Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a entendu M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports, sur le projet de loi relatif à Voies navigables de France (n° 3871).
Mes chers collègues, l'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi relatif à Voies navigables de France. Ce texte a été adopté par le Sénat le 19 octobre dernier ; il devrait être examiné par l'Assemblée nationale en séance publique avant la fin de l'année.
Nous avons auditionné la semaine dernière notre collègue Alain Gest en sa qualité de président de Voies navigables de France. Je tiens à remercier Françoise Branget, notre rapporteur, d'avoir procédé à un nombre important d'auditions dans des délais contraints, ce qui lui a permis de proposer plusieurs amendements parmi la trentaine qui a été déposée.
Je donne la parole à M. Thierry Mariani, ministre chargé des transports, pour qu'il nous présente ce projet de loi.
Le projet de loi relatif à Voies navigables de France, qui vous est présenté aujourd'hui, est une traduction concrète des engagements du Grenelle de l'environnement en matière de transports.
Il résulte en effet de la volonté, partagée avec les acteurs concernés, de renforcer le report modal vers la voie d'eau et de faire évoluer la part cumulée du fret ferroviaire et du fret fluvial de 14 % à 25 % du fret global à l'échéance 2022.
La France prend aujourd'hui la pleine mesure du formidable potentiel de développement du transport fluvial. Les excellents chiffres du trafic de fret fluvial en 2010, avec notamment une progression de 8,6 % des volumes transportés, le démontrent dans un contexte économique pourtant difficile. Ces résultats prouvent que le report modal devient chaque jour un peu plus une réalité. Nous pouvons nous en féliciter.
Comme vous le savez, le transport fluvial a franchi une première étape importante en avril dernier, avec le lancement du dialogue compétitif pour le canal Seine-Nord Europe, décidé par le Président de la République. Ce développement du réseau fluvial doit s'accompagner d'une réforme en profondeur du service public de la voie d'eau. En effet, Voies navigables de France, établissement public industriel et commercial créé en 1991 pour exploiter, entretenir, améliorer, développer et promouvoir les voies navigables, ne maîtrise aujourd'hui qu'insuffisamment les moyens indispensables à sa gestion. Il exerce par ailleurs une autorité limitée sur les agents qui travaillent pour lui. L'établissement n'a que très peu la main sur sa propre organisation territoriale. Surtout, l'état des lieux du réseau impose des améliorations urgentes.
La réforme du service public de la voie d'eau, que nous avons engagée, est donc nécessaire et particulièrement attendue pour répondre aux besoins des professionnels français et européens. Elle implique non seulement d'accroître la compétitivité du transport fluvial et de disposer d'un réseau modernisé et fiabilisé, mais également de se doter, enfin, d'un opérateur complet disposant de moyens à la hauteur de ses ambitions.
C'est pourquoi la principale disposition du projet de loi vise à regrouper, au sein d'un même établissement public administratif de l'État, les 400 salariés actuellement employés par VNF et les 4 500 agents des services déconcentrés de l'État qui travaillent pour lui. L'ensemble des personnels sera regroupé sous l'autorité d'un directeur général. Ce dernier aura des pouvoirs de gestion et de recrutement étendus ; il pourra ainsi piloter efficacement l'établissement en disposant de l'autorité hiérarchique et de l'autorité fonctionnelle. Il aura également des compétences élargies en matière de rémunération et de formation, afin de lui permettre de développer une politique d'emploi à la fois adaptée à la spécificité des missions de la voie d'eau et valorisante pour les personnels.
Ce rapprochement permettra d'instaurer une véritable communauté de travail et d'unifier les compétences et les moyens au sein d'un nouvel établissement. Le nouveau statut présente l'avantage de maintenir, au bénéfice des agents de l'État concernés par le transfert, les garanties qui étaient les leurs auparavant, tout en gardant la possibilité de recruter des salariés de droit privé. Le Sénat a d'ailleurs suivi, sur ce point, la proposition du Gouvernement.
