'ai compris qu'il pouvait être critique, sur la déclinaison de la RGPP au cours de ces quatre dernières années.

Vous avez parlé de Troyes. La devise date d'une période de terreur, période durant laquelle Maximilien Robespierre…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…a beaucoup combattu Danton, lui-même originaire de Troyes, mais c'était également une période, Dieu merci, où les sens, l'attitude, le comportement avec les autres évoluaient beaucoup. Quelques années auparavant, l'un de mes prédécesseurs, aimable et très généreux édile de cette ville, avait importé, grâce à ses contacts anglais, de la farine d'Angleterre parce que la récolte avait été très mauvaise. La farine était arrivée avariée, ce qui avait provoqué une dysenterie. Des citoyens étaient allés chercher cet homme dans le bureau que j'ai l'honneur d'occuper et l'avaient écartelé, dispersant ce qui restait de son corps un peu partout sur le territoire. Dieu merci, les moeurs ont évolué.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

On ne sait pas si Dieu y est pour quelque chose.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Le processus démocratique est passé par là et nous avons retenu de cette idée de la fraternité ou de la mort un sens de la convivialité qui n'altère pas la relation si jamais cela se passe mal. Vous êtes donc naturellement le bienvenu à Troyes dans un esprit de fraternité, point final. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Permettez-moi de revenir un instant sur l'esprit et la méthode de la RGPP.

L'esprit de la RGPP repose sur trois ambitions et sur une démarche : améliorer la qualité des services rendus aux usagers, faire des économies et moderniser la fonction publique. Je me permets d'insister sur cette idée, il s'agit bien de trois ambitions intimement liées et non d'une seule qui serait la seule réduction des coûts.

Certes, les contraintes budgétaires s'imposent à tous et nous les avons prises en compte pour la RGPP. Mais la réduction des dépenses n'est pas l'alpha et l'oméga de la RGPP, ce n'est qu'une de ses composantes.

Il n'y a pas que le point de vue du contribuable qui a été pris en compte, il y a le point de vue de l'usager, pour lequel la complexité des démarches administratives est au moins aussi importante, et il nous fallait y répondre. Les résultats que je veux évoquer avec vous montrent d'ailleurs que l'on peut à la fois réduire les coûts et améliorer la qualité de service.

Et puis il y a le point de vue de l'agent public, les fonctionnaires. L'urgence était aussi de simplifier le mode de fonctionnement de l'administration et de moderniser les statuts pour s'adapter aux nouvelles exigences.

Ainsi, la RGPP porte les ambitions des contribuables, des usagers et des agents publics, en une seule et même démarche, une démarche de performance. C'est dire son ambition !

Cette ambition de performance, ce n'est pas une idéologie, monsieur Paul, ce n'est pas une doctrine, ce n'est pas un prêt à penser que l'on veut imposer aux administrations, c'est l'une des valeurs fondatrices de la fonction publique. C'est d'ailleurs la meilleure façon, me semble-t-il, de pérenniser notre modèle français de services publics.

En termes de méthode, certains disent que la RGPP est une démarche qui n'associe pas suffisamment les agents du secteur public. Loin de moi l'idée d'affirmer que tout est parfait. Les réformes conduites sont d'une ampleur sans précédent, à la fois parce que les chantiers sont importants et parce que tous les ministères sont concernés. Les changements sont parfois difficiles, les réformes sont parfois douloureuses, mais elles sont indispensables pour pérenniser notre modèle.

Cela requiert un dialogue social approfondi et transparent, pour associer les agents et les organisations syndicales, pour expliquer les objectifs poursuivis par les réformes. Bien sûr, on peut ne pas souscrire à ces démarches, mais il est impératif d'en débattre. Le Premier ministre a d'ailleurs insisté dès le début des réformes pour que le dialogue social soit conduit avec la plus grande rigueur. Il y a eu des débats, des désaccords, mais cela ne nous a jamais empêchés d'avancer.

Il ne faut donc pas confondre désaccord sur tel ou tel point et absence de dialogue social. Si je prends l'exemple de la direction générale des finances publiques, sous l'autorité du ministre du budget, les fonctionnaires participent aux réformes mises en oeuvre : ils ont été associés à l'élaboration d'un document d'orientation stratégique pour cette nouvelle direction et ont pris une part active à la réflexion portant sur les nouvelles manières de travailler, qui résultent de la fusion des deux anciennes directions, la direction des impôts et la direction de la comptabilité publique.

De même, dans le cas de la réforme de l'administration territoriale de l'État, une concertation spécifique a été organisée par les préfets, dans chaque département, entre les agents de l'État, les organisations qui les représentent, les administrés et les élus.

Enfin, j'ajoute que, depuis l'année dernière, une école de la modernisation de l'État a été créée, afin de former et d'accompagner les agents qui mettent en oeuvre la RGPP. Je crois de ce point de vue que, les uns et les autres, nous avons accompagné cette réforme et cette modification en profondeur de notre organisation administrative.

Parlons maintenant des résultats déjà obtenus grâce à la révision générale des politiques publiques.

Nous avons d'abord fortement simplifié les relations entre les usagers et les administrations autour de deux idées simples : d'une part, l'usager doit pouvoir effectuer ses démarches administratives de même type auprès d'un seul guichet ; d'autre part, il doit pouvoir les effectuer en ligne, s'il le souhaite, comme il le fait pour le reste de ses activités aujourd'hui.

Cet engagement a donc conduit à la création de guichets uniques, pour les contribuables avec le guichet fiscal unique, pour les entreprises, avec le guichet entreprise, pour les demandeurs d'emploi, avec Pôle emploi.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

La réforme de l'administration territoriale de l'État a permis de passer d'environ vingt à huit directions régionales et d'une dizaine de directions départementales à deux ou trois seulement.

S'agissant du développement des démarches administratives dématérialisées, nous sommes désormais, on le sait peu ici mais les usagers le savent, à 65 % des démarches prioritaires qui sont accessibles en ligne, contre 30 % en 2007 – en un peu moins de quatre ans, nous avons doublé les modalités d'utilisation du Net au service des démarches administratives. Nous visons un taux de 80 % à la fin de l'année 2011. Je mesure pleinement combien ce cap est ambitieux, mais c'est une véritable révolution. Juste pour vous donner un argument supplémentaire pour nourrir votre réflexion, sachez par exemple que, aujourd'hui, près de 11 millions d'assujettis utilisent Internet pour télédéclarer leurs revenus. Nous avons assisté à une accélération phénoménale au cours de ces dernières années. Cette modernisation incontestable de l'État va dans le sens de l'évolution de la société, de ses habitudes qui se prennent très rapidement. Nous devions nous adapter, les efforts sont concluants.

J'ajoute que la complexité perçue par les usagers des services publics a baissé pour les quatorze « événements de vie » qui sont identifiés par la direction générale de la modernisation de l'État. Ce ne sont pas des chiffres du Gouvernement que vous pourriez contester dans une éventuelle subjectivité, c'est un sondage BVA et le fruit d'un examen et de l'analyse d'un baromètre objectif, lui aussi, effectué auprès des usagers du service public.

Parallèlement à ces réformes, nous avons conduit des mutualisations interministérielles pour les fonctions support, afin de réduire le coût de fonctionnement de l'État et de professionnaliser le service rendu aux agents eux-mêmes. Le service des achats de l'État permet par exemple de professionnaliser cette fonction dans l'ensemble des ministères et conduira à une économie de l'ordre d'un milliard d'euros d'ici à la fin 2013.

La mise en place de l'État propriétaire, sous l'égide de France Domaine, apporte un support efficace à toutes les administrations désormais dans leur gestion immobilière. Elle a permis d'économiser près de 200 millions d'euros dès 2010, notamment en réduisant les surfaces de 3 % depuis 2007.

Nous venons de créer la direction des systèmes d'information de l'État, qui, là aussi, permet de mettre de l'ordre dans les dépenses informatiques.

Enfin, nous sommes en train de constituer une plateforme interministérielle pour toute l'organisation des concours. Leur mutualisation, leur rationalisation permettra de réduire les coûts.

Sur toutes ces questions, nous avons ainsi rattrapé, en quelques années, notre retard par rapport à nos partenaires européens. Et, là encore, ce n'est pas seulement une question d'économies, ce sont aussi de meilleures conditions de travail pour les agents, il ne faut jamais l'oublier.

Enfin, la RGPP porte ses fruits en termes d'économies. Nous n'avons jamais caché l'objectif d'inscrire cette révision générale des politiques publiques comme un outil pour avoir un meilleur rapport qualité-prix entre l'usager et le contribuable, l'administré et les services publics. La période de tension budgétaire dans laquelle nous nous trouvons, comme les autres pays européens, nous oblige à tenir les objectifs intangibles en matière de réduction de déficits publics.

Les économies réalisées grâce à la RGPP au cours de la dernière période permettent d'apporter une contribution utile et profitable à cet objectif de réduction des déficits publics. Pour la période 2009-2011, ces économies s'élèvent à 7 milliards d'euros. Ce chiffre atteindra 15 milliards d'euros d'ici à 2013. En 2012, nous reviendrons au nombre de fonctionnaires de l'État du début des années 1990 – je ne me lasse pas de vous apporter la même réponse aux questions d'actualité lorsque vous me sollicitez. En 1990, que je sache, la France n'était pas sous-administrée.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Mais vous étiez alors aux affaires, il fallait le dire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

La France était sous-administrée parce que la droite avait gouverné juste avant.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Les services publics étaient rendus de manière convenable. Cela représente 150 000 postes de fonctionnaires en moins par rapport à 2007, soit une diminution de l'ordre de 7 %.

