La séance est ouverte à 11 heures.
Présidence de M. Jean-Luc Warsmann, président.
La Commission examine, sur le rapport de M. Claude Goasguen, la proposition de loi de M. Bernard Accoyer, tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques (n° 2081).
Avant de commencer nos travaux, je tiens à vous présenter mes meilleurs voeux pour cette nouvelle année.
Je vous souhaite également une bonne année au nom des commissaires du groupe SRC.
La suggestion que je voudrais brièvement présenter ne concerne pas seulement notre commission, mais aussi celle des affaires étrangères et celle de la défense : après la récente tentative d'attentat sur le vol Amsterdam - Detroit, qui a fait l'objet de nombreuses déclarations et qui a eu un grand écho dans les médias, il me semblerait utile d'auditionner le ministre de l'intérieur pour recueillir un certain nombre d'éléments d'information, notamment en ce qui concerne les mesures adoptées pour faire face à la menace terroriste. Pourriez-vous, monsieur le président, relayer cette demande auprès de M. Brice Hortefeux ?
La Commission examine, sur le rapport de M. Claude Goasguen, la proposition de loi de M. Bernard Accoyer tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques (n° 2081).
Cette proposition de loi vient parachever le travail entamé avec la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, et qui tend à conférer au Parlement de nouveaux pouvoirs en matière de contrôle de l'action du Gouvernement et d'évaluation des politiques publiques.
Elle a été déposée par le président Bernard Accoyer sur le fondement des recommandations émises par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) de l'Assemblée nationale à l'issue des travaux sur les critères de contrôle des études d'impact que j'ai conduits avec Jean Malot en qualité de co-rapporteur du CEC.
Cette proposition de loi permettra en particulier de remédier à plusieurs censures récentes du Conseil constitutionnel qui ont affaibli les moyens de contrôle et d'évaluation dont dispose le Parlement.
L'article 1er prévoit que les rapporteurs des instances parlementaires de contrôle et d'évaluation disposeront des pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place et de communication des documents conférés par l'ordonnance du 17 novembre 1958 aux rapporteurs des commissions d'enquête. Cet alignement des prérogatives permettra aux instances de contrôle et d'évaluation d'obtenir communication des informations nécessaires, notamment lorsqu'elles seront sollicitées pour examiner une étude d'impact, sans préjudice de la compétence des commissions permanentes et de la conférence des présidents.
Cet article prévoit en outre que toute personne dont l'audition est jugée nécessaire par une instance parlementaire de contrôle et d'évaluation pourra faire l'objet d'une convocation. Cette disposition tend à surmonter la décision du Conseil constitutionnel du 25 juin 2009 sur la résolution modifiant le Règlement de l'Assemblée nationale : le Conseil a censuré une disposition autorisant l'organisation d'un débat sur les rapports du CEC « en présence des responsables administratifs de la politique publique concernée » – il s'agissait en réalité de pouvoir auditionner les directeurs d'administration centrale. Le Conseil constitutionnel avait indiqué qu'une telle mesure devait être adoptée par la voie législative.
Il avait été proposé, lors de la réforme du Règlement de l'Assemblée nationale, de permettre au CEC de solliciter l'assistance de la Cour des comptes pour l'évaluation des politiques publiques – je rappelle que l'article 47-2 de la Constitution n'énonce qu'un principe général d'assistance de la Cour des comptes au Parlement. Cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel au motif que, « si la Cour des comptes a vocation à assister ledit comité dans l'évaluation des politiques publiques, il n'appartient pas au règlement mais à la loi de déterminer les modalités selon lesquelles un organe du Parlement peut demander cette assistance ». Le CEC a estimé qu'« il serait utile de désigner rapidement dans la loi les organes du Parlement qui seront habilités à demander l'assistance de la Cour des comptes en matière d'évaluation des politiques publiques […]. Dans le cas de l'Assemblée nationale, il s'agirait naturellement, au premier chef, du Comité d'évaluation et de contrôle, ainsi que des commissions permanentes, dans leurs champs de compétences respectifs ».
L'article 3 répond partiellement à cet objectif, puisqu'il autorise les présidents des deux assemblées ainsi que les présidents des instances parlementaires d'évaluation à demander à la Cour des comptes de réaliser une évaluation d'une politique publique.
En dernier lieu, ce texte tend à remédier à la censure d'une disposition du Règlement relative aux conditions de consultation du procès-verbal des personnes auditionnées par une commission d'enquête. Le Conseil constitutionnel ayant considéré qu'une telle disposition devait être prévue par la loi, et non par le règlement d'une assemblée parlementaire, compte tenu de la rédaction de l'article 51-2 de la Constitution, l'article 2 tend à l'insérer dans l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958, relatif aux commissions d'enquête parlementaires.
Je vous proposerai quelques amendements à la proposition de loi. Afin d'aller jusqu'au bout de ce que propose le CEC en ce qui concerne l'assistance apportée par la Cour des comptes, il me paraît souhaitable que les demandes puissent émaner non seulement des instances d'évaluation des politiques publiques, mais également des commissions permanentes. Je rappelle que seules les commissions des finances et des affaires sociales peuvent aujourd'hui obtenir l'assistance de la Cour. S'il est logique que le CEC puisse solliciter son assistance pour l'évaluation des politiques publiques transversales, ce rôle revient tout aussi légitimement aux commissions permanentes dans leur domaine de compétence respectif.
Afin de garantir l'efficacité de ce mécanisme, je propose que la Cour des comptes soit tenue de répondre aux demandes dans un délai maximal de douze mois, correspondant à la période pour laquelle les rapporteurs du CEC sont désignés. Cela permettra également de prendre en compte les difficultés dont Philippe Séguin m'avait fait part juste avant sa disparition – mais j'y reviendrai plus tard. Nous devons veiller à trouver les ajustements nécessaires avec la Cour des comptes, en particulier grâce à un dialogue entre le Président de notre Assemblée et le Premier président de la Cour.
En outre, il me paraît souhaitable de limiter le bénéfice des articles 1er et 3 aux seules instances d'évaluation permanentes. Nous éviterons ainsi que des instances temporaires d'évaluation, telles que les missions d'information, bénéficient de pouvoirs excessifs – je pense notamment au contrôle sur pièces et sur place, ainsi qu'aux demandes d'enquête adressées à la Cour des comptes. Cette disposition garantira que le CEC, la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation et la délégation sénatoriale à la prospective pourront bénéficier au premier chef des nouvelles possibilités prévues par le texte. Les amendements adoptés par la commission des finances sur ce sujet vont dans le bon sens.
Sous la réserve de ces quelques modifications, je vous invite à adopter cette proposition de loi.
Je ne saurais conclure mon propos sans revenir sur les inquiétudes dont m'avait fait part Philippe Séguin lors de notre dernier entretien. La Cour des comptes a constaté que les chambres régionales des comptes se montrent peu favorables à la centralisation prévue par le projet de loi portant réforme des juridictions financières et qu'elles estiment difficile, compte tenu de leur charge de travail et de leurs effectifs, de répondre dans de brefs délais aux demandes qui leur seraient adressées. C'est notamment pour cette raison que j'ai préféré revoir à la hausse le délai maximal de réponse de la Cour des comptes. Nous aurons l'occasion de revenir sur ces différentes questions lors de l'examen du projet de loi sur les juridictions financières, mais il me paraissait essentiel de rappeler que les instances parlementaires compétentes doivent pouvoir bénéficier de cet outil exceptionnel qu'est la Cour des comptes en matière d'évaluation.
La Commission des finances est favorable à ce texte, sous réserve des amendements techniques qu'elle a adoptés.
L'amendement CL 2 précise que les prérogatives des rapporteurs sont exercées « conjointement » : cela ne fait que transposer les pratiques en vigueur au sein de la mission d'évaluation et de contrôle (MEC).
L'amendement CL 3 prévoit que la Cour des comptes pourra être saisie d'une demande d'évaluation d'une politique publique par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, sur proposition de toute instance permanente créée au sein d'une des deux assemblées parlementaires pour procéder à l'évaluation de politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente. Cette modification rédactionnelle s'inspire directement de la logique qui sous-tend notre Règlement.
Je n'ai pas d'objection de principe au sous-amendement CL 10 qui tend à ce que la demande d'assistance puisse être formulée par le président de l'Assemblée ou du Sénat de sa propre initiative, mais on peut tout de même avoir quelques doutes d'un point de vue juridique : c'est au nom de l'institution qu'ils représentent, et non à titre personnel, que le Président de l'Assemblée et celui du Sénat sont chargés d'exercer cette compétence.
Les procédures de contrôle revêtent une importance croissante depuis la révision constitutionnelle de 2008 et la réforme de notre Règlement qui a suivi. Sur le fond, nous n'avons pas d'objections de principe à formuler à l'encontre des dispositions relativement techniques qui nous sont aujourd'hui proposées, bien au contraire.
Ma première observation concerne l'organisation de la semaine désormais réservée au contrôle de l'action du Gouvernement. J'avoue que je reste perplexe : il n'est pas certain que nous ayons trouvé un rythme satisfaisant en la matière.
En second lieu, il me semble que l'Assemblée devrait s'efforcer de mieux s'organiser pour disposer du temps et des moyens nécessaires pour réaliser un véritable travail d'évaluation et de contrôle à l'occasion de l'examen de la loi de règlement, comme la LOLF nous y invite. Alors qu'elle présente moins d'intérêt qu'auparavant, la discussion de la loi de finances initiale continue à occuper beaucoup de temps, et les procédures d'évaluation des résultats restent insuffisantes, même si elles ont été quelque peu améliorées. J'espère que nous allons progresser d'ici au mois de juin afin de mieux exploiter toutes les possibilités de la LOLF.
Je m'interroge sur votre proposition de restreindre les possibilités nouvelles prévues par ce texte aux seules instances permanentes des assemblées, toutes présidées par des membres de la majorité, hormis la Commission des finances. La modification que vous proposez est tout sauf rédactionnelle, et elle change singulièrement notre perception du texte. Dans sa rédaction initiale, l'opposition devait en effet disposer de droits nouveaux, notamment grâce à la constitution de missions d'information et de commissions d'enquête, instances non permanentes qui sont généralement présidées par un membre de l'opposition.
On ne peut qu'être d'accord avec René Dosière au sujet de notre ordre du jour. La surabondance des textes nous met aujourd'hui en grande difficulté.
Je reconnais que l'amendement CL 3 n'est pas neutre et qu'il faudra en débattre. Je rappelle que les instances permanentes des assemblées visées par cet amendement comprennent le CEC, la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale et celle du Sénat, la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation et la délégation sénatoriale à la prospective. Je rappelle également que les commissions d'enquête jouissent déjà des attributions prévues par ce texte.
Pour avoir été rapporteur d'une commission d'enquête, j'ai eu l'occasion de procéder à des contrôles sur un certain nombre d'organismes, souvent peu enthousiastes, et je peux témoigner que nous disposons déjà d'importants moyens de contrôle et d'évaluation. Faut-il les généraliser en accordant à d'autres instances la faculté de recourir à ces outils relativement coercitifs ? Il ne faudrait pas instaurer une paralysie générale en multipliant à l'excès les demandes d'information et les visites inopinées.
La Commission passe ensuite à l'examen des articles.
Article 1er (article 5 ter A [nouveau] de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958) : Convocation de personnes par les instances permanentes de contrôle ou d'évaluation du Parlement et pouvoirs de leurs rapporteurs :
La Commission est d'abord saisie de l'amendement CL 1 de la commission des finances saisie pour avis, faisant l'objet du sous-amendement CL 5 du rapporteur.
La définition des instances d'évaluation retenue par la proposition de loi est très large. Or, dans la mesure où des pouvoirs spéciaux sont attachés à cette définition, il est souhaitable de ne retenir que les instances permanentes d'évaluation et de contrôle dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente. Avis favorable, donc, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement de précision.
La Commission adopte le sous-amendement CL 5.
Elle adopte ensuite l'amendement CL 1 ainsi sous-amendé.
Puis, elle examine l'amendement CL 6 du rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de précision. Dans la mesure où le Comité d'évaluation et de contrôle est susceptible de désigner comme rapporteurs des députés qui ne sont pas membres du Comité, il est préférable d'adopter une rédaction qui leur assure les mêmes droits.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL 2 de la commission des finances.
L'amendement prévoit la possibilité pour deux co-rapporteurs d'exercer leur mission de façon conjointe. J'y suis favorable, même si cela peut présenter des inconvénients en cas d'abus. En effet, si l'un des deux rapporteurs n'est pas d'accord, cela peut paralyser le système. Il semble cependant que cela fonctionne bien à la MEC.
Je suis sensible à l'observation de M. Vidalies sur les pouvoirs de l'opposition. Mais contrairement au CEC, la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances n'est pas autonome : son fonctionnement est subordonné à la saisine de la commission des finances. Pour chacun des sujets soumis à une étude, deux rapporteurs sont nommés, l'un issu de la majorité, l'autre de l'opposition, qui disposent des mêmes prérogatives et doivent donc s'efforcer de dépasser d'éventuels désaccords. Ce système fonctionne bien, et permet en outre de démultiplier les capacités d'intervention.
Je souhaite bien mesurer les conséquences de l'amendement, car j'effectue, avec Christian Vanneste, la première mission de contrôle et d'évaluation du CEC, portant sur les autorités administratives indépendantes. Chaque co-rapporteur disposerait donc des mêmes pouvoirs d'investigation, mais cela signifie-t-il qu'ils seraient toujours obligés de les exercer ensemble ? S'il en était ainsi, cela pourrait poser des problèmes matériels.
C'est tout le problème de l'emploi du mot « conjointement ». Ce dernier signifie avant tout que l'exercice de ces pouvoirs d'investigation est soumis à un accord préalable entre les deux co-rapporteurs. On peut imaginer qu'en certaines circonstances, un rapporteur – de l'opposition comme de la majorité – soit amené à refuser de procéder à une vérification dans un lieu donné. Dans ce cas, la situation serait bloquée si l'on suit la rédaction proposée par M. Tron. De même, on peut se demander, en cas d'enquête sur le terrain, s'il est nécessaire que les deux rapporteurs soient présents.
Nous avons longuement réfléchi à tout cela, mais au final, il y a lieu d'être optimiste : dans la mesure où le système a déjà fonctionné dans le passé, il ne devrait pas en être autrement dans l'avenir.
Le système fonctionne, en effet, y compris lorsque d'autres commissions sont concernées. La MEC a été saisie ces derniers mois de plusieurs missions auxquelles ont participé des membres de commissions saisies au fond, majorité et opposition confondues. Cela n'a jamais posé de problème. Je précise en outre que « conjointement » ne signifie pas « simultanément ».
À partir du moment où il existe un accord de principe pour se rendre quelque part, l'un des deux rapporteurs peut y aller seul.
J'ai une expérience similaire au sein de la commission des affaires européennes, où le travail est fréquemment organisé autour de deux rapporteurs, y compris sur des sujets sensibles. Une différence d'approche peut se manifester, au point, d'ailleurs, que des avis différents sont parfois exprimés dans nos rapports. C'est une source d'enrichissement : ainsi, les questions sont abordées sous tous leurs aspects.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 1er modifié.
Article 2 (article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958) : Règles relatives au compte rendu des auditions des commissions d'enquête :
La Commission adopte l'article 2 sans modification.
Article 3 (article L. 132-5 [nouveau] du code des juridictions financières) : Assistance de la Cour au Parlement pour l'évaluation des politiques publiques :
La Commission examine l'amendement CL 3 de la commission des finances, qui fait l'objet des sous-amendements CL 10 et CL 4 du rapporteur.
L'amendement de la commission des finances prévoit que les demandes de rapport d'évaluation à la Cour des comptes sont formulées par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, sur proposition d'une instance permanente d'évaluation des politiques publiques. Je suggère pour ma part deux sous-amendements : le premier permet au président de chaque assemblée de demander de sa propre initiative une assistance de la Cour des comptes ; le second précise qu'une demande d'assistance pourra être formulée sur proposition d'une commission permanente dans son domaine de compétence.
Les dispositions de l'amendement CL 3 sont plus restrictives que celles de la proposition de loi, puisqu'il limite aux présidents des seules instances permanentes le droit de faire appel à l'assistance de la Cour des comptes. Or, c'est essentiellement l'opposition qui souffre de cette restriction, dans la mesure où elle se voit généralement confier la présidence des missions d'information. Si l'on se rappelle par ailleurs que le groupe majoritaire a décidé d'imposer l'un des siens comme rapporteur de la proposition de résolution tendant à créer une commission d'enquête sur les sondages, alors qu'il est de tradition que ce poste revienne au groupe qui a déposé la demande, vous conviendrez que nous soyons inquiets. Je suis donc très défavorable à l'adoption de cet amendement.
Nous sommes tous d'accord pour juger utile que le CEC puisse solliciter l'assistance de la Cour des comptes. Mais une multiplication des demandes se heurterait au principe de réalité. En effet, la Cour a toujours argué de sa position équidistante entre le Parlement et le Gouvernement, position qu'elle déduit de l'article 47 de la Constitution, pour se donner la possibilité de faire elle-même le tri parmi les demandes. Une extension excessive des saisines risquerait donc de conduire la Cour à ne pas y donner suite. C'est pourquoi je propose que les demandes d'assistance passent par le filtre du président de l'Assemblée nationale ou du Sénat.
Je précise par ailleurs que, par souci de cohérence, j'ai rédigé mon amendement en reprenant la définition du CEC figurant à l'article 146-3 de notre règlement.
Enfin, dans la mesure où le président de l'Assemblée nationale est aussi celui du CEC, je me demande si la disposition contenue dans l'amendement CL 10 ne pose pas un problème juridique.
Le problème, en effet, c'est le principe de réalité. Feu le Premier président de la Cour des comptes voulait que celle-ci puisse examiner au préalable sa capacité à répondre aux demandes formulées par l'Assemblée nationale. Je rappelle que les chambres régionales sont indépendantes de la Cour et que le président n'exerce pas sur elles un pouvoir hiérarchique. En l'absence d'une réforme des chambres financières, Philippe Séguin doutait donc de la possibilité de répondre à des demandes dont le nombre s'avérerait excessif.
Nous progressons lentement dans la voie de l'évaluation et du contrôle, et il me semble donc nécessaire de faire preuve de souplesse, afin de privilégier l'efficacité. C'est pourquoi nous avons préféré exclure du dispositif les missions parlementaires, qui sont – et c'est une bonne chose – de plus en plus nombreuses. Sachons faire preuve de mesure, d'autant que l'opposition dispose d'un « droit de tirage » pour la création de commissions d'enquête.
Pour répondre à M. le rapporteur pour avis, je rappelle que si le président de l'Assemblée nationale est président du CEC ès qualités, cette situation pourrait évoluer, et c'est pourquoi il convient de lui donner la possibilité de saisir proprio motu la Cour des comptes. L'attribution de pouvoirs étendus aux présidents des deux chambres est d'autant plus utile qu'ils pourront ainsi maintenir un équilibre entre les différentes instances du Parlement, qui tendent à entrer en concurrence depuis la réforme constitutionnelle.
Si l'assistance de la Cour des comptes pose un problème matériel, celui-ci doit être résolu collectivement, par la limitation du nombre de saisines. Or, l'amendement CL 3 tend à faire porter le plus gros de l'effort sur l'opposition, dans la mesure où, hormis le cas de la commission des finances, les seules présidences qui lui sont attribuées sont celles des missions temporaires.
Les présidents de missions d'information ne pourraient pas saisir la Cour des comptes. Mais qu'en est-il des présidents de commission d'enquête ?
Les commissions d'enquête ont déjà ce droit, et le conserveront, car nous ne modifions pas l'article L. 132-4 du code des juridictions financières.
Je précise que non seulement la Cour s'est réservé la possibilité d'effectuer un tri entre les demandes, mais que le Conseil constitutionnel, notamment dans sa décision sur la loi organique relative aux lois de finances, l'a soutenue sur ce point précis. Le risque que j'évoquais à l'instant est donc réel.
La Commission adopte successivement le sous-amendement CL 10 avec une rectification rédactionnelle à l'initiative de M. François Vannson et le sous-amendement CL 4.
Puis, elle adopte l'amendement CL 3 ainsi sous-amendé.
Elle adopte ensuite l'amendement de précision CL 7 du rapporteur.
Puis, elle examine l'amendement CL 8 du même auteur.
Nous aurons sans doute des difficultés à harmoniser le travail d'évaluation et de contrôle effectué par l'Assemblée nationale avec le rythme et l'organisation interne de la Cour des comptes. J'espère que cette organisation sera modifiée dans les mois qui viennent, de façon à ce que la Cour puisse répondre à l'obligation nouvelle à laquelle elle est soumise.
On pourrait fixer à huit mois le délai dans lequel la Cour des comptes devra rendre son rapport : c'est le délai actuellement prévu pour répondre aux demandes de la commission des finances. Mais il me semble préférable que ce délai fasse l'objet d'une discussion entre le président de l'Assemblée et la Cour, tout en restant dans une limite de douze mois, correspondant à la durée du mandat des rapporteurs du Comité d'évaluation et de contrôle. Une telle solution aurait l'avantage de la souplesse.
Quoi qu'il en soit, le débat sur l'organisation de la Cour des comptes sera difficile, car les chambres régionales sont hostiles à la réforme proposée.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL 9 du rapporteur.
Il paraît utile de préciser que l'instance à l'origine de la demande d'assistance de la Cour des comptes statue sur la publication du rapport qui lui a été transmis.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 3 modifié.
Puis elle adopte l'ensemble de la proposition de loi modifiée.
Amendements examinés par la Commission
Amendement CL1 présenté par M. Georges Tron, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances :
Article 1er
Rédiger ainsi l'alinéa 2 :
« Art. 5 ter A. – Les instances permanentes créées au sein de l'une des deux assemblées parlementaires pour contrôler l'action du Gouvernement ou évaluer des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente peuvent convoquer toute personne … (le reste sans changement). »
Amendement CL2 présenté par M. Georges Tron, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances :
Article 1er
À l'alinéa 3, après le mot : « exercent », insérer le mot : « conjointement ».
Amendement CL3 présenté par M. Georges Tron, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances :
Article 3
À l'alinéa 2 de cet article, substituer aux mots : « par le président de l'Assemblée nationale, le président du Sénat ou par le président de toute instance créée au sein du Parlement ou de l'une de ses deux assemblées pour procéder à l'évaluation des politiques publiques », les mots : « par le président de l'Assemblée nationale ou le président du Sénat, sur proposition de toute instance permanente créée au sein d'une des deux assemblées parlementaires pour procéder à l'évaluation de politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d'une seule commission permanente ».
Sous-amendement CL4 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur, à l'amendement CL3 de la commission des finances :
Article 3
Au dernier alinéa, après le mot : « proposition », insérer les mots : « d'une commission permanente dans son domaine de compétence ou ».
Sous-amendement CL5 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur, à l'amendement CL1 de la commission des finances :
Article 1er
À l'alinéa 2, substituer aux mots : « … (le reste sans changement) », les mots : « dont elles estiment l'audition nécessaire, sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article 5 bis ».
Amendement CL6 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur :
Article 1er
À l'alinéa 3, substituer aux mots : « rapporteurs de », les mots : « rapporteurs désignés par ».
Amendement CL7 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur :
Article 3
À l'alinéa 3, après le mot : « assistance », insérer les mots : « de la Cour des comptes ».
Amendement CL8 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur :
Article 3
Après le mot : « délai », rédiger ainsi la fin de l'alinéa 3 : « qu'elle détermine, dans la limite de douze mois, après consultation du premier président de la Cour des comptes. »
Amendement CL9 présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur :
Article 3
Rédiger ainsi l'alinéa 4 :
« La commission permanente ou l'instance permanente à l'origine de la demande d'assistance de la Cour des comptes statue sur la publication du rapport qui lui a été transmis. »
Sous-amendement CL10 rectifié présenté par M. Claude Goasguen, rapporteur, à l'amendement CL3 de la commission des finances :
Article 3
Au dernier alinéa, après le mot : « Sénat, », insérer les mots : « de leur propre initiative ou ».
Informations relatives à la Commission