Concernant l'organisation de la gouvernance du futur établissement, le Gouvernement a tenu à maintenir une véritable unité de gestion en ne recréant pas deux structures parallèles au sein de ce nouveau VNF. Notre objectif est de faire prévaloir une culture commune, qui sera le ciment du nouvel établissement.
À cet égard, le dispositif qui figure désormais dans le projet de loi adopté par le Sénat respecte les orientations que nous avons négociées avec les partenaires sociaux. Il prévoit la constitution, à terme, d'un seul comité d'établissement, tout en respectant les statuts des salariés de droit privé et des agents de droit public.
Avec ce dispositif, le texte a atteint un point d'équilibre. Il préserve les intérêts des différentes catégories de personnels tout en évitant les risques d'inconstitutionnalité en matière de détermination collective des conditions de travail, prévue par le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.
Comme vous l'avez compris, l'État a mené une large concertation avec les représentants des personnels du ministère et de Voies Navigables de France. Il en est ressorti un consensus sur le développement de la voie d'eau à laquelle tous sont extrêmement attachés. Cette concertation a également permis de veiller à ce que le projet de loi garantisse, à chaque catégorie d'agent, le maintien de son statut ou la conservation des stipulations de son contrat.
L'autre volet du projet de loi concerne les missions de l'établissement.
Ce projet de loi élargit en effet les principales missions de l'établissement afin d'affirmer sa contribution à la réalisation des objectifs du Grenelle de l'environnement en matière de transport fluvial, et ce en parfaite complémentarité avec les autres modes de transport. Le rôle de l'établissement en matière de gestion hydraulique est par ailleurs renforcé pour prendre en considération les enjeux liés au partage de la ressource en eau.
L'action sur le réseau secondaire a également été mise en avant, compte tenu du rôle majeur qu'il joue en matière d'aménagement du territoire et de préservation de l'environnement, grâce à sa vocation touristique. Sur ce point, les débats au Sénat ont permis d'enrichir le texte du Gouvernement.
Par ailleurs, dans la perspective d'accroître les ressources de l'établissement et de lui permettre de valoriser le domaine de l'État qui lui est confié, le projet de loi lui confère des compétences nouvelles afin qu'il puisse procéder, par le biais de filiales, à des opérations d'aménagement ou de développement complémentaires à ses missions.
Les sénateurs ont souhaité que ces filiales soient à capitaux majoritairement publics. Je souhaite souligner que ce n'est pas la position du Gouvernement qui n'envisage pas de restreindre les possibilités de financement. Cette obligation aurait en effet un impact non négligeable sur le nombre et l'ampleur des projets. Elle limiterait fortement l'effet de levier induit par la mobilisation de capitaux privés. En conséquence, le Gouvernement souhaite que votre commission examine avec attention cette possibilité, en prenant en compte les objectifs mêmes de la réforme. Je rappelle qu'il s'agit, avant tout, de permettre au nouvel établissement de prendre des initiatives au service du développement de la voie d'eau.
Vingt ans après la création de VNF – Alain Gest ne me contredira pas – il était temps d'avoir un établissement disposant des moyens lui permettant d'atteindre les objectifs du Grenelle de l'environnement et d'offrir un service de qualité, adapté aux attentes des usagers. Nous pouvons lui donner aujourd'hui tous les leviers pour ce faire.
Enfin, comme je l'ai dit précédemment, cette réforme est une condition nécessaire mais non suffisante pour un véritable développement de la voie d'eau. Il est également indispensable de moderniser et de sécuriser le réseau par des investissements adaptés.
Le niveau d'investissements était tombé à 50 millions d'euros annuels il y a dix ans. Il ne permettait plus de moderniser le réseau, lui faisait perdre des parts de marché par rapport à la route, et pouvait présenter un risque pour la sécurité des agents et des usagers. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a adopté un programme ambitieux d'investissements de près de 840 millions d'ici à 2014. C'est sans précédent. Il permettra de moderniser la voie d'eau et d'améliorer le service offert aux usagers. Ainsi, sur le grand gabarit, la navigation sera désormais possible vingt-quatre heures sur vingt-quatre, comme c'est déjà le cas chez nos voisins d'Europe septentrionale.
Concernant le réseau touristique, il s'agira de mettre en place une offre de service adaptée, qui tienne compte de la saisonnalité de ce secteur et de la réalité des besoins.
La mise en oeuvre du programme d'investissements par VNF aura également un impact important sur les conditions de travail des agents et leur sécurité. Les barrages manuels seront progressivement remplacés. La remise en état des ateliers de travail, des bâtiments administratifs et des équipements de sécurité des ouvrages sera en outre poursuivie.
Cet effort s'ajoute au plan de relance portuaire, qui comprend un volet consacré à l'amélioration de la desserte fluviale de nos ports, ainsi qu'au projet de canal Seine-Nord Europe, investissement colossal de près de 4,2 milliards d'euros. Il reliera dans quatre ans, avec tous les avantages que représente le grand gabarit, le bassin de la Seine et les réseaux fluviaux du Nord de l'Europe.
Vous l'aurez compris, ce projet de loi constitue une étape cruciale dans la réforme des voies navigables. Je sais combien vous êtes nombreux, au sein de cette commission, à partager cette même ambition renouvelée pour le transport fluvial. L'examen de ce texte concrétise les efforts déployés, ces dernières années, pour améliorer et promouvoir la voie d'eau et favoriser le report modal, conformément au Grenelle de l'environnement.
Je sais que certains d'entre vous veulent profiter de ce vecteur législatif pour introduire des dispositions relatives à la création d'une interprofession dans le secteur fluvial. J'y suis pour ma part très favorable : les professionnels doivent s'organiser pour accompagner, à leur tour, l'ambition portée par le Gouvernement.
Il nous appartient aujourd'hui de nous doter d'un opérateur à même de nous placer au niveau de nos voisins, qui ont su démontrer tout le potentiel du réseau fluvial. Tel est l'objet de ce texte.
Je ne vous présenterai pas à nouveau le projet de loi : M. Thierry Mariani l'a fait avec talent. La semaine dernière, nos échanges sur les voies navigables ont permis à chacun d'entre vous de connaître mon opinion.
La France, pourtant forte de 8 500 kilomètres de canaux, a laissé péricliter la culture du fluvial, alors même que nos voisins d'outre-Rhin et européens en faisaient un atout majeur dans leur politique de transport.
La prise en compte de ce potentiel renouvelé est finalement assez récente. L'alternative à la route, jusqu'aux années 1990, misait presque exclusivement sur le ferroviaire. C'est ainsi que la desserte fluviale du port du Havre reste grandement perfectible. Toutefois, avec le Grenelle de l'environnement et ses deux lois de mises en oeuvre que nous avons votées, la France a pris la mesure du potentiel formidable de développement de la voie d'eau comme moyen de transport terrestre, particulièrement adapté pour acheminer des marchandises sur de longues distances avec un minimum d'énergie et des rejets de gaz à effet de serre limités. Dois-je vous le rappeler ? Quatre fois moins d'énergie consommée, c'est quatre fois moins de CO2 émis !
Le travail à accomplir demeure considérable en raison du manque de cohérence de notre réseau, de son mauvais état, de son faible développement et des trop nombreuses années passées dans l'oubli.
Beaucoup ont souligné, la semaine dernière, que ce projet de loi ne révolutionnait pas la voie d'eau française. C'est vrai, pour une raison simple : un développement fulgurant nécessiterait des sommes importantes que nous n'avons plus et un consensus général que nous atteignons rarement. Il n'est qu'à entendre les réactions hostiles des écologistes locaux quand est imaginée la création de nouvelles voies fluviales. Le souvenir du projet avorté reliant le Rhin au Rhône résonne encore douloureusement dans ma mémoire franc-comtoise. Ce constat ne nous empêche pas d'en faire un autre : sans même mentionner Seine-Nord, nous disposons d'un réseau existant particulièrement vaste et prometteur. En ne retenant que le grand gabarit, ce sont tout de même encore 1 800 kilomètres qui maillent le territoire français. Le réseau secondaire peut également servir à convoyer du fret : mes travaux m'en ont convaincue.
Nous avons donc un potentiel important : il reste à le valoriser en exprimant sa pleine mesure. Je salue notre collègue Alain Gest et, à travers lui, tous les personnels qui oeuvrent en ce sens au sein de VNF comme dans les services de l'État. Ils ne ménagent pas leurs efforts. Nous devons leur donner un outil efficace, propre à faciliter leurs actions. Cet outil, c'est le nouvel établissement public administratif que ce projet de loi propose d'instituer.
Notre commission examine ce texte après son passage au Sénat. Les sénateurs – les nouveaux sénateurs, devrais-je dire – ont modifié le projet pour y faire figurer, ce que je comprends, des marqueurs idéologiques par le biais de questions de structure de capital et de construction de logements. Nous pourrions les effacer et aller au « dernier mot ». À travers mes amendements, je proposerai plutôt une voie médiane propre à satisfaire chacun. Le développement des voies d'eau françaises ne doit pas reposer sur des querelles strictement préélectorales. Nous ferons un pas vers le Sénat ; j'ose espérer qu'il fera à son tour un pas vers nous et que nous éviterons l'écueil d'une CMP conflictuelle – je compte sur vous à cette fin, mes chers collègues.
En ce qui concerne le coeur du projet de loi, c'est-à-dire le transfert d'agents publics de l'État au nouvel établissement public administratif VNF, je pense que le dispositif prévu permet à la fois de rassurer les fonctionnaires craignant une privatisation de leur activité, les salariés de droit privé redoutant une dilution de leur identité dans une culture publique et les pouvoirs publics à la recherche d'une plus grande cohérence dans la chaîne hiérarchique. Les usagers des voies d'eau ont d'ailleurs compris l'intérêt de cette réforme : ils lui ont exprimé un soutien unanime.
Restent quelques questions en suspens. Il y a celle du nom du nouvel établissement public, VNF ou Agence nationale des voies navigables. Le Sénat a opté pour la première solution. Nous aurons le débat, mais je pense que nous pourrons acter la persistance de la marque VNF.
Il y a aussi la question du domaine public fluvial, que le projet de loi confie à VNF en gestion, et que beaucoup suggèrent de transférer en pleine propriété. Je sais qu'il s'agit, pour certains, d'un symbole : c'est une orientation que nous pourrions soutenir.
Enfin, monsieur le ministre, les négociations avec les syndicats mentionnaient la perspective d'une cartographie des emplois et de réunions préparatoires avant le vote du projet de loi. À ma connaissance, le processus a pris du retard. Il est vrai que la loi n'est pas encore votée – nous sommes bien placés pour le savoir.
Mes chers collègues, je vous appellerai à voter en faveur de ce projet de loi institutionnel, tout en ayant conscience qu'il restera beaucoup à faire en ce qui concerne la politique de développement. Il faudra concevoir une meilleure articulation du transport de fret sur l'ensemble du réseau et prévoir la mise en cohérence avec les infrastructures portuaires, routières et ferroviaires. Ce texte est un outil : il accompagne une volonté politique. Il ne nous dit pas quel sera l'avenir de Saône-Rhin, de Saône-Moselle ni quelle progression de part modale induira Seine-Nord.
C'est néanmoins un préalable incontournable : c'est pourquoi je le soutiens.
Monsieur le ministre, à propos du projet Seine-Nord Europe, vous avez évoqué le dialogue compétitif. Pourriez-vous détailler à nouveau les financements et l'échéancier ?
La nouvelle agence pourra créer des filiales et prendre des participations pour valoriser son domaine, public et privé, et réaliser des opérations d'aménagement connexes à ses missions ou complémentaires de celles-ci. Pourriez-vous être plus précis sur cette orientation, qui fait l'objet d'un amendement du rapporteur ?
Nous serions également heureux de recevoir des informations sur le budget de cette future agence – nous avons évoqué la question au cours de l'audition d'Alain Gest.
Enfin, selon mes informations, trois des organisations représentatives auraient signé le protocole du 24 juin ; or j'ai lu que la CGT, la CFDT, UNSA et FO avaient voté contre. J'ai un certain mal à m'y retrouver ! Quelles organisations représentatives du ministère ont finalement signé ce protocole ?
Comme je l'ai dit mercredi dernier à M. Alain Gest, président de VNF, le groupe Nouveau Centre considère que ce texte répond à une logique d'efficacité, notamment en créant l'Agence nationale des voies navigables qui s'attaque enfin à l'éclatement de la gestion du domaine fluvial, préjudiciable à l'utilisation optimale de la voie d'eau. Aujourd'hui, en effet, la gestion du réseau fluvial est confiée à une multitude de partenaires. La majeure partie du domaine fluvial – 6 100 kilomètres sur les 8 500 – est confiée à l'établissement public VNF ; l'État en a conservé en gestion directe quelque 700 kilomètres et il a concédé à la Compagnie nationale du Rhône 330 kilomètres de voies navigables à grand gabarit. Par ailleurs, plus de 1 000 kilomètres à petit gabarit ont été transférés à des collectivités territoriales dans les années 1980 dans les régions Picardie, Pays-de-la-Loire, Bretagne et Poitou-Charentes. Enfin, la région Bourgogne s'est engagée jusqu'à la fin de 2012 dans une expérimentation de transfert de 574 kilomètres de voies d'eau. Bref, il faut parvenir à un pilotage plus cohérent et plus unifié de ce réseau fluvial.
Le 5 avril dernier, le Président de la République est venu lancer officiellement la procédure de dialogue compétitif du canal Seine-Nord Europe, à Nesle, dans la Somme. Vous y étiez, aux côtés de Nathalie Kosciusko-Morizet et de Jean-Louis Borloo. La remise des premières propositions a eu lieu le 24 octobre dernier. Dans l'attente des offres définitives des deux compétiteurs, prévues au cours de l'année 2012, il semble que l'échéance ait été repoussée de quelques mois. Ce projet est majeur pour la France et le Nord de l'Europe : c'est pourquoi les quatre régions concernées – Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Île-de-France et Haute-Normandie – se préparent, activement et dès maintenant, à l'arrivée de ce canal à grand gabarit qui est un véritable accélérateur économique pour les territoires traversés. Comment ce projet de loi permettra-t-il de piloter encore plus efficacement les grands projets d'infrastructures du XXIe siècle ?
Ma deuxième question porte sur le renouvellement de la flotte de péniches. Je me réjouis de l'appel à projet lancé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – ADEME – concernant les « Navires du futur » : les offres doivent être remises pour le 11 janvier 2012. Quels objectifs assignez-vous à la nouvelle Agence nationale des voies navigables dans l'accompagnement du nécessaire renouvellement de la flotte française ?
Ma dernière question concerne le réseau secondaire, dont le bon fonctionnement est indispensable à l'irrigation du canal Seine-Nord Europe, notamment pour augmenter la mise sur la voie d'eau des productions céréalières de l'est de la Picardie et de la Champagne-Ardenne. En quoi la création de la nouvelle agence permettra-t-elle d'accélérer la rénovation de ce réseau secondaire qui représente, rappelons-le, quelque 6 000 kilomètres sur les 8 500 de voies navigables en France ?
Monsieur le ministre, en dépit de ce texte, demeure le problème de l'investissement dans les voies navigables. J'ai le sentiment de me retrouver, toutes proportions financières gardées, dans une discussion portant sur le ferroviaire.
Je prends acte de l'augmentation significative des crédits alloués à la voie d'eau. Toutefois, ni la pérennité de ces investissements, ni la cohérence ou l'extension de notre réseau ne sont garanties. Des sommes importantes seront consacrées à rattraper le retard ou à maintenir l'existant : cela n'est pas suffisant pour respecter les engagements du Grenelle de l'environnement et se mettre au niveau qui, aujourd'hui, devrait être le nôtre. Pour les ports de la Basse Seine – Le Havre, Rouen, Cherbourg ou Dieppe – la voie d'eau n'est pas simplement complémentaire du ferroviaire : elle est un moyen écologique, qui peut être également rapide, de rejoindre le centre du territoire national et une grande partie du territoire européen.
Ce texte prend également acte des préoccupations des personnels : VNF devient un EPA – le Sénat a adopté la disposition – et les voies navigables demeurent la propriété de l'État, ce qui n'était pas écrit d'avance.
Je ne parle pas de vous, monsieur le ministre, mais il y a eu un « avant vous » et il y aura un « après vous ». Qu'il soit inscrit dans la loi que les voies navigables demeurent la propriété de l'État me semble intéressant.
Le projet de loi préserve également les avantages collectifs et individuels des agents, quels qu'ils soient, et aucun d'entre eux ne se verra imposer une mobilité géographique. La relance concernera toutes les voies navigables et pas seulement celles qui sont dédiées au fret. L'engagement de l'État à investir quelque 840 millions d'euros pour la période 2011-2013 est également à noter, ainsi que celui de ne fermer aucune voie d'eau. Bref, la lutte paie ! Les personnels ont eu raison de faire pression, ce qui a permis d'aboutir à l'accord de juin dernier.
Je tiens à revenir sur deux amendements. Le premier, l'amendement CD 16 de madame le rapporteur, concerne les opérations d'aménagement, notamment de construction, connexes aux missions de l'établissement ou complémentaires de celles-ci. Pourquoi un tel amendement, qui vise notamment à substituer le plan local d'urbanisme au schéma de cohérence territoriale ?
Le second, l'amendement CD 11 présenté par nos collègues socialistes, vise à remettre en pleine propriété le domaine fluvial à VNF : pourquoi ?
Même si, je le répète, je prends acte des évolutions positives des derniers mois, je ne suis pas disposé à voter le texte en l'état. J'attends de connaître le sort qui sera réservé à nos amendements et les précisions qui seront apportées sur le contenu du texte que nous examinons.
Ma question concerne le bouclage du financement de la réfection de la vanne secteur implantée sur la commune de Joinville-le-Pont, à l'écluse de Saint-Maur. Cette vanne est en effet destinée à protéger une dizaine de communes, allant de la Seine-Saint-Denis à Joinville-le-Pont, dans le Val-de-Marne : elle permettrait de faire baisser de soixante à quatre-vingts centimètres le cours de la Marne en cas de crue centennale. Il manquerait 200 000 euros, et il m'a été répondu que le fonds Barnier pourrait intervenir pour boucler le financement.
J'ai demandé à M. Alain Gest, il y a quelques jours, de venir visiter cette écluse, actuellement asséchée, afin de tester la vanne secteur avant l'arrivée de l'hiver, pour éviter d'éventuelles inondations. Comment, monsieur le ministre, pourriez-vous nous aider à boucler ce financement ?
Madame le rapporteur, permettez-moi de saluer, au nom du groupe UMP, le travail réalisé dans des délais très brefs. Il est vrai que le sujet vous passionne.
Monsieur le ministre, je rejoins votre analyse visant à donner suite au Grenelle de l'environnement, lequel a souvent été à l'ordre du jour de la Commission du développement durable. Je vous rejoins également sur la nécessité de parfaire le maillage des voies navigables à l'échelle européenne : le canal Seine-Nord Europe et, plus à l'est, la liaison Saône-Moselle ou Saône-Rhin devraient y contribuer.
L'arrivée du conteneur équivalent vingt pieds (EVP) a modifié, pour nos mariniers, l'offre de matières transportables. Traditionnellement, en effet, le fret transporté par voie fluviale est composé essentiellement de vrac pondéreux – céréales, charbon, graviers, etc. Ce modèle ouvre de nouvelles perspectives : ce texte de loi permettra à VNF d'être pleinement actif sur le sujet.
Monsieur le ministre, pourquoi créer un établissement public administratif (EPA) alors que son caractère industriel et commercial (EPIC) semble évident ? Si un EPA peut, grâce à des dérogations, fonctionner comme un EPIC, pourquoi ne pas avoir créé directement un EPIC ?
Je me réjouis que le Sénat ait conservé l'appellation VNF, qui est désormais entrée dans les esprits, et je souhaite que nous fassions de même.
Je comprends que les organisations syndicales soient rassurées que le domaine fluvial reste à l'État qui est, effectivement, le mieux à même de garantir la pérennité du domaine fluvial. En revanche, qui est le plus capable de rassembler les fonds indispensables à l'entretien et à la modernisation des voies navigables ? Qui assurera le portage du passif ? Comment construire les nouvelles maquettes de financement ? La liaison Saône-MoselleSaône-Rhin sera directement concernée par le débat public sur la manière d'internaliser les coûts du transport. L'instauration d'un outil fiscal est nécessaire. Si le domaine fluvial appartient à l'État, celui-ci doit être au rendez-vous.
Par ailleurs, quid du domaine fluvial transféré aux régions ou à d'autres collectivités locales ? Sera-t-il transféré en l'état ? Sera-t-il préalablement remis à niveau avant d'être confié à une collectivité ? La question de l'état du domaine transférable est aussi importante que celle des personnels.
Enfin, monsieur le ministre, vous avez dit souhaiter avancer sur la question de la filialisation. J'avais, en accord avec le port autonome de Strasbourg, déposé un amendement en ce sens, mais il a été déclaré irrecevable. Si vous le souhaitez, vous pouvez le reprendre à votre compte.
Nul n'ignore la nécessité de moderniser la voie d'eau après l'amélioration des performances constatée depuis une décennie, amélioration qui doit beaucoup, n'en doutons pas, à la création de VNF et à sa gestion du réseau.
Ce texte est manifestement le résultat d'un travail important, lequel a permis d'arriver à un accord avec les personnels de droit public, qui représentent 93 % des effectifs, et ceux de droit privé. Vous avez élargi les compétences de Voies navigables de France, ce dont on ne peut que se féliciter puisque vous souhaitez que l'agence puisse jouer, dans la logique du Grenelle de l'environnement, un rôle en matière de biodiversité, de continuité environnementale et d'hydraulique.
La question des investissements a déjà été posée : comment seront-ils financés demain ? Comment achever la mise en cohérence du réseau fluvial avec les ports français, primordiale pour Le Havre et Marseille-Fos, en vue d'améliorer la performance des voies navigables ?
Vous avez annoncé des chiffres optimistes en ce qui concerne le financement de l'agence. Or, dans le même temps, on prévoit une réduction des moyens de l'agence de 28 millions pour 2012 et peut-être plus pour l'année suivante. Qu'en est-il également de la taxe hydraulique, qui risque d'être gelée ?
Enfin, les discussions avec les régions Midi-Pyrénées et Bourgogne révèlent que les conditions du transfert sont loin d'être satisfaisantes pour les collectivités territoriales : quelles précisions pouvez-vous apporter en la matière ?
Madame le rapporteur, s'agissant de la cartographie des emplois, conformément aux engagements pris par l'État avec les agents des services de navigation, des directions départementales des territoires et de la mer et de VNF, une série de réunions a été organisée – la première s'est déroulée il y a deux semaines. Après plusieurs décalages de dates, demandés par les syndicats, les échanges doivent se poursuivre pour permettre une finalisation de la démarche d'ici au mois de mars 2012.
En ce qui concerne le projet de nouvelle liaison Saône-MoselleSaône-Rhin, en application des lois Grenelle, VNF est chargé de la préparation de la saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP). Un comité de pilotage des études préparatoires a été mis en place. Les études sont en cours pour permettre l'association des différentes parties prenantes et du public. L'objectif est de saisir la CNDP l'année prochaine.
Monsieur Chanteguet, le coût global du projet de canal Seine-Nord Europe s'élève à 4,2 milliards d'euros courants, hors taxes, dans l'hypothèse d'une réalisation de 2011 à 2015. Ce calcul n'intègre pas les coûts d'aménagement des quatre plates-formes multimodales projetées à Cambrai-Marquion, Péronne, Nesle et Noyon, qui sont estimées à 200 millions. Un protocole d'intention a été signé le 11 mars 2009 avec les régions Île-de-France, Nord-Pas-de-Calais et Picardie, qui prévoit une contribution publique initiale de 2,1 milliards d'euros : 330 millions de l'Union européenne, 900 millions de l'État et 900 millions des collectivités territoriales associées au projet. Des inquiétudes demeurant sur l'engagement de ces dernières, il était légitime que l'État cherche à les lever avant de s'engager dans un projet d'une telle ampleur. Les présidents des trois régions citées ont, depuis lors, confirmé par écrit leur engagement à hauteur de 510 millions d'euros. Par ailleurs, les conseils généraux de l'Oise, du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme ont confirmé au préfet de la région Picardie, préfet coordinateur, leur engagement à hauteur de 200 millions d'euros pour l'aménagement des quatre plates-formes multimodales, qui feront l'objet d'un protocole spécifique. Enfin les grands ports maritimes du Havre, de Rouen et de Dunkerque, ainsi que le port de Paris, participent au projet. Le montant de leur contribution, en contrepartie de l'activité engendrée par le canal, est en discussion avec le directeur général de VNF : il se situe d'ores et déjà autour de 106 millions d'euros. La Commission européenne, qui subventionne le projet à hauteur de 333 millions d'euros dans le cadre du programme pluriannuel de Réseau transeuropéen de transport (RTE-T), a pris note du retard du lancement de la consultation pour le canal Seine-Nord Europe ; elle devrait nous confirmer le montant de son engagement. Compte tenu du maintien par l'État de sa participation initiale de 900 millions d'euros, et de sa couverture ultérieure du risque trafic estimée à plus de 1 milliard d'euros, le besoin de financement du projet est couvert à 97,7 % du coût objectif, soit 4,216 milliards d'euros. Il nous reste cinq ans avant l'achèvement du projet : il ne devrait pas être insurmontable de trouver, d'ici là, les 2,3 % manquants.
C'est un projet de partenariat public-privé qui engage l'État et sur le calendrier duquel la réorganisation de VNF n'a aucun impact. Le choix du candidat à l'issue du dialogue compétitif est en cours : il sera effectué à l'été 2012. Deux groupes y participent.
Enfin, monsieur Chanteguet, le protocole du 24 juin dernier a été signé par trois organisations syndicales du ministère chargé des transports : UNSA, CGT et CFDT. En revanche, les discussions au conseil supérieur de la fonction publique ont été interrompues par le départ des organisations syndicales représentatives de l'ensemble des fonctionnaires d'État : aucun vote n'a donc pu avoir lieu.
Plutôt une façon de lutter – c'est ce que vous avez affirmé précédemment. (sourires)
Les « péniches du futur », monsieur Demilly, bénéficieront d'un financement au titre du programme « Navires du futur » : 100 millions