Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Séance du 25 janvier 2012 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • air
  • aérien
  • aéroport
  • compagnie
  • compagnies aériennes
  • cost
  • courrier
  • court
  • passager

La séance

Source

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a entendu M. Alexandre de Juniac, président-directeur général d'Air France.

PermalienPhoto de Serge Grouard

Je souhaite, en notre nom à tous, la bienvenue à M. Alexandre de Juniac, qui a été nommé président-directeur général d'Air France en novembre dernier. Son audition me paraît particulièrement importante dans le contexte actuel. Nous souhaiterions, en effet, recueillir des informations sur la situation, notamment financière, du groupe Air France-KLM et sur le plan de restructuration de l'entreprise pour les années 2012 à 2014, tel qu'approuvé par le conseil d'administration du 12 janvier dernier.

Air France constitue, depuis longtemps, un des fleurons de l'économie française. Comment la compagnie nationale traverse-t-elle l'actuelle zone de turbulences et s'adapte-t-elle à l'évolution internationale du transport aérien, soumis à une forte concurrence ?

J'ajoute qu'une mission d'information de notre commission a rendu ses conclusions en novembre dernier sur la question de la sûreté du transport aérien et que nous avons eu hier un débat sur le sujet connexe des aéroports.

PermalienAlexandre de Juniac

Avant d'aborder les deux grands thèmes mentionnés par le président de la Commission, je voudrais évoquer le contexte dans lequel nous nous situons.

Le secteur du transport aérien présente trois caractéristiques principales.

Il est à la fois très capitalistique, compte tenu notamment du coût extrêmement élevé des avions et des infrastructures, et s'organise néanmoins autour d'entreprises de main-d'oeuvre et de services. On pourrait en déduire que les barrières à l'entrée de ce marché sont très élevées, or il n'en est rien : il est très facile de créer une compagnie aérienne.

Deuxième caractéristique : la concurrence y est extrêmement vive, s'exerçant, pour Air France-KLM, à la fois par le haut, sur les longs courriers et les prestations de haut de gamme – je pense notamment aux compagnies du Golfe Persique et aux compagnies asiatiques –, ainsi que par le bas, sur les réseaux des courts et des moyens courriers où se sont développées, partout dans le monde et particulièrement en France, des compagnies dites low cost.

Enfin, cette concurrence est mondiale, non seulement du fait des dimensions du marché mais également des modes opératoires, des règlementations et des statuts sociaux mis directement en compétition les uns avec les autres. Ainsi, les hôtesses, pilotes et stewards d'Air France sont confrontés à la concurrence des mêmes professions dans les autres compagnies internationales, qu'il s'agisse, par exemple, d'Emirates, de China Southern ou de Delta Airlines.

Sur ces éléments structurels s'est greffée la crise économique que nous subissons depuis 2008, qui explique notre situation financière très tendue. Elle justifie la mise en place du plan « TransForm 2015 ». La rentabilité d'Air France s'est considérablement dégradée. Le groupe Air France-KLM – et Air France en particulier – connaît, pour la quatrième année consécutive, un résultat d'exploitation sensiblement négatif, de plusieurs centaines de millions d'euros pour le moins, bien que les comptes de 2011 ne soient pas encore définitivement établis : en cours de certification, ils seront présentés au conseil d'administration en mars prochain et à l'assemblée générale au mois de mai ou de juin.

À cela s'ajoute une dette financière nette qui s'est creusée en raison de l'incapacité de notre groupe, depuis trois ans, à financer ses investissements car il ne dégage pas le cash flow nécessaire pour cela. Son endettement financier net est ainsi passé de 4,5 milliards à 6,5 milliards d'euros, alors qu'il s'élevait à 2,5 milliards en 2007. Encore ce montant ne comprend-t-il pas les sommes versées au titre des ventes et des locations d'appareils effectuées pour une partie de notre flotte. Si on l'intégrait cet élément, notre dette totale s'établirait entre 11 et 12 milliards d'euros.

Une telle situation a justifié le lancement, en janvier de cette année, du plan dit « TransForm 2015 », selon trois objectifs fixés par le conseil d'administration du groupe : la restauration de notre compétitivité ; la restructuration de notre réseau de courts et de moyens courriers, qui concentre l'essentiel des pertes de l'entreprise ; enfin, la réduction du montant de notre dette de 6,5 à 4,5 milliards d'euros pour 2014.

Le plan se décline pour chacune des deux compagnies, en vue de rétablir leur capacité d'autofinancement, à hauteur de 2 milliards pour Air France et de près de 900 millions pour KLM, correspondant au poids relatif de chaque entreprise. Le montant total de l'enveloppe est donc supérieur à celui du désendettement programmé car il intègre aussi des provisions pour aléas conjoncturels, portant par exemple sur le prix du pétrole. Je rappelle qu'un tiers de nos charges d'exploitation est imputable au coût du kérosène.

Le plan respecte trois principes : l'équité entre les deux compagnies du groupe et au sein de chacune d'elles, pour les différentes catégories de personnels et les différents facteurs de performance des entreprises ; la préservation de l'outil de production, à travers des installations industrielles du meilleur niveau qu'il m'a été donné de connaître et de la qualité de la flotte ; enfin, le maintien de nos investissements pour la sécurité des vols et des conditions de travail – de tels sujets ne sauraient en effet supporter de compromis.

Le plan comprend deux phases : l'une annoncée en janvier de cette année et l'autre probablement présentée aux alentours de juin prochain. La première comporte des mesures immédiatement applicables. Il s'agit, en premier lieu, de la réduction de la flotte et de la diminution des investissements, pour 330 millions d'euros ; en deuxième lieu, de dispositions conjoncturelles, car n'ayant pas vocation à durer et portant essentiellement sur la maîtrise de la masse salariale, pour 490 millions d'euros – si la situation de l'entreprise se rétablit, le gel des rémunérations sera bien sûr abandonné car il deviendrait contreproductif ; en troisième lieu, des mesures structurelles qui, elles, ont vocation à perdurer, portant sur des économies de carburant, de frais généraux, de dépenses diverses, pour environ 400 millions d'euros. Le total des mesures correspondantes s'élève donc à un peu moins de 1,2 milliard d'euros.

La deuxième phase, pour 800 millions d'euros, visera à transformer l'entreprise par une réforme de son organisation et de ses méthodes de travail, c'est-à-dire la façon dont nous faisons fonctionner nos avions et nos services. Elle impliquera une restructuration de notre réseau de courts et de moyens courriers, une amélioration de nos performances sur les longs courriers, une révision de notre gestion des cargos et du fret, ainsi que des aménagements touchant l'ingénierie et la maintenance – qui constituent notre quatrième métier, exercé pour notre propre compte comme pour des clients extérieurs.

Nous ouvrirons aussi trois chantiers transversaux. Le premier, relatif à la productivité et à l'efficacité de nos méthodes de production, nécessitera un travail de longue haleine, de plusieurs mois, en collaboration avec les organisations syndicales et avec les salariés, afin notamment de renégocier un certain nombre de conventions et d'accords collectifs. Le deuxième concerne le management et l'organisation de l'entreprise elle-même afin de les simplifier et de les rapprocher des personnels. Le troisième vise les produits et les clients, avec pour objectif de remonter vers le haut de gamme les prestations proposées sous la marque Air France. Nous réaliserons pour cela d'importants investissements, aussi bien pour les courts que pour les moyens et longs courriers, sans préjudice de la façon dont nous aborderons la concurrence des low cost.

La conduite de ces chantiers donnera lieu à une communication générale suivie d'une mise en oeuvre à partir du mois de mai prochain, ou plus tôt si certaines mesures s'avèrent réalisables dès le mois de mars.

Nous sommes optimistes quant à la réussite de ce plan, la mobilisation des salariés d'Air France – mais c'est aussi le cas de ceux de KLM – étant très grande, comme leur attachement à leur maison. La volonté de sortir le groupe de son ornière financière est partagée par tous.

PermalienPhoto de Yanick Paternotte

Air France se trouve aujourd'hui confrontée à la fois à des problèmes de structure et à des difficultés conjoncturelles.

Les compagnies low cost attaquent l'entreprise sur le segment des courts et des moyens courriers, tandis que les compagnies du golfe persique la concurrencent sur celui des longs courriers.

S'agissant du marché intérieur, qu'en est-il de la stratégie des bases de province ? Celle de Marseille a été ouverte en octobre dernier ; celles de Toulouse et de Nice vont suivre au printemps prochain ; une quatrième est prévue. Disposez-vous déjà d'un retour d'expérience pour la première, étant rappelé que les objectifs consistaient à obtenir des gains de productivité de 15 %, à ouvrir de nouvelles lignes et à attirer de nouveaux passagers, bref à accroître votre chiffre d'affaires en face d'une diminution des coûts opérationnels ?

Les longs courriers subissent notamment la concurrence de la compagnie Emirates. Tandis que celle-ci commandait 90 Airbus A 380, les commandes cumulées de British Airways, de Lufthansa et du groupe Air France-KLM atteignaient seulement 42 exemplaires, ce qui traduit une volonté de conquête manifeste de la part du Proche-Orient fortuné.

Depuis le 1er janvier de cette année, les quotas d'émission de gaz carbonique s'appliquent aux compagnies aériennes de l'Union européenne en vertu d'une directive de 2008, judiciairement confirmée. Les Américains et les Chinois ont fait part, pour le moins, de leurs réserves. Ne risque-t-on pas, là aussi, de souffrir d'incidences négatives pour la compétitivité des compagnies européennes vis-à-vis de celles du golfe persique, d'Amérique du nord et de Chine ?

Votre prédécesseur nous avait présenté la différence de coût, pour une compagnie aérienne, selon qu'on l'immatricule en France plutôt qu'à Amsterdam ou à Berlin. Là-bas, les charges seraient globalement inférieures de 400 à 700 millions d'euros. Une certaine forme de délocalisation ferait-elle partie de vos pistes de réflexion ou une telle formule se trouve-t-elle complètement exclue ?

Parmi vos contraintes sociales, figure celle de votre caisse de retraite, dont le coût est à la fois important et latent compte tenu de l'évolution de votre démographie d'entreprise. Comment la prenez-vous en compte ?

Nous avions eu avec votre prédécesseur, Pierre-Henri Gourgeon, une discussion sur les commandes groupées d'Air France et de KLM, notamment à propos de celles de l'Airbus A 350, ainsi qu'un débat sur les relations engagées avec Rolls Royce pour la maintenance du moteur Trent 1000. Selon la presse, les discussions seraient au point mort. Qu'en est-il en réalité ? La politique de commandes d'Airbus A 350-900 par Air France-KLM pourrait s'en trouvée perturbée, alors que vous avez évoqué celle-ci parmi les voies de redressement de votre groupe.

PermalienPhoto de Jean-Paul Chanteguet

Vous avez, monsieur le président, parlé de plan de transformation plutôt que de redressement ou de restructuration. Que signifie ce choix de terminologie ?

Parmi les objectifs que vous avez fixés, pourriez-vous nous apporter des précisions concernant le retour à l'équilibre de l'activité des courts et des moyens courriers ? Il semblerait qu'elle soit déficitaire d'environ 700 millions d'euros en 2011.

Pouvez-vous aussi nous fournir davantage d'informations sur la dénonciation des accords collectifs organisant le travail des personnels navigants d'Air France ?

Notre commission suit tout particulièrement la question du réchauffement climatique. Depuis le 1er janvier dernier, les compagnies aériennes sont soumises au marché des quotas d'émission de gaz à effet de serre, spécialement de gaz carbonique. Comment Air France va-t-elle faire face à cette nouvelle contrainte, quand on sait que les compagnies aériennes devront acheter 15 % de ces quotas ? Votre entreprise envisage-t-elle d'acquérir des quotas par anticipation, le prix de la tonne de carbone étant en ce moment particulièrement bas, de l'ordre de 7 à 8 euros ?

Avez-vous établi une évolution prévisionnelle de l'incidence des quotas vous concernant puisque ceux-ci doivent diminuer chaque année ? Quelle en sera, pour Air France, la conséquence financière et quelle répercussion faut-il en attendre sur le prix des billets d'avion ?

Le transport aérien représentant aujourd'hui 2 à 3 % des émissions de gaz à effet de serre et le trafic aérien européen augmentant de 5 % par an, comment améliorer son efficacité énergétique ? Les compagnies européennes ont noué un partenariat entre secteur public et secteur privé afin de travailler dans ce sens et ont arrêté ensemble un objectif particulièrement ambitieux puisqu'il vise, à l'horizon de 2020, une réduction de 50 % des émissions de gaz carbonique dans le transport aérien : quelles mesures envisagez-vous de prendre pour l'atteindre ?

PermalienPhoto de Stéphane Demilly

Votre stratégie économique s'insère dans un marché que vous jugez très concurrentiel, à la fois vers le bas et vers le haut.

En bas, les compagnies low cost empiètent sur votre clientèle de courts et moyens courriers, segments de marché au sein desquels vous perdez beaucoup d'argent. Comment voyez-vous l'avenir dans ce domaine et comment envisagez-vous la riposte ? Allez-vous accentuer votre présence sur le marché du transport aérien à bas prix au travers de filiales ? D'autres initiatives sont-elles imaginables ?

En haut, la comparaison avec Lufthansa, qui repose sur le même modèle économique qu'Air France et subit donc les mêmes contraintes, montre que cette compagnie est très profitable. Comment expliquer cet écart ? Faut-il prendre en compte les différences de coûts de production au sol ?

Depuis toujours Air France assure elle-même la maintenance de ses appareils et sa filiale Air France Industries en commercialise le savoir-faire. Vos sites de maintenance sont, je crois, en France au nombre de quatre : Roissy–Charles-de-Gaulle, Orly, Toulouse-Blagnac et Le Bourget-Villeneuve-le-roi pour l'entretien des composants. Leur implantation est donc principalement francilienne. Air France envisage-t-elle de jouer, elle aussi, les cartes de la décentralisation et de la proximité, ainsi qu'elle l'a fait dans d'autres domaines ?

Vous avez indiqué qu'un tiers de vos coûts provenait de l'achat de kérosène. Prévoyez-vous le recours à des carburants alternatifs, en particulier aux biocarburants ? Un vol ainsi alimenté a été expérimenté entre Toulouse et Orly le 13 octobre dernier et s'est avéré une remarquable réussite au titre du développement durable : il a permis une réduction de moitié des émissions de gaz carbonique par passager et par kilomètre, soit 54 grammes. Avez-vous fixé des objectifs précis en la matière ?

PermalienPhoto de André Chassaigne

Le plan de restructuration d'Air France emporte des conséquences non négligeables pour les salariés : un millier de suppressions d'emplois, par le non remplacement des départs en retraite et le gel des embauches ; le blocage des salaires, voire leur diminution de fait par le « cadeau » de certains congés payés. Le coût social est donc sévère ; il entraînera aussi des conséquences pour les usagers. Ceux-ci déplorent déjà une baisse de la qualité des services, à travers la disparition de bureaux de proximité, comme c'est le cas à Clermont-Ferrand-Aulnat, ou l'annulation de vols, provoquant durant toute une journée des attentes aux aéroports sans proposition de solution de substitution.

Vous avez parlé d'équité. Or une menace pèse sur certaines entreprises régionales filiales d'Air France, notamment celles qui assurent des tâches de maintenance, comme l'entreprise de Clermont-Ferrand qui emploie environ 350 personnes en équivalents temps plein. Une grande inquiétude se manifeste pour son avenir alors que d'importants investissements ont été réalisés avec le concours financier des collectivités locales, dont la région, à hauteur de 10 %. L'opération devait s'accompagner de la création d'une quarantaine de postes, d'une extension du site et d'une augmentation de l'activité. On dresse plutôt le constat inverse aujourd'hui.

Dans votre stratégie d'acquisition d'avions, vous avez parfois procédé à des choix contestables, notamment à l'achat d'avions Bombardier terriblement inconfortables. La qualité du service s'en trouve ainsi dégradée.

PermalienPhoto de Didier Gonzales

En tant que député d'une circonscription qui, étant la plus survolée de France, connaît bien votre belle maison, et maire d'une commune, Villeneuve-le-roi, qui héberge le centre EOLE d'Air France Industries – ce dont nous sommes très fiers –, je m'intéresse tout naturellement au transport aérien.

Dévoilés la semaine dernière par Aéroports de Paris (ADP), les chiffres records du trafic aérien confirment la tendance à une hausse continue : les experts en prévoient le doublement d'ici à 2030. Comment notre compagnie nationale appréhende-t-elle l'avenir des capacités aéroportuaires en Île-de-France, sachant notamment que la plateforme d'Orly est déjà saturée ? Certaines capitales européennes, comme Oslo ou Berlin, ont déjà « relocalisé » des aéroports trop enclavés en agglomération. Londres réfléchit à cette formule. Avez-vous une position sur cette perspective d'aménagement à long terme ?

PermalienPhoto de Geneviève Gaillard

Votre plan de redressement comporte une réduction de la flotte et des investissements. Quelle est la portée concrète de cette orientation et quel en sera l'impact sur votre clientèle ?

Votre compagnie déverse tous les ans des millions de personnes dans des pays aux écosystèmes parfois fragiles, sans jamais en informer ses passagers. Or l'afflux de touristes provoque souvent des dégâts environnementaux. La protection des espaces et des espèces devrait davantage être prise en compte par les compagnies aériennes, ce qui exigerait, de leur part, une bonne information du public. Air France ne devrait-elle pas profiter de ses longs courriers pour fournir aux voyageurs des indications sur les caractéristiques naturelles des pays, ou des territoires, où ils vont débarquer et qu'il convient de préserver ? Je pense, par exemple, au massif corallien de Mayotte…

PermalienPhoto de Yves Albarello

Pour que le plan « TransForm 2015 » réussisse et qu'Air France restaure sa compétitivité, sans doute faut-il, au delà des économies à réaliser, tabler sur une reprise de l'activité commerciale. Sur quel taux d'augmentation du trafic avez-vous basé vos prévisions ?

La convergence franco-allemande étant, plus que jamais, à l'ordre du jour, comment expliquer un écart aussi important dans la diminution des cours de bourse de Lufthansa et d'Air France, le premier ayant chuté de 35 % et le second de 55 % ?

Vous devrez accomplir d'importants progrès pour améliorer la qualité de vos services. Quand les réclamations se multiplient, c'est que le problème est réel et nécessite d'être traité à la source ; or, c'est le cas des services offerts par Air France, qui, comparés à ceux de compagnies concurrentes, souffrent d'importantes lacunes. La reconquête de la clientèle passe aussi par un effort important dans ce domaine.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

Au nom de notre collègue Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, qui a dû s'absenter, je voudrais évoquer le problème de la liaison aérienne entre Limoges et Paris, qui existait depuis les années trente en empruntant la ligne de Toulouse. Depuis 1973 et la création de l'aéroport de Limoges-Bellegarde, elle fonctionne sans interruption à destination d'Orly. Or, par lettre du 30 décembre dernier, la compagnie qui l'exploite, Air Linair, a annoncé sa fermeture pour le 2 juillet prochain alors que le trafic et les coefficients de remplissage augmentent.

Air France a progressivement racheté les compagnies aériennes régionales françaises, notamment Air Inter, Brit Air, Flandre Air, Proteus Airlines. Elle exerce également un contrôle sur des compagnies telles que Air Linair, détenue à 40 % par Brit Air et réalisant plus de la moitié de son chiffre d'affaires à travers Air France. Pour des territoires comme le Limousin, et plus particulièrement le département de la Haute-Vienne, la stratégie de la compagnie nationale conduit, de façon incompréhensible, à la disparition de liaisons aériennes vitales. Ainsi, la fermeture annoncée de la ligne Limoges–Paris-Orly, pourtant subventionnée à hauteur de 2,5 millions d'euros par an depuis 2010, traduit le désengagement d'Air France du territoire français alors que l'État reste son actionnaire de référence. Cela paraît inacceptable au regard de l'aménagement du territoire, quand les collectivités territoriales ne cessent de s'engager financièrement. Entendez-vous donc revenir sur cette funeste décision ?

PermalienPhoto de Bertrand Pancher

Je voudrais approfondir la question de notre collègue Jean-Paul Chanteguet sur les objectifs environnementaux d'Air France, notamment pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la diminution du bruit.

Le groupe Safran a déjà enregistré 3 000 commandes de moteurs d'avions de nouvelle génération, livrables en 2015. Moins bruyants, ils consomment également 15 % de kérosène de moins que les moteurs actuels. La révision du plan d'investissements d'Air France en tient-elle compte ?

M. André Chassaigne s'est inquiété des suppressions d'emplois. Pouvez-vous nous éclairer sur les rémunérations actuelles par catégories de personnels et les comparer avec celles pratiquées par les compagnies aériennes occidentales concurrentes ?

PermalienPhoto de Charles de Courson

Air France est absente du marché low cost. Tous vos prédécesseurs considéraient que, notamment, son organisation sociale et le niveau de ses salaires l'en empêchaient. Or ce marché représentera dans dix ans la moitié des moyens courriers, et c'est déjà le cas dans quelques pays. Quelles mesures entendez donc vous prendre pour faire face à cette évolution ? Maintenez-vous la stratégie consistant à s'exclure d'un segment aussi prometteur ? L'idée d'une filialisation, que je défends depuis des années, vous paraît-elle maintenant envisageable ?

De même que les moyens courriers, le fret est devenu un gouffre financier pour Air France. Lors de la deuxième phase de votre plan, quelles mesures structurelles prévoyez-vous pour tenter d'améliorer la situation ?

En quoi ses alliances internationales, comme par exemple celle nouée avec Alitalia, peuvent-elles contribuer au redressement d'Air France ?

PermalienPhoto de Christophe Bouillon

Le plan d'économies d'urgence résulte largement, selon vos propos, de la crise de 2008. Mais n'a-t-on pas, depuis lors, capté d'autres signaux d'alarme ? Quelle est aujourd'hui la situation des concurrents d'Air France ayant dû, eux aussi, mettre en place des plans d'économies ? Votre horizon de redressement est fixé pour 2015. Quel est celui des compagnies aériennes comparables ?

Les innovations en faveur du développement durable dans le transport aérien passent par l'utilisation de moteurs consommant moins et le recours aux biocarburants. Votre plan remet-il en cause, ou non, les perspectives dessinées en la matière par votre prédécesseur ?

Quel est aujourd'hui le classement du groupe Air France-KLM parmi les grandes compagnies aériennes internationales ? Vous êtes-vous fixé un objectif à ce titre ?

Quelle part représente le fret dans le chiffre d'affaires d'Air France et comme facteur de dégradation de sa rentabilité ?

PermalienPhoto de Jérôme Bignon

Monsieur le président-directeur général, redressement rime-t-il avec dessertes du territoire national, de la Corse – qui dispose d'une desserte spécifique avec une autre compagnie –, mais aussi de l'outre-mer français ?

Qu'en est-il de vos liens avec les gestionnaires d'aéroports ? À mon sens, la dégradation du service est en partie liée aux conditions d'accès aux plateformes aéroportuaires, mais aussi d'accueil dans les aéroports. L'hégémonie d'Air France dans un aéroport amène souvent à la confondre avec le gestionnaire de l'aéroport. En la matière, des progrès importants sont indispensables en termes d'identification et de différenciation, mais aussi de qualité du service à l'usager.

Pouvez-vous nous indiquer votre position sur l'implantation ou l'agrandissement de plateformes, en particulier sur le projet de futur aéroport à Notre-Dame-des-Landes, qui ne suscite aucune polémique ? (Rires)

Enfin, comme vous le savez, quatre lignes à grande vitesse sont en cours de réalisation. La desserte de Toulouse, par exemple, par Air France pourrait-elle être remise en cause du fait d'une LGV qui irait à Toulouse ?

PermalienPhoto de Christophe Caresche

La proposition de loi sur l'encadrement du droit de grève dans le transport aérien, votée hier soir par notre assemblée, vous paraît-elle utile ? Ne craignez-vous pas le mouvement de grève annoncé pour le mois de février dans l'hypothèse où elle serait adoptée définitivement ?

PermalienPhoto de Jean-Marie Sermier

Monsieur le président-directeur général, selon vous, cette proposition de loi constituera-t-elle une avancée significative pour les voyageurs ?

Par ailleurs, le coût pour Air France des grèves de 2011 a-t-il été évalué ?

Enfin, quelle sera votre stratégie dans les mois à venir face à la flambée du prix du kérosène ?

PermalienPhoto de Jean-Michel Boucheron

Le résultat d'exploitation de la compagnie est négatif depuis le début de la crise, avez-vous déclaré. Pourquoi alors avoir attendu quatre ans pour mettre en place ce plan ?

Vous avez annoncé que des mesures de grande ampleur, conjoncturelles et structurelles, seraient mises en oeuvre à travers votre plan. Quand les premiers résultats se feront-ils sentir ? Et à quelle date pensez-vous retrouver une capacité financière qui permette de financer les investissements de l'entreprise ?

PermalienPhoto de Daniel Goldberg

N'en doutons pas, le vote de la proposition de loi sur l'organisation du service et l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien entraînera le mouvement de grève annoncé, du 6 au 9 février.

Monsieur le président-directeur général, connaissez-vous le nombre de passagers bloqués dans les aéroports pour cause de mouvement social et le nombre de ceux qui le sont pour cause d'aléas climatiques ou techniques ?

L'accord signé en 2008 sur la concertation et la prévention des conflits à Air France a-t-il d'ores et déjà donné des résultats ? Au vu du débat social préexistant dans l'entreprise, nécessitait-il un passage par la loi ?

Le dispositif prévu par la proposition de loi vous paraît-il applicable pour l'ensemble du secteur aérien ?

Enfin, si le droit d'information des passagers en cas de mouvement social est essentiel, qu'en est-il de ce même droit dans tous les autres cas ?

PermalienPhoto de Jacques Le Nay

L'arrivée des lignes à grande vitesse dans certaines régions posera sans aucun doute de sérieux problèmes en termes de concurrence. Dans ces conditions, craignez-vous une diminution de vos dessertes, par exemple vers Lorient, Quimper ou Brest, et une incidence sur le coût du transport pour les passagers ?

PermalienAlexandre de Juniac

La première base de province que nous avons lancée, celle de Marseille, est d'ores et déjà opérationnelle. Deux nouvelles bases, à Toulouse et à Nice, ont été lancées en avril, et les réservations ont été ouvertes en décembre. Pour Marseille, les premiers résultats en termes d'exploitation sont conformes au plan – les réservations sont correctes et le taux de remplissage est supérieur à 50 %. Pour l'instant, les réservations d'été, notamment avec les tour-opérateurs, sont bonnes. Nous sommes donc optimistes.

Nos avions affectés aux bases de province opèrent sur la base de onze heures et demie par jour – à comparer à une base de huit heures et quart en moyenne pour les courts et moyens courriers. L'écart est considérable.

Au sein de la base de Marseille, l'atmosphère est excellente : un esprit PME s'y est créé, et on a compté un seul gréviste lors du mouvement social du personnel navigant commercial (PNC) à la fin du mois d'octobre 2011.

Nos bases de province nous ont permis de faire preuve de réactivité : il faut en effet savoir – et nous l'avons appris des low cost – ouvrir ou fermer des lignes très rapidement.

S'agissant des compagnies du Golfe, leur concurrence nous fait beaucoup de mal, notamment sur les lignes Asie-Europe et Asie-Afrique. En effet, elles n'ont pas les mêmes contraintes économiques et financières que nous en matière sociale et salariale, et certaines d'entre elles ne publient pas de comptes. De plus, elles mettent en place des capacités extrêmement lourdes et ininterrompues dans des conditions qui, à notre avis, déstabilisent le marché – autrement dit, qui font baisser les prix.

En ce qui concerne l'application aux compagnies aériennes européennes du système d'échange de quotas d'émission, la directive ETS (emissions trading system) est entrée en vigueur le 1er janvier 2012. L'impact est de l'ordre de 70 millions d'euros par an pour le groupe Air France-KLM, qui estime devoir contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et donc à tout dispositif allant dans ce sens. Nous avons suggéré que l'ensemble des vols intra-européens et des survols européens, y compris ceux des compagnies non européennes, soient soumis aux ETS, mais cette proposition a reçu un accueil défavorable de la part des compagnies américaines, asiatiques et du Golfe. Notre compagnie se trouvant dans une situation financière difficile, l'application du dispositif ne lui est pas favorable – nous aurions préféré un moratoire de deux à trois ans afin de lui permettre de rétablir sa situation financière. Néanmoins, nous l'appliquerons ; nous avons d'ailleurs commencé à acheter des quotas sur le marché des émissions, et sommes devenus partenaires de BlueNext.

Philippe Calavia, directeur général délégué économie et finances. Dès le début, Air France s'est engagée, par la voix de son ancien président, Jean-Cyril Spinetta, en faveur du système des permis d'émission. Elle a ainsi convaincu un certain nombre de ses partenaires européens, notamment les Allemands qui y étaient farouchement opposés, pour que l'Association des compagnies aériennes européennes (AEA) accepte ce système. Toutefois, si ce dernier n'est pas appliqué par tout le monde, il sera très préjudiciable aux intérêts économiques des compagnies européennes, mais très favorable à celles du Golfe : ainsi, il permettra d'accentuer le mouvement de contournement de l'Europe pour les passagers venant d'Asie et se rendant en Amérique du Nord, par exemple, dont le développement s'est réalisé, ces dernières années, grâce à la puissance financière des États du Golfe – qui soutiennent leurs compagnies.

Or si les compagnies européennes sont les seules à devoir contribuer au financement d'une partie de leurs émissions, la délocalisation du trafic et, à terme, des emplois deviendra inéluctable. Il est donc très important pour nous que l'Europe parvienne à convaincre les acteurs des autres zones géographiques de la nécessité d'instituer des systèmes équivalents ou de trouver un compromis permettant à tout le monde d'être sur un pied d'égalité. Faute de quoi, la perte d'influence des grandes compagnies européennes ne fera que s'accélérer – les trois grandes compagnies européennes, qui sont les premières compagnies au monde en termes de trafic mondial, sont de plus en plus talonnées par Emirates, qui se placera parmi les trois premières dans quelques années.

Cela étant dit, nous nous conformons à la directive. Cette année, nous devons acheter environ 25 % de nos permis, mais ce pourcentage va progressivement augmenter pour s'établir à 40 % à l'horizon de quelques années. L'échange d'émissions de CO2 est malheureusement devenu un marché financier, au même titre que celui du carburant, qui pour nous, n'est plus un marché de matières premières mais un marché purement financier dont les hedge funds sont les principaux acteurs, prenant des positions à la hausse ou à la baisse – mais, ça, on fait semblant de ne pas s'en apercevoir… Dans ce type de marché, n'importe quel acteur financier peut intervenir, d'où une probable spéculation sur les prix dans un proche avenir. Pour intervenir, il faut être partenaire d'une plateforme, et, pour notre part, nous sommes partenaire de BlueNext et nous intervenons, d'autant que le prix de la tonne de CO2est très bas – aux alentours de 10 euros.

Si, aujourd'hui, le coût est relativement modeste pour le groupe – 40 millions pour Air France et 30 millions pour KLM –, il va croître inéluctablement dans les années à venir. L'honnêteté et le souci de transparence obligent à dire que la dépense complémentaire sera répercutée sur le client soit à travers un système de surcharge, soit par le biais des tarifs – de la même manière que nous répercutons en partie sur le client le surcoût du carburant lorsqu'il atteint des niveaux très élevés comme c'est le cas aujourd'hui.

On peut néanmoins espérer que le produit récupéré par les États, notamment par le biais des mises aux enchères, servira à améliorer l'efficacité de l'écosystème du transport aérien – avions, contrôle aérien, etc. –, de manière à réduire les temps d'attente, à accélérer la fluidité et, ainsi, à réduire les émissions.

L'effort principal pour la réduction des gaz à effet de serre dans le transport aérien ne pourra pas être fourni par les compagnies aériennes : il doit d'abord l'être par les constructeurs d'avions et les motoristes, dont les moyens en la matière sont largement supérieurs à ceux des compagnies. C'est d'eux que dépendra l'efficacité des avions actuels et futurs – je pense aussi bien aux moteurs, qu'aux voilures ou aux matériaux utilisés. D'ores et déjà, les motoristes ont consenti des efforts considérables visant à diminuer les nuisances sonores – comme ils l'ont fait pour la consommation de carburant. Il leur revient aujourd'hui d'accomplir des efforts en matière de recherche pour réduire davantage encore la consommation de kérosène ou promouvoir l'utilisation de nouveaux carburants – biocarburant, carburant de synthèse. En la matière, il faudra néanmoins que le modèle économique soit tenable, ce qui n'est pas encore le cas : Lufthansa a d'ailleurs décidé de mettre un terme à ses vols expérimentaux avec du biocarburant. Faute d'un système public rendant ces biocarburants accessibles en termes financiers, les compagnies ne peuvent que se rabattre sur le carburant classique.

PermalienAlexandre de Juniac

En matière de charges, les différences entre les deux compagnies du groupe et Lufthansa portent principalement soit sur le financement des retraites, soit sur le financement de la branche famille – 300 millions pour KLM, 700 millions pour Lufthansa –, le mode de financement étant assis chez nous sur les salaires.

Nous avons commandé un nombre équivalent de Boeing 787, dit dreamliner, et d'Airbus A 350. Le contrat Boeing est signé, et celui pour l'A350, en cours de négociation, le sera dans les prochaines semaines. Cet Airbus est équipé de moteurs Rolls-Royce, pour la maintenance desquels nous sommes en négociation avec le motoriste. Les Boeing n'arriveront dans la flotte Air France qu'à partir de 2016, et les A 350 à partir de 2018.

Si je parle de « plan de transformation », c'est parce qu'il s'agit de transformer la maison pour l'adapter aux nouvelles réalités économiques – il ne s'agit pas simplement d'une restructuration sociale.

Le réseau des courts et des moyens courriers est censé revenir à l'équilibre à l'horizon du plan 2014. Il faut distinguer, d'une part, le réseau dit « point à point », principalement animé par les bases de province et par Orly, et, d'autre part, le réseau d'alimentation du hub qui, depuis la France ou l'Europe, ramène les passagers sur le hub de Roissy pour qu'ils prennent un long courrier. Le réseau d'alimentation du hub est très déficitaire, tandis que le réseau point à point est déficitaire, mais à un moindre degré – le rapport est d'environ 1 à 5. Or si l'on peut tolérer une légère perte sur le premier – puisque nous gagnons de l'argent sur le long courrier, l'investissement étant de type commercial –, on ne le peut pas pour le second. Par conséquent, notre objectif est de ramener le réseau point à point à l'équilibre à la fin de l'année 2013, et l'ensemble du réseau court et moyen-courrier à l'équilibre en 2014 afin qu'il dégage des profits en 2015.

En ce qui concerne les low cost, personne dans les compagnies historiques, que ce soit British Airways, Lufthansa ou Delta, n'a trouvé la solution miracle. J'observe en effet deux comportements différents. British Airways a vendu l'ensemble de son réseau court et moyen-courrier – si bien que de première compagnie européenne, elle est devenue la troisième, nettement après Lufthansa et Air France-KLM –, ce qu'elle semble avoir regretté puisqu'elle a racheté récemment British Midland (BMI). Cette stratégie n'est donc pas convaincante de notre point de vue.

Inversement, Lufthansa et Iberia ont des filiales low cost – Germanwings pour la première, Vueling et une autre en cours de création pour la seconde. Toutefois, cela ne les a cependant pas empêchées de rencontrer des difficultés sur le réseau court et moyen-courrier, au point que Lufthansa a lancé un plan d'économie de 1,5 milliard et demi.

En outre, les opérations des low cost filiales des grandes compagnies historiques sont toujours réalisées sous une marque différente. Pour notre part, nous avons nos propres opérations low cost, limitées j'en conviens, sous la marque Transavia. Notre conviction est qu'Air France ne sera pas une low cost. Opérer une compagnie low cost sous la marque Air France nous paraît en effet contreproductif en tirant la marque vers le bas. En revanche, développer des opérations low cost sur la base de compagnies opérant sous une autre marque filiale d'Air France est tout à fait possible.

Aux États-Unis, Delta a mis en place des lignes face à son concurrent historique Southwest, compagnie low cost, en parvenant à maintenir une prestation importante et à ne plus perdre de parts de marché sur ces lignes. Inversement, KLM met avec Transavia des avions de cette dernière sur les lignes opérées par ses propres avions, d'où un risque de cannibalisation ; certes, pour l'instant, cette stratégie a empêché les low cost de prendre des parts de marché sur les lignes en question, mais combien de temps cela va-t-il durer ? Il s'agit d'un sujet difficile : les solutions sont très variées – elles font d'ailleurs l'objet de notre groupe de travail court et moyen-courrier qui rendra ses conclusions au printemps.

Le fret représente 12 % de nos revenus, soit 2,7 milliards. Cette activité est extrêmement sensible à la conjoncture : elle s'est effondrée en 2008, puis s'est très nettement redressée en 2010, avant de redevenir déficitaire en 2011 en raison du ralentissement de la conjoncture dans la deuxième partie de l'année.

À ce sujet, il est très surprenant de constater que les lignes de fret dans le sens Chine Europe sont déficitaires alors qu'elles sont relativement bien équilibrées dans le sens Europe Chine. Paradoxalement, en effet, l'importation en provenance de l'Asie s'est effondrée, tandis que l'exportation en provenance de l'Europe est restée assez dynamique dans nos soutes. Le fret fait l'objet d'un plan spécifique dans le cadre du plan transformation afin qu'il restaure ses profits.

Air France-KLM fait partie de l'alliance internationale Sky Team, au sein de laquelle figurent notamment Delta Air Lines, China Eastern et China Southern et Korean Air. Notre joint venture avec Delta nous a permis d'avoir la plus grosse offre de sièges sur l'Atlantique nord et, ainsi, d'occuper une part de marché importante. Nous nous fixons le même objectif sur la Chine, marché immense qui se développe très rapidement et que nous ne pourrons capter sans les alliances avec China Southern ou China Eastern. Selon nous, il est donc fondamental de développer ces alliances ; il est également souhaitable d'y ajouter des membres. À cet égard, nous sommes en négociation avec diverses compagnies du sud-est asiatique et d'Amérique latine pour essayer d'ajouter de nouvelles compagnies à l'alliance Sky Team qui est pour nous un très important facteur d'alimentation de nos avions et de nos hubs.

Nous avons avec les gestionnaires d'aéroport des relations de clients à fournisseurs. Nous sommes le premier client des plateformes de Roissy et d'Orly. Il est vrai que la confusion est assez souvent entretenue entre qui fait quoi. Sachez que les bagages relèvent de la responsabilité d'Air France – et non d'Aéroports de Paris, comme beaucoup le pensent. En revanche, le fonctionnement du trieur à bagages est sous la responsabilité d'Aéroports de Paris. Les relations avec ce dernier sont très bonnes. L'infrastructure n'est pas optimale, mais Aéroports de Paris s'emploie à l'améliorer avec la construction du terminal S4. Air France opérera donc sur les terminaux S3, S4, E et F, ce dernier terminal étant dédié aux liaisons internes à l'espace Schengen. De gros efforts ont été faits, et nous finançons une partie des travaux par le biais des redevances. Nous finançons également la rénovation des salons et des espaces d'accueil.

S'agissant de la flotte, la livraison de deux A 380 a été retardée – ils arriveront au sein de la compagnie en 2016 au lieu de 2014 –, ainsi que celles d'un Boeing 777 et de trois A 320. De même, les options sur deux Boeing 777 ont été annulées. Au total, la flotte Air France-KLM restera globalement stable, conformément au scénario économique qui se base sur une croissance de trafic de 5 % sur la période de trois ans – notre croissance était auparavant de 5 % par an. Le scénario est donc prudent ; une amélioration de la conjoncture permettrait d'atténuer les effets négatifs de la situation économique sur la maison Air France.

Le plan de transformation n'est pas incompatible avec une desserte du territoire. Par contre, il est faux de dire que toutes les destinations sont rentables. Nous nous efforçons de négocier avec les collectivités territoriales, comme c'est le cas avec la Haute-Vienne ou la Corse. Pour l'outre-mer, la desserte est plutôt bonne pour la maison sur le plan économique.

La concurrence du rail est une difficulté pour notre compagnie, même si nous essayons d'impulser des partenariats avec la SNCF. Toute création de ligne TGV aboutit à un effondrement du trafic passager sur nos lignes – c'est le cas pour la desserte Lyon-Paris. La création de lignes TGV est un choix que je respecte, mais dont il faut mesurer les conséquences. De la même manière, la prolongation du TGV en Bretagne amènera inéluctablement une baisse du trafic passager pour cette région.

S'agissant de la proposition de loi sur le service dans les transports aériens, Air France s'est exprimée : elle respecte bien évidemment le droit de grève, mais estime que toute disposition visant à améliorer la prévisibilité du trafic ne peut qu'être favorable aux usagers. Une déclaration 48 heures à l'avance permettra à la compagnie de mettre en place une planification de ses vols et d'informer suffisamment tôt les passagers des vols maintenus ou annulés. Des dispositifs allant dans ce sens existent, mais ils sont très imparfaits – nous ne savons « gréer » nos avions en pilotes et en PNC que le matin. Les nouvelles dispositions que vous avez votées hier soir nous permettront de fixer le programme et d'informer les passagers 24 heures à l'avance. Le dispositif d'alarme social, qui existe depuis plusieurs années et qui fonctionne grâce à un dialogue permanent avec les organisations syndicales, n'a malheureusement pas empêché les conflits sociaux et les grèves.

Le conflit des personnels navigants commerciaux de cet automne a coûté à la compagnie un peu plus de 20 millions d'euros. Toute grève des personnels qui immobilise nos avions représente un coût très élevé pour la maison.

PermalienPhilippe Calavia

La compagnie dégage environ 30 à 35 millions d'euros de chiffre d'affaires par jour. Le client qui ne peut emprunter son avion, surtout lorsqu'il s'agit d'un client professionnel, soit annule son voyage, soit va voir la concurrence. Pour nous, la perte d'une journée ou d'une fraction de journée représente une somme énorme car nous supportons plus de 50 % à 60 % de coûts fixes. Chaque fois que nous perdons 10 millions de chiffre d'affaires, nous économisons certes 3 ou 4 millions de coûts variables – en carburant et en redevances –, mais le reste demeure à la charge de l'entreprise. Il faut donc éviter autant que possible les conflits sociaux, comme parviennent à le faire certains pays européens grâce au consensus social.

PermalienJean-Claude Cros, directeur général adjoint aux ressources humaines

Nous ne parlons là que des coûts directs – et non des coûts induits par les passagers en provenance de l'étranger qui choisissent d'autres compagnies et éviteront durablement le hub de Roissy.

PermalienAlexandre de Juniac

Informer les passagers des caractéristiques des pays dans lesquels ils se rendent est difficile, mais pas impossible. Nous le faisons dans le domaine du tourisme sexuel, qui fait l'objet d'une information systématique sur nos vols. En outre, à travers la Fondation Air France et nos accords conclus avec des organisations non gouvernementales, nous finançons des dispositifs comme celui en faveur de la reforestation à Madagascar, et essayons d'intervenir pour les enfants, notamment dans des pays africains.

S'agissant de la commande de nouveaux moteurs économes en carburant, je suppose que vous faites allusion au nouveau moteur CFM de l'Airbus NEO. Nous n'avons pas commandé d'A 320 NEO car l'âge moyen de notre flotte de courts et de moyens courriers est peu élevé. Mais nous étudierons le sujet quand il se présentera – notre dernière commande concerne uniquement les longs courriers.

S'agissant de l'atelier de maintenance de Clermont-Ferrand, nous avons fait réaliser les travaux d'extension.

PermalienJean-Claude Cros, directeur général adjoint aux ressources humaines

Il va être réceptionné dans les prochaines semaines.

PermalienPhoto de André Chassaigne

Qu'en est-il des créations d'emplois annoncées qui conditionnaient les aides des collectivités locales ?

PermalienPhilippe Calavia

La montée en charge sera conditionnée au carnet de commandes. Le plan de transformation ne prévoit pas de remise en cause des objectifs initiaux, c'est-à-dire de l'investissement réalisé grâce à des financements locaux significatifs.

PermalienAlexandre de Juniac

En ce qui concerne les petits jets, nous n'avons le choix qu'entre deux fournisseurs : Bombardier ou Embraer. La question du confort à l'intérieur de ces avions relève de considérations personnelles – on ne peut pas espérer avoir le même confort dans les petits avions que dans les grands. Sachez tout de même, monsieur Chassaigne, que, par siège, le coût d'exploitation de ces avions est le double de celui d'un airbus A 320 – ce qui explique le coût des lignes transversales. Cela ne vaut pas pour les turbo propulseurs : leur coût d'exploitation est moins cher.

PermalienPhoto de Joël Regnault

Si la compagnie entend améliorer l'accueil et les services rendus, on a parfois l'impression que ces derniers ne sont pas à la hauteur de ce qu'attendent les usagers. Pourtant, quelques euros seulement pourraient dans certains cas faire la différence pour rétablir l'attractivité d'Air France par rapport aux autres compagnies.

PermalienAlexandre de Juniac

Nous entamerons une rénovation complète de nos cabines affaires à partir de 2013, ce qui représentera un investissement de 260 millions d'euros.

Nous avons rehaussé la prestation nourriture. Air France se doit en effet d'offrir une prestation vin et nourriture à la hauteur de sa réputation. Elle poursuivra dans cette voie grâce à des partenariats avec de grands chefs tels que Robuchon ou Ducasse.

Nous avons maintenu tous les investissements au sol. Le traitement des passagers au sol devient un point très discriminant dans les salons d'attente. British Airways, ainsi que les compagnies Emirates, Qatar et Cathay Pacific font d'ailleurs des efforts considérables en la matière.

Notre objectif est donc de rehausser notre prestation produits et services en demandant à nos personnels de consentir des efforts et en les formant pour cela. Ainsi, en offrant un produit de qualité, ces derniers seront, je l'espère, motivés pour améliorer la qualité de service. Cette politique concernera le court et moyen-courrier, notamment la classe avant des avions effectuant des vols intra-européens – là, nous avons un peu décroché…

PermalienJean-Claude Cros, directeur général adjoint aux ressources humaines

Je vais fournir quelques indications sur les caisses de retraite.

S'agissant du personnel au sol, il relève du régime général – AGIRC, ARRCO.

Pour ce qui est du personnel navigant technique et commercial, il a une caisse de retraite propre : la CRPN (caisse de retraite du personnel navigant). Celle-ci n'est pas actuellement dans une situation présentant un danger dans la mesure où elle dispose de nombreuses réserves. Toutefois, on ne peut jurer que ce sera toujours le cas. Cela étant, il fallait résoudre un problème portant sur une différence d'appréciation à propos de l'évolution des cotisations et de leur durée, ce que nous avons fait avec l'aide du médiateur M. Hadas-Lebel. Les nouveaux textes publiés le 1er janvier donnent à la caisse une véritable respiration.

PermalienPhoto de Serge Grouard

Je vous remercie, messieurs, pour cette audition particulièrement intéressante.

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 25 janvier 2012 à 9 h 30

Présents. - M. Jean-Pierre Abelin, M. Yves Albarello, M. Jérôme Bignon, M. Joseph Bossé, M. Jean-Claude Bouchet, M. Christophe Bouillon, M. Christophe Caresche, M. Jean-Paul Chanteguet, M. André Chassaigne, M. Frédéric Cuvillier, Mme Claude Darciaux, M. Stéphane Demilly, M. Raymond Durand, M. Paul Durieu, M. Daniel Fidelin, Mme Geneviève Gaillard, M. Daniel Goldberg, M. Didier Gonzales, M. Serge Grouard, Mme Fabienne Labrette-Ménager, M. Thierry Lazaro, M. Jacques Le Nay, Mme Annick Lepetit, M. Gérard Lorgeoux, M. Jean-Pierre Marcon, M. Philippe Martin, M. Philippe Meunier, M. Bertrand Pancher, M. Yanick Paternotte, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, M. Joël Regnault, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean-Marie Sermier, M. Philippe Tourtelier, M. André Vézinhet

Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Yves Besselat, M. Philippe Boënnec, M. Maxime Bono, Mme Françoise Branget, M. Philippe Briand, M. Olivier Dosne, M. André Flajolet, M. Jean-Claude Fruteau, M. Alain Gest, M. Joël Giraud, M. Michel Havard, M. Armand Jung, M. Jacques Kossowski, M. Jean Lassalle, M. Bernard Lesterlin, M. Apeleto Albert Likuvalu, M. Philippe Plisson, M. René Rouquet, M. Martial Saddier

Assistaient également à la réunion. - M. Charles de Courson, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Francis Saint-Léger