Vous pourriez dire que, socialement, c'est inacceptable. Je me permets de vous rappeler qu'il y a quelques semaines à peine – c'est le ministre de la fonction publique qui vous le dit – nous avons signé un accord avec six organisations syndicales sur huit, dont la CGT, cher monsieur Paul, sur la question de la précarité dans la fonction publique, qui concerne pas moins de 800 000 personnes. Nous sommes parvenus à cette signature grâce à une logique de dialogue social, c'est un fait. Nous avons beaucoup discuté, nous y avons consacré des heures.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

En outre, bien que certains – pas tous – contestent le déroulé de cette révision générale des politiques publiques, nous poursuivons l'amélioration du pouvoir d'achat des fonctionnaires, ne vous en déplaise !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Mais bien sûr que si ! Là aussi les chiffres sont objectifs, ce sont ceux de l'INSEE, organisme statistique indépendant, et ils ont été validés par Eurostat qui a chiffré l'évolution du pouvoir d'achat des fonctionnaires au cours de ces dernières années à plus du double de l'inflation. Ce sont des chiffres objectifs. Alors, évidemment, après il y a des points de contestation sur le GVT, …

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…l'intégration, etc, mais c'est l'INSEE qui a défini sa matrice, pas le Gouvernement. Donc, ne le montrez pas du doigt ! Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Vous continuez à les contester ; je le déplore, mais je ne m'y arrête pas.

Vous le savez, cet effort s'accompagne de la restitution aux agents publics de la moitié des économies réalisées. Il y a donc une logique qui se décline : moins de fonctionnaires, mais mieux payés. À la fin de l'année 2011, c'est un montant de 1,4 milliard d'euros qui aura été redistribué aux fonctionnaires dans ce cadre, ce qui n'est pas rien.

Pour l'avenir, nous serons naturellement attentifs à l'appropriation par les agents de ces réformes.

Les réformes que nous conduisons sont difficiles – nul ne le conteste –, longues et ambitieuses. Leurs résultats doivent donc être analysés à l'aune de leur ancienneté et de leur complexité. Ainsi, une réforme comme celle de la Direction générale des finances publiques a fait débat durant de longues années, y compris dans les mois qui ont suivi son annonce. Et pourtant, après trois années, les résultats sont au rendez-vous. Nous terminerons de boucler cette réforme à la fin de l'année.

De la même manière, une réforme interministérielle comme la réforme de l'administration territoriale est plus difficile à porter qu'une réforme ministérielle car elle conduit à des changements plus importants. Mais pouvait-on en rester à un mode de fonctionnement « en silo » face aux usagers des services publics, qu'ils soient particuliers, entreprises ou collectivités ? Je ne le crois pas. Nous poursuivrons donc cette démarche.

Doit-on s'étonner que, quelques mois après la mise en oeuvre de cette réforme, les dénominations des nouvelles directions départementales soient moins connues que les précédentes, traditionnellement ancrées dans nos mémoires ? Je ne le crois pas non plus, mais je reconnais volontiers qu'il faut du temps pour qu'une réforme prenne ses marques. Cela dit, celles qui ont été engagées les ont trouvées, et dans des délais probablement plus rapides que ce que certains experts ne craignaient.

J'en conclus donc que, face à ces changements, il faut poursuivre le renforcement de l'accompagnement des agents, notamment dans une perspective interministérielle, et fixer comme un impératif qui s'impose à tous la nécessité d'un dialogue social partout et sur tout. Le Gouvernement est particulièrement attentif à cet accompagnement.

La révision générale des politiques publiques, dans la fonction publique d'État comme dans les collectivités territoriales, participe de la même philosophie qui vise à améliorer la qualité du service public tout en rendant l'administration plus efficace et moins dépensière.

Pour être complète, l'ambition renouvelée de la RGPP doit trouver un écho favorable auprès des collectivités – c'est la prochaine étape. Ce n'est pas un travail anodin ni par son ambition ni par l'ampleur des changements qu'il exige de la part des agents. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire d'inscrire des rendez-vous comme celui-ci dans le cadre d'une démarche constructive qui débouchera sur des améliorations concrètes pour les contribuables, les usagers et les fonctionnaires. Pour que la RGPP soit un succès, il faut que tous y trouvent leur compte. Chacun y prend sa part : vous dans les contributions et dans la contestation de cette méthode, nous tous pour rendre chaque jour un service un peu plus performant aux Français, contribuables et usagers de ces services publics. Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la révision générale des politiques publiques recoupe différentes réalités : des réformes emblématiques – par exemple la fusion entre la Direction de la comptabilité publique et la Direction générale des impôts –, la simplification des procédures administratives de l'État en passant par des règles comme celle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux.

Près de quatre années après son début, où en est la RGPP ? À l'occasion de ce débat je souhaiterais, dans un premier temps, dresser un bref bilan de la RGPP, puis je reviendrai sur la règle du « un sur deux » avant d'évoquer certains aspects du pilotage et du suivi de la RGPP.

S'agissant du premier bilan de la RGPP quatre ans après sa mise en oeuvre, mes chers collègues, la RGPP vise à rendre plus efficace l'action de l'État et à réduire les dépenses publiques. Pour ce faire, beaucoup de réformes ont d'ores et déjà été conduites et le groupe Nouveau Centre les a soutenues. Prenons, par exemple, la réforme de la carte judiciaire, la fusion des réseaux des directions générales des impôts et de la comptabilité publique, la création des agences régionales de santé, la réorganisation du réseau diplomatique et consulaire ou encore la réforme du 1 % logement.

Début mai, sur 522 mesures concrètes décidées 361 sont en cours d'exécution, 124 considérées comme exécutées et 37 mesures nouvelles sont encore à mettre en oeuvre selon le cinquième rapport du Conseil de modernisation des politiques publiques.

En juin 2008, la première phase de la RGPP a permis des économies, en année pleine, d'environ 7 milliards d'euros. Sept milliards d'euros, c'est beaucoup et c'est peu ! Je rappelle en effet que le déficit du budget de l'État est de 91 milliards et que la dépense brute du budget de l'État est de 380 milliards. C'est donc un effort, mais qui porte sur un peu moins de 2 % en cinq ans. Cela dit, c'est mieux que rien. L'objectif de la seconde phase est d'aller plus loin en portant l'effort de 7 à 10 milliards d'ici à 2013, dont 3 milliards en masse salariale, 2 milliards en fonctionnement et environ 5 milliards en dépenses d'intervention. Je veux donc dire à mes collègues que la RGPP c'est bien, il faut la poursuivre, mais qu'elle n'est pas à la hauteur de l'énorme déficit public que nous devons résorber.

Le second point que je veux aborder, qui est délicat, est la règle de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Mes chers collègues, cette règle mérite d'être approfondie. La loi de finances pour 2011 prévoit une suppression de 31 638 postes dans la fonction publique d'Etat, tous ministères confondus. Si la trajectoire 2011-2012 est suivie, ce sont près de 145 000 emplois qui auront été supprimés au cours de la législature, soit à peu près 7 % des effectifs. Je tiens à saluer, au nom du groupe Nouveau Centre, le volontarisme du Gouvernement en la matière. Le ministre a tenu bon. Certes, ceux qui critiquent cette règle relativement aveugle n'ont pas tout à fait tort, car elle montre que nous n'avons pas encore d'indicateurs suffisamment pertinents pour faire une analyse beaucoup plus fine. Mais enfin, si le ministre ne tient pas bon, tous ses collègues lui expliqueront que, bien entendu, ils n'ont pas assez.

Je voudrais vous interroger, monsieur le ministre, sur la part des économies résultant de ces réductions d'effectifs qui a été recyclée sous forme de primes destinées aux fonctionnaires. La règle était 50-50. Les économies annuelles étant de l'ordre de 700 millions, 350 millions devaient être affectés à l'augmentation des primes. Or, il semble que l'on soit bien au-delà de la règle des 50 %. Le secrétaire d'État chargé de la fonction publique nous a en effet avoué que, lorsque l'on compte tout, y compris les mesures catégorielles, le GVT, etc, on est plutôt autour de 70 %. La Cour des comptes est venue nous montrer en commission des finances que l'on ne pouvait continuer de la sorte si l'on voulait redresser les finances publiques, mais j'y reviendrai tout à l'heure. Vous avez eu raison, monsieur le ministre, de tenir bon sur le gel du point. Je vais vous donner les chiffres des deux dernières années.

La rémunération moyenne des personnes en place – ceux que l'on appelle, dans le langage de la fonction publique, des présents-présents, c'est-à-dire ceux qui ont été là du 1er janvier au 31 décembre – a progressé de 3,7 % en 2009. Je rappelle que l'indice de consommation des ménages, en moyenne annuelle, avait augmenté de 0,6 %. Le pouvoir d'achat des salariés du public a donc augmenté de 3,1 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Et comment ont évolué les rémunérations dans le privé ? Je vous donne les chiffres, qui sont tirés d'une récente note de l'INSEE : le salaire moyen par tête dans le secteur marchand, en 2009, a augmenté de 1,3 % ! Le différentiel entre la rémunération moyenne par tête des présents-présents dans la fonction publique a enregistré un écart de 2,4 % en 2009. Cela n'est pas nouveau. Ceux qui aiment l'histoire économique et sociale doivent se souvenir de l'évolution de ces indicateurs lors de la crise de 1929, qui est arrivée en France en 1930, 1931 : c'était le même schéma. En effet, la crise crée une très forte pression sur les salaires dans le privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Finalement, ce sont les salaires qui créent la crise !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Pas du tout !

En revanche, la progression dans la fonction publique continue au moins pendant un an ou deux. En 2010, avec une augmentation de la rémunération moyenne des présents-présents de 3,5 % et une inflation à 1,2 %, le pouvoir d'achat des fonctionnaires de l'État a augmenté en moyenne de 2,3 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Dans le privé, le salaire moyen par tête s'est accru de 2,5 % en valeur.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

L'écart est donc de 1 %. Sur 2009-2010, cet écart a été de l'ordre de 3,5 %. On ne peut pas continuer ainsi. Cela pose un problème de justice sociale entre les différentes couches de salariés. On ne peux pas expliquer aux salariés du privé que c'est la crise,…

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Paul

Il faut aussi l'expliquer aux actionnaires des grands groupes !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

…que ce n'est pas le Gouvernement qui fixe les salaires dans le privé, que cela dépend des négociations collectives, si dans le même temps l'État, patron des fonctionnaires, fait augmenter le pouvoir d'achat des présents-présents deux ou trois fois plus vite que celui des salariés du privé. C'est totalement intenable. Je vous encourage donc, monsieur le ministre, à persister dans votre position et, surtout, à vous engager dans une politique de réduction de la part des 700 millions d'économies affectée aux primes des fonctionnaires. La Cour des comptes nous a indiqué qu'il faudrait descendre de la moitié à environ un quart la proportion destinée aux primes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

On pourrait même tout supprimer tant que vous y êtes !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Par ailleurs, je voudrais évoquer certaines difficultés dans le suivi et le pilotage de la RGPP.

La RGPP est un « mastodonte » qui recoupe un nombre très élevé de réformes et de mesures. Le pilotage en est rendu plus difficile. Aussi, si je tiens à souligner le sérieux des comptes rendus du Conseil de modernisation des politiques publiques, via ses rapports d'étape, je souhaite reprendre à mon compte quelques observations pointées par la Cour des comptes.

Dans ses observations définitives de 2009 sur le pilotage et le suivi de la RGPP, la Cour des comptes faisait état en effet d'un certain nombre de remarques.

D'abord, la Cour expliquait que l'impact budgétaire de la RGPP était difficile à évaluer. Ainsi, si l'on prend la « règle du un sur deux », la Cour des comptes a estimé cet impact en 2009 à 100 millions d'euros, alors que le Gouvernement avance le chiffre de 500 millions d'euros. En effet, on a redistribué des économies qui n'ont été que partiellement réalisées. On ne peut donc continuer durablement ainsi.

Ensuite, la Cour encourageait le Gouvernement à parfaire le dispositif de pilotage de la RGPP, notamment en détaillant les rapports de suivi en fonction de l'avancement des mesures, et ce ministère par ministère. Il serait intéressant, monsieur le ministre, que vous preniez un engagement sur ce point.

Enfin, la Cour concluait en ces termes : « la RGPP n'a pas permis de combiner des objectifs clairs et chiffrés, affichés en amont de la mise en oeuvre des décisions, et un lien direct avec l'élaboration du budget », c'est-à-dire le couplage entre la RGPP et les négociations budgétaires.

Plus récemment, il y a quelques jours, le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de notre assemblée s'est interrogé, à l'occasion d'une évaluation d'étape de la RGPP, sur la pertinence du système des feux tricolores servant à estimer l'aboutissement ou non d'une mesure.

Je me permets donc d'attirer votre attention, monsieur le ministre, sur l'importance de pouvoir évaluer avec pertinence l'impact des réformes que nous votons et qui font, une fois encore, partie de la RGPP pour l'essentiel.

En conclusion, mes chers collègues, le groupe Nouveau Centre ne peut que soutenir la logique de la RGPP. Mieux, nous appelons au respect des objectifs ambitieux assignés au départ.

Pour 2012, l'idée d'une « phase 2 » de la RGPP et notamment de la « règle du un sur deux » doit faire son chemin. Le débat devra avoir lieu. Peut-être faudra-t-il, une fois la phase de réforme structurelle passée, reconsidérer les variations d'effectifs dans l'éducation nationale ou encore au sein de nos forces de police. Mais si nous faisons cela, il faut durcir la règle dans d'autres ministères. C'est en tout cas l'esprit qui anime notre groupe parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Cornut-Gentille

Monsieur le ministre, mes chers collègues, Daniel Paul a prononcé l'oraison funèbre de la fonction publique qui, d'après lui, serait morte de la RGPP. Je ne partage pas du tout cette vision caricaturale.

Le bilan de la RGPP est considérable. L'État a connu en France des périodes des grandes transformations, mais il s'était figé depuis de longues années. Grâce à la RGPP, il a retrouvé une dynamique de transformation tout à fait neuve, que beaucoup de donneurs de leçons d'aujourd'hui ont été incapables d'engager.

Le bilan de la RGPP est équilibré, et nul ne peut contester les économies réalisées, ce qui n'est pas un mince résultat, au vu de l'état de nos finances publiques. Charles de Courson nous incite même à aller plus loin, en tenant le cap. On peut également parler de bilan positif pour les usagers et l'administration, grâce à l'amélioration des méthodes de travail, replacée au coeur des débats par la RGPP.

On peut cependant s'interroger sur le paradoxe suivant : pourquoi ce bilan flatteur n'est-il pas toujours bien assumé, y compris par la majorité, ce qui donne prise à toutes les caricatures ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Cornut-Gentille

Aller plus loin dans la maîtrise des coûts et l'amélioration du service public nécessite de lever ces réticences. Il faut pour cela surmonter trois obstacles. Le premier touche à la difficulté d'obtenir de vrais chiffres. Il est pourtant dans l'intérêt de l'information des Français et de l'Assemblée nationale de disposer de chiffres clairs, sans quoi le doute s'installe, ce qui est normal. J'incite donc vos services, monsieur le ministre, à fournir tous les chiffres. Chacun ensuite en fera sa lecture : s'agit-il d'économies nettes ou de non-dépense ? Certaines mesures catégorielles limitent-elles les économies, comme l'a dit M de Courson ? Toutes ces questions sont justifiées, et il faut avoir les éléments pour y répondre. Nous aurions donc intérêt à jouer davantage la transparence pour éclairer le débat public et l'empêcher de sombrer dans les caricatures.

La RGPP souffre en second lieu d'une approche trop budgétaire. Portée trop exclusivement par les services et l'administration, elle gagnerait à être davantage soutenue par les ministres, qui devraient se saisir des éléments de réforme qui les concernent. En laissant en effet les administrations faire au mieux, on n'a pas su donner à la réforme sa véritable dimension politique, capable d'éclairer les services sur les évolutions de leurs missions.

Cela m'amène au dernier point : la participation des agents de la fonction publique à la RGPP. Ils se sont adaptés de façon formidable mais ils ont sans doute besoin, confrontés à des changements d'importance, d'une gestion plus proche, plus participative, qui les associe davantage aux réformes.

À ces trois réserves près, nous pouvons aller plus loin encore dans la RGPP. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Monsieur le ministre, je voudrais insister sur quelques-uns des aspects qu'a revêtus la RGPP dans un ministère qui en est le meilleur élève : je veux parler du ministère de la défense.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Ce ministère va supprimer près de 54 000 emplois d'ici 2015, engendrant des économies de fonctionnement extrêmement significatives, et cela en garantissant non seulement le contrat opérationnel résultant du Livre blanc mais également l'efficacité de notre défense nationale, dans un contexte incertain où, de plus en plus souvent, nos forces sont amenées à intervenir sur le théâtre des opérations extérieures.

J'insisterai en particulier sur trois sujets : la réduction très significative des effectifs et les économies qui doivent en résulter ; les aspects immobiliers et la rationalisation des emprises immobilières dont on attend des ressources financières non négligeables ; la réalité enfin et la sincérité budgétaire de la réforme.

Pour ce qui concerne la déflation des effectifs, je l'ai dit, 54 000 emplois vont être supprimés, 36 000 emplois au titre de la RGPP et 18 000 emplois au titre du Livre blanc. Cette réduction très sensible des effectifs doit produire une économie d'un peu plus de 4 milliards d'euros, desquels doivent être retranchés le montant du plan d'accompagnement des restructurations, c'est-à-dire les mesures d'accompagnement social, et le coût des infrastructures nécessaires au réaménagement de la carte militaire, ce qui se solderait, selon le modèle du Gouvernement, par une économie finale de 2,7 milliards d'euros.

Cette déflation des effectifs pose plusieurs questions. En premier lieu s'agissant de son aspect social. Les armées, pour être plus muettes que les autres corps sociaux, n'en souffrent pas moins lorsqu'on leur impose des réformes à répétition, dont la lisibilité est plus qu'aléatoire. J'appuierai mon propos sur un exemple très concret : en 2010, les suppressions supplémentaires d'emplois non programmées ont concerné des personnels dits polyrestructurés, c'est-à-dire qui avaient déjà été restructurés l'année précédente, conduisant ainsi à des traumatismes sociaux non négligeables.

En second lieu, j'aimerais que vous nous garantissiez que, lorsque les effectifs diminuent, les compétences ne partent pas. En effet, la réforme du ministère de la défense a opéré une répartition entre soutien et missions opérationnelles censée garantir le maintien des compétences. Or je ne suis pas sûr que vous ayez les outils permettant de nous le garantir.

Voilà pour ce qui concerne les ressources humaines, volet non négligeable car désespérer nos armées pourrait contribuer à remettre en cause l'efficacité du contrat opérationnel.

Le second sujet sur lequel je voudrais insister, parce qu'il montre que la RGPP et la sincérité budgétaire sont incompatibles, c'est la question des recettes exceptionnelles résultant de la vente des emprises immobilières. Le Gouvernement auquel vous appartenez, monsieur le ministre, a inscrit en loi de finances pendant trois exercices budgétaires consécutifs des recettes censées garantir l'équilibre mais qui n'ont jamais été réalisées. Vous connaissez ces données mieux que quiconque, puisqu'elles sortent de votre ministère. En 2009, vous avez inscrit 1,7 milliard d'euros de recettes exceptionnelles, dont 1 milliard qui devait résulter de la vente des emprises immobilières : vous n'en avez quasiment pas réalisé. En 2010, vous avez inscrit 1,6 milliard d'euros, dont 700 millions d'euros au titre des emprises immobilières qui, là encore, n'ont quasiment pas été réalisées, le reste devant résulter de la vente de fréquences et de l'usufruit de satellites de communication. Ces recettes portent donc très bien leur nom : elles sont exceptionnelles puisque vous les inscrivez chaque année et que vous ne les réalisez jamais !

Il y a enfin l'affaire de Balard. Je voudrais être sûr que ce « Balardgone », où doivent être rassemblés tous les états-majors, représentera bien les économies attendues. Je rappelle qu'il s'agit de 720 millions d'euros d'investissements privés, d'un loyer annuel de 150 millions d'euros payé par l'État sur vingt-sept ans avec, en contrepartie, la vente des emprises immobilières du ministère pendant la durée du PPP. Quelle est la position de votre ministère sur l'équilibre de ce partenariat public-privé compte tenu de la non-réalisation des recettes exceptionnelles immobilières ? Il ne faufrait tout de même pas qu'il aboutisse à des bénéfices pour des entreprises privées tandis que l'État creuserait son déficit.

Je conclurai enfin en abordant la question des bases de défense, censées être l'instrument de la mutualisation et devant permettre une nouvelle répartition des emplois entre soutien et actions opérationnelles génératrice d'économies. Avez-vous, monsieur le ministre du budget, un seul document qui agrège l'ensemble des économies réalisées grâce à ces bases de défense ? Si ce document existe et qu'il atteste des économies réalisées, je suis prêt à revenir à cette tribune pour admettre que je me suis trompé. Mais aujourd'hui aucun service n'est capable de produire ce document. La Cour des comptes elle-même l'a d'ailleurs souligné de façon extrêmement sévère, tout comme elle s'interroge – à l'instar de M. Cornut-Gentille, qui le fait avec élégance parce qu'il appartient à la majorité cependant qu'étant dans l'opposition je le fais plus perfidement, mais au fond nous disons la même chose – sur la fiabilité des chiffres que vous avancez concernant les économies réalisées dans la défense, grâce à la RGPP : 6,7 milliards d'euros pour 2011, 4,9 milliards en 2010 et 2,7 milliards au moment de son lancement. Voilà qui est révélateur de l'insincérité budgétaire qui préside à cette RGPP, et je voudrais savoir comment la défense, qui a subi une telle cure d'amaigrissement, va pouvoir remplir son contrat opérationnel, alors que vous venez, pour la remercier d'avoir été aussi vertueuse, de la taxer de 3,6 milliards d'euros supplémentaires l'an dernier, ce qui l'oblige à remettre en cause une grande partie des programmes dans lesquels elle s'était engagée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je ne reviendrai pas sur l'exposé des conséquences désastreuses de la politique de révision générale des politiques publiques conduite au pas de charge depuis 2007. Mon collègue Daniel Paul en a dressé en introduction un tableau édifiant.

Je voudrais revenir plus spécifiquement sur les enjeux et les incidences économiques et budgétaires de cette RGPP. Ce programme est en effet emblématique de la politique que le Gouvernement conduit, de ses échecs et de ses visées purement idéologiques. Emblématique aussi de votre volonté de soumettre la politique aux forces du marché et d'accélérer en conséquence le démantèlement de notre modèle social.

D'ailleurs il faudra bien un jour que le Gouvernement prenne le temps de nous expliquer quelles sont ces forces occultes, quasiment divines, que vous appelez les « marchés », plus particulièrement les « marchés financiers » et qui, par une sorte de pouvoir surnaturel, échapperaient à la loi des hommes et à la démocratie, c'est-à-dire à la volonté des peuples.

Pour ma part, j'hésite entre l'intervention de cette fameuse « main invisible » chère à Adam Smith et la main de la soeur de cet empereur malgache qui, voyant ses pouvoirs lui échapper, en accusait très injustement sa soeur.

Mais d'abord, soulignons que l'un des traits marquants de ce programme de réformes est son caractère autoritaire. Il faut bien constater, avec les rapporteurs du groupe de travail sur l'évaluation de la RGPP, que « cette méthode n'a pas constitué, depuis son lancement, un modèle en matière d'information des parlementaires sur l'action conduite par le Gouvernement ».

La RGPP n'est pas un outil de progrès ; c'est une machine de guerre pour dégager de l'argent public et le transférer à la sphère privée.

Le baromètre Acteurs publicsIfop d'avril dernier est éclairant : 78 % des cadres de la fonction publique estiment que la qualité du service rendu aux usagers s'est dégradée du fait des réformes en cours et 80 % jugent que l'environnement et les conditions de travail se sont détériorés depuis 2007.

Vous nous dites que l'État est en faillite mais, si la situation de nos finances publiques est à ce point alarmante, c'est parce que vous avez accordé, selon le rapport de notre rapporteur général du budget Gilles Carrez, 100 milliards d'euros de cadeaux fiscaux. Pour quel bilan économique et financier ?

Non seulement vous avez doublé la dette publique en dix ans mais vos largesses incessantes en faveur des plus riches ont plus contribué à créer les bulles spéculatives qu'à alimenter la croissance économique et développer l'emploi.

Et ne me dites pas que c'est la faute de la crise car il faudrait alors expliquer qui en est responsable, ce qui est fort bien résumé dans le rapport de la commission Stiglitz créée par l'ONU, intitulé « Pour une vraie réforme du système monétaire et financier international ».

Je cite : « La crise n'est pas un simple accident comme on n'en voit qu'une fois par siècle, quelque chose qui est seulement « arrivé » à l'économie, qu'on ne pouvait pas prévoir et encore moins éviter. Nous sommes convaincus qu 'elle est due, au contraire, à l'action humaine : elle a été le résultat de fautes du secteur privé et de politiques mal orientées et vouées à l'échec des pouvoirs publics ».

Vous êtes par conséquent à 100 % responsables du déficit budgétaire, dû pour deux tiers à des cadeaux fiscaux que vous avez faits et pour un tiers à la crise dont vous êtes les coresponsables !

Cet échec est aussi celui de la stratégie de Lisbonne. Le pacte de stabilité monétaire n'a eu pour effet, en dix ans, que de brider les investissements et les salaires, de maintenir un chômage de masse, d'accroître les inégalités, de freiner la croissance, d'ouvrir la voie à une régression sociale sans précédent et de laisser les États face à l'appétit de financiers privés.

Alors que les banques et les actionnaires ont accumulé des profits considérables, il n'est rien proposé d'autre aujourd'hui, sous la pression des marchés financiers, que d'imposer toujours plus d'austérité aux peuples européens, de baisser les salaires et les pensions, d'imposer un nouveau recul de l'âge de la retraite, de déréglementer toujours davantage le marché du travail et enfin de démanteler un peu plus l'État par la voie de la fameuse révision générale des politiques publiques.

Votre seule stratégie est celle de la fuite en avant. Vous trompez nos concitoyens pour présenter comme indispensable une baisse des dépenses publiques alors qu'il ne s'agit pour vous que de ne pas remettre en cause les cadeaux fiscaux que vous avez octroyés sans compter aux plus grosses entreprises et aux privilégiés. Et vous vous préparez à le faire de nouveau en allégeant l'impôt sur la fortune, ce qui va coûter 1 milliard d'euros. Une mesure qui n'intéresse que deux Français sur mille ! Mesure que vous allez financer par le gel des salaires des fonctionnaires, qui rapportera 900 millions d'euros. La taxation des grosses successions de 5 % supplémentaires n'est qu'un gadget qui ne va pas faire trembler les plus riches.

Vous maquillez en politique vertueuse de gestion des comptes publics une croisade idéologique contre l'État et les services publics. L'objectif prioritaire de votre politique de révision générale, ou plutôt de régression générale, des politiques publiques n'est pas d'améliorer le fonctionnement de nos administrations, sinon à la marge, mais d'accompagner la réalisation de vos objectifs de réduction des effectifs : 150 000 postes entre 2007 et 2012, soit 7 % de la fonction publique d'État.

Ce n'est dans votre esprit qu'une première étape. Les conséquences en sont pourtant dès à présent désastreuses dans les secteurs de l'éducation, de la justice, de la sécurité publique, de la formation professionnelle et de l'emploi pour ne rien dire des hôpitaux, sommés aujourd'hui de se soumettre à l'unique critère de la rentabilité et qui connaissent eux aussi leur lot de fermetures de services et de suppressions de postes – 1000 par an à l'Assistance publique de Paris, leurs investissements étant divisés par trois ou quatre.

Nos concitoyens paient chaque jour les conséquences de vos visées idéologiques, qui consistent à entretenir un double mythe : celui d'un État tentaculaire et inefficace, celui d'un libéralisme qui libérerait l'initiative privée et l'investissement alors qu'il ne sert depuis trente ans que la seule logique de la rente et de l'accumulation des profits en faveur d'une poignée de privilégiés.

Faut-il illustrer cette réalité par quelques chiffres ? C'est un jeu d'enfant tant les études abondent pour le prouver.

L'OCDE nous apprend qu'en dix-huit ans, si les salaires ont augmenté en France de 81 %, les dividendes ont quant à eux progressé de 355 % ! Par ailleurs, selon la commission des prélèvements obligatoires près de la Cour des Comptes, un pour cent des Français les plus riches ne payent pas un impôt au taux de 40 % comme ils le devraient mais seulement de 18 %. Quant au millième le plus riche, il ne supporterait qu'un taux de 15 %.

Je vous invite à lire un récent document de l'OCDE qui démontre le creusement des inégalités et combien l'efficacité économique peut en être affectée.

Pour appuyer ma démonstration, je vous citerai l'économiste américain Jeffrey Sachs, président de l'université Columbia de New York : « Il faut expressément considérer les impôts comme le prix à payer pour développer la « civilisation ». Aux États-Unis, on préfère […]comprimer les budgets de l'éducation, de la santé, des sciences et technologies ou du développement durable, […] c'est un mauvais choix. En revanche, couper dans les budgets militaires, augmenter les impôts des sociétés et des riches, éliminer les paradis fiscaux, c'est la voie pour construire une société juste et productive. »

Cessez donc d'instruire le procès des enseignants, des infirmières, de tous les services publics : instruisez plutôt celui de ceux qui s'enrichissent du travail des autres.

La conséquence de votre politique est que l'État « fait moins » et vous voulez désormais entraîner les collectivités locales, qui réalisent plus des deux tiers de l'investissement public, dans la même spirale de l'impuissance en réduisant leurs ressources, faisant ainsi le lit de la récession économique.

Les Français ne sont pas dupes et, dans leur grande majorité, jugent très sévèrement votre politique à l'égard des services publics. Le sondage TNS Sofres réalisé en avril dernier est sans appel : 71 % de nos concitoyens considèrent que le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux est « une mauvaise chose ».

La priorité n'est pas aujourd'hui d'appauvrir toujours davantage l'État dans son rôle de créateur d'égalité entre les Français mais de promouvoir une autre répartition des richesses, favorable aux salaires et à l'investissement, par un véritable printemps fiscal, organisant le retour à un impôt progressif et juste, par la taxation du capital et la remise en cause des cadeaux fiscaux.

Nous militons enfin depuis des années pour que soit mis en oeuvre un pôle financier public dont le rôle serait, entre autres, d'octroyer aux PME-PMI des prêts à taux bonifiés dès lors qu'elles s'engagent à privilégier l'emploi, les salaires et l'investissement.

L'urgence est de sortir de la spirale infernale du moins-disant social et fiscal, de la course à une compétitivité qui devient absurde car elle se fait au service des appétits des marchés financiers et non de l'intérêt général.

Il est grand temps de mettre fin à cette politique de régression générale des politiques publiques. C'est ce que proposent les députés GDR.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Même si elle semble surprenante à certains, la démarche de la RGPP n'a rien d'insolite. Elle est en réalité pratiquée depuis toujours par toutes les organisations dont la pérennité dépend de la fidélité de ceux qui en assurent le financement. Quelle structure, quel qu'en soit le statut, survivrait, si elle ne s'interrogeait pas en permanence sur le périmètre de ses activités, sur l'adaptation de son offre à la demande, sur son organisation et ses méthodes ?

Ce qui est nouveau n'est donc pas la démarche elle-même, mais le fait qu'elle s'applique désormais de manière systématique et permanente à l'ensemble des administrations de l'État. Des tentatives avaient déjà été lancées en ce sens. Rappelons-nous la rationalisation des choix budgétaires dans les années 1970. Si cette politique n'a pas perduré, c'est qu'elle a manqué d'un portage politique.

La RGPP aujourd'hui, c'est une volonté politique, c'est une application systématique, c'est sans doute ce qui en fait la nouveauté et la force.

C'est évidemment un effort qui est demandé à l'ensemble des administrations publiques de l'État, mais je crois que cet effort est indispensable au regard des capacités financières de l'État, je n'y insiste pas, mais aussi des attentes du public, ce qui mérite sans doute d'être davantage développé.

Car la RGPP, ce n'est pas seulement la maîtrise des dépenses, c'est aussi, et surtout, l'amélioration de la qualité du service rendu.

Je sais qu'il est difficile d'en convaincre, non pas l'opposition car je crois qu'elle l'est, au-delà de ses propos, mais l'opinion publique. C'est assurément ce qui fait la fragilité majeure de cette politique.

C'est pourtant une réalité et, en tant que rapporteur spécial du budget de la mission de la sécurité publique, je voudrais citer un exemple dans ce domaine si sensible : si le Gouvernement n'avait pas réexaminé de fond en comble les conditions d'organisation et de fonctionnement de la police et de la gendarmerie nationales, jamais il n'aurait pu continuer à améliorer la performance des services et à faire baisser la délinquance.

Le réexamen de l'organisation a abouti à une unité de commandement – rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur –, un redéploiement des zones de compétences de la police et de la gendarmerie, une mutualisation des moyens et des procédures. Ce sont des réformes lourdes qui attendaient depuis longtemps d'être mises en oeuvre. Cela a été fait.

Quant au réexamen des conditions de fonctionnement, il a conduit à accorder la priorité absolue à la police technique et scientifique, ce qui constitue un changement fondamental de culture puisque l'on est passé, lors de la phase d'enquête, d'une culture de l'aveu à une culture de la preuve. C'est un changement très profond qu'il fallait lui aussi conduire.

L'exemple des services de police et de gendarmerie est d'autant plus intéressant qu'il montre que, quel que soit aujourd'hui le poids des contraintes financières, la révision générale des politiques publiques ne saurait avoir pour objectif, ni pour résultat, de transférer à la technique ce qui relève fondamentalement du politique.

Si l'on prend l'exemple de la mutualisation, la stricte logique serait de tout mutualiser ; mais dans ce cas la spécificité de ces deux forces disparaîtrait, ce qu'aucune formation politique ne souhaite et ce qui ne se fera pas. Voilà qui démontre clairement qu'au moment de prendre la décision finale, le politique l'emporte sur les considérations d'ordre strictement technique. La RGPP est le moyen d'une politique, mais n'est en aucun cas une politique par elle-même.

Reste une dernière question : peut-on, dans ce domaine, faire mieux ? Vous l'avez dit, monsieur le ministre : « Bien entendu ». Comme toutes les politiques, comme toutes les oeuvres humaines, la RGPP est perfectible. Elle l'est essentiellement dans deux domaines, à mon avis. Le premier est son image. La dénomination de « RGPP », hermétique, presque barbare, donne l'impression d'un chef d'oeuvre de la technocratie, d'un triomphe des chiffres sur la volonté des hommes. Il faudra y réfléchir car la réalité est très différente.

C'est par ailleurs sur le portage politique de cette action qu'il faudrait progresser : il est essentiel de faire apparaître très clairement que l'objectif majeur n'est pas d'amoindrir la qualité du service mais de l'améliorer et de le pérenniser.

Les Français sont en général, et nous avec eux, profondément attachés à notre modèle social. Nous n'assurerons pas sa pérennité par l'idéologie ou l'incantation, mais en le rendant plus efficace et moins coûteux. Ce sont les deux objectifs de la RGPP.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

RGPP, que de crimes on aura commis en ton nom ! Sans parler, bien entendu, de l'écartèlement du maire de Troyes, entre celui qu'il fut hier et celui qu'il est devenu aujourd'hui.

Oui, la RGPP n'aura fait à ce jour qu'un seul heureux: le Gouvernement, pour qui c'est le mot magique, par lequel il explique toute sa politique à l'égard de l'administration.

En réalité, c'est un moyen inavoué et sans doute inavouable de remettre en question le concept même de service public dans notre pays tel qu'il fonctionnait, jusqu'alors à la satisfaction de nos concitoyens, depuis la Libération, s'appuyant à l'époque sur les décisions du Conseil national de la Résistance.

En pratique, c'est une réforme financière qui entraîne la fusion de ces services publics, leur disparition dans certains cas, le redéploiement dans d'autres, au détriment des fonctionnaires eux-mêmes, qui sont des éléments importants de ces services, et des usagers.

Les fonctionnaires ont de moins en moins les moyens nécessaires pour exercer les missions pour lesquelles ils se sont engagés dans le service public. Vous évoquiez, monsieur le ministre, la concertation dans les services déconcentrés. J'ai reçu une délégation d'organisations syndicales dans le cadre d'une mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances, avec M. de La Verpillère et M. Francina. Ces partenaires sociaux nous ont dit n'avoir été à aucun moment associés aux initiatives prises dans le cadre de la RGPP. Quant à l'impact direct sur les usagers, j'y reviendrai.

Vous avez rappelé, monsieur le ministre, les trois objectifs que se fixait le Gouvernement : l'amélioration de la qualité du service rendu aux usagers, la réduction des dépenses publiques, la modernisation de la fonction publique. Qui pourrait ne pas y souscrire – s'ils ne s'accompagnaient pas de ces coupes sombres dont les services publics font l'objet. Dans les faits, cela se traduit par le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. On en voit les conséquences : l'économie est toute relative, comme l'a rappelé M. de Courson, en regard du déficit de l'État ; par ailleurs, sur le site Internet de votre ministère, vous reconnaissez aux agents un véritable courage pour porter la RGPP. C'est vrai qu'il leur en faut ; mais à certains, à un moment, le courage fait défaut et nous avons enregistré quelques suicides ici ou là. C'est dire combien les fonctionnaires vivent mal les conséquences de votre politique. Plusieurs organisations syndicales ont d'ailleurs souligné le rythme précipité de la réorganisation et le caractère brutal de sa mise en oeuvre.

Je reviens aux usagers, avec l'exemple de Pôle Emploi. Ce devrait être l'administration la plus performante lorsqu'il y a autant de demandeurs d'emploi. Il y a pourtant des insuffisances et, recevant cet après-midi le directeur général de Pôle Emploi, j'ai constaté que l'obligation qui lui a été faite de supprimer 1 800 postes dans ses services met finalement en difficulté l'ensemble des demandeurs d'emploi. Les usagers utilisent aussi des services publics dépendant des collectivités territoriales. Or les communes considèrent que l'État ne joue plus son rôle. La RGPP a des effets négatifs sur les services déconcentrés de l'État, ce qui entraîne des inégalité territoriales dans les domaines de la santé, de la sécurité, de la justice. Et, par une sorte de cercle vicieux, la fermeture des hôpitaux, des maternités, des gendarmeries et des commissariats a conduit les communes à embaucher plus de policiers municipaux et à ouvrir des centres de santé.

Pour toutes ces raisons, nous avons dénoncé la RGPP. Au terme de ce débat, permettez-moi un souhait : avant d'aller plus loin dans la réforme, allons d'abord plus loin dans l'évaluation de ce qui a déjà été fait, avec le Parlement et avec les partenaires sociaux que sont les organisations de fonctionnaires, pour voir si une nouvelle étape de la RGPP ne pourrait pas être conduite avec une autre orientation afin d'éviter que les services publics soient autant malmenés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, Claude Guéant, interrogé sur la RGPP dans Acteurs publics il y a deux ans et demi, avait assumé de mener cette procédure, « avec un minimum de concertation car toute autre procédure aurait pris du temps et aurait abouti à des demi-mesures impropres à régler les problèmes de l'organisation administrative française ».

Après trois années de mise en oeuvre intense de la réforme, il me semble important de dresser un premier constat. L'idée de réformer l'État est en soi une bonne chose. Les audits Copé étaient un début. Il était urgent de réformer et de moderniser un État dont l'architecture datait de 1'après-guerre et en particulier de simplifier et d'adapter à notre société l'administration déconcentrée.

Avant de juger sur le fond la mise en oeuvre de la RGPP, je souhaiterais en évoquer la forme. La RGPP est une démarche de l'exécutif. À aucun moment la représentation nationale n'a été consultée. Ce constat est partagé par Christian Jacob qui, dans un entretien en janvier dernier, avait regretté que « les députés n'aient pas été assez associés ». Une réforme aussi importante, qui modifie structurellement notre organisation administrative, aurait dû faire l'objet d'un débat au Parlement et aurait dû se faire en concertation avec les élus nationaux et les acteurs locaux. Il n'est pas normal qu'il faille attendre plus de trois ans après son lancement pour qu'enfin un débat soit organisé dans cet hémicycle, sur une réforme qui touche tous les territoires et l'ensemble de nos services publics.

Sur le fond, la RGPP a permis d'économiser plusieurs milliards d'euros, ce qui, dans le contexte actuel, n'est pas négligeable, bien au contraire. Vous avez, monsieur le ministre, dressé un tableau très précis des réformes. Je soutiens la révision des services centraux et de la structure administrative verticale, mais il est urgent de pointer quelques dysfonctionnements de la réforme. Dans sa mise en oeuvre, la RGPP relève d'une vision qui ne tient pas compte des réalités du territoire et du risque de déstructuration du tissu social en zone rurale.

Voilà pourquoi il faut en moduler l'application selon les territoires. En effet, des mesures acceptables dans leur principe deviennent dangereuses quand elles s'appliquent à des territoires où la densité de population est faible. Il n'est pas acceptable que le même principe s'applique dans un pôle urbain où l'activité et la population sont concentrées dans un espace très restreint et dans une zone rurale de montagne où la densité n'atteint pas 15 habitants au kilomètre carré.

J'en prendrai plusieurs exemples. Maire d'une commune de 350 habitants, je suis affecté de plein fouet par la disparition des services d'ingénierie publique. Lorsque je dois, par exemple, construire une station d'épuration, je n'ai plus accès à la DDE qui était auparavant maître d'oeuvre pour la commune, il n'y a plus de service pour analyser les dossiers. Nous devons dès lors nous tourner vers les cabinets privés. Mais il n'en existe pas toujours sur place, ils sont souvent chers et surtout ils ne font qu'une analyse technique qui ne garantit pas que le dossier sera accepté par les services de l'État. Auparavant, la DDE et DDA concevaient et contrôlaient, nous fournissant un service global. Nous avons tenté de créer des agences départementales pour pallier la disparition de l'assistance de l'État ; mais elles n'ont pas les moyens financiers et humains pour remplacer l'ingénierie technique apportée par les DDE et DDA. Les petites communes ont de plus en plus de mal à monter des dossiers car non seulement l'ingénierie publique leur fait défaut, mais parallèlement, elles doivent respecter des normes de plus en plus drastiques.

Autre exemple, la RGPP a conduit dans bon nombre de cas à supprimer des postes d'encadrement de catégorie A, ce qui a de lourdes conséquences sur la capacité de l'État à répondre à telle ou telle demande sur les territoires.

Enfin, le non remplacement d'un agent sur deux peut provoquer la disparition de plusieurs agents dans un même service, ce qui pose in fine la question de l'organisation globale du service. Ainsi, dans la gendarmerie, qui exige une présence territoriale, du fait de la RGPP, des difficultés apparaissent dès lors qu'un agent prend ses congés ou se trouve en maladie. La maigreur de l'effectif ne permet plus la bonne marche du service public.

De façon générale, je pense que la RGPP doit évoluer. Une première phase est en train de s'achever. Le Président de la République m'a reçu comme président de la Droite rurale avec 55 autres députés, tous, comme moi, élus de la ruralité.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morel-A-L'Huissier

Beaucoup plus que le bouclier rural !

Il a conscience des limites de la RGPP en zone rurale et notamment de la règle du non remplacement d'un départ à la retraite sur deux. Cette règle ne doit pas devenir un dogme sur lequel les pouvoirs publics auraient une position figée. Il nous l'a dit très clairement pour ce qui est des écoles.

Il est urgent d'enclencher une nouvelle phase de la RGPP, qui doit aussi faire l'objet d'un audit. Dans cette nouvelle phase, il faudra penser à garantir un seuil minimum de présence des services. Il faut cesser de raisonner uniquement selon la population quand il s'agit par exemple de l'accès aux politiques publiques. La RGPP ne peut et ne doit pas être totale dans des territoires comme la Lozère qui compte 78 000 habitants pour une superficie égale au cinquième de la région Languedoc-Roussillon. On ne peut pas faire l'économie de cette adaptation et de cette prise en compte, sans quoi la RGPP, qui à l'origine était une idée saine, serait un véritable échec. Au moins, en conscience, je vous l'aurai dit.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Après la droite rurale, au tour de la gauche urbaine…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

J'examinerai le cas du ministère de l'intérieur, le premier visé puisque sur les 522 mesures de la RGPP, 70 le concernaient. Certaines de ces réformes ont d'ailleurs été présentées comme les fleurons de la RGPP : ainsi, le rattachement de la gendarmerie à ce ministère et la réorganisation des directions régionales et départementales des administrations déconcentrées.

Mais pour le ministère de l'intérieur, la RGPP est à peu près aussi subtile qu'a pu l'être la planification soviétique, avec les mêmes résultats – accumulation de contradictions, goulets d'étranglement, poches de pénurie, missions non appliquées, voire abandonnées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Appliquons au ministère de l'intérieur les questions que chacun, et vous-même, monsieur le ministre, a posées.

L'État est-il plus efficace dans le domaine de l'administration territoriale ? Il est difficile de se prononcer déjà en toute honnêteté, puisque la réorganisation n'est pas parvenue à son terme. Je souhaite néanmoins vous interroger sur deux points. Il s'agit d'abord du pilotage du dispositif : il me semble grippé par l'incapacité à résoudre la contradiction permanente entre l'administration centrale et les échelons déconcentrés. Le fait que ce soit le secrétariat général du Gouvernement qui a la charge de cette réforme l'explique sans doute en partie. D'un côté, la logique ministérielle verticale s'appuie sur des programmes budgétaires, sous votre houlette, monsieur le ministre du budget, avec notamment la règle de non remplacement d'un fonctionnaire sur deux Parallèlement, une logique interministérielle horizontale s'applique au niveau des services déconcentrés, et c'est la mission interministérielle de réforme de l'administration territoriale, créée par le Premier ministre, qui bâtit ces équilibres. Les deux architectes ont des visions différentes, d'où des dysfonctionnements que l'on constate sur le terrain. J'ajoute que la dimension des ressources humaines me paraît avoir été totalement sous-estimée, puisque l'État employeur s'est montré sous son plus mauvais jour en refusant d'appliquer les règles qu'il impose aux entreprises, et notamment la stricte information. Bernard Derosier l'a très bien dit.

Ensuite, l'État est-il plus économe ? Là encore, si l'on regarde le ministère de l'intérieur, une étude de l'Inspection générale de l'administration a mis en lumière le fait que les gains étaient très limités au regard des mutualisations entreprises. Selon cette enquête, 21 % des projets réalisés n'ont procuré aucun gain financier et les économies hors dépenses de personnel, soit le titre II du budget du ministère, sont réalisées grâce à seulement 24 % des opérations menées. La Cour des comptes a souligné qu'au ministère de l'intérieur, la masse salariale avait augmenté en raison des mesures catégorielles, à savoir notamment le protocole « corps et carrières » qui concerne les personnels actifs de la police nationale. Dans son rapport de gestion sur le ministère de l'intérieur pour 2009, Gilles Carrez soulignait aussi la baisse continue et sensible des effectifs et l'envolée des dépenses de personnel.

Dans ces conditions, l'État a-t-il vraiment fait des économies au ministère de l'intérieur en appliquant la RGPP de manière aussi brutale ?

Enfin, l'État est-il plus proche des attentes des citoyens ? Dans l'administration territoriale, 2 107 emplois ont été supprimés et on est allé au-delà du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux, ce qui a aggravé la situation. Dans la police et la gendarmerie, 10 792 emplois ont disparu, ce qui n'est pas sans conséquence sur la qualité du service rendu à l'usager. Je ne reviens pas sur les chiffres de la délinquance, puisque le Premier ministre lui-même a dit que c'était un échec du Gouvernement. Mais s'agissant de l'administration territoriale, la sénatrice Michèle André a observé, dans un rapport sur la qualité du service rendu à l'usager, que pour la constitution du passeport biométrique, non seulement un agent passe plus de temps sur chaque dossier, mais le coût a augmenté de 35 %. Là encore, monsieur le ministre, l'État est-il plus près des citoyens, sans parler des économies ?

Il faut enfin déplorer que la RGPP ait dévoyé la démarche de la LOLF, qui était une démarche de performance, alors que vous n'avez appliqué qu'une règle strictement comptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cette semaine parlementaire de contrôle nous donne l'occasion de revenir sur ce qui est incontestablement l'un des chantiers majeurs de cette législature : la révision générale des politiques publiques.

La légitimité de la RGPP participe directement de celle de l'action de l'État, qui repose non seulement sur les finalités qu'il poursuit mais aussi sur l'adéquation des moyens qu'il met en oeuvre pour les atteindre. En ce sens, l'utilité de la RGPP et sa légitimité sont incontestables. Faut-il rappeler que, au fil du temps, dans bien des domaines, l'intervention de l'État était devenue illisible voire incompréhensible aux yeux des Français.

Tout d'abord, les missions se sont multipliées, sans que leur cohérence et leur nécessité soient toujours bien garanties. Ensuite, les structures de l'État chargées de les accomplir se sont ajoutées les unes aux autres dans une sédimentation administrative, et sont apparues parfois inadaptées faute d'avoir évolué au rythme des technologies et des besoins de nos concitoyens. Enfin, les dépenses publiques se sont accrues d'autant et le nombre de fonctionnaires a augmenté de 300 000 en trente ans, malgré de nombreux transferts de compétences liés à la décentralisation, tout cela sans que le service rendu à nos concitoyens en soit pour autant nécessairement meilleur.

Ces constats, couplés à l'état de nos finances publiques, justifiaient donc pleinement qu'en 2007 le Gouvernement engage l'État dans une véritable démarche de performance qui allait au-delà des audits de performance et des stratégies ministérielles de réformes déjà expérimentés.

Cette démarche a deux objectifs : améliorer le service rendu et, par la modernisation de l'État, réduire les dépenses publiques. Ces objectifs ne se contredisent pas ; ils sont bien les deux faces d'une même médaille, ils visent une meilleure efficacité au service de nos compatriotes. C'est la raison pour laquelle j'ai toujours soutenu la RGPP.

Des résultats concrets ont déjà été enregistrés. La possibilité pour les Français de réaliser 80 % de leurs démarches administratives en ligne, celle de signaler un changement d'adresse à toutes les administrations en une seule fois ou de remplir un formulaire unique pour demander un logement social peuvent paraître de bien modestes avancées ; elles n'en traduisent pas moins, concrètement, l'amélioration du service rendu.

Les structures aussi ont évolué, et cela est sans doute plus important encore. La fusion de la DGI et de la DGCP, jugée impossible depuis l'échec de 2001, a été réalisée. Même si cela a été douloureux, la carte judiciaire a été redessinée alors qu'elle était inchangée depuis cinquante ans. Les ASSEDIC et l'UNEDIC ont fusionné au sein de Pôle emploi malgré la résistance de ces organismes qui avaient trouvé le moyen de choisir des systèmes informatiques incompatibles pour préserver leur identité et leur indépendance.

Sur un plan financier, ces évolutions auront permis d'économiser 7 milliards d'euros à la fin de l'année 2001, avec l'objectif d'atteindre 15 milliards en 2013. Elles auront aussi permis de dégager des moyens humains et de faciliter ainsi la mise en place du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite. En 2012, 150 000 postes sont concernés, ce qui ramène le nombre des fonctionnaires au niveau moyen des années 1990, après la décentralisation.

Pour autant, monsieur le ministre, il faut encore faire progresser l'acceptabilité de la RGPP par les citoyens, les fonctionnaires de l'État et les élus locaux, au-delà de la présentation caricaturale qui en est faite parfois. Cela passe notamment par une meilleure concertation en amont, ce qui a déjà été dit sur tous les bancs.

Pour ma part, je veux m'attarder sur un point sur lequel la MILOLF, la mission d'information sur la mise en oeuvre de la LOLF, que j'ai l'honneur d'animer, a eu à se pencher à plusieurs reprises. Il s'agit de la coordination avec les autres politiques de mobilisation autour de la performance, pour la mise en oeuvre desquelles la RGPP a parfois pu être un élément perturbateur.

Ainsi, la réorganisation territoriale décidée dans le cadre de la RGPP a-t-elle pu priver l'État d'ingénierie publique en région. Elle a aussi retardé le déploiement de Chorus, le système d'information budgétaire, financière et comptable de l'État, les choix retenus en RGPP ne coïncidant pas avec ceux du schéma de déploiement initial. La MILOLF avait été amenée à demander à plusieurs reprises la mise en oeuvre d'une gouvernance de Chorus qui soit non seulement technique mais politique, afin d'assurer la cohérence et la coordination entre les deux approches. Il semble malheureusement que ce ne soit toujours pas le cas.

De façon plus fondamentale encore, l'articulation entre les mises en oeuvre de la LOLF et de la RGPP doit être mieux assurée, au risque de voir le « train » de la RGPP cacher celui de la LOLF. RGPP et LOLF constituent deux volets distincts, mais complémentaires et non concurrents, de la modernisation de l'État.

Là où la première vise la nature des missions de l'État, les structures qui les portent et l'amélioration du service rendu à nos concitoyens, la seconde, sur le plan qui nous intéresse ici, vise les moyens déployés et l'amélioration de la gestion des services publics, en responsabilisant les gestionnaires des budgets opérationnels de programmes, les BOP, et en leur confiant le soin de gérer eux-mêmes les moyens humains et financiers qui leur sont alloués.

Or, force est de constater que, loin d'être mise en oeuvre de façon coordonnée, « la modernisation de l'administration a été engagée le plus souvent sans lien véritable avec la LOLF ». Comme nous, la Cour des Comptes faisait ce constat il y a un an. En effet, de quelle marge de manoeuvre dispose le gestionnaire si la RGPP recentralise certaines décisions au sein des ministères ? Comment gérer réellement au niveau local des ressources humaines dans le contexte général du non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant en retraite, au regard, notamment, de la fongibilité asymétrique ? Comment, enfin, ne pas craindre que le dialogue de gestion se réduise à une procédure formelle, d'ailleurs concentrée sur le volet budgétaire au détriment du volet performance ?

Il doit donc s'agir, là aussi, de coordonner les deux approches, de telle sorte que l'on puisse répondre aux défis de la contrainte budgétaire inévitable et des indispensables réformes structurelles – c'est le volet RGPP – tout en continuant à faire de la LOLF le cadre de référence de la modernisation de la gestion de l'État.

Cela suppose en amont de mieux associer les responsables de programme à la définition et à la mise en oeuvre des mesures RGPP. Cela suppose aussi de conforter le rôle et la place des responsables de programme et des gestionnaires des BOP, clés de voûte du système. La LOLF n'est opérationnelle que s'ils conservent un réel pouvoir de redéploiement. Pour cela, l'interdiction du fléchage depuis le niveau central des crédits déconcentrés, demandée depuis plusieurs années par la MILOLF, doit être actée, et la fongibilité asymétrique et la gestion locale des crédits de personnel réellement promues.

C'est à cette condition, par son association étroite avec la LOLF, que la RGPP pourra donner toute sa mesure, produire tous ses résultats et être pleinement acceptées par les parlementaires qui soutiennent cette démarche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Yves Durand, dernier orateur inscrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Durand

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux vous parler de la grande victime de la RGPP : l'éducation nationale.

En effet, monsieur le ministre, au regard des deux objectifs de la RGPP que vous avez vous-même rappelé, moderniser l'État et faire des économies, l'éducation nationale est bien une grande victime.

Le non-remplacement, ou la suppression, d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite – mesure à laquelle se réduit finalement votre RGPP, disons-le clairement – permet d'économiser 250 millions d'euros. Autrement dit, il s'agit d'une économie infime si on la compare à ce que rapporterait la suppression d'un certain nombre de cadeaux fiscaux faits aux plus riches.

Pour l'éducation nationale, les économies ne sont donc pas au rendez-vous, mais c'est encore moins le cas de la modernisation des services de l'État.

Nous constatons, au contraire, une dégradation sans précédent du système éducatif. Les conséquences de ces évolutions ne sont pas uniquement quantitatives, contrairement à ce que nous assène inlassablement le ministre de l'éducation nationale – il a encore repris cette antienne, lors des questions au Gouvernement cet après-midi. Il nous accuse de ne parler que de moyens. Mais, derrière les moyens, il y a la réalité de l'éducation et la qualité du système éducatif. Permettez-moi de vous en donner quelques exemples.

Un récent rapport de l'OCDE a montré que, depuis que la majorité actuelle est au pouvoir, la France est en recul permanent en termes de taux d'encadrement des élèves par les enseignants. En la matière, notre pays connaît l'un des plus mauvais ratio de l'Europe occidentale, notamment au niveau de l'école élémentaire dont on sait pourtant qu'il s'agit de l'un des cycles scolaires les plus importants pour la réussite des élèves – tous les instituts de recherche l'ont démontré, en particulier l'Institut Montaigne dans un rapport qui fait désormais autorité.

M. le ministre de l'éducation nationale nous répète sans discontinuer qu'il veut défendre l'école maternelle et qu'il y est particulièrement attaché. Malgré cela, il a donné pour consigne aux recteurs d'académie de ne pas comptabiliser les élèves de deux ans scolarisés en école maternelle pour l'ouverture des classes – pour fermer les classes, en revanche, les comptes sont faits différemment ! Or toutes les enquêtes internationales – notamment la récente enquête PISA – ont montré que les pays qui réussissaient en matière éducative étaient ceux qui scolarisaient un grand nombre d'enfants de façon précoce.

Par ailleurs, la suppression de fait de l'école maternelle aura une conséquence claire : la garde des jeunes enfants reviendrait aux collectivités territoriales, en particulier aux communes. Encore un transfert de charges !

Conséquence de la suppression massive des moyens, je citerai enfin le problème qui provoquera sans doute la crise la plus grave dans les années à venir : la formation des maîtres. Elle est aujourd'hui sacrifiée du fait de la suppression des stages, réforme qui permet d'économiser entre cinq et six mille postes.

Cela a deux conséquences. D'abord, on envoie devant les élèves des enseignants qui ne sont armés ni pour assurer leurs tâches ni pour être véritablement les maîtres dans leur classe. Ensuite, nous constatons que, depuis cette réforme, les concours de l'enseignement sont de moins en moins attractifs ; les candidats sont de moins en moins nombreux et les meilleurs étudiants ne se dirigent plus vers l'éducation nationale, qui en a pourtant besoin.

Par vos économies de bouts de chandelle, vous organisez la crise du recrutement de l'éducation nationale pour les dix ans qui viennent. Peut-être est-ce là la plus grave des conséquences de vos choix en matière d'éducation.

Monsieur le ministre, pour l'éducation, votre RGPP est un non-sens ; votre politique de non-remplacement d'un enseignant sur deux partant à la retraite est un non-sens ; votre politique d'économies de bouts de chandelle est un non-sens.

L'éducation est un investissement beaucoup plus qu'un coût. Prenez le temps de calculer le coût de l'échec et du décrochage scolaires ; vous constaterez qu'il va bien au-delà des 250 millions d'économies que vous dégagez en ne remplaçant pas un enseignant sur deux qui part à la retraite ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Par respect pour la qualité de notre débat et pour répondre aux interventions des honorables parlementaires, je reprends la parole, même si je serai bref, compte tenu de l'heure avancée.

Je remercie Charles Amédée de Courson d'avoir défendu le bilan des réformes de la RGPP. Le soutien du groupe NC nous est évidemment précieux.

En ce qui concerne les économies faites grâce à la RGPP, je veux rappeler le coût d'un fonctionnaire à l'échelle de sa vie : 1,3 million d'euros. La suppression de 150 000 postes de fonctionnaires représente donc une économie de l'ordre de 200 milliards d'euros sur le long terme – car il ne faut jamais oublier d'intégrer le coût des agents retraités.

Je remercie aussi François Cornut-Gentille d'avoir rappelé que, sous l'égide du Président de la République et du Premier ministre, le Gouvernement avait engagé des réformes courageuses. Monsieur le député, j'ai transmis ce jour les chiffres qui m'ont été demandés ; mes services sont à votre disposition pour vous donner des réponses plus complètes.

Vous souhaitez que la RGPP ait une véritable dimension politique ; cela est effectivement souhaitable. Je vous rappelle que les conseils de modernisation des politiques publiques se sont réunis cinq fois en présence soit de Nicolas Sarkozy ou de François Fillon, soit de l'ensemble des ministres. Lors du dernier séminaire gouvernemental, chacun a d'ailleurs présenté le bilan partagé en la matière.

Monsieur Cazeneuve, s'agissant du volet social, nous sommes tout à fait conscients que les armées consentent un effort important. Toutefois, j'observe que l'Allemagne a annoncé une baisse de ses effectifs de 45 000 militaires, soit un chiffre similaire au nôtre, alors que son armée est deux fois moins importante. Quant aux recettes immobilières, nous avons affiché, pour 2011, un objectif raisonnable, de l'ordre de 400 millions d'euros, soit un montant équivalent à celui réalisé en 2010. Cette estimation me paraît acceptable, même pour vous.

Monsieur Sandrier, j'ai trop de respect pour les fonctionnaires pour penser que l'État est tentaculaire et inefficace. C'est en réformant que nous pourrons pérenniser la fonction publique et nos services publics. Regardons, encore une fois, les plans qui sont annoncés par nos partenaires européens : la Grande-Bretagne a prévu de supprimer – de mémoire – 500 000 postes de fonctionnaires au cours des quatre prochaines années,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Évidemment, si vous comparez avec la Grande-Bretagne !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…sur un nombre total d'agents au service de l'État – la contractualisation est différente – à peu près identique au nôtre.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Que je sache, monsieur Sandrier, la crise a frappé le Royaume-Uni comme elle a frappé la France. Vous le niez, comme si nous avions échappé à ce phénomène.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Mais comparez la situation de nos deux pays, et vous constaterez qu'en dépit de la crise, le plan français n'a rien à voir avec celui de nos voisins britanniques. Regardons vers le sud, si vous préférez : les gens sont un peu plus joyeux, il y fait plus beau. Eh bien, en Espagne, non seulement le plan décidé sous l'autorité du gouvernement Zapatero est de même nature, mais il comprend, de surcroît, une baisse des traitements des fonctionnaires de l'ordre de 5 % pour les années qui viennent – pas uniquement sur le prochain exercice. Intégrez dans votre analyse une comparaison des différents plans dits de rigueur et vous vous apercevrez que le plan français est en réalité un plan de modération.

Monsieur Diefenbacher, vous avez tout à fait raison, il faut promouvoir les résultats de la RGPP, en faisant de la pédagogie – évidemment, je compte, pour cela, davantage sur vous que sur M. Paul ou M. Sandrier. (Sourires.) La pédagogie étant l'art de la répétition, nous devons sans cesse mettre en valeur ces résultats, en nous appuyant sur des éléments objectifs. Je pense au baromètre des services publics, à l'évolution de l'utilisation des technologies, que j'évoquais tout à l'heure, voire aux accords que nous avons conclus avec les partenaires sociaux. À ce propos, on peut dire ce que l'on veut, le dialogue social s'est poursuivi, l'administration s'est modernisée et les agents ont obtenu plus qu'ils n'avaient auparavant, même s'ils sont moins nombreux.

Monsieur Derosier, vous m'incitez à accentuer le dialogue social, et je vous en remercie : je m'efforcerai de progresser. (Sourires.) Il s'agit d'une véritable préoccupation, comme en témoigne l'accord récemment signé – je n'y reviens pas : je vous renvoie au texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Derosier

Il porte sur un sujet très précis, qui n'a rien à voir avec la RGPP !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Il porte sur la précarité, a été signé par six syndicats sur huit et concerne 800 000 fonctionnaires.

J'ai récemment réuni la Commission de modernisation des services publics, au sein de laquelle siègent les organisations syndicales et les représentants des usagers du service public, pour évoquer le dernier rapport d'étape, et je le ferai à nouveau avant le 30 juin, afin que nous améliorions ensemble le dispositif.

Monsieur Morel-A-L'Huissier, vous avez raison, il faut tenir compte des spécificités des territoires, en particulier des communes rurales. C'est pourquoi le Gouvernement, qui sera toujours à l'écoute, favorise le développement des relais de service public, qui permettent de préserver les services publics dans les territoires, et la signature des contrats d'avenir avec les buralistes. Je vous précise, à ce sujet, que nous avons ouvert des négociations portant sur un nouveau contrat d'avenir pour une période d'au moins quatre ans, qui devrait permettre, là aussi, de maintenir une activité dans des zones où la densité de population n'est absolument pas la même que dans les zones urbaines.

Monsieur Urvoas, vous vous intéressez, comme chacun sait, aux problématiques qui concernent la place Beauvau. En l'espèce, vous vous êtes interrogé sur la pertinence de l'application de la RGPP en termes d'efficacité des services publics et des missions rendues. Permettez-moi de vous citer un exemple, et je me tiens à votre disposition si vous souhaitez que nous approfondissions ce sujet : le délai de délivrance du passeport biométrique est passé de douze à sept jours. Cela signifie qu'économies et qualité de service peuvent aller de pair. Pour le reste, nous avons des désaccords sur l'évolution des effectifs et la redistribution de la bonification indiciaire liée aux économies réalisées, mais nous poursuivrons ce débat dans les mois à venir.

Quant à M. Bouvard, qui a eu l'amabilité de me dire qu'il devait s'absenter, je lui répondrai par écrit. Néanmoins, je veux le remercier de mettre en valeur non seulement l'esprit, mais aussi la méthode et les résultats de la réforme, puisqu'il a été très attentif aux indicateurs de la RGPP, comme il l'avait été à ceux de la LOLF. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion de la proposition de loi modifiant la loi n° 2009-879 portant réforme de l'hôpital.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma