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Séance en hémicycle du 6 juillet 2010 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat, tendant à l'élimination des armes à sous-munitions (nos 2501, 2641).

La parole est à M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Madame la présidente, monsieur le président de la commission de la défense, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les députés, conçues pour disperser une grande quantité de projectiles explosifs, les armes à sous-munitions ont fait au moins 13 000 victimes dans le monde depuis les années 1970. Chaque année, ce sont environ 125 personnes qui sont touchées par ce fléau, dont la moitié sont, hélas ! des enfants. Et encore ces chiffres, qui ne concernent que les victimes recensées, sont-ils probablement bien inférieurs à la réalité.

Les armes à sous-munitions constituent donc une grave menace humanitaire. Une menace sournoise et durable, car elles laissent sur le terrain une part significative de sous-munitions non explosées. Une menace particulièrement lâche, qui frappe avant tout les populations civiles, et notamment, je l'ai dit, les enfants.

La France a toujours été aux avant-postes dans la lutte contre ce fléau.

Sur le plan opérationnel, d'abord, puisque nous avons cessé d'utiliser les armes à sous-munitions dès 1991 et d'en produire dès 2002.

Sur le plan juridique ensuite, puisque notre pays a pris toute sa part à l'élaboration de la convention d'Oslo, qui entrera en vigueur au plan international le 1er août prochain.

Cette convention, nous l'avons signée le 3 décembre 2008 et ratifiée le 25 septembre 2009. Surtout, nous en avons largement anticipé l'entrée en vigueur.

Dès 2008, nous avons décidé le retrait du service opérationnel de 22 000 roquettes M26 à grenades du lance-roquettes multiples et de 13 000 obus de 155 millimètres à grenades.

Dès le 25 novembre dernier, nous avons présenté un projet de loi d'application en conseil des ministres, projet qui a ensuite été enrichi par le Sénat. Ce projet de loi témoigne de notre volonté de respecter rigoureusement les engagements souscrits par la France dans le cadre de la convention d'Oslo.

Il prévoit d'abord l'interdiction en toutes circonstances des armes à sous-munitions, qu'il s'agisse d'emploi, de mise au point, de production, d'acquisition, de stockage, de conservation, de transfert, de fabrication, d'offre, de cession, d'importation, d'exportation ou de commerce.

Cette interdiction s'accompagne de peines lourdes et de délais de prescription allongés dérogatoires du droit commun.

Elle s'accompagne également de la possibilité pour la France de poursuivre l'un de ses ressortissants même si les faits n'ont pas été commis sur le territoire national et même s'ils ne sont pas punis par la législation du pays dans lequel ils ont été commis.

Je sais, madame la rapporteure, que la portée de cette interdiction suscite de votre part des questions. Permettez-moi de vous apporter aujourd'hui quelques éléments de réponse.

Certes, le projet de loi ne prévoit pas expressément l'interdiction formelle du transit ou du financement direct ou indirect d'activités liées aux armes à sous-munitions, car le Gouvernement a été soucieux de reprendre la formulation retenue par la convention d'Oslo.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Je voudrais cependant vous rassurer sur trois points.

Concernant le transit, le Gouvernement considère sans restriction que le champ de l'interdiction tel qu'il est déjà défini s'étend à l'interdiction d'activités commerciales portant sur des armes à sous-munitions, et donc au transit effectué dans ce cadre.

Concernant le financement, il est clair, dans notre esprit, que toute aide financière, directe ou indirecte, en connaissance de cause d'une activité de fabrication ou de commerce d'armes à sous-munitions constituerait une assistance, un encouragement ou une incitation tombant sous le coup de la loi pénale au titre de la complicité ou de la commission des infractions prévues par le présent projet de loi. Si les travaux de suivi de l'application de la loi par la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel, la CNEMA, amenaient à constater une insuffisance de la loi sur ce point, le Gouvernement en tirerait les conclusions qui s'imposent, en proposant au Parlement les modifications législatives nécessaires.

Enfin, concernant le régime d'autorisation des opérations d'intermédiation, un projet de loi a été déposé sur le bureau du Sénat au début de la législature, mais le calendrier parlementaire n'a pas encore permis son inscription à l'ordre du jour.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Le Gouvernement envisage de solliciter cette inscription avant la fin de l'année 2010.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Concernant la promotion de la convention d'Oslo, qui, je le sais, vous tient particulièrement à coeur, le projet de loi ne reprend pas, certes, ni le premier alinéa de l'article 21, qui indique que chaque État partie encourage les États non parties à ratifier la convention ou à l'accepter, à l'approuver ou à y adhérer, ni le deuxième alinéa de cet article, qui dispose que chaque État notifie aux États non parties ses obligations, promeut les normes qu'établit la convention et met tout en oeuvre pour décourager les États non parties d'utiliser des armes à sous-munitions. Mais, là encore, permettez-moi de vous rassurer.

Il n'est pas nécessaire que ces dispositions soient expressément rappelées dans la loi pour être activement mises en oeuvre. Comme le déclarait devant vous Pierre Lellouche, secrétaire d'état chargé des affaires européennes, lors du débat de ratification de la convention le 20 juillet 2009, la France ne saurait cautionner l'utilisation des armes à sous-munitions. Dans l'hypothèse d'une participation de militaires français à une opération conjointe aux côtés d'un État non partie, notre pays fera une déclaration politique au plus haut niveau incitant cet État à ratifier au plus vite ladite convention.

La France mène d'ailleurs une action déterminée pour convaincre les États non parties à la convention d'Oslo à y adhérer.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Cette action se concentre aujourd'hui sur les États non signataires susceptibles d'adhérer à la convention dans un avenir proche, afin notamment que soit représenté le plus grand nombre d'États possible lors de la première conférence des États parties, à Vientiane, du 8 au 12 novembre 2010.

La France a donc engagé de nombreuses démarches en vue de l'universalisation de la convention, à titre bilatéral auprès d'États signataires proches de la ratification – le Burkina Faso, qui a depuis ratifié, le Liban, le Sénégal, le Togo – ou d'États non signataires – les Seychelles, qui ont depuis signé et ratifié, la Mauritanie, qui a signé, Andorre, Djibouti, le Gabon, l'Île Maurice. Mais la France travaille également avec Handicap International – au Cambodge, au Vietnam, en Jordanie, bientôt en Serbie et au Maroc.

S'agissant des grands États non signataires, la France ne manquera pas de rappeler, dans ses contacts avec ces États, l'importance qu'elle attache à la convention d'Oslo et au fait qu'elle se doit d'être universelle.

Le texte prévoit également la destruction par les armées de leur stock d'armes à sous-munitions dès que possible, dans un délai de huit ans à compter de l'entrée en vigueur de la convention. Je rappelle que cette destruction concerne 22 000 roquettes et 13 000 obus à grenades, qui sont actuellement stockés sur des sites de la direction centrale du matériel : dans l'Est de la France, à Neubourg et Mazières-les-Verdun, pour les roquettes M26 ; à Salbris, Miramas, Brienne et Le Rozelier pour les OGR.

Cette destruction sera entièrement financée par le ministère de la défense, sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces » de la mission « Défense », pour un coût estimé entre 30 et 35 millions d'euros.

Notre objectif est d'achever ce processus de destruction en 2016. Pour cela, il nous faudra d'abord vaincre des difficultés techniques.

La destruction des obus à grenades, estimée à 900 000 euros hors taxes, est une opération que l'armée sait réaliser.

En revanche, la destruction des roquettes M26 est plus complexe, car il faut traiter les explosifs, 644 sous-munitions, et les propulseurs. Cette opération est d'autant plus complexe qu'elle sera, à partir de 2012, soumise à de nouvelles contraintes environnementales liées à la réglementation européenne.

Au-delà de ces difficultés techniques, il nous faudra également surmonter des difficultés industrielles. En effet, les installations existant en Italie et en Allemagne n'ont pas la capacité de détruire l'ensemble du stock des États européens signataires de la convention d'Oslo – je vous rappelle que cela concerne 120 000 roquettes.

Il nous paraît donc indispensable de créer une filière nationale, un troisième pôle européen de destruction des armes à sous-munitions aux côtés de l'Italie et de l'Allemagne. C'est tout le sens de l'étude qui a été confiée à l'état-major des armées.

Selon les premières évaluations de cette étude, cela supposerait notamment de fournir un effort d'investissement de l'ordre de 6 millions d'euros hors taxes pour l'acquisition d'un incinérateur adapté aux futures normes environnementales. Ces investissements pourraient parfaitement être amortis si nos partenaires de l'Union européenne ou de l'OTAN faisaient appel à ces capacités futures.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

C'est pourquoi nous envisageons de confier à une agence de l'OTAN, la NAMSA, l'Agence d'entretien et d'approvisionnement de l'Alliance atlantique, le soin de mettre en place un dispositif de partenariat européen qui serait implanté en France.

Permettez-moi, mesdames et messieurs, pour clore le sujet de la destruction des ASM, de revenir sur trois points.

Le premier, c'est la question de la dépollution, de la destruction des restes d'armes et de l'assistance aux victimes dans les zones sous la juridiction ou le contrôle des États parties, articles 4 et 5 de la convention d'Oslo.

Ces articles n'ont pas été transposés dans le projet de loi, notamment parce qu'aucun territoire sous contrôle ou juridiction de la France n'est affecté par des restes d'armes à sous-munitions. Notre pays n'est donc pas concerné par les obligations formelles de dépollution, de destruction et d'assistance aux victimes dans ces territoires.

Le deuxième point est la question du stock d'armes autorisé. Conformément aux modalités de la convention, le texte autorise en effet la conservation d'un stock d'armes à sous-munitions. Ce stock sera limité aux besoins strictement nécessaires aux activités de formation des démineurs et de mise au point de techniques de détection, d'enlèvement ou de destruction des armes, soit 500 armes à sous-munitions et 400 munitions acquises hors conteneurs.

Le troisième point est la question du suivi des stocks d'armes à sous-munitions. À cet égard, le projet de loi prévoit notamment d'étendre les compétences de la commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel, la CNEMA, au suivi de la loi d'application de la convention d'Oslo.

Le Gouvernement sera particulièrement attentif aux conclusions de cette commission nationale. Il mettra tout en oeuvre pour apporter les modifications réglementaires ou proposer au Parlement les modifications législatives qui se révéleraient nécessaires le cas échéant.

Enfin, le projet de loi réaffirme l'engagement d'assistance de la France à l'égard des pays et des populations affectés par les armes à sous-munitions. Cet engagement se traduit par un certain nombre d'actions. Premièrement, des actions de formation sont menées par la direction de la coopération de sécurité et de défense du ministère des affaires étrangères, à hauteur de plus de un million d'euros par an. Deuxièmement, le ministère des affaires étrangères finance des projets d'ONG françaises, avec le concours de l'Agence française de développement, à hauteur de 2 millions d'euros en 2010. Troisièmement, des actions de déminage sont menées par les armées dans le cadre des opérations extérieures de la France ou des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Enfin, la France contribue financièrement à l'action contre les mines menée par l'ONU et l'UE.

Mesdames et messieurs les députés, déjà signataire de la convention d'Ottawa, la France est fière d'être aujourd'hui au premier rang des grands pays qui s'engagent pour lutter contre les mines antipersonnel. Cette exemplarité, nous sommes déterminés à en faire preuve en matière d'armes à sous-munitions.

En signant la convention d'Oslo, en la ratifiant et en anticipant largement son entrée en vigueur, nous avons pris une longueur d'avance. Avec ce projet de loi, nous avons aujourd'hui l'opportunité de transformer l'essai, de contribuer plus efficacement à la lutte contre ce fléau et de convaincre nos partenaires de nous rejoindre dans ce combat.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Ne nous laissons pas distancer. Ne perdons pas de temps en querelles inutiles. Faisons en sorte que ce projet de loi puisse entrer en vigueur dès que la convention d'Oslo sera elle-même entrée en vigueur au plan international, le 1er août prochain. Soyons au rendez-vous de la modernité et de la responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La parole est à Mme Françoise Hostalier, rapporteure de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Hostalier

Vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'État, la France a eu jusqu'à présent un parcours exemplaire pour contribuer à l'élimination des armes à sous-munitions de la planète, qui sont de véritables fléaux pour les populations, et notamment pour les enfants.

C'est grâce à la décision courageuse de la France, lors de la conférence de Dublin en mai 2008, que la situation avait pu se débloquer et qu'un très large accord avait pu être obtenu sur un texte qui a ensuite été adopté à Oslo le 3 décembre de la même année.

Le Gouvernement français a ensuite tenu parole en demandant à nos postes diplomatiques de sensibiliser les autorités de leur pays à la signature de la convention afin qu'elle puisse entrer en vigueur au plus vite.

Je voudrais également saluer ici le travail très constructif des ONG, notamment Handicap International et Amnesty International, qui ont porté ce dossier à bout de bras aux plus hauts niveaux depuis plusieurs années.

Je souhaite également témoigner de l'esprit et de l'attitude constructifs de toutes les personnes qui ont travaillé en bonne intelligence sur ce dossier. Tout d'abord, vos services, monsieur le secrétaire d'État, qui ont répondu à toutes nos questions au cours de la préparation du rapport et lors des débats en commission. Je sais qu'ils resteront attentifs à la mise en place de la loi que nous allons voter et qu'ils resteront à l'écoute des parlementaires, de la CNEMA et des ONG. Il importe aussi de souligner le haut niveau du débat sur cette question et l'esprit constructif des parlementaires, tous partis confondus, que ce soit au Sénat ou ici à l'Assemblée nationale.

Ce texte, que nous avons tous en mémoire, je n'y reviens donc pas, reprend fidèlement les exigences et les termes de la convention d'Oslo. Il me paraît être un juste équilibre entre le souhaitable et le réalisable.

Certes, quelques points auraient pu être précisés par la loi, nous en avons débattu en commission et vous nous avez donné des garanties qui, pour l'heure, me paraissent suffisantes. Si des insuffisances apparaissaient néanmoins lors du dépôt du rapport annuel de la CNEMA, le Gouvernement s'engage à revenir devant le Parlement pour y remédier.

Je voudrais rappeler rapidement quelques points qui demandent des précisions, sachant qu'un certain nombre de mes collègues vous questionneront sur ces sujets.

Se pose tout d'abord la question du transit, ou du transfert. Seule la mention de transfert figure dans le texte. Si ce mot couvre aussi le transfert des droits, il ne concerne pas de manière directe la notion de transit par le territoire national et notamment de transit étatique. S'agissant du transit commercial, nous avons bien entendu votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Mais le risque n'est pas exclu d'une utilisation de notre espace aérien ou d'une escale technique sur le territoire national d'avions non commerciaux impliqués dans l'usage des armes à sous-munitions. Dans ce cas, nous avons bien entendu que l'État français s'engage à faire tout ce qui sera possible pour l'empêcher, mais nous demandons une garantie supplémentaire.

La question du financement direct ou indirect, qui ne figure pas explicitement dans les interdictions, a également fait l'objet d'interrogations. En commission vous avez clairement répondu que les alinéas 11 et 12 de l'article L. 2344-2, à la troisième page du projet de loi, comprenaient explicitement le financement de toutes les actions interdites, en particulier à travers l'interdiction de la fabrication ou la production. Nous en prenons donc acte.

Nous avons également débattu sur l'usage, dans le texte, du mot « courtage ». C'est pour le moment le terme légal, mais il serait souhaitable de le remplacer par le mot « intermédiation », qui englobe à la fois le courtage proprement dit, mais aussi toutes les actions et les acteurs qui concourent au commerce. Vous vous êtes engagé à ce que le projet de loi relatif au régime d'autorisation des opérations d'intermédiation, présenté au conseil des ministres le 19 juillet 2006 et enregistré le même jour au bureau de l'Assemblée nationale, soit repris dans les meilleurs délais. Nous vous soutiendrons dans cette démarche.

La situation de l'interopérabilité est effectivement très délicate, notamment dans le cadre de l'OTAN, où nous avons des partenaires éminents qui ne sont pas parties à ce traité. Même si j'ai bien entendu l'exposé des difficultés opérationnelles ou diplomatiques, je persiste à vous demander d'être très vigilant sur cette question. Il en va en effet de la crédibilité de la France à respecter ses engagements en matière d'éthique, ainsi que de la sécurité de nos militaires sur le terrain, et ce pour deux raisons : d'une part, si ces armes étaient utilisées avec leur complicité, ils perdraient eux-mêmes une grande part de leur crédibilité dans l'action vis-à-vis des populations – je pense par exemple au théâtre afghan ; d'autre part, leur sécurité serait menacée si ces armes étaient utilisées sur des sites où ils peuvent être exposés directement quand il faudra investir et nettoyer les zones, comme ce fut le cas au Liban en 2006.

Concernant la destruction des stocks, je note avec satisfaction que non seulement la France s'engage à respecter ses obligations, mais que vous avez l'intention d'aller plus vite que l'obligation et de créer une nouvelle filière qui servira aussi à nos partenaires européens. En effet, quinze d'entre eux possèdent des stocks de ces armes. Pour le nombre de sous-munitions à détruire, la France arrive seulement, si je puis dire, en quatrième position après le Royaume Uni, l'Allemagne et les Pays-Bas, mais suivie par l'Autriche et l'Espagne. Ces pays, sauf les Pays-Bas, ont déjà signé et ratifié la convention. Il va donc prochainement y avoir beaucoup de stock à éliminer.

J'ai bien entendu, monsieur le secrétaire d'État, que vous aviez l'intention de solliciter l'OTAN pour créer cette filière française. Si vous avez déjà avancé sur cette question, j'aimerais que vous nous donniez quelques précisions dans cet hémicycle.

D'autres questions ont été posées par des députés qui n'ont pas souhaité déposer d'amendements afin de ne pas retarder le cycle de ce projet de loi, et je les en remercie. Leurs questions demandent néanmoins une explication.

Le mot « un Français », à l'alinéa 53, nous a tous intrigués au niveau de la sémantique. La logique veut qu'un Français soit un individu, et que si l'on souhaite étendre l'expression à toute structure française, cela soit précisé. À cette question, il nous a été répondu que le terme « un Français » englobait bien toutes ces considérations en matière juridique. Nous en prenons acte. Mais nous souhaitons que la CNEMA soit très vigilante dans ce domaine et qu'elle veille à ce que les individus ou les structures françaises soient bien mises sur le même plan concernant les interdictions et sanctions. À défaut, il sera nécessaire de modifier la loi.

En ce qui concerne la précision de l'interdiction de toute recherche sur les ASM, la volonté d'éradiquer totalement les armes à sous-munitions de la planète sous-entend logiquement que toute recherche dans le perfectionnement de ces armes soit interdite. Mais cela nécessite évidemment d'être contrôlé dans la rubrique des interdictions totales et sanctionnables. Là encore, nous faisons confiance à la vigilance de la CNEMA, qui pourra suggérer de modifier la loi s'il s'avérait que cette précision soit utile.

En conclusion, je me réjouis, monsieur le secrétaire d'État, de la volonté du Gouvernement français d'être exemplaire pour l'application de la convention d'Oslo. Vous avez su être à l'écoute des parlementaires et approfondir, en quelques jours, des questions que nous avions abordées lors des débats en commission, telles que celles portant sur la filière de destruction des stocks.

Je sais par ailleurs que le ministère des affaires étrangères s'investit pour sensibiliser, via nos postes diplomatiques, les pays non partie à la convention pour qu'ils la ratifient, et ceux qui sont partie, pour qu'ils l'appliquent.

C'est pourquoi, vu la bonne volonté du Gouvernement et la coopération active de votre ministère, que vous avez fortement rappelée, sachant la poursuite de l'action de vigiles des ONG et la qualité du suivi qui sera assuré par la CNEMA, et afin de montrer l'engagement de la France tout entière pour éradiquer ces armes de la planète mais aussi pour aider les populations qui ont à subir les conséquences de leur usage, je vous invite, mes chers collègues à adopter ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Dans la discussion générale, la parole est à M. Patrick Beaudouin.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

La France a joué un rôle majeur dans l'élaboration de la convention d'Oslo sur les armes à sous-munitions. Elle a été signée le 3 décembre 2008 et, dès septembre 2009, l'Assemblée nationale et le Sénat en avaient autorisé la ratification, ouvrant ainsi la voie à son entrée en vigueur, le 1er août. Avant même cette échéance, nous discutons aujourd'hui des adaptations de notre droit à cette convention.

