Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 22 janvier 2008 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • ANPE
  • ASSEDIC
  • demandeur
  • fusion
  • maison

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Axel Poniatowski, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Axel Poniatowski

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.

La commission d'enquête sur les conditions de libération des infirmières et du médecin bulgares détenus en Libye et sur les récents accords franco-libyens, constituée en octobre dernier, a adopté son rapport ce matin. J'en profite pour renouveler aux infirmières bulgares toute notre sympathie et notre compassion pour les terribles épreuves, physiques et morales, qu'elles ont endurées pendant plus de huit ans, et je les salue, car elles sont aujourd'hui dans les tribunes de l'Assemblée nationale. (Mesdames et messieurs les députés et les membres du Gouvernement se lèvent, se tournent vers les tribunes du public et applaudissent longuement.)

Elles avaient été injustement condamnées et leur libération a été – nous l'avons montré – le résultat des efforts constants de l'Union européenne, notamment de sa commissaire chargée des relations extérieures, Mme Ferrero-Waldner, et de l'engagement du Président de la République, Nicolas Sarkozy, qui a fait de la défense des droits de l'homme une de ses priorités. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Cet heureux dénouement, dont nous pouvons tous être fiers, a pourtant suscité des interrogations et inquiétudes. En travaillant dans la plus grande transparence, la commission d'enquête a démontré avec certitude que les contrats d'armement signés en août dernier n'ont pas constitué une contrepartie à la libération des soignants.

Cette libération était en revanche la condition sine qua non posée par le chef de l'État pour relancer notre coopération avec la Libye et l'aider à poursuivre sa réintégration progressive au sein de la communauté internationale – certains diront même sa rédemption. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Monsieur le ministre, alors que la Libye préside actuellement, et jusqu'à la fin du mois, le Conseil de sécurité des Nations unies, pouvez-vous faire le point sur l'état et les perspectives d'évolution de nos relations avec ce pays, six mois après que les infirmières bulgares ont été libérées ? Sans l'intervention de la France, au lieu de nous regarder du haut de ce balcon, probablement seraient-elles toujours prisonnières. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Monsieur le président, monsieur Poniatowski, mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement s'associe à vos salutations chaleureuses et à la compassion que vous avez exprimée pour les épreuves qu'ont vécues les infirmières et le médecin bulgares pendant toutes ces années.

Il se trouve que, aujourd'hui, la commission d'enquête sur ce dossier a rendu un rapport édifiant, qui prouve le rôle déterminant joué par la France pour la libération des soignants bulgares, avec le soutien de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Il montre également, de manière claire et nette, qu'il n'y a pas eu de contreparties financières à la libération des soignants : il est important que cela aussi soit aujourd'hui établi.

En même temps que les infirmières nous ont remerciés, elles ont souhaité que nous soyons à leurs côtés, avec l'Union européenne, et qu'elles bénéficient elles aussi d'un soutien, à l'image de celui que l'Union a apporté aux enfants victimes du sida en Libye. Naturellement, avec Bernard Kouchner et l'Union européenne, nous apporterons ce soutien.

Enfin, il faut aborder la question des relations avec la Libye. Comme vous l'avez dit, c'est parce que la Libye a renoncé au terrorisme, parce qu'elle a renoncé à la fabrication d'armes de destruction massive…

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

…parce que, lors du voyage du président Kadhafi en France, elle a condamné de manière explicite les attentats en Algérie, que ce pays est aujourd'hui réintroduit dans le dialogue international… (Exclamations continues sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

…non seulement avec les nations européennes, mais avec d'autres grandes nations du monde. C'est parce qu'il y a eu ce dialogue et parce que les infirmières ont été libérées, que la visite du colonel Kadhafi en France a été possible. (« Menteur ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Et c'est parce qu'il y a eu cette visite et parce que ce dialogue a été amorcé, y compris au niveau des Nations unies, que nous pouvons aujourd'hui, avec le soutien de l'Union européenne, exiger de la Libye une réhabilitation totale et complète des soignants, car elle est évidemment méritée, comme la commission d'enquête l'a établi. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Hollande, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Monsieur le président, mes chers collègues, je m'associe à mon tour à l'hommage qui a été rendu par le président Poniatowski aux infirmières bulgares, mais je condamne le régime qui les a détenues pendant huit ans et leur a fait supporter des violences et brutalités indignes des rapports entre États. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicain, et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Vives protestations sur les autres bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Tenez-vous correctement : c'est la meilleure image que vous puissiez donner aux infirmières bulgares !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, donnons l'image de la démocratie que nous sommes !

Monsieur Hollande, vous avez la parole.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Je vous remercie, monsieur le président : je vais la reprendre tranquillement.

Ma question s'adresse au Gouvernement et, en l'absence du Premier ministre, je demande que quelqu'un me réponde. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les turbulences boursières qui affectent l'économie mondiale ne sont pas un simple mouvement d'humeur des marchés : elles révèlent une crise profonde, qui touche l'ensemble du financement de l'économie, et pas simplement de l'économie américaine. Nous l'avions dit en août dernier, au moment de la crise des subprimes : vous avez, madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, construit un budget pour 2008 qui, déjà, ne tenait pas compte des inquiétudes qui pouvaient naître à la suite de cette crise.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Vous avez bâti des paramètres, des hypothèses, qui étaient déjà décalés par rapport à la réalité de l'économie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Au milieu de l'année 2007, vous annonciez une croissance de 2,5 % : elle sera d'à peine 1,5 %.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

L'inflation ne devait pas dépasser 1,6 % : elle sera de 3 %. Les déficits budgétaires devaient être maîtrisés : ils ne le seront pas. Le déficit du commerce extérieur devait être inférieur à 30 milliards d'euros : on annonce déjà 40 milliards. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avec l'onde de choc qui traverse l'économie mondiale, avec la crise boursière, comment vos hypothèses pourraient-elles encore être valides ?

Ma question sera simple…

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Dès lors que toutes les hypothèses de croissance, fondements sur lesquels vous aviez bâti votre budget, sont infirmées, dès lors que l'inflation dans notre pays atteint déjà le double de ce que vous annonciez, dès lors que rien ne tient dans vos prévisions (« Ça suffit ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), je demande qu'un débat soit organisé à l'Assemblée nationale (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), à la fois sur la réalité de l'économie française et sur l'ajustement que vous préparez. (« Arrêtez-le ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Le rapport Attali – dont vous avez dit que vous le reprendriez en totalité – préconise une augmentation de la TVA de 1,6 % et une augmentation de la CSG. Les Français veulent savoir. (Vives exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Un débat doit être organisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. – Protestations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) S'il n'a pas lieu avant les élections municipales, c'est qu'un plan de rigueur se prépare. Nous avons le droit d'en connaître la teneur ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine. – Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Hollande, dans une situation économique internationale caractérisée par de brutales corrections sur les marchés, deux réponses s'imposent : le sang-froid et l'esprit d'équipe. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

En effet, des corrections brutales sont intervenues, en Asie d'abord, puis sur un certain nombre de marchés européens, au moment où le président Bush présentait un plan de relance de l'économie mobilisant 145 milliards de dollars, mais dont les modalités de mise en oeuvre restent empreintes d'un certain flou.

Debut de section - PermalienPhoto de François Hollande

Autrement dit, c'est la faute à Bush maintenant…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

La France, elle, a pris, plus tôt, diverses précautions et nous sommes plutôt bien placés pour relancer la machine économique, ne serait-ce que sur le marché intérieur.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Il ne faut pas se laisser gagner par un pessimisme qui tient essentiellement à l'analyse comparée de deux marchés.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Nous avons, d'un côté, le marché américain et, de l'autre, le marché européen. Le marché américain se présente sous un angle très différent.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Ainsi, en France et, plus généralement, en Europe, l'immobilier tient, alors que, aux États-Unis, le marché immobilier n'est pas en bonne situation. De même, lorsque l'on compare la situation des ménages français et celle des ménages américains, on s'aperçoit que les seconds sont largement endettés, et à des taux variables, ce qui n'est pas le cas en France.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Mais le plus important, c'est la situation de nos économies. Un critère fondamental nous distingue des Américains, nous les Européens, nous les Français : nos économies sont créatrices d'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

En 2007, 312 000 emplois et plus de 320 000 entreprises ont été créés.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Ces chiffres sont la traduction d'une activité économique. C'est cela qui est fondamental, et non l'écume des jours. Ce n'est pas le mouvement boursier au quotidien qui guide notre effort. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

La deuxième réponse, c'est l'esprit d'équipe : c'est entre Européens que nous examinons les situations, que nous confrontons nos analyses et que nous proposons des solutions. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Et le débat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Monsieur le présidnet, je tiens tout d'abord à saluer, au nom du groupe de la gauche démocrate et républicaine, le courage et le combat des infirmières bulgares pour la liberté. Merci à elles.

La crise financière qui secoue le monde est l'illustration parfaite d'un système qui a pour objectif premier non pas de satisfaire les besoins de l'humanité mais de spéculer et de pousser la rentabilité du travail jusqu'à l'overdose.

L'existence, dans les grands pays, d'actifs financiers qui représentent trois fois leur produit intérieur brut est une véritable gangrène pour l'économie et la société.

La situation actuelle n'est autre que le résultat d'une politique qui, en vingt ans, a vu la part des salaires baisser de dix points dans la richesse nationale, pendant que celle des profits financiers augmentait d'autant. En France, cela représente un détournement de 180 milliards d'euros en faveur des marchés financiers, soit quatorze fois le déficit de la sécurité sociale, ou trente-cinq fois le déficit actuel du régime général des retraites !

Un tel transfert ne peut que creuser les inégalités. Il y a dix ans, les 500 plus grosses fortunes de France possédaient 6 % du produit intérieur brut. Aujourd'hui, elles en possèdent 15 % !

Comme si cela ne suffisait pas, le Gouvernement a inventé les franchises médicales. Celles-ci toucheront d'abord les personnes âgées, les handicapés et les malades et devraient rapporter 800 millions d'euros, soit exactement le montant du cadeau que vous faites en 2008 aux riches qui paient l'impôt sur la fortune !

On voit aussi l'extraordinaire inconséquence qu'il y a à vouloir s'en remettre aux assurances privées, aux fonds de pension pour financer les retraites, le logement et l'investissement productif. Vous allez à nouveau faire payer les errements d'une gestion financière privée par les salariés, privés du fruit de leur travail.

Il est urgent de modifier l'utilisation de l'argent pour le rendre utile aux salariés mais aussi aux PME. Pour cela, il faut augmenter les salaires, annuler les franchises médicales, baisser la TVA sur les produits de première nécessité, orienter le crédit pour la recherche, la création d'emploi, l'investissement public et privé. Et pour cela, il faut contrôler les banques, à commencer par la Banque centrale européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Allez-vous arrêter cette fuite en avant d'une politique qui est en train de conduire le monde et la France dans le mur ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Monsieur Roy, pensez aux oreilles de vos voisins. (Sourires.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député, je voudrais vous répondre sur deux plans.

Sur le plan international,vous avez raison, nous évoluons dans un monde qui change, avec des équilibres qui se modifient, des acteurs nouveaux et surtout des pays émergents qui ont un besoin impératif de développement.

Je voudrais à ce propos souligner une initiative du Président de la République, que nous soutenons dans toutes les instances possibles : c'est celle qui vise à améliorer la représentation des pays émergents et des pays les moins représentés dans des instances telles que le FMI, la Banque mondiale ou l'Organisation mondiale du commerce.

Cette représentation est indispensable. J'étais ce matin même à l'ECOFIN à écouter M. Dominique Strauss-Kahn, le directeur général du Fonds monétaire international ; je puis vous assurer qu'il se fera l'apôtre de cette volonté.

Je vous répondrai ensuite sur le plan national. Je crois que vous êtes tout à fait d'accord avec ce que nous faisons.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Vous avez mentionné le développement, la recherche, l'innovation. Or qu'avons-nous fait ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Nous avons mis en place depuis le 1er janvier 2008 un crédit impôt-recherche qui place la France non seulement dans le peloton de tête mais en tête de tous les pays dans le monde pour encourager la recherche et le développement. Un crédit impôt-recherche à 50 % la première année, vous ne trouvez ça nulle part ailleurs.

S'agissant des relations sociales, alors qu'aucun accord n'était intervenu depuis très longtemps, l'accord du 11 janvier entre l'ensemble des partenaires sociaux…

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Pas l'ensemble ! Pourquoi dites-vous « l'ensemble » ? Ce n'est pas vrai !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…et que Xavier Bertrand va pouvoir mettre en oeuvre dans la loi, est un accord qui porte sur des dispositions aussi fondamentales que le contrat de travail, la rupture du contrat de travail et les relations dans l'entreprise.

Nous sommes vraiment entrés dans une nouvelle ère, à la fois par ce que nous souhaitons faire au niveau international et par la manière dont nous voulons, dans notre pays, libérer toutes les forces, au service d'une croissance plus forte et d'une lutte plus efficace contre le chômage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, le Gouvernement a pris de nombreuses initiatives pour soutenir le pouvoir d'achat des salariés et le groupe Nouveau Centre a soutenu ces efforts. Se pose toutefois la question du pouvoir d'achat des retraites.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

En application des règles existantes, la revalorisation de ces dernières ne sera en effet que de 1,1 % en 2008, alors que l'inflation a été de 1,6 % en 2007 et qu'elle atteindra probablement plus en 2008 – on parle de 2,6 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

De nombreux retraités connaissent une baisse de leur pouvoir d'achat, et la situation est d'autant plus difficile pour ceux qui bénéficient de petites retraites. Certains en sont même réduits à devoir économiser sur le chauffage et l'alimentation.

Pourtant, lors des dernières élections, la majorité présidentielle avait pris deux engagements : maintenir le pouvoir d'achat des retraités et porter, d'ici à 2012, le minimum vieillesse à 75 % du SMIC net, en le faisant passer de 621 euros par mois actuellement à 754 euros.

Le groupe Nouveau Centre, conscient des graves difficultés financières des régimes de retraite et, plus largement, des finances publiques dans un contexte économique international incertain, a fait des propositions d'économies sur les dépenses, notamment en matière de niches fiscales et d'exonérations de charges sociales, pour financer des dépenses nouvelles.

Ma question, monsieur le ministre, est double : quel calendrier le Gouvernement envisage-t-il pour revaloriser le minimum vieillesse afin de le porter à 75 % du SMIC net ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le Gouvernement est-il favorable à un coup de pouce pour les retraites afin de maintenir leur pouvoir d'achat en 2008 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre et du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur le député, nous devons agir également pour celles et ceux qui ne peuvent pas ou qui ne peuvent plus travailler, c'est-à-dire les retraités. Tous les engagements qui ont été pris seront tenus.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Oui, le minimum vieillesse sera revalorisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Je comprends que certains soient étonnés que les engagements pris pendant les campagnes puissent être tenus : cela les change ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

Je serai le Président du pouvoir d'achat, qu'il disait !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Nous tiendrons également les engagements pris concernant les pensions de réversion parce que nous savons pertinemment que les retraités aujourd'hui qui ont le plus de problèmes de pouvoir d'achat, qui sont largement au-dessous du seuil de pauvreté, ce sont les femmes seules et âgées qui vivent avec leur seule pension de réversion.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Notre ambition est d'agir également et principalement sur les pensions de réversion. Leur niveau actuel de 54 % est trop faible.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Quand allons-nous en parler ? À l'occasion du rendez-vous des retraites, c'est-à-dire dès cette année. Nous allons en parler avec les partenaires sociaux mais aussi avec la représentation nationale, les députés comme les sénateurs.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Par ailleurs, nous avons toutes et tous l'obligation, depuis la loi de 2003 portant réforme des retraites, de garantir le pouvoir d'achat des retraités. Le problème, c'est que ce dernier s'apprécie tous les trois ans ; or il n'est pas question d'attendre trois ans pour savoir si le pouvoir d'achat des retraités a bien été garanti. (Applaudissements sur les bancs du groupe Nouveau Centre. – « Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Certes, nous avons constaté qu'en 2004, 2005 et 2006, le pouvoir d'achat avait été garanti – ce n'est pas moi qui le dis, ce sont les partenaires sociaux lors de la réunion de la commission de garantie des retraites – mais ce qui intéresse chacun, c'est l'avenir, c'est 2008. Or, compte tenu des chiffres de l'inflation qui se profilent, il faudra vraisemblablement aller au-delà de l'augmentation de 1,1 %. Mais, comme il l'a toujours indiqué, le Gouvernement n'attendra pas le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 pour prendre ses responsabilités.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

En effet, vous le savez, nous avons vis-à-vis des retraités, une responsabilité légale, sociale mais aussi morale. Nous voulons garantir le pouvoir d'achat des retraités, et nous le ferons, je peux vous l'assurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Je vais finir par être partisan des sondages, avec ce Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Yves Censi, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

Madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, ma question concerne également la crise boursière, que je voudrais aborder de façon plus objective et moins dogmatique que nos collègues communistes et socialistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

Mais puisque qu'elle dit que tout va très bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

Madame la ministre, cela fait maintenant plusieurs mois que les marchés mondiaux connaissent une fébrilité certaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

La confiance nécessaire entre les différents acteurs de la planète Finance pour une régulation sereine des marchés ne fait que se dégrader depuis la crise dite des subprimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

À cela vient s'ajouter la crainte de récession aux États-Unis, vous l'avez dit, et surtout sa prolifération sur l'ensemble des économies dont la nôtre.

Hier, Wall Street fermée, nous avons pu observer sur l'ensemble des autres places financières de notre planète des chutes de cours importantes, à Paris même une chute de 7 % de l'indice CAC 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

C'est la plus forte baisse enregistrée depuis le 11 septembre 2001.

Madame la ministre, vous nous avez fait part de votre analyse de la situation. Il nous importe aussi de savoir si cette conjonction de perte de confiance à la fois sur le marché financier et sur l'économie dite réelle ne risque pas d'avoir un impact important sur la croissance et l'emploi en France dans les mois à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

Madame la ministre, au-delà des mesures que nous avons votées et que vous avez prises en juillet, et qui fort heureusement ont anticipé la nécessaire consolidation de notre économie, quelle réponse le Gouvernement entend-il apporter à ces risques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député, je voudrais d'abord revenir sur les corrections brutales intervenues sur les marchés financiers.

Nous avons assisté hier à une baisse du CAC 40 de 6,84 %, soyons précis, et non de 7 %. Il est bon de rappeler toutefois que la personne qui a investi sur le marché boursier depuis cinq ans dans le CAC 40 a réalisé une plus-value de 57 % ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Il faut donc relativiser les choses et surtout ne pas se laisser guider par les modifications et les fluctuations d'un jour.

Deuxièmement, le Gouvernement français a anticipé et a proposé, à juste titre, à votre assemblée et au Sénat le vote, dès l'été 2007, d'un texte qui permet en particulier de remettre le travail au coeur de l'économie et par conséquent de se caler sur nos fondamentaux.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Ces dispositions ont permis de développer les heures supplémentaires – au 30 novembre, plus de 50 % des entreprises avaient eu recours au mécanisme. Elles ont permis également de réinjecter du pouvoir d'achat dans l'économie.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Cela représentera 6 milliards d'euros pour l'année 2008.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

C'est une bonne chose que le dispositif ait été adopté et qu'il soit en vigueur dès l'année 2008.

Enfin, la France ne reste pas inactive non plus à l'extérieur. Avec nos collègues européens, nous avons sollicité, à l'initiative dès le mois d'août dernier du Président de la République, Nicolas Sarkozy (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.), l'ensemble des pays du G7.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Nous demandons deux choses : une plus grande transparence des instruments financiers et la publication, par les institutions financières, de l'ensemble de la valeur de leurs actifs, pour renforcer le climat de confiance nécessaire à l'activité économique.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

C'est exactement ce dont nous avons convenus hier lors de la réunion de l'Eurogroupe et nous continuerons sur cette ligne, nous y sommes déterminés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Claude Greff, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Greff

Ma question s'adresse à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Greff

Monsieur le haut-commissaire, les communautés Emmaüs existent depuis 1949 et respectent les mêmes principes que ceux établis par l'abbé Pierre lors de la création de sa première communauté. Les compagnons vivent de leur travail sans être pour autant salariés et c'est grâce à leurs actions qu'ils retrouvent leur dignité et le sens de leur vie dans notre société.

Nous connaissons tous dans nos territoires la valeur de ces communautés et l'intérêt qu'elles représentent sur le plan tout à la fois de l'insertion et de la protection de l'environnement par la collecte, le recyclage et la revalorisation des produits ainsi collectés.

En hommage à l'abbé Pierre,…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Greff

…en ce jour anniversaire de sa mort, il me semble important que nous puissions reconnaître unanimement le travail réalisé par ces structures.

Depuis très longtemps, les communautés d'Emmaüs réclament la mise en place d'un véritable statut permettant de sacraliser un modèle économique et social qui leur a permis, à elles et aux hommes qui les animent, de trouver toute leur place en donnant du sens au mot insertion.

Monsieur le haut-commissaire, tout récemment encore, les communautés Emmaüs d'Indre-et-Loire et plus particulièrement celle de ma circonscription (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine), animée par plus de cent sympathisants bénévoles et soixante-dix compagnons, m'ont fait part de leurs préoccupations à ce sujet. Eh oui, chers collègues, je suis très attentive à la vie des communautés Emmaüs !

Je sais qu'en plein accord avec M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité, vous vous êtes saisi de cette question. Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est et ce qu'un tel groupe de travail pourra apporter au mouvement ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté

Madame Greff, je connais bien le responsable de la communauté Emmaüs à Esvres-sur-Indre. Vice-président du mouvement, il fait partie de ceux qui se sont battus aux côtés de l'abbé Pierre pour que le statut des compagnons d'Emmaüs soit enfin officiellement reconnu.

En 1949, l'Abbé Pierre a créé la première communauté Emmaüs en demandant à des personnes de l'aider dans son activité de récupération, pour ne dépendre ni de la charité ni des aides sociales. Aujourd'hui, il existe 115 communautés en France dans lesquelles passent chaque année 8 000 compagnons. Je suis allé moi-même, avec l'abbé Pierre, voir plusieurs Premiers ministres, au cours des dernières années, pour demander un statut. L'obtenir n'est pas facile, car il faut à la fois respecter la liberté des communautés Emmaüs et s'inscrire dans le droit commun pour ne pas enfermer les personnes dans leur statut. (« Et alors ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

En 1998, nous avions réussi à faire admettre le principe d'un droit à la retraite pour les périodes passées dans une communauté Emmaüs. Il faut maintenant passer à l'étape suivante. C'est pourquoi, Xavier Bertrand et moi-même avons pris hier, devant le président d'Emmaüs France, l'engagement solennel d'apporter enfin une réponse satisfaisante pour que les compagnons d'Emmaüs puissent envisager sereinement les années qui viennent.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté

On a trop souvent trouvé des raisons pour ne rien faire. Nous ne savons pas encore si la solution sera réglementaire ou législative. Elle devra en tout cas recueillir le consensus du mouvement Emmaüs. Et nous espérons, s'il faut revenir devant le Parlement, qu'elle fera consensus ici aussi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Louis Touraine, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Touraine

Monsieur le président, chers collègues, permettez-moi d'abord de rappeler la question de M. Hollande : pouvons-nous avoir à l'Assemblée nationale un débat sur l'inquiétante situation financière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Madame la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, en 1945, le Conseil national de la Résistance a créé la sécurité sociale, bel ouvrage de solidarité nationale qui a permis à la France de se hisser au rang de premier pays du monde en termes de santé pour tous à la fin du XXe siècle. Ce système est mis à mal par vos diverses mesures dont la plus emblématique est l'instauration de taxes pour les malades, ce que vous appelez des franchises médicales. C'en est fini du beau principe de la cotisation de chacun en fonction de ses moyens et du bénéfice pour tous en fonction de leurs besoins ! Certes, vous gardez le nom de « sécurité sociale », mais vous le videz de son sens en transférant vers l'assurance privée une grande partie de ses activités. C'est ce que j'appelle l'apoptose de la sécurité sociale (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), sa mort programmée.

Les franchises médicales imposées aux malades porteront un rude coup au pouvoir d'achat des classes moyennes et basses, des malades chroniques et des personnes âgées. Elles s'ajoutent de façon choquante aux déremboursements de plus en plus nombreux, lesquels ne concernent plus les seuls médicaments dits de confort. Les franchises médicales vont également dissuader nombre de patients de se faire soigner précocement et efficacement. Certains d'entre eux, dont des malades du sida, des diabétiques et des insuffisants rénaux, ont entrepris une grève des soins ce qui comporte, bien sûr, des risques importants, pour eux et pour la santé publique. Ces patients se sentent pénalisés, rejetés, ou encore, comme ils le disent eux-mêmes, « coupables d'être malades ». Face à ce drame, vos réponses apparaissent en décalage, sans compassion ni empathie. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Touraine

La réponse apportée par écrit par le Président de la République est en outre fausse, traduisant la méconnaissance par M. Sarkozy des lois qu'il a suscitées. Non, les franchises médicales ne peuvent pas être prises en charge par des organismes complémentaires et ne peuvent pas être remboursées !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Touraine

La plupart des malades n'ont d'autre solution, pour éviter de payer, que de renoncer aux soins. (« La question ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous avons formulé des propositions, madame la ministre, mais vous êtes restée autiste…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vous remercie.

La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Monsieur Touraine, je veux rappeler que notre système d'assurance maladie assure une solidarité parmi les plus élevées du monde. Nous sommes en effet l'un des trois pays qui garantissent le meilleur remboursement des dépenses maladies : pratiquement 80 % de ces dépenses sont prises en charge par l'assurance maladie.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

En ce qui concerne les franchises médicales, qui servent à financer de nouveaux besoins de santé, quinze millions de nos concitoyens les plus fragiles, dont les revenus sont les plus faibles, en sont exonérés.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Vous avez appelé mon attention sur quatre personnes qui ont décidé de faire une grève des soins. L'une d'elles a déjà repris ses soins. J'en ai reçu une autre, pour lui dire mon inquiétude et la convaincre de l'importance de mettre un terme à sa grève.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Des dispositifs sont à l'oeuvre pour les malades qui auraient des difficultés à suivre des soins. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) En effet, le Fonds national d'action sociale et sanitaire de l'assurance maladie, doté de 224 millions d'euros pour 2008, permet de financer des actions programmées et d'apporter des soutiens individuels soit en remboursements de prestations, soit par des aides en argent. Les dossiers sont instruits extrêmement rapidement soit par les caisses primaires, soit par les associations.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Le débat sur ces questions, dans une démocratie, doit se passer dans la confrontation des arguments et ne saurait en aucun cas relever de la violence faite aux personnes, y compris à soi-même ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je vous rappelle, mes chers collègues, que vous disposez de deux minutes et demie pour poser vos questions. Quant à ceux qui crient, et je m'adresse en particulier à M. Roy, je considère que c'est regrettable pour l'image de notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Briand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Briand

Ma question, à laquelle j'associe Lucien Degauchy, éminent député (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), s'adresse à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Moins de cinq mois après son installation, le 30 août 2007, la commission pour la libération de la croissance française, présidée par Jacques Attali, doit remettre, demain, à M. le Président de la République, le résultat de ses travaux : 314 propositions déclinées autour de huit ambitions et vingt mesures jugées fondamentales.

Pour avoir une vision globale et réelle de notre société, M. Attali s'était entouré de quarante-deux personnes : des présidents de grandes entreprises, des Européens de premier plan, des acteurs de la lutte contre les discriminations, des patrons de PME, des économistes, ainsi que des journalistes, observateurs attentifs de nos sociétés. Je tiens à souligner combien la démarche de la commission est audacieuse et courageuse. Comme le disait Hervé de Charrette ce matin, on se rend compte que « la commission a rouvert la très grande bibliothèque des rapports inappliqués ». (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

À la veille d'une période majeure pour notre pays, nous nous devons de continuer à mettre sur pied les réformes nécessaires et souhaitées par les Français. Ce rapport est le lancement d'une véritable force réformatrice. Nous en avons vu les grandes lignes dans la presse. Madame la ministre, pouvez-nous en parler et nous dire quelles vont être les modalités de ce rapport ? Comment reviendra-t-il notamment devant le Parlement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député Briand, il m'avait semblé que la commission Attali, compte tenu de son éminente direction et de son excellente composition, aurait pu faire l'unanimité et nous garantir un silence absolu !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

L'objectif de cette commission, que l'on retrouve dans son titre – la libération de la croissance en France –, est aussi le nôtre : c'est ce que le Gouvernement s'acharne déjà à faire et ce qu'il continuera à faire en poursuivant les réformes engagées.

Bien qu'il ait déjà été largement commenté par la presse, le rapport ne sera remis que demain au Président de la République. Vous comprendrez donc que je lui réserve la primeur de mes commentaires. Ayant lu la presse attentivement, je peux néanmoins vous dire deux choses.

D'une part, en ce qui concerne la méthode, la commission Attali a travaillé en étroite collaboration avec mes services. L'inspection générale des finances en particulier s'est tenue à sa disposition.

D'autre part, j'observe que nous avons déjà mis en oeuvre un certain nombre des conclusions de la commission, qu'il s'agisse de la libération du travail, de la modification de la loi Galland ou du développement de la concurrence.

Il y a bien sûr d'autres propositions, que le Gouvernement, sous l'autorité de François Fillon, s'efforcera de mettre en oeuvre dans un esprit de concertation avec l'ensemble des acteurs, et en particulier les parlementaires, qu'il privilégie depuis sept mois. Nous souhaitons réformer la France pour libérer la croissance selon les prescriptions de ce rapport. C'est le Président de la République qui recevra celui-ci. Le Gouvernement formulera des propositions et c'est votre assemblée qui en examinera le contenu. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Philippe Vitel, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

Ma question s'adresse également à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Madame la ministre, la promotion de notre commerce extérieur constitue plus que jamais un formidable défi pour notre économie. En 2007, les entreprises françaises ont montré un fort dynamisme à l'international. Cela a permis une croissance importante de nos exportations. (Exclamations et rires sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.) Cette très bonne nouvelle doit nous encourager à accentuer nos efforts et à soutenir sans relâche nos entreprises innovantes qui s'engagent à l'international, en nous donnant comme objectif majeur que le solde de notre commerce extérieur redevienne positif le plus rapidement possible. (Mêmes mouvements.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vitel

En ce sens, les mesures que vous avez annoncées le 17 janvier aux côtés de votre excellent collègue Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur, nous semblent aller la bonne direction.

Pouvez-vous informer la représentation nationale des nouveautés de ce dispositif, notamment en ce qui concerne le futur périmètre d'intervention d'OSEO, des nouveaux objectifs fixés à cette institution, ainsi que de la modernisation et de la simplification de l'assurance prospection, dont l'État vient de confier la gestion à la Compagnie française d'assurance du commerce extérieur, plus communément appelée la COFACE ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député, je vous prie d'excuser l'absence de M. Novelli, qui se trouve actuellement en Suède (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), plus précisément à Stockholm, afin précisément de promouvoir le commerce extérieur français et de défendre nos entreprises exportatrices.

Vous avez raison de dire que le commerce extérieur est, en France, une donnée importante ; c'est même un des trois moteurs de l'économie française. Mais il présente aujourd'hui un déficit lié, pour les trois quarts, aux lignes importation et exportation d'énergie.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Non, c'est vrai. Les trois-quarts du déficit se concentrent sur les lignes énergétiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Bacquet

Je maintiens que c'est faux ! M. Novelli a affirmé l'inverse devant la commission et vous l'avez approuvé !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Vous m'interrogez sur la réforme de certains mécanismes.

En ce qui concerne les instruments, deux types de réforme sont intervenus, que j'ai annoncés le 17 janvier avec M. Novelli.

La première concerne les outils commercialisés par la COFACE, qui gère, pour le compte de l'État, ceux qui encouragent le commerce extérieur. Nous souhaitons ainsi simplifier l'assurance prospection, pour ce qui est de l'accès et de la liquidation des dossiers, dès lors que la prospection a abouti. Par ailleurs, nous prévoyons une procédure spécifique pour les entreprises innovantes. À cet égard, une expérience pilote sera menée avec le Génopole d'Évry. Enfin, l'assurance prospection sera étendue à de nouveaux pays. On sait en effet que, lorsque les Français commercialisent des produits français à l'étranger, ils ont besoin d'être soutenus.

La réforme concerne également une autre catégorie d'outils, les contrats export, dont nous souhaitons améliorer les garanties dans le secteur des franchises, de l'édition, des logiciels et de l'audiovisuel. Nous voulons également qu'elles ne concernent plus seulement l'exportation de produits, mais qu'elles s'étendent aussi à l'exportation des services. Une garantie spécifique concernera les secteurs particulièrement frappés par le décalage entre l'euro et le dollar. La filière des sous-traitants aéronautiques bénéficiera ainsi d'une garantie particulière.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Il n'y a pas que les sous-traitants qui sont frappés !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Le marché s'effondre !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Vous m'avez également interrogée sur OSEO. Cet établissement pourra désormais commercialiser les produits qui l'étaient traditionnellement par la COFACE, puisqu'elle finance les petites et moyennes entreprises. Ce soutien accru s'effectuera par le biais d'un guichet unique auquel celles-ci pourront accéder…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…pour obtenir toute la gamme des produits.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

J'ajoute que la fusion prochaine entre OSEO et l'AII permettra une augmentation de la dotation, qui passera de 450 millions d'euros en 2007…

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

…à 800 millions en 2008. Voilà ce que nous faisons pour soutenir le commerce extérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Valérie Fourneyron, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Ma question s'adresse à la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Madame la ministre, nous sommes nombreux, sur tous les bancs de cet hémicycle, à nous inquiéter de la situation financière alarmante des hôpitaux publics. Vous avez répondu à M. Leteurtre, qui vous interrogeait récemment sur les moyens consacrés à l'hôpital, que vous ne partagiez pas son « catastrophisme ». Pourtant, c'est Nicolas Sarkozy lui-même qui vous a contredite, lorsqu'il a déclaré, il y a deux semaines, que « l'hôpital est en déshérence » – d'autres auraient dit « en faillite ». (« Très juste ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Le problème, c'est qu'il fait de la gouvernance de l'hôpital l'objectif pour 2008, alors que l'urgence n'est pas à la gouvernance, mais aux moyens ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Eh oui, madame la ministre, les caisses des hôpitaux, comme le pouvoir d'achat, sont au plus bas.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Les déficits sont évacués grâce aux reports de charges, et les prétendus plans de retour à l'équilibre sont devenus de véritables plans sociaux pour les personnels hospitaliers qui servent de variable d'ajustement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Les réformes successives montrent que les hôpitaux et leur personnel se sont investis, avec volontarisme et détermination, dans des efforts de modernisation et de gestion, mais le vrai problème est ailleurs. La réalité, c'est que l'hôpital public, parce qu'il est ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, parce qu'il pratique des actes médicaux non programmés, parce qu'il assure des missions de recherche et de formation, parce qu'il répond aux insuffisances du tissu médical, parce que, en un mot, ses activités et ses patients ne sont pas les plus rentables ni les plus aisés, nécessite des moyens structurels.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Et ce ne sont pas la TAA à 100 % ni les moyens dégagés pour payer les heures supplémentaires qui peuvent constituer la seule réponse à ces besoins.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Fourgous

Et pourquoi croyez-vous donc que les caisses sont vides ?

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Alors que l'hôpital public est aux urgences, nous attendons les propositions de la commission Gérard Larcher, mais ses retombées ne pourront s'inscrire que dans le moyen terme. Or ma question porte sur le court terme, car il y a urgence pour les budgets qui seront votés dans les prochaines semaines. Répondez-nous, madame la ministre : réévaluerez-vous dès 2008 l'enveloppe budgétaire correspondant aux missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les MIGAC, des hôpitaux publics ?

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Fourneyron

Je souhaiterais également que le Gouvernement réponde avant la fin de notre séance à la question de M. François Hollande sur le débat public que nous voulons avoir ici même. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et sur quelques bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Madame la députée, notre système de santé a besoin de réformes profondes. Faut-il rappeler que les dépenses hospitalières sont, en France, les plus élevées du monde… (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

…tout comme les dépenses hospitalières pour chaque Français.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Ce n'est pas grave si nous avons les meilleurs soins !

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

C'est donc de profondes réformes structurelles que nous avons besoin. Nous les avons déjà entamées, notamment en faisant passer la T2A à 100 %. Comment expliquer, en effet, que certains hôpitaux publics soient en déficit, alors que d'autres connaissent une bonne gestion ? (« C'est faux ! Ils sont tous en déficit ! » sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Il y a donc des marges de progression.

Quant à la question des jours stockés sur le compte épargne temps, ainsi que des 23 millions d'heures supplémentaires impayées, nous en sommes en train de la régler par un dialogue social nourri et constructif. Nous poursuivons le plan d'investissement engagé par Xavier Bertrand. Après les 5 milliards d'euros investis dans le plan 2012, d'autres investissements supplémentaires de 5 milliards d'euros seront décidés. Nous réfléchissons également aux moyens de renforcer l'attractivité des métiers de l'hôpital via des formations de type LMD.

Mais vous avez raison de souligner, madame la députée, que nous devons nous attaquer à des réformes plus globales. L'année 2008 sera celle de ces réformes, grâce à la loi sur l'organisation de la santé promise par le Premier ministre.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Elle concernera tant l'organisation des soins de premier recours – songez que 70 % des malades reçus en urgence devraient être traités par la médecine de ville – que la réorganisation de l'hôpital et de sa gouvernance, assise sur le socle de la transformation des agences régionales de l'hospitalisation en agences régionales de santé, pour mieux coordonner les soins de villes, les soins hospitaliers et le médico-social. C'est à ces réformes de structure que nous devons nous atteler tous ensemble, pour mettre en place le système hospitalier dont nous avons besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Pascale Gruny, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Madame la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, on sait aujourd'hui qu'un enfant sur six en France est touché par l'obésité, soit deux fois plus qu'il y a dix ans. Il est important d'alerter la population, et d'inculquer des gestes et des réflexes simples pour lutter contre ce phénomène. Car, au-delà des répercussions psychologiques de rejet de soi causées par les moqueries des autres enfants, les répercussions physiques sont nombreuses et souvent minimisées. Ces enfants sont plus fréquemment sujets à des douleurs et à des entorses. Devenus adultes, les deux tiers resteront obèses et seront beaucoup plus exposés aux risques de diabète, de maladies cardio-vasculaires, d'hypertension ou de troubles respiratoires.

En septembre 2006, Xavier Bertrand, alors ministre de la santé, a lancé, pour 2006-2010, le second Plan national « nutrition santé », mettant en place une véritable politique nutritionnelle, avec de nouvelles ambitions en matière de prévention et d'éducation à la santé. Pour mettre en pratique les recommandations de ce plan, le programme EPODE – « Ensemble, prévenons l'obésité des enfants » – a été lancé dans plusieurs villes de France. Il repose sur la mobilisation durable de l'ensemble des acteurs locaux, enseignants, éducateurs, commerçants, autour d'une démarche de prévention santé.

Je souhaiterais savoir, madame la ministre, comment ce plan s'articule avec le thème plus précis de l'obésité infantile et quelles mesures sont envisagées pour combattre ce problème de santé publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports.

Debut de section - PermalienRoselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports

Madame la députée, la récente étude, publiée en décembre 2007 par l'Institut national de veille sanitaire, confirme vos chiffres et votre analyse. Elle révèle que 3,5 % des Français de moins de dix-sept ans étaient atteints d'obésité et que 14,7 % étaient en surpoids, taux qui s'avère identique pour les filles et les garçons. L'étude révèle, ce qui est intéressant, que, sur le plan quantitatif, les chiffres sont stabilisés, voire en légère baisse. Cette réussite est un des premiers résultats du Plan national « nutrition santé » décidé par notre collègue Xavier Bertrand. Néanmoins, nous sommes interpellés par le fait que l'obésité infantile, si elle baisse quantitativement, est très inégalement répartie selon les classes sociales. Elle augmente en effet dans les classes défavorisées, alors même qu'elle diminue dans les plus aisées. L'obésité devient ainsi un véritable marqueur social, ce qui implique des politiques de lutte beaucoup plus ciblées.

Je veux porter la lutte dans trois directions.

Premièrement, une action plus volontariste doit être entreprise à l'égard de la restauration collective. Les textes doivent, dans ce domaine, être plus contraignants.

La deuxième action, que je mène conjointement avec mon collègue, le secrétaire d'État chargé des sports, concerne le développement de l'activité physique, en particulier dans les collèges et les lycées. Nous entendons augmenter le nombre d'heures dédiées au sport, aussi bien dans le cursus scolaire que dans le périscolaire.

Enfin, le dépistage doit être de plus en plus précoce. Les médecins sont mobilisés. Vous avez observé que la journée de dépistage, organisée le 12 janvier par la Société française de pédiatrie, a été financée par mon ministère, via la direction générale de la santé, afin de permettre, outre le dépistage, le traitement en lien avec les réseaux ville-hôpital. Il s'agit, madame la députée, d'un vrai sujet de santé publique, qui doit mobiliser l'ensemble des acteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Michel Villaumé, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, des relations sociales et la solidarité. Elle concerne les retraités, qui subissent de plein fouet la hausse du coût de la vie et dont les conditions de vie sont de plus en plus difficiles. En effet, la situation des Français qui touchent de petites retraites est aujourd'hui insupportable. Dans nos circonscriptions, certains sont parfois obligés d'avoir recours à différentes associations caritatives ou sociales. Ils doivent faire face à l'augmentation du prix du fioul, des carburants, du gaz, de l'augmentation de la CSG, au déremboursement des médicaments, et affronter l'instauration des franchises médicales et la généralisation des dépassements d'honoraires... Pendant le débat qui a précédé l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy a osé promettre d'augmenter les petites retraites de 25 % !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Aujourd'hui, l'augmentation des pensions est limitée à 1,1 %, alors que l'inflation est de l'ordre de 2,60 %. (« Le compte n'y est pas ! », sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Grâce à vous, les retraités perdent encore cette année 1,5 % de pouvoir d'achat, et la hausse des prix, qui doit se poursuivre, va particulièrement peser sur eux puisqu'ils n'auront pas l'occasion de faire des heures supplémentaires pour payer leur logement ou leur chauffage.

Leur inquiétude ne fait que croître depuis que vous avez annoncé vouloir faire payer la redevance audiovisuelle au plus modestes d'entre eux afin de supprimer la publicité sur les chaînes publiques.

De plus, le comportement ostentatoire du Président de la République, qui fait financer ses vacances par les milliardaires, est insupportable alors que tant de Français peinent à boucler leurs fins de mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, et protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Monsieur le ministre, ma question est simple : quand mettrez-vous enfin en place des mesures concrètes et efficaces en faveur de nos aînés, notamment ceux qui perçoivent de petites retraites ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Monsieur Jean-Michel Villaumé, quel dommage que, sur un sujet aussi sérieux, vous n'ayez pas réussi à chasser le naturel et qu'il soit revenu au galop ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.) Quel dommage que vous n'ayez pas pu vous empêcher de faire preuve de démagogie sur un sujet aussi sensible pour des millions de Français ! Quel dommage ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Exclamations prolongées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Quel dommage aussi que, dans le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, quand le sujet était sur la table, l'opposition soit restée discrète, voire muette ! Quel dommage : cela nuit à la sincérité de son propos aujourd'hui. (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité

Quel dommage que, pendant la campagne pour les élections présidentielles, les retraités aient bien perçu que c'était Nicolas Sarkozy qui les avait compris et entendus et qui les défendait ! (Très vives protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Mesdames et messieurs les députés de l'opposition, votre attitude prouve votre manque de sérénité sur un sujet qui requiert pourtant le consensus. Les Français l'ont compris : sur toutes ces questions, il y a d'un côté l'agitation et, de l'autre, les solutions ! Et c'est nous qui garantirons le pouvoir d'achat des retraités français. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Huées sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Revalorisation des petites retraites

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Jean-Marie Le Guen.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

M. le président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre deux lettres, la première l'informant de sa décision de charger M. Jean-Michel Couve, député du Var, d'une mission temporaire auprès du secrétaire d'État chargé de la consommation, la seconde l'informant de sa décision de charger M. Martial Saddier, député de la Haute-Savoie, d'une mission temporaire auprès du ministre de l'agriculture et de la pêche et du ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d'urgence, relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi (n° 578, n° 600).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Jean-Patrick Gille, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Une fois de plus – cela devient malheureusement une habitude –, nous n'avons pas pu préparer l'examen de ce texte dans des conditions satisfaisantes. La décision, prise au dernier moment, de faire examiner le projet de loi d'abord par le Sénat a certainement déstabilisé l'organisation de nos débats. Ainsi, le texte ne nous est revenu du Sénat que très tardivement et le rapport de M. Tian n'a été disponible – en ligne – que dimanche. Qui plus est, nous entamons la discussion générale sans avoir achevé l'examen des amendements, la commission devant encore se réunir demain matin à cette fin.

Nous déplorons ces conditions de travail difficiles, qui ne permettent pas une bonne élaboration de la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est sans doute la raison pour laquelle la droite est absente de l'hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je veux tout d'abord remercier M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, M. le rapporteur et M. le rapporteur pour avis, pour la diligence et la mobilisation dont ils ont fait preuve lors de la préparation de ce projet de loi éminemment important, puisqu'il permet de travailler à la question fondamentale de l'amélioration du fonctionnement du marché public de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Vous avez bien entendu, monsieur le député, et je me réjouis que vous soyez si attentif !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement a pris l'engagement – qui figure expressément dans ma feuille de route – d'atteindre le plein emploi, c'est-à-dire de ramener le taux de chômage structurel à 5 % et de porter le taux d'emploi à 70 % à la fin de l'année 2012, conformément aux objectifs fixés avec nos partenaires européens dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Je suis convaincue que nous y parviendrons et qu'au fil des mois, les engagements que certains présentent comme des paris deviendront autant de constats.

Les premiers pas sont d'ores et déjà franchis, les chiffres en attestent. La baisse continue du chômage depuis deux ans, qui s'est accélérée au troisième trimestre 2007 en passant sous les seuils très symboliques des 8 %, au sens du Bureau international du travail, et des deux millions de chômeurs inscrits en catégorie 1 à l'ANPE, montre que nous sommes sur la bonne voie. Ce mouvement va se poursuivre, j'en suis convaincue. Les transformations à l'oeuvre sur le marché du travail, qui tiennent à la fois à une dynamique retrouvée de création d'emplois, à une importante transition démographique, et à une restructuration fondamentale de nos économies, nous offrent une chance historique de sortir de trois décennies de chômage constant. Les premières mesures que nous avons prises en 2007 vont favoriser les créations d'emplois en dynamisant la croissance. Les lois de modernisation de l'économie que nous présenterons devant votre assemblée dès le printemps permettront de poursuivre cet effort de libération de la croissance et du travail.

Mais tout attendre des évolutions démographiques serait une dangereuse illusion, et même favoriser la création des emplois n'est pas suffisant. Aujourd'hui, ce sont des centaines de milliers d'offres d'emplois disponibles qui ne trouvent pas preneur – on parle de 400 000 à 500 000 emplois non pourvus, dont plus de 100 000 recensés par la Chambre de commerce et d'industrie de Paris sur la seule région d'Île-de-France.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Je vais y venir, monsieur le député. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Les difficultés de recrutement que nous connaissons déjà pourraient encore s'aggraver. En ajoutant les postes libérés par les départs en retraite aux créations nettes d'emplois, on peut quantifier les besoins de main-d'oeuvre à environ 750 000 emplois par an jusqu'en 2015, alors que la population active devrait se stabiliser d'ici quelques années.

Or, en dépit du grand nombre d'actifs disponibles sur le marché du travail – deux millions de demandeurs d'emplois de catégorie 1 – les offres d'emploi ne seront pas forcément satisfaites, parce que les profils recherchés ne sont pas toujours en adéquation avec les profils disponibles, parce que certains métiers en tension sont parfois perçus comme peu attractifs, et parce que les services en charge de l'intermédiation sur le marché de l'emploi ne fonctionnent pas de manière suffisamment efficace.

Ainsi, face à une formidable opportunité d'en finir avec le chômage, nous risquons de nous trouver face à ce paradoxe, où les employeurs ne parviennent pas à embaucher, tandis que les chômeurs à la recherche d'un emploi n'en trouvent pas ! Notre pays a donc un défi considérable à relever, à mon sens par deux moyens : d'une part, la réforme du marché de l'emploi, d'autre part, la réforme de la formation professionnelle.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Président de la République et le Premier ministre ont donné au Gouvernement une feuille de route ambitieuse. L'ampleur du travail législatif réalisé par le Parlement en 2007 est impressionnante. Je ne doute pas que ce travail se poursuivra en 2008. Quant aux partenaires sociaux, ils vont mener cette année des chantiers essentiels, dans le cadre de l'agenda social défini avec eux lors de la conférence qui s'est tenue le 19 décembre sous la haute autorité du Président de la République.

L'accord signé le 11 janvier dernier à l'issue de la négociation interprofessionnelle sur le marché du travail et la sécurisation des parcours professionnels constitue un premier pari gagné, dont l'importance a probablement été sous-estimée jusqu'à présent. Le Gouvernement a offert aux partenaires sociaux une formidable occasion de démentir les discours sur la faiblesse du dialogue social et des organisations représentatives, et sur l'incapacité à conduire des réformes dans notre pays. Saisis dans des délais contraints – justifiés par l'urgence de la situation – de sujets difficiles, mais qui devaient être traités, ils ont répondu à ce que l'on attendait d'eux.

Qui aurait parié sur un accord aussi ambitieux, et portant sur tant de questions : l'entrée dans l'entreprise, la sortie, les grandes orientations des réformes à venir de l'assurance chômage et la formation professionnelle ? Qui aurait parié sur la signature d'un tel accord par sept des huit organisations qui l'ont négocié ?

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Le Gouvernement, lui, avait fait ce pari ! Il nous appartient désormais de remporter les suivants, qui s'inscrivent dans la même ambition : moderniser notre marché du travail.

Le projet de loi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui devant vous, mesdames et messieurs les députés, constitue une étape essentielle de cette réforme du marché du travail dans la mesure où il concerne la colonne vertébrale de notre service public de l'emploi, qui a besoin d'un acteur fort.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Il vous appartient, en discutant et en votant ce projet de loi, de prolonger la dynamique de cette année 2008 qui commence…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Il ne lui manque qu'une tête, à cette colonne vertébrale !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Je vous écoute toujours attentivement lorsque vous vous exprimez, monsieur Roy, et je vous prie d'avoir la gentillesse d'en faire de même avec moi.

Après l'accord sur le marché du travail signé en janvier, et la loi sur le service public de l'emploi que j'espère voir promulguée en février, les premières bases de la réforme de la formation professionnelle vont être posées en mars, à l'issue des réflexions d'un groupe de travail. Il s'agira du troisième pilier de l'action du Gouvernement, qui entend avancer sur ce sujet en 2008 en associant tous les partenaires impliqués, régions comme partenaires sociaux. Conformément à l'agenda social défini par le Président de la République, je vais mettre en place dans les tout prochains jours un groupe de travail sur la formation professionnelle continue réunissant l'État, les partenaires sociaux, et les régions.

Il s'agit de clarifier les priorités stratégiques en matière de formation professionnelle et d'établir une répartition très claire entre les sujets qui relèvent de la négociation professionnelle et ceux qui devront faire l'objet d'une réforme législative d'ici à la fin de l'année. Vous le voyez, nous pouvons en quelques mois franchir des étapes essentielles dont personne n'aurait pu imaginer, ne serait-ce que huit mois plus tôt, qu'elles le seraient.

Mais revenons à celle qui nous occupe aujourd'hui, à savoir la réforme du service public de l'emploi. J'évoquerai successivement quatre points : pourquoi fusionner l'ANPE et les ASSEDIC ? Quels objectifs devons-nous poursuivre ? Ne s'agit-il pas d'une simple étape dans un processus plus vaste ? Enfin, quels seront les modalités pratiques et les principes qui nous inspireront dans ce projet ?

Premièrement, pourquoi fusionner l'ANPE et les ASSEDIC ? Commençons par quelques brefs constats. Le premier est celui de la multiplicité des acteurs de la lutte contre le chômage, à tous les niveaux. Sur le terrain, plusieurs réseaux coexistent, qui ont du mal à se coordonner dans un certain nombre de régions et de départements.

Le deuxième constat est un élément de comparaison internationale : la plupart des pays qui ont engagé avec succès une réforme de leur marché du travail ont fait le choix du regroupement des fonctions d'indemnisation du chômage et de placement.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

C'est le cas du Royaume-Uni, de l'Allemagne, du Danemark et, plus loin de nous, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis. La tendance est générale dans les pays les plus performants, et fondée sur un constat éprouvé, que vous avez pu faire dans vos circonscriptions : l'accompagnement d'un demandeur d'emploi est un tout qui associe prise en charge financière, diagnostic, placement et accompagnement. Pourquoi se priver d'un outil qui a fait ses preuves ailleurs ?

Le troisième constat, c'est que la voie du rapprochement sur le terrain des deux réseaux au sein de guichets uniques avec le soutien des maisons de l'emploi, retenue par la loi de cohésion sociale il y a trois ans, a fonctionné, mais n'a pas acquis la dynamique que nous espérions et a, d'une certaine manière, atteint ses limites. Les réalisations concrètes peinent à se construire et à se déployer. Pour ne prendre que cet exemple, les véritables guichets uniques, c'est-à-dire des sites entièrement communs, se comptent encore sur les doigts des deux mains. Quant au système d'information commun, le groupement d'intérêt économique qui en constitue le support n'a commencé à fonctionner que l'été dernier !

Enfin, la logique du simple rapprochement ne permet pas de traiter l'ensemble des problèmes : l'enrichissement de l'offre de service vers les entreprises et les demandeurs d'emploi, la rationalisation des moyens mis en oeuvre, et surtout la dualité du marché du placement entre indemnisés et non indemnisés. Finalement, je crois que la direction retenue par la loi de cohésion sociale était la bonne et que le rapprochement était une étape indispensable : s'il n'y avait pas eu la loi de cohésion sociale et de nombreuses initiatives en matière de maisons de l'emploi, nous ne serions pas aujourd'hui en train de discuter avec un minimum de sérénité et un maximum de concertation préalable d'un projet qui en constitue en quelque sorte l'aboutissement. Il s'agit tout simplement de passer à la vitesse supérieure.

Deuxièmement, quels sont les objectifs de ce nouveau chantier ? D'abord, améliorer le service rendu aux usagers – demandeurs d'emploi et entreprises – en mettant en place des guichets uniques. Ces plateformes polyvalentes seront en charge de l'accueil, du diagnostic, de la prescription éventuelle en matière de formation professionnelle, de l'accompagnement, du placement de son suivi, de l'indemnisation enfin lorsque le placement n'est pas possible.

Quand je parle des usagers, je pense à la fois, je le répète, aux demandeurs d'emploi – qu'ils soient indemnisés ou non – mais aussi aux entreprises, car il faut aller chercher les emplois là où ils se trouvent et prendre par la main ceux des demandeurs d'emploi qui sont éloignés du marché du travail.

Les autres objectifs consistent ensuite à proposer une gamme de prestations complète et pour tous les demandeurs d'emploi, indemnisés ou non ; enfin, à renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi, notamment de ceux qui sont le plus en difficulté, grâce à la mutualisation des moyens, qui permettra de déployer plus d'agents sur le terrain à la disposition de tous les usagers.

Comme vous le voyez, notre réforme ne va pas créer un nouveau monstre administratif. Nous aurons l'occasion d'évoquer le régime juridique applicable à cette nouvelle entité, mais devons nous appliquer à concentrer toute notre énergie sur les objectifs ; à cette condition, nous constituerons un attelage rapide et performant, au service de l'emploi et de la lutte contre le chômage. La fusion n'est pas une construction bureaucratique dont la portée serait purement institutionnelle. Elle doit avant tout avoir des implications concrètes sur le terrain, pour les demandeurs d'emploi comme pour les entreprises.

Ne pas attendre plusieurs jours entre le rendez-vous à l'ANPE et celui à l'ASSEDIC, c'est du concret ! Pouvoir désormais proposer toutes les prestations à tous les demandeurs d'emploi, et non plus réserver certaines d'entre elles aux seuls demandeurs d'emploi indemnisés, c'est aussi du concret ! Déployer davantage d'agents au contact direct des usagers, c'est encore du concret !

La mise en oeuvre au quotidien de cette opération sera donc essentielle. L'étape législative, évidemment déterminante, n'est qu'une étape. La plus importante sera celle qui se vivra, jour après jour, semaine après semaine, entre les différents agents, dans le cadre d'une institution unifiée.

La fusion est-elle une fin en soi ? Poser la question, c'est donner la réponse : en fait, c'est une première étape de la réforme du service public de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Elle en est le socle mais elle n'épuise pas, et de loin, la réforme que nous entendons conduire.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

J'entends porter une attention particulière au contenu de l'offre de service du nouvel opérateur qui sera définie par la convention que passeront avec lui les deux commanditaires que sont l'État et le régime d'assurance chômage.

Il s'agira de définir ainsi les publics prioritaires du nouveau service public de l'emploi, tant en ce qui concerne les salariés que les entreprises, les prestations offertes en matière de formation et d'orientation, et enfin les conditions de collaboration avec les réseaux spécialisés, publics ou privés, qui devront trouver toute leur place dans ce nouveau dispositif. Je pense tout particulièrement aux maisons de l'emploi.

J'entends mener ces différents chantiers selon le même mode que le chantier de la fusion lui-même, en associant largement toutes les parties prenantes, partenaires sociaux, collectivités territoriales et usagers. Pour ce faire, je vais mettre en place, au sein du Comité supérieur de l'emploi, un groupe de travail qui accompagnera ces différentes étapes. Nous agirons, comme nous l'avons fait précédemment dans le cadre de la concertation, dans la discrétion et le souci de l'efficacité.

J'aimerais à présent vous présenter les modalités pratiques de l'opération, telles qu'elles sont présentées dans le projet de loi. Elles correspondent à cinq grands principes, qui se sont peu à peu dégagés de l'intense concertation engagée depuis le mois de juillet avec les partenaires sociaux, et qui a culminé le 19 novembre dernier avec la réunion du Comité supérieur de l'emploi et qui a permis de faire évoluer les avis de chacun sur ce dossier. De quels principes s'agit-il ? D'abord, du paritarisme. Ensuite, d'une gouvernance équilibrée. Enfin, d'une mise sous tension, dans une dimension territoriale et avec pour souci et pour guide le pragmatisme et l'efficacité.

Premier principe : le respect du paritarisme. Le régime paritaire d'assurance chômage demeure sous la responsabilité de l'UNEDIC. Je veillerai notamment à ce que le transfert aux URSSAF du recouvrement des contributions d'assurance chômage n'entame ni l'autonomie financière de l'UNEDIC ni la qualité de l'information qu'elle continuera à détenir.

Deuxième principe : une gouvernance efficace, autour des deux financeurs et commanditaires. Les partenaires sociaux seront majoritaires au sein du conseil, mais c'est l'État qui aura la responsabilité de la nomination du directeur général, afin que le nouvel opérateur reste un outil de politique de l'emploi. Cet équilibre obtenu par la concertation est à la fois politique et juridique. Enfin, comme l'a souhaité le Sénat, un représentant des collectivités locales fera entendre leur voix au sein de ce conseil d'administration. C'est une amélioration du texte initial.

À l'extérieur de l'opérateur, un conseil national de l'emploi, que je présiderai, assurera la cohérence des politiques de l'emploi. C'est également la vocation de la convention tripartite entre l'État, l'UNEDIC et la nouvelle institution qui fixera les priorités et les moyens alloués.

Troisième principe : la mise en tension de l'opérateur, avec la définition d'objectifs de résultats, le recours à l'évaluation et le principe d'un appel systématique à des opérateurs spécialisés. À cet égard, n'imaginons pas que l'un serait mieux géré que l'autre : on trouve de bonnes méthodes et de bons principes de gestion chez l'un comme chez l'autre. Je suis sûre qu'en les rapprochant, on fera mieux. Un comité de suivi de la convention tripartite conclue entre l'État, l'UNEDIC et le nouvel opérateur vérifiera le respect et la mise en oeuvre de ces principes. Les organisations syndicales étaient particulièrement sensibles à ce point. Au sein de l'institution, j'ai également souhaité la création d'un comité d'audit permanent afin qu'on puisse s'assurer que les politiques mises en oeuvre sont efficaces.

Quatrième principe : la dimension territoriale des politiques d'emploi, facteur clé de leur succès. Les politiques de l'emploi seront adaptées aux situations locales, grâce aux budgets d'intervention déconcentrés et aux coopérations que le nouvel opérateur entretiendra avec tous les réseaux secondaires spécialisés – APEC, missions locales, Cap emploi.

Les sénateurs ont permis que soit mieux mise en valeur la forte dimension territoriale que revêtent les politiques d'emploi en instaurant par la loi un conseil régional de l'emploi, qui associera les acteurs des territoires, notamment et tout particulièrement les maisons de l'emploi. Il est en effet normal de prendre en compte la dimension territoriale car tous les territoires ne se ressemblent pas. Ainsi, le taux de chômage est de 4,9 % à Vélizy-Villacoublay, contre 8,4 % à Luxeuil, où je me trouvais hier. Deux poids, deux mesures, deux territoires affectés différemment, des bassins d'emploi et des tissus industriels différents : cet exemple montre qu'il est impératif de prendre en compte la dimension territoriale.

S'agissant des maisons de remploi, dont le rôle de coordination est essentiel dans les bassins d'emploi où elles sont implantées, j'ai confié une mission à l'excellent député Jean-Paul Anciaux, que je souhaite publiquement remercier ici, pour le travail qu'il a entrepris à cet égard. Je lui ai demandé de formuler des recommandations sur le futur cahier des charges des maisons de l'emploi, qui permette une bonne articulation avec le réseau territorial du nouvel opérateur.

Cinquième principe : le pragmatisme dans la mise en oeuvre. Le projet de loi prévoit notamment la mise en place immédiate d'une instance provisoire, une instance de préfiguration, qui permettra de préparer la naissance officielle de la nouvelle institution d'ici à la fin de l'année 2008. C'est elle qui sera notamment en charge de la réflexion sur l'organisation territoriale du réseau. Elle préparera l'évolution des institutions représentatives du personnel dans le cadre du rapprochement des deux réseaux. Je souhaite que cela se fasse dans le même esprit de concertation qui a présidé aux travaux de préparation.

Naturellement, et comme je m'y étais engagée devant le comité supérieur de l'emploi et en m'adressant directement, à travers leurs directeurs, aux agents concernés, j'ai tenu à inscrire dans le texte des garanties fortes pour les agents des deux institutions.

Les personnels de l'ANPE conserveront leur statut actuel, qui est un statut de droit public, jusqu'à ce qu'ait pu être négociée une nouvelle convention collective au sein de la nouvelle institution.

Une fois la convention collective négociée et signée, ils auront le choix, pendant un an, entre rejoindre le statut commun, ou conserver, à titre dérogatoire, le statut public qu'ils ont aujourd'hui. C'est un changement important que ce passage d'un statut public à un statut privé, mais la convention collective comportera des garanties prenant en compte la nature particulière des missions de service public exercées par ces agents, comme le prévoit d'ailleurs la convention n° 88 de l'OIT.

Quant au statut actuel des personnels des ASSEDIC, qui résulte déjà d'une convention collective, il sera conservé jusqu'à ce qu'ait pu être négocié la nouvelle convention collective au sein de la nouvelle institution. Le Sénat a souhaité encadrer dans des délais raisonnables la négociation de cette convention, qui devra s'achever avant septembre 2010. L'équilibre du texte proposé initialement par le Gouvernement en a été légèrement modifié.

Toutefois, en combinant cette disposition nouvelle avec celle prévoyant que cette convention collective serait une convention de branche, ce qui n'est pas neutre quant aux conditions de la négociation, le Sénat a mis en place un nouvel équilibre qui a emporté la conviction du Gouvernement.

Je me félicite que les débats parlementaires puissent ainsi, comme l'intense concertation avec les partenaires sociaux l'avait fait auparavant, contribué encore à l'amélioration du projet du Gouvernement. Je ne doute pas que nos débats de ces prochaines heures, de jour comme de nuit, permettront de poursuivre en ce sens et d'aboutir à un texte favorable au marché de l'emploi et à la fluidité des acteurs. Nous parviendrons ainsi à atteindre nos objectifs : le plein emploi et l'amélioration de l'emploi de nos concitoyens dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. Dominique Tian, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, chers collègues, enfin un opérateur unique pour l'emploi ! Depuis vingt ans, de nombreuses mesures de rapprochement de l'assurance chômage et de l'agence nationale pour l'emploi ont été mises en oeuvre. La fusion, suite logique de ce processus, était donc attendue et souhaitée.

Après une première lecture au Sénat, l'Assemblée nationale est donc aujourd'hui saisie du projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi. Je commencerai mon propos en saluant le remarquable travail réalisé au Sénat, qui a permis une amélioration du texte grâce à l'implication de la rapporteure de sa commission des affaires sociales, Mme Catherine Procaccia. Je salue également le travail d'Yves Albarello et de la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Le projet de loi vise à constituer une nouvelle institution nationale qui reprendra les missions et les moyens, d'une part, de l'ANPE, d'autre part, du réseau opérationnel de l'assurance chômage, à savoir principalement les ASSEDIC, tout en respectant l'autonomie des partenaires sociaux dans la définition des paramètres de l'indemnisation du chômage et sa gestion financière, et en préservant la gestion par l'UNEDIC du régime d'assurance chômage.

La présente réforme s'inscrit dans un processus respectueux des intérêts et des sensibilités de toutes les parties. Elle a fait l'objet en amont de nombreuses consultations et a été présentée dès le 2 octobre dernier à l'Assemblée nationale, plus précisément à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, par Mme Christine Lagarde. Le présent projet de loi a été vivement débattu en novembre dernier devant le comité supérieur de l'emploi, conduisant le Gouvernement à modifier son texte sur plusieurs points importants.

La réforme, pourquoi ? L'objectif final, c'est le plein-emploi. De ce point de vue, des résultats sont déjà là puisque le nombre de demandeurs d'emploi a diminué en un an de plus de 200 000 – soit presque 10 % de baisse – et est désormais inférieur à 2 millions.

Mais, comme l'a indiqué Mme la ministre, le mouvement doit être amplifié, en particulier au regard des 300 000 à 500 000 offres d'emploi toujours non pourvues aujourd'hui. Parce que les intermédiaires de placement sur le marché du travail jouent un rôle encore insuffisant, il est essentiel de procéder aujourd'hui à cette réforme institutionnelle.

L'objectif poursuivi par cette réforme, c'est aussi, bien sûr, la qualité du service rendu aux usagers. On l'a dit et répété, la vie du demandeur d'emploi s'apparente bien souvent à un parcours du combattant. C'est vrai, l'Agence nationale pour l'emploi et l'UNEDIC ont entrepris depuis plusieurs années de réels efforts de modernisation et de coopération. Cela étant, le guichet unique doit devenir une réalité et le demandeur d'emploi être vraiment placé au coeur du système.

Un regard sur les expériences étrangères confirme l'importance de l'enjeu institutionnel par-delà une réelle diversité des solutions retenues, pays par pays.

En France, depuis les années 1990 et plus encore 2000, le développement des politiques dites « actives » de l'emploi par l'UNEDIC, tels l'établissement de l'allocation de remplacement pour l'emploi ou le rapprochement des services de l'ANPE et de l'UNEDIC, par la création d'une gestion informatisée commune, ou la mise en oeuvre du PARE-PAP constituent autant de premiers pas en direction d'une réforme.

C'est plus vrai encore si l'on considère les avancées très récentes de la loi de programmation pour la cohésion sociale, promulguée il y a presque trois ans : cette loi a acté la fin du monopole du placement, consacré la notion de « service public de l'emploi » et formalisé les modalités de coordination entre acteurs, que ce soit par la convention tripartite entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC ou par la création des maisons de l'emploi – chères à Jean-Paul Anciaux – dont on sait l'action déterminante sur le terrain. La commission a tenu à inscrire l'action des maisons de l'emploi au sein de la nouvelle organisation du service public de l'emploi.

La réforme, comment ? Je voudrais d'abord insister sur deux points de méthode qui me paraissent essentiels : d'une part, le projet de loi qui nous est soumis a fait l'objet d'un processus de concertation avec les partenaires sociaux, conformément à la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social. Le fait est assez nouveau pour être souligné. Le temps a été donné pour la préparation de ce texte important et si, naturellement, certains points de divergence subsistent, de très nombreux autres ont pu évoluer. D'autre part, ce projet de loi comporte des garanties et des mesures transitoires : une instance provisoire sera créée dans un premier temps. Le transfert aux URSSAF de la mission de recouvrement, prévu par le projet de loi, sera étalé sur une certaine période. D'ailleurs, un groupe de travail présidé par un membre de l'Inspection générale des affaires sociales doit identifier, d'ici à la fin du mois, les principales questions en termes organisationnels qui pourront se poser.

J'en viens maintenant aux grands axes de la nouvelle organisation : je les rappellerai brièvement, en insistant sur les principaux apports résultant de la discussion en commission – dont je tiens à dire qu'elle a été riche, constructive et a vu l'adoption de plusieurs amendements de l'opposition.

À l'article 1er, le projet de loi crée un Conseil national de l'emploi, présidé par le ministre en charge de l'emploi et chargé de veiller à la cohérence d'ensemble des politiques de l'emploi. Le Sénat a en outre consacré l'existence de conseils régionaux de l'emploi qui, dans le projet initial du Gouvernement, ne devaient être institués que par voie réglementaire et qui sont désormais inscrits dans la loi.

La commission a adopté plusieurs amendements, dont l'un, à l'article 1er, vise à reconnaître et à garantir le rôle des maisons de l'emploi dans la nouvelle architecture institutionnelle, en assurant notamment leur représentation au Conseil national de l'emploi. Il me semble que c'est là un élément essentiel ; il avait d'ailleurs été évoqué lors de la table ronde que la commission des affaires sociales avait consacrée à ces questions en décembre, en présence de Mme Annie Thomas, présidente de l'UNEDIC, et de M. Christian Charpy, directeur général de l'ANPE.

L'article 2 du projet de loi crée un opérateur unique pour l'accueil, le placement, le service des prestations d'indemnisation et l'accompagnement des demandeurs d'emploi. La nouvelle institution, issue de la fusion de l'Agence nationale pour l'emploi et des réseaux opérationnels de l'UNEDIC, sera dirigée par un conseil d'administration dans lequel seront présents les partenaires sociaux majoritaires, des représentants de l'État et des personnalités qualifiées. Un directeur général sera nommé par le Gouvernement après avis du conseil d'administration. Au niveau territorial, la nouvelle institution sera organisée en directions régionales.

Le Sénat a explicitement précisé le caractère public de l'institution. Il en a modifié la gouvernance en introduisant dans son conseil d'administration un représentant des collectivités territoriales et en habilitant ce conseil à adopter à la majorité des deux tiers une délibération demandant la révocation du directeur général.

Le Sénat a aussi scindé en deux la section du budget qui était consacrée à la fois au fonctionnement et aux interventions de la nouvelle institution.

Il a enfin précisé que la convention collective qui régira les agents de la nouvelle institution, doit être une convention collective de branche. Cependant, les agents issus de l'ANPE pourront conserver leur statut de droit public.

À l'initiative du groupe socialiste, la commission a inséré dans les missions de la nouvelle institution la promotion professionnelle des usagers. Il nous est apparu utile que les missions du service public soient définies dans des termes larges et positifs.

J'ai proposé pour ma part à la commission un amendement qu'elle a adopté, précisant les modes de conciliation entre la conservation du statut des ex-agents de l'ANPE et la nouvelle règle relative à la représentation collective. Il s'agit d'apporter à ces agents toutes les garanties possibles.

Le financement de la nouvelle institution est assuré à la fois par l'État et par le régime d'assurance chômage. En revanche, il est important de rappeler que le régime d'assurance chômage, géré par l'UNEDIC, reste sous la responsabilité des partenaires sociaux : c'est ce que prévoit l'article 3. Ceux-ci continuent de fixer, dans le cadre de la convention d'assurance chômage, les paramètres d'indemnisation et de financement du régime d'assurance chômage.

Toujours à l'initiative du groupe socialiste, la commission a consacré la dénomination d' « organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage ». Cette clarification est importante et évitera toute ambiguïté terminologique avec la nouvelle institution créée par l'article 2.

Aux termes de l'article 4, le recouvrement des contributions d'assurance chômage sera transféré au plus tard le 1er janvier 2012 aux URSSAF. Le Sénat a veillé à ce que soient pris en compte les régimes dérogatoires existants, notamment dans le monde agricole et pour les intermittents du spectacle.

Pour ma part, afin de donner toutes garanties aux gestionnaires de l'UNEDIC, j'ai proposé d'inscrire dans la loi que la neutralité de la trésorerie de l'assurance chômage est assurée grâce à une remontée quotidienne des fonds recouvrés par les URSSAF ; la commission a adopté un amendement dans ce sens.

L'article 5 organise la transition en prévoyant qu'une institution provisoire préfigurera le nouvel opérateur. Le Sénat a confié à cette instance la tâche de donner un nom à la nouvelle institution.

Aux termes de l'article 6, les personnels actuels de l'ANPE et des ASSEDIC seront transférés à la nouvelle institution avec des garanties statutaires. Ceux de l'ANPE auront le choix entre la conservation de leur statut de droit public et l'adhésion à la future convention collective de l'institution. La commission a adopté un amendement que nous lui avons proposé, visant à prendre explicitement en compte les personnels de l'ANPE sous statut précaire, avec des contrats à durée déterminée.

Pour les personnels des ASSEDIC, une garantie de continuité est apportée par le fait que la convention collective actuelle restera applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective. Cependant, le Sénat a jugé nécessaire de fixer une date butoir pour cette convention en vigueur : le 1er septembre 2010.

On peut comprendre cette démarche, qui a simplement pour objet d'accélérer la négociation de la convention collective en l'encadrant dans le temps et dont le but n'est en aucun cas de réduire les acquis des personnels actuels des ASSEDIC. Chacun sait que la fusion aura un coût élevé en termes d'alignement des statuts vers le haut ; Mme Lagarde a indiqué que 300 millions d'euros sont provisionnés à cet effet.

Toutefois, il est nécessaire de rassurer ces personnels sur la continuité de leurs statuts et notamment la conservation de leurs avantages acquis. C'est pourquoi j'ai proposé à la commission – comme l'a fait de son côté Yves Albarello pour la commission des affaires économiques – un amendement accordant aux personnels en provenance des ASSEDIC le bénéfice de garanties fortes : il s'agit de prévoir l'inscription d'un principe de garantie des avantages acquis, notamment en matière salariale, dans la future convention collective de la nouvelle institution. La commission a adopté cet amendement, très important pour l'équilibre de l'ensemble du dispositif.

On se doit de le répéter : le but n'est pas d'imposer brutalement une fusion, mais de la réaliser, dans le respect de tous les salariés, au bénéfice des usagers du service public de l'emploi, entreprises et demandeurs d'emploi.

L'article 7 organise le transfert des biens à la nouvelle institution. Dans le respect des partenaires sociaux et du statut associatif des ASSEDIC, leurs biens doivent faire l'objet d'une mise à disposition organisée par une convention. Afin d'accélérer la mise en place de la nouvelle institution, la commission a adopté un amendement visant à ce que la négociation de cette convention puisse être engagée par l'instance provisoire de préfiguration.

L'article 8 fixe la date de la création de la nouvelle institution.

L'article 8 bis, introduit par le Sénat, prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport sur le transfert éventuel des psychologues de l'AFPA à la nouvelle institution – ce qui n'était pas prévu dans le texte initial.

L'article 8 ter, également introduit par le Sénat, a pour objet d'éviter – ce qui n'était pas non plus prévu par le texte initial du Gouvernement – certains abus en matière d'indemnisation du chômage, en écartant de l'assurance chômage les salariés ayant quitté leur emploi sans motif légitime.

Les derniers articles du projet de loi comportent des mesures de coordination, insérées notamment dans le nouveau code du travail. Il me semble important de préciser que la gestion assurée aujourd'hui par l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés restera de la compétence de l'UNEDIC et ne reviendra pas, comme le propose le projet de loi, à la nouvelle institution : j'ai proposé un amendement dans ce sens à la commission, qui l'a adopté, tout en préservant la compétence des URSSAF s'agissant du recouvrement des contributions dans le cadre de ce régime.

Enfin, dans un souci de continuité, la commission a également souhaité que l'expérimentation du contrat de transition professionnelle puisse être prolongée jusqu'à la fin de l'année 2008, afin que son échéance coïncide avec celle de l'actuelle convention d'assurance chômage. Elle a aussi réparé un oubli en prévoyant pour les organisateurs de fraudes à l'assurance chômage les mêmes amendes que pour les bénéficiaires de ces fraudes, ce qui est une mesure de justice élémentaire.

Il est donc clair que l'objectif n'est pas d'imposer une fusion brutale, mais d'engager une réforme profonde de nos politiques de l'emploi – dont le présent projet de loi n'est que la première pierre – en ménageant des transitions et des adaptations progressives.

C'est pourquoi la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a adopté le présent projet de loi. J'invite bien sûr notre assemblée, au terme de la discussion sur les articles et les amendements, à l'adopter également. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Albarello

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le Sénat a adopté en première lecture, il y a près de deux semaines, le projet de loi n° 578, portant réforme de l'organisation du service public de l'emploi. Notre commission des affaires économiques, s'étant saisie pour avis et ayant examiné ce projet le 15 janvier, ce texte, compte tenu des modifications apportées par le Sénat, appelle de ma part les observations suivantes.

La réforme présentée par Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, relève du bon sens. S'inscrivant dans la logique de plusieurs mesures importantes prises au cours de ces dernières années en vue d'améliorer la situation de l'emploi, notamment la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 présentée par M. Jean-Louis Borloo, elle tire les premiers enseignements de ces mesures, en même temps qu'elle vise à franchir un pas significatif dans la transformation qualitative d'une partie importante des structures qui concourent à la mise en oeuvre, sur le terrain, de la politique de remploi voulue par le Président de la République et le Gouvernement.

Le regroupement, sous l'égide d'une institution unique nouvelle, de l'ANPE et des ASSEDIC est l'élément dominant et moteur de cette réforme. Ces deux organismes, vieux respectivement de quarante et cinquante ans, sont les piliers d'un dispositif qui fut créé à l'époque des trente glorieuses, c'est-à-dire à un moment où le plein emploi était la référence et où l'environnement mondial et la conjoncture étaient sans rapport avec ceux d'aujourd'hui – ce que confirme la crise financière qui s'installe dans le paysage mondial depuis une semaine et qui semble nous donner raison.

Le Gouvernement s'est fixé un objectif majeur : le retour progressif au plein emploi d'ici 2012. Le succès de cette politique volontariste implique le choix de moyens appropriés pour atteindre cet objectif bénéfique pour la société. L'un des moyens appropriés les plus efficaces est le regroupement de l'ANPE et des ASSEDIC.

Comme toute réforme, celle-ci bouleverse certaines habitudes, surtout lorsqu'elles reposent sur des décennies de pratiques devenues parfois mécaniques. Mais ce nécessaire bouleversement concerne avant tout l'esprit dans lequel la nouvelle organisation du service public de l'emploi devra désormais fonctionner : un esprit sainement combatif mis au service de la volonté de vaincre le chômage.

C'est pourquoi la réforme ne vise en aucun cas à passer par pertes et profits, si j'ose dire, l'ANPE et les ASSEDIC, mais au contraire à valoriser leurs potentialités, à susciter des synergiques dynamiques, à mettre en commun ce qu'elles ont de meilleur pour en accroître les résultats positifs, et je tiens à cet égard à saluer le travail de leurs personnels dont le rôle ingrat est trop souvent méconnu.

Le Gouvernement propose ainsi de mettre en place un opérateur unique pour l'accueil, le placement, le service des prestations d'indemnisation et enfin l'accompagnement des demandeurs d'emploi.

Les acquis obtenus depuis la loi Borloo, notamment en ce qui concerne la mise en commun des systèmes d'information respectifs de l'ANPE et des ASSEDIC, le développement progressif de guichets uniques et, d'une manière générale, tous les progrès apportés par la création des maisons de l'emploi – qu'il n'est absolument pas question de supprimer mais de pérenniser, comme l'a voulu le Sénat –, seraient ainsi capitalisés et optimisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Albarello

Il faut également couper court à un autre procès d'intention : la réforme proposée n'est pas réalisée à des fins d'économies mais pour améliorer le service. Comme l'a rappelé Dominique Tian, elle devrait coûter dans les faits 300 millions d'euros selon les dernières estimations. C'est le prix à payer pour disposer d'une structure appropriée nécessaire à la poursuite de la baisse régulière du chômage.

Dans le même esprit, la réforme ne touche pas au régime paritaire d'assurance chômage. Celui-ci reste confié à l'UNEDIC, structure gérée paritairement au niveau national et qui est responsable des règles d'assurance chômage ainsi que de la gestion financière des cotisations sociales.

Le regroupement de l'ANPE et des ASSEDIC vise à rendre plus fluide le marché de l'emploi, tout en fournissant de meilleures prestations tant à l'égard des entreprises que vis-à-vis des demandeurs d'emploi. Il s'agit ainsi de faciliter les démarches des entreprises et des demandeurs d'emploi, de renforcer la gamme de prestations offertes à l'ensemble des usagers de ce nouveau service public de l'emploi tout en améliorant le marché du travail, de faciliter l'orientation sur le marché du travail en favorisant l'accès à l'accompagnement et à la formation, les liens existant avec les réseaux spécialisés tels que l'APEC – l'Association pour l'emploi des cadres – et l'AFPA étant resserrés.

Dans cette perspective, le projet de loi comprend trois volets.

Sur le plan national, un Conseil national de l'emploi est substitué à l'actuel comité supérieur de l'emploi. Toujours sur le plan national, mais au-dessous, une nouvelle institution issue de la fusion des réseaux ANPE et ASSEDIC et formant désormais un réseau unique est créée. L'UNEDIC, comme je l'ai indiqué, subsisterait dans sa forme paritaire et resterait responsable de la gestion du régime d'assurance chômage, ainsi que de la gestion financière des cotisations qui seraient recouvrées par l'URSSAF à l'issue d'une période transitoire s'achevant au plus tard le 1er janvier 2012. Enfin, sur le plan territorial, un ensemble de directions régionales relevant de la nouvelle institution serait mis en place.

La nouvelle institution exercera donc un ensemble de missions de service public concourant au développement de l'emploi, ce qui justifie l'application d'un statut sui generis auquel le Sénat a conféré un caractère public.

Le personnel de cet établissement particulier doit bénéficier d'un statut de droit privé régi par une convention collective de branche selon les termes votés par le Sénat. Cette convention collective nouvelle sera agréée par l'État, son élaboration devant prendre en compte les éléments les plus positifs figurant dans les deux statuts actuels respectifs de l'ANPE et des ASSEDIC, qui sont sensiblement différents, le premier relevant du droit public, le second du droit privé.

J'ai d'ailleurs proposé à la commission, qui l'a adopté, un amendement à l'article 6 garantissant l'ensemble des avantages individuels acquis par les salariés des ASSEDIC, en application de leur convention collective actuelle.

Au total, les enseignements qui pourront être tirés du fonctionnement de ce nouveau système devraient logiquement conduire à envisager, dans l'avenir, des nouveaux regroupements, notamment avec l'AFPA. Quant aux maisons de l'emploi, elles continueront de fonctionner normalement, comme je l'ai dit plus haut, en harmonie avec la nouvelle institution, un rapport à ce sujet ayant été confié par Mme Lagarde à notre collègue Jean-Paul Anciaux.

Je voudrais ajouter que cette réforme, qui peut paraître modeste à certains dont la position maximaliste cache en fait quelquefois une véritable opposition, est viable en raison même de sa relative modestie. Elle constitue une étape indispensable pour le moment et nous constaterons à l'usage, comme pour les maisons de l'emploi, son bien-fondé. Mais nous ne pouvions continuer à perdre du temps : si nous voulons que la réforme soit réalisée en 2012 et pleinement opérationnelle, c'est aujourd'hui que nous devons créer cet outil nécessaire à son succès.

En ce qui concerne l'examen des articles, on notera spécialement les modifications apportées par notre commission au texte voté par le Sénat.

L'article 2 institue le nouvel opérateur. Notre commission a estimé nécessaire de préciser que la mobilité était « géographique et professionnelle ».

À l'article 5, qui concerne l'instance de préfiguration de la nouvelle institution, notre commission a adopté plusieurs amendements.

Le premier concerne la date limite de validité à la convention applicable aux ASSEDIC. Le Sénat l'a fixée au 30 septembre 2010, disposition introduite par ses soins à l'article 6. Notre commission, toutefois, a préféré laisser la liberté aux partenaires sociaux de fixer cette date dans le cadre de l'accord préalable.

Un autre amendement concerne le budget de rétablissement. Dans la mesure où il n'est pas certain que la nouvelle convention d'assurance-chômage aurait été adoptée au moment de la fixation du premier budget de la nouvelle institution, il convenait de contourner cette difficulté en ce qui concerne tant les ressources que les pouvoirs de l'État en cas de carence.

Le dernier amendement apporté à l'article 5 précise que toute convention ou tout acte de l'instance provisoire engageant la nouvelle institution sera soumis au visa du contrôle économique et financier de l'État. Cette disposition est cohérente avec l'affirmation du caractère public de l'institution.

L'article 6 est relatif aux modalités du transfert à la nouvelle institution des personnels de l'ANPE et de l'UNEDIC. Deux amendements ont été adoptés, le premier tendant à substituer à la date butoir du 30 septembre 2010, fixée par le Sénat, une référence à la date prévue par l'accord préalable évoqué à l'article 5, le second prenant en considération des avantages individuels acquis par le personnel des ASSEDIC. Ce dernier amendement a l'avantage de garantir les droits acquis du personnel sans présenter les inconvénients de la gestion d'un statut supplémentaire qui aurait résulté de la reconnaissance d'un droit d'option analogue à celui offert au personnel de l'ANPE.

La commission des affaires économiques vous propose donc d'adopter le projet de loi qui nous est soumis, sous réserve des amendements adoptés par elle et sans préjudice de ceux de mes collègues de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une exception d'irrecevabilité déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à Mme Monique Iborra.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet de loi improprement appelé « réforme du service public de l'emploi ». Car si nous sommes tous convaincus de la nécessité d'une réforme du service public de l'emploi qui ne fonctionne pas aujourd'hui en France, celle que vous nous présentez aujourd'hui est improvisée parce que précipitée. Elle se caractérise par un manque d'ambition évident : elle décrit un outil avant le contenu ; les conséquences sont donc prévisibles.

Oui, nous sommes favorables à la mise en place d'un guichet unique pour les demandeurs d'emploi – cela va dans le bon sens –, mais le Meccano que vous mettez en place ici ne nous garantit absolument pas que ce seront les demandeurs d'emplois qui en seront bénéficiaires. Cette réforme n'a de sens, en effet, que si elle améliore les services rendus aux demandeurs d'emploi et si elle gagne en efficacité. Pour cela, l'ensemble des acteurs est concerné. L'opérationnalité sur les territoires, vous l'avez dit, madame la ministre, reste la clé de la réussite et de l'efficacité. Or, contrairement à ce que vous affirmez, votre projet de conception verticale, centralisatrice et, de ce fait, j'ose le dire, archaïque, n'a rien de moderne. C'est une centralisation d'un autre temps, contrairement à ce qui se passe dans les autres pays européens que vous avez cités et qui réussit. Vous avez tout simplement oublié de citer l'importance des régions dans ces pays et leur participation aux politiques locales !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Pays européens pour qui le Président de République prétend devenir un modèle… en toute modestie !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

En effet, il s'agit d'un outil encore flou par certains aspects, qui ignore superbement, madame la ministre – mais je crois que c'est une constante chez vous, vu vos déclarations à la commission des affaires sociales il y a quelques semaines sur les maisons de l'emploi –, les compétences décentralisées par vos prédécesseurs, notamment celles des régions.

Votre politique en la matière, pardonnez-moi, est une politique de Gribouille ; les maisons de l'emploi en sont un exemple éclatant,…

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

…malgré les efforts de M. Anciaux pour les réintroduire dans votre projet de loi. Je note que notre collègue est revenu dans l'hémicycle et je le salue : dès qu'on parle des maisons de l'emploi, il lève la tête, et on le comprend !

Votre projet, madame le ministre, décrit un contenant et non pas un contenu. Si nous le votions, ce serait vous donner un chèque en blanc, inverser les priorités. C'est l'habitude du Gouvernement en général et pas seulement la vôtre d'annoncer des réformes qui, en fin de compte, n'ont pas les effets escomptés parce que d'abord conjoncturelles, électoralistes et précipitées.

À ce propos, j'ouvre une parenthèse pour confirmer ce qu'a dit mon collègue Jean-Patrick Gille tout à l'heure dans son rappel au règlement : il y a effectivement de quoi s'insurger en voyant le rôle que vous donnez au Parlement, et ce texte n'en est qu'un exemple : à cause de l'activisme du Président de la République, il a d'abord déposé à l'Assemblée, puis réorienté dans la précipitation au Sénat qui a dû se prononcer en quelques jours. Là aussi, la contradiction est flagrante entre les actes et les discours.

À l'examen attentif du projet, à l'audition exhaustive des différents acteurs, y compris les plus intéressés a priori, c'est-à-dire les associations des demandeurs d'emploi, votre projet est d'abord et surtout, premièrement, une fusion institutionnelle de l'ANPE et des réseaux ASSEDIC. Et c'est d'abord incontestablement une OPA sur l'assurance chômage, c'est-à-dire sur les cotisations des entreprises et celles des salariés. Il est vrai que les caisses de l'État sont, paraît-il, vides, essentiellement d'ailleurs parce que vous les avez vidées cet été, avec vos cadeaux fiscaux à 15 milliards d'euros ! On comprend mieux l'urgence qu'il y avait à mettre votre projet en place.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Eh oui, ça fait mal : 15 milliards, il faut le rappeler ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Je conçois que cela vous agace, messieurs de la droite (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.), mais imaginez notre agacement quand vous parlez sans arrêt des trente-cinq heures !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Cela ne nous agace pas, cela nous inquiète pour vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Deuxièmement, votre projet, quoi que vous disiez, vise dans le même temps à réduire le paritarisme à la portion congrue et à le vider de son contenu, alors que vous clamez haut et fort votre attachement au dialogue social.

Troisièmement, votre projet ignore, pour ne pas dire méprise, les collectivités locales, au premier rang desquelles les régions. Pourtant, M. Borloo avait fait de la loi de cohésion sociale le fer de lance de la lutte contre le chômage, sollicitant – rappelez-vous, mes chers collègues de droite et de gauche – très largement les financements des collectivités locales, en particulier, mais pas seulement, dans le cadre des maisons de l'emploi, dont, à la vérité, vous ne savez plus que faire, et dont, plus grave, les financements de l'État n'arrivent toujours pas, rompant ainsi vos propres engagements.

Et cependant, sans complexe, vous prévoyez que les collectivités locales pourront financer la nouvelle institution dont elles sont effectivement absentes – à moins qu'elles aient droit, dans le meilleur des cas, à un petit strapontin et qu'elles se voient chargées d'appliquer au niveau régional la politique de l'État…

Votre projet est le mariage de la carpe et du lapin : deux métiers différents, deux statuts différents dont la polyvalence reste à organiser, dont l'opérationnalité reste à mettre en place, ce qui prendra incontestablement du temps. C'est un outil, madame la ministre, au moins aussi complexe que le précédent, dont les conditions de mise en oeuvre réelle ne sont pas clairement énoncées alors même qu'il implique la mise en place d'une nouvelle organisation sur les territoires, et donc des fermetures, des regroupements, au détriment sans doute, on peut le craindre, des secteurs les plus isolés.

Votre projet, madame la ministre, met les salariés des deux institutions, malgré les promesses, dans l'incertitude et donc dans l'inquiétude – les organisations de salariés que nous avons encore reçues il y a une demi-heure nous l'ont réaffirmé. On découvre peu à peu, sans que ce soit explicitement dit, le statut juridique de cette nouvelle institution. Ce serait un EPIC, établissement public industriel et commercial – c'est en tout cas ce qui a été annoncé en commission des affaires sociales par le rapporteur, me semble-t-il. Est-ce le statut le mieux adapté pour une mission de service public qui traite a priori d'abord de l'emploi, une compétence que vous affirmez d'État ? Il faudra que vous précisiez vos intentions, monsieur le rapporteur.

La fusion institutionnelle n'était pas forcément indispensable à la réalisation du guichet unique car les choses étaient en marche.

Quelle évaluation de cette politique avez-vous conduite avant de vous lancer en quinze jours – sur ordre du Président de la République – dans la construction du dispositif que vous nous présentez aujourd'hui ?

Je le répète : la fusion institutionnelle n'était pas indispensable pour réaliser le guichet unique. En Suède, vous le savez, le guichet unique existe ; pour autant, il y a une séparation institutionnelle entre l'indemnisation et le retour à l'emploi, l'assurance chômage et l'accompagnement vers l'emploi étant gérés par deux organismes différents. Mais votre modèle est d'abord anglo-saxon.

Cette nouvelle institution va ainsi être à la fois juge et partie vis-à-vis des demandeurs d'emploi. En écoutant les propos du Président de la République, nous pouvons raisonnablement penser que le renforcement des sanctions sera inéluctable. Sur quels critères ? Que signifie, mes chers collègues, « offre valable » ou « offre acceptable » d'emploi ? Aucune définition précise n'est donnée. Vous la renvoyez à la négociation des partenaires sociaux, qui l'ont, pour l'instant, reportée à plus tard.

Cependant, on ne peut laisser croire aux Français que les fraudes sont massives. Même si elles existent, elles ne concernent qu'une infime partie des demandeurs d'emploi. On ne peut pas faire croire aux Français que les sanctions n'existent pas déjà. Mes chers collègues, connaissez-vous le parcours d'un demandeur d'emploi et surtout de ceux qui sont le plus en difficulté ?

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

J'en doute !

Depuis la loi de cohésion sociale, il a beaucoup de devoirs et beaucoup moins de droits. Il se trouve parfois confronté à l'arbitraire – vérifiez-le –, à des recherches d'emploi souvent inefficientes et qui ne sont pas, vous le savez, de leur fait.

Cette institution ne créera pas plus d'emplois que l'ancienne. Elle ne peut se substituer à une politique économique et sociale, à une croissance riche en emplois

Cependant, vous privilégiez les effets d'annonce, en pariant sur le fait que les problèmes traités sont très complexes. Vous simplifiez le message, vous tentez de faire croire que votre principale préoccupation est la situation du demandeur d'emploi et vous nous prédisez une baisse du taux du chômage, qui serait ramené à 5 %.

Vous voulez faire oublier par cette diversion le fait que la croissance n'est pas au rendez-vous. Vous voulez nous faire oublier par un activisme forcené que les résultats promis ne sont pas au rendez-vous. Vous vous accordez un satisfecit sur la baisse du chômage, quand la précarité, dont vous ne parlez pas, explose, alors que le nombre de personnes qui travaillent et ne s'en sortent pas s'accroît.

Une telle réforme ne peut être conduite indépendamment de celles de l'assurance chômage, de la formation professionnelle, de la territorialisation des politiques publiques de l'emploi.

Comme d'autres, madame la ministre, je l'affirme, vous mettez la charrue avant les boeufs et vous souhaitez obtenir du Parlement un chèque en blanc.

Parce que les conditions que j'ai énoncées plus haut auraient dû être un préalable, parce que les chantiers en cours ne sont pas terminés, parce que votre projet exclut plus qu'il ne rassemble les collectivités locales, l'AFPA, les missions locales, parce que votre nouvel outil est dangereux sous de nombreux aspects, parce que le SPE va devenir l'outil d'un marché du travail à deux vitesses, dans lequel sera privilégié le placement dans les secteurs professionnels sous tension, renvoyant les personnes les plus en difficulté vers le RSA – ce qui aura d'ailleurs pour avantage de les sortir des statistiques du chômage –, parce que votre modèle anglo-saxon n'est pas le nôtre, parce que votre réforme est avant tout, je le dis et je l'affirme, idéologique et archaïque par son organisation, mes collègues du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, dans leurs interventions et leurs amendements, feront des propositions pour modifier ce texte. Mais vous repousserez vraisemblablement celles-ci car, je le répète, votre réforme est idéologique, avant d'être pragmatique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Madame, si vous considérez que la France peut attendre, que les demandeurs d'emploi peuvent attendre et qu'il n'y a pas d'urgence, alors, c'est vrai, nous sommes mal fondés à présenter aujourd'hui ce projet.

Nous, au contraire, nous croyons qu'il y a urgence, que nous devons mettre en oeuvre tous les moyens pour essayer de lutter contre le chômage et de mettre en place un vrai marché d'intermédiation, qui permette aux offres de rencontrer les demandes et aux demandes de rencontrer les offres.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Si vous considérez qu'un projet qui a fait l'objet d'une concertation régulière depuis le mois de juillet est précipité, c'est que nous n'avons pas la même définition du temps. Selon moi, il y a urgence. Nous avons mené une concertation, qui, je vous l'accorde, a été discrète. Cela n'a pas fait les premières pages des journaux.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Être en première page des journaux n'a aucun intérêt.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Ce qui est important, c'est la vraie concertation, c'est ce qui se passe avec les organisations syndicales en matière sociale. Lorsqu'il s'agit d'améliorer le marché de l'emploi, ce qui compte le plus, c'est la concertation avec les partenaires sociaux. Nous nous y sommes livrés de manière intensive, depuis le mois de juillet.

Étant donné qu'il y a urgence, étant donné que nous avons élaboré ce texte dans la concertation et étant donné que notre but est d'améliorer le service public de l'emploi, je considère que nous n'avons pas les mêmes conceptions, même si nous partageons les mêmes objectifs de lutte contre le chômage et d'amélioration de l'emploi.

Sur le plan juridique, je souhaite préciser qu'il ne viendrait à l'esprit de personne que cette nouvelle institution soit un établissement public industriel et commercial. Vous allez présider à la création d'un établissement public administratif. Vous allez créer un être juridique nouveau, je vous l'accorde – et nous aurons l'occasion de nous en expliquer lors de l'examen des amendements –, puisqu'il y aura une comptabilité d'ordre privé et une convention collective applicable à l'ensemble du personnel avec l'option pour ceux qui sont soumis au statut actuel de conserver leur statut à l'expiration des périodes en cours. Il s'agit, c'est vrai, d'un être juridique particulier, mais c'est bel et bien un établissement public administratif.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Madame Iborra, je ne pense pas avoir fait mention en commission – mes collègues en sont témoins –, ni nulle part ailleurs, d'EPIC. J'ai toujours parlé d'établissement public administratif.

Nous sommes, avec Mme la ministre, sur la même longueur d'ondes. Ce sont d'ailleurs les arguments qu'elle a développés au Sénat que j'ai repris.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Dans les explications de vote sur l'exception d'irrecevabilité, la parole est àM. Roland Muzeau, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Madame la ministre, nous sommes, bien évidemment, favorables à la simplification des conditions d'accès aux organismes qui s'occupent du placement des chômeurs.

Mais nous ne sommes plus d'accord avec vous, lorsque vous traitez de dogmatique la démarche des élus locaux qui oeuvrent en direction des maisons de l'emploi. Ils ont agi ainsi par souci d'efficacité.

Avec ce texte, nous nous situons à des années lumière de la volonté de favoriser les parcours et l'efficacité de la recherche d'emploi, à laquelle j'ajouterai la recherche des meilleurs parcours d'insertion, de formation que sous-tendent les conséquences inévitables qui découleront de votre texte.

Le projet « Réforme de l'organisation du service public de l'emploi » a changé de titre. Au départ, il s'agissait de la fusion UNEDIC-ANPE. Aujourd'hui, c'est un peu plus policé, mais, en réalité, il s'agit de la fusion de plusieurs opérateurs qui ont ou avaient – dans quelques jours, il en sera ainsi – des missions spécifiques et dont les personnels bénéficiaient de statuts différents.

Notre attitude reflète-t-elle la volonté de faire du surplace, de ne pas voir la société évoluer, un refus d'envisager une amélioration des différentes modalités de traitement du chômage ? Bien évidemment non !

Madame la ministre, votre objectif n'est pas d'atteindre le plein-emploi, contrairement à vos affirmations. Nous pensons que vous tentez d'imposer la précarisation du travail. Vous envisagez d'obliger les demandeurs d'emploi à accepter n'importe quelle offre sous la menace.

Madame la ministre, s'il y a, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure, 500 000, 600 000 ou 700 000 postes non pourvus – peu importe les chiffres, à ce niveau c'est dramatique –, c'est qu'il y a des problèmes dans différents métiers. Or ces problèmes, vous refusez de les examiner. Vous ne vous attaquez pas aux causes essentielles des refus : découpage en tranches des horaires de travail dans la journée ; salaires si bas que le minimum de la branche est inférieur au SMIC ; sous-salariat dans le commerce ; travail saisonnier dans le tourisme ou l'agriculture ; conditions de travail difficiles dans le bâtiment, par exemple.

Vous accordez des milliards au secteur de l'hôtellerie-restauration, mais vous ne demandez aucune contrepartie en termes d'emplois, de conditions de travail et de salaires. Madame la ministre, en renonçant à vous attaquer à tous ces problèmes, vous laissez 700 000 emplois non pourvus.

Vous avez trouvé parallèlement à nos débats, une solution qui fait partie intégrante de la pensée du Gouvernement : le recours à l'immigration choisie.

Dans le même temps, on refuse aux travailleurs roumains et à ceux d'un autre pays parmi les Vingt-sept de faire partie de cette immigration choisie.

Vous vous complaisez dans votre dogmatisme et vous accusez les demandeurs d'emploi soit de farniente, soit de mauvaise volonté en préférant l'assistanat. Madame la ministre, ne le niez pas, ces propos vous ont parfois échappé lors de réponses aux questions au Gouvernement.

Nous voterons bien évidemment l'exception d'irrecevabilité présentée par notre collègue socialiste. Nous considérons que ce débat a été construit dans l'urgence, ce qui n'a pas permis d'y associer les partenaires sociaux – je veux dire les organisations syndicales, puisque les organisations patronales, elles, sont associées depuis longtemps.

Après vous être attaqué au monopole de l'ANPE – et je pourrais prendre d'autres exemples du service public de l'emploi –, vous avez laissé le privé prendre la plus grosse part du gâteau. On constate dans les départements et les régions que, partout où le privé a été chargé d'une mission sur le placement des demandeurs, il y a une forme de césure : les personnes les plus éloignées de l'emploi restent bien évidemment à l'ANPE, celles les plus proches de l'emploi vont vers le privé, au bénéfice de qui vous savez.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera cette motion avec détermination, et nous essaierons, pendant toute la durée du débat, de faire prévaloir un certain nombre de nos positions contre le projet. Nous tenterons également d'améliorer certaines dispositions au bénéfice des personnels des différentes structures et des demandeurs d'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

La parole est àM. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte vise à améliorer le service public de l'emploi, en le rendant plus moderne, mieux adapté au marché du travail et surtout plus efficace pour les demandeurs d'emploi, inscrits ou non dans les fichiers des ASSEDIC ou de l'ANPE.

C'est l'objectif que nous devons nous fixer. Il ne s'agit pas de bloquer un texte qui a pour but de moderniser le service public de l'emploi, véritable guichet unique pour les demandeurs d'emploi et pour nos entreprises, notamment pour le recouvrement des cotisations.

Bien évidemment, le Nouveau Centre soutient ce texte, même si, comme tout un chacun, nous avons quelques inquiétudes, notamment sur les maisons de l'emploi. L'excellent Jean-Paul Anciaux (« Excellent, en effet ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) nous donnera sans nul doute un éclairage sur ce point. Quel sera le rôle de ces maisons au sein du service public de l'emploi ? Comment se fera l'articulation avec ces structures locales très importantes, parce que les élus locaux sont impliqués ?

Autre inquiétude : comment les élus locaux seront-ils des acteurs du parcours d'insertion ? Martin Hirsch nous indiquait, il y a à peine une semaine, qu'il était préoccupé par cette modernisation et qu'il tenait à ce que le service public de l'emploi prenne toute sa place dans l'insertion et les parcours d'insertion. Nous vous entendrons donc, madame la ministre, avec intérêt sur ces questions.

Nous aurions, certes, préféré une loi de programmation, générale, dans laquelle le service public de l'emploi soit le pilier de la politique de l'emploi, autour duquel s'articuleraient des textes sur la formation professionnelle, le Grenelle de l'insertion, la représentativité syndicale, ou encore la modernisation du travail avec la flexisécurité. Le Gouvernement a choisi une autre voie, privilégiant une trajectoire qu'il aura à coeur de développer au cours du débat. C'est donc un petit reproche que je lui adresse sur ce point. Mais j'attends avec impatience le débat qui, je l'espère, permettra de lever mes inquiétudes.

Il est urgent de réformer le service public de l'emploi au bénéfice des demandeurs d'emploi, notamment de ceux qui sont le plus en difficulté. C'est la raison pour laquelle le groupe Nouveau Centre ne votera pas l'exception d'irrecevabilité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

J'informe l'Assemblée que, sur le vote de l'exception d'irrecevabilité, je suis saisi par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Paul Anciaux, pour le groupe de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

Sur les maisons de l'emploi, je vous répondrai, cher collègue Vercamer, au cours du débat. Pour l'heure, je m'attacherai à répondre à l'exception d'irrecevabilité.

Le projet de loi qui nous est soumis est une des promesses présidentielles, une de ces réformes qu'on prétendait impossible. Une fois de plus, le groupe socialiste use des moyens de procédure (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

…pour remettre en cause un texte qui, sur le fond, répond aux besoins de notre pays et qui ne soulève aucune interrogation d'ordre constitutionnel. Il n'est plus temps de se perdre en discussions creuses : l'essentiel c'est d'avancer dans la réforme.

Quels avantages présente la réforme ? La fusion des réseaux opérationnels de l'ANPE et de l'UNEDIC présente des avantages réels d'abord pour les demandeurs d'emploi. Elle permettra de simplifier les démarches des demandeurs d'emploi ; de leur offrir une gamme de prestations complète et unifiée, qu'ils soient indemnisés ou non ; et de déployer davantage d'agents sur le terrain, directement au service des usagers – soixante puis trente demandeurs d'emploi pour un conseiller l'ANPE contre cent ou cent vingt actuellement !

En outre, la réforme permet aussi d'accélérer la décrue du chômage. En effet, l'objectif est de mettre en place une structure, qui permette de réduire de neuf mois à trois mois la durée moyenne nécessaire aux chômeurs pour retrouver un emploi et, plus globalement, de contribuer à faire baisser le taux de chômage à 5 %. Nous sommes sur la bonne voie : le taux de chômage est passé de 8,8 % en 2006, à 7,9 % au troisième trimestre 2007, son niveau le plus bas depuis cinq ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

Cela, c'est concret et répond aux attentes !

Permettre d'améliorer l'adéquation des demandes d'emploi aux offres des entreprises, c'est en finir avec plusieurs milliers d'offres d'emploi non pourvues, du fait du manque de qualification, du manque de mobilité ou plus simplement de la mauvaise mise en relation entre demandeurs et offres à pourvoir.

Loin d'être un désengagement de l'État, c'est au contraire un renforcement significatif de son rôle et un engagement redoublé.

Le projet de loi précise les missions et l'organisation de la nouvelle institution. Les parlementaires du groupe de l'UMP soutiennent le Gouvernement car les mesures proposées vont dans le bon sens : cela d'autant plus volontiers que nous avons pu discuter depuis plusieurs mois de ce projet. Mme la ministre a, en effet, dès le mois d'octobre, rencontré les commissaires de la commission des affaires sociales et m'a confié une mission.

L'exception d'irrecevabilité présentée par Mme Iborra, au nom du groupe socialiste, n'est pas fondée en droit. Une fois de plus, c'est un prétexte et un artifice de procédure pour ne pas avancer sur une réforme essentielle. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Pour toutes ces raisons, le groupe de l'UMP rejettera cette motion ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Nous avons, au moins à gauche de cet hémicycle, écouté avec un grand intérêt la motion défendue par Mme Iborra. (« À droite aussi ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) Au-delà de la qualité technique de son exposé, nous avons aussi apprécié son souci de la vérité.

Nous, socialistes, nous ne contestons pas, nous encourageons, et nous demandons même une réforme ! (« Bravo » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Attendez, chers collègues de la majorité, je sens que vous n'allez pas apprécier la suite ! Réforme signifie progrès pour les usagers.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. En effet, c'est de cela qu'il s'agit !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Or cette réforme a été, pour le moins, précipitée. M. Gille a, dans son rappel au règlement, déploré l'absence de dialogue et la confusion. Une fois de plus, mais c'est une habitude de ce Gouvernement, on travaille dans la précipitation. Or ce n'est pas ainsi que l'on peut faire de bonnes réformes.

Oui, le groupe socialiste est favorable au guichet unique !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Bravo !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Mais pour nous, réforme signifie progrès pour les bénéficiaires. Or il n'en sera rien avec cette réforme et les demandeurs d'emploi n'en tireront pas avantage. Le Gouvernement ne cesse de faire référence aux pays voisins. Mais Mme la ministre oublie – et Mme Iborra, fort heureusement, l'a rappelé avec force – de dire que dans ces pays, les régions jouent un grand rôle dans la lutte contre le chômage, ce qui n'est pas proposé dans ce texte.

En fait, ce texte est avant tout un tour de passe-passe en matière financière parce que « les caisses sont vides ». Pourquoi ? Parce que vous avez, cet été, distribué des cadeaux fiscaux aux plus privilégiés (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire), et ce à hauteur de quinze milliards, ce qui est insupportable. (« Menteur ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous n'aimez pas vous l'entendre rappeler, et Mme Iborra a eu bien raison de vous rafraîchir la mémoire.

Malheureusement, les caisses sont vides et vous cherchez tous les artifices pour pouvoir, un tant soit peu, les remplir, toujours au détriment des mêmes ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Menteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Si nous sommes favorables à la motion défendue par Mme Iborra, c'est aussi parce que, sous-jacente à ce projet, il y a la chasse aux fraudeurs potentiels, les fraudeurs les plus faibles. Depuis six mois, vous n'avez de cesse de poursuivre les plus faibles, jamais, les puissants ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

À chaque fois, vous éludez le problème ! Avec vous, ce sont toujours les plus faibles qui trinquent ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Un député du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Il s'écoute parler !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Vous nous rebattez les oreilles avec les 300 000 à 500 000 emplois non pourvus. Mais si ces emplois demeurent vacants, notre collègue communiste l'a rappelé, c'est pour deux raisons majeures auxquelles votre texte n'apporte aucune solution ! D'une part, ces emplois sont très mal rémunérés, et, d'autre part, les conditions de travail sont tout à fait détestables. Et dans ce domaine, vous ne faites aucune proposition, madame la ministre.

Vous affirmez aussi que grâce à la fusion ANPE- ASSEDIC, le chômage baissera de 5 %. J'avoue n'avoir toujours pas compris par quel mécanisme, on aboutirait à ce résultat !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Ce projet exclut – heureusement que Mme Iborra était là aujourd'hui pour vous rappeler cet élément, et je ne doute pas que M. Gille sera tout aussi brillant dans sa démonstration ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire) – les collectivités locales, l'AFPA et les missions locales. Ce projet est un modèle anglo-saxon, qui n'est pas le nôtre. C'est pourquoi le groupe socialiste votera l'excellente exception d'irrecevabilité défendue par Mme Iborra ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Nous allons maintenant procéder au scrutin public, précédemment annoncé, sur l'exception d'irrecevabilité.

(Il est procédé au scrutin.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 143

Nombre de suffrages exprimés 143

Majorité absolue 72

Pour l'adoption 40

Contre 103

L'exception d'irrecevabilité est rejetée. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Le Guen

J'ai reçu de M. Jean-Marc Ayrault et des membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche une question préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 4, du règlement.

La parole est à M. Jean-Patrick Gille.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Madame la ministre, si chacun s'accorde à estimer nécessaire l'amélioration du service public de l'emploi – expression que je préfère à celle de « marché public de l'emploi » concept que vous venez de lancer et qui me paraît peu clair –, je souhaite vous interroger sur votre précipitation à organiser la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC, et surtout analyser les objectifs et les conséquences de ce choix précipité alors qu'il aurait fallu proposer la création d'un service public de la sécurisation des parcours professionnels.

Tous les acteurs de l'emploi s'accordent sur la nécessité d'améliorer les dispositifs d'accueil et d'accompagnement des demandeurs d'emploi. Nombreux sont ceux qui attendent un meilleur pilotage, une meilleure cohérence de ces dispositifs, et souhaitent éviter les doublons à la fois onéreux pour la collectivité et inefficaces.

Le principe d'un rapprochement entre les services chargés du suivi de l'offre et de la demande d'emploi et ceux chargés de l'indemnisation est accepté par tous. Le mouvement est d'ailleurs largement engagé, même si beaucoup pensent qu'il faut néanmoins distinguer deux métiers différents.

La recherche, par le rapprochement de l'ANPE et des l'ASSEDIC, d'un meilleur maillage du territoire, notamment rural, ne peut que susciter l'adhésion et, souvent, le soutien des collectivités locales. Pour autant, le projet de fusion, que vous nous proposez dans la précipitation sous l'injonction du Président de la République,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

… qui, en effet, ne vous avait donné que quinze jours pour le faire, ne me paraît pas répondre aux exigences d'un véritable service public de l'emploi dont notre pays et notre économie ont besoin aujourd'hui.

L'urgence invoquée ne permet pas de mener la réforme de fond nécessaire susceptible d'enrayer à la fois la précarisation constante de l'emploi et la pénurie de main d'oeuvre dont vous parliez. Comme l'a dit un responsable de l'UNEDIC « votre projet aurait été bien il y a quinze ans ! ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

En effet, aujourd'hui, trois embauches sur quatre sont des emplois temporaires et ils représentent désormais près de 14 % des emplois. Ce taux atteint 44 % chez les 18 - 24 ans. Ainsi, un jeune sur deux, qui fréquente les missions locales, travaille, mais pas assez pour vivre correctement et se stabiliser dans sa vie personnelle et professionnelle !

En outre, 45 % à 50 % des chômeurs ne sont pas indemnisés par les ASSEDIC faute d'avoir pu travailler assez.

De plus, alors que le risque de passage du CDI au chômage est de 5 %, il peut atteindre 30 % pour les titulaires de contrats précaires ou temporaires.

Nous sommes confrontés à une précarisation et à une dualisation croissante du marché du travail. Si, statistiquement, le taux de chômage officiel baisse pour les raisons démographiques que nous connaissons et par le jeu des radiations, la qualité de l'emploi se détériore pour une grande partie des salariés chaque jour davantage, et les plus jeunes ne connaissent bien souvent, si j'ose dire, que des « carrières de précaires »

Voilà, madame la ministre, la réalité de l'emploi et du marché du travail dans notre pays. Et ce ne sera pas une simple fusion quasi administrative qui la changera !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Alors pourquoi une telle précipitation ? Puisque cela fait vingt ans, paraît-il, qu'une réforme est nécessaire, pourquoi ne pas attendre six mois de plus pour réformer le service public de l'emploi dans de meilleures conditions et, surtout, en prenant en compte les évolutions du marché du travail ?

Pourquoi conduire dans la précipitation la fusion des réseaux opérationnels de placement et d'indemnisation des demandeurs d'emploi avant de connaître le contenu des politiques d'emploi qui découleront des réformes annoncées ? Rappelons-les. Une modernisation du marché du travail prenant appui sur l'accord qui vient d'être signé par la majorité des partenaires sociaux sera menée par Xavier Bertrand tandis qu'est prévue une refonte des minima sociaux et des politiques d'insertion, fondée sur le Grenelle de l'insertion piloté par Martin Hirsch, qui devrait s'achever au printemps. Quant à la réforme de la formation professionnelle, vous devriez vous-même la conduire, madame la ministre. Pour finir, une réforme ou du moins une renégociation de l'indemnisation des demandeurs d'emploi sera menée par les partenaires sociaux au premier semestre. Dès lors, comment comptez-vous réorganiser efficacement les réseaux avant de savoir quelles seront dans six mois, voire moins, l'architecture des dispositifs et les mesures en faveur de l'emploi et de l'insertion professionnelle ?

D'autre part, est-il sérieux de mener ce travail sans avoir évalué le plan de cohésion sociale lancé par votre collègue Jean-Louis Borloo en 2005, qui organise déjà un rapprochement entre les acteurs des politiques d'emploi ? Comment ne pas faire d'abord l'évaluation de la mise en place du guichet unique ANPE- ASSEDIC, censée être d'ores et déjà effective, avec des résultats contrastés, sur la moitié du territoire, ou encore celle de la création de deux cents maisons de l'emploi regroupant l'ensemble des acteurs concernés autour de bassins d'emploi? Une mission d'information présidée par notre collègue Mme Dalloz leur est consacrée mais elle ne rendra son rapport qu'au printemps. Qu'en est-il du lancement du dossier unique du demandeur d'emploi, attendu depuis si longtemps ? Enfin, je n'oublie pas la mise en oeuvre du suivi mensuel personnalisé par l'ANPE, sur lequel nous aurons à revenir.

Puisque nous parlons d'évaluation, je ne veux pas croire que votre précipitation soit uniquement due à votre crainte de subir une mauvaise appréciation dans le cadre de l'évaluation des ministres, dont on sent bien que l'un des critères principaux sera la docilité et la diligence à répondre aux injonctions parfois paradoxales du Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Loin de moi aussi l'idée d'un manque d'articulation entre les différents ministères concernés ou d'un excès d'émulation entre eux. Néanmoins il est difficile de voir la cohérence fonctionnelle et chronologique de l'ensemble des réformes annoncées et de comprendre pourquoi vous commencez par la fusion du service public de l'emploi.

Reste donc l'hypothèse, déjà évoquée par mes collègues, qu'il existe un plan d'ensemble mais que vous ne souhaitez pas nous le communiquer. Il s'agirait, pour faire simple, de l'importation du modèle anglo-saxon avec une harmonisation sur ses standards.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Seulement, vous hésitez à l'avouer aux Français de peur de les affoler. Sachez qu'ils ne tarderont pas à découvrir que derrière les chiffres rassurants d'un taux de chômage de 5 % se cache une réalité plus contrastée avec l'explosion de la précarité et l'accroissement du nombre des travailleurs pauvres : un salarié britannique sur quatre connaît le chômage chaque année. Est-ce la mise en place d'un Jobcentre à la française que vous souhaitez ? Encore faut-il rappeler que cet organisme regroupe 75 000 salariés, soit près du double des effectifs que vous prévoyez.

Comment pouvez-vous croire qu'il suffise de fusionner deux réseaux pour que le chômage baisse mécaniquement jusqu'à 5 % et que le taux d'activité monte à 70 % ? C'est confondre l'outil et la politique qu'il est censé mettre en oeuvre. Comme l'a souligné la présidente de l'UNEDIC, votre projet met la charrue avant les boeufs, c'est-à-dire qu'il réforme l'outil avant le contenu. L'impréparation et l'improvisation risquent de limiter la portée du dispositif annoncé, voire de retourner son effet.

Venons-en aux objectifs que vous poursuivez et aux conséquences de votre précipitation.

Vous parlez de « flexisécurité », voie vers laquelle l'accord sur la modernisation du travail signé par les partenaires sociaux s'engage timidement. Mais vous bricolez à la hâte un outil qui sera uniquement un outil de placement et de contrôle des demandeurs d'emploi – et c'est l'un de nos principaux reproches. Votre projet n'apporte en réalité aucune réponse à la montée de la précarité.

Vous invoquez la nécessité de rendre le marché du travail plus fluide et plus flexible, mais savez-vous que, selon l'INSEE, le temps partiel concerne déjà 18 % des actifs dans notre pays et qu'un salarié sur quatre change d'emploi chaque année ? Entre 2000 et 2005, la part des salariés travaillant la nuit est passée de 4,6 % à 7,1 %, ceux travaillant le samedi de 25 % à 31,3 %, et le dimanche de 9 à 14 %. Mais j'ai l'impression que ces derniers chiffres ne vous inquiètent pas trop car j'ai cru comprendre que vous proposiez d'ouvrir les magasins tous les dimanches.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Vous évoquez des pénuries de main-d'oeuvre, mais ne sont-elles pas avant tout liées à l'insuffisance des actions de formation, dont seuls 8 % des chômeurs bénéficient, à un problème d'orientation, qu'il s'agisse de la formation initiale ou de la formation professionnelle, ou encore à une gestion à courte vue des compétences et une sous-utilisation des dispositifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dont vous avez sabré les crédits, en particulier pour la validation des acquis de l'expérience ? Enfin, ne doit-on pas aussi invoquer des questions de rémunération et de conditions de travail dans certains secteurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Gille

Il ne convient pas d'augmenter la flexibilité, mais de l'améliorer et de lutter contre la scandaleuse précarité que nous avons laissé s'installer, notamment chez les jeunes.

Notre première préoccupation doit être désormais de sécuriser les parcours professionnels. Or votre projet de fusion ne répond pas du tout à cet objectif. Il vise au contraire à augmenter la fluidité par une gestion administrative voire bureaucratique des demandeurs d'emploi, déjà bien engagée à travers l'obligation d'accepter des offres sous peine de sanction et la suspension des indemnités dont il faut savoir qu'elle relève de systèmes automatisés, qui ne permettent ni débat contradictoire ni explication. Certains demandeurs d'emploi ont ainsi vu leurs indemnités suspendues alors même qu'ils s'étaient rendus à des entretiens d'embauche.

Ne sous-estimez pas non plus le fait que cette fusion à marche forcée risque de donner lieu à des tensions avec les personnels : la manifestation qui a lieu devant le Palais Bourbon nous le confirme. Ils s'inquiètent pour leur statut mais aussi pour les futures nominations à la tête des directions régionales – M. Méhaignerie les a évoquées– et s'interrogent sur l'évolution de leurs missions. Ils craignent que le placement à outrance et la course aux radiations prennent le pas sur l'accompagnement et le développement des compétences et des qualifications.

Malheureusement, je crois qu'ils ont en partie raison. L'économie de votre projet, son étroitesse et votre précipitation s'expliquent du reste de plusieurs manières. Vous voulez avant tout mener une politique de pression sur les demandeurs d'emploi, notamment en transférant le contrôle à la nouvelle institution. Vous comptez, par ailleurs, faire financer le dispositif par l'UNEDIC, qui revient à meilleure fortune, en l'obligeant à y consacrer 10 % de ses fonds, sans donner de garanties sur les financements de l'État. Vous entendez également faire des économies d'échelle sur les locaux et les personnels, à l'instar des fusions des réseaux bancaires, et confier la collecte des contributions à l'URSSAF. Tout cela conduit à étendre la mainmise de l'État sur les flux financiers et à opérer un glissement vers le tripartisme, comme pour la sécurité sociale. Contrairement à ce vous affirmez, le paritarisme n'est pas préservé car l'UNEDIC, soyons francs, deviendra une coquille vide. Et je n'oublie pas votre intention d'éliminer ou du moins de remettre en cause le rôle des régions dans les politiques d'emploi et de formation.

Pour résumer, votre projet est restreint, administratif, centralisé et répressif !

Si vous vouliez mettre en oeuvre une véritable « flexisécurité » à la française, la nouvelle institution ne devrait pas se limiter pas au placement mais proposer un accompagnement global des demandeurs d'emploi et même de l'ensemble des salariés, en vue de la sécurisation des parcours professionnels. Dès lors, il ne s'agirait plus d'optimiser le réseau de placement, comme vous le proposez dans votre projet, mais de garantir à chacun le droit à un suivi individuel, à un référent unique l'accompagnant dans ses démarches de recherche d'emploi, mais aussi à une évaluation de ses compétences, à une formation et à une qualification, le cas échéant, à une reconversion. En un mot, il s'agirait de rendre effectif le droit à la formation tout au long de la vie, une formule que j'aurais aimé vous entendre prononcer, madame la ministre !

Tout cela nécessiterait bien évidemment des moyens supérieurs – rappelons qu'aujourd'hui, la France consacre 40 euros par demandeur d'emploi contre 110 euros au Danemark – ainsi que la mobilisation de l'ensemble des partenaires et des acteurs afin de mener une concertation approfondie sur ces sujets aussi bien avec les partenaires sociaux que les collectivités territoriales, au premier rang desquelles les régions qui, malgré leurs compétences en matière de développement économique et de formation professionnelle, sont les grandes absentes de votre projet de loi.

En procédant ainsi, le Gouvernement croit sans doute tenir une promesse de campagne. Mais il ne répond pas de manière satisfaisante aux exigences d'une réforme en profondeur de notre politique de l'emploi et s'écarte de la mise en oeuvre de la sécurisation des parcours professionnels que réclame le développement de l'économie de la connaissance.

Pour notre part, nous proposons la création d'un service public de la sécurisation des parcours professionnels. La fusion que vous proposez ne peut se concevoir qu'adossée à une réorientation en profondeur de la politique de l'emploi, qu'il faut à présent adapter aux nouveaux enjeux du marché du travail.

Quels sont-ils ?

D'abord, la segmentation n'a fait que s'accentuer entre salariés à statut classique et salariés précaires et a été aggravée pas les différences de traitement entre chômeurs selon qu'ils sont indemnisés ou non. Cette segmentation, la politique de l'emploi ne doit pas avoir pour effet de la reproduire et de l'amplifier mais de la combattre. C'est pourquoi une telle réforme ne peut être conduite indépendamment de celle de l'assurance chômage.

Ensuite, il existe un risque de déqualification des salariés ou des candidats à l'emploi, qui accroît leur vulnérabilité face au chômage. Or les rapports officiels se succèdent pour nous rappeler que les moyens que la nation consent à la formation continue ne sont pas utilisés efficacement et ne bénéficient pas à ceux qui en ont le plus besoin. C'est pourquoi une telle réforme ne peut être conduite indépendamment de celle de la formation professionnelle.

Enfin, les évolutions démographiques, liées au vieillissement de la population active, vont accroître les tensions sur le marché du travail entre offres et demandes d'emploi. C'est pourquoi une telle réforme ne peut être conduite indépendamment d'une territorialisation des politiques de l'emploi.

Le groupe socialiste a donc choisi d'entrer dans ce débat avec un ensemble de propositions qui visent à aller beaucoup plus loin que le projet du Gouvernement.

En premier lieu, nous proposons la création d'un véritable service public de l'emploi, de l'orientation et de la formation.

L'efficacité des politiques publiques de l'emploi est affaiblie aujourd'hui par la multiplicité des dispositifs et des interlocuteurs. La fusion que vous proposez n'a de sens que si elle permet de répondre à cet enjeu. Le nouveau service public de l'emploi devra prendre en charge toutes les étapes du parcours vers l'emploi, et pas simplement le placement et le contrôle. Sa création constituera la pierre angulaire d'une véritable sécurisation des parcours professionnels copilotée par l'État et les conseils régionaux, garantissant à ceux qui occupent un emploi, comme à ceux qui en recherchent un, tous les moyens utiles à l'accomplissement de leur projet.

Ensuite, nous proposons l'instauration d'un réfèrent unique dès le premier mois de l'inscription du demandeur d'emploi et non à partir du quatrième mois, afin de permettre un meilleur accompagnement du demandeur d'emploi. Cette mesure, qui s'inspire des expériences réussies en la matière dans d'autres pays européens, suppose naturellement que l'on précise le nombre d'emplois supplémentaires qui seront affectés aux missions d'accueil, de placement et d'accompagnement et que ces missions soient clairement distinctes de celle du contrôle.

Nous proposons également de réduire le nombre moyen de conseillers par demandeur d'emploi. La fusion n'a de sens en effet que si elle permet un accompagnement renforcé des demandeurs d'emploi. La réalité correspond aujourd'hui à une moyenne de 130 à 140 demandeurs d'emploi par conseiller et de 80 à 90 si l'on ne prend en compte les demandeurs d'emploi qu'à compter du quatrième mois. Si l'on veut assurer l'efficacité du dispositif, il faut atteindre un objectif d'un conseiller pour 50 demandeurs d'emploi, ratio plus proche de la réalité observée dans les pays qui font preuve du maximum d'efficacité en matière de reclassement.

Nous demandons aussi un renforcement et une meilleure articulation des moyens et des outils d'intervention de l'État. Or votre projet de loi est assez muet sur ce sujet. Pourtant, il en est la conséquence. Il n'indique pas quel devenir vous réservez aux services de votre propre ministère, aux outils et aux moyens gérés par les directions départementales du travail et de la formation professionnelle, aux services d'orientation de l'AFPA qui manifestent actuellement devant nos portes, ni même comment s'articule ce travail avec celui des dispositifs d'insertion des conseils généraux dans le cadre du RMI, ou encore avec les PLIE initiés par les collectivités locales.

De la même manière, le mépris dans lequel vous tenez les régions vous empêche d'évoquer l'articulation avec les programmes de formation dont elles ont la compétence.

Notre dernière proposition, mais non la moindre, consiste à mobiliser tous les acteurs à partir des enjeux concrets des territoires.

Le projet gouvernemental constitue une véritable usine à gaz dont le pilotage reste indéfini, pour ne pas dire flou. Le rôle des partenaires sociaux, y compris au sein de la nouvelle institution, reste incertain. Les régions, alors qu'elles ont la compétence en matière de formation et de développement économique, sont tenues à l'écart. Or le pilotage du dispositif constitue un enjeu essentiel. Le niveau régional nous paraissant être le bon niveau, nous proposons que la nouvelle institution soit copilotée par le préfet de région et le président du conseil régional, afin que l'on aboutisse à une coproduction des politiques de l'emploi à l'échelle de chaque région.

Nous demandons également la signature de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens entre la nouvelle institution, l'État, le conseil régional et les départements, en vue de préciser les ressources allouées par chaque partenaire à la réalisation des objectifs qu'ils auront déterminés collectivement à partir des réalités locales du marché du travail.

Cette solution permettra, dans le respect des responsabilités de chacun, une véritable mobilisation de tous et la prise en compte des besoins concrets des territoires.

Le même processus sera appliqué au niveau des bassins d'emploi et des agglomérations. Les maisons de l'emploi pourraient constituer, lorsqu'elles existent, l'instance normale de pilotage.

L'exemple des maisons de l'emploi témoigne à cet égard de votre improvisation sur le pilotage, madame la ministre. Dans un premier temps, vous nous avez indiqué un gel des conventions des maisons de l'emploi alors qu'aujourd'hui vous procédez à une sorte de réhabilitation de ce concept, si bien qu'on ne sait plus très bien où on en est dans cette valse-hésitation, faute d'avoir clairement déterminé au départ le pilotage des politiques de l'emploi et le rôle que vous assignez aux maisons de l'emploi.

En conclusion, le texte qui est soumis à notre examen ne tient pas compte du plan de cohésion sociale lancé en 2005 par Jean-Louis Borloo qu'il serait peut-être temps d'évaluer, ni des évolutions récentes du marché du travail, notamment de l'aggravation de la précarité et de la segmentation du marché du travail, ni des réformes annoncées en matière de marché du travail, d'indemnisation, de formation professionnelle et des dispositifs d'insertion, ni des stratégies territoriales pour l'emploi conduites par les collectivités locales – qu'il s'agisse des maisons de l'emploi, du devenir des PLIE ou des missions locales –, ni encore de l'inquiétude des personnels quant à leur statut notamment par rapport à la mise en place d'une nouvelle convention collective des ASSEDIC. On explique à ces personnels qu'elle sera meilleure, mais ils sont attachés à celle qui existe : aussi, pourquoi ne pas la conserver ?

Madame la ministre, votre projet de loi ne tient pas compte non plus du dissensus des partenaires sociaux sur la question du recouvrement des cotisations chômage par l'URSSAF et il ne donne pas d'information sur le devenir de l'AFPA, sur celui des directions du travail et de la formation professionnelle ou encore sur celui des missions locales. C'est donc peu de dire que votre projet n'expose pas clairement la politique de l'emploi que vous comptez mener ni même son pilotage, pourtant essentiel. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à voter cette question préalable, afin de mieux préparer la mise en place d'une politique de l'emploi tout entière tournée vers la mobilisation des acteurs dans le cadre d'un nouveau service public de l'emploi orienté en fonction des besoins concrets des territoires, de leurs entreprises, de leurs salariés et de leurs demandeurs d'emploi plutôt que de poursuivre la discussion d'un projet de fusion conçu par le Gouvernement dans la hâte et manifestement inachevé, et qui, finalement, posera plus de problèmes qu'il n'en résoudra. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Roy

Belle prestation : 19 sur 20 ! M. Gille est un homme habile !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Monsieur le député, vous avez évoqué à plusieurs reprises ma précipitation. Au risque de paraphraser Arletty, j'aurais tendance à vous demander si j'ai une tête de précipitée ! (Sourires.)

J'ai fait le compte des réunions que nous avons tenues : quatre séries de réunions bilatérales ont eu lieu entre juillet et novembre avec toutes les organisations syndicales et patronales. Je tenais à apporter cette précision car M. Muzeau a tendance à croire que je ne rencontre que les organisations patronales.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

En tout cas, vous n'écoutez que les organisations patronales !

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi

Pas du tout ! Du reste, vous verrez qu'on a écouté tout le monde !

À cela s'ajoutent de nombreuses réunions qui ont eu lieu entre mon cabinet, mes services et les différentes organisations. De plus, au cours d'une réunion du Conseil supérieur de l'emploi qui a duré plus de six heures, nous avons examiné le texte article par article afin de tenter de l'améliorer.

Par ailleurs, les intersyndicales ont été reçues deux fois par chacune des deux institutions, l'ANPE et les ASSEDIC, et chaque organisation syndicale l'a été individuellement. Il y a donc eu plus de concertation que de précipitation.

S'agissant de la cohérence des réformes, vous avez donné l'impression que le dispositif était touffu, qu'il y avait une émulation entre les différents ministres et qu'on ne savait pas très bien de quoi procédait ce mouvement général. Or c'est faux. Il y a une cohérence parfaite. Nous avons lancé, dès 2007, la négociation sur le contrat de travail en appelant les partenaires sociaux à se pencher sur l'intégralité du contrat, son début, sa sortie, la réflexion sur l'opérateur unique et sur le fonctionnement du marché de l'emploi. En 2008, il sera question de la remise à plat de l'assurance chômage à travers la négociation de la convention et de la réforme de la formation professionnelle.

Tout cela procède donc d'une grande logique et d'une grande cohérence avec toujours le même objectif : aboutir à moins de chômage et à plus d'emplois.

Je suis heureuse de vous entendre dire que vous allez faire des propositions. J'ai l'impression que vous allez vous rallier à ce texte.

Vous demandez un service public de l'emploi couvrant l'orientation, le conseil, l'insertion : c'est ce que nous proposons.

Vous souhaitez un accompagnement renforcé pour le demandeur d'emploi avec un référent unique : c'est ce que nous proposons.

Vous souhaitez également que le nombre de demandeurs d'emploi par conseiller soit moins important qu'actuellement, en particulier pour les publics les plus éloignés de l'emploi : c'est ce que nous proposons.

Vous proposez que davantage d'agents soient déployés sur le terrain : c'est ce que nous proposons.

Vous demandez encore une articulation sur le terrain des différents outils au niveau régional sous l'égide des directions régionales du travail ainsi qu'une coopération avec les régions et une dimension territoriale : c'est ce que nous proposons. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

J'ai bien entendu, madame Iborra, monsieur Gille, que vous souhaitez que les régions soient fortement impliquées et qu'elles soient les pilotes de l'ensemble du système dans bien des cas. Ce n'est pas la logique que nous avons retenue car il nous semble que le service public de l'emploi relève bien de la responsabilité de l'État. C'est la raison pour laquelle le nouvel établissement public administratif sera, pour ses déclinaisons régionales, placé sous la direction du préfet qui assurera la coordination en très étroite coopération et concertation avec les instances territoriales et en y incluant tous les autres acteurs, c'est-à-dire les maisons de l'emploi, les missions locales et les PLIE, qui doivent eux aussi trouver leur place dans ce mécanisme.

(Mme Catherine Génisson remplace M. Jean-Marie Le Guen au fauteuil de la présidence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Madame la présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt l'opposition. Mes collègues de la majorité trouvent que j'ai un sens critique assez développé. Mais, sur ce texte qui était très attendu, je ne vois pas où sont les difficultés.

La France est sur-administrée et sous-organisée, nous disent nos partenaires internationaux. Les procédures sont trop complexes et les structures s'empilent. Le présent texte nous permet d'aller vers une simplification (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), et j'ai pu le mesurer sur le terrain.

Je constate que les demandeurs d'emploi mais aussi les entreprises attendent un accompagnement amélioré, simplifié et individualisé.

Ayons un peu l'esprit critique : aujourd'hui, 25 % seulement des demandeurs d'emploi passent par l'ANPE. On doit donc se poser des questions quant à l'efficacité de notre système.

Le seul différend qui existait entre la ministre et nous a été résolu. Nombre d'entre nous croient à la réalité des maisons de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Les maisons de l'emploi permettent de réunir tous ceux qui doivent participer à la politique de l'emploi,...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Les maisons de l'emploi sont financées !

Si nous voulons qu'elles soient un succès, il faut accepter qu'elles soient labellisées et évaluées en permanence. Il ne suffit pas de créer une structure supplémentaire, il faut la mobiliser au service de l'emploi, de l'entreprise, de la formation professionnelle. J'écoute toujours les critiques avec attention, mais, après l'exposé très clair de Mme Lagarde, je suis convaincu que nous avons là un bon texte qui améliorera réellement la politique de l'emploi en vue du retour au plein-emploi. C'est la raison pour laquelle je soutiens ce projet de loi totalement. Vous verrez qu'il aura des résultats extrêmement positifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Dans les explications de vote, la parole est à M. Gérard Cherpion, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cherpion

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, notre collègue Gille a commencé en déclarant qu'il fallait améliorer le service public de l'emploi. Mais ce projet de loi va au-delà. Il constitue la première étape du retour au plein-emploi, objectif clairement réaffirmé par le Président de la République et Mme la ministre. Il est clair que cela passe, aussi bien pour les demandeurs d'emploi que pour les entreprises – dont 25 % seulement, 30 % dans certains secteurs, font appel à l'ANPE pour recruter – par la simplification des parcours qui sont aujourd'hui trop complexes.

Sur le terrain, déjà, nous avons expérimenté, grâce à la loi de cohésion sociale de M. Borloo, le contrat de transition professionnelle dans sept bassins d'emploi. Il permet au chômeur d'être mieux indemnisé, d'accéder à une formation et de bénéficier d'un accompagnement, comme le préconise l'opposition, de trente personnes environ par agent. Peut-être ce taux d'encadrement est-il encore trop élevé, mais c'est bien l'évaluation qui permettra de juger le seuil pertinent, entre les 120 personnes actuellement suivies par un même agent et les trente prévues.

Par ailleurs, tous les acteurs de l'emploi sont impliqués, de même que les régions. Or on constate que la participation des régions à la formation a été relativement faible dans le cadre des CTP, mais ils ont montré leur efficacité. Aussi souhaitons-nous que l'expérimentation, qui devait prendre fin au 1er mars, soit prolongée jusqu'à la fin de l'année, sachant que les négociations concernant l'indemnisation du chômage, que l'opposition appelle également de ses voeux, auront eu lieu à l'automne.

Vous avez souvent eu le mot « évaluation » à la bouche, monsieur Gille. Alors, oui, il faut évaluer, mais les constats sont connus depuis fort longtemps. Il s'agira simplement d'une vérification. Les partenaires sociaux ont répondu à leur façon à votre question préalable en signant un accord historique qui nous montre qu'ils souhaitent, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés français, procéder à une réforme. Nous devons donc poursuivre dans le même esprit.

Attendre semble être votre mot d'ordre. Vous voulez toujours attendre, mais il faut bien sécuriser les parcours professionnels. Or vous restez figés sur des schémas anciens.

En fait, vous critiquez plus la forme que le fond, dont vous n'avez guère parlé. Les demandeurs d'emploi ne semblaient pas au centre de vos préoccupations, vous vous focalisiez plutôt sur les structures, le nom de l'institution, mais pas véritablement sur le fond, qui correspond pourtant au besoin essentiel du demandeur d'emploi : retrouver un emploi stable.

Les entreprises attendent également cette réforme, et le projet de loi ouvre la voie à une nouvelle vision du travail, des relations entre les partenaires sociaux, l'État et les différentes collectivités. On ne peut que s'en réjouir. C'est la raison pour laquelle le groupe de l'UMP votera contre la question préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

J'ai écouté avec attention les explications de Mme la ministre. Et, dans sa deuxième intervention sur les motions de procédure, elle a apaisé mes inquiétudes (« Déjà ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche) en mettant en perspective les projets de loi importants qui vont nous être soumis dans les prochains mois.

Sur la formation professionnelle d'abord. On sait que ses acteurs sont nombreux et qu'elle ne bénéficie qu'aux gens déjà les mieux formés sans atteindre les gens les plus éloignés de l'emploi. La dispersion entre les acteurs et les organismes de financement nuit à l'efficacité de la formation professionnelle. Le service public de l'emploi a un rôle à jouer en la matière, en coopération, bien sûr, avec les régions, les organismes paritaires collecteurs agréés – les OPCA –, les services de l'AFPA et les organismes de formation que le projet de loi devrait réformer et sans doute rassembler, pour parvenir à une formation plus efficace.

Ensuite, le marché du travail sera modernisé grâce à l'introduction de la « flexisécurité » rendue possible par la convention sur le contrat de travail qui a été acceptée par la plupart des syndicats représentatifs. Elle apportera plus de sécurité au salarié tout en laissant plus de flexibilité aux entreprises, flexibilité qui leur est nécessaire pour se développer à l'international et affronter la concurrence étrangère. Tout à l'heure, pendant la séance de questions, le Gouvernement a été interrogé sur le déficit du commerce extérieur. Eh bien, en réformant le marché du travail et grâce à la « flexisécurité », les entreprises parviendront sans doute à s'adapter.

Quant au contrat de transition professionnelle, il est très important pour les régions dont les industries ont été ravagées. Dans le Nord-Pas-de-Calais, après les mines, est venu le tour de la métallurgie, puis du textile. Le CTP est très important pour le reclassement de gens qui sont exclus de l'emploi et qui ont de grandes difficultés à trouver un travail.

Nous attendons aussi le texte sur la représentativité syndicale. Le paritarisme étant en vigueur dans le service public de l'emploi, il faut adapter la représentativité syndicale. Certaines organisations doivent la leur à leur patriotisme. Ce critère est sans doute un peu dépassé aujourd'hui. Il faudrait élargir le champ de la représentativité pour moderniser le paritarisme.

Le Nouveau Centre est de plus en plus acquis au texte, madame la ministre. Il constituera le pilier central de la réforme du droit du travail, dont beaucoup attendent une plus grande efficacité. Mon groupe ne votera donc pas la question préalable défendue par le groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La parole est à M. Christian Paul, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Le groupe socialiste votera des deux mains la question préalable car il approuve le plaidoyer implacable dressé par Jean-Patrick Gille contre le bricolage technocratique que veulent opérer le Gouvernement et sa majorité.

Derrière l'idée en apparence séduisante de la fusion des guichets, c'est le vide : il n'y aura pas demain plus de pilote qu'aujourd'hui. La concertation a été très incomplète et il faudrait, madame la ministre, que le Gouvernement comprenne que, dans une démocratie pluraliste, les collectivités sont gérées par des élus de tous les horizons politiques avec lesquels il faut travailler dans le cadre des bassins d'emploi. Il était indispensable de les traiter avec considération en les associant aux choix que vous avez faits.

D'inspiration contestable, cette réforme correspond à une nouvelle étatisation, et nous allons le démontrer tout au long du débat. Les partenaires sociaux disposeront d'un strapontin ; et celui des régions et des collectivités est carrément relevé.

La majorité se livre depuis 2002 à des improvisations successives. Les emplois aidés ont été régulièrement supprimés, et nous avons compris il y a quelques semaines en commission des affaires sociales quel jugement vous portiez, madame la ministre, sur les maisons de l'emploi.

Les socialistes voteront la question préalable car nous savons bien, nous, que les premières victimes de ce bricolage, ce seront les chômeurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Je mets aux voix la question préalable.

(La question préalable n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Dans la discussion générale, la parole est à Mme Geneviève Fioraso.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, faciliter l'accès à l'emploi des demandeurs d'emploi, c'est un objectif que nous ne pouvons que partager. Nous adhérons donc entièrement à l'objectif de simplification du service public de l'emploi, pour en améliorer l'efficacité. Dès lors, la question qui se pose est donc de savoir si le projet de loi, déposé dans la précipitation, permet d'améliorer l'accès à l'emploi de ceux qui en sont éloignés, en particulier les moins qualifiés et ceux qui vivent dans la plus grande précarité.

À l'évidence, la réponse est non. La fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC ne simplifiera rien et donnera naissance à une structure parfaitement illisible, qui n'a même pas de nom. Quand on ne nomme pas les choses, c'est mauvais signe. Cela signifie que l'on ne sait pas où l'on va. Ce qui est clair, en revanche, c'est que l'État renforce sa présence institutionnelle sans que le service apporté aux demandeurs d'emploi en matière de formation ou d'accompagnement individualisé ne soit amélioré.

Je me suis efforcée de faire un schéma de ce nouveau dispositif, dit « simplifié ». Voilà ce que cela donne ! (L'oratrice montre ce schéma.)

J'apprécierais que vous regardiez le document que je vous montre, madame la ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

C'est une usine à gaz ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Benoist Apparu

Et le schéma du dispositif actuel, vous l'avez fait ?

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Celui que vous proposez est pire encore, car il s'arrête au directeur régional du conseil régional de l'emploi. Un conseil régional de l'emploi qui n'intègre pas le conseil régional, c'est bizarre, tout de même ! Les collectivités territoriales sont totalement absentes : il n'y a ni la région, ni les départements, ni les intercommunalités, ni les communes. Et le demandeur d'emploi est là : dans le trou, hors du cadre ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

C'est vous qui le mettez dehors ! Ce n'est qu'une question d'échelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Ce qui est choquant, dans ce schéma, c'est que le demandeur d'emploi, à qui l'on promet un service amélioré, n'est même pas pris en compte ! Le point d'aboutissement de ce système très complexe est une direction technocratique – et non politique – de la nouvelle institution.

Nulle place non plus, dans ce dispositif, pour les acteurs de terrain de l'insertion, du développement économique, de la formation professionnelle : les régions, à qui l'on ne propose qu'un vague strapontin au Conseil national de cette institution sans nom, mais aussi les départements, les intercommunalités, les communes, les missions locales ou les maisons de l'emploi – dont vous avez d'ailleurs brutalement suspendu le développement après l'avoir préconisé, ce qui a suscité une protestation assez vive des élus locaux de tous les groupes. Tous les acteurs de la décentralisation, politiques et professionnels, sont tenus à l'écart, alors qu'ils sont confrontés quotidiennement aux ravages du chômage, en particulier chez les jeunes – la France étant, je le rappelle, avant-dernière en Europe dans ce domaine –, mais aussi chez les seniors et les femmes chefs de famille.

Deuxième point de désaccord : cette réforme est non seulement complexe, mais c'est surtout une boîte vide. L'assurance chômage fera l'objet d'une négociation avec les partenaires sociaux dans les prochains mois ; la formation professionnelle, d'un projet de loi ultérieur, sans qu'aucune évaluation n'ait été demandée par l'État aux régions, dont c'est pourtant la compétence pleine et entière et qui ont mené des politiques courageuses et inventives malgré le désengagement financier de l'État et un pilotage très complexe. Tout cela n'est pas sérieux et témoigne de votre précipitation et d'un manque de concertation. Un sondage récent – un de ces sondages qui guident si souvent votre action, madame la ministre, ainsi que celle du Président de la République – montre d'ailleurs que 31 % des Français seulement croient à l'efficacité de cette réforme, tandis que 66 % redoutent en revanche une augmentation de la précarité au travail.

Pourquoi alors cette réforme, qui ne traite pas des problèmes de fond, laisse de côté les acteurs de terrain, ne simplifie pas les dispositifs de recherche d'emploi et n'améliore nullement les services d'accompagnement individualisé ? C'est qu'elle a un autre objectif, non formulé, et que nous ne pouvons partager : la baisse artificielle du chômage grâce à une radiation plus facile des demandeurs d'emploi.

Ce que cache votre boîte vide, c'est en effet la culpabilisation du demandeur d'emploi, présenté comme quelqu'un qui refuserait les propositions d'embauche – ce que l'on n'observe pas sur le terrain –, ainsi que le traitement statistique du chômage par la réorientation des personnes qui sont le plus dans la précarité vers le revenu de solidarité active, afin de les faire sortir des chiffres du chômage. Or l'emploi est la première des solidarités et des dignités, et nous ne pouvons accepter que ce droit fondamental ne soit pas mieux traité par votre gouvernement. Car la réalité, c'est que la croissance n'est pas au rendez-vous, que le renforcement de la compétitivité des entreprises, notamment des PMI-PME et des TPE, par l'innovation et la recherche n'a fait l'objet d'aucune mesure, et que vous ne faites rien non plus pour améliorer la formation initiale et continue, et éviter que 180 000 jeunes sortent chaque année sans qualification du système scolaire. C'est un véritable gâchis !

Votre projet de loi révèle bien d'autres insuffisances. Je n'en citerai que deux, car nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion des amendements que notre groupe a proposés.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Tout d'abord, votre précipitation vous conduit à proposer trois statuts différents pour le personnel du nouvel organisme : un de droit public pour les salariés de l'ANPE ; un de droit privé pour les salariés des ASSEDIC ; et un de droit inconnu pour les salariés de la nouvelle structure, dont la nature juridique n'a toujours pas été définie. La fusion de personnels aux cultures et aux métiers différents, et cela sans accompagnement ni formation, cela promet !

Second point, que je traiterai de façon plus détaillée au cours de la discussion des amendements : le transfert du recouvrement des cotisations de l'assurance chômage des ASSEDIC à l'URSSAF, prévu en 2012, se prépare dès aujourd'hui et va dépouiller les premières d'une mission dont elles s'acquittaient parfaitement, avec un taux proche de 100 % et une certification ISO 9000 ; surtout, elle mettra un terme à la précieuse expertise des besoins des entreprises et des bassins d'emploi, privant les PMI, les PME, les TPE et les collectivités de conseils pertinents –que, par ailleurs, vous préconisez. Il y a là une contradiction évidente !

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

On en vient toujours à la même conclusion : votre projet est un projet technocratique, idéologique, au service d'une seule cause, la diminution artificielle et statistique du nombre de demandeurs d'emploi.

Pourtant, conscient de ses responsabilités, le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche souhaite faire des propositions, qui seront présentées par mes collègues ainsi qu'à l'occasion de la présentation des amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Chère collègue, vous avez épuisé votre temps de parole. Veuillez terminer.

Debut de section - PermalienPhoto de Geneviève Fioraso

Elles vont dans le sens de la sécurisation du parcours professionnel et d'un accroissement du rôle des régions, qui se trouvent au premier rang en matière de développement économique et de formation professionnelle, donc de gestion de l'emploi.

En conclusion, nous ne voulons pas de cette réforme de façade, aux objectifs inavouables, mais nous souhaitons construire, en concertation avec les partenaires sociaux et les acteurs de terrain, de véritables contre-propositions, car la question de l'accès à l'emploi et de la formation pour tous est au coeur de notre conception de la solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le 9 janvier dernier, au Sénat, Gérard Larcher, ancien ministre du travail, déclarait : « N'oublions jamais que les structures, certes importantes, ne sont que des outils et que le coeur de notre débat, c'est l'emploi. Il y a une catégorie dans ce pays qui a longtemps été maltraitée : le demandeur d'emploi non indemnisé. » On ne pouvait mieux résumer les principales questions auxquelles ce projet de loi devait répondre. La fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC permettra-t-elle de structurer la politique de l'emploi au bénéfice des demandeurs d'emploi et, plus largement, de tous ceux qui vivent des situations de travail inacceptables ?

Aujourd'hui, à peine 47 % des personnes privées d'emploi sont indemnisées. Pourtant, dans votre intervention, madame la ministre, vous n'avez pas dit un mot sur l'insécurité sociale qui leur est réservée. Vous n'avez fait aucune critique, ne serait-ce qu'en creux, des travers de notre système d'assurance chômage, qui n'indemnise pas, ou peu, les plus fragiles, notamment les jeunes, particulièrement exposés au chômage durable et à la précarité permanente – mais peut-être jugez-vous normal que 25 % des personnes sorties du système scolaire depuis moins de douze mois soient au chômage ? Et vous n'avez adressé aux employeurs aucun signal fort afin qu'ils investissent dans les générations nouvelles autrement que par des stages non rémunérés ou par l'embauche, à l'aide de contrats d'insertion appauvris, de trois allocataires du RMI pour le prix d'un smicard.

Le Président de la République souhaite durcir encore le contrôle sur les chômeurs, en sanctionnant ceux qui oseraient refuser deux offres d'emploi « acceptables ». Voilà le signal envoyé aux partenaires sociaux qui vont prochainement renégocier la convention d'assurance chômage ! Le haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté semble décidément bien absent et impuissant à infléchir le discours si facile de culpabilisation des chômeurs et des pauvres tenu par nos plus hauts dirigeants et véhiculé par les médias ! Tout est savamment orchestré pour que le poison d'une pensée libérale visant à établir un lien de causalité entre passivité et chômage continue de se répandre dans l'opinion publique.

Telle était la grille de lecture qu'avaient en tête le MEDEF et d'autres partenaires sociaux lorsqu'ils ont conclu en janvier 2006 la convention d'assurance chômage dégradant les conditions d'accès à l'indemnisation. Les chômeurs français étaient déjà les plus mal lotis de l'Europe des Quinze. Par rapport à leur PIB, en 2003, selon les chiffres d'Eurostat, dix pays dépensaient davantage que la France pour indemniser leurs chômeurs ; la dépense était jusqu'à 2,7 fois supérieure pour le Danemark ou les Pays-Bas. Et pourtant, l'accès à la deuxième filière d'indemnisation, qui concerne près de la moitié des chômeurs, a été rendue plus difficile : alors qu'il fallait auparavant avoir cotisé quatorze mois dans les vingt-quatre derniers mois pour obtenir vingt-trois mois d'indemnisation, seize mois d'activité dans les vingt-six derniers mois sont désormais nécessaires pour la même durée d'indemnisation. Rien de comparable avec le Danemark, dont la politique volontariste est prise à l'envi pour modèle, mais où, même après durcissement des conditions d'accès à l'assurance chômage, les prestations restent à un niveau élevé : en contrepartie des plans de retour à l'emploi, les chômeurs ont droit, pour une durée de quatre ans, à une indemnisation allant jusqu'à 1 400 euros par mois, et ce après seulement quelques mois de travail. Ce n'est donc pas le fruit du hasard si ce pays compte parmi ceux d'Europe où le taux de la population vivant sous le seuil de pauvreté est le plus bas.

Au contraire, votre politique vise à pénaliser davantage les chômeurs, rendus responsables de leur situation ; et vous transposez méthodiquement et sans pitié le modèle du workfare anglo-saxon en France. Si vous vous réclamez du modèle nordique, très « accompagnateur », vous empruntez d'abord et surtout la voie anglo-saxonne des sanctions.

Dans un article très critique, paru dans Le Monde diplomatique et consacré aux politiques dites « d'activation » visant à remettre les « exclus » au travail, Anne Daguerre, chercheuse à Londres et spécialiste des politiques publiques, relève d'autres contradictions dans votre soutien au modèle scandinave. Ces pays s'appuient ainsi largement sur des emplois publics aidés dont vous ne cessez de réduire le volume. En outre, les dépenses de formation y sont très élevées, sans rapport avec celles de la France ; au Danemark, par exemple, elles représentent 5 % des dépenses dites « d'activation ». Quant aux résultats, ils n'ont rien de miraculeux, puisqu'un tiers des chômeurs ont été transférés de l'assurance chômage et de l'aide sociale vers les pensions de préretraite. Enfin, comme dans les autres pays appliquant ces politiques, les conditions de travail se sont dégradées et les salaires ont été tirés vers le bas.

Quel constat pouvons-nous faire en France, après plus de cinq ans de réformes néolibérales et de mutations du capitalisme industriel ? La précarité s'est étendue, et les situations de travail porteuses d'insécurité se sont multipliées, au-delà des CDD et de l'intérim. Robert Castel, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, évoque avec justesse la précarité qui « s'institutionnalise, en particulier avec la multiplicité des contrats aidés, des services ponctuels à la personne, des stages, cette précarité devenant une condition permanente qu'on pourrait appeler “précariat”, qui représenterait une couche du salariat en deçà de l'emploi “classique”. » À raison, il montre les conséquences de ce capitalisme mondialisé, financiarisé, « sur le statut de l'individu devenu individu par défaut, qui ne dispose pas du minimum de ressources, de supports, de droits pour construire son existence ». Cette réalité de l'emploi – l'emploi « inadéquat » au sens du BIT, c'est-à-dire le sous-emploi, l'emploi précaire, l'emploi à bas salaire, l'emploi dangereux pour la santé des salariés –, il n'en est jamais fait mention dans vos interventions, madame la ministre, ni dans celles du Gouvernement. C'est pourtant le seul horizon de millions de salariés, de travailleurs pauvres, dans lequel vous tentez d'enfermer les chômeurs.

Prenant toujours les mêmes modèles pour caution, tantôt de la baisse du coût du travail, tantôt du retour aux 39 voire aux 40 heures – voire davantage –, tantôt encore de la baisse ciblée des impôts au nom de la croissance économique et de l'emploi, vous taisez aux Français qu'ils sont parmi les plus productifs au monde. Et vous vous gardez bien de porter au débat la captation de la richesse par une frange infime, mais toujours plus riche de la population ! Pourtant, la part des salaires dans le produit intérieur brut français a chuté, selon la Commission européenne, de 9,3 % entre 1983 et 2006, ce qui représente plus de 100 milliards d'euros en partie transférés vers le capital. Parallèlement à cela, de réformes en contre-réformes, présentées comme tout aussi inéluctables les unes que les autres – la sécurité sociale, les retraites, la fonction publique, l'indemnisation du risque chômage – vous conduisez à la ruine notre modèle social, en rognant sur la solidarité.

Pour dissimuler le caractère inacceptable de vos réformes, vous agitez l'objectif du plein-emploi. Au cours d'un débat en ligne sur le site d'un grand quotidien, un internaute posait la question : « Les maux dont souffrent notre société – exclusion des jeunes, déclassement, précarisation croissante… – disparaîtront-ils avec le plein-emploi ? ». Louis Chauvel, chercheur associé à l'OFCE et professeur à Sciences-Po, a répondu, de manière on ne peut plus explicite, par la négative : « Le plein-emploi peut vouloir dire deux choses : ce peut être le plein-emploi décent, mais aussi signifier tout à fait autre chose : généralisation de la figure du travailleur pauvre, exploitation, absence de visibilité de l'avenir… » ; et Louis Chauvel de craindre que ce soit bien ce deuxième type de plein-emploi, le plein-emploi négatif, qui nous menace si l'on a pour seul objectif la baisse du taux de chômage.

Madame la ministre, le plein-emploi dont vous parlez, c'est ce plein-emploi négatif, le plein-emploi précaire ! Il est d'ailleurs symptomatique, s'agissant des offres d'emploi non pourvues, que personne sur les bancs de la majorité ne pense à discuter de la précarité et des conditions de travail insoutenables de la plupart de ces métiers dits « sous tension » – qui, pour beaucoup, relèvent de branches où les grilles de salaires ne respectent même pas les minima légaux.

Il n'y a personne non plus pour préciser que certaines offres, par nature temporaires car liées à l'activité saisonnière, dans l'agriculture notamment, sont considérées comme n'ayant pas été pourvues lorsque la mission a été remplie plus rapidement.

Comme vos prédécesseurs, qui ont accompagné le projet personnalisé d'accès à l'emploi, vous avez pris l'habitude de vous satisfaire à bon compte des chiffres du chômage à la baisse, jugés pourtant peu réalistes par de nombreux économistes, chercheurs ou syndicalistes. Les deux tiers des RMIstes sont ignorés des statistiques officielles, et, pour le seul mois d'octobre 2007, 17 000 personnes ont été radiées. Mais comme ce n'est jamais suffisant – il est vrai qu'on radie quatre fois plus en Espagne ou en Belgique –, des quotas de radiation seront-ils désormais fixés comme pour les expulsions ?

Les agents de l'ANPE avec lesquels nous avons préparé ce débat ont exprimé leurs craintes sur le contenu de la convention pluriannuelle liant l'État, l'institution gestionnaire du régime d'assurance chômage et la nouvelle institution issue de la fusion, ce qui renforce nos propres doutes relatifs aux missions véritables qui leur seraient désormais confiées. En effet, sous couvert d'améliorer le service rendu aux demandeurs d'emploi, les agents en charge d'une mission de service public devront satisfaire des indicateurs d'activité et de résultat, en grande mesure étrangers aux attentes et aux besoins des personnes concernées.

Simplification, interlocuteur unique de l'inscription au reclassement, qualité, accompagnement renforcé, dites-vous : dans ces conditions, comment expliquer que cette fusion si urgente, et à ce point nécessaire qu'elle aurait été préparée de longue date, ait été aussi peu anticipée, notamment en ce qui concerne la formation des agents à d'autres métiers – je pense tout particulièrement à ceux qui sont actuellement en charge du recouvrement des cotisations d'assurance chômage et qui devront être reclassés, selon vous, au sein de la nouvelle institution en raison du transfert de leur mission actuelle aux URSSAF ?

Quant au suivi renforcé des demandeurs d'emploi et à la qualité du service qui leur sera rendu, comment arriverez-vous à diviser par deux le nombre de demandeurs d'emploi suivis par un conseiller puisque, sans recrutement supplémentaire, la fusion ne permettra d'atteindre le nombre d'agents requis pour atteindre cet objectif, à savoir 4 500 ? Dès lors, le suivi mensuel restera tout aussi fictif qu'aujourd'hui.

La fusion des réseaux opérationnels de l'ANPE et de l'UNEDIC est guidée par des motivations étrangères à la satisfaction d'aspirations légitimes, que ce soit en termes d'accès de chacun au service public de l'emploi sur l'ensemble du territoire ou en termes d'amélioration de la qualité du service rendu. Alors que certains opérateurs privés de placement sont parties prenantes de la nouvelle architecture, comment expliquer que ces autres composantes fondamentales du service public de l'emploi que sont l'AFPA et le ministère du travail soient à ce point méprisées dans ce texte ?

Le rôle de l'État, initiateur et garant des politiques publiques de l'emploi, y compris dans leur dimension financière, et le contrôle de l'utilisation des fonds publics sont gommés. En revanche, il est clair que le MEDEF se voit officiellement promu co-constructeur et co-gestionnaire des politiques d'emploi, via le Conseil national pour l'emploi et le conseil d'administration de l'institution. Il était déjà en force au sein de l'UNEDIC, dont du reste il devrait prendre la tête fin janvier : demain il aura les coudées franches pour mettre en musique les mesures décidées dans le cadre de la réforme du marché du travail, notamment les questions de portabilité de certains droits et la couverture chômage des salariés en cas de rupture négociée du contrat de travail.

La façon dont les personnels de l'AFPA chargés de l'orientation professionnelle ont appris au détour d'un amendement du Sénat que le principe même de leur intégration au personnel de l'institution était acquis – ils devront dès lors en exercer les missions – et qu'il ne restait plus au Gouvernement qu'à présenter les modalités pratiques du démembrement de l'AFPA, déjà fragilisée par la décentralisation, témoigne également de l'objet premier de ce mécano institutionnel. Comment se fait-il du reste que M. Pierre Boissier, directeur général de l'AFPA, ait pu déclarer à l'intersyndicale son total désaccord ? Est-il prévenu ? Est-il complice ? Qui dit vrai ? Je l'ignore !

Vous détournez chacun des acteurs de ses missions essentielles en mêlant indemnisation, laquelle relève de la protection sociale, placement, accompagnement, formation ou sanction sans pour autant garantir un financement 100 % public de l'ANPE et tout en ouvrant plus largement encore le marché du placement au privé, lequel offre des prestations de moindre qualité à un coût bien supérieur. Vous ne prévoyez pas de voie de recours contre les sanctions individuelles et vous faites peser à dessein de lourdes menaces sur le devenir du service public de l'emploi tout en hypothéquant largement les perspectives de renforcement des droits des personnes privées d'emploi.

Il s'agit-là d'un grief de fond contre le projet de fusion du Gouvernement. Loin d'être demandée par les partenaires sociaux, cette réforme soulève de nombreuses inquiétudes, voire leur opposition, chez les salariés des ASSEDIC comme chez les agents de l'ANPE, du GARP et maintenant de l'AFPA.

En effet, ils ne sauraient être à bon droit rassurés par l'amendement adopté au Sénat visant à préciser la nature publique de l'institution, du reste encore innomée à ce jour, alors même que le projet de loi mentionne par ailleurs que l'institution n'est pas soumise au code des marchés publics. C'est pourquoi, en vue de clarifier sa nature, nous défendrons l'existence d'un établissement public national à caractère administratif, nous proposant de réaffirmer le rôle de l'État et de supprimer, lors de l'examen des articles, toutes les dispositions soulignant le caractère industriel et commercial de l'institution.

En ce qui concerne enfin le statut des personnels, nous demanderons la coexistence de deux statuts au sein d'une même entité, celui de droit privé des personnes employées par l'UNEDIC et celui de droit public pour les agents de l'ANPE, et a minima un droit d'option réciproque pour les agents des ASSEDIC, lesquels doivent également se voir garantir par la loi la possibilité de choisir entre leur statut actuel ou la nouvelle convention collective. Nous proposerons également de supprimer le transfert du recouvrement des cotisations d'assurance chômage aux URSSAF, décision aux conséquences dramatiques notamment pour les agents du GARP.

L'opposition des députés communistes concerne donc le fond même du projet de loi, ce que vous aviez compris, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons avec ce projet de loi une étape essentielle de l'action de la majorité en faveur de l'emploi, essentielle, en effet, parce que la réforme du service public de l'emploi permettra de définir une architecture générale et une nouvelle organisation pratique plus modernes et mieux adaptées aux évolutions du marché du travail, et donc plus efficaces.

Mais pour essentielle qu'elle soit, cette étape ne suffit pas. La question du dynamisme de l'emploi ne saurait en effet se réduire à l'aspect purement organisationnel des services qui accompagnent le demandeur d'emploi. La réforme de l'organisation du service public de l'emploi ne trouvera sa cohérence que dans le cadre plus vaste de la modernisation du marché du travail, en direction de laquelle les partenaires sociaux ont franchi un seuil décisif avec l'accord conclu la semaine dernière sur le contrat de travail. Cet accord introduit en effet dans nos règles de droit du travail la notion de « flexisécurité » dont nous parlons depuis tant d'années – je l'évoquerai à mon tour – sans avoir réussi jusqu'ici à la traduire dans les faits de manière satisfaisante.

Voilà plusieurs années que j'insiste sur la nécessité de mieux protéger le salarié pour libérer l'emploi : c'est que les députés du Nouveau Centre sont convaincus que si l'entreprise a besoin de souplesse pour s'adapter aux évolutions internationales et faire face à la concurrence, celle-ci n'est possible qu'à la condition que les salariés disposent préalablement de garanties fortes de retour à l'emploi. En effet, si l'entreprise ne peut plus leur offrir comme par le passé un emploi à vie, ils doivent toutefois pouvoir y acquérir des compétences nouvelles et reconnues afin d'être davantage à l'abri des aléas de la vie économique et de retrouver plus facilement un emploi.

Cette réforme n'aura donc de sens que si elle est suivie, dans les meilleurs délais, d'une réforme de la formation professionnelle en faveur de ceux qui en ont le plus besoin. De plus, elle ne sera utile que si elle vient appuyer une politique volontariste de soutien aux entreprises, à l'investissement et à l'innovation, afin d'améliorer la qualité de nos produits et de nos services et de permettre à nos entreprises de gagner des marchés et de créer de l'emploi.

Ce que nous abordons aujourd'hui n'est donc qu'un aspect d'une politique de l'emploi et de croissance dont le champ doit évidemment être plus vaste. Nous appelons du reste l'attention du Gouvernement comme de la majorité sur le caractère pour le moins dispersé des réformes en cours. Entre le Grenelle de l'insertion, la modernisation du marché du travail, les réformes à venir de la formation professionnelle et de la représentativité syndicale, les mesures pour l'emploi du plan banlieues, dont nous attendons l'annonce, et la réforme du service public de l'emploi, il serait temps pour le Gouvernement – mais vous l'avez fait au cours de votre intervention, madame la ministre – de rappeler la cohérence qui a présidé à l'ouverture de ces différents chantiers et d'harmoniser les mesures prises dans leur cadre, faute de quoi son action risque de perdre en lisibilité. Vous avez donc eu raison de rappeler le schéma général de la politique de l'emploi que vous conduisez.

Vous le savez, notre groupe est plutôt favorable au texte, notamment parce que la réforme envisagée ne remet pas en cause le paritarisme qui prévaut dans la gestion de l'assurance chômage. Le maintien de la gestion paritaire est pour le Nouveau Centre le signe d'une démocratie sociale respectée et confortée dans sa légitimité.

L'idée d'une fusion des services opérationnels de l'ANPE et de l'UNEDIC au travers des ASSEDIC est également intéressante dans la mesure où elle a pour premier objectif d'améliorer le service rendu à l'usager, en l'occurrence le demandeur d'emploi, service dont la nature et la qualité sont au coeur de la réflexion ayant abouti à ce projet de fusion, même si le débat est surtout dominé par les questions organisationnelles – ce que les deux motions de procédure présentées par le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche ont bien montré.

Développer un meilleur accompagnement du demandeur d'emploi est en effet l'objectif, malheureusement trop peu souligné, du projet de loi. Les missions en la matière sont multiples, puisqu'il convient d'analyser les parcours professionnels avant la période de chômage pour mieux détecter les compétences que le chômeur a pu acquérir, de prendre en compte son parcours professionnel ou encore de déterminer les attentes du demandeur d'emploi et de cibler ses besoins afin de les comparer aux caractéristiques du marché du travail dans le bassin d'emploi ou aux possibilités qu'offre celui-ci – étapes qui doivent être franchies avec d'autant plus d'attention que c'est d'elles que dépend la rapidité avec laquelle la personne accompagnée retrouvera ou non un emploi.

Conseiller le demandeur d'emploi dans l'élaboration ou l'actualisation de son projet professionnel, l'aider à s'orienter ou à se lancer, le cas échéant, dans un nouvel itinéraire professionnel, lui conseiller les formations éventuellement nécessaires et faire le point de manière régulière sur sa recherche d'emploi et sur l'avancée de sa formation, telles sont les missions pour lesquelles le service public de l'emploi a un rôle à jouer. L'enjeu de la fusion de l'ANPE et des ASSEDIC est donc de garantir un meilleur accompagnement du demandeur d'emploi, pour un retour rapide à l'emploi durable. C'est la raison pour laquelle il faut veiller dans le cadre du projet de loi à réunir les conditions d'une implication réelle des personnels de l'ANPE et de l'UNEDIC.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

La fusion ne réussira complètement que si elle fait l'objet d'une adhésion des personnels des deux structures concernées, d'où l'intérêt de lever toutes les hypothèques et de calmer toutes les inquiétudes qui pèsent encore chez certains personnels quant à leur avenir au sein de la nouvelle institution, notamment en ce qui concerne la question du droit d'option des salariés des ASSEDIC, laquelle suscite les craintes les plus vives chez les agents des organismes de gestion des assurances chômage. Nous sommes, quant à nous, favorables à ce qu'ils puissent choisir entre la convention collective dont ils bénéficient actuellement et celle qui résultera des négociations engagées après la création de la nouvelle institution. : c'est pourquoi nous proposons que le droit d'option leur soit reconnu.

Notre groupe sera également très attentif à ce que la fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC respecte l'engagement des élus locaux dans l'activation des politiques de l'emploi. Les maisons de l'emploi, créées par la loi de programmation pour la cohésion sociale, doivent pouvoir trouver leur place dans la nouvelle organisation du service public de l'emploi – question que développera sans aucun doute Jean-Paul Anciaux –, d'autant, madame la ministre, que vos déclarations initiales à leur sujet avaient suscité une certaine inquiétude quant à leur avenir, et même fragilisé certaines. Si, dans un second temps, vous vous êtes voulue rassurante en ce qui concerne la nécessité de tenir compte du réseau des maisons de l'emploi, le gel des conventions n'a pas dissipé toutes les craintes relatives à la pérennité du dispositif. Les maisons de l'emploi constituent en effet d'ores et déjà l'échelon de proximité et le guichet unique d'accueil des demandeurs l'emploi, des entreprises et des porteurs de projets. Loin d'être un échelon supplémentaire de la politique de l'emploi au plan local, elles ont permis de décloisonner les différents services et les différentes structures, de réunir autour de la table l'ensemble des acteurs et de les mobiliser sur des objectifs partagés au plus près de la réalité du terrain.

Pour le groupe Nouveau Centre, cette dimension territoriale de la politique de l'emploi doit impérativement être maintenue car elle est mobilisatrice. C'est pourquoi nous attendons que le débat permette d'apporter des éclaircissements et des garanties très nettes quant à l'articulation entre les maisons de l'emploi et la nouvelle institution issue de la fusion – mais, il est vrai, vous avez déjà évoqué la question, madame la ministre. La discussion des amendements présentés par tous les groupes, notamment par celui du Nouveau Centre, permettra évidemment d'y revenir. Nous avons du reste déposé un amendement sur ce point et soutiendrons les propositions qui iront dans ce sens, quelle que soit leur origine, le centre étant par définition susceptible de voter des amendements déposés aussi bien par la gauche que par la droite.

Nous souhaitons également poser la question de la représentation des usagers de la nouvelle institution au sein de son conseil d'administration. Il nous semble en effet souhaitable que les publics directement concernés par les décisions et le fonctionnement de l'institution soient associés, à travers leurs représentants, à l'élaboration des mesures qui leur seront appliquées. Nous ferons donc une proposition en ce sens.

Nous souhaitons également des garanties sur le niveau de la participation de l'UNEDIC au financement de la nouvelle structure.

Si une participation à hauteur de 10 % est présentée comme un taux moyen correspondant à l'effort réalisé dans la période récente par le régime d'assurance chômage pour participer aux mesures actives en faveur des demandeurs d'emploi, il faut néanmoins s'assurer qu'elle ne sera pas plus importante à l'avenir.

Les missions de l'institution doivent également être complétées, en particulier en ce qui concerne l'implication de celle-ci dans la définition et la mise en oeuvre des parcours d'insertion sociale et professionnelle des publics les plus éloignés de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Nous voulons, en effet, avoir la garantie que la nouvelle institution se saisira de cette dimension de la lutte contre le chômage qu'est l'insertion des publics les plus en difficulté.

Nous ne pourrions pas accepter un partage des compétences qui aboutirait à ce que le service public de l'emploi prenne prioritairement en charge les demandeurs d'emploi les plus immédiatement employables, alors que les collectivités locales et les acteurs de l'insertion seraient chargés de l'accompagnement renforcé des personnes les plus éloignées de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

À l'occasion du débat sur le Grenelle de l'insertion, jeudi dernier, dans un hémicycle malheureusement presque vide, le haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté a souligné le paradoxe selon lequel les personnes qui rencontrent le plus d'obstacles pour retrouver un emploi sont aussi celles qui bénéficient le moins de l'accompagnement du service public de l'emploi.

Seuls 35 % des allocataires du RMI sont inscrits à l'ANPE, et les 65 % qui restent ne le sont pas, non par choix personnel mais parce que le système veut qu'ils ne bénéficient pas au service public de l'emploi.

Et Martin Hirsch d'insister, ici même, pour que, à l'occasion de la réforme du service public de l'emploi, l'on reconnecte – ce sont ses propres termes, vous pourrez les retrouver dans le compte rendu intégral des débats – les mécanismes de ce service public avec ceux de l'insertion professionnelle pour que l'offre de services soit adaptée aux publics les plus en difficulté.

Nous formulerons à cet égard, là encore, au cours de la discussion sur les articles, des propositions dont nous souhaitons vivement qu'elles soient examinées avec attention par le Gouvernement.

Le groupe Nouveau Centre estime enfin nécessaire d'accentuer les politiques de lutte contre les discriminations à l'embauche et dans l'emploi. Lors de la précédente législature, j'ai personnellement beaucoup insisté pour que l'anonymat des curriculum vitae soit une obligation inscrite dans la loi. Un amendement en ce sens a d'ailleurs été voté. Cette obligation légale, devenue réalité avec l'article 24 de la loi pour l'égalité des chances votée en 2006, est restée lettre morte, faute de décret d'application. En décembre dernier, le président de la HALDE lui-même regrettait que, pour cette raison, le CV anonyme soit peu utilisé. L'accord national interprofessionnel sur la diversité dans les entreprises, bien qu'il encourage l'expérimentation du CV anonyme, ne change rien à cette situation.

C'est pourquoi nous proposerons, afin d'encourager sa pratique, que les organismes de placement, lorsqu'ils transmettent aux employeurs les curriculum vitae des candidats à l'embauche, le fassent en respectant l'anonymat de ces derniers, procédé qui existe déjà dans le cadre des missions d'intérim. L'institution nationale que nous sommes sur le point de créer sera évidemment concernée par cette pratique et les entreprises pourront ainsi constater que l'anonymat des candidatures ne constitue ni un obstacle au recrutement de collaborateurs compétents et motivés ni une entrave au libre choix de recrutement.

Comme vous pouvez le constater, madame la ministre, le groupe Nouveau Centre aborde la discussion de votre texte dans un esprit à la fois attentif, positif et, bien sûr, constructif.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Vercamer

Nous avons l'intention de lui apporter les améliorations et précisions qui lui permettront d'être un outil adapté à une plus grande fluidité du marché du travail, pour un accès rapide à l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Madame la présidente, madame le ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, après avoir écouté les interventions de mes collègues de l'opposition, j'ai bien présent à l'esprit ce que ce texte n'est pas. Aussi, je suis assez heureux d'intervenir après les deux motions de procédure de nos collègues socialistes et après quelques interventions dans la discussion générale.

Je ne pense pas que ce texte fustige les demandeurs d'emploi, les enferme ou les condamne à quoi que ce soit. Je ne crois pas que ce texte ait l'intention de truquer les chiffres, et M. Larcher, votre prédécesseur, madame le ministre, avait répondu sur ce point à plusieurs reprises à cette assemblée. On se souvient de la formule : on ne peut pas accuser le thermomètre d'être juste quand il indique plus de dix degrés et de devenir faux quand il descend en deçà !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

Je ne pense pas que ce texte camoufle des intentions de je ne sais quelle nature, même si je constate qu'il ignore un certain nombre de réalités, chers collègues, qui pourtant sont des réalités de terrain pour nombre de personnes engagées dans la lutte contre le chômage. Ainsi existe-t-il des opérations de terrain, que ce soit dans le cadre des maisons de l'emploi ou non, qui fonctionnent bien et rendent un service de qualité à tous ceux qui sollicitent le service public de l'emploi, qu'il s'agisse des demandeurs d'emploi – chômeurs ou non –, des entreprises qui recrutent, des collectivités locales ou autres.

Je vous le dis d'emblée, madame le ministre, chers collègues : si ce texte était tout ce que prétend l'opposition, le groupe de l'UMP ne le voterait pas.

Je souhaite maintenant prononcer quelques mots sur le contexte dans lequel nous légiférons. Madame le ministre, vous avez été interpellée à plusieurs reprises sur le fait qu'à l'occasion de l'examen de ce texte vous n'aviez pas cru bon d'expliciter quelle était la politique du Gouvernement en matière d'emploi. Je rappelle que ce n'est pas tout à fait l'objet de notre discussion, même si nous pouvons donner quelques éléments de réponse. Aussi, sans vouloir me montrer redondant par rapport à ce qui vient d'être précisé, j'attire l'attention de l'Assemblée sur quelques points.

Nous avons battu, en novembre dernier, un record en atteignant le chiffre de 16,49 millions d'emplois salariés dans le secteur marchand. En dix ans, on compte donc presque 2,7 millions d'emplois de plus, dont plus de 300 000 pour la seule année 2007. Cette évolution est cohérente avec la baisse continue du nombre de demandeurs d'emploi et semble indiquer, malgré tout, que la direction prise par la majorité n'est pas si mauvaise que certains veulent bien le dire. Ces données montrent, en tout cas, que les institutions qui accompagnent les demandeurs d'emploi vers le retour au travail accomplissent leur mission de manière tout à fait remarquable, et je souhaite, depuis cette tribune, les saluer.

Cela étant, ces excellents résultats ne doivent pas dissimuler des disparités, notamment par secteurs d'activité. En effet, si ces créations d'emplois sont massives, elles ne sont pas homogènes en fonction des types d'activité. À l'exception des industries de transport, des industries d'excellence et du BTP, qui enregistrent des hausses, le reste du secteur industriel connaît de lourdes pertes sur lesquelles il faudra évidemment agir.

La tertiarisation de notre économie se poursuit avec un accroissement notable du secteur hôtelier et des services à la personne. Cette évolution montre que nous devons agir en amont, et, pourquoi pas, en prenant en compte tout ce qui est nécessaire en matière de relecture des parcours professionnels des uns, de requalification ou de formation des demandeurs d'emploi pour les autres. Ces questions devront faire l'objet d'études.

Une autre catégorie de disparités porte sur les territoires. On se rend compte que les créations d'emplois sont massives à l'ouest du pays alors que, malheureusement, dans les régions situées à l'est, nous enregistrons des pertes importantes.

J'en viens à un troisième type de disparités que nous avons déjà évoqué. On ne sait pas très bien si ce sont 300 000 offres d'emplois qui ne trouvent pas preneur ou bien 700 000 – fourchette qui laisse songeur –, autant dire que l'on n'en sait rien,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Frédéric Poisson

…même si les chiffres n'en demeurent pas moins très importants.

Eh bien, madame le ministre, ma conviction est que ces trois types de disparités sont susceptibles d'être réduites par la politique dont nous allons maintenant discuter et que nous souhaitons mettre en oeuvre en fusionnant les réseaux opérationnels de l'ANPE et des ASSEDIC. C'est la raison pour laquelle le groupe de l'UMP, sauf surprise que je ne puis imaginer, votera ce texte.

Vous-même, madame le ministre, avez largement abordé, de même que les rapporteurs et différents orateurs, un certain nombre de questions dont la commission a d'ailleurs longuement débattu : le statut de la nouvelle institution, son nom, le statut des personnels, leur mission, la place des partenaires, les moyens donnés à la future institution, les modalités de leur incrémentation. Nous y reviendrons à l'occasion de la discussion des articles.

Je rappelle néanmoins une évidence qui ne semble pas encore partagée sur tous les bancs : les missions essentielles de l'ANPE et des ASSEDIC ne changent pas. Il n'y a donc pas lieu de se demander pourquoi on ne précise pas que tel ou tel dispositif doit être repris ou bien les raisons pour lesquelles la loi n'indique pas dans le détail ce que doit être la fiche de mission des opérateurs.

Je souhaite néanmoins, madame le ministre, soulever trois questions dans le cadre de la discussion générale ; je reviendrai lors de la discussion des articles sur des points plus précis. La première porte sur le rôle et la place de l'État dans le futur dispositif. La deuxième concerne la définition du statut des agents de la future entité. La troisième, enfin, touche au facteur-clef de succès de cette opération de fusion.

Nous avons déjà évoqué le rôle de l'État lorsque vous êtes venue devant la commission, madame le ministre. Vous avez alors très justement rappelé qu'il fallait nous montrer attentifs tant il est vrai que les organisations se délitent par la tête. En conservant à l'UNEDIC son statut, son existence, ses missions principales, on conserve de fait le paritarisme, même si je comprends que les partenaires sociaux engagés dans cette fusion réclament de plus amples précisions. De même, finalement, la question qui se pose vraiment n'est pas tant de savoir si le conseil supérieur de l'emploi sera à sa place et sa nouvelle configuration pertinente, je crois que c'est bien le cas. Quant à savoir de quelle manière les conseils régionaux doivent coopérer aux conseils régionaux de l'emploi, on pourra sans doute le préciser.

Je suis tenté d'affirmer que, pour déterminer la juste place des différents partenaires, nous devons réfléchir au phénomène récent de l'implication massive des collectivités locales dans les politiques de l'emploi. Je n'ai pas parlé des collectivités territoriales mais bien des collectivités locales. Ce phénomène s'est certes développé autour des maisons de l'emploi mais aussi dans les territoires où il n'y en existe pas. À mon tour et pour saluer la tradition née cet après-midi, je salue nos collègues Jean-Paul Anciaux et Marie-Christine Dalloz pour leur mobilisation autour des maisons de l'emploi.

Sans négliger la place des conseils régionaux dans les dispositifs existants – il faut reconnaître leur présence au sein des maisons de l'emploi quand elles existent –, je tiens tout de même à souligner que les acteurs les plus proches du terrain sont les mairies et les conseils généraux. L'implication des collectivités locales, leur rôle actif dans certains dispositifs très concrets doivent donc être reconnus et maintenus, et l'on doit les laisser agir en fonction des besoins du terrain.

Ensuite, à propos du statut des agents, je serai bref puisque nous devrions avoir une très longue discussion sur le sujet. La question s'est posée sur le fait de savoir s'il fallait inscrire dans le texte le détail des garanties de la future convention. Nous avons entendu ce genre de propositions lors des auditions et sur lesquelles nous avons également échangé en commission.

D'après le texte, les partenaires sociaux doivent faire leur affaire, si l'on peut dire, du contenu de cette convention collective. Je partage cet avis, et c'est pourquoi le projet me convient et convient, du reste, au groupe de l'UMP. Il faut que les partenaires sociaux s'entendent seuls sur le contenu de la future convention collective. Le Gouvernement estime en effet peu probable qu'ils s'entendent sur un texte moins favorable que ceux en vigueur. Je partage cet avis, et cette démarche devrait s'imposer.

C'est donc forts de cette double conviction – laisser les partenaires sociaux faire leur travail et les laisser d'autant mieux le réaliser qu'ils aboutiront à un résultat positif –que nous voterons cette disposition.

Je termine avec le facteur-clef du succès de cette opération, sur lequel nous devons nous montrer très attentifs. Il s'agit de la question de l'accompagnement et de la conduite du changement. Certes, le point que j'évoque n'est pas à proprement parler prévu par le texte. Certes, il n'est pas question que le Parlement décide du contenu de la fiche de fonction du futur directeur général ou des fiches de mission des directeurs régionaux, ce n'est pas notre rôle.

Cela étant, je souhaite affirmer depuis cette tribune que ce genre d'opération ne peut pas réussir si elle se fait contre les salariés, si elle se fait en ignorant l'ensemble des mutations qu'ils vont devoir connaître – pas tant, d'ailleurs, quant au contenu de leur mission que, surtout, dans la manière de les gérer, raison pour laquelle les équipes qu'ils constituent doivent être accompagnées, comme c'est le cas sur le terrain. Ainsi, la semaine dernière, les deux rapporteurs et moi-même avons-nous pu le constater dans un lieu où une agence ASSEDIC et une ALE devaient fusionner. Et je souhaite, madame la ministre, que vous puissiez nous rappeler que l'esprit de ce texte, c'est que tous les moyens d'accompagnement, sur le plan managérial, soient donnés aux institutions, qui devront faire évoluer leur manière de travailler.

Voilà, madame la ministre, les quelques remarques que je souhaitais formuler. J'aurai l'occasion de les compléter au moment de la discussion des articles. Le groupe de l'UMP soutient votre texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la réforme qui nous est présentée n'a de sens que si elle permet de répondre aux objectifs d'une nouvelle politique de l'emploi et que si elle s'en donne, évidemment, les moyens.

Ces objectifs, quels sont-ils ? Le marché de l'emploi, dans les années qui viennent, ne sera pas celui que nous avons connu ces dernières années. Il sera caractérisé, c'est vrai, par un élément lourd, que nous portons depuis bien longtemps, à savoir la présence d'un chômage de masse, et surtout d'un noyau dur d'un million de personnes qui éprouvent de véritables difficultés, non seulement à retrouver un emploi mais aussi à acquérir les compétences et les qualifications qui augmenteraient leurs chances d'y parvenir. Il est nécessaire d'aider ces personnes.

Le second objectif d'une réforme de la politique d'emploi, c'est de répondre aux nouveaux défis qui vont nous être lancés par l'évolution du marché du travail, notamment de la démographie, ce qui a été bien analysé par le Centre d'analyse stratégique. Celui-ci a fait remarquer que nous aurions à faire face, non pas à des tensions en matière d'offres et de demandes d'emplois, mais à des difficultés à rapprocher offres et demandes. Ces difficultés seront renforcées pour les petites entreprises et pour certains territoires.

Voilà les deux objectifs autour desquels une réforme des politiques de l'emploi doit être conçue.

Quels sont les problèmes auxquels est aujourd'hui confrontée une bonne politique de l'emploi ? Quels sont les problèmes que nous vivons sur le terrain ?

La première difficulté à laquelle il faut répondre pour atteindre ces objectifs, c'est que les moyens qui sont mobilisés le sont indépendamment des besoins du terrain ou ne sont pas adaptés à ces besoins.

Deuxième préoccupation, la multiplication des acteurs.

Si l'on veut atteindre les objectifs que j'indiquais à l'instant, c'est donc sur ces moyens qu'il faut faire porter l'effort. La réforme que vous nous proposez va-t-elle permettre de le faire ? C'est naturellement la question centrale, à partir de laquelle il faudra que nous puissions nous prononcer à l'issue de ces débats.

La fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC va-t-elle répondre à ces questions ? À titre personnel, et je crois que ce sentiment est largement partagé dans cet hémicycle, le principe de la fusion ne me paraît pas contestable. C'était ma position avant que vous la proposiez, madame la ministre. C'est toujours ma position. Cette fusion doit nous permettre de gagner en efficacité, notamment en mettant en place un système plus simple et plus lisible.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Cela dit, votre projet de loi va-t-il le permettre ? C'est là qu'apparaît une interrogation. C'est sur ce point qu'il nous faut, à travers le débat qui s'engage, l'améliorer.

La première question qui est posée est celle du pilotage. Au plan national, vous nous dites, à juste titre, que c'est naturellement à l'État qu'il revient de fixer les grandes orientations de la politique de l'emploi. Vous voulez y associer de manière plus étroite les partenaires sociaux. Tant mieux. Il faut y associer les collectivités territoriales. Il faut faire en sorte que l'avis qui pourra être rendu sur ces orientations intervienne assez tôt pour avoir une incidence sur les budgets de l'emploi. Il faut aussi qu'un avis soit demandé sur les résultats obtenus par cette politique. Car il faut une évaluation des moyens qui auront été consacrés à l'emploi.

Mais ensuite, sur le terrain, le problème devient plus délicat. Notre rapporteur y a fait allusion dans son rapport. La question se pose au niveau des territoires, et d'abord des régions. Vous mettez en place un dispositif qui va reposer exclusivement sur l'État, à travers la nouvelle institution. Celle-ci s'efforce d'associer l'ensemble des partenaires au plan national, dans des conditions dont nous aurons l'occasion de discuter, mais, d'une certaine manière, elle les laisse de côté au plan régional.

Les partenaires sociaux seront consultés dans le conseil régional de l'emploi. Mais les collectivités territoriales, et au premier chef la collectivité régionale, ne sera associée que par défaut.

C'est là qu'il faut prendre des positions claires. Il y a deux options possibles, entre lesquelles il faut pouvoir trancher. Et je crois que vous n'en choisissez aucune. Pourtant, elles conditionnent l'efficacité du dispositif.

La première option, c'est que l'État assume sa responsabilité et propose aux collectivités régionales de contractualiser sur les objectifs et les moyens de la politique de l'emploi et de la formation au niveau du territoire régional. La région est un partenaire étroitement et directement associé à la mise en oeuvre de ces actions, et pour cause, puisqu'elle gère notamment les budgets de la formation.

La seconde option, et l'on pourrait d'ailleurs proposer de tenter une expérimentation en la matière, ce serait de confier directement à l'échelon régional la responsabilité de la gestion de la nouvelle institution. Cela ne pourrait pas permettre de faire l'économie d'une contractualisation, pour assurer la coordination. Mais on confierait directement aux conseils régionaux le soin de piloter cette nouvelle institution.

On ne voit pas, dans les propositions qui nous sont faites, de réponse claire à cette alternative. Je ne vois pas d'autre solution.

La proposition que vous nous faites, qui réaffirme, d'une certaine manière, l'autorité de l'État au plan régional, et qui prévoit une convention entre le préfet et le représentant de l'institution au plan régional, ignore les collectivités territoriales et n'assure pas la mobilisation des acteurs.

On retrouve cette difficulté au niveau des territoires. C'est le débat que nous avons sur les maisons de l'emploi. Si l'on veut décliner la même logique de mobilisation de moyens autour d'objectifs adaptés aux territoires, au niveau des bassins d'emploi, alors on aurait pu imaginer de réintroduire les maisons de l'emploi dans ce débat et d'en faire le lieu, l'endroit, l'outil, la personnalité avec laquelle contractualiser, pour que ces politiques puissent trouver leur efficacité.

Malheureusement, là encore, nous sommes dans l'incertitude. On ne voit pas cette nouvelle institution se mettre en place d'une manière efficace, cohérente, au niveau des bassins d'emploi.

Deuxième série de questions,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je vais conclure très vite, madame la présidente.

Je ne ferai qu'évoquer pour mémoire une deuxième série de questions, parce que nous y reviendrons au cours de la discussion des articles. Nous poserons dans ce débat la question des moyens de la nouvelle institution. Nous poserons celle du référent unique et du moment où il intervient. Nous poserons celle des moyens consacrés à la formation des demandeurs d'emploi. Nous poserons celle du nombre de demandeurs d'emploi par conseiller, pour que la démarche d'accompagnement soit réellement efficace.

En clair, nous abordons ce débat dans un esprit tout à fait constructif, avec néanmoins des interrogations qui sont nourries par ce que nous avons connu par le passé. Je pense en particulier à la confusion qu'a installée la mise en place des maisons de l'emploi, qui n'ont pas été gérées de manière extraordinairement cohérente, pardon, cher collègue Anciaux.

Et nous abordons également ce débat avec le souci de garantir l'efficacité de ce dispositif, dans une logique de la politique de l'emploi qui doit être entièrement renouvelée.

Puisque la présidente m'invite à conclure,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

…je dirai qu'il serait dommage que vous arriviez à confirmer une formule qu'employait autrefois, dans un domaine bien différent, Albert Einstein. On l'interrogeait pour lui demander quelle était la différence entre la théorie et la pratique. Il disait : c'est bien simple, la théorie, c'est quand on peut tout expliquer mais que rien ne marche ; la pratique, c'est quand tout marche mais qu'on ne peut rien expliquer ; et quand on réunit la théorie et la pratique, rien ne marche et personne ne peut expliquer pourquoi.

Ce qui serait utile, c'est que dans votre réforme, tout marche, et qu'on puisse expliquer pourquoi. Cela supposera que vous amendiez en profondeur ce texte, que vous alliez plus loin dans l'ambition qui est la vôtre, pour que nous ayons enfin un outil au service d'une politique de l'emploi qui réponde aux enjeux des dix années qui viennent. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord remercier notre rapporteur pour le rapport qu'il a établi au nom de la commission des affaires sociales. Je voudrais également remercier ma collègue Marie-Christine Dalloz, qui a été rapporteure de la mission d'information sur les maisons de l'emploi.

L'un et l'autre ont souligné l'importance de la réforme du service public de l'emploi engagée par le Gouvernement, avec pour objectif de faciliter les démarches des personnes à la recherche d'un emploi dans notre pays.

Comme le soulignait le rapport Marimbert remis en 2004 à François Fillon, la mosaïque complexe des acteurs et des réseaux sur le terrain est difficilement lisible pour nos concitoyens, et surtout pour ceux qui ont le plus besoin de recourir à leurs services, je veux parler des demandeurs d'emploi.

Madame la ministre, vous avez raison, il faut repenser l'organisation du service public de l'emploi, le moderniser, en simplifier l'accès pour les personnes et les entreprises, et en faire un véritable service de proximité. Le territoire constitue en effet un élément des identités collectives et individuelles où s'entrecroisent nombre d'acteurs économiques et sociaux.

À la complexité des organisations doit répondre une simplification locale pour rétablir la cohérence d'ensemble. Votre projet de loi, madame la ministre, nous y invite.

La loi de programmation pour la cohésion sociale, défendue par Jean-Louis Borloo et Gérard Larcher en 2005 à cette tribune, avait ouvert la voie en créant les maisons de l'emploi, ces lieux « accueillants et conviviaux » regroupant sous la forme d'un guichet unique tous les services pouvant être offerts aux chômeurs, et en particulier à ceux qui sont le plus en difficulté.

Portées par les élus locaux, et associant obligatoirement l'État, l'ANPE et l'ASSEDIC, la maison de l'emploi assure la convergence des politiques publiques de l'emploi et de la formation professionnelle dans le cadre d'un diagnostic, d'une stratégie et d'un plan d'actions partagés, adaptés au développement économique et social du territoire.

Elle a pour objectifs d'associer les collectivités territoriales, de fédérer l'action des partenaires publics et privés et d'ancrer le service public de l'emploi dans les bassins d'emploi, afin d'améliorer le service rendu aux personnes à la recherche d'un emploi.

La maison de l'emploi est fondée sur l'adhésion de chacun des acteurs concernés. Elle respecte l'identité de chaque partenaire, reconnaît leur responsabilité commune, regroupe leurs moyens et les rassemble dans l'action. L'ANPE et l'ASSEDIC exercent leurs missions dans ce cadre.

C'est un lieu de conjonction des efforts pour analyser les besoins, anticiper les mutations économiques et améliorer les services d'accueil, d'information, d'orientation et d'accompagnement vers la formation et l'emploi de toutes les personnes, y compris les demandeurs d'emploi non indemnisés et non inscrits à l'ANPE.

Les maisons de l'emploi s'adressent aussi aux entreprises – TPE, PME, PMI – qui sont à la fois les plus créatrices d'emplois et les moins structurées pour recruter, puisqu'elles ne disposent que très rarement de compétences en la matière. Pourtant, nous savons que la création d'activités nouvelles constitue la réponse la plus efficace contre le chômage.

Un cheminement de près de quatre ans nous permet aujourd'hui de réaliser un bilan et une évaluation des premières maisons de l'emploi. La finalité de la mission que vous m'avez confiée, madame la ministre, consistera à vous proposer un nouveau cahier des charges des maisons de l'emploi, qui précisera leur rôle dans le contexte de réforme du service public de l'emploi et leur articulation avec le nouvel opérateur et les acteurs locaux.

Où en sommes-nous à ce jour ?

La Commission nationale des maisons de l'emploi, que je préside, a proposé la labellisation de 227 projets. Et déjà, plus de 180 maisons de l'emploi fonctionnent sur l'ensemble du territoire national.

Tous les acteurs que j'ai rencontrés s'accordent sur l'importance du rôle moteur joué par les élus et porteurs de projets, ainsi que de la mobilisation de tous les membres constitutifs, y compris les conseils généraux et les conseils régionaux.

Quatre valeurs ajoutées font consensus : la maison de l'emploi est un lieu de gouvernance d'un projet de territoire ; c'est un endroit où l'on élabore un diagnostic de la situation de l'emploi et où l'on définit une stratégie partagée ; c'est un outil de coordination de tous les acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l'emploi ; c'est, enfin, un lieu qui permet la mise en oeuvre d'actions innovantes, expérimentales et de proximité.

Mais il reste encore beaucoup à faire dans le rapprochement des acteurs et dans la performance du projet commun.

Comme le cahier des charges les y invite, les maisons de l'emploi vont engager dans les semaines à venir, une démarche d'autoévaluation pour rendre compte de l'atteinte de leurs objectifs, vérifier que leur action est cohérente avec le diagnostic posé et la stratégie retenue, améliorer le management et décider des améliorations à apporter au projet. En résumé, il s'agira de mieux comprendre, pour mieux décider, mieux agir et mieux rendre compte. C'est une véritable démarche de progrès.

Je suis conscient, par ailleurs, que toutes les maisons de l'emploi ne fonctionnent pas parfaitement. Certaines d'entre elles ont du mal à démarrer, d'autres rencontrent des difficultés. C'est un travail de longue haleine, qu'il faudra conduire dans la durée.

La rédaction du futur cahier des charges sera aussi l'occasion de clarifier des causes de dysfonctionnement.

Je veux parler par exemple :

De la nécessaire définition enfin stabilisée de la notion de bassin d'emploi, condition pour atteindre progressivement la couverture du territoire national ;

De la déconcentration du conventionnement, afin de réduire les délais d'instruction des projets ;

Du nécessaire rapprochement des PLIE, les plans locaux pour l'insertion et l'emploi, des missions locales et des comités de bassin d'emploi avec les maisons de l'emploi, tout en veillant à ce que la spécificité des missions de chacun soit respectée. La diversité de gouvernance de ces structures est d'autant plus inopportune au niveau local qu'elle regroupe les mêmes acteurs ;

De la délégation d'organisme intermédiaire permettant aux maisons de l'emploi de gérer une subvention globale et d'assumer la responsabilité du cofinancement communautaire d'actions de proximité ;

Ou enfin, du financement de l'animation du réseau pour capitaliser les bonnes pratiques et accompagner les maisons de l'emploi vers plus de qualité et plus d'efficacité.

Je ne reviendrai pas sur la nécessaire représentation des maisons de l'emploi au sein du futur conseil régional de l'emploi, qui a fait l'objet d'un amendement au projet de loi de la part de nos collègues du Sénat.

J'ai entendu de nombreuses inquiétudes d'élus locaux et de parlementaires quant aux incertitudes pesant sur les maisons de l'emploi. La fusion entre ANPE et ASSEDIC interroge sur l'articulation des politiques nationales et territoriales, ainsi que sur la nécessité de bâtir une stratégie articulant l'impulsion nationale et les politiques mises en oeuvre par les élus locaux.

Il faut désormais, madame la ministre, raisonner en termes de territoire de proximité et moins en termes de structures ou de dispositifs particuliers.

Je crois pouvoir vous dire que les maisons de l'emploi qui fonctionnent bien, et elles sont nombreuses, jouent désormais un rôle essentiel d'espace d'expression et de cohérence des territoires et renforcent ainsi l'action du service public de l'emploi.

Il ne s'agit pas de les absorber dans un système omnipotent, mais de repenser leur positionnement et leur rôle de coordination, de mieux les utiliser en cohérence avec le nouvel opérateur et de renforcer leur valeur ajoutée, tant en faveur des demandeurs d'emploi et des entreprises que du meilleur usage des fonds publics. La pertinence de l'action nationale ne sera véritablement nourrie que par la richesse de la coopération entre l'État, les collectivités territoriales, et les acteurs locaux.

En résumé, ce sont les maisons de l'emploi qui font le lien entre tous les acteurs sur le territoire – élus, institutionnels, opérateurs, entreprises, partenaires sociaux dont la présence dans ces maisons est très importante, organismes de formation. Ce sont les maisons de l'emploi qui recherchent, de manière constante, la cohérence sur le territoire entre toutes les politiques publiques et qui font le lien entre emploi, formation, insertion et développement économique, avec une approche préventive et non pas uniquement curative, et en laissant plus de place à l'innovation, à l'entreprenariat et aux nouvelles formes d'activité.

Les maisons de l'emploi, comme le nouvel opérateur issu de la fusion de l'ANPE et de l'ASSEDIC, sont des outils qui doivent être utilisés pour un seul objectif, qui me tient à coeur : le plein-emploi et la lutte contre l'exclusion. Le projet de loi de réforme du service public de l'emploi, j'en suis sûr, y contribuera. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi sur la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC que nous examinons est une bonne nouvelle pour la France.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Il entérine une situation de fait, dans la mesure où les ASSEDIC gèrent depuis une dizaine d'années la liste des demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE. Le projet du Gouvernement répond à l'ambition de réduire le taux du chômage de trois points d'ici à 2012 en créant une institution nationale publique. L'organisation des services sera assurée par une instance nationale provisoire, élargie aux collectivités territoriales. Il va sans dire que cette instance jouera un rôle primordial dans le rapprochement de deux structures aussi distinctes que l'ANPE et l'UNEDIC. De ce point de vue, je m'étonne que le Sénat ait décidé d'appliquer aux agents de l'ANPE les conventions collectives régissant l'UNEDIC. En revanche, je me réjouis que le Gouvernement ait tenu à préserver la stabilité de l'emploi et la protection des personnels composant la nouvelle institution.

Beaucoup d'experts ont disserté sur la pertinence de créer au-dessus de cette structure un Conseil national de l'emploi susceptible de répondre aux besoins du marché. Il me semble plus judicieux de souligner l'intérêt des conseils régionaux de l'emploi, à même d'adapter la réponse de l'État aux réalités de chaque territoire.

Ces avancées ne doivent pas masquer certaines zones d'ombres du projet. Ainsi, le régime de retraite des salariés de la nouvelle institution pourrait pâtir du régime de droit privé. Il est également légitime de s'interroger sur l'intérêt de confier le recouvrement des cotisations d'assurance chômage à l'URSSAF, dans le cadre d'une simplification administrative. La plupart des salariés des ASSEDIC jugent ces dispositions injustifiées, compte tenu de leurs compétences. J'avoue ne pas être insensible à leurs interrogations.

Je veux redire ici combien cette réforme, attendue depuis plus de dix ans, est nécessaire. Elle va dans le sens d'une simplification voulue tant par les salariés que par les entreprises et les demandeurs d'emploi. Dans ce projet de fusion, comme dans le domaine de l'emploi, nous ne devons avoir de cesse de mettre en adéquation les différentes formations et les besoins exprimés par les entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il y a une semaine, nous évoquions dans cet hémicycle l'évolution du marché du travail et l'accord entre les partenaires sociaux, fruit de la loi de modernisation du dialogue social que nous avions adoptée. Dans quelques mois, nous examinerons la réforme de la formation professionnelle. Aujourd'hui, nous débattons d'un sujet très important qui touche directement à l'emploi. Il s'agit, non pas de créer un nouveau monstre, mais de modifier la colonne vertébrale de notre service public de l'emploi, tout en gardant à l'esprit un objectif qui ne saurait nous diviser : réduire le taux de chômage qui préoccupe les Français, et qui est déjà en baisse grâce à l'action du Gouvernement. Il faut amplifier ce mouvement positif.

L'équilibre entre l'offre et la demande est variable d'une région à l'autre. De nombreuses offres d'emploi ne sont pas pourvues. Nous devons donc nous interroger sur l'efficacité des aides à la mobilité professionnelle ou géographique, sur le caractère peu attractif de certains métiers, sur les difficultés des entreprises à anticiper leurs besoins futurs ou encore sur le rôle des intermédiaires de placement sur le marché du travail.

On ne peut que se réjouir de la réforme proposée, dont l'un des enjeux majeurs est d'améliorer la qualité du service rendu aux usagers – demandeurs d'emploi comme employeurs. Qu'attendent nos concitoyens du service public de l'emploi ? Un service de proximité, un service coordonné et regroupé en un seul lieu pour ne pas avoir à faire des kilomètres, un service personnalisé et réactif, qui sache guider chaque demandeur d'emploi vers l'emploi.

Beaucoup de progrès ont déjà été accomplis avec le guichet unique et le dossier unique de demandeur d'emploi, mais il faut aller plus loin. Ce projet de loi, qui est l'aboutissement d'une concertation, fournit des outils de pilotage stratégique, comme le Conseil national de l'emploi, les conseils régionaux de l'emploi et les instances paritaires régionales, et les partenariats conventionnels. Il propose un réseau unique, géré par une institution nationale tripartite aux missions précises, dont la gouvernance repose sur un équilibre entre l'État et les partenaires sociaux. Il offre un cadre protecteur pour le rapprochement des statuts des personnels. Vous avez aussi, madame la ministre, apporté des réponses à nos préoccupations s'agissant du statut de la nouvelle instance.

Comme certains de mes collègues, je voudrais appeler votre attention sur les stratégies territoriales. Si les collectivités locales n'en ont pas la compétence de droit, elles s'impliquent fortement dans l'insertion et dans l'emploi au travers des missions locales. Il faut le reconnaître, car cette implication permet de prendre en compte les besoins de chaque territoire, d'en prévoir les évolutions, et d'actionner la dynamique partenariale. De fait, on ne peut pas parler d'emploi sans parler d'entreprise : il n'y a d'emploi que parce qu'il y a une entreprise. L'emploi ne se décrète pas par l'institution qui encadre les chômeurs ; celle-ci ne peut que les accompagner vers les entreprises.

Si je suis convaincu du besoin de gouvernance régionale, je considère qu'une gouvernance locale est tout autant nécessaire. Ce rôle serait tenu par nos maisons de l'emploi, qu'il faut intégrer dans le nouveau dispositif. En tant que président d'une maison de l'emploi, j'en connais les points forts, mais aussi les points faibles. C'est pourquoi je demande que l'autoévaluation que vous allez organiser soit sérieuse et objective, de façon à prendre des décisions appropriées, tant il est vrai que certaines maisons fonctionnent mieux que d'autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Perrut

Il faut faire preuve de pragmatisme, et nos dispositifs ne doivent poursuivre qu'un seul but : mieux accompagner le demandeur d'emploi vers l'emploi. En matière d'accompagnement des jeunes, l'action des missions locales devrait aussi être mieux reliée à celle que mènera ce nouveau service public, même si cela risque d'entraîner des difficultés, des tiraillements. Ce texte a au moins une vertu, celle de poser tous les problèmes sur la table. Avec vous, madame la ministre, nous trouverons les solutions, j'en suis convaincu ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, chacun s'accorde à constater, comme l'a fait M. Méhaignerie tout à l'heure, l'émiettement considérable du dispositif. Ainsi, la seule région Rhône-Alpes compte pas moins de 735 organismes ! Mme la ministre l'a indiqué, et cela nous apparaît également évident, il est essentiel de tenir compte des besoins des interlocuteurs : ceux des entreprises, qu'il faut connaître et anticiper ; ceux des chômeurs, auxquels il faut éviter de longues périodes de chômage ; ceux des salariés en reconversion afin d'anticiper la mise en chômage.

La fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC apparaît comme un progrès, et je suis prêt, comme Gaëtan Gorce l'a dit avant moi, à la soutenir. Je veux seulement appeler votre attention, madame la ministre, sur le risque que représente le rapprochement de deux métiers différents : le placement et l'intermédiation, d'une part, et le financement, d'autre part, même si les ASSEDIC interviennent de plus en plus au niveau de la formation. Je crains que ne se reproduise une conséquence de la fusion de l'ANVAR et la BDPME : aujourd'hui, le métier de développeur de l'ANVAR est en train d'être cannibalisé par le métier de banquier. Pour siéger au conseil d'administration d'OSEO, je sais que cela n'est pas bon. Je vous livre cette réflexion sans y apporter de réponse, mais pour souligner un problème réel.

Beaucoup de collègues ont évoqué l'action des collectivités locales, des mairies, des départements, des régions. Je crois, madame la ministre, qu'il faut aller plus loin. Le Gouvernement a lancé la révision générale des politiques publiques, pour rationaliser l'organisation de notre pays. Mais, pardonnez-moi de le dire, ce n'est pas un progrès que de confier le pilotage du dispositif au préfet ou à la direction du travail : les pays qui réussissent, eux, décentralisent ce dispositif. Là où ça marche, là où ça coûte le moins cher, là où il n'y a pas de doublon, c'est là où c'est décentralisé. Je suis voisin de l'Espagne, je regarde ce qui se passe en Allemagne et en Italie, et, croyez-moi, ça marche.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

C'est exact ! Voilà une vision moderne, madame la ministre !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Pourquoi le dispositif ne marche-t-il pas aujourd'hui, et pourquoi, malgré l'effort louable que vous voulez faire, ne marchera-t-il pas demain ? Parce qu'il n'y aura pas de pilote dans l'avion. Le préfet ne pourra pas être le pilote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Certes, avec le directeur départemental du travail et de l'emploi – auquel il déléguera –, il pilotera ce conseil, auquel les présidents de région ne sont même pas conviés, alors que, de nos jours, tout dans les régions, y compris les fonds européens, est copiloté par le président de région et le préfet. Ce n'est pas de l'étatisation, c'est de la rebureaucratisation. À entendre tous les orateurs qui se sont exprimés, on se demande si notre culture permettra, un jour, que l'État s'occupe de ses fonctions régaliennes et que l'on fasse confiance aux collectivités locales, aux élus locaux, à la démocratie locale. Pourquoi faut-il que l'on reste sous tutelle, même dans ce domaine-là ? Sommes-nous inférieurs à un préfet ou à un DDTE ? Ne sommes-nous pas capables d'avoir un pilotage qui respecte le rôle des départements et celui des maisons de l'emploi ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Pourquoi ne ferions-nous pas, comme la loi le permet, une expérimentation dans deux, trois ou quatre régions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Je le demande, les régions le demandent. Je suis mandaté par elles.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Sinon, vous ne changerez rien. Je crois bien connaître le monde économique, madame la ministre, car j'en viens. Lorsque, dans le sud de l'Aquitaine, une entreprise comme Turbomeca, que vous connaissez bien, recrute 100 personnes par an, il faut aller puiser la main-d'oeuvre dans le nord de la région. À côté des dispositifs existants, il en faut donc favoriser la mobilité. Tant que l'on n'aura pas pris en compte la mobilité dans le traitement du chômage, on ne réglera rien.

Il faut aussi envisager les problèmes du logement et, à différents niveaux, les problèmes d'accompagnement par la formation. Or quelle est, aujourd'hui, la collectivité qui exerce de plus en plus sa compétence en matière de développement économique, avec des difficultés, certes, parce qu'on la jalouse et parce que, peut-être, cette compétence n'est pas partout à son maximum ? C'est la région. Quelle est la collectivité qui, avec les partenaires sociaux, d'une part, et un CES, d'autre part, assume la compétence de formation professionnelle ? C'est la région. Qui finance les missions locales ? Qui finance l'insertion ? Qui gère, avec l'État, le FSE ? C'est la région.

Je ne souhaite pas mettre en place une tutelle des régions sur les départements ou sur les communes. Je propose que, dans cette expérimentation, on crée un schéma régional de l'emploi, pour que l'on puisse savoir qui fait quoi. Ne serait-ce pas le plus grand progrès qu'un gouvernement pourrait faire accomplir au pays, que de dire qui fait quoi et qui est responsable de quoi ? Et il ne faudrait pas désigner seulement des hauts fonctionnaires de l'État : ils ne sont pas élus, ils ne sont pas responsables, ils ne vont pas au contact, ils ne sont pas plus compétents que les élus. La plupart d'entre nous ont fait des études, bon sang de bois ! (Sourires.)

Considérons l'expérience que la région Rhône-Alpes a mise en place : on note un déficit en matière d'orientation. Or, avec la connaissance des secteurs en tension, l'orientation est peut-être l'un des éléments essentiels du placement des chômeurs. Elle est, en tout cas, un service de l'AFPA qui n'a pas été décentralisé aux régions. Permettez-moi d'improviser trente secondes sur ce sujet. L'AFPA a été décentralisée aux régions. Vous savez, madame, que nous n'avons pas encore réglé un petit problème, celui des appels d'offres et de la concurrence. Aujourd'hui, l'AFPA a ceci d'exceptionnel qu'elle place la quasi-totalité des demandeurs d'emploi ou des stagiaires qui sont dans son dispositif, parce qu'elle les accompagne et met à leur disposition un service d'orientation. Ne banalisez surtout pas ce service d'orientation, ne gâchez pas cette compétence. Dans le cadre de cette expérimentation, faisons-en profiter tous les dispositifs.

Encore une fois, faites en sorte qu'il y ait un patron, un pilote, dans cette expérimentation, car, pour l'instant, vous n'en avez pas prévu. Or, aujourd'hui, les régions sont au coeur de tout. On conventionnera avec les maisons pour l'emploi, on conventionnera sur l'insertion avec les départements, on conventionnera avec les mairies. Je ne veux pas de tutelle. Je ne veux pas reproduire le système de l'État. Mais, de grâce, faites en sorte que le coût et les délais de la décision publique diminuent : ce doit être un élément essentiel de la révision générale des politiques publiques. Pour s'administrer, la France dépense trois fois plus d'argent que les autres pays d'Europe, parce que bien que l'État ait transféré des compétences aux collectivités locales, il maintient toutes ses directions extérieures : les DRASS, les DDASS, les DDTE. À quoi tout cela sert-il, aujourd'hui ? Cela ne sert plus à rien. Cela déresponsabilise les élus et la démocratie locale, alors que, dans tous les pays d'Europe, aujourd'hui, c'est cette responsabilité qui favorise la créativité.

Il faut également pouvoir raccourcir les délais, parce que, comme le disait tout à l'heure un de mes collègues, dans votre dispositif, il faudra toujours mettre quinze personnes autour d'une table pour décider de la mission locale ou du système d'insertion des chômeurs les plus en difficulté. On ne peut pas continuer comme ça. La France dépense trop d'argent pour son gouvernement et pas assez pour ses actions. Il ne s'agit pas de diminuer l'action publique, mais de la rendre beaucoup plus rationnelle.

En vous proposant cela, je ne mets pas en cause la fusion des organismes, mais je tâche d'aller plus loin encore. Prenons des collectivités volontaires, par exemple deux régions de droite et deux régions de gauche, et tentons l'expérience. (Rires et exclamations sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Je sais bien qu'il n'y en a que deux, et je n'ai pas dit cela au hasard. Mais redevenons sérieux un moment. Dans la culture de notre pays, la décentralisation ne passe pas, et votre projet le prouve bien, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Essayons tout de même de désétatiser ce pays, de l'organiser comme tous ceux qui fonctionnent bien, d'une manière performante.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rousset

Nous y sommes prêts, madame la ministre, sans polémiques, en toute participation, parce que, au-delà des effets démographiques, il faut que nous améliorions le service public de l'emploi. L'État conserve ses responsabilités avec les partenaires sociaux, pour fixer le montant des indemnités, les règles d'indemnisation, les aides aux entreprises, et, sur le territoire, les régions, en coopération avec les départements, les maisons de l'emploi et les communes, relèvent le défi. Madame la ministre, elles pourraient non seulement le relever, mais le gagner, en partenariat, sans qu'aucun des partenaires ne puisse se targuer d'avoir remporté la victoire sur les autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Génisson

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures dix.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Jean-Pierre Carton