COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 4 novembre 2009
La séance est ouverte à neuf heures trente.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission puis de M. Pierre Morange, vice-président)
La Commission des affaires sociales examine, pour avis, les crédits pour 2010 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sur le rapport de M. Paul Jeanneteau, pour la partie « Handicap et dépendance », et sur le rapport de M. Christophe Sirugue, pour la partie « Solidarité ».
La Commission examine d'abord, pour avis, sur le rapport de M. Paul Jeanneteau, pour la partie « Handicap et dépendance » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Avec des crédits d'un montant de 9,1 milliards d'euros, le budget pour 2010 du programme « Handicap et dépendance » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » augmente de 5,5 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009, confirmant la dynamique de l'année précédente où les crédits avaient augmenté de 6,5 % entre 2008 et 2009.
Cet effort, particulièrement significatif en temps de crise, mérite d'être salué. Il témoigne d'une réelle constance de la politique au profit des personnes handicapées et des personnes dépendantes, conforme aux orientations définies par le Président de la République dans le discours qu'il a prononcé lors de la conférence nationale du handicap le 10 juin 2008.
Trois points méritent d'être soulignés. Tout d'abord, l'attribution de moyens nouveaux aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), la dotation de l'État passant de 14,9 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2009 à 21,7 millions d'euros dans le présent budget. Ensuite, le financement de 1 400 places nouvelles en établissements et services d'aide par le travail (ESAT), conformément au plan pluriannuel de création de places d'accueil au profit des personnes handicapées. Enfin, la poursuite de la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), conforme à l'objectif global d'une revalorisation de 25 % en cinq ans.
Mais l'examen détaillé des crédits de ce programme n'est pas l'objet principal de mon rapport. J'ai en effet choisi de centrer mon analyse sur la prise en charge des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes.
La question du vieillissement de ces personnes est relativement nouvelle, liée à l'allongement de leur espérance de vie, parallèle à celui constaté dans la population générale. Alors qu'en 1929, l'espérance de vie d'une personne trisomique était de neuf ans, elle est passée à 55 ans en 1990.
Dans le même temps, et bien que ce sujet appelle la prudence, de nombreuses personnes entendues, au cours de la vingtaine d'auditions que j'ai menées, ont insisté sur la spécificité du vieillissement des personnes handicapées, notamment leur fatigabilité beaucoup plus importante à partir de quarante-cinq ans, qui appelle une prise en charge spécifique. Le vieillissement de ces personnes constitue une préoccupation majeure pour les familles, d'autant qu'il va souvent de pair avec celui de leurs aidants, le plus souvent des membres de la famille.
Si la prise en charge des personnes handicapées vieillissantes est un sujet bien identifié et cette réalité bien établie aujourd'hui, elle est encore insuffisamment quantifiée, cela pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le vieillissement des personnes handicapées est lui-même encore récent. Ensuite, la notion de déficience intellectuelle n'est pas toujours facile à appréhender et à distinguer de déficiences voisines, en particulier psychiques. Enfin, la seule étude complète sur la détermination du nombre de personnes intellectuellement déficientes vieillissantes semble être l'enquête Handicaps-Incapacités-Dépendance (HID) menée en 1998-2001 par l'INSEE et la direction statistique des ministères chargés du travail, du budget et de la santé, il y a donc près de dix ans. Selon cette enquête, on dénombrait environ 635 000 personnes handicapées vieillissantes, dont 267 000 avaient soixante ans ou plus et 140 000 soixante-dix ans ou plus. Environ 44 % de ces personnes, soit environ 280 000, souffriraient d'une déficience intellectuelle ou mentale.
L'enquête « Établissements sociaux et médico-sociaux », conduite auprès des structures par la direction statistique que je viens d'évoquer, dénombrait, pour sa part, au 31 décembre 2006, 3 659 établissements accueillant 118 865 personnes handicapées. Ces chiffres sont en augmentation de 20 % par rapport à 2001. Sur cet ensemble, on peut estimer à 46 000 le nombre de personnes intellectuellement déficientes vieillissantes – de plus de 45 ans. En outre, quelque 12 000 personnes intellectuellement déficientes seraient accueillies dans des structures pour personnes âgées, maisons de retraite ou unités de soins de longue durée.
Ces données sont intéressantes mais fragiles, fondées parfois sur des hypothèses incertaines et des extrapolations. En outre, elles ne permettent pas de répondre à toutes les questions. Combien de personnes intellectuellement déficientes attendent-elles qu'une place se libère en établissement ? Quelles projections pour l'avenir ? Certaines associations font des estimations. Ainsi, l'une d'entre elles a-t-elle demandé un programme pluriannuel de création de 30 500 places dédiées à l'accueil et à l'accompagnement des personnes handicapées mentales vieillissantes, à horizon de cinq ans.
Ces incertitudes sur le diagnostic exigent que soit mis en oeuvre un dispositif de suivi, sur le plan national, des structures au service des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes, dans le cadre de l'enquête HID, et que les personnes concernées soient recensées, de manière à établir clairement les besoins. Je proposerai un amendement en ce sens.
Si la question du vieillissement des personnes intellectuellement déficientes gagnerait à faire l'objet d'études plus systématiques pour une meilleure évaluation des besoins, des avancées nombreuses ont déjà eu lieu ces dernières années, qu'il s'agisse de la programmation des politiques publiques, de la coordination des actions menées sur le terrain, de la mutualisation des moyens entre établissements ou encore de la formation des personnels du secteur médico-social. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances des personnes handicapées, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital, mais aussi le plan annuel de création de places dans les structures d'accueil mis en oeuvre depuis 2008, constituent déjà autant d'outils efficaces.
Ces outils visent à développer les structures d'accueil aujourd'hui bien identifiées des personnes handicapées qui avancent en âge : maintien à domicile ou en milieu familial ; accueil en foyer d'hébergement ou passage en foyer de jour ou occupationnel ; séjour en foyer d'accueil médicalisé ou en maison d'accueil spécialisée ; accueil en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).
De manière générale, avec l'avancée en âge, le passage d'une structure à une autre est d'autant plus difficile que divers éléments, parfois contradictoires, sont à prendre en compte. D'aucuns préconisent le maintien dans la structure d'origine le plus longtemps possible, au besoin par le recours complémentaire à des structures médicalisées externes et l'intervention de services d'accompagnement à la vie sociale ou de services d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés. D'autres invoquent le risque d'engorgement des structures au détriment de l'accueil des nouvelles générations. Des questions de financement se posent également car, selon les structures, les financeurs ne sont pas les mêmes : si les établissements ou services d'aide par le travail sont financés par l'État, les foyers d'accueil médicalisés le sont par l'assurance maladie pour ce qui concerne les soins et par les conseils généraux pour ce qui relève de l'hébergement.
Je ne serai pas complet sans évoquer la « barrière d'âge » de soixante ans, maintes fois soulignée pendant les auditions : trop de structures imposent encore, en effet, une limite d'âge pour l'accueil des personnes handicapées, en l'absence pourtant de toute disposition législative ou réglementaire en ce sens. Je proposerai un amendement à ce sujet.
De même, il existe encore des inégalités dans l'attribution des prestations aux personnes handicapées selon leur âge et il sera intéressant d'entendre la position du Gouvernement sur cette question en séance publique.
Parce que les solutions que je viens d'évoquer ne suffisent pas toujours sur le plan quantitatif et qualitatif, des initiatives complémentaires ont vu le jour. Elles permettent de mettre l'accent sur certaines priorités et constituent autant de pistes de réflexion pour l'avenir, tant il faut élargir la palette des solutions envisageables. Je crois sincèrement que c'est dans le foisonnement des initiatives ponctuelles, souvent expérimentales, que se joue l'avenir de la prise en charge des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes. C'est d'ailleurs pourquoi je présenterai un amendement encourageant les expérimentations.
De mes auditions et de mes déplacements pour la préparation de cet avis, je retiens cinq axes principaux de réflexion.
Premier axe : préserver la continuité des parcours. Une première exigence est, en effet, d'éviter les changements de structures d'hébergement, vécus comme des ruptures par les personnes vieillissantes, et de privilégier les solutions graduées. Dans le Nord, une expérience permet à des personnes handicapées travaillant en établissement ou service d'aide par le travail de cesser progressivement leur activité, en entrant en accueil de jour à mi-temps.
Deuxième axe : favoriser l'adossement des unités dédiées aux personnes handicapées vieillissantes à des structures existantes. Les expériences actuelles tendent à privilégier l'accueil d'un nombre restreint de personnes handicapées vieillissantes, dans des unités de petite taille, créées au sein notamment d'EHPAD. Ces solutions ont le mérite de favoriser une certaine mutualisation des moyens et les échanges d'expériences, comme l'illustre le développement des unités pour personnes handicapées vieillissantes (UPHV) et des unités pour personnes handicapées âgées (UPHA) dans le Maine-et-Loire.
Troisième axe : repenser l'aide aux familles. Le problème du vieillissement des aidants, notamment des parents, a été très fréquemment soulevé lors des auditions. Des solutions existent aujourd'hui, qui consistent à accueillir à la fois la personne handicapée et ses parents. L'hébergement en EHPAD peut, dans certains cas, être opportun. Mais d'autres solutions existent pour l'accueil des familles. Les représentants de la maison Marie-Claude Mignet nous ont ainsi fait part d'une expérience novatrice menée en Vendée, où une quinzaine de personnes handicapées sont accueillies avec leurs parents. L'existence, au sein de la structure, de places d'accueil temporaire, permet une certaine souplesse, le moment venu, pour l'accueil de nouvelles personnes en cas de décès au sein d'une famille.
Quatrième axe : équilibrer les dimensions sociale, économique et territoriale des projets. Si la dimension sociale de l'accueil des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes est évidente, les dimensions économique et territoriale des projets ne doivent pas être négligées. Le foyer de vie Thérèse Olivier à Somain dans le Nord, que j'ai pu visiter, est une réalisation d'exception qui, tant au plan architectural que dans les échanges avec la municipalité et les associations locales, en fait un élément structurant d'aménagement du territoire. Créer une structure, c'est aussi parfois un moyen de dynamiser ou redynamiser un territoire sur le plan économique.
Cinquième axe : favoriser la médicalisation des structures existantes, en privilégiant une certaine souplesse. On pourrait ainsi encourager la médicalisation d'une ou de quelques places en foyer, en autorisant des procédures simplifiées pour l'obtention des agréments requis comme des financements.
Les expérimentations sont nombreuses et riches. Pourquoi ne pas confier par exemple à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) le soin de les recenser de manière exhaustive, de façon à favoriser les échanges d'expériences et la diffusion des bonnes pratiques ?
Pour conclure, il me semble important de rapprocher les politiques du handicap et de la dépendance, encore trop souvent scindées. Beaucoup, déjà, a été fait sur cette voie. Mais des progrès sont encore possibles. Je proposerai un amendement encourageant les départements à élaborer des schémas départementaux d'organisation des structures d'accueil, consacrés simultanément à la gérontologie et au handicap. C'est aussi l'un des moyens de faire de la prise en charge des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes l'une des priorités de nos politiques publiques futures.
Je félicite le rapporteur pour la qualité de son travail et des pistes qu'il a ouvertes. Il a souligné l'accroissement des moyens consacrés aux maisons départementales de personnes handicapées (MDPH), aux établissements ou services d'aide par le travail et à la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés.
Alors même que la question du vieillissement des personnes handicapées, notamment des personnes intellectuellement déficientes, constitue un défi pour l'avenir, nous disposons de peu d'informations. Comment distinguer précisément les déficiences intellectuelles des déficiences psychiques ? Comment améliorer la prise en charge de ces personnes, notamment par le biais d'expériences innovantes ? La création d'une cinquième branche de la Sécurité sociale pourrait-elle aider à régler le problème ?
Alors que l'on dénombrerait, aujourd'hui dans notre pays, 300 000 personnes intellectuellement déficientes vieillissantes, il n'y aurait qu'entre 50 000 et 100 000 places d'accueil. Cela signifie-t-il que 200 000 personnes vivent à leur domicile ou dans leur famille ? Dispose-t-on d'informations précises sur ce point ?
Le plan pluriannuel qui prévoit la création de 10 000 places d'accueil supplémentaires peut-il laisser espérer que des places se libèrent en établissements ou services d'aide par le travail, certaines personnes handicapées y étant parfois gardées au-delà de soixante ans, parce qu'elles ne bénéficieraient plus sinon d'aucune prise en charge ? Comment assurer une certaine souplesse dans la gestion des structures, de façon que le problème de la barrière d'âge ne se pose plus de manière aussi dramatique ? En bref, comment et où accueillir les personnes handicapées de plus de soixante ans ? Que faire concernant l'attribution des ressources, la loi de 2005 disposant qu'à l'horizon de cinq ans, il ne devait plus y avoir de distinction entre personnes handicapées par critère d'âge ? A-t-on atteint l'objectif ?
Que pensez-vous, parmi les solutions innovantes, de l'adossement de structures pour personnes handicapées vieillissantes à des structures existantes ? Quelle complémentarité envisager ?
Enfin, comment mieux aider les familles, trop souvent contraintes de se substituer à des structures d'accueil trop peu nombreuses ?
Je félicite à mon tour le rapporteur. Les structures d'accueil pour personnes handicapées, qui disposent de moyens médicaux très limités, sont souvent désarmées face aux besoins des personnes polyhandicapées, alors même que leur espérance de vie s'allonge. Les structures hospitalières, où l'approche transversale a beaucoup de mal à prévaloir, ne peuvent, hélas, pas aider beaucoup. Et les aidants eux-mêmes sont démunis, ne bénéficiant d'aucun soutien spécifique.
Comment favoriser les relations entre structures d'hébergement et structures de soins, notamment pour développer l'hospitalisation à domicile et faire se déplacer les soignants plutôt que les personnes handicapées ? C'est au niveau des agences régionales de santé (ARS), créées par la loi du 21 juillet 2009 dite « HPST », que l'on pourra quantifier les moyens afin que s'instaure une véritable collaboration entre les collectivités, les structures d'hébergement et les structures de soins.
Je remercie le rapporteur d'avoir centré son travail sur la question essentielle du vieillissement des personnes handicapées, qui a fait l'objet de plusieurs études ces dernières années.
Leurs structures d'accueil sont le lieu de vie des personnes handicapées. Il est donc important de tout faire pour les maintenir le plus longtemps possible dans leur environnement, ce qui implique la nécessité d'une certaine souplesse dans le fonctionnement des établissements. Mais, comment l'organiser alors que les habilitations sont aujourd'hui déjà si difficiles à obtenir ? Ensuite, le maintien des personnes handicapées vieillissantes dans leur lieu de vie ne risque-t-il pas d'engorger les structures, au détriment des jeunes générations, comme on l'a constaté, en un mouvement inverse, voilà quelques années dans les structures d'accueil pour enfants handicapés ? Enfin, il faut prévoir une formation spécifique pour les personnels.
Comment obtenir des garanties sur la complémentarité entre schémas départementaux et schéma régional d'accueil ? Les ARS ont bien sûr là tout leur rôle à jouer mais, une fois les besoins recensés, quelles garanties aura-t-on que les engagements pris seront tenus ? Dans de nombreux départements, des projets de création de structures d'accueil ont reçu un avis favorable, qui n'ont ensuite jamais pu être financées. Comment parer à cette difficulté ?
Conformément à la loi de 2005, il ne devait plus y avoir de barrière d'âge à l'horizon de cinq ans. Nous voici donc bientôt à l'échéance. Il faut impérativement avancer sur le sujet, car la difficulté est loin d'être levée.
On ne pourra pas s'engager dans toutes les voies indiquées si les maisons départementales des personnes handicapées ne disposent pas des moyens suffisants pour accueillir, évaluer, orienter et accompagner les personnes handicapées. Certes, leurs crédits augmentent mais beaucoup de retards avaient aussi été accumulés. Le Sénat et la Cour des comptes ont chacun établi un rapport sur le sujet. Pourriez-vous nous rassurer sur la situation de ces maisons départementales ?
Pour ce qui est de la revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés, les engagements pris par le Président de la République seront tenus, mais les charges croissantes auxquelles doivent faire face les personnes en situation de handicap, liées en particulier aux franchises médicales et à l'augmentation du forfait journalier d'hébergement, font qu'au final elles sont pénalisées. On est parfois loin du reste à vivre de 30 % du montant de leur allocation qui devrait leur être garanti !
J'ai également apprécié le rapport, mais je m'interroge sur l'application de ses mesures. Il est invraisemblable que personne ne soit capable de dire quels sont les besoins exacts dans chaque département. Je me demande d'ailleurs d'où viennent les chiffres avancés sur le plan national puisque, quand on interroge aussi bien les préfectures que les autorités médicales locales comme dans mon département, elles ne savent rien ! On compte dans le Nord-Pas-de-Calais et en Picardie proportionnellement plus de personnes handicapées que dans les autres régions. À la fois pour répondre aux besoins immédiats et pour anticiper l'avenir, il faudrait que les ARS puissent fournir des données précises.
La prise en charge des personnes handicapées constitue un tout et on ne peut pas séparer les personnes vieillissantes des autres. Il y a des listes interminables, notamment en Picardie, de personnes handicapées à la recherche d'une place en établissement. Beaucoup de parents, eux-mêmes vieillissants, s'angoissent pour l'avenir de leurs enfants handicapés lorsqu'ils ne seront plus là pour s'en occuper.
Enfin, on n'a pas évoqué le coût pour les familles de l'accueil en établissement pour personnes handicapées, comme pour personnes âgées d'ailleurs. Il y a eu une envolée soudaine intolérable des tarifs.
Je félicite à mon tour le rapporteur. Pour avoir été l'an passé rapporteure pour avis des crédits de ce programme, je suis heureuse que l'État maintienne son effort budgétaire en faveur des personnes handicapées. J'avais centré mon rapport sur les maisons départementales des personnes handicapées et pointé les graves difficultés qu'elles connaissaient alors. Je ne peux donc que me réjouir de l'augmentation des crédits, indispensable à leur bon fonctionnement. Une autre question était en suspens l'an dernier, celle du statut de ces structures. Une étude était en cours et trois possibilités d'évolution du statut étaient envisagées, qui devaient permettre de lever les difficultés, essentiellement liées aux transferts de personnels. Où en est la réflexion du Gouvernement ?
L'espérance de vie des personnes handicapées, physiques ou mentales, augmente à l'instar de celle de la population générale. Nous avons tous reçu dans nos permanences des parents vieillissants, qui se sont toute leur vie dévoués pour leur enfant handicapé, et sont profondément angoissés par le sort de celui-ci après leur disparition, d'autant qu'ils n'ignorent pas le manque criant de places en établissements.
La suppression une fois pour toutes de la barrière d'âge n'est pas indépendante de la mise en oeuvre de la convergence tarifaire, dont on parle depuis si longtemps, non plus que de la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale. Par ailleurs, les maisons départementales doivent, à terme, s'adresser à toutes les personnes en perte d'autonomie, que celle-ci soit liée à un handicap ou au vieillissement. Où en est leur transformation en maisons de l'autonomie ? Des expérimentations ont déjà eu lieu dans quelques départements.
Je félicite moi aussi le rapporteur. Nous sommes confrontés à un problème très difficile, né à la fois de l'augmentation du nombre de personnes handicapées et de l'allongement de leur espérance de vie. C'est une lourde charge budgétaire pour la société et on voit mal comment régler le problème. Est-il imaginable que, pour certains types de handicap, le nombre de personnes atteintes diminue ? S'il est difficile de combattre certaines maladies neuro-dégénératives, source de handicaps mentaux, les progrès dans les techniques de dépistage devraient permettre de limiter le nombre des handicaps congénitaux et néo-nataux. Ainsi dépiste-t-on aujourd'hui très efficacement la trisomie 21. Peut-on envisager, alors même que les personnes handicapées vivront plus longtemps, qu'il y ait à terme moins de personnes handicapées mentales ?
À mon tour, je félicite le rapporteur de la qualité de son rapport, comme des auditions qu'il a organisées. Une remarque concernant ces dernières en général : nous avons entendu le même jour quasiment les mêmes personnes lors des auditions organisées par Isabelle Vasseur, rapporteure pour le secteur médico-social du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 et les vôtres, monsieur le rapporteur, sur le programme « Handicap et dépendance » du projet de loi de finances. Lorsque des sujets sont aussi proches, ne serait-il pas possible, dans un souci de rationalisation du travail parlementaire, de n'organiser qu'une seule audition de la même personne ?
La loi du 11 février 2005, conformément aux recommandations internationales, invite à parler non pas de personne handicapée, mais de « personne en situation de handicap », et non pas de dépendance, mais de « perte d'autonomie ». C'est une demande essentielle des associations et des professionnels. Veillons à la prendre en compte, car cela aidera aussi à changer le regard porté sur ces personnes.
Quand enfin avancera-t-on sur la question de la barrière d'âge ?
Il faudra veiller à l'articulation du futur travail des ARS et de celui déjà mené par les conseils généraux, qui ont élaboré des schémas départementaux des structures d'accueil. Un cadrage sera nécessaire, afin que ne se répète pas ce qui s'est passé avec les programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie (PRIAC).
Oui, les parents vieillissants d'enfants handicapés sont extrêmement angoissés. Comment aménager au mieux la transition vers un établissement quand, trop âgés, ils ne peuvent plus s'occuper de leur enfant ? Je ne suis pas certaine, pour ma part, que l'accueil en EHPAD soit la bonne solution, d'autant que la charge de l'hébergement dans ces structures repose très largement sur les conseils généraux. Là encore, la barrière d'âge pose problème pour les financements.
Pour le reste, je suis perplexe quant au fait que la CNSA ait pu connaître un excédent d'un milliard d'euros en 2008, ait rendu 150 millions d'euros à l'État en 2009 et que ses crédits pour 2010 soient inférieurs de 150 millions à ses crédits pour 2009. Je comprends bien que certains projets, dont le financement est assuré, ne sont pas terminés. Mais a contrario, il existe des projets qui pourraient avancer sur le plan local et ne sont pas pris en compte par les instances nationales. Comment faire pour que les crédits disponibles soient pleinement utilisés ? On ne peut pas accepter que les besoins, considérables, ne soient pas satisfaits alors même que les moyens existent.
Le problème des personnes handicapées vieillissantes n'est pas nouveau, mais il prend aujourd'hui une acuité particulière du fait de l'augmentation de leur nombre. Il faut impérativement supprimer la barrière d'âge de soixante ans.
Il est important aussi que les maisons départementales des personnes handicapées se rapprochent des centres locaux d'information et de coordination (CLIC), afin que les personnes n'aient qu'un seul interlocuteur.
Je souhaiterais enfin connaître le pourcentage de personnes handicapées qui pourraient travailler en milieu ordinaire. Des progrès, indispensables, peuvent être faits en ce domaine.
Nous avons fait dans ma commune l'expérience d'accueillir en EHPAD des personnes handicapées vieillissantes en même temps que leurs parents. Elle s'est révélée positive pour tous. Mais il m'a fallu être très persévérante, car j'ai mis sept ans à obtenir l'autorisation ! Ainsi, il fallait que je définisse un projet de vie. Mais, comment en définir un si l'on ignore qui sera accueilli dans l'établissement ?
S'il faut se féliciter de l'objectif d'accroître le nombre de places d'accueil en établissement, il faudrait que celles-ci puissent être créées plus rapidement. Il y a trop de lourdeurs et de rigidités administratives.
La loi dite « HPST » a créé les ARS et des commissions de coordination des politiques publiques régionales de santé. Il est urgent de mettre en place cette nouvelle organisation. Pourrions-nous avoir une idée du calendrier ?
Je salue l'excellent travail du rapporteur, qui a présenté plusieurs pistes tout à fait intéressantes, parmi lesquelles deux ont tout particulièrement retenu mon attention : préserver la continuité des parcours des personnes handicapées vieillissantes, et permettre que des parents âgés puissent être accueillis en même temps que leur enfant, lui-même vieillissant. Pour autant, personnes âgées et personnes handicapées ne relèvent pas de la même prise en charge. Si cette solution est rassurante sur le plan affectif, tant pour les parents que pour la personne handicapée elle-même, comment pérenniser l'accueil de celle-ci une fois ses parents décédés et éviter une rupture traumatisante ? Qu'a-t-il été prévu à ce sujet dans l'expérimentation que vous avez citée ?
Je félicite à mon tour notre excellent rapporteur. J'aimerais savoir si nous disposons d'éléments de comparaison avec ce qui se fait à l'étranger. Dans les zones frontalières, des personnes handicapées françaises se rendent-elles en Belgique, en Suisse ou en Italie du Nord, parce que les conditions d'accueil y seraient meilleures ?
Il y a dix ans, dans l'Isère, alors que nous étions encore en période de vaches grasses, nous avons réussi à créer à Saint-Martin-le-Vinoux une structure d'accueil pour handicapés vieillissants, adossée à un centre d'aide par le travail. Mais, aujourd'hui, nous n'en aurions plus les moyens.
Il faut faire un effort particulier de formation des personnels, car les personnes handicapées vieillissantes exigent une prise en charge spécifique, différente de celle des personnes âgées sans handicap.
J'aurais souhaité des compléments d'information sur le pilotage des actions du programme 157. Comment notamment sera évaluée la qualité des établissements ?
Je souhaiterais enfin que l'on veille à n'être jamais stigmatisant au travers du vocabulaire, et que nous parlions toujours des personnes handicapées, et non des handicapés.
Je remercie à mon tour le rapporteur. Je trouve en effet judicieux de choisir un sujet particulier qu'on approfondit. Pour avoir été dix-huit ans président de conseil général et pour présider aujourd'hui une communauté d'agglomération, je puis témoigner que la palette des solutions, la lourdeur des structures et la complexité des procédures font qu'il est difficile, tant pour l'opinion que pour les élus, d'appréhender ces problèmes. Cherchons vraiment à simplifier nos dispositifs et à les rendre plus lisibles pour tous. Un benchmarking avec nos voisins européens, comme le suggérait Dominique Dord, ne serait sans doute pas inutile.
Plusieurs orateurs m'ayant posé les mêmes questions ou des questions se rejoignant, j'y répondrai de façon groupée.
Bernard Perrut s'est demandé comment distinguer déficience intellectuelle et déficience psychique. Une déficience, c'est une perte de la capacité d'utilisation ou un dysfonctionnement d'une partie du corps. Une incapacité, elle, est la conséquence d'une déficience : c'est l'impossibilité ou la difficulté à réaliser des actes élémentaires de la vie courante. S'il faut distinguer déficience intellectuelle et déficience psychique, j'ai pu constater lors de mes auditions qu'il pouvait arriver que des directeurs départementaux des affaires sanitaires et sociales eux-mêmes les confondent. Certes, des caractéristiques peuvent leur être communes, comme des difficultés de compréhension ou certains troubles du comportement ou de la personnalité. C'est la proportion de ces troubles qui distingue les deux types de déficience.
Si on lève la barrière d'âge, on en vient à la question de la convergence tarifaire et de là, à celle d'un cinquième risque. À titre personnel, je pense qu'il faudra s'engager dans cette voie, même si des progrès ont déjà été accomplis, pour ce qui concerne par exemple la prestation de compensation du handicap. Il faut absolument réfléchir à la création d'un cinquième risque, mais bien évidemment cette réflexion ne pourra pas aboutir à moyens constants. Je m'associe aux conclusions d'Isabelle Vasseur, rapporteur pour le secteur médico-social du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010, qui a souligné l'importance de l'enjeu. Le Gouvernement a engagé une concertation avec les partenaires sociaux, portant notamment sur les sujets suivants : le financement de ce risque pourrait être assuré en partie par la solidarité nationale ; des partenariats pourraient être noués avec les organismes de prévoyance, collective ou individuelle ; les possibilités de contribution personnelle de chacun devraient être mieux prises en compte. Nous venons de créer une mission d'information, pilotée par Valérie Rosso-Debord, sur le financement du cinquième risque, qui devrait rendre ses conclusions au premier trimestre 2010. Au-delà des aspects financiers, il y va d'un choix de société.
Une formation spécifique des personnels à la prise en charge des personnes handicapées mentales, surtout vieillissantes, est essentielle – plusieurs d'entre vous y ont insisté. En février 2008, Mme Valérie Létard, alors secrétaire d'État chargée de la solidarité, avait proposé la mise en oeuvre de plans régionaux des métiers au service des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes. La déclinaison de ces plans doit prendre en compte la problématique relativement nouvelle des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes, qui appelle une prise en charge particulière, médicale, sociale et psychologique.
Il est vrai, comme l'a souligné Maxime Gremetz, que l'un des problèmes majeurs est que nous ne disposons pas de chiffres précis. Ceux que je vous ai donnés sont extrapolés « au doigt mouillé », par recoupements des résultats de diverses enquêtes. Or, il est très difficile de définir une politique adaptée et efficace sans connaître précisément le nombre de personnes potentiellement concernées. Cela étant, c'est en l'espèce assez délicat, car certaines personnes handicapées mentales vivent au domicile de leurs parents et ne se sont jamais signalées auprès de la maison départementale des personnes handicapées, ni n'ont jamais sollicité aucune aide. Mais, on pourrait obtenir des chiffres plus précis. D'où l'un de mes amendements proposant une étude « grandeur nature » pour obtenir des chiffres fiables et actualisés.
Nous nous intéressons bien entendu au sort de toutes les personnes handicapées. J'ai choisi de traiter plus spécifiquement dans mon rapport des personnes intellectuellement déficientes, car c'est un problème émergent, qui va aller croissant et suscite une très forte angoisse pour leurs parents, certains de ces derniers allant jusqu'à dire qu'ils préféreraient que leur enfant disparaisse avant eux. Nous avons tous reçu dans nos permanences des parents cherchant désespérément une solution pour un enfant handicapé.
Madame Carrillon-Couvreur, peu d'études ont encore été réalisées sur le sujet des personnes intellectuellement déficientes vieillissantes, à l'exception d'un rapport du sénateur Paul Blanc. Il n'existe pas de réponse type, non plus que de solution miracle. Toute solution adaptée, permettant un accompagnement des personnes sans rupture, est bonne. On pourrait citer l'exemple de l'EHPAD créé à Saint-Saulve, commune dont Cécile Gallez est maire, où peuvent être accueillis à la fois la personne handicapée et ses parents âgés, ou bien encore la Maison Marie-Claude Mignet, en Vendée, où la personne handicapée, accueillie en même temps que ses parents, peut rester après leur mort, ce qui ne la perturbe pas trop. Mais, bien entendu, la prise en charge des personnes handicapées et des personnes âgées dans ces établissements est différenciée, avec du personnel formé et des activités distinctes pour chaque catégorie de résidents, même s'il y a des moments où tous se retrouvent.
Il faut favoriser la souplesse, la réactivité et les expérimentations. Je propose d'ailleurs un amendement en ce sens. Il n'est pas normal, comme l'a souligné Cécile Gallez, que les financements soient si longs à obtenir lorsque les conseils généraux et l'État sont cofinanceurs. Il suffit parfois d'autoriser la médicalisation de quelques places d'un foyer de vie ou d'hébergement, parfois de permettre à une personne de rester en établissement ou service d'aide par le travail au-delà de soixante ans, et de passer d'un type de structure à l'autre sans rupture. Il n'est pas pour cela nécessairement besoin de dispositions législatives systématiques. C'est plus une question d'état d'esprit et de bonne information des acteurs - préfets de région, préfets de département, présidents de conseils généraux et, demain, directeurs d'ARS. C'est pourquoi il faut permettre des expérimentations, et faire ainsi évoluer les mentalités.
Monsieur Domergue, il est vrai que, grâce au dépistage anté-natal, peu d'enfants trisomiques 21 naissent aujourd'hui en France : quelque 98 % des futurs parents dont le foetus est atteint de trisomie 21 choisissent, me semble-t-il, une interruption médicale de grossesse. Mais d'autres troubles, liés notamment à la très grande prématurité, apparaissent en nombre, sans parler de la frontière ténue entre déficience intellectuelle et déficience psychique. Les besoins resteront donc importants.
Il est essentiel que les départements soient encouragés à élaborer un seul schéma d'organisation des structures d'accueil, traitant simultanément des personnes âgées et des personnes handicapées. Les ARS auront un rôle majeur à jouer. La loi dite « HPST » a prévu que leurs schémas régionaux seraient établis en tenant compte des schémas départementaux arrêtés par les conseils généraux. Par ailleurs, avant d'élaborer ces schémas régionaux, les directeurs généraux des ARS consulteront les présidents de conseils généraux. Enfin, chaque agence régionale devra engager une concertation avec les conseils généraux, afin de mieux connaître les besoins des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées. Telle est la loi. Reste à l'appliquer : il faudra être vigilant.
Madame Poletti, une réflexion est en cours sur le statut des maisons départementales des personnes handicapées. Le sénateur Paul Blanc a remis un rapport sur le sujet en juin dernier. Une simplification des procédures a également été lancée par le Gouvernement, en lien avec les professionnels des maisons et les associations.
S'agissant de la CNSA, madame Hoffman-Rispal, il faut rappeler que le Président de la République s'est engagé à créer 51 000 places d'accueil pour personnes handicapées d'ici à 2015, dont 39 000 pour adultes et 12 000 pour enfants. D'ici à 2012, 30 000 places auront été créées, dont 9 625 en 2008 et 6 925 en 2009. Nul ne peut nier l'effort consenti par l'État. Enfin, tous les crédits consacrés aux personnes handicapées ne figurent pas dans le projet de loi de finances. Certains figurent dans l'ONDAM de la loi de financement de la sécurité sociale, d'autres, concernant notamment les entreprises adaptées, dans le budget du travail et de l'emploi, d'autres encore dans celui du ministère de l'Éducation. Au total, l'effort national en faveur des personnes handicapées s'élève ainsi à 38 milliards d'euros en 2008.
L'ambiguïté concernant les crédits non utilisés tient au fait qu'il n'existe pas de dispositif autorisations de programmecrédits de paiement. Le délai de latence entre l'annonce de la création d'une structure et le début de sa réalisation explique qu'il y ait des fonds inutilisés. Sans doute faudrait-il en venir à des autorisations d'engagement et à des crédits de paiement.
Nous en arrivons à l'examen des amendements.
Article additionnel après l'article 59 : Établissement par le Gouvernement d'un dispositif de suivi annuel des structures d'accueil des personnes handicapées vieillissantes
La Commission est d'abord saisie de l'amendement AS 1 du rapporteur pour avis.
Cet amendement prévoit que le Gouvernement mettra en oeuvre un dispositif de suivi annuel des structures d'accueil des personnes handicapées vieillissantes afin, d'une part, de disposer de données précises sur le nombre et le type de structures existantes, les places qu'elles offrent et leurs sources de financement, d'autre part de pouvoir adapter l'offre de structures à l'évolution prévisible des besoins.
Bien entendu, ces informations sont indispensables, et il est de bon sens de les demander. C'est d'ailleurs pourquoi nous voterons l'amendement, mais il me semblait que les maisons départementales des personnes handicapées étaient censées les fournir. Si elles ne le font pas, pourquoi ?
Un rapport ou un dispositif de suivi, c'est certes toujours intéressant, mais lorsque c'est l'opposition qui en demande, on lui répond systématiquement que les informations sont connues et qu'un énième rapport serait inutile. Demander un rapport est pourtant souvent le seul moyen pour l'opposition de contourner l'interdiction de déposer des amendements qui tomberaient sous le coup de l'article 40.
Je suis heureux que vous releviez mon bon sens ! Je suis, comme vous, surpris que nous ne disposions pas de ces informations. Pour autant, le rôle des maisons départementales n'est pas en priorité de recueillir des données statistiques, mais d'accueillir et d'accompagner les personnes handicapées dans un guichet unique. Le recensement des personnes et l'établissement de statistiques au niveau national relèvent davantage du travail de l'INSEE ou encore de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), des ministères du travail, de la santé et du budget.
La globalisation des données est nécessaire. La dernière enquête portant sur les personnes handicapées mentales date de dix ans et celle sur les structures d'accueil de cinq ans ! Des chiffres récents et actualisés sont indispensables. Les maisons départementales seront bien entendu associées à la collecte des informations.
La Commission adopte l'amendement.
Article additionnel après l'article 59 : Rapport du Gouvernement au Parlement évaluant les effets de la fixation de limites d'âge maximales pour la prise en charge des personnes handicapées
Puis elle examine l'amendement AS 2 du rapporteur pour avis.
Cet amendement prévoit que le Gouvernement remet un rapport au Parlement recensant et évaluant les effets des limites d'âge qui continuent d'être appliquées dans certains établissements, sans d'ailleurs qu'aucune disposition législative ni réglementaire ne les impose.
Nous voterons cet amendement, mais je ne peux m'empêcher à mon tour de faire remarquer que les amendements demandant des rapports que nous avons présentés lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale ont tous été refusés.
Je comprends bien que la mission des maisons départementales n'est pas avant tout de recueillir des informations statistiques, mais si ce n'est pas fait là, je vois mal où cela pourrait l'être.
Enfin, il faut prévoir une péréquation au niveau national, car il existe de très fortes disparités entre régions. Le Nord-Pas-de-Calais manque cruellement de places d'accueil, ce qui explique que beaucoup de personnes handicapées de notre région partent en Belgique. Pour adapter efficacement l'offre aux besoins, il faut connaître précisément ces besoins.
Il existe en effet d'importantes disparités régionales, et parfois entre départements au sein d'une même région. Le Nord-Pas-de-Calais est incontestablement sous-doté, quand, dans le même temps, la Belgique est depuis longtemps en pointe dans l'accueil des personnes handicapées, avec des réalisations spécifiques comme le village n° 1 Reine Fabiola. Les maisons départementales seront bien sûr impliquées dans le recueil des données, mais force est de constater qu'elles n'en disposent pas aujourd'hui.
La Commission adopte l'amendement.
Article additionnel après l'article 59 : Convention d'objectifs tendant à favoriser la mise en oeuvre de dispositifs expérimentaux en matière d'accueil des personnes handicapées vieillissantes
Elle est enfin saisie de l'amendement AS 3 du rapporteur pour avis.
Cet amendement tend à favoriser l'expérimentation de solutions adaptées aux besoins du terrain pour l'accueil des personnes handicapées vieillissantes : mutualisation des moyens au niveau local afin de rationaliser les coûts, notamment au profit des établissements ou services d'aide par le travail ; mise au point d'indicateurs sur l'évolution de l'accueil ; possibilité donnée aux départements d'élaborer des schémas départementaux d'organisation des structures d'accueil consacrés simultanément à l'action gérontologique et au handicap.
Nous voterons également cet amendement. Mais les expérimentations que vous appelez de vos voeux ne pourront se faire à moyens constants. Il faudra bien que les établissements ou services d'aide par le travail, notamment, obtiennent des crédits complémentaires pour les mener.
Comment est désormais calculée la participation des familles à la prise en charge en établissement d'accueil pour personnes handicapées – ou pour personnes âgées d'ailleurs –, participation qui ne cesse d'augmenter ?
J'insiste enfin sur la nécessité de tenir compte de la situation des polyhandicapés, trop souvent traités comme des personnes ne présentant qu'un seul handicap, alors qu'ils ont des besoins très spécifiques.
Ces trois excellents amendements visent à améliorer la collecte des informations pour mieux adapter l'offre à la demande dans le cadre d'une gestion prévisionnelle des besoins. Nous avons voté dans le volet médico-social du projet de loi de financement de la sécurité sociale le principe d'une collecte d'informations qui devront être transmises à la CNSA. Il faudra s'assurer que toutes ces informations seront bien partagées au niveau national.
Quelle sera la place exacte réservée aux conseils généraux ? Il faut, en effet, veiller à la cohérence des interventions de tous les acteurs.
C'est pourquoi l'amendement précise qu'à titre expérimental, jusqu'au 31 décembre 2011, dans des départements dont la liste est fixée par voie réglementaire, le directeur général de l'ARS, le préfet de département, le président du conseil général et, le cas échéant, les établissements et certains services peuvent conclure des conventions d'objectifs.
Monsieur Gremetz, les polyhandicapés posent en effet un problème spécifique. Le Gouvernement s'est engagé à créer 13 000 places nouvelles en foyer d'accueil médicalisé et en maison d'accueil spécialisée, ce qui n'est pas rien dans un contexte budgétaire contraint.
Madame Carrillon-Couvreur, les expérimentations exigent parfois quelques moyens financiers supplémentaires, mais pas toujours. Deux exemples : l'établissement et service d'aide par le travail du Hainaut dans le Nord a mis en place un dispositif appelé « Étape », qui a consisté simplement à aménager une salle permettant à des travailleurs de l'établissement, ne pouvant pas travailler à temps plein de venir souffler une ou quelques demi-journées par semaine. La salle existait déjà au sein du bâtiment. Il a seulement fallu créer deux postes d'aides médico-psychologiques pour accompagner les personnes handicapées durant ce temps de repos. Ce n'est donc pas tout à fait à moyens constants, mais les moyens supplémentaires nécessaires ne sont pas considérables. Il en va de même lorsqu'on médicalise seulement quelques places dans un foyer de vie. Il n'y a pas à recréer une structure, un bâtiment, une administration.
Puisqu'on parle d'expérimentation, j'insiste sur la nécessité de prendre en compte la diversité des handicaps, congénitaux ou acquis. Aujourd'hui, les personnes cérébro-lésées, que leurs lésions soient consécutives à un accident vasculaire cérébral ou à un traumatisme crânien, ont beaucoup de mal à être prises en charge et accompagnées.
Je suis surpris qu'il faille adopter un amendement pour demander un nouveau rapport sur un sujet qui relève typiquement du rôle de la CNSA. Je me souviens parfaitement que, lors de la mise en place des maisons départementales, il a fallu changer certains logiciels de saisie des données, afin qu'ils soient compatibles avec ceux de la CNSA.
C'est vrai. Mais la diversité et le nombre des interlocuteurs auraient à eux seuls justifié la mise en place des ARS, qui auront un rôle essentiel de coordination tant des besoins que de l'offre de services, dans un secteur en pleine mutation. Nous ne devrions plus retrouver ce genre de difficultés demain.
Selon des représentants de la CNSA que nous avons auditionnés, même celle-ci ne disposerait pas de chiffres.
Dans la bonne vieille tradition française, certaines structures, pour conserver leur pouvoir, gardent leurs informations par-devers elles !
Il n'est pas toujours possible de médicaliser des places dans des foyers en raison des normes, notamment en milieu urbain très contraint. La médiatisation est parfois très difficile et très coûteuse, pouvant engendrer des prix de journée exorbitants. Si l'idée est donc intéressante, sa faisabilité technique n'est pas toujours évidente.
Si le forfait soins que nous avons voté dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 se met en place après expérimentation, cela ne risque-t-il pas d'exclure certaines personnes, notamment polyhandicapées ou intellectuellement déficientes vieillissantes, fortement consommatrices de médicaments ?
Le Centre technique national d'études et de recherche sur les handicaps et les inadaptations (CTNRHI) doit se rapprocher de l'École des hautes études en santé publique. Là encore, il faudra veiller à la convergence des approches et au partage des informations. Pour le reste, je suis tout à fait d'accord avec ce qui a été dit sur la CNSA.
La Commission adopte l'amendement.
Elle procède ensuite à l'examen pour avis, sur le rapport de M. Christophe Sirugue, des crédits de la partie « Solidarité » de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Mon rapport porte sur les crédits des programmes 304 « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », 106 « Actions en faveur des familles vulnérables », 137 « Égalité entre les hommes et les femmes » et 124 « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales ». Après avoir abordé dans une première partie les principales inflexions des crédits concernés, il portera principalement sur les jeunes en très grande exclusion, dans le prolongement du rapport relatif aux crédits de la mission « Travail et emploi » présenté par Bernard Perrut la semaine dernière.
Le présent rapport, même si le recul est encore insuffisant pour porter des jugements définitifs, permet une première approche de la mise en oeuvre du revenu de solidarité active (RSA).
Le premier élément qui mérite d'être souligné tient à la relative fragilité du financement, cela pour deux raisons.
La première est que si le RSA socle repose sur un financement assuré par les conseils généraux, un désaccord demeure entre les départements et le Gouvernement quant à la compensation des coûts. La difficulté des conseils généraux s'accroissant, des interrogations ont trait, en particulier, à l'accompagnement des bénéficiaires.
La seconde raison tient au financement du RSA « chapeau » qui est assuré, pour une part, par une subvention budgétaire de l'État et, pour l'autre part, par une contribution sociale de 1,1 % sur les revenus du capital. Or, s'agissant du rendement de la contribution, ce ne sont pas 1,5 milliard d'euros qui sont attendus mais plutôt 1,2 milliard d'euros, ce qui justifie qu'une subvention budgétaire de l'État beaucoup plus forte que prévu vienne équilibrer le tout.
Le second enseignement de la mise en oeuvre du RSA a trait au rythme de montée en puissance du dispositif. Même si une prestation nouvelle met toujours longtemps à trouver son public, il n'en reste pas moins que face aux 2 millions de bénéficiaires attendus du RSA « chapeau », il n'y avait fin août que 467 000 inscrits, avec un rythme de croissance de 70 000 unités par mois. Les explications sont diverses : complexité des démarches, peu d'attrait pour des RSA « chapeau » faibles, frein provoqué par la référence à la mise en oeuvre des obligations alimentaires dans le formulaire de demande ou, raison peut être plus préoccupante, refus de s'inscrire dans un dispositif trop connoté socialement.
L'examen des crédits permet également un examen des dispositifs en faveur des familles vulnérables, où la ligne consacrée à l'accompagnement des familles connaît une diminution de 6,5 % de ses crédits. Les crédits déconcentrés d'accompagnement des familles sont passés de 25 millions d'euros en 2007 à 12,6 millions d'euros pour 2010, en contradiction avec l'importance des actions d'accompagnement social des couples et des familles.
Par ailleurs, des interrogations se posent quant à la mise en place des maisons des adolescents, puisque le Gouvernement souhaite en doter durant cet exercice tous les départements qui n'en ont pas encore, soit vingt-cinq. Or, l'enveloppe de 2 millions d'euros est inférieure à celle de 2009, fixée à 2,5 millions d'euros pour seulement dix-neuf maisons des adolescents.
Cette réduction des moyens est aussi une réalité pour les crédits plus spécifiquement encore destinés au soutien à la parentalité, notamment en faveur des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents qui subissent une forte baisse : 13,6 millions d'euros en 2008, contre 7,1 en 2009 et 6,1 prévus pour 2010. Il y a, certes, une compensation annoncée par les caisses d'allocations familiales, mais son montant est insuffisant puisque, au total, 500 000 euros manqueront en 2010 par rapport à 2009.
En ce qui concerne l'égalité entre les hommes et les femmes, cette politique voit son faible budget de 29,5 millions d'euros progresser de 1,3 %, ce qui conduit à s'interroger sur la capacité à suivre les préconisations de la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.
Enfin, notons dans le programme qui regroupe les moyens de fonctionnement des administrations sanitaires et sociales l'apparition des crédits destinés aux agences régionales de santé (ARS), pour un montant légèrement supérieur à 260 millions d'euros. Le même programme permet, d'ailleurs, d'identifier les faibles moyens de la Défenseure des enfants, soit 3,18 millions d'euros. La question de sa disparition, alors même qu'il paraît nécessaire de préserver des modes d'intervention tout à fait spécifiques, ne tient donc pas à une raison budgétaire !
En parlant de disparition, je ne faisais que reprendre les propos de la Défenseure des enfants elle-même.
On ne peut en même temps dénoncer l'empilement des structures et refuser leur regroupement pour des raisons de souplesse, de simplification et d'efficacité.
Je comprends bien, sauf que les enfants repèrent plus facilement un défenseur des droits des enfants clairement identifié, dont, en outre, l'action spécifique porte plus sur la médiation que sur l'injonction.
La seconde partie du rapport permet de mettre en lumière la grave situation des jeunes en grande exclusion, dont peu de rapports se font l'écho – ceux que nombre d'associations appellent en conséquence les jeunes « invisibles ».
Je commencerai par citer trois éléments préoccupants : le taux de chômage pour les moins de vingt-cinq ans est passé en un an de 18,7 à 23,9 %, taux à comparer à celui de 9,1 % pour l'ensemble de la population ; un million de jeunes âgés de dix-huit à vingt-quatre ans, soit plus de 20 % d'entre eux, sont considérés comme pauvres ; en quarante ans, enfin, le taux de pauvreté des personnes âgées a été divisé par deux, mais celui des jeunes a doublé.
En période de crise, ces derniers jouent souvent le rôle de variable d'ajustement en termes d'emploi : 25 % des moins de 30 ans en emploi ont des emplois précaires – CDD et postes d'intérim – et le risque d'un basculement très rapide, soit dans une forme d'exclusion, soit dans la pauvreté doit être souligné.
Face à cette situation, les conclusions de la commission de concertation sur la politique de la jeunesse, mise en place par M. Martin Hirsch à la demande du Président de la République, et dont je salue les travaux, ne semblent pas véritablement destinées à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi. En effet, le plan qui en a découlé repose sur la mise en oeuvre de dispositifs déjà existants, l'idée étant d'aller vite. Or, quel bilan peut-on tirer des différentes expériences passées ?
S'agissant du plan de cohésion sociale lancé en 2004 par M. Jean-Louis Borloo, l'objectif de 500 000 apprentis est loin d'avoir été atteint. Concernant les contrats de professionnalisation, on en comptait 195 000 fin 2008 alors que les contrats de qualification, d'orientation et d'adaptation, qu'ils ont pourtant remplacés, étaient 224 000 en 2001. Quant au plan de M. de Villepin en 2005, le dispositif Défense deuxième chance devait prendre en compte 20 000 jeunes par an : en 2008, à peine 3 000 ont bénéficié de cette mesure.
La situation est encore plus préoccupante concernant le premier impact des mesures mises en oeuvre au printemps 2009, fondées sur l'activation de dispositifs classiques : on compte, en août 2009, 15,5 % de jeunes en moins qui bénéficient d'une de ces mesures qu'un an plus tôt. Ces dernières sont, c'est le moins que l'on puisse dire, boudées par les jeunes, et il convient donc de s'interroger sur la qualité et la durée des contrats proposés.
Bien entendu, la situation des jeunes est extrêmement diverse. Si personne ne sous-estime les difficultés rencontrées par les étudiants, ces derniers ont cependant une capacité relativement forte à pouvoir exprimer leurs problèmes. Il en va de même des jeunes dans l'entreprise, par l'intermédiaire des structures syndicales. En revanche, tous ceux qui se trouvent dans la frange invisible et qui sont surreprésentés dans les chiffres de la pauvreté, mais sous-représentés dans les différentes enquêtes, doivent être aidés prioritairement.
Tout le monde s'accorde à dire que le phénomène d'exclusion est multifactoriel, et que l'on ne peut donc qualifier celle-ci à partir d'un seul indicateur. La plupart des acteurs de terrain, que nous avons auditionné, ont cependant insisté sur la rencontre, à l'origine de l'exclusion, de situations de précarité matérielle et de précarité relationnelle.
Concernant la pauvreté matérielle, près de 2,4 millions de mineurs, soit près de 18 % d'entre eux, vivent dans des foyers où le revenu par unité de consommation est inférieur à 60 % du revenu médian. Aujourd'hui, si vous naissez dans une famille en précarité, le risque d'être demain dans la même situation s'est accru, c'est-à-dire que l'ascenseur social ne semble plus fonctionner pour nombre de nos concitoyens.
Pour ce qui est de la pauvreté relationnelle, une enquête lancée par une association auprès de jeunes venant vers elle a montré que la plupart de ces derniers ne pouvaient identifier plus de cinq « personnes ressource » autour d'eux. En outre, les chiffres indiquent que les jeunes les plus marginalisés ont très souvent été l'objet de mesures judiciaires ou administratives de protection auprès, soit de l'aide sociale à l'enfance, soit de la protection judiciaire de la jeunesse.
L'échec scolaire, qui est corrélé à la pauvreté et aux difficultés familiales, constitue un autre facteur d'exclusion ultérieure.
Enfin, les jeunes en situation de grande exclusion, qui combinent généralement pauvreté, situation familiale difficile et échec scolaire, restent mal connus. La question du repérage est donc importante, même s'il convient de faire attention à l'effet de mode que constitue la lutte contre le décrochage scolaire. Il existe déjà dans l'Éducation nationale un dispositif de suivi et de relance des élèves. Avant d'imaginer de nouveaux dispositifs, sans doute faut-il que l'Éducation nationale se penche, pour la part qui est la sienne, sur le problème, sachant que le repérage n'est pas aisé à mettre en oeuvre : le décrochage scolaire est un phénomène progressif, qui ne se manifeste pas forcément dans un premier temps par de l'absentéisme.
Aujourd'hui, le discours ambiant porte sur l'équilibre des droits et des devoirs qu'il faut inscrire dans un contrat. Or, les jeunes en question sont à ce point déstructurés, qu'ils ne sont pas en capacité d'entrer dans une démarche contractuelle. Toutes les associations sans exclusive prônent la démarche d'aller d'abord vers les jeunes, avant de les amener dans des dispositifs contractuels. Les jeunes dont je parle ne sont ni idiots ni ignorants. Simplement, ils ne disposent pas des repères nécessaires pour saisir la main qui leur est tendue.
Au cours des auditions, le message a été fréquemment donné de la nécessité de politiques s'inscrivant dans le temps, sans annonces permanentes de nouvelles mesures. Les accompagnateurs n'arrivent plus eux-mêmes à se repérer dans la jungle des dispositifs et peuvent donc encore moins être à la disposition de ceux qui en ont le plus besoin.
Il convient aussi de s'interroger sur la durée des dispositifs, par exemple du contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), d'un an renouvelable. Personne n'imagine que l'on peut en un an réinsérer des jeunes qui, au contraire, ont besoin d'une perspective beaucoup plus longue.
Par ailleurs, plutôt que de recourir sans arrêt à de nouveaux opérateurs, il conviendrait de renforcer les acteurs existants, notamment l'Éducation nationale et sa mission générale d'insertion (MGI), dont l'objectif est de prévenir les sorties du système scolaire sans diplôme. De même, les missions locales et les permanences d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) pourraient sans doute intégrer davantage le « aller vers ».
Enfin, les écoles de la deuxième chance, qui ont pour objet de proposer, pour neuf mois à un an, une formation à des jeunes sans qualification professionnelle, devraient voir leurs moyens d'accueil renforcés.
La précarité et, en fin de compte, la vie de SDF semble aujourd'hui pour certains jeunes un destin quasi inéluctable. Cette situation, que soulignent les différentes associations, justifie que nous nous mobilisions, afin de donner de la clarté et de la durée aux politiques publiques, en nous appuyant sur celles et ceux qui ont propension à les accompagner. De ce point de vue, le RSA jeunes ne paraît pas, lui non plus, correspondre aux jeunes dont j'ai parlé. Ils sont aujourd'hui « invisibles ». Faisons en sorte qu'ils deviennent visibles et qu'ils aient des perspectives.
On peut se demander si notre système centralisé est le meilleur pour répondre rapidement et de façon adaptée à la situation.
Les jeunes que vous dites invisibles pour nos structures d'accueil, monsieur le rapporteur, sont bien visibles pour nous les élus de terrain. Et s'agissant du problème de l'emploi, il n'est pas totalement nouveau dans notre pays, puisque cela fait vingt ou trente ans que les jeunes rencontrent des difficultés pour entrer sur le marché de l'emploi, contrairement à d'autres pays.
Quant à opposer la multiplication des annonces au besoin de stabilité, si le Gouvernement propose des outils nouveaux c'est parce qu'il n'y a non pas une, mais des jeunesses. Il est normal par conséquent, qu'il souhaite y répondre par des solutions diverses qui, elles-mêmes, doivent évoluer. Bien évidemment, une approche de fond est également nécessaire – vous avez d'ailleurs rendu hommage à la commission mise en place par M. Martin Hirsch –, car on ne peut dissocier le problème de l'emploi de ceux de la formation, de l'orientation, des ressources, de la citoyenneté, du logement ou encore de la santé.
À cet égard, votre analyse pourrait faire penser que le Gouvernement et les parlementaires qui le soutiennent ne sont pas assez attentifs aux jeunes. Pourtant, les crédits en direction de ces derniers sont passés de 3,2 milliards l'année passée à 3,7 milliards aujourd'hui, soit plus 19 % d'augmentation, qu'il s'agisse du CIVIS – dont les moyens sont passés de 55 millions d'euros en 2009 à 135 millions en 2010 –, des missions locales – dont les crédits atteignent 220 millions contre 156 l'an passé –, de la prime à l'embauche de jeunes stagiaires en contrat à durée indéterminée, des dispositifs en faveur des apprentis, des contrats d'accompagnement passerelle, des contrats initiative emploi, ou encore des contrats d'accompagnement formation. Et il en va de même pour les mesures non plus conjoncturelles, mais structurelles, qu'il s'agisse du plan Agir pour la jeunesse ou encore de l'orientation.
En tout état de cause, un effort doit, j'en suis d'accord, être mis en oeuvre pour aller vers les jeunes. À côté des outils mis en place, ces derniers ont droit à une deuxième chance lorsqu'il s'agit de publics précarisés, qui n'ont peut-être pas la volonté d'entrer dans un système contraignant. À cet égard, le RSA ne peut être une mesure d'accompagnement pérenne, c'est-à-dire d'assistanat. Je suis, pour ma part, favorable à des mesures d'accompagnement qui débouchent sur un emploi plutôt qu'à des mesures dans lesquelles les jeunes pourraient se complaire et les considérer comme une fin en soi.
Votre rapport laisserait croire que le maximum n'est pas fait en faveur des jeunes qui sont les plus éloignés de nos structures de la formation et de l'emploi. Ce n'est pas le cas.
Il me semble que, dans notre pays, une préférence implicite existe pour les personnes qui sont déjà en situation d'intégration, fussent-elles en difficulté. En effet, au même titre qu'hier l'on préférait revaloriser la situation de ceux qui avaient un emploi au détriment de celles des chômeurs, aujourd'hui nos politiques tendent plus ou moins à soutenir ceux qui sont déjà dans des circuits d'intégration plutôt que ceux qui sont dans une situation de grande exclusion. De ce point de vue, ni la commission Hirsch ni le Gouvernement ne me semblent avoir proposé des leviers permettant de rompre ce cercle non vertueux, puisque les mesures se concentrent plutôt sur les personnes qui vont vers l'emploi.
La solution tient à la mise en place, d'une part, de dispositifs simplifiés – ne rajoutons pas des dispositifs à l'existant, favorisant l'accès des jeunes au droit commun et, d'autre part, de parcours inscrits dans la durée.
S'agissant du RSA, je tiens à insister sur les difficultés que pose l'insuffisante compensation par l'État. Dans la mesure où celle-ci s'opère sur la base du nombre de Rmistes en 2004, non seulement un décalage existe nécessairement, surtout en période de crise, mais les ressources ainsi sollicitées de la part des conseils généraux ne peuvent plus l'être pour la mise en oeuvre des politiques actives d'insertion et d'accompagnement. C'est là un effet de ciseau, que l'on voit se produire dans de nombreux départements.
Par ailleurs, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, M. Xavier Darcos, a annoncé au cours des débats sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale sa volonté de faire de l'égalité entre les hommes et les femmes l'un des axes forts de son ministère. Le programme correspondant ne me semble pourtant pas en mesure de donner une traduction concrète à cette priorité.
Le Planning familial, enfin, joue un rôle important en direction des femmes, mais aussi des familles et des jeunes. On retrouve là la nécessité d'avoir une politique globale et une action de soutien à la parentalité, si l'on veut être plus efficace à l'égard des jeunes en difficulté. Quelles garanties a-t-on d'un maintien des fonds dont peut disposer le Planning familial ?
Les mesures de la mission sont toutes tournées vers l'emploi. Malheureusement, 28 % des allocataires du RSA socle en restent très éloignés, soit pour des raisons de santé, soit du fait même de vivre dans la rue. Ceux qui ne sont pas en état de repartir vers l'emploi sont ainsi devenus totalement invisibles dans les politiques de lutte contre l'exclusion, d'autant qu'après l'augmentation du nombre de bénéficiaires du RSA socle, qui tend à étrangler les départements, le basculement de l'allocation de parent isolé vers le RSA ne s'est accompagné que d'une compensation partielle.
Sachant par ailleurs que, du fait du préalable idéologique de la majorité selon lequel il ne faut pas maintenir les jeunes dans l'assistanat, le RSA jeunes – dont le financement ne semble d'ailleurs pas prévu – ne sera versé aux moins de vingt-cinq ans qu'à condition d'avoir travaillé 3 600 heures sur les trois années précédentes, son extension ne concernera pas grand monde ! En outre, aucune réponse n'est apportée dans le budget au fait que les jeunes ne peuvent pas toujours accéder à des dispositifs d'hébergement saturés et qu'ils restent donc à la rue, comme c'est le cas en région parisienne.
Par ailleurs, peut-on être assuré que la question des droits connexes est maintenant réglée ? Sur le terrain, des problèmes subsistent.
Il est prévu également, par une mesure fiscale, de donner des avantages, en conséquence du nombre d'enfants, aux familles qui sont soumises à l'impôt de solidarité sur la fortune. Cette mesure n'a coûté que 25 millions d'euros en 2008 et 20 millions en 2009 – il en ira de même pour 2010 –, mais cette somme ne serait-elle pas mieux utilisée en faveur des familles vulnérables ?
S'agissant enfin de l'égalité entre les hommes et les femmes, les crédits du programme correspondant stagnent. On peut craindre encore un long chemin pour les femmes avant toute amélioration en ce domaine !
Si je me félicite du dispositif du RSA qui devient enfin une réalité, même si la montée en charge est longue, je regrette que l'on n'ait pas travaillé sur tous les minima sociaux, en particulier l'allocation de solidarité spécifique (ASS), afin de ne pas diviser les Français entre ceux qui bénéficient du RSA et les autres.
Quant à la compensation des départements, il me paraît normal, à partir du moment où l'on a décentralisé une politique, que les départements s'en saisissent pleinement. S'ils veulent avoir moins de bénéficiaires de RSA à aider, libres à eux de développer une politique d'insertion ! Mais s'ils restreignent les budgets d'insertion active, qu'ils ne s'étonnent pas alors que le stock des bénéficiaires du RSA augmente !
Pour avoir été nommé parlementaire en mission sur le sujet du développement de l'économie sociale et de l'entreprenariat social, je ne peux que regretter le faible montant, seulement 10 millions d'euros, affecté en la matière. J'espère qu'à la fin de la mission, les crédits augmenteront, car il existe selon moi des gisements d'emplois très forts dans l'économie sociale et l'entreprenariat social.
Concernant, selon le rapporteur, l'effort insuffisant des interventions de l'État destinées à accompagner les familles dans leur rôle de parents, qu'il me soit permis de regretter le temps passé en réunion par les partenaires en la matière, ce qui conduit ces derniers à se plaindre de ne pas avoir le temps de travailler et à réclamer en conséquence des moyens supplémentaires ! Mais, la manipulation n'est pas non plus absente en matière de parentalité et, plus généralement, de jeunes…
Je ne suis pas opposé, par ailleurs, à la départementalisation des caisses d'allocations familiales, à condition que l'on conserve l'autonomie des antennes dans les bassins d'emploi, car les situations sont loin d'êtres équivalentes au sein d'un même département.
Il est selon moi incompréhensible que l'Éducation nationale ne soit pas capable de signaler aux organismes chargés de suivre les jeunes en difficulté, ceux qui sont en décrochage scolaire. Certains s'appuient pour justifier cela sur le secret professionnel, mais les dispositifs de réussite éducative, par exemple, comprennent des assistantes sociales à qui l'on peut faire confiance.
S'agissant enfin des parcours, il faut avoir l'emploi comme finalité même si c'est difficile et que cela demande des étapes intermédiaires. Car, si l'on fait croire au jeune qu'au bout du parcours ce ne sera pas l'emploi mais l'assistanat tout au long de sa vie, il ne faudra pas s'étonner si le nombre des gens exclus augmente.
On peut se plaindre, c'est vrai, du morcellement des outils. Il n'en reste pas moins qu'avec les nombreux moyens qui nous ont été donnés et une mobilisation des acteurs locaux, beaucoup peut être fait par des solutions simples.
Par ailleurs, le procès fait à l'État en matière de transfert des dépenses est profondément injuste : si le retard de l'État vis-à-vis des dépenses des départements se chiffre à 1,2 milliard d'euros à peu près, ses dotations en faveur des collectivités locales ont, ces sept dernières années, progressé, elles, de 10 milliards d'euros, dont 6,5 milliards de dégrèvements et d'exonérations, qui rendent l'impôt local plus indolore et permettent de l'augmenter !
Après m'être étonnée des propos de Francis Vercamer qui a parlé de manipulation s'agissant des difficultés des familles, je précise, monsieur le président, que ce n'est pas un manque de compensation qui a été dénoncé. Simplement, on ne peut tenir deux raisonnements différents, l'un exonérant l'État du fait d'une situation conjoncturelle, l'autre accablant les collectivités territoriales en raison de leur revendication d'autonomie. Les conséquences de la crise valent pour tout le monde.
S'agissant du décrochage scolaire, je souhaite appeler l'attention sur le problème de la proximité des places dans les filières techniques et professionnelles. Si le nombre de places, selon les schémas régionaux de formation, répond globalement aux besoins, tout tient à la proximité pour les populations en difficulté. Or, il manque des places dans certains établissements scolaires qui leur sont proches.
Quant aux dispositifs de retour à l'emploi, si vous avez souligné la diversité de l'offre en matière de stages dans les entreprises, vous avez omis de parler de la difficulté à accéder à de tels stages, en dépit d'exonérations de cotisations sociales ou d'autres avantages multiples et variés. Peut-on disposer de données à cet égard ?
Alors qu'en un an, d'août 2008 à août 2009, on décompte une augmentation d'un tiers des jeunes au chômage – et de 50 % si l'on prend les seuls jeunes hommes –, la stabilité des dispositifs se révèle nécessaire. De la même manière, ne peut-on craindre, avec la substitution annoncée aux missions générales d'insertion des plates-formes de lutte contre le décrochage, la reprise à zéro d'un travail déjà effectué ?
S'agissant des jeunes « invisibles », ne faut-il pas réfléchir à des relais qui leur permettent de se faire entendre ? Il existe, en effet, des mesures qui sont sous-utilisées tant de la part des employeurs que des jeunes. Ne faut-il pas s'interroger, par exemple, sur la pertinence du contrat d'autonomie ?
De même, après la chute des contrats aidés passerelle dans le secteur non marchand, il conviendrait de réfléchir à un contrat plus long, comprenant un encouragement à la formation, comme l'a demandé le Conseil d'orientation pour l'emploi, même s'il ne s'agit pas de relancer les emplois jeunes. Pour ma part, je regrette le manque de réponses apportées aux jeunes des quartiers, notamment des zones urbaines sensibles.
Plus généralement on ne fera pas l'économie du débat, qui n'a pas été tranché dans le cadre de la commission Hirsch, sur le choix entre une allocation à tout jeune à dix-huit ans, une généralisation du RSA ou un statut générique du jeune en formation. Je suis, pour ma part, de plus en plus sceptique quant à la multiplication des mesures pour l'emploi en faveur des jeunes, car elles créent des effets pervers dans le mode de raisonnement des employeurs voire des jeunes eux-mêmes. Je demeure, en revanche, persuadé de la nécessité du développement de l'effort de formation, associée si possible à un contrat, aussi bien dans le secteur marchand que dans le secteur non marchand. Les jeunes demandent un accompagnement particulier, notamment ceux qui connaissent la précarité relationnelle.
L'un des mérites du rapport est de montrer le décalage qui existe entre ce qui est affiché et ce qui est effectivement réalisé. Si les outils mis en place n'ont pas eu les résultats escomptés – je pense par exemple aux contrats d'autonomie –, peut-être conviendrait-il de réexaminer, en particulier, le mode d'intervention des missions locales ?
Quant aux missions générales d'insertion de l'Éducation nationale, il faudrait non pas les remplacer par d'autres structures, mais plutôt les ouvrir aux autres acteurs, car elles sont par trop cloisonnées.
On nous parle des jeunes en grande difficulté, en particulier dans les banlieues, alors que dans le même temps on diminue les crédits en faveur des familles vulnérables, des maisons de l'adolescence, du soutien à la parentalité : c'est la raison essentielle pour laquelle nous ne voterons pas ces crédits.
Les faibles moyens du programme « Égalité entre les hommes et les femmes » sont en stagnation, ce qui est loin de montrer une volonté politique d'améliorer la situation dans une matière où la France vient même d'être rétrogradée dans un classement international : non seulement la différence de salaires entre les hommes et les femmes ne diminue pas – alors que M. Xavier Bertrand, alors ministre du travail, avait annoncé en novembre 2007 que cette égalité se ferait en 2010 –, mais la précarité des emplois reste forte pour les femmes, tous éléments qui expliquent que les retraites soient 40 % plus faibles chez ces dernières que chez les hommes.
On ne retrouve pas non plus ce qui pourrait améliorer les carrières des femmes, c'est-à-dire l'accompagnement dans leur vie professionnelle. En France, après la naissance des enfants, les femmes ne retrouvent ni leur emploi ni leur salaire. Une politique d'articulation entre la vie familiale et la vie professionnelle est nécessaire, ce que ne permet pas le budget de 168 113 euros de l'action « Articulation des temps de vie ».
Je ne peux que regretter qu'un ministère aux droits des femmes attitré ne puisse porter cette politique indispensable d'égalité entre les hommes et les femmes et que le nombre de postes du service des droits des femmes et de l'égalité diminue de quatre équivalent temps plein. C'est bien la marque de l'absence d'une volonté politique de lutter pour l'égalité.
J'aurais souhaité que le rapporteur soit un peu plus modéré, voire moins partisan, dans l'élaboration de son rapport.
S'agissant du décrochage scolaire, il existe, au même titre que pour la problématique du retour à l'emploi, des structures qui sont sous-utilisées, à savoir les classes relais au sein des collèges. Les trois que j'ai mises en place en trois ans dans le département du Jura m'ont ainsi permis de m'assurer qu'elles constituaient une réponse individuelle dans le cadre de l'Éducation nationale, et j'aurais aimé retrouver cette référence dans le rapport. En matière d'illettrisme, ce n'est pas après la seconde que l'on récupérera des jeunes, mais entre la sixième et la troisième.
Pour ce qui est de la longueur des dispositifs, il faut être très vigilant, car, à l'exemple des emplois tremplin, le problème se pose du financement dans la durée.
Quant aux écoles de la deuxième chance, quarante-trois sites en France ont accueilli 4 100 jeunes en 2008. Sachant qu'il y a eu 19 % d'abandons en cours de formation, cela fait, pour 2 025 sorties positives, moins de 50 % de réussite. Sans rejeter ce dispositif, qu'est-il prévu pour les jeunes qui n'ont pas connu de sortie positive ?
Un autre dispositif à l'appellation voisine existe, appelé Défense deuxième chance, mais je ne suis pas sûr que le ministère de la défense s'enthousiasme à l'idée de continuer un effort pourtant justifié et adapté à certains jeunes.
(M. Pierre Morange succède à M. Pierre Méhaignerie à la présidence de la Commission).
Pour revenir sur la notion de jeunes « invisibles », je souhaite que l'on fasse attention aux termes employés car, pour ne prendre que l'exemple de ma circonscription, les 62 % de jeunes au chômage sont loin d'être invisibles !
Je regrette, par ailleurs, que le rapport ne fasse pas état du problème du logement des jeunes. Or, sans un toit, un jeune ne peut avoir de travail. On ne peut parler de la jeunesse sans parler de la crise du logement ! Nous avons pour notre part toujours réclamé une allocation autonomie pour la jeunesse.
Quant au RSA et aux droits connexes, la maire UMP de Beauvais elle-même m'a demandé, avec raison, de déposer un amendement, afin que les bénéficiaires du RSA soient, comme les bénéficiaires du RMI avant la réforme, exonérés de taxe d'habitation et de redevance audiovisuelle.
Alors que nous butons tous depuis des années sur la situation des jeunes en grande difficulté, le rapport fait honneur au travail des parlementaires.
À cet égard, je ne peux laisser dire, comme l'un de nos collègues, que certains dispositifs conforteraient les jeunes en grande difficulté dans un avenir d'assistés. Au contraire, il nous faut faire en sorte que tous les dispositifs existants permettent d'apporter les réponses attendues.
Quant à aller vers les jeunes – car les difficultés sont telles que ces derniers ne sont pas toujours en capacité d'entreprendre eux-mêmes des démarches –, il convient de renforcer les dispositifs tels que les missions locales et, en tout cas, de soutenir toutes les associations qui peuvent accompagner les jeunes sur leur lieu d'exclusion.
Le manque de lisibilité des contrats étant réel, ne serait-il pas temps d'arrêter d'inventer des contrats qui ne répondent en fait qu'à une vision théorique des choses, et de toiletter tout l'arsenal d'aide aux jeunes et à l'emploi, afin de repartir sur de nouvelles bases, en mettant surtout en place un véritable système d'évaluation ?
Le déficit d'information que le rapporteur pour avis soulignait dans la première partie de son rapport pourrait justement trouver une réponse dans l'interconnexion des fichiers des 1 700 organismes sociaux qui devrait être opérationnelle pour la fin de l'année, ce qui permettait également une évaluation des différents dispositifs mis en place.
Si le problème de l'emploi n'est pas nouveau, comme l'a souligné Bernard Perrut, la durée pour stabiliser le parcours jusqu'à un emploi à durée indéterminée est aujourd'hui entre sept et dix ans, élément qui contribue également à fragiliser les parcours notamment des plus jeunes.
Personne n'a dit que la finalité n'était pas l'emploi, et je ne comprends pas à cet égard la remarque de Francis Vercamer. La place dans la société est aussi déterminée par l'emploi que l'on occupe. Pour autant, il convient de faire attention à ne pas mettre dans un parcours emploi des jeunes qui ne sont pas en situation d'y faire face, car on enregistrerait alors un triple échec : pour le dispositif, pour le jeune et pour l'employeur. Il faut accepter que, dans le cadre d'un parcours, il y ait un temps d'insertion sociale pour certains.
Pour ce qui est du RSA et des droits connexes, madame Billard, monsieur Gremetz, les choses sont claires : faute de droit automatique à dégrèvement de taxe d'habitation et de redevance audiovisuelle, certains bénéficiaires du RSA ou ex-rmistes ont des frais qu'ils n'avaient pas à supporter auparavant. Certains sont donc perdants.
S'agissant de la diminution de l'attractivité de certains dispositifs, madame Génisson, non seulement les dispositifs ne sont pas attractifs en eux-mêmes car on n'en voit pas véritablement la finalité, mais la problématique des stages se pose à chaque fois cruellement. Alors que l'on a fait un effort d'insertion, on se trouve là encore en situation d'échec.
Quant au financement du RSA jeunes, aucune ligne budgétaire ne lui est affectée. Mais comme les inscriptions budgétaires sont particulièrement élevées dans le cadre du RSA, le Haut commissaire considère qu'il peut financer cette mesure sur les crédits RSA sans prévoir de ligne nouvelle. Faut-il croiser les doigts afin que, pour financer le RSA jeunes, le RSA ne touche pas tous ses bénéficiaires potentiels ? Sans en arriver là, il nous faut en tout état de cause être vigilants.
Concernant les contrats d'autonomie évoqués par Monique Iborra, les chiffres sont clairs : alors qu'un CIVIS coûte 1 000 euros contre 6 000 euros pour un contrat d'autonomie, on compte 19 % de sorties positives à un an pour les CIVIS contre 7 % pour les contrats d'autonomie qui coûtent plus cher ! À l'évidence, c'est un dispositif qui ne fonctionne pas.
Il est vrai, madame Dalloz, que le rapporteur a eu du mal à cacher sa sensibilité, mais c'est là une attitude assez logique – Bernard Perrut la semaine dernière ne nous expliquait-il pas pour sa part que la situation de l'emploi s'améliorait ?
S'agissant de l'illettrisme, des expérimentations intéressantes sont menées, mais il ne s'agit que d'expérimentations. Nous ne disposons pas encore d'éléments suffisamment significatifs pour en apprécier les résultats. J'ajoute que ce phénomène est de plus en plus difficile à identifier depuis la disparition du service militaire pour les garçons.
Pour ce qui est de la question de la durée, peut-être faut-il se demander si les dispositifs ont tous vocation à être pérennisés et si l'on est prêt à accepter que certains le soient, tandis que d'autres serviraient de support à la logique d'insertion ?
Quant aux écoles de la deuxième chance, je vous trouve très sévère : 93 % des entrants n'ont pas le CAP et, alors qu'ils font partie de ceux qui sont dans les situations de plus grande exclusion, 50 % connaissent une sortie positive. Ces écoles de la deuxième chance ont donc une pertinence.
La formulation « jeunes invisibles », monsieur Gremetz, est due aux associations elles-mêmes. Elle ne signifie pas dans leur esprit que ces jeunes n'existent pas, mais qu'aucun outil ne permet d'aller vers eux.
En conclusion, je me réjouis que l'on puisse axer nos travaux sur les jeunes en situation de très grande exclusion. À cet égard, ne faisons pas de confusion entre les jeunes qui sont dans des parcours d'insertion – que Bernard Perrut nous a parfaitement décrits dans son rapport – et ceux qui, pour l'instant, relèvent de rien ou de pas grand-chose. Le problème en l'occurrence ne tient pas seulement aux moyens, mais également aux structures. Comme l'a souligné Jacques Domergue, il est à cet égard nécessaire d'identifier ce qui fonctionne bien avant d'inventer d'autres dispositifs qui viendront encore complexifier la mission qui nous est donnée, cela dans une perspective de retour à l'emploi.
Je rappelle que Christophe Sirugue a exprimé un avis défavorable à l'adoption des crédits de la partie « Solidarité », alors que Paul Jeanneteau a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Handicap et dépendance ».
La Commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
La séance est levée à douze heures quarante.