Le projet de loi qui nous est présenté, introduit dans le code de la défense le principe selon lequel : « la mise au point, la fabrication, la production, l'acquisition, le stockage, la conservation, l'offre, la cession, l'importation, l'exportation, le commerce, le courtage, le transfert, et l'emploi des armes à sous-munitions sont interdits ». Ces interdictions seront assorties de sanctions pénales sévères. Mme la rapporteure a déjà évoqué les ravages causés par les armes à sous-munitions et les lourds problèmes qu'elles posent, tant à nos militaires qu'aux populations civiles. Ils sont d'autant plus graves que, au même titre que les mines antipersonnel, leur dangerosité perdure pendant des années, et que leurs victimes sont le plus souvent des civils, et notamment des enfants. La France, qui n'en utilise plus depuis 1991, en est bien consciente.

La convention d'Oslo nous fait désormais obligation de détruire nos stocks d'ici à huit ans. Le Sénat a amendé le projet de loi pour que cette destruction intervienne « dès que possible », elle pourrait peut-être même intervenir dès 2016. Sont concernés 22 000 roquettes à grenades et 13 000 obus à grenades, soit plus de 15 millions de sous-munitions. La destruction des roquettes M 26 est la plus délicate.

Compte tenu de l'enjeu que représente la fin de vie des équipements militaires, la commission de la défense nationale et des forces armées avait adopté un amendement au projet de loi de programmation militaire, sur l'initiative de ses rapporteurs, Yves Fromion et moi-même, précisant que la France devait disposer d'un tissu industriel adapté à ces déstructurations. Notre collègue Michel Grall a ainsi été chargé de la rédaction d'un rapport d'information sur le sujet.

Monsieur le secrétaire d'État, s'agissant de l'élimination des armes à sous-munitions, j'ai pris acte de vos propos sur la mise en place d'une filière nationale ou même européenne, voire dans le cadre de l'OTAN. Vous venez d'en dessiner le contour, il me semble que sa mise en place devrait être accélérée. Des précisions en ce sens nous seraient utiles.

Avec cette loi, nous nous inscrivons donc dans un mouvement qui vise à bannir l'usage des armes à sous-munitions de tous les théâtres d'opérations. Cependant, parmi les grandes puissances militaires mondiales, beaucoup ne sont pas parties à la convention d'Oslo. C'est le cas, en particulier, des États-Unis, de la Chine ou de la Russie. Huit des vingt-huit États-membres de l'OTAN, six des vingt-sept États-membres de l'Union européenne n'ont pas signé la Convention. Il appartiendra à notre diplomatie de faire oeuvre de persuasion auprès de ces pays. Dans cette attente, la loi définit les conditions dans lesquelles la France pourra avec eux participer à une coopération en matière de défense ou de sécurité ou à une opération militaire multinationale.

Si ce texte constitue un progrès remarquable, un certain nombre de points ont toutefois fait débat au cours de la discussion parlementaire, que ce soit au Sénat ou au sein de notre commission de la défense.

Ainsi, si le transfert des armes à sous-munitions est interdit, leur transit n'est pas mentionné par le projet de loi. Le Gouvernement a jugé que l'interdiction des activités commerciales revenait à interdire les transits effectués dans un cadre marchand, il s'est engagé à ce que tout soit mis en oeuvre pour éviter le transit étatique d'armes à sous-munitions sur notre territoire. Je prends acte avec satisfaction de cet engagement et des précisions qui nous ont été apportées.

La question du financement d'entreprises menant des activités interdites par la convention a également fait débat. M. le secrétaire d'État à la défense a précisé, lors de l'examen du texte en commission, et tout à l'heure à la tribune, que toute aide financière directe ou indirecte apportée à une activité de fabrication ou de commerce d'armes à sous-munitions serait assimilée au « fait d'assister, d'encourager ou d'inciter quiconque » à s'engager dans l'une des activités prohibées, et tomberait donc sous le coup de la loi. Ces précisions sont suffisamment rassurantes pour qu'il ne soit pas, pour l'heure, nécessaire d'amender le texte à ce propos.

Du reste, si la France se veut exemplaire, il ne faudrait pas, pour autant, qu'une interprétation maximaliste de la convention conduise à remettre en cause les partenariats industriels noués par nos entreprises avec des entreprises étrangères, notamment dans le cadre des programmes d'armement réalisés à l'échelon européen.

Sur ces différents points, et sur quelques autres comme la notion d'intermédiation ou la responsabilité des personnes morales, des précisions convaincantes ont d'ores et déjà été apportées par le Gouvernement, et je ne doute pas que celui-ci y travaillera encore après le vote de ce texte et sa mise en application.

La convention d'Oslo entrera en vigueur le 1er août prochain. Le présent projet de loi a déjà été adopté par le Sénat. La commission de la défense n'a pas souhaité amender le texte, équilibré, de la Haute assemblée. En adoptant le texte du Sénat sans le modifier, notre assemblée permettra à la France d'avoir adapté son droit à la convention avant même l'entrée en vigueur de celle-ci. Ce sera un nouvel acte fort de l'engagement de notre pays en faveur du droit international humanitaire. En la matière, la France se veut exemplaire et responsable : bravo ! Voilà pourquoi le groupe UMP votera ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Chambefort

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission de la défense, madame la rapporteure, mes chers collègues, l'examen de ce projet de loi sur l'élimination des armes à sous-munitions est un moment important des travaux de notre assemblée. En effet, il nous est donné, tous ensemble, la possibilité d'oeuvrer en faveur d'une humanité plus juste, et de hisser au plus haut les valeurs universelles de notre République.

La guerre est un phénomène constant dans l'histoire de nos sociétés. Si elle a perdu de sa légitimité au cours du vingtième siècle, il y a moins de cent ans, elle était encore considérée comme légitime. Néanmoins, les hommes ont toujours eu conscience de la nécessité de contenir cette violence. S'il est évident que le principal objectif de la communauté internationale doit être de tenter de prévenir l'éclatement de conflits et de les condamner, quand elle ne parvient pas à régler pacifiquement les différends et qu'un conflit éclate, il faut faire en sorte de réglementer « le droit dans la guerre ». D'autant qu'il faut rappeler que les principales victimes des conflits sont les populations civiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Chambefort

C'est pour tenter de remédier à cette injustice que nous examinons aujourd'hui ce texte, qui s'inscrit dans la même lignée que la loi de 1997 sur l'élimination des armes antipersonnel, adaptant la convention d'Ottawa. Son adoption apportera une pierre nouvelle à l'édifice juridique devant permettre de prémunir les civils des souffrances de la guerre. Nous devons nous féliciter de cette avancée. Sur quelque banc que nous siégions dans cet hémicycle, nous nous apprêtons à défendrons les principes visant à interdire ces armes perfides que sont les bombes à sous munitions.

Je ne veux pas parler ici des questions entourant l'existence même des conflits, mais des règles qui tentent de discipliner les hommes dans leurs actes guerriers. Je fais bien sûr référence au droit international humanitaire. Lorsqu'on évoque ce droit, on pense en premier lieu à la bataille de Solférino et à la décision d'Henri Dunant de créer la Croix-Rouge pour porter assistance aux blessés des champs de bataille, Mais l'enjeu contemporain est au premier chef la protection des principales victimes des conflits : les civils, qui représentent 90 % des blessés ou des tués.

Des règles existent pour protéger ces populations, leurs origines sont très anciennes. Les premières traces de l'élaboration d'un droit dans la guerre sont présentes dans l'antiquité. Deux siècles avant notre ère, en Inde, les lois de Manou interdisaient déjà l'utilisation des armes « perfides », et préconisaient une distinction entre les objectifs civils et militaires. Malgré cela, des siècles plus tard, nos civilisations tentent toujours de rendre la guerre moins inhumaine. Pour preuve, nous pouvons évoquer la Guerre de Cent ans. À cette occasion, comme le montre Fernand Braudel dans L'identité de la France, quinze siècles après les lois de Manou, la population française a été divisée par deux à l'issue d'un conflit qui a ramené le royaume à sa démographie du IXe siècle. La démonstration est claire, ce sont les populations civiles qui payent le plus lourd tribut des combats.

Aujourd'hui, les bombes à sous-munitions contribuent aussi aux dommages indirects qui peuvent miner la reconstruction et le développement d'une région. Elles retardent le retour à la paix. En ratifiant la convention d'Oslo, les signataires affichent d'abord leur désir de protéger les populations civiles des atrocités de la guerre. Selon l'organisation non gouvernementale Handicap international, 98 % des victimes des bombes à sous-munitions sont des civils, et 27 à 47 % d'entre elles sont des enfants. Suivant l'état des munitions utilisées, 5 à 40 % n'explosent pas à l'impact, se transformant, de fait, en mines antipersonnel. Ces armes ne font donc pas de différence entre les combattants et les populations civiles. Elles ont un caractère « non-discriminant ». Chaque jour, en Irak, au Liban, au Kosovo ou bien en Afghanistan, dans les pays dont les sols sont contaminés, des civils risquent leur vie. 60 % des accidents liés aux bombes à sous-munitions ont lieu lors des activités liées à la subsistance des populations. Les gestes du quotidien les mettent en danger car chaque pas peut s'avérer mortel. Lors de la guerre qui a opposé Israël et le Hezbollah, en 2006, dans le Sud-Liban, l'ONU a estimé qu'un million de bombes avaient été larguées sur cette région.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Chambefort

Environ 40 % n'auraient pas explosé à l'impact.

Outre les dangers physiques que ces armes représentent pour les civils, la pollution des sols retarde également le retour à l'économie de paix. Les travaux de reconstruction sont plus périlleux, de même que l'exploitation des surfaces agricoles. Or, c'est lorsqu'un conflit touche durablement les populations civiles qu'il se fait le plus violent. En s'appliquant à lui-même l'interdiction de ces armes, notre pays affirme que ces bombes sont à la fois moralement inacceptables mais également illicites.

J'appelle votre attention sur ce qui, selon moi, constitue le véritable enjeu de ce projet de loi. Nous devons nous féliciter de l'engagement de la France dans la lutte contre les bombes à sous-munitions qui se concrétise aujourd'hui. Cependant, comme vous le savez, la portée générale de ce texte est moins certaine. En effet, la convention d'Oslo n'est malheureusement pas d'application universelle.

Malgré les appels de multiples associations, de nombreux États, et non des moindres, refusent toujours de prendre part à ce texte. Par la ratification de cette convention internationale, la France adopte volontairement une loi contraignante à son propre égard. Nous pouvons être fiers de notre bonne volonté, mais cet engagement ne prendra vraiment de sens que dans la mesure où nous parviendrons à faire admettre aux États réfractaires que leur position n'est pas tenable.

Nous avons évoqué lors de nos travaux en commission la question de l'interopérabilité. En effet, que doivent faire les pays signataires impliqués dans une intervention multinationale où d'autres forces non parties à la convention pourraient employer des armes à sous-munitions ? Le texte international prévoit que « chaque État partie encourage les États non parties à la présente convention à la ratifier, l'accepter, l'approuver ou y adhérer, dans le but de susciter la participation de tous les États à la présente convention ». Ce travail doit se faire dès à présent, avant même que la question de la participation à une opération aux côtés d'un État non-signataire se pose.

Monsieur le ministre, pouvez-nous nous éclairer sur les actions que vous entreprendrez pour faire évoluer la position des pays refusant toujours de prendre part à la convention ? Quant à eux, les parlementaires resteront vigilants quant à la progression des ratifications. Parce que votre projet de loi est porteur d'espoir, les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche le voteront. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC ainsi que sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, cher président de la commission de la défense, madame la rapporteure, mes chers collègues, avec ce projet de loi tendant à l'élimination des armes à sous-munitions, nous arrivons au terme d'un long processus législatif, qui marque une importante avancée du droit humanitaire international et de la protection des populations civiles.

Ce texte s'inspire de la convention d'Oslo du 3 décembre 2008, signée par 106 pays et ratifiée par 36 États. Il convient toutefois de noter que les États-Unis, la Russie, la Chine, l'Inde, le Pakistan ou Israël n'en sont pas signataires. On peut le regretter et espérer qu'un effet d'entraînement poussera ces pays à nous rejoindre dans la voie du désarmement. Alors que 90 % du stock mondial d'armes à sous-munitions est détenu par des États non signataires, chacun doit prendre ses responsabilités.

Au-delà des clivages politiques classiques, nous devons nous féliciter que la France ait été l'un des pays à l'origine de la signature de la convention d'Oslo et qu'elle ait été l'un des premiers pays à ratifier ce texte en adoptant la loi du 21 septembre 2009.

Il faut aussi se réjouir de ne pas avoir attendu qu'un texte contraignant soit écrit pour cesser d'utiliser et de produire ce type d'armes. Quant aux armes restantes, actuellement stockées, elles sont pour la plupart dans l'attente de leur destruction, conformément aux prescriptions de la convention d'Oslo.

Cette convention prévoit que ses prescriptions soient adaptées dans le droit national de chaque État partie. La probable transcription unanime de la convention en droit national, en particulier dans ses dispositions pénales, sera un signe de la volonté française de mettre fin aux drames causés par les armes à sous-munitions.

Je rappelle que ces armes entrent dans la catégorie des systèmes dits « à effet de zone », également appelés « armes de saturation ». Elles sont conçues pour disperser, sur une large surface, une grande quantité de projectiles explosifs, de manière à renforcer la probabilité de détruire l'objectif visé. Mais ni la fiabilité ni la précision des armes incriminées par la convention ne sont reconnues suffisantes pour que les principes du droit humanitaire de proportionnalité et de discrimination soient garantis. En clair, ces armes ont des caractéristiques qui les rendent extrêmement dangereuses. Elles dispersent des sous-munitions explosives sur de vastes étendues et peuvent faire un nombre considérable de victimes, notamment des enfants.

On estime qu'elles ont déjà causé entre 50 000 et 100 000 victimes dans le monde, chiffre qui fait froid dans le dos et qui ne doit pas augmenter. Selon les experts, près de trente-cinq ans après la fin de la guerre du Vietnam, le Laos est toujours le pays le plus concerné par ce fléau : des dizaines de millions de sous-munitions non explosées continuent de faire des ravages au sein de la population. L'armée américaine en a aussi utilisé en Irak et, plus récemment, l'armée israélienne en a fait usage lors des bombardements au Sud-Liban à l'été 2006. « Ce que nous avons fait était fou et monstrueux » avait alors déclaré un gradé israélien. Citant son chef de bataillon, le commandant d'une unité de missiles a affirmé que les forces israéliennes de défense avaient tiré près de 1 800 bombes à sous-munitions contenant au total plus de 1,2 million de petites bombes. « Le conflit de 2006 au Liban a donné lieu à une contamination par sous-munitions jamais vue par le passé. La plupart ont été larguées dans les 72 heures précédant la fin du conflit », indiquait Chris Clark, qui dirige le Centre de coordination des Nations unies pour l'action contre les mines au Liban.

Ainsi que le résume notre rapporteure, ma chère collègue nordiste, Françoise Hostalier, « au-delà des conséquences humanitaires, deux problèmes majeurs se posent : d'une part, ces armes-pièges retardent le retour à la vie normale des populations, retardent la paix entre belligérants et, d'autre part, elles mettent en danger accru les forces militaires françaises ou alliées à l'extérieur ». Il est donc indispensable d'agir pour que l'ensemble des États prennent toutes les mesures nécessaires afin de prévenir et de réprimer ces marchands de mort et de désolation que sont les fabricants d'armes à sous-munitions.

Le présent projet de loi respecte l'esprit et la lettre de la convention. Il témoigne d'une volonté forte de respecter rigoureusement les engagements souscrits par la France. Il prévoit ainsi l'interdiction en toutes circonstances des armes à sous-munitions, qu'il s'agisse d'emploi, de mise au point, de production, d'acquisition, de stockage, de conservation, de transfert, de fabrication, d'offre, de cession, d'importation, d'exportation ou de commerce. Cette interdiction s'accompagne de peines lourdes et de délais de prescription allongés, dérogatoires au droit commun. Comme nous l'ont garanti M. Falco, devant la commission de la défense, et M. Morin, au Sénat, le texte permet à la France de poursuivre l'un de ses ressortissants, personne physique ou morale, même si les faits n'ont pas été commis sur le territoire national et s'ils ne sont pas punis par la législation du pays dans lequel ils ont été commis.

Il est très important – nous en avons longuement discuté – que les personnes morales soient concernées par le vocable « un Français » utilisé dans le texte. L'adoption d'éventuels amendements rédactionnels de précision présenterait, à mon sens, l'inconvénient de retarder l'adoption définitive du projet de loi. Or, si celui-ci est adopté conforme au Sénat, notre pays aura adapté la convention en droit français avant son entrée en vigueur au plan international, le 1er août prochain. On peut ainsi espérer que cette adoption sera de nature à inciter d'autres États à signer la convention, dont la portée humanitaire est réelle, et, surtout, se réjouir, dans l'immédiat, de la détermination de la France en matière d'interdiction des armes à sous-munitions.

Toutefois, ce texte n'est qu'un début ; le combat pour l'application correcte du texte commence. Si jamais les travaux de suivi de l'application de la loi, notamment par la Commission nationale d'élimination des mines antipersonnel, amenaient à constater une insuffisance sur la question de la répression de l'assistance et du financement des armes à sous-munitions ou de l'assistance aux victimes, il nous reviendrait d'améliorer encore la législation. Nous n'en sommes pas là, mais c'est le devoir de sauver des vies qui nous guide.

La France se doit de promulguer la loi dans les meilleurs délais, pour des raisons humanitaires, pour la sécurité de nos soldats et pour l'image de notre pays. Dans la lignée du vote favorable que le groupe GDR a émis lors de la ratification de la convention d'Oslo, en juillet 2009, nous voterons bien entendu en faveur de ce texte d'adaptation de notre droit aux engagements de la convention.

Je conclus en saluant la qualité du travail des organisations non gouvernementales, telles que Handicap international, la Croix-Rouge ou encore Amnesty International. Poursuivons ensemble nos efforts pour débarrasser le monde du fléau que sont les armes à sous-munitions ! (Applaudissements.)

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, je souhaite dire, en préambule, combien nous pouvons être fiers du chemin parcouru par la France, tant dans le cadre du processus d'Ottawa contre les mines antipersonnel que dans celui du processus d'Oslo sur l'interdiction des bombes à sous-munitions.

Avec la signature, en 1997, et la ratification du traité d'Ottawa, la communauté internationale a adressé un signal fort en matière de lutte contre les mines antipersonnel. Avec la convention d'Oslo, ce sont les bombes à sous-munitions qui sont mises à l'index. Dix ans plus tard, nous pouvons ainsi constater une réelle continuité, du moins une correspondance certaine, entre deux démarches qui visent à éliminer des armes particulièrement lâches, les plus lâches qui puissent exister en ce qu'elles visent indistinctement militaires et civils, qu'elles tuent ou mutilent aveuglément bien après la fin des conflits armés.

La lutte contre les mines a pris – et c'est heureux – une dimension planétaire, avec l'appui des sociétés civiles. Citons pour mémoire, l'impact de courts-métrages tels que La Forêt, réalisé en 1997 par Mathieu Kassovitz pour Handicap International. Cette dizaine de films ont su attirer l'attention de l'opinion publique sur les ravages causés dans le monde par les mines antipersonnel utilisées, voire banalisées, au gré des conflits armés qui ont secoué ces dernières décennies des pays du Sud, du Cambodge à l'Angola en passant par le Soudan. Je n'omettrai pas de citer également l'exemple du Sud-Liban, où l'offensive de l'armée israélienne de 2006, lors de laquelle des bombes à sous-munitions ont été largement dispersées sur les territoires habités, produit aujourd'hui encore ses effets tragiques sur une population civile qui côtoie au quotidien, et souvent sans le savoir, le danger que représente le risque d'explosion de ces armes disséminées, car ce sont bien des armes.

Ainsi que l'a parfaitement décrit notre rapporteure – notre collègue et amie Françoise Hostalier –, qui s'est fortement impliquée dans ce dossier et n'a pas ménagé ses efforts – vous me permettrez, d'ailleurs, de saluer son excellent rapport –, nous avons assisté à une véritable « contamination » de la planète par les mines et fragments d'armes à sous-munitions. C'est donc à l'honneur de notre pays que d'avoir pris la mesure de l'enjeu humanitaire que représente la lutte contre ce fléau mondial. Qu'il me soit permis de souligner la part déterminante prise par M. le ministre des affaires étrangères et son collègue, M. le ministre de la défense, ainsi que par le secrétaire d'État à la défense et M. Falco, dans la conclusion et la mise en oeuvre de la convention d'Oslo sur l'élimination des armes à sous-munitions. Par leur inlassable engagement, les ONG – qu'il nous faut saluer et au premier rang desquelles figurent le Comité international de la Croix-Rouge, Handicap international, ICBL et Amnesty international – n'ont eu de cesse de sensibiliser et de mobiliser l'opinion, d'abord contre les mines antipersonnel, puis contre ces armes terribles que sont les armes à sous-munitions.

Leur engagement est récompensé par le dépôt, la discussion et l'adoption du projet de loi qui nous rassemble aujourd'hui. Pour nous, le moment est venu de dire qu'il faut bannir ces armes. Rappelons que la France figure parmi les tout premiers États signataires à avoir signé et ratifié ce texte, en septembre 2009. Ayant eu le privilège d'être, au nom de notre commission des affaires étrangères, rapporteur du projet de loi qui en autorisait la ratification, j'avais émis le voeu que puisse être mise en oeuvre le plus rapidement possible la convention d'Oslo. C'est ce que nous nous apprêtons à faire, et je ne peux que m'en réjouir.

Conformément aux stipulations de la convention d'Oslo, celle-ci entrera en vigueur le premier jour du sixième mois après lequel le trentième pays a déposé les instruments de sa ratification auprès du secrétariat général des Nations unies, soit le 1er août 2010. Sans attendre cette date, la France a pris, dès 2008, des mesures visant à retirer du service opérationnel 22 000 roquettes M26 et 13 000 obus de 155 millimètres à grenades, qui sont stockés en attendant d'être détruits ; ce fut une avancée majeure.

Le texte qui nous est soumis aujourd'hui vise à adapter notre droit pénal aux stipulations de la convention d'Oslo. Il s'agit de parachever l'édifice que nous avons commencé à bâtir avec la convention d'Ottawa, en incluant dorénavant dans notre droit interne l'interdiction des armes à sous-munitions.

Profitant de cette discussion générale, j'aimerais ici attirer votre attention sur cinq points.

Premièrement, je note que nos collègues sénateurs ont adopté ce projet de loi à l'unanimité. J'ose espérer – mais, après avoir écouté les orateurs qui m'ont précédé, je n'en doute plus – que nous ferons de même et que nous adopterons ce texte en termes identiques, afin que sa promulgation corresponde à l'entrée en vigueur de la convention d'Oslo. La France démontrerait ainsi à nouveau son rôle pionnier en matière d'interdiction des armes à sous-munitions.

Deuxièmement, le Gouvernement a déposé, au début de la législature, sur le bureau du Sénat, un projet de loi relatif au régime d'autorisation des opérations d'intermédiation dans le domaine des matériels de guerre et assimilés. Il serait souhaitable que l'examen de ce texte figure prochainement à l'ordre du jour de notre assemblée. Monsieur le secrétaire d'État, vous nous avez indiqué qu'en dépit d'un ordre du jour chargé, nous devrions en discuter avant la fin de l'année ; c'est mon souhait le plus sincère.

Troisièmement, en figurant parmi les premiers États qui mettent en oeuvre la convention d'Oslo, la France participe à l'envoi d'un signal fort en direction des États non parties à cette convention, comme la Russie, la Chine, les États-Unis, l'Inde, Israël ou le Pakistan. Ceux-ci sont actuellement au nombre des pays producteurs, exportateurs ou utilisateurs de ce type d'armes, et leur influence directe sur les théâtres d'opérations dans le monde est considérable. Au nom du groupe Nouveau Centre, j'appelle le Gouvernement à poursuivre sans relâche ses efforts pour rallier ces États non seulement à la convention d'Oslo, mais également à la convention d'Ottawa. Par ailleurs, nous souhaitons que les armes à sous-munitions soient absentes des théâtres où la France est engagée aux côtés de pays non parties à la convention. En effet, soyons lucides, l'entrée en vigueur de la convention d'Oslo ne mettra pas fin, hélas ! au fléau des armes à sous-munitions.

Quatrièmement, le dispositif prévoit – et c'est un aspect important – la destruction des armes à sous-munitions par les armées dans un délai de huit ans à compter de l'entrée en vigueur de la convention. Les 22 000 roquettes et les 13 000 obus à grenades retirés du service en 2008 sont concernés, pour un coût estimé à 35 millions d'euros. Au vu du nombre conséquent d'armes à sous-munitions actuellement stockées et qu'il va falloir détruire en France et chez certains de nos partenaires européens, la question de la mise en place d'une filière française de démantèlement se pose. Ainsi que vous l'avez rappelé, monsieur le secrétaire d'État, il existe déjà un pôle de destruction d'armes en Italie et un autre en Allemagne. Il y a sans doute matière à mutualiser nos moyens dans ce domaine, avec nos partenaires et l'OTAN, d'autant que des contraintes environnementales fortes sont exigées. L'état-major des armées a été chargé de mener une étude sur cette option, qui permettrait de réaliser des économies – ce qui est particulièrement important dans la période actuelle – et qui nous conduirait à achever le processus de destruction en 2016, c'est-à-dire deux années avant la date butoir. Je souhaite donc, monsieur le secrétaire d'État, que la représentation nationale soit pleinement informée des conclusions de cette étude sur une filière nationale de destruction.

Enfin, nos collègues sénateurs ont proposé par amendement d'étendre les compétences de la Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel. Je le souhaitais déjà depuis plusieurs années et je ne peux que me féliciter de cet apport, qui permettra à la CNEMA de veiller à la bonne application du présent projet de loi. Un décret doit venir modifier le code de la défense en ce sens. Pour ma part, j'aurais préféré que cela soit inscrit dans la loi elle-même, mais je sais que cela aurait risqué de retarder la procédure d'une année, voire davantage.

Permettez-moi de rappeler les termes de cet amendement, que je n'ai pas déposé pour la raison que je viens d'exposer.

« La Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel assure le suivi :

a) de l'application de la loi tendant à l'élimination des armes à sous-munitions ;

b) de la destruction des restes de sous-munitions explosives situées dans les zones sous la juridiction ou le contrôle de la France, ou contaminées par les armes à sous-munitions de l'armée française ;

c) de l'action internationale de la France en matière d'assistance aux victimes d'armes à sous-munitions et de sous-munitions explosives.

La Commission nationale pour l'élimination des mines antipersonnel publie chaque année un rapport sur l'application de la loi tendant à l'élimination des armes à sous-munitions ; ce rapport est adressé par le Gouvernement au Parlement. »

Nous avons assisté, avec Mme Hostalier, au Quai d'Orsay, à la remise, par le président de la CNEMA à Bernard Kouchner, du rapport sur les mines antipersonnel de l'année 2009.

En tant que membre de la CNEMA, au sein de laquelle je siège depuis sa création – je suis du reste le seul à être dans ce cas –…

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

…je souhaite que soit publié dans les plus brefs délais le décret qui étendra ses missions à la mise en oeuvre de la convention d'Oslo. À ce propos, monsieur le secrétaire d'État, vous m'avez indiqué, il y a deux mois, que les décrets concernant la campagne double allaient être publiés incessamment. Or, ce matin, j'ai reçu une lettre dans laquelle on me demande où en est cette publication. Puisque vous aviez pris un engagement à ce sujet et que vous avez l'habitude de respecter vos engagements, je ne doute pas qu'elle interviendra bientôt.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Vous n'aurez que des bonnes nouvelles !

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

Je vous en remercie, monsieur le secrétaire d'État.

En une dizaine d'années, la CNEMA a largement démontré son efficacité pour identifier les problèmes entourant l'interdiction des mines antipersonnel et sa capacité à proposer des solutions. Je suis sûr qu'avec sa nouvelle compétence, étendue aux armes à sous-munitions, la CNEMA saura honorer au mieux sa mission.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, c'est à la fois avec satisfaction et le sentiment du devoir accompli que le groupe Nouveau Centre aborde le vote de ce texte. L'adaptation de notre droit interne à la convention d'Oslo est en effet une nouvelle étape d'un processus amorcé par notre pays voici une quinzaine d'années, processus qui démontre, une fois encore, son attachement à l'édification d'un véritable droit international intégrant pleinement le droit humanitaire. La France appartient au cercle des nations qui ne s'en remettent pas totalement à la loi du plus fort. Aussi instable que soit notre monde, ce message doit être porté haut et fort.

En adoptant ce texte à l'unanimité, notre assemblée s'inscrira dans le droit fil d'une tradition qui a fait la grandeur de notre nation, qui, comme le disait Clemenceau, a toujours eu l'espoir « d'ouvrir, aux hommes comme aux peuples, toutes les forces de la vie ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les armes à sous-munitions sont un instrument de guerre amplement dénoncé, car violant les règles du droit international humanitaire. Ces armes extrêmement meurtrières touchent particulièrement les civils, dont plus d'un quart d'enfants. J'ai moi-même pu constater, au Cambodge et au Liban, les dégâts qu'elles occasionnent. La France a choisi, conjointement avec de nombreux États et une importante coalition d'organisations internationales, de faire régresser autant que possible ce fléau.

À cette fin, une nouvelle étape, très importante pour le droit humanitaire, a été franchie lors de la signature du traité d'Oslo le 3 décembre 2008, par laquelle la France et 93 autres pays ont renoncé à l'usage et à la commercialisation des ASM. Cette décision est à l'honneur de notre pays. Fière d'être à la tête de cette action, la France a ratifié le traité par la loi du 21 septembre 2009. Elle est donc tenue de transcrire les termes de la convention d'Oslo en droit interne et a pour objectif de le faire, si possible, avant son entrée en vigueur le 1er août.

Cependant, si l'adoption de la présente loi d'adaptation semble urgente, son contenu doit être d'autant plus clair à nos yeux. À cet égard, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, de vous poser un certain nombre de questions. Comme l'ont rappelé plusieurs de nos collègues, l'absence de plusieurs États clés à Oslo – notamment les États-Unis, la Russie ou Israël – soulève la question essentielle des opérations effectuées en interopérabilité avec nos alliés non signataires, par exemple dans le cadre de l'OTAN.

L'article 21 de la Convention dispose que la France doit « mettre tout en oeuvre » pour dissuader les États non signataires d'utiliser les armes à sous-munitions, notamment dans le cadre d'une intervention en interopérabilité. S'il semble difficile de les transcrire juridiquement, ces paragraphes illustrent un aspect majeur de notre lutte contre les ASM, qui mérite de faire l'objet d'actions politiques concrètes.

Le Gouvernement a-t-il prévu des initiatives dynamiques pour tenter de susciter « la participation de tous les États à la Convention » ? Existe-t-il une garantie du fait qu'un État allié ne saurait avoir recours à des ASM dans le cadre d'une opération conjointe avec des forces françaises ? Pour illustrer mon propos, je me permets de suggérer, par exemple, l'inscription de ces débats à l'ordre du jour d'un sommet du G8 – pourquoi pas le prochain, qui aura lieu à Nice ?

De même, un autre engagement du Gouvernement me semble nécessiter une clarification. Il inclut la lutte contre le transit d'ASM sur le territoire français, que ce transit soit commercial ou étatique. Si le transit issu d'un autre État ne peut faire l'objet de sanctions, quelles mesures précises pourraient être prises, outre une déclaration politique, dans une telle éventualité ? Ici encore, le respect de la Convention engage des mesures bien précises.

Par ailleurs, certaines questions soulevées, notamment par les associations mobilisées sur ce sujet, ont été laissées en suspens au cours de l'élaboration du projet ; je souhaite les remettre en exergue. Ainsi, plusieurs organisations ont exprimé, à juste titre, leur inquiétude, peu entendue, concernant les dangers qu'implique la récupération des sous-munitions individuelles trouvées sur le terrain. Celles-ci présentent effectivement des risques d'explosion et une instabilité matérielle non négligeable. Le Gouvernement peut-il expliquer comment il va procéder à ces transports d'ASM ?

L'interdiction des financements directs et indirects d'entreprises fabriquant ou faisant le commerce d'ASM a fait l'objet d'une interprétation satisfaisante. Cependant, je demande au Gouvernement si cette interprétation s'étend également au traité d'Ottawa sur les mines anti-personnel, qui contient la même interdiction d'assistance à toute entreprise de production ou de commercialisation. En effet, il serait intéressant d'avoir une cohérence dans l'interprétation des deux textes.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

La question des financements est prépondérante aux yeux des organisations internationales. Quelles sont les mesures que compte prendre le Gouvernement pour s'assurer que les acteurs financiers français respectent l'interdiction d'investissements dans ces secteurs d'armement – qu'il s'agisse de l'information, du suivi ou du contrôle ?

De surcroît, si le financement indirect a bien été inclus dans le champ de l'interdiction fixé par le texte, une ambiguïté persiste quant à son contrôle. En effet, le ministère de la défense avait lui-même considéré que ce mode de financement était trop difficile à contrôler. Maintient-il cette position, maintenant qu'une sanction est applicable ? Compte-t-il mettre en place des mesures précises de contrôle ; le cas échéant, quelles sont-elles ?

Nous nous sommes souvent interrogés sur l'avenir des partenariats industriels dans le cadre de cette interdiction. Une formulation excluant ce cas précis avait été proposée, mais laissée de côté. Je tiens à exprimer mon regret vis-à-vis de cette omission.

Enfin, vous aviez reconnu la pertinence d'une inscription à l'ordre du jour du projet de loi relatif aux opérations d'intermédiation avant la fin de l'année 2010. L'adoption de cette loi nous permettrait de remplacer la notion de courtage par celle d'intermédiation, plus adaptée, car elle inclut les autres intermédiaires que sont le transporteur et le financier. Vous nous avez apporté un début de réponse tout à l'heure, monsieur le secrétaire d'État, mais le Gouvernement peut-il confirmer qu'il sollicitera en toute urgence cette inscription dans l'intervalle de temps annoncé ?

En conclusion, cela fait des années qu'aux côtés des grandes ONG, je combats l'utilisation des mines antipersonnel et des armes à sous-munitions. C'est pourquoi je suis très satisfait de cette nouvelle avancée dans la lutte contre des armes dont les principales victimes sont les populations civiles. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nauche

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l'utilisation massive des armes à sous-munitions en Asie du Sud-Est, mais aussi au Liban en 2006, leur emploi dans des zones habitées et cultivées, conjugué à leur fort potentiel de dispersion, ont entraîné un nombre très important de victimes, au sein desquelles civils et enfants se comptaient par milliers. L'émotion suscitée fut à la hauteur de l'horreur vécue par les populations. Par ailleurs, l'explosion de ces armes des années après la fin des conflits, en plus de constituer une menace quotidienne intolérable pour les populations, aboutit aussi à interdire la culture des terres dans certaines régions.

Je veux saluer la mobilisation des organisations non gouvernementales internationales, en tête desquelles il faut citer Amnesty International et Handicap International…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nauche

…dont la mobilisation a permis d'accélérer la prise de conscience des gouvernements.

Je saluerai également l'action des différents gouvernements qui se sont succédé depuis 1997. Ils ont assuré la continuité de l'action de la France dans ce domaine. En effet, la convention sur l'interdiction des mines antipersonnel, dite convention d'Ottawa, ratifiée par la France en juillet 1998, a relancé le processus de désarmement pour ce type d'armes. La convention d'Oslo sur les armes à sous-munitions de 2008 poursuit cette oeuvre. Le texte que nous examinons aujourd'hui concerne l'adaptation en droit français des préconisations de cette Convention. À ce titre, nous ne pouvons que nous féliciter de l'initiative du Gouvernement.

Au-delà des effets bénéfiques de cette loi, quelques questions demeurent en suspens. J'en soulignerai trois, auxquelles j'associe ma collègue Françoise Olivier-Coupeau, députée du Morbihan et membre de la commission de la défense et des forces armées de notre assemblée.

La première question porte sur le problème du transit. De fait, le transit étatique ne pose pas vraiment de problème lorsqu'il est de nature aérienne. Mais au regard de la liste des pays ayant ratifié la convention d'Oslo, on peut envisager qu'un transit ait lieu à travers notre pays par voie maritime ou terrestre. Dès lors qu'il n'est pas de nature commerciale, de quelle façon s'applique la loi ?

La deuxième question est liée au retour de la France au sein du commandement intégré de l'OTAN. On peut légitimement s'interroger sur la position de notre pays quant à l'usage des armes à sous-munitions dans l'Alliance, et je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir nous éclairer sur cet aspect des choses.

Enfin, et c'est là ma dernière interrogation, on peut comprendre que les engagements actuels de notre pays avec des pays non signataires de la convention d'Oslo ne puissent être remis en cause. Mais qu'en sera-t-il des engagements futurs de notre pays ? La France ne se prononcerait-elle que sur une demande d'intervention ou d'assistance, ou bien étudierait-elle également les modalités d'intervention ? En d'autres termes, ne s'engagerait-elle qu'à la condition d'exclure tout recours aux armes à sous-munitions ? Sommes-nous prêts à faire de la non-utilisation de ces armes une condition de l'engagement de nos troupes ? Cette question me semble d'autant plus pertinente lorsque l'on examine la liste des pays non signataires, constituée notamment de la Russie, des États-Unis, de la Chine, de l'Inde, du Pakistan et d'Israël, pour ne citer que ceux-là.

Je conclurai en ajoutant que la France a joué un rôle majeur dans l'élaboration de la convention d'Oslo et que je souhaite, bien sûr, qu'elle poursuive son action sur la scène internationale et diplomatique en incitant l'ensemble des pays non signataires – nous savons tous qu'il ne s'agit pas des moindres – à intégrer le processus d'Oslo. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC, ainsi que sur les bancs u groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Mariani

Nous abordons aujourd'hui une question délicate et capitale, car elle concerne les armes à sous-munitions, responsables de souffrances humaines considérables au sein des populations civiles. Cela a été fort bien exposé dans votre rapport d'une grande précision, madame la rapporteure.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Mariani

La dangerosité des ASM, née de leur dysfonctionnement, de leur manque de fiabilité et du fait qu'elles soient incontrôlables, rend leur utilisation intolérable. Conçues à l'origine pour des frappes ponctuelles, ces armes ont été utilisées de façon plus systématique et plus massive depuis les années 1960. Ce fut le cas au Vietnam, au Laos, pendant la première guerre du Golfe, en Irak en 2003, au Sud-Liban en 2006, au Kosovo, en Tchétchénie, pendant le conflit géorgien en 2008, ainsi qu'en Afghanistan.

Il existe, à ce jour, plusieurs milliards de bombes à sous-munitions, stockées dans 70 pays. C'est dire les effets dévastateurs que cela peut engendrer, en particulier auprès des enfants, qui en sont les premières victimes. Ces armes, aux mêmes effets que les mines antipersonnel, causent des accidents entraînant de graves mutilations sur les populations. Une véritable prise de conscience est née dans la communauté internationale et je suis fier que la France ait endossé le rôle de leader dans le processus d'interdiction de ces armes.

En ce moment même se tient l'assemblée parlementaire de l'OSCE à Oslo. La délégation française, présidée par notre collègue Michel Voisin, a toujours figuré au premier rang de cette assemblée dans le combat pour l'interdiction de ces armes – tous partis confondus et unis au sein de la délégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Mariani

La France a pris le problème à bras-le-corps. Le seul cas d'utilisation de ces armes par la France remonte à 1991, lors de la première guerre du Golfe, au cours de missions ponctuelles et dans le strict cadre de ses objectifs militaires. Dès 1996, la France a amorcé le retrait et la destruction de son arsenal de lance-grenades BLG 66, ou système Bélouga. Ainsi, les stocks de bombes d'aviation à sous-munitions ont été détruits entre 1996 et 2002. Par ailleurs, grâce à la loi de programmation militaire 2009-2014, les roquettes M26 équipant les lance-roquettes multiples – LMR – seront supprimées et remplacées par des lance-roquettes unitaires. Les obus d'artillerie à grenades – OGR –, qui comptent chacun 63 sous-munitions, au nombre de 13 000, seront également détruits. En tout, la destruction des LMR et des OGR de l'arsenal français entraîne la destruction de 15 millions de sous-munitions, pour un coût estimé entre 20 et 30 millions d'euros.

Dans la mesure où la France est un des États les plus engagés sur la scène internationale en termes de coopération sur le déminage, elle conservera un stock strictement minimum d'armes à sous-munitions. Cela permettra aux professionnels du déminage participant aux programmes internationaux de déminage conformément aux articles 5 et 6 de la convention de poursuivre leur formation et de maintenir leurs capacités opérationnelles.

L'exemplarité de la France en la matière doit être irréprochable de par son anticipation et l'adaptation de notre arsenal militaire. Vous agissez en ce sens, monsieur le secrétaire d'État.

L'effort à mener au niveau international est encore considérable pour enrayer totalement les armes à sous-munitions, mais nous nous devons d'agir au plus vite sur cette question fondamentale. La tâche est immense pour convaincre tous les États – et non les moindres – non signataires. La France, en raison de son influence politique ainsi que du fait de la compétence et des moyens dont elle dispose, doit se voir confirmer, suivant les cas, un rôle de pilote, de conseil ou d'acteur en la matière.

La ligne suivie par notre pays, au côté d'autres nations, pour accentuer la politique de restriction doit pouvoir contribuer à faire pression, tant dans les négociations que dans l'application des textes, sur les États responsables de la dissémination. Il convient d'ajouter que, tant que ces accords internationaux ne comporteront pas de clauses réalistes et efficaces de vérification et de sanction et n'auront pas de caractère universel, ils risquent, au moins pour une part, de rester lettre morte.

Aussi, étant donné la diversité des acteurs, des points de vue et des intérêts dans le monde, il ne faut pas se cacher que le processus permettant d'améliorer radicalement la situation actuelle sera nécessairement long et complexe et comportera sans doute plusieurs étapes. Ignorer ce cheminement pourrait avoir pour conséquences de tomber dans le piège d'effets d'annonce dont le résultat risque de ne pas toujours être à la hauteur du but recherché. Il peut s'ensuivre à la longue un effet démobilisateur. Une démarche responsable, pragmatique et évolutive doit donc être privilégiée.

C'est pourquoi, je souhaite que le plus grand nombre possible d'États soit en mesure de participer à la première conférence des États parties à la convention d'Oslo qui se tiendra en décembre 2010 au Laos. Je me félicite du vote de ce texte qui fait honneur à la France. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Armand Jung

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, madame la rapporteure, mes chers collègues, de tout temps, les guerriers de tous bords ont rivalisé d'imagination et d'inventivité pour mettre au point et fabriquer les armements les plus meurtriers et les plus lâches.

Sans remonter très loin dans le temps, on peut noter que le XXe siècle s'est distingué par son raffinement mortifère en matière de recherche d'armes pouvant terrasser l'ennemi ou celui qualifié comme tel : des balles dum-dum capables de fracasser le corps humain ou des armes chimiques de la Première Guerre mondiale et du Vietnam jusqu'aux armes nucléaires d'Hiroshima et de Nagasaki.

On nous annonce que les prochaines armes seront « intelligentes » et « discriminantes », comme les armes BONUS ou les drones, déjà largement utilisés, qui permettent d'atteindre des cibles définies et repérées sans faire, prétendument, de dommages collatéraux.

Dans ce contexte, je voudrais, comme d'autres ici, apporter mon soutien à ce projet de loi sur l'élimination des armes à sous-munitions et féliciter les associations, que ce soit Handicap International ou Amnesty International, pour leurs actions et leurs contributions majeures à ce débat. Même si la portée de ce texte est plus morale que juridique, il était de la plus grande symbolique qu'il fasse l'objet d'un examen au Parlement.

Quelques interrogations subsistent, néanmoins. En effet, notre pays ayant réintégré le Haut Commandement de l'OTAN, quelle sera la position de la France sur l'usage des armes à sous-munitions au sein de l'Alliance ? Demain, si nos alliés de l'OTAN décident de créer une zone franche ou une zone tampon entre l'Afghanistan et le Pakistan pour neutraliser tous les points de passage entre ces deux pays, comment la France réagira-t-elle ? S'il est décidé d'arroser des centaines de kilomètres carrés de territoires avec des armes à sous-munitions – et cette hypothèse semble bien envisagée à l'heure actuelle par l'administration américaine –, quelle sera la position de notre pays ?

N'étant pas membre de la commission de la défense, j'ai appris avec effarement, en préparant mon intervention, que l'élimination de notre stock d'armes à sous-munitions s'élèverait à plus de 35 millions d'euros ! Comme quoi, il est plus facile d'inventer une arme ravageuse que de procéder à son élimination ! Comment expliquer cela à nos concitoyens ?

Par ailleurs, il me semblerait judicieux que la construction de l'incinérateur prévu pour la destruction des armes à sous-munitions se fasse au niveau européen, du moins au niveau des États de l'Union européenne ayant signé et ratifié la convention d'Oslo. Mais vous avez fait le choix d'une filière française, et je le regrette. Si même sur un problème aussi consensuel, l'Europe n'est pas capable d'avoir une démarche commune, c'est à désespérer.

Je voudrais également attirer votre attention sur l'impérieuse nécessité d'accentuer les campagnes de déminage, notamment dans les pays qui nous sont historiquement proches. Je pense au Liban et au Cambodge, par exemple, où la dépollution des territoires minés dure depuis plus de quinze ans et n'est pas près de s'achever. Les efforts constants de nos soldats spécialisés ne sont pas suffisants. Notre pays devrait sensibiliser l'ONU et encourager l'action d'ONG qui pourraient se joindre aux interventions des démineurs militaires.

En conclusion, après le débat sur les mines antipersonnel et, aujourd'hui, sur les armes à sous-munitions, je reste persuadé que notre assemblée sera amenée à débattre dans les prochaines années des armes nucléaires, armes non discriminantes par définition, qui peuvent avoir des conséquences dévastatrices pour l'ensemble de la planète.

C'est pourquoi j'invite le Gouvernement à soutenir la démarche du Président des Etats-Unis, qui est prêt à réduire considérablement ses armements nucléaires, à interdire les essais et à limiter la production mondiale de matériaux à usage nucléaire.

Après l'interdiction des mines antipersonnel et des armes à sous-munitions, il serait logique et souhaitable que notre pays adopte une politique similaire à celle, courageuse, menée par Barak Obama, même si les États-Unis n'ont pas encore signés la convention d'Oslo. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Vandewalle

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, madame la rapporteure, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, le présent projet de loi découle de la convention d'Oslo, signée par la France avec 93 autres États en décembre 2008. Elle a joué dans ce processus un rôle moteur qui nous fait honneur. En votant, je l'espère à la quasi-unanimité, ce texte, nous allons permettre à notre pays d'être au rendez-vous de l'entrée en vigueur du traité, le 1er août prochain.

Cette rapidité est à la mesure des enjeux, même si la portée immédiate du traité sera limitée par l'absence d'acteurs majeurs, comme les États-Unis, la Russie ou la Chine. Il faudra gérer ce point délicat, notamment dans le cadre de nos engagements internationaux. Si les armes à sous-munitions peuvent être d'une grande efficacité militaire puisqu'elles permettent parfois d'interdire des zones entières, elles peuvent aussi – et c'est tout le problème – persister bien au-delà des conflits et transformer durablement des territoires en pièges dangereux pour les populations, engendrant d'inutiles et terribles mutilations quand ce n'est pas la mort, car une proportion significative n'explosent pas à l'impact, jusqu'à 30 % selon certaines sources. Ce type d'arme paraît d'autant plus dépassé aujourd'hui que l'on cherche plutôt à réduire les dommages collatéraux grâce à la précision des armes.

Selon l'association Handicap International, qui s'est illustrée, avec la Croix-Rouge, par son combat contre ce type d'armes, les armes à sous-munitions ont fait plus de 13 000 victimes civiles, notamment des enfants.

Monsieur le secrétaire d'État, je voudrais m'attarder sur l'article 3 de la Convention qui dispose que les États devront détruire leurs stocks d'armes à sous-munitions dans un délai de huit ans.

Si les 13 000 obus à grenades de l'arsenal français devraient être détruits sans difficulté apparente, les 22 000 roquettes M26 de notre arsenal sont plus problématiques. Je rappelle que chacune de ces roquettes contient 644 grenades, ce qui fait plus de 14 millions de sous-munitions à traiter. Je ne reviendrai pas sur le coût prévisionnel de ces destructions. Il semble que nous ayons besoin d'acquérir un incinérateur capable de les détruire tout en respectant les normes environnementales.

En effet, en Europe, seules l'Allemagne et l'Italie disposent des installations nécessaires pour éliminer ce type d'arme. La France devrait donc s'équiper d'un dispositif similaire afin de se conformer au délai qu'elle s'est fixé, à savoir 2016.

Cela me conduit, monsieur le secrétaire d'État, à vous poser deux questions.

La première vous semblera peut-être naïve : il me semble que la France devait se doter d'un incinérateur pour détruire, enfin, les munitions chimiques de la Première Guerre mondiale. Cet équipement fonctionne-t-il et pourrait-on l'utiliser pour détruire les sous-munitions ?

Deuxième question, peut-on envisager de les détruire dans le cadre d'une coopération européenne ? Vous le souhaitez, manifestement, mais sous l'égide de la France, ce qui ne me pose aucun problème.

Monsieur le secrétaire d'État, je voterai ce projet de loi, qui est un pas de plus dans l'humanisation des conflits, même s'il reste beaucoup à faire pour généraliser la portée de cette convention. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La discussion générale est close.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Mesdames, messieurs, je tiens tout d'abord à vous remercier tous pour le ton et la qualité de vos interventions, et le sens de la responsabilité dont vous avez fait preuve. Je vais m'efforcer de répondre aux différentes questions que vous avez posées.

Sur le transit étatique, madame la rapporteure, monsieur Pinte, je précise qu'il s'agit du transit d'armes à sous-munitions effectué à bord d'avions gouvernementaux ou de bâtiments appartenant aux armées de pays non signataires de la convention d'Oslo. Les autorités françaises seront particulièrement vigilantes. Nous le savons, l'efficacité du contrôle matériel est limitée juridiquement. Il sera donc beaucoup plus utile de travailler en amont par les voies diplomatiques au plus haut niveau pour informer nos partenaires non signataires et de nos obligations et de nos exigences.

Madame la rapporteure, monsieur Beaudouin, vous êtes également interrogés sur la filière de destruction française. Le Gouvernement tient à la création d'un troisième pôle européen de destruction d'armes à sous-munitions qui serait implanté en France aux côtés du pôle allemand et du pôle italien. Nous étudions une solution de partenariat qui réduirait les coûts de cette opération. Aucune option n'a été arrêtée à ce jour dans le cadre de l'OTAN ou de l'Union européenne. Nous avons cependant la volonté d'inscrire ce projet dans un cadre partenarial. Bien sûr, nous tiendrons le Parlement informé des suites de cette démarche.

Madame la rapporteure, monsieur Rochebloine, en ce qui concerne la substitution de la notion d'intermédiation à celle de courtage, je vous précise que ce dernier terme ne figure pas expressément dans la convention d'Oslo. Il a été ajouté dans le projet de loi, ainsi d'ailleurs que d'autres termes, afin de préciser l'expression : « acquérir de quelque autre manière », utilisée par la convention au sujet de l'interdiction d'acquérir des armes à sous-munitions.

Il a été décidé de reprendre le terme de « courtage », de préférence à celui d'« intermédiation », dans la mesure où la notion est connue en droit français, qu'il s'agisse du courtage en général ou des activités de courtiers spécialisés. D'ailleurs, ce terme est mentionné dans le code civil et dans le code de commerce. Pour sa part, l'intermédiation n'est à ce jour définie que dans le décret no 95-589 du 6 mai 1995, relatif à l'application du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions.

Or, s'agissant d'une incrimination pénale, il est nécessaire que cette définition soit reprise au niveau législatif. Tel est le sens du projet de loi relatif au régime d'autorisation des opérations d'intermédiation et d'achat pour revendre dans le domaine des matériels de guerre et assimilés. Ce projet, porté par le ministre de la défense, dont je salue l'arrivée parmi nous, a été enregistré à la présidence du Sénat le 5 juin 2007 après avoir initialement été déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale en juillet 2006. Le Gouvernement, et en particulier le ministre de la défense, sollicitera, comme je l'ai indiqué, l'inscription de ce projet de loi à l'ordre du jour des travaux du Sénat avant la fin de l'année 2010.

Madame la rapporteure, monsieur Étienne Pinte, vous nous avez interrogés sur l'interopérabilité. Celle-ci, je tiens à le préciser, est très encadrée. Comme je l'ai dit, en cas de participation de militaires français à une opération aux côtés d'États non parties à la Convention, la France fera au plus haut niveau une déclaration politique incitant ces États à ratifier au plus vite la Convention. Elle notifiera également à ces États ses obligations aux termes de la Convention. D'ailleurs, l'article du projet de loi créant un article L. 2344-3 du code de la défense précise les lignes rouges à ne pas franchir et garantit la sécurité juridique de l'engagement de nos militaires.

Monsieur Rochebloine, vous êtes notre dernier représentant à la CNEMA. Je sais que vous y êtes un parlementaire assidu. Le projet de loi prévoit l'élargissement des compétences de la CNEMA, qui interviendra par voie réglementaire. Le Gouvernement prend l'engagement de veiller à ce que le décret d'application soit pris et publié dans un délai de trois mois après la promulgation de la loi.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

J'aurai l'occasion de vous répondre sur la campagne double très prochainement et j'aurai de bonnes nouvelles à vous annoncer.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

Je vous en remercie par avance, monsieur le secrétaire d'État !

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Cher Étienne Pinte, sur la question du financement, je réaffirme que tout financement en connaissance de cause d'activités prohibées par la convention d'Oslo constitue une infraction à la loi pénale, pour autant que l'élément moral ou intentionnel de l'infraction soit suffisamment caractérisé.

Je vous confirme en outre que le Gouvernement sollicitera l'inscription du projet de loi sur l'intermédiation à l'ordre du jour des travaux du Sénat avant la fin 2010.

Par ailleurs, vous avez souligné la question de la dangerosité du transport des armes à sous-munitions et demandé quelles mesures prend le Gouvernement pour sécuriser ce transport. Il convient de souligner que seules les ASM armées sont dangereuses et que ne sont transportées que celles qui sont non armées. Quand les militaires trouvent une arme à sous-munition armée, ils la font exploser et ne la transportent pas. Le plus grand nombre des armes à sous-munitions trouvées sont des stocks non utilisés et donc non armés.

Je crois avoir ainsi fait le tour des questions qui m'ont été posées. Je voudrais remercier encore le ministre de la défense d'avoir porté ce projet de loi. Je vous remercie également, mesdames et messieurs les députés, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, tant pour vos travaux – j'ai pu participer à une partie d'entre eux en commission – que pour la responsabilité dont vous avez fait preuve ce matin pour que la France soit au rendez-vous du 1er août. Je crois qu'une telle attitude honore notre Parlement et notre pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

J'appelle maintenant les articles du projet de loi dans le texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je constate que le vote est acquis à l'unanimité. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Quand Hubert Falco est là, cela change tout ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la reconversion des militaires (nos 2212 rectifié, 2436).

La parole est à M. Hervé Morin, ministre de la défense.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Madame la présidente, monsieur le président de la commission de la défense nationale et des forces armées, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, comme vous le savez, 80 % des militaires n'effectuent pas l'intégralité de leur carrière dans les armées. Je pense notamment à ceux qui servent en vertu d'un contrat. Chaque année, ce sont plus de 33 000 militaires qui quittent l'institution.

Ces carrières courtes, qui sont une spécificité du métier militaire, sont une condition nécessaire pour conserver une armée jeune et opérationnelle. En contrepartie de cette spécificité, la reconversion constitue un droit, qui s'articule traditionnellement autour de deux dispositifs : le premier est l'accès à la fonction publique et le second regroupe toutes les aides au départ, de l'évaluation à l'orientation, jusqu'à la formation professionnelle.

En 2009, nous avons mis en place une agence unique : l'agence de reconversion de la défense. Son action se décline à trois niveaux : national, régional – avec dix pôles de reconversion – et local, avec une cellule de reconversion dans chacune des cinquante et une bases de défense. Elle s'appuie également sur un recours plus important à des intervenants extérieurs.

D'ores et déjà, et en dépit d'un contexte économique difficile, les résultats sont là. Le taux global de reclassement des militaires est aujourd'hui de 69 % : 71 % pour les officiers, 73 % pour les sous-officiers et 50 % pour les militaires du rang, ce qui est moins bon. Ce sont 1 411 militaires qui ont été reclassés dans le cadre des conventions signées avec une vingtaine de grands groupes et des fédérations d'employeurs. En 2008, nous étions à 148 militaires reclassés. Nous continuerons cette action d'anticipation et nous renforcerons la relation directe avec les grands groupes français ayant des besoins en matière de recrutement. Enfin, près de 2 000 militaires ont intégré la fonction publique en 2009, soit une hausse de 54,6 % par rapport à 2008.

Pour autant, un certain nombre de dispositifs complémentaires sont nécessaires, et c'est tout l'objet du projet de loi, qui repose sur trois mesures.

La première concerne l'assouplissement des règles du congé de reconversion pour permettre aux militaires de suivre une formation segmentée dans le temps. Grâce à ce texte, le congé est désormais fractionnable par journées, dans la limite de 120 jours ouvrés cumulés, contre six mois consécutifs au maximum actuellement. Dans le cas d'un congé fractionné, la durée totale est de deux ans. Le projet de loi ouvre aussi le congé de reconversion, dans la limite de vingt jours, aux volontaires ayant moins de quatre ans de services. Pour cette population fortement exposée au chômage, il s'agit d'une avancée importante.

La deuxième mesure consiste dans la création d'une nouvelle position statutaire d'activité : le congé pour création ou reprise d'entreprise, qui est directement inspiré du dispositif existant pour la fonction publique. Ce congé sera d'une durée maximale d'un an, renouvelable une fois, sur demande agréée.

Outre ces deux mesures statutaires, la modernisation de la politique de reconversion des militaires passe par la création du bilan professionnel de carrière, qui a été instauré par voie réglementaire et était très attendu par la communauté militaire. Il instaure en effet un parcours de reconversion plus souple et plus efficace, centré sur l'individu et sur son projet professionnel. Il lui permet ainsi d'être informé tout au long de sa carrière sur ses possibilités d'évolution au sein des armées, mais aussi de réorientation et de départ, et ce dans les meilleures conditions.

Enfin, pour ajuster notre dispositif et affiner ces mesures, nous avons profité de la période relativement longue entre la réunion de la commission et l'examen en séance publique pour vous proposer cinq amendements gouvernementaux qui seront examinés tout à l'heure. Je n'entrerai donc pas maintenant dans le détail de ces dispositions.

Mesdames et messieurs, avant de conclure, permettez-moi de remercier chaleureusement le rapporteur, Daniel Mach, le président Teissier, ainsi que les membres de la commission de la défense de votre assemblée pour leur contribution et leur coopération dans l'examen du projet de loi qui vous est aujourd'hui soumis.

Ce texte permet de compléter les outils de reconversion indispensables à la gestion de nos armées. Il répond aussi aux aspirations des militaires, qui veulent pouvoir s'insérer dans la société civile dans les meilleures conditions possibles une fois leur carrière militaire achevée. Enfin, dans un contexte de réformes sans précédent, qui se traduit notamment par une réduction importante des effectifs, ce projet de loi constitue une condition majeure de la réussite de la modernisation de nos armées. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La parole est à M. Daniel Mach, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

de la commission de la défense nationale et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la reconversion professionnelle est en effet, de façon traditionnelle, une question importante pour les armées. Elle est la condition du renouvellement des troupes et du nécessaire maintien de leur jeunesse.

Le projet de loi qui nous est soumis tend à améliorer le dispositif de reconversion existant. Je souhaiterais dire d'abord quelques mots sur le contexte général dans lequel il s'inscrit avant d'aborder l'ensemble de son contenu.

Les armées disposent depuis longtemps d'un dispositif de reconversion spécifique, qui s'est enrichi au fil du temps. Plusieurs éléments attestent son importance. Sur près de 35 000 militaires quittant les armées chaque année, environ 22 400 peuvent demander à bénéficier de l'ensemble du dispositif de reconversion. Parmi ceux-ci, 15 348 y ont eu effectivement recours en 2009.

Plus de 21 300 prestations d'orientation et d'accompagnement ont été accordées l'an dernier, recouvrant une vingtaine de catégories différentes et 4 218 congés de reconversion.

Près de 700 professionnels du ministère de la défense sont employés à cet effet, et le budget de la reconversion s'est élevé en 2009 à 104,5 millions d'euros.

Les résultats sont effectivement encourageants, monsieur le ministre, puisque le taux global de reclassement a été – vous le rappeliez – de 63 % en 2009 et qu'il atteint 69 % si l'on y ajoute les reclassements dans le secteur public.

Cependant, le dispositif de reconversion est confronté aujourd'hui à quatre défis principaux.

D'abord, le flux de départs des armées tend à augmenter, puisqu'il est passé de 28 728 en 2005 à 34 696 en 2009. Il en va de même pour les ayants droit, qui représentent 65 % des départs. Or, ces flux sont appelés à s'accroître avec la suppression de 54 000 postes prévue d'ici à 2014 par la loi de programmation militaire.

Deuxièmement, les profils des partants varient beaucoup en fonction de l'âge, de la catégorie ou de l'arme.

Il faut aussi compter avec la contrainte budgétaire. La chaîne de reconversion devra répondre à ces attentes tout en poursuivant la réduction programmée de ses effectifs, qui devrait passer de 680 actuellement à 515 d'ici à 2014. Cette exigence est d'autant plus forte que le ministère de la défense doit assumer le coût du chômage des militaires non reconvertis. Or, ce coût, qui s'est élevé à 110 millions d'euros l'an dernier, ne cesse de s'accroître, tandis que le nombre de chômeurs est passé de 8 214 en 2008 à 9 689 en 2009.

Enfin, la crise économique et les rapides évolutions du marché du travail supposent une grande réactivité de la chaîne de reconversion pour permettre une réinsertion rapide, durable et de qualité des militaires dans la vie civile.

C'est précisément pour y répondre que le présent projet de loi aménage et élargit les possibilités actuelles du congé de reconversion, au travers de trois mesures principales.

En premier lieu, l'article 1er tend à modifier le code de la défense pour prévoir que le congé de reconversion ne sera plus de six mois consécutifs, comme aujourd'hui, mais d'une durée maximale de 120 jours ouvrés, pouvant être fractionnée pour répondre aux contraintes de la formation suivie ou de l'accompagnement vers l'emploi. Le congé complémentaire de reconversion reste, quant à lui, d'une durée maximale de six mois consécutifs.

Cette disposition ne change pas le nombre de jours du congé de reconversion, la durée actuelle de six mois correspondant environ à 120 jours ouvrés. Mais elle permet d'étaler ceux-ci sur une période plus longue. Elle présente plusieurs avantages : elle offre plus de souplesse dans l'organisation de la formation ou de la recherche d'emploi ; elle donne davantage de temps aux candidats pour préparer leur reconversion : alors que le cumul du congé actuel de reconversion et du congé complémentaire ne peut excéder un an, les candidats pourront étaler le futur congé de reconversion sur plusieurs années. La seule date butoir est fixée par l'alinéa 11, qui prévoit que l'intéressé est radié des cadres ou rayé des contrôles à titre définitif s'il n'a pas bénéficié de la totalité du congé de reconversion au plus tard deux ans après l'utilisation du quarantième jour de celui-ci. Cette mesure permettra aussi de réaliser plus facilement des formations longues et ouvrira de ce fait davantage de débouchés. Enfin, elle donnera aux intéressés et aux entreprises ou institutions partenaires une plus grande sécurité juridique : la réalisation des stages devrait pouvoir se faire systématiquement dans le cadre des congés de reconversion, et non, comme c'est parfois le cas aujourd'hui, dans celui des permissions.

L'étude d'impact jointe au projet estime que cette mesure devrait entraîner une amélioration du taux de reclassement et une diminution du coût du chômage, mais que ces effets « ne sont pas chiffrables ni même évaluables ». En tout état de cause, le fractionnement du congé imposera une gestion administrative plus lourde, que le ministère entend assumer à moyens administratifs constants.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

C'est précisément pour limiter les charges supplémentaires de gestion qu'il est prévu, dans le projet de décret en Conseil d'État relatif à l'application du projet de loi, de comptabiliser pour moitié les durées d'activité telles que celles des missions opérationnelles ou des congés de maladie dans les deux ans restant à courir après l'utilisation du quarantième jour du congé.

Cette disposition suppose, on le voit, que, selon l'expression employée à plusieurs reprises devant moi par des candidats à la reconversion, les autorités militaires « jouent le jeu », autrement dit qu'elles n'entravent pas les démarches de reconversion des militaires souhaitant quitter les armées, mais les concilient au mieux avec l'intérêt et les nécessités du service.

La deuxième disposition clé du projet de loi, prévue à l'alinéa 6 de l'article 1er, est la création d'un congé de reconversion court pour les volontaires ayant moins de quatre ans de service. D'une durée maximale de vingt jours ouvrés, ce congé fonctionnerait selon les mêmes modalités et dans les mêmes conditions de fractionnement que le congé de reconversion classique.

Il s'agit de faciliter la reconversion des volontaires – pour l'essentiel des gendarmes – qui sont généralement jeunes et peu diplômés, et qui rencontrent, en particulier dans un contexte de crise économique et de chômage, des difficultés d'insertion sur le marché du travail. Cette mesure ne concerne pas les militaires engagés, que le ministère de la défense souhaite fidéliser.

Au total, indépendamment de l'évolution des flux annuels de sortie, 13 000 personnes seraient éligibles à ce nouveau dispositif. Selon le ministère, la charge nouvelle représentée par l'instruction des dossiers devrait incomber aux échelons locaux des armées et ainsi être fractionnée sans nécessiter de moyens supplémentaires.

La troisième mesure principale du projet est l'instauration d'un congé pour création ou reprise d'entreprise, en vue d'accroître les créations et les reprises d'entreprises par des militaires. À cette fin, l'article 2 ajoute une nouvelle position d'activité à celles énumérées à l'article L. 4138-2 du code de la défense, telles que les congés de maladie ou le congé de reconversion.

Le projet définit le régime juridique de ce nouveau congé : il est ouvert, sur demande agréée, au militaire ayant accompli au moins huit ans de services militaires effectifs. Il est précisé que l'interdiction d'exercer à titre professionnel une activité lucrative n'est pas applicable dans ce cas. La durée de ce congé est au maximum d'un an, renouvelable une fois.

La rémunération du militaire durant ce congé est celle correspondant à son grade, comme c'est le cas pour le congé de reconversion. Lorsque ce congé est renouvelé, le militaire perçoit la rémunération de son grade réduite de moitié.

La durée de ce congé compte pour les droits à avancement et les droits à pension, comme pour le congé de reconversion.

S'agissant des conséquences statutaires, le bénéficiaire est radié des cadres ou rayé des contrôles à titre définitif à l'expiration du congé, sauf s'il est mis fin à celui-ci dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Selon les informations communiquées par le Gouvernement, ce texte prévoirait que le militaire ne souhaitant pas être radié ou rayé des contrôles à l'issue du congé doit en faire la demande au moins deux mois avant son expiration. Par ailleurs, le projet de loi précise que le bénéfice d'un congé pour création ou reprise d'entreprise est exclusif de tout congé de reconversion.

Ce nouveau congé, qui devrait être mis en oeuvre à moyens constants, comporte plusieurs avantages : il permettra à un militaire de continuer son activité tout en exerçant celle de chef d'entreprise ; sa durée sera environ deux fois plus longue que celle du congé de reconversion ; enfin, il n'est pas cumulable avec le congé de reconversion, ce qui évitera d'éventuels abus et incitera les candidats à la reconversion à exercer un choix professionnel clair.

Selon l'étude d'impact, ce congé concernerait « au maximum une population d'une vingtaine de militaires par an ». Son coût en année pleine est estimé en conséquence à 2,09 millions d'euros.

Cette évaluation est surprenante. La plupart de mes interlocuteurs ont en effet estimé que le nombre de bénéficiaires potentiels devrait en réalité être nettement plus important, sauf si le ministère décidait de contingenter ceux-ci, indépendamment de la qualité des projets – ce qui me semblerait contraire à l'objectif de reconversion. En effet, on peut penser qu'une grande partie des quelque 200 bénéficiaires du parcours individualisé du créateur ou repreneur d'entreprise, le PIC, pourraient être intéressés par un tel congé. Il serait utile, monsieur le ministre, que vous nous précisiez votre position sur ce point.

En conclusion, les dispositions contenues dans le projet de loi sont dans l'ensemble utiles et devraient permettre de favoriser le processus de reconversion des militaires. Ce projet a d'ailleurs fait l'objet d'un avis globalement favorable du Conseil supérieur de la fonction militaire. La commission de la défense l'a adopté tel quel, moyennant quelques améliorations rédactionnelles et corrections de référence.

Je vous invite donc, mes chers collègues, à l'adopter sans délai. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La parole est à M. Guy Teissier, président de la commission de la défense nationale et des forces armées.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Teissier

nationale et des forces armées. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous l'avez très bien dit : chaque année, en France, plus de 30 000 militaires quittent les armées. Ces hommes et ces femmes ont acquis des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être ; ils constituent donc un vivier exceptionnel de recrutement pour les entreprises, lesquelles représentent un débouché naturel pour les militaires. Relativement jeunes, puisque leur âge moyen est d'environ trente-deux ans, ces militaires sont souvent très motivés ; ils ont acquis un sens des valeurs collectives et du devoir qui font d'eux d'excellents candidats pour les entreprises et pour d'autres entités, à l'exemple des ONG.

Cela étant dit, il nous revient de faire connaître et reconnaître ces compétences ; il nous faut aussi nous assurer de l'adaptation du dispositif de reconversion au marché de l'emploi. Si les qualités personnelles des militaires sont importantes, encore faut-il qu'ils soient orientés vers les emplois pour lesquels ils sont faits et qu'ils disposent de facilités pour se préparer à l'intégration dans une entreprise.

Car cette adéquation des personnes et des emplois, préoccupation première de tous les employeurs, ne va pas de soi. Comme nous le savons tous, le recrutement est loin d'être une science exacte ! L'adaptation des dispositifs de reconversion constitue donc pour nous tous ici une préoccupation majeure.

Le ministère de la défense a mis en place divers dispositifs pour aider ces militaires à s'orienter et à préparer leur retour à la vie civile. Nous avons mis sur pied des dispositifs originaux, comme en témoigne la création récente de Défense Mobilité, agence de la reconversion de la défense. Qu'il me soit permis d'exprimer ma confiance dans cette structure et dans les hommes qui la dirigent et l'animent pour relever les défis qui les attendent.

Notre dispositif me semble intéressant en ce qu'il combine plusieurs actions complémentaires : aide au choix de l'orientation, formation, conseil en techniques de recherche d'emploi, période d'adaptation en entreprise sous statut et rémunération militaires, aide à la création ou à la reprise, sessions d'accompagnement vers l'entreprise.

Comme je l'ai dit, le défi est de grande ampleur : reconvertir – avec succès – 30 000 militaires environ chaque année relève quasiment de la mission impossible. D'une part, certains militaires ne souhaitent pas bénéficier de l'aide qui leur est proposée ; d'autre part, il paraît difficilement envisageable de reclasser la totalité des militaires avec succès chaque année, compte tenu des paramètres personnels complexes qui entrent en jeu et que personne ne peut maîtriser. Le dispositif de reconversion du ministère de la défense permet de reclasser environ deux tiers des militaires. Ce ratio me semble très bon compte tenu de l'ampleur de la tâche ; naturellement, il peut être amélioré, et c'est ce que nous souhaitons.

La reconversion des militaires est un enjeu majeur à plusieurs titres. Comme nous le savons tous, les armées ne recrutent bien que si elles reconvertissent bien ; or des armées aux formats réduits doivent mettre l'accent sur la qualité du recrutement, ce qui passe par un ratio élevé entre candidats et postes offerts : il n'y a aucun doute sur le fait que les possibilités de reconversion comptent parmi les facteurs d'attractivité pour les emplois qu'offrent nos armées.

Ensuite, l'indemnisation du chômage des anciens militaires relève du ministère de la défense. De ce fait, les efforts accomplis pour réduire la charge budgétaire qu'elle représente sont importants, puisque cela représente environ l'équivalent d'un programme d'armement moyen, chaque année.

Les collectivités publiques sont engagées aujourd'hui dans des politiques de rigueur pour maîtriser les déficits publics. Le processus de révision générale des politiques publiques dans lequel nous sommes engagés repose, pour le ministère de la défense, sur une réduction du volume de nos armées de 54 000 hommes. Il va de soi que le volet « défense » de la RGPP ne pourra être appliqué que si la reconversion, qui est devenue pour nous une ardente obligation, est couronnée de succès. Nous savons que cela s'est bien passé l'an dernier ; monsieur le ministre, j'aimerais savoir ce qu'il en est pour l'année en cours.

Dans ces conditions, je ne peux que me féliciter du projet de loi que nous soumet le Gouvernement et qui a été excellemment présenté par notre collègue Daniel Mach. Il comporte deux dispositions essentielles à mes yeux en vue d'adapter les textes au marché actuel.

D'une part, le dispositif est assoupli : il devient possible de fractionner le congé. M. le rapporteur l'a dit et je n'y reviens pas. D'autre part, il devient possible de lancer la création d'une entreprise avant de quitter le service actif, grâce à un aménagement du temps de travail du militaire qui envisage la création d'une entreprise au titre de la reconversion. Le congé pour création d'entreprise constitue une nouvelle position statutaire, qui permettra au militaire de bénéficier d'un emploi à temps partiel pour réaliser son projet. Le ministère devra, je crois, prêter la plus grande attention à ce nouveau dispositif, qui me paraît excellent : c'est une porte ouverte pour nos militaires. Toutefois, il faudra bien vérifier la compatibilité entre le maintien du service et un emploi civil.

Ce mécanisme nouveau marque un effort majeur du ministère de la défense pour assouplir les conditions de reconversion. Or la caractéristique première du militaire est sa disponibilité de service. Pour résoudre la difficulté, peut-être peut-on placer les militaires intéressés sur des emplois non opérationnels.

J'y insiste, la crise doit nous conduire à réfléchir aux moyens d'améliorer notre dispositif de reconversion. En effet, le coût de l'indemnisation des militaires au chômage représente une charge de 90 millions d'euros par an environ. Dès lors, toute piste d'amélioration doit être étudiée. Je pense notamment à l'ouverture européenne des débouchés pour nos militaires.

Dans le contexte actuel, nous sommes confrontés à un besoin accru de formation et, pour une partie de nos militaires en voie de reconversion, à un besoin de mobilité. La force d'une économie performante, c'est la capacité de mobilité de ses acteurs : nos militaires ne doivent pas se limiter aux possibilités offertes par l'économie nationale, mais profiter du mouvement fondamental d'internationalisation de nos économies et de nos entreprises.

En particulier, l'un des piliers essentiel de la construction européenne est la constitution d'un grand marché intérieur avec la libre circulation des travailleurs. Il serait plus que regrettable que nos militaires ne puissent profiter de cette ouverture. Pour les y aider, nous devrons réfléchir aux moyens de formation – connaissance des économies, du cadre juridique, des langues de nos partenaires – à mettre à disposition de nos militaires. Nous devons les inciter à solliciter le bénéfice des dispositions du projet de loi que nous nous apprêtons à voter pour trouver un emploi à l'étranger. La majorité d'entre eux en ont la capacité.

Ce projet est un bon projet, il apporte de bonnes réponses à de vraies questions. Je vous invite à le voter sans réserve. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Dans la discussion générale, la parole est à M. Bernard Cazeneuve.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Monsieur le ministre, la présentation de ce texte me donne l'occasion de poser quelques questions sur la réforme du ministère de la défense que vous avez engagée, alors que le Gouvernement s'apprête à prendre des décisions importantes qui auront des conséquences pour l'équilibre de cette réforme.

Nous n'aurions d'ailleurs certainement pas eu à débattre de ce projet si, dans l'ambitieuse réforme que vous avez lancée, le volet ressources humaines n'avait tenu une telle place, comme l'a rappelé le président Teissier. La réforme repose en effet sur l'idée que nos armées, plus resserrées, mieux équipées, davantage projetables, seront mieux à même d'agir dans le nouveau contexte international dont le livre blanc a dessiné les contours.

Mais supprimer 54 000 postes sur la durée de la loi de programmation militaire n'est pas un exercice facile, et vous le savez bien, monsieur le ministre. Il faut, pour le réussir, que deux conditions soient réunies.

D'abord, il faut que le ministère maîtrise parfaitement la « manoeuvre ressources humaines » de façon à garantir qu'on atteindra l'objectif affiché de suppressions d'emplois ; que ces dernières ne conduisent pas à des pertes de compétences extrêmement préjudiciables pour le ministère et pour l'efficacité de nos armées ; que les objectifs de rationalisation, qui doivent reposer sur un autre équilibre entre le soutien et l'opérationnel, seront bien atteints grâce à la réforme et à la déflation des effectifs qui en est un aspect.

C'est sur les questions que je viens de soulever que j'axerai mon propos.

D'abord, au cours des premières années de la réforme, le nombre d'emplois supprimés a été un peu supérieur à celui que vous escomptiez. Cela s'explique d'ailleurs par le fait que, si les dispositifs d'accompagnement social sont bien mis en place au début de l'application d'une réforme, il se produit un effet d'aubaine qui pousse à partir des gens qui, sinon, ne l'auraient pas fait, et qui souhaitent profiter de ces dispositifs. Je rappelle rapidement ces derniers : l'indemnité de départ volontaire qui concerne les personnels civils du ministère de la défense – ainsi qu'un certain nombre d'autres comme les ouvriers d'État –, le pécule et des aides à la mobilité.

Mais – les excellents collaborateurs, très rigoureux qui vous accompagnent ne me contrediront certainement pas – ces dispositifs d'accompagnement ont été un peu sous-budgétisés en 2009. Qu'en est-il pour 2010 ? Je pense notamment à l'enveloppe destinée à accompagner le départ des ouvriers d'État. Certains, dont le départ avait été accepté, ont été rappelés faute de financement suffisant de la mesure. Vous-même, monsieur le ministre, avez dit à plusieurs reprises devant la commission de la défense que le décalage entre le nombre de pécules que vous aviez inscrits à votre budget et le financement réel n'avait pas permis de donner satisfaction à tous les militaires qui voulaient partir.

Les mesures d'accompagnement social des départs sont donc sous-financées. Et voilà que, pour accélérer ce mouvement, vous nous proposez aujourd'hui une nouvelle mesure, qui n'est pas mauvaise, j'en conviens. Elle repose sur la possibilité pour les militaires qui ont plus de quatre ans d'ancienneté de fractionner leur droit à congé de conversion pour accéder de façon plus souple à des emplois dans le secteur privé sans subir de préjudice de carrière, ce qui est une excellente chose. Pour ceux qui ont moins de quatre ans d'ancienneté, vous ouvrez un droit à congé de formation pour faciliter leur reconversion. Enfin, est institué un droit à congé pour la création d'entreprise.

L'étude d'impact étant un peu silencieuse à ce propos, quel est le financement prévu ? L'intérêt de ce dispositif est de dépenser moins au total puisqu'il y aura moins d'indemnités de chômage à payer pour les militaires qui en profiteront. Mais pour mesurer l'économie réalisée, il faut aussi que vous puissiez nous dire combien coûtera le dispositif. Au vu de la sous-budgétisation des mesures d'accompagnement social que je viens de souligner, on est en droit de se demander si ce nouveau dispositif est correctement financé.

Pour conclure sur les aspects budgétaires et de ressources humaines de ce dispositif, vous êtres trop proche des personnels de votre ministère, monsieur le ministre, et trop au fait de ce qui se passe dans les armées, pour ne pas savoir que, notamment parce que la « manoeuvre RH » n'est pas conduite de façon assez méticuleuse, ces personnels subissent un certain nombre de traumatismes qu'il faut prendre en compte car aucune réforme ne peut se faire contre les personnels. Aussi serait-il bon que vous nous indiquiez comment vous percevez le moral des armées à l'heure où elles subissent une réforme d'une ampleur sans précédent.

Pour que votre réforme réussisse, la première condition était que la « manoeuvre RH » réussisse. Une autre condition est que les budgets soient tenus. C'est sur cet aspect que je voudrais maintenant vous interroger. Sur ce plan, je veux vous dire notre très grande inquiétude, et croyez bien que ce n'est pas parce que nous siégeons sur les bancs qui sont les nôtres : les chiffres sont là. Ils suscitent des questions, qu'il faut affronter avec exigence si nous voulons que la réforme réussisse .

Votre réforme repose sur une équation budgétaire assez simple. Au départ, vous avez annoncé que les 54 000 suppressions d'emplois annoncées devaient procurer 3,9 milliards d'euros d'économies. Vous avez indiqué qu'il fallait soustraire de cette somme le coût des mesures d'accompagnement social dont nous débattons, soit environ 800 millions d'euros. Vous évaluiez, en revanche, les économies de fonctionnement dues à la déflation des effectifs à 1,1 milliard. Au début de la période, vous indiquiez aussi qu'il faudrait tenir compte de dépenses d'infrastructures alors évaluées à 1,7 milliard, mais qui sont très supérieures à ce montant prévu. Dans le rapport que nous avons rédigé avec François Cornut-Gentille sur la réforme, nous avons d'ailleurs dit notre inquiétude sur ces surcoûts très importants, qui diminuent forcément le montant des économies que vous attendiez. Compte tenu de ces dépenses d'infrastructure et des dépenses d'accompagnement social, malgré le surcroît d'économie que procure la déflation des effectifs, le solde global n'est plus de 3,9, mais de 2,7 milliards en fin de période. Le Président de la République s'était engagé à faire abonder d'un milliard d'euros par an, à partir de 2012, les crédits d'investissement de manière à ce que les économies engendrées suffisent à financer les équipements et le changement de format de nos armées.

Or voilà que vous, qui êtes le meilleur élève de la RGPP et qui auriez dû être épargné par la régulation budgétaire compte tenu des efforts que vous avez déjà imposés à ce titre à votre ministère, vous subissez la régulation pour 3,5 milliards d'euros. C'est pratiquement un milliard de plus que les économies que vous avez déjà effectuées en imposant une cure d'amaigrissement sans précédent à nos armées, économies qui sont dévorées, et au-delà, par la régulation alors qu'elles devaient servir à financer la réforme. Dans un tel contexte budgétaire, monsieur le ministre, serez-vous en mesure de mener cette réforme à son terme ?

Dans la presse, certains responsables du ministère ont déclaré que ce n'était pas si grave, car si les économies destinées à financer la réforme était englouties par cette sévère régulation budgétaire, des recettes exceptionnelles allaient permettre, en fin de compte, de parvenir à l'équilibre. Mais pour ma part, je me souviens que votre brillant collaborateur M. Maisonneuve m'avait dit d'oublier les recettes exceptionnelles, le dispositif se finançant sans elles. Voilà qu'on les réintroduit pour équilibrer un budget qui ne l'est plus. Mais, monsieur le ministre, cela fait trois ans que vous nous proposez la réalisation des recettes exceptionnelles qui s'élèvent à 3,7 milliards d'euros ! Chaque année, c'est avec un talent chaque fois décuplé que vous essayez de nous convaincre de la réalisation pour l'année suivante de ce que vous n'avez pas réussi à faire l'année précédente. Or cela fait maintenant trois ans qu'on attend 1,6 milliard d'euros.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Vous allez même avoir plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Nous annoncer davantage devient fort suspect ! (Sourires.) Vous comprendrez que des interrogations légitimes verront le jour, y compris sur les bancs de la majorité – à cet égard, je vois le sourire avisé de mon collègue Jean-Louis Bernard –, qui seront comme autant de doutes sur la pertinence de l'argumentation que vous développez.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Ne faites pas de procès d'intention !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Monsieur le ministre, comment allez-vous faire ? Il est normal que la représentation nationale puisse comprendre, alors que nos armées subissent une réforme, les moyens et les chemins que vous allez emprunter au moment où vous subissez cette régulation, pour faire en sorte que nos armées ne soient pas à genoux.

En conclusion, nous avons toujours essayé de parvenir à un consensus s'agissant des questions relatives à la défense nationale. Vous aurez remarqué que le groupe socialiste ne brandit pas des arguments de pure politique ni ne dérape sur des chemins qui ne seraient pas à la hauteur de ces enjeux. Nous essayons de poser des questions de façon rationnelle et technique. J'espère que ce débat sera l'occasion pour vous d'apporter toutes les réponses à ces questions légitimes que nous nous posons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma position sur ce texte qui vise à favoriser la reconversion des militaires dans le civil sera différente de celle de tout à l'heure concernant les armes à sous-munitions, projet que j'ai voté.

Quel est aujourd'hui le paysage de la reconversion des militaires ? Les chiffres de l'étude d'impact fournie par le Gouvernement que je vais vous citer manquent de fraîcheur, ce dont je vous prie de m'excuser. Mais je n'ai pas trouvé mieux.

Sur les 33 604 militaires ayant quitté l'institution en 2008, 14 072 candidats au départ ont sollicité un accompagnement de reconversion. Parmi ces bénéficiaires, 66 % ont été reclassés dans le privé ou dans le public et le taux atteint 70 % si l'on retranche les 2 497 candidats à la reconversion qui ont trouvé un emploi sans attendre la fin des prestations.

On le voit, il reste du chemin à parcourir pour assurer un emploi à tous les anciens militaires.

Les députés du groupe GDR réclament une grande réforme de la sécurisation de l'emploi et des compétences dont bénéficieraient aussi bien les militaires que les civils. Or ce texte se contente de deux mesures principales : l'assouplissement des conditions d'accès au congé de reconversion et la création d'un congé spécifique pour création ou reprise d'entreprise.

L'assouplissement des modalités du congé de reconversion part du principe qu'il faut s'adapter à la diversité des parcours de formation du secteur civil. Pour une plus grande efficacité, ce congé pourra ainsi être pris de manière fractionnée par journée, lorsque la formation suivie ou l'accompagnement vers l'emploi l'exige. Le fractionnement se fera dans la limite de 120 jours ouvrés cumulés, contre six mois consécutifs actuellement. Parallèlement, il est proposé que les volontaires de moins de quatre ans de service actif bénéficient du même dispositif, mais dans la limite de vingt jours. Il est donc proposé de donner un minimum de droits à tous les militaires, quelle que soit la durée de leur engagement dans l'armée. Cela n'est pas un luxe.

Toutefois, vingt jours de congé de reconversion, c'est un tout petit minimum. Ce sont les contractuels de courte durée, souvent peu qualifiés, qui sont particulièrement touchés par les difficultés de reconversion.

Pour une plus grande efficacité, j'ai proposé un amendement prévoyant le doublement de cette durée du congé de reconversion, la portant ainsi à quarante jours. Mais cette mesure a été déclarée irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution.

Je le dis clairement, dans le contexte actuel de dégraissage massif des armées, il est à craindre que les mesures proposées aient un effet homéopathique. L'obsession principale du Gouvernement reste bien la suppression de postes. Sous les effets de la RGPP, la loi de programmation militaire supprime 54 000 emplois sur la période 2009-2014. Il s'agit de la plus grande saignée de l'histoire.

Dans ces conditions et dans un contexte de crise économique, ne rêvons pas : seuls les militaires aux compétences reconnues et aux diplômes nationaux, comme les ingénieurs ou les médecins, pourront s'en sortir.

Un congé pour création ou reprise d'entreprise sera également proposé aux militaires, à l'instar du dispositif applicable aux autres fonctionnaires, au bout de huit années de services.

Personnellement, j'ai tendance à me prononcer pour la reprise en main des activités par les propres salariés, quand il y en a. On le sait, les actionnaires sont plus soucieux de rentabilité que de développement industriel. Aussi, pour développer l'emploi en France, serait-il important de favoriser les dispositifs de reprise des entreprises par leurs salariés, seuls créateurs des richesses produites. Les salariés sont souvent les mieux placés pour la reprise. Ils sont les premiers intéressés par le maintien de leur emploi. Ils connaissent parfaitement leur entreprise, ses rouages, ses produits et ses clients.

Mais le problème de la reprise, comme à l'usine AFR de Douai, c'est le rachat du capital, l'apport des fonds propres. Les salariés ne disposent souvent que de leur propre force de travail. Alors, il ne faut pas rêver non plus, en l'état actuel du système capitaliste, le problème reste identique pour les salariés et pour les militaires : seuls ceux qui possèdent un patrimoine pourront se lancer dans l'aventure entrepreneuriale, même pour les projets de petite envergure.

Au final, si l'on veut résumer la logique du Gouvernement, je dirais que, pour fournir un emploi aux anciens militaires, le Gouvernement compte beaucoup sur le secteur privé. Cela est encore illustré par le développement des partenariats entre 1'administration et les grands groupes pour la reconversion des militaires.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Bonne mesure !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

L'État est le seul responsable de la casse de l'emploi des militaires, et pourtant il se défausse sur le privé.

Je ne connais pas la liste des entreprises partenaires, mais étant donné les bonnes relations avec L'Oréal, on peut penser qu'elle en fait partie, monsieur le ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Eh bien non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Parce que l'armée le vaut bien ! (Sourires.)

Il est prévu la création, par décret, du bilan professionnel de carrière. Celui-ci permettra d'informer périodiquement le militaire tout au long de sa carrière. Il faut attendre de connaître le contenu exact du décret pour savoir si la logique de carrière sera réellement favorisée.

Attention à ce que ce bilan effectué par les gestionnaires ne revienne pas à un entretien préalable au licenciement, ou ne soit une nouvelle occasion pour faire pression vers des reclassements, des départs volontaires ou des réorientations.

Enfin, je voudrais évoquer l'indemnisation du chômage des militaires. Lorsqu'ils quittent l'armée de façon non volontaire, les anciens militaires sans emploi ont droit à des indemnités chômage. Mais, à la différence des civils, la charge et la gestion de l'indemnisation chômage des militaires licenciés sont assurées par le ministère de la défense.

Récemment, la presse a évoqué le cas de militaires voulant poursuivre l'État pour absence de paiement des indemnités chômage. Les militaires sont amers. Ils ont le sentiment que l'État s'est servi d'eux puis les a oubliés. Certains sont dans une situation financière inextricable.

Le problème n'est pas nouveau : fin 2008 déjà, notre excellent collègue Maxime Gremetz que vous connaissez monsieur le ministre, et qui sera là cet après-midi...

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Quand il n'est pas là, cela se voit !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

..interpellait le ministre de la défense sur ces délais de paiement et regrettait que la situation perdure depuis plus d'une décennie.

Une fois de plus, il est démontré que les conséquences financières de la suspension de l'appel sous les drapeaux ont été minimisées par les tenants de l'armée de métier.

Les dossiers de défaut d'indemnisation s'accumulent. J'en profite pour féliciter le travail de l'Association de défense des droits des militaires dans ce dossier.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner les dernières informations concernant 1'éventuel dédommagement du préjudice subi et l'externalisation au Pôle emploi du paiement du chômage des militaires ?

Je conclus par quelques réflexions.

Dans le domaine de la défense, on préfère souvent discuter de haute stratégie, des opérations extérieures, de l'OTAN ou encore de la défense anti-missile. On a aussi tendance à voir nos armées par le petit bout de la lorgnette, à travers les « joujoux » technologiques utilisés. On évoque moins le sort des soldats et le grand malaise qui existe au sein de la grande muette.

Il faut déplorer la courte durée de certains parcours et la précarisation croissante du métier de militaire. Si des militaires se satisfont peut-être de contrats courts et de la flexibilité, ce n'est pas le cas de tous. Il existe une différence entre mobilité choisie et mobilité imposée, source de stress et de précarité. Cette dernière peut conduire à un sentiment d'inutilité sociale et d'échec.

Non, les hommes et les femmes ne sont pas des outils que l'on peut jeter après usage. Les soldats ne sont pas non plus de simples flux à gérer. Ils sont des citoyens à part entière, avec leurs légitimes aspirations, actuellement bafouées.

Le besoin de stabilité professionnelle et familiale existe, tout comme celui de libre expression, mis à mal récemment.

Si la reconversion est un droit garanti par le statut des militaires, il faut la favoriser sans qu'elle devienne pour autant un pis-aller pour tous ceux que l'administration flanque à la porte. D'ailleurs, il y a une apparente contradiction : d'un côté, l'UMP veut augmenter la durée des carrières, tandis que, de l'autre, elle veut inciter au départ des militaires, pour avoir en permanence une armée relativement jeune. Monsieur le ministre, n'avez-vous pas le sentiment d'appuyer sur le frein et l'accélérateur en même temps ?

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Pas du tout !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Ce projet de loi est donc loin de contrebalancer les évolutions néfastes envisagées ou en cours.

Une armée de métier est toujours vieillissante. Avec ce texte qui prétend la rajeunir, vous cherchez la quadrature du cercle, vous naviguez à vue car la droite ne veut pas remettre en cause le péché originel.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Heureusement que c'est un député communiste qui parle de péché originel !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Et au bout de la logique initiée par l'armée de métier, il y a la précarisation des armées, puis la privatisation, non seulement du soutien, mais de nos forces opérationnelles elles-mêmes, sur le modèle américain. Nous dénonçons avec force ces logiques destructrices du capital à l'oeuvre.

Toutefois, les députés communistes, républicains et du parti de gauche, fidèles à leurs positions et combats historiques – c'est le parti des fusillés – et, dans la mesure où ce texte tend à augmenter légèrement les droits des militaires français, déjà bien inférieurs à ceux des armées étrangères comparables, s'abstiendront sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les militaires qui quittent l'armée sont souvent jeunes et ne disposent pas de ressources suffisantes pour ne plus exercer d'activité professionnelle. Et, souvent, comme ils sont dans la force de l'âge, ils ne souhaitent pas rester inactifs.

Comme vous le savez, on ne gagne pas une guerre ou on ne maintient pas la paix avec des quinquagénaires. La force d'une grande armée se mesure avant tout à la jeunesse de ses talents.

Le projet de loi qui nous rassemble aujourd'hui s'inscrit dans la lignée de plusieurs textes réglementaires ou législatifs qui visent à mieux accompagner la reconversion des militaires. C'est une avancée majeure, et les députés centristes s'en réjouissent.

Comme chacun sait, la suppression du service militaire en 1996 et la professionnalisation des armées conduisent à prendre davantage en compte la question de la reconversion. J'en profite pour saluer toute l'implication du ministre de la défense qui, un an après avoir oeuvré à la création de l'Agence de la reconversion de la défense, dénommée Défense Mobilité, nous propose aujourd'hui de nous doter des outils d'accompagnement adéquats.

Ces avancées sont particulièrement nécessaires compte tenu de la courte durée des parcours professionnels dans les armées en période de restructurations de l'outil de défense, c'est-à-dire au moment où l'armée connaît une déflation d'environ 6 000 personnels par an jusqu'à la fin de 2014.

Surtout, l'amélioration des dispositifs de reconversion des militaires est particulièrement importante pour l'attractivité de la carrière militaire. En effet, pour susciter des vocations, un corps de métier doit veiller à ce qu'il y ait un après, une sortie par le haut de ses effectifs. C'est ce qui nous est proposé aujourd'hui.

Ce projet de loi nous permettra de mettre un terme à des situations de déshérence, d'isolement, de découragement que l'on constate trop souvent aujourd'hui chez des militaires ayant achevé leur carrière.

En effet, 61 % des militaires ayant quitté les armées en 2007 n'ont pas eu recours aux dispositifs de reconversion ; 25 % des militaires du rang connaissent une situation de chômage dans l'année suivant leur départ des armées ; environ 8 500 anciens militaires sont inscrits au chômage et seuls 60 % des militaires quittant l'institution sont éligibles à l'ensemble des prestations de reconversion en vigueur.

Ce n'est pas acceptable. Pire, cette situation est indigne des sacrifices auxquels sont confrontés les militaires durant leur carrière. Dans une démocratie moderne, la carrière militaire doit être récompensée par une reconversion souple, adaptée et offerte à tous les personnels, quel que soit leur rang. C'est aussi cela une grande armée. Le rôle des militaires dans la société est symboliquement important parce qu'ils exercent un métier comparable à nul autre : au bout de leur engagement, il y a le sacrifice suprême, celui de leur vie. Ils assurent la sécurité de la nation et méritent d'être considérés à la mesure de cet engagement si spécifique.

En effet, aujourd'hui, au-delà de la mise en oeuvre des orientations de la RGPP et du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, plusieurs études, ainsi que l'évolution récente des politiques publiques en matière de mobilité professionnelle, dans le secteur privé comme dans le secteur public, ont montré le manque d'adaptation de certains outils statutaires.

On observe ainsi plusieurs entraves à la reconversion des personnels militaires. J'en distinguerai trois.

Tout d'abord, le dispositif de reconversion ne concerne qu'une partie des militaires qui quittent les armées. Seuls ceux qui justifient de plus de quatre ans de service peuvent bénéficier de l'ensemble des prestations de reconversion. On sait ici que l'exclusion du bénéfice du congé de reconversion pour les militaires ayant effectué moins de quatre de service prive statutairement 38 % des militaires.

Ensuite, la nécessité de la reconversion n'est pas suffisamment prise en compte en amont pendant le parcours professionnel des militaires. De nombreux militaires quittent l'institution dépourvus de qualifications facilement transposables dans le secteur civil, alors qu'une détection plus en amont de ce décalage permettrait à ces hommes et à ces femmes, tout en poursuivant leur parcours professionnel dans les armées, de se préparer, dans le cadre ou en dehors de l'exercice de leurs fonctions, au retour à la vie civile.

Enfin, certains outils mis en oeuvre au moment de la reconversion semblent particulièrement rigides au regard de la diversité des parcours de formation proposés dans le secteur civil.

Nous ne pouvons donc que nous réjouir de constater que ce texte répond à ces carences, en complétant les actions menées, notamment la convention que vous avez signée avec plusieurs grands groupes, monsieur le ministre.

En assouplissant les modalités du congé de reconversion pour l'adapter à la diversité des parcours de formation du secteur civil, ce texte permettra à ce congé d'être pris de manière fractionnée lorsque la formation suivie ou l'accompagnement vers l'emploi l'exige.

Ce nouveau congé permettra ainsi d'offrir plus de souplesse dans de la formation ou de la recherche d'emploi, de donner davantage de temps aux candidats pour préparer leur reconversion. En effet, alors que le cumul du congé actuel de reconversion et du congé complémentaire ne peut excéder un an, les candidats pourront étaler le futur congé de reconversion sur plusieurs années.

Enfin, il donnera aux intéressés, aux entreprises et aux institutions partenaires une plus grande sécurité juridique : les stages devraient pouvoir être systématiquement effectués dans le cadre des congés de reconversion et non, comme c'est parfois le cas aujourd'hui, dans le cadre des permissions.

En instaurant le congé pour création d'entreprise comme nouvelle position statutaire d'activité sur le modèle du dispositif applicable aux fonctionnaires, ce texte permettra à un militaire de continuer son activité tout en exerçant celle de chef d'entreprise.

J'en profite pour vous informer, mes chers collègues, que j'ai déposé un amendement visant à élargir le régime simplifié de création et de gestion d'entreprise applicable aux entrepreneurs individuels ou militaires selon certaines modalités, notamment dans le cadre de la reconversion – je pense en particulier au statut d'auto-entrepreneur. Il compléterait ainsi les autres dispositifs mis en place pour accompagner la déflation des effectifs militaires – pécule, dispositifs d'accès à la fonction publique. Repoussé au titre de l'article 40, vous l'avez repris, monsieur le ministre, ce dont je vous félicite.

Enfin, au nom du groupe Nouveau Centre et apparentés, je souhaite vous interroger sur deux sujets.

D'abord, quand il est question de la reconversion des militaires, il est indispensable de rappeler qu'une reconversion qui fonctionne est avant tout une reconversion encadrée. Selon le principe d'une République irréprochable telle que la souhaite le Président de la République (Murmures sur les bancs du groupe SRC),…

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

…ce type de reconversion prévient toute prise illégale d'intérêts. J'aimerais donc, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez quant à l'activité de la commission de déontologie, censée prévenir de possibles dérives ; il s'agit notamment de protéger certains officiers supérieurs ou généraux qui, parfois, sont appelés à de nouvelles fonctions en lien direct avec leurs anciennes attributions, même s'il est très positif pour nos entreprises – en particulier pour celles du secteur de l'armement – de valoriser de telles compétences.

Ensuite, la rationalisation de tous les dispositifs disparates qui coexistent doit être confortée par une communication appropriée. On sait en effet que le ministère de la défense mène en matière de recrutement des engagés des actions de communication très dynamiques et très bien faites. Une telle politique de communication est-elle prévue en matière de reconversion ? La délégation à l'information et à la communication de la défense dispose-t-elle d'un cadre ou d'une ligne budgétaire spécifique pour valoriser auprès des entreprises et des administrations l'expérience, les compétences et la motivation des militaires ?

J'ai pu me rendre compte de la situation sur le terrain, à Castres, où des liens très spécifiques existent entre le régiment et la ville. L'amicale des anciens du 8e RPIMa joue un rôle majeur de lien entre l'institution militaire et le monde civil qui l'entoure. Les valeurs véhiculées par l'institution militaire – solidarité, travail, dépassement de soi – renforce l'intérêt pour les secteurs privé et public de reclasser des militaires qui n'ont rien à voir avec le cliché les réduisant à de « gros bras pour une petite cervelle ». Au contraire, ces hommes maîtrisent des savoir-faire techniques, présentent de réelles qualités d'adaptation et une aptitude à se former continûment, et se révèlent souvent polyglottes, ceux qui ont participé aux OPEX maîtrisant l'anglais. Un ancien militaire constitue donc souvent un plus pour une entreprise ou pour une administration.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, c'est avec satisfaction que le groupe Nouveau Centre et apparentés aborde l'examen de ce texte qui parachève un édifice global de reconversion pour les personnels militaires au moment où l'armée vit une très importante déflation de ses effectifs.

Ce texte constitue une avancée majeure pour toutes celles et tous ceux qui ont fait le choix d'une carrière difficile et qui peut aller jusqu'au sacrifice ultime. Il représente également une avancée pour l'attractivité d'un métier qui s'apparente bien plus à une vocation qu'à un choix par défaut. « Il n'y a de richesses que d'hommes », disait le général de Gaulle ; les militaires sont une richesse pour la France, ses entreprises et ses administrations. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Madame la présidente, monsieur ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la reconversion est un enjeu essentiel pour les armées. Elle est non seulement la condition du renouvellement des effectifs, mais aussi la contrepartie des contraintes inhérentes à la vie militaire. À ces hommes et à ces femmes dont la carrière est souvent brève, dont on exige une disponibilité constante, qui sont prêts au sacrifice suprême, la nation se doit de proposer des perspectives au terme de leur engagement.

Cette exigence prend une dimension particulière aujourd'hui avec la réduction du format des armées prévue par la dernière loi de programmation militaire : 54 000 postes seront supprimés d'ici à 2014 afin de renforcer l'aspect opérationnel de nos forces par rapport au soutien.

Dans un contexte budgétaire contraint, il est nécessaire, pour le ministère de la défense, de minimiser le coût du chômage des militaires qui représentait 110 millions d'euros en 2009. Des efforts doivent donc être entrepris pour optimiser les dispositifs de reconversion. L'étude d'impact prévue par le projet de loi l'illustre bien.

Il faut toutefois noter que les différents dispositifs de reconversion des militaires enregistrent, dans l'ensemble, des résultats positifs. Alors que près de 35 000 militaires quittent les armées chaque année, plus de 21 300 prestations d'orientation, de formation professionnelle et d'accompagnement vers l'emploi ont été accordées l'an dernier. Au total, comme l'indique notre collègue Daniel Mach dans son rapport très précis, le taux de reconversion des militaires, c'est-à-dire la part de ceux qui ont trouvé un emploi après leur départ des armées, s'est élevé à près de 83 % en 2009.

Pour améliorer ces performances, le Gouvernement a d'ores et déjà engagé plusieurs actions, à commencer par une réforme en profondeur des structures de reconversion. Cette mutualisation de structures jusque-là éclatées entre les différentes armées doit permettre d'améliorer, à moindre coût, la qualité des prestations offertes. Il existe désormais un service unique à compétence nationale, l'Agence de reconversion de la défense dont vous avez souhaité la création, monsieur le ministre. Le succès de la dernière édition du forum « Carrefour, emploi, défense, mobilité », organisé à l'École militaire, témoigne de son dynamisme.

En outre, vous nous avez indiqué avoir signé des conventions avec de grands groupes visant à permettre la reconversion d'anciens militaires. Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, si ces conventions n'avaient pas été affectées par la crise économique.

Sur le terrain, l'antenne implantée dans chacune des futures bases de défense assurera un suivi au plus près des intéressés, tandis que les dix pôles Défense Mobilité assureront l'interface entre l'échelon national et l'échelon local. À cet égard, à l'instar des conventions passées avec les grands groupes, pourriez-vous nous indiquer si de telles conventions ont été ou pourraient être signées avec les organisations représentant les collectivités territoriales, pour créer un lien plus direct, un vrai réflexe d'embauche, avec les DRH des dites collectivités, entre Défense Mobilité et les employeurs publics locaux – je pense à l'Association des maires de France, à l'Association des départements de France, à l'Association des régions de France voire aux fédérations intercommunales.

Autre élément de cette rénovation, la récente création, par décret, d'un bilan professionnel de carrière qui sera organisé pendant la cinquième année de service puis renouvelé tous les quatre ans. Il permettra de définir un projet professionnel au sein de l'armée ou bien d'orienter l'intéressé vers les dispositifs de reconversion.

C'est dans cette même logique d'optimisation que s'inscrit le présent texte. Il va d'abord permettre d'assouplir et d'élargir les possibilités actuelles du congé de reconversion.

Pour les militaires enregistrant plus de quatre années de service, le congé de reconversion deviendra fractionnable par journée, dans la limite de cent vingt jours ouvrés cumulés, contre six mois consécutifs actuellement. Les candidats disposeront de davantage de temps pour préparer leur reconversion. Ils bénéficieront de plus de souplesse dans l'organisation de leur formation ou de leur recherche d'emploi. Au total, cette mesure devrait avoir pour effet d'élargir les débouchés des militaires préparant leur retour à la vie civile.

La loi permettra aussi aux volontaires ayant accompli moins de quatre années de services effectifs de bénéficier d'un congé de reconversion court, d'une durée maximale de vingt jours ouvrés. Cette population, pourtant particulièrement touchée par les difficultés de reconversion, était jusqu'à présent écartée de ce dispositif.

L'autre grande disposition de ce projet de loi, c'est l'instauration d'un congé pour création ou reprise d'entreprise. Le parcours individualisé du créateur ou repreneur d'entreprise illustre le succès des anciens militaires lorsqu'il s'agit de créer une entreprise. Avec ce nouveau congé, inspiré de celui proposé aux agents publics depuis la loi de modernisation de la fonction publique de février 2007, il deviendra possible pour un militaire – très souvent spécialisé – de continuer son activité tout en exerçant celle de chef d'entreprise. D'une durée d'un an, renouvelable une fois, il donnera aux intéressés davantage de temps et de garanties pour se lancer dans la création d'une entreprise et assurer sa viabilité.

Les dispositions de ce texte, celles prévues par les amendements présentés par le Gouvernement et adoptés ce matin en commission, semblent pour le moins positives. Alors que le contexte économique demeure difficile, il est nécessaire de consolider l'accompagnement de la reconversion des militaires, afin de leur donner les meilleures chances de réussir une seconde carrière dans la vie civile. Ce projet de loi y contribuera, le groupe UMP le votera donc naturellement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Mariani

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Président de la République m'ayant fait l'honneur de me nommer représentant spécial de la France pour l'Afghanistan et le Pakistan, j'ai pu, lors de mes déplacements entre juillet 2009 et janvier 2010, comme vous, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, apprécier à sa juste valeur l'engagement de nos troupes ainsi que le courage, le dévouement et l'abnégation qui les caractérisent lors de ces missions difficiles, exigeantes et dangereuses. C'est pourquoi, je tenais aujourd'hui à leur rendre l'hommage particulier qui leur est dû, pour leur exprimer la solidarité de tous les Français.

Ce texte est particulièrement bienvenu, en tentant de contribuer au mieux à l'amélioration des instruments destinés à faciliter leur reconversion.

Sans entrer dans les détails et les modalités de ses dispositions visant à assouplir, adapter, ouvrir et proposer un meilleur dispositif de reconversion, je me contenterai, aujourd'hui, de donner mon sentiment sur la question et de mettre en évidence l'obligation qui nous est faite de garantir et de réussir l'accomplissement d'une véritable seconde carrière pour nos militaires.

Les spécificités et les contraintes du métier des armes amènent de nombreux militaires à quitter l'institution à un âge où ils doivent poursuivre une activité professionnelle, car la profession reste un élément déterminant de l'identité. La réalisation de soi et l'accomplissement personnel ainsi que la recherche d'un nouveau statut social demeurent également, et c'est tout à fait logique, une priorité pour nos militaires dans cette seconde carrière. Et sans conteste, les armées sont un vivier de compétences, de savoir-faire et de qualifications indispensables pour notre société et nos entreprises. Leurs aptitudes leur permettent sans aucun doute de satisfaire les besoins d'employeurs éventuels.

Néanmoins, entreprendre une seconde carrière civile n'est pas chose aisée. C'est une étape importante dans leur vie professionnelle, qui revêt en outre une dimension psychologique. La singularité du métier de militaire – attachement à des valeurs, sentiment d'être au service d'un idéal, fraternité, culte de l'effort – témoigne de la nécessité d'être épaulé dans ses démarches de changement. En outre, le contexte actuel est particulier : la crise économique, les mutations du marché du travail, les contraintes budgétaires ont accentué les difficultés et les défis à relever. L'insertion dans la société civile ne doit donc en aucun cas aboutir à une dévaluation de l'image de ceux qui ont servi la France.

II leur est donc nécessaire de définir et de construire un projet professionnel réaliste au regard des compétences à détenir, et réalisable au regard de l'environnement socio-économique du bassin d'emploi choisi.

C'est dans cette optique, monsieur le ministre, qu'une nouvelle fois, le Gouvernement a marqué sa volonté de leur offrir une meilleure reconnaissance, en mettant à leur disposition des moyens d'accompagnement adaptés pour les aider à s'orienter et à se former afin de faciliter leur retour vers un emploi civil : aide au choix de l'orientation, formations, conseils en techniques de recherche d'emploi, périodes d'adaptation en entreprise sous statut et rémunération militaires, aides à la création ou à la reprise d'entreprise, notamment avec la souplesse du congé spécifique, sessions d'accompagnement vers l'entreprise, création d'un congé de reconversion court pour ceux ayant accompli moins de quatre années de services. Bref, le dispositif qui est mis en place peut répondre à toutes les situations possibles.

Aussi, je souhaite mettre l'accent sur l'orientation et la formation, qui, selon moi, sont les bases d'une reconversion réussie.

La possibilité de bénéficier d'une orientation professionnelle doit leur permettre de déterminer leur futur métier, compte tenu de leurs compétences et des possibilités d'accès à l'emploi dans l'activité considérée. Il convient d'ailleurs de noter que la création, en mars dernier, du « bilan professionnel de carrière », qui tient compte de l'expérience, des compétences et des aspirations personnelles des intéressés, est une avancée encourageante et importante dans le processus d'orientation et de reconversion.

La formation professionnelle revêt également un caractère crucial pour ceux qui en ont besoin. Lorsque le militaire, qui a élaboré un projet professionnel validé par le commandement et la chaîne de reconversion, ne dispose pas de compétences transférables directement dans le civil, il n'est pas possible d'engager d'emblée une démarche d'accompagnement direct vers l'emploi. L'objectif est alors de lui assurer une formation professionnelle lui permettant de combler l'écart entre son savoir-faire et les métiers civils auxquels il peut prétendre.

Ces deux étapes primordiales permettent de préparer convenablement ce changement de projet de vie.

Ce bref exposé me permet de souligner à nouveau le bien-fondé de la démarche qui est entreprise par le ministère depuis des années. Ce texte propose un dispositif alliant souplesse et prise en compte des inquiétudes des militaires dans un contexte de plus en plus difficile. Il témoigne de la volonté affichée du Gouvernement de répondre aux préoccupations de nos troupes. Nous resterons attentifs, comme l'ensemble de nos collègues, à ce que leur seconde carrière puisse être réussie. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Je remercie tout d'abord Thierry Mariani, qui a effectué un très gros travail en tant que représentant spécial pour l'Afghanistan et le Pakistan, pour les mots qu'il a eus à l'égard de nos militaires, tout comme Philippe Folliot et chacun d'entre vous.

Pour répondre à la question de Daniel Mach, je précise que le congé de reconversion pour création d'entreprise est limité à vingt par an. En deux ans, quarante dossiers pourront donc être traités. Il ne s'agit pas d'une limitation de principe. Nous voulons expérimenter le dispositif, voir s'il donne pleinement satisfaction, avant, éventuellement, d'augmenter les volumes budgétaires. Mais aucun chiffre n'est d'ores et déjà arrêté.

Le président Teissier me pose, s'agissant de la création d'entreprise, la question de la compatibilité avec les missions et les opérations de nos militaires. Il s'agit, je le rappelle, d'un congé agréé, et non pas d'un congé auquel on accède de droit. Il faut que le gestionnaire l'accepte. Il doit être tenu compte, bien entendu, des impératifs opérationnels des armées. En cas de retour, la réinsertion du militaire sera adaptée à son nouvel emploi. Nous prévoirons donc un système de réinsertion, et de formation, s'il le faut, pour faire en sorte que le militaire qui reviendrait après cette période puisse retrouver un cadre d'activité.

Monsieur Cazeneuve, s'agissant des augmentations des indemnités de départ volontaire, le coût a été de 54 millions d'euros en 2009 et en 2010. Dans le cadre des aménagements budgétaires, j'ai rendu un arbitrage tendant à en faire passer le nombre de 300 à 600. La plupart des indemnités de départ volontaire qui ont été accordées à des fonctionnaires décidant de quitter l'État l'ont d'ailleurs été par le ministère de la défense. De mémoire, nous avons accordé entre 70 et 75 % des indemnités de départ volontaire de la fonction publique.

S'agissant des pécules militaires, le coût a été de 93 millions d'euros. Ils ont concerné 1 200 militaires. Il y a probablement eu, je vous l'accorde, un appel d'air au début de la mise en oeuvre de ce dispositif. Mais il est vrai que, au moins pour les militaires, pas pour les civils, nous avons été confrontés à un afflux considérable de demandes, qui prouve que le dispositif est adapté et judicieux.

Nous aurons probablement moins de demandes en fin de période, vers 2013, 2014. Mais aujourd'hui, nous avons un stock extrêmement important. Comme pour le congé de reconversion, ce n'est pas un droit. Ce n'est pas un guichet qui est ouvert. La décision est prise, cas par cas, au terme d'une analyse de poste. Il est évident que nous n'accordons pas des indemnités ou des pécules à des agents, ou, surtout, à des militaires dont la qualification et la formation sont extrêmement précieuses pour nos armées. Pour prendre un exemple simple, ceux qui sont atomiciens n'ont aucun problème de reconversion, étant donné que la demande du marché est extrêmement importante : ce n'est donc pas pour ce genre de postes que nous attribuons des pécules.

Je dirai un mot sur le budget de la défense. Je viendrai demain devant la commission pour évoquer le sujet. Vous avez évoqué le chiffre de 3,5 milliards d'euros sur trois ans. Il faut mettre ce chiffre en perspective, au regard des recettes exceptionnelles, dont nous estimons qu'elles s'élèveront à 2,3 milliards d'euros.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Je vous vois vous réveiller tout d'un coup, c'est cela qui me fait sourire.

Je vous rappelle que ces recettes exceptionnelles, nous ne les avons toujours pas encaissées, puisque jusqu'ici, les arbitrages du Premier ministre nous ont amenés à avoir des dotations budgétaires supplémentaires. Ces recettes exceptionnelles, elles sont toujours prévues dans les crédits accordés à la défense jusqu'en 2020, puisque, comme vous le savez, le Livre blanc a prévu un total de 377 milliards d'euros, sur deux lois de programmation militaire.

Pourquoi avons-nous réévalué les recettes exceptionnelles ? Parce que mon excellent collaborateur Christophe Maisonneuve a rencontré les membres de l'ARCEP, dont le président indique que nous aurons, pour la vente des fréquences, des propositions qui seront probablement très supérieures à celles que nous avions prévues. Sur l'immobilier, à l'inverse, notre première estimation du produit des cessions était supérieure à celle de beaucoup d'observateurs. Dans le cadre de la reconfiguration budgétaire des trois prochaines années, nous avons décidé de retenir, purement et simplement, l'estimation du service des domaines, qui s'élève, s'agissant de l'immobilier parisien, à 500 millions d'euros environ. Nous avons donc essayé de rester au plus près des évaluations de ceux qui connaissent les sujets : celle de l'ARCEP, pour les fréquences ; celle du service des domaines, pour les estimations immobilières.

Vous dites que nous avons construit un budget de la défense en fonction de la transformation et de la mutation du ministère. C'est vrai. Le rythme des suppressions de postes sera plus important que prévu, dites-vous. C'est vrai, mais ce n'est pas parce que nous n'avons pas pu effectuer les recrutements en temps et en heure dans l'année. Il y a toujours un décalage entre les appels à concours et les recrutements. J'ai volontairement fait en sorte que ne soient pas pourvus tous les postes que le budget avait ouverts, parce que j'estimais que, compte tenu de la situation budgétaire, si nous allions un peu plus vite dans le rythme des départs, ce serait autant de gagné pour l'avenir. Mais si nous n'avions pas engagé cette transformation en profondeur du ministère, il est clair que les 1,5 milliard d'euros d'économies en année pleine à partir de 2013, 2014, nous ne les aurions pas. Par conséquent, l'équation budgétaire que vous évoquez serait encore plus difficile sans cette mutation en effet exigeante pour le personnel, mais absolument nécessaire pour notre défense.

Monsieur Candelier, j'ai pris en 2007 l'initiative de plusieurs conventions après avoir constaté qu'un certain nombre de grands groupes français avaient des perspectives d'embauches extrêmement importantes pour les années à venir. Ces groupes sont présents dans tous les domaines, et peuvent intéresser des personnels qui sont dans des métiers civils ou des métiers techniques. J'ai signé des conventions avec le monde des assurances, avec la fédération française des banques, avec PPR, avec Suez, avec Renault... Ces groupes prévoient de recruter plusieurs milliers de personnes par an à partir de 2010. J'ai également signé des conventions avec le syndicat des logisticiens, parce que ce sont des métiers qui peuvent offrir un certain nombre d'emplois.

J'en profite pour dire à Patrick Beaudouin que nous avons aussi signé une convention avec le CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale, qui permet de sensibiliser les collectivités locales au recrutement de militaires, d'autant plus que nous avons mis en place un dispositif tendant à compenser une éventuelle différence de rémunération.

M. Folliot m'a posé deux questions. La commission de déontologie se réunit tous les mois, pour examiner une trentaine de dossiers. Des décisions de refus sont prononcées dès lors qu'elle estime qu'il y a un conflit d'intérêts entre le métier et les perspectives futures.

Nous n'avons pas, pour les reconversions, une politique de communication aussi énergique que celle que nous avons pour le recrutement, bien entendu. C'est avant tout à l'agence de reconversion, Défense Mobilité, d'assurer la promotion des hommes et des femmes qui vont quitter notre institution. Je vous accorde que l'on peut faire encore plus, mais je crois qu'avec cette agence, nous avons enfin mis en place un système qui permet d'être plus efficace.

Au lendemain de ma nomination, j'avais eu l'occasion, avec Patrick Beaudouin, de visiter le Centre interarmées de reconversion, le CIR de Vincennes. J'avais constaté que la structure interarmées chapeau vivait dans un système extrêmement cloisonné, où l'Armée de terre, la Marine et l'Armée de l'air continuaient à avoir leur propre dispositif de reconversion, leur propre fichier, leur propre « clientèle », pour ainsi dire. Il n'y avait aucune politique de mutualisation permettant d'être plus efficace et de faire appel, autant que nécessaire, à des prestataires extérieurs pour dynamiser le dispositif. Vous aurez pu observer que, depuis la mise en place de l'agence de reconversion, nous améliorons ces chiffres, puisqu'en dépit d'un contexte économique difficile, nous parvenons à un taux de reconversion de 70 %. Il faut reconnaître que la reconversion des militaires, comme vous le disiez, monsieur Tessier, est relativement facile, car ils ont à la fois un métier, une formation et ils savent ce qu'est remplir une mission. Ils ont également un savoir être. De ce fait, il sont plutôt considérés comme d'intéressantes recrues par les entreprises. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La parole est à Mme Patricia Adam, inscrite sur l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Adam

Vous avez répondu, monsieur le ministre, à de nombreuses questions posées par différents collègues. Vous avez essayé de nous rassurer, c'est votre rôle. Mais vous vous livrez, depuis quelque temps, à un exercice difficile et complexe. La reconversion des militaires est un élément très important, garantie de la bonne santé des armées. Nous sommes tous d'accord sur ce point.

Pour ce qui est des aspects budgétaires et des recettes exceptionnelles, vous nous promettez des recettes imminentes. Nous le souhaitons, sinon l'équilibre budgétaire de votre ministère sera compromis.

Nous allons examiner ce texte aujourd'hui, après qu'ont été prises des dispositions comme l'arrêté de juin 2009 sur l'agence de reconversion et le décret de mars 2010 sur l'entretien préalable : il nous aurait semblé préférable de procéder dans l'ordre inverse.

M. Cazeneuve a tout à l'heure brillamment exposé le décalage particulièrement inquiétant entre l'ampleur des suppressions de postes et le flou qui entoure le financement de la reconversion, même si vous avez répondu partiellement à ce sujet. Ce point n'est pas abordé dans le texte, il aurait été nécessaire qu'il le soit.

Nous ne pouvons pas non plus examiner ce texte en ignorant la crise budgétaire et le fait que de nouvelles économies de 3,9 millions devront être trouvées. Nous observons pour la défense, comme pour les autres ministères, que les emplois seront, une fois de plus, principalement concernés. Quand on connaît la situation de l'emploi, je ne pense pas que l'on puisse être rassuré : même si les militaires ont un métier et une capacité qui leur permettent d'accéder peut-être plus facilement que d'autres à l'emploi, la crise et le chômage les concerneront comme tous les autres citoyens. Les personnels militaires, comme les personnels civils, feront les frais de la diminution des effectifs de la fonction publique, et ils affronteront un marché de l'emploi plus difficile que jamais.

La défense, depuis le passage à une armée professionnelle décidé par le Président Jacques Chirac, a été, je crois, une excellente élève. Elle a toujours rempli ses missions, et réalisé de notables économies. Elle est, depuis cette période, en restructuration permanente pour financer la professionnalisation, puis les équipements. Le livre blanc, la loi de programmation militaire ont fixé des objectifs encore plus importants : 54 000 suppressions de postes, 16 000 externalisations. L'étau s'est encore resserré, les armées ont été, une fois encore, bonnes élèves et s'appliquent à réaliser l'objectif en cours de réalisation.

Et voilà qu'aujourd'hui un nouveau plan de restructuration est annoncé, prévoyant encore la suppression de 10 000 emplois. Cet exercice devient pratiquement impossible, je tiens à le dire solennellement. Cela risque de mettre en danger la vie des hommes et des femmes engagés dans nos armées. C'est de notre responsabilité collective. Il devient plus que difficile de trouver l'équilibre indispensable entre la formation, l'entraînement, les OPEX, le repos nécessaire... Nous pouvons réaliser des économies ; les deux exercices que sont la loi de programmation militaire et le Livre blanc doivent être revus. Nous vous avons déjà proposé des économies : Balard et la flotte présidentielle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Madame Adam, premièrement, il n'existe aucun plan de suppressions d'emplois. Je ne sais où vous avez trouvé ces informations.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

J'ai l'impression qu'en matière de rumeur, nous sommes servis en ce moment. Si vous pensez que tout ce qui figure dans la presse est exact et que la rumeur suffit pour alimenter le discours politique…

Deuxièmement, qui peut penser un instant que les armées auraient pu être exonérées d'un effort supplémentaire, compte tenu de la nécessité de redressement des comptes publics ? Les militaires sont plus à même que personne d'appréhender cette question. J'imagine mal en effet que nos concitoyens puissent comprendre qu'il faille préserver uniquement le budget de la défense. Cela n'aurait pas servi les armées si nous n'avions pas fait nous-mêmes un effort compte tenu des difficultés vécues par la totalité de la communauté nationale.

En outre la communauté militaire est en mesure de comprendre, car elle sait que la lutte contre les déficits publics est le même combat que la mission militaire au quotidien. Lutter contre les déficits publics, c'est faire en sorte que notre pays soit souverain, indépendant et puisse rayonner dans les prochaines décennies. De même, assurer la défense de son pays, c'est également être souverain, indépendant et faire en sorte que notre pays puisse rayonner au XXIe siècle. Ces combats ont beaucoup de points en commun. Vous voyez donc que la communauté militaire est à même de comprendre tout cela.

Enfin, permettez-moi d'établir des comparaisons avec les autres pays. Nous sommes en France devant un arbitrage qui intervient après trois années extrêmement favorables pour le budget de la défense. Le plan de relance a été lancé. Nous étions à 15 milliards d'équipement durant la loi de programmation 2002-2007 : nous sommes passés, pendant trois ans, entre 17 et 18 milliards d'équipements.

À l'étranger, la réduction des budgets de la défense est de 20 à 25 %. Même le budget de la défense américain – nous ne sommes évidemment pas sur les mêmes volumes – va enregistrer une baisse de 100 milliards de dollars. Tous les budgets européens sont en très forte baisse ; et l'arbitrage dont nous bénéficions en France distingue le budget de la défense des autres budgets de l'État.

Je pense donc honnêtement que cet effort devait être fait, et qu'il devait être compatible avec l'ambition de notre pays. Je crois que nous avons su trouver l'équilibre.

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Nous en arrivons aux amendements.

Je suis saisie d'un amendement n° 9 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cet amendement vise à prévoir l'édiction d'un décret devant préciser le formalisme de la demande ainsi que le formalisme de son rejet éventuel et de l'indication des possibilités de recours.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

L'amendement tend à prévoir que le formalisme de la demande de formation professionnelle ou d'accompagnement vers l'emploi, son éventuel rejet, ainsi que l'indication des possibilités de recours de l'intéressé sont fixés par décret en Conseil d'État. Cette mesure ne ferait qu'alourdir la procédure. Elle limiterait aussi la liberté de gestion de cet outil par les services du ministère et, ce faisant, sa capacité à réguler les flux de départs des armées en fonction des besoins de celles-ci.

Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Instaurer l'obligation pour le gestionnaire de motiver ces décisions de rejet et d'indiquer les possibilités de recours reviendrait d'une part à instituer un droit opposable au dispositif d'évaluation, et d'autre part à placer ces dispositifs à un niveau juridique plus élevé que les autres outils d'accompagnement vers la vie civile.

Or, je vous le rappelle, aucun de ces outils n'est accessible de droit. Cette décision est prise par le gestionnaire, en fonction d'un certain nombre d'éléments, sans qu'il y ait besoin de motiver. Je pense que nous avons besoin d'un système et d'un dispositif souple, qui n'alourdisse pas la gestion quotidienne d'un ministère composé de 320 000 hommes et femmes, qui n'est pas une mince affaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Compte tenu des explications fournies, je retire l'amendement.

(L'amendement n° 9 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 10 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Il est nécessaire de prévoir ici la période maximale de fractionnement, mentionnée dans le présent article, avec l'objectif d'éviter tout abus.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

L'amendement tend à prévoir que le congé de reconversion de 120 jours ouvrés est fractionnable sur une période maximale de deux ans, afin d'éviter tout abus.

Une telle mesure serait donc contradictoire avec le dispositif prévu à l'alinéa 11 de l'article 1er qui prévoit que le militaire bénéficiant d'un congé de reconversion est radié des cadres ou rayé des comptes à titre définitif s'il n'a pas bénéficié du congé au plus tard deux ans après l'utilisation du quarantième jour de congé.

Ce dispositif donne davantage de liberté et de souplesse aux militaires bénéficiant d'un congé, tout en fixant une date butoir. À mon sens, il y a lieu de le maintenir ainsi. La commission est donc défavorable à votre amendement.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Je souhaite compléter les propos du rapporteur.

Porter cette mention au début de l'article aboutirait à annuler la possibilité de proroger cette durée dans le cas où le militaire aurait été envoyé en opération extérieure ou placé en congé maladie. Nous rendrions ainsi le dispositif plus compliqué à mettre en oeuvre. Je vous demande donc, monsieur le député, de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Je retire l'amendement.

(L'amendement n° 10 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 1 .

La parole est à M. Philippe Nauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nauche

L'amendement précise les termes employés à l'article 1er, qui traite, en effet, de deux congés de reconversion. Le premier est d'une durée de cent vingt jours ouvrés et le second de vingt jours ouvrés.

Appeler « congé de reconversion » un congé de très faible durée, comme celui-là, ne nous semble pas représentatif de ce qu'il est dans le monde de la formation professionnelle. C'est pourquoi nous proposons de substituer à l'alinéa 6 aux mots : « de reconversion » les mots : « d'adaptation ».

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

L'amendement tend à qualifier de congé d'adaptation le nouveau congé de reconversion de vingt jours ouvrés destiné aux volontaires ayant au moins quatre ans de service, pour le distinguer du congé de reconversion classique.

On invoque le fait qu'un congé court ne permettrait pas une authentique reconversion. Faut-il pour autant créer une nouvelle appellation pour ce congé, alors que, en dehors de la durée, son régime juridique est identique à celui du congé de reconversion classique et qu'il existe déjà au sein du dispositif de reconversion une vingtaine de prestations différentes ?

Je crains que cela ne soit justement une source de confusion et ne donne l'impression d'une prestation dévalorisée. Je rappelle en outre que certaines prestations réalisées dans le cadre du congé de reconversion classique pourront être effectuées dans celui du congé de reconversion de vingt jours ouvrés. C'est le cas de certains stages de formation ou cycles d'enseignement qui durent quelques jours, ou bien de la session de technique de recherche d'emploi, qui demande trois jours.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Je suis défavorable à un double titre. D'une part, cette dénomination pourrait être mal perçue par les personnes concernées par le dispositif car elle donne à penser qu'elles seraient inadaptées, inaptes à exercer leurs tâches. La formule relève plutôt du vocabulaire lié au handicap.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

D'autre part, une tel changement induirait une modification de l'ensemble du code et de notre dispositif législatif et réglementaire.

Avis défavorable donc.

(L'amendement n° 1 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 11 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cet amendement de précision vise à prévoir le montant de la réduction.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Votre amendement précise que la rémunération du bénéficiaire du congé de reconversion est réduite à due proportion lorsque celui-ci perçoit une rémunération publique ou privée.

Le dispositif actuel qui figure à l'article 4138-29 du code de la défense est plus favorable. Il prévoit en effet que si la rémunération civile du militaire excède la moitié de sa solde, celle-ci est diminuée d'un tiers. En revanche, si sa rémunération excède les deux tiers de sa solde, celle-ci est diminuée de moitié. Si, enfin, sa rémunération excède la totalité de sa solde, celle-ci est réduite des deux tiers.

Le but de ce régime est d'encourager à la reprise d'activité pendant le congé de reconversion. Réduire la solde à due proportion serait donc moins favorable aux militaires que le régime actuel et rendrait celui-ci moins attractif.

C'est pour ces raisons que la commission a émis un avis défavorable.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Même avis que la commission, au mot près !

(L'amendement n° 11 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 12 .

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cet amendement vise à prévoir la remise d'une attestation au terme de la formation professionnelle ou de l'accompagnement vers l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Cet amendement prévoit qu'au terme de la formation professionnelle ou de l'accompagnement vers l'emploi, une attestation relatant les actions entreprises, dont le contenu est fixé par décret, est remise à l'intéressé.

Cet ajout ne paraît pas nécessaire. D'une part, il alourdit la procédure. D'autre part, dans la mesure où les diverses formes de formation professionnelle – stages de formation, périodes de formation gratuite de l'entreprise, validation des acquis ou accompagnement direct vers l'emploi comme des sessions d'accompagnement vers l'entreprise ou des périodes d'adaptation à l'entreprise – donnent généralement lieu, en pratique, à la remise d'un certificat.

En tout état de cause, l'intéressé peut toujours demander aux services de Défense Mobilité de lui délivrer une attestation en ce sens.

Je suis confus, monsieur Decool, mais une fois encore, la commission a émis un avis défavorable.

(L'amendement n° 12 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 1er est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

La parole est à M. Philippe Nauche, inscrit sur l'article 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nauche

L'article 2 prévoit la création du congé pour création ou reprise d'entreprise, l'article 1er ayant prévu des dispositifs d'évaluation, d'orientation, de formation et d'accompagnement. Cela semble en effet intéressant pour préparer la reconversion.

Nous serons tous d'accord pour constater que dans un ministère tel que celui de la défense, la gestion des ressources humaines est un exercice extrêmement difficile d'autant que sa réforme est particulièrement complexe.

À la suite de cette réforme, conséquence directe de la RGPP, le ministère s'est engagé dans une politique de déflation des effectifs, fixée dans un premier temps à 54 000 personnels, chiffre qui, selon les termes de la loi de programmation militaire pour 2009-2014, doit être réexaminé en fonction du périmètre 2008.

Ce texte se justifie donc par l'immense plan de restructuration auquel le ministère doit se livrer. C'est l'un des outils mis à disposition. C'est à l'aune de l'importance de cette tâche – car le texte que nous examinons ce matin est loin d'être anodin – que j'exprimerai ma principale inquiétude, comme l'a fait Mme Adam à l'article 1er : elle porte sur les moyens affichés pour réaliser ces objectifs.

Selon le rapport d'information sur le contrôle et l'exécution des crédits de la défense que nous avons adopté, le plan de relance a permis de réaliser ce qui avait été initialement prévu et seulement cela, rien de plus. Le problème des recettes exceptionnelles est préoccupant, comme M. Cazeneuve l'a rappelé. Plus personne ne les espère avant 2014, notamment en matière de cessions immobilières. Pour ce qui concerne les fréquences, même si le dossier avance, on ne peut escompter aucune ressource cette année. Il en va de même pour les options satellitaires.

Les mesures annoncées sur le gel des dépenses publiques pour les trois ans à venir et la moins-value estimée à 3,5 millions d'euros sur la période 2011-2013 – en dépit de tous les efforts du ministre pour nous convaincre que tout allait bien – auront inéluctablement des conséquences sur les effectifs. Autrement dit, une réduction encore plus drastique que prévue.

Dans ces conditions, les objectifs du Livre blanc et de la loi de programmation miliaire ne pourront pas être tenus. Or la contrepartie de la suppression prévue des 54 000 emplois était l'assurance de la mise en oeuvre du Livre blanc et d'une modernisation des forces. S'il ne reste que les suppressions de postes et si la modernisation est laissée de côté, les lendemains seront difficiles.

En conclusion, je rappelle une question abordée en commission par ma collègue Françoise Olivier-Coupeau qui regrettait que, même si ce point figure dans l'arrêté du 10 juin 2009, la question de la valorisation des acquis de l'expérience ne soit pas reprise dans le texte de loi.

(L'article 2 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'une série d'amendements portant articles additionnels après l'article 2.

La parole est à M. le ministre pour soutenir l'amendement n° 14 .

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Cet amendement reprend une proposition de Philippe Folliot, qui avait été rejetée au titre de l'article 40.

Il s'agit de permettre aux militaires de bénéficier du statut d'auto-entrepreneur durant les deux dernières années de leur activité et de débuter ainsi leur reconversion.

(L'amendement n° 14 deuxième rectification, accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 4 .

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

L'article L. 405 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre dispose que le candidat aux emplois réservés effectue son stage en position de détachement. Toutefois, le renvoi au détachement de droit commun n'est pas adapté.

En effet, ces dispositions, qui ne permettent pas de garantir la rémunération durant le détachement, constituent un obstacle au recrutement de certains militaires en raison du classement de l'intéressé à un indice très supérieur à celui du corps d'accueil.

Notre amendement permet d'adapter une prime permettant aux militaires qui intègrent la fonction publique de pouvoir compenser le différentiel de rémunération entre la solde et le traitement.

(L'amendement n° 4 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 3 .

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Cet amendement permettra aux volontaires – pour l'essentiel il concerne donc la gendarmerie, car il n'y a que quelque 1000 à 2000 volontaires dans l'armée de terre – d'accéder aux emplois réservés au-delà de la période de cinq ans. Cette disposition introduit un peu de souplesse.

(L'amendement n° 3 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Il est proposé que la liste des établissements restructurés permettant d'ouvrir un mode d'accès supplémentaire aux emplois réservés soit fixée non plus par décret, mais par arrêté du ministre compétent, afin d'éviter les procédures interministérielles toujours extrêmement longues.

(L'amendement n° 7 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 5 .

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Le personnel des établissements publics du ministère de la défense doivent pouvoir bénéficier des mêmes possibilités de mise à disposition que le personnel directement employé par le ministère.

(L'amendement n° 5 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 6 .

La parole est à M. le ministre.

Debut de section - PermalienHervé Morin, ministre de la défense

L'amendement a pour objet de préciser les conditions du recours à la mise à la disposition du personnel du ministère de la défense prévu par l'article 43 de la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique.

Le personnel du ministère de la défense dont l'activité est confiée à un prestataire privé au titre d'un contrat de partenariat doit pouvoir bénéficier des mêmes possibilités de mise à disposition que le personnel dont l'activité est externalisée au titre d'un autre mode contractuel.

(L'amendement n° 6 , accepté par la commission, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je suis saisie d'un amendement n° 2 .

La parole est à M. Philippe Nauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nauche

Amendement de cohérence avec notre amendement n° 1 qui a été repoussé.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Mach

Avec la même cohérence, la commission a rejeté cet amendement.

(L'amendement n° 2 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Danielle Bousquet

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Vote solennel sur le projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche ;

Déclaration du Gouvernement sur les finances publiques ; débat et vote sur cette déclaration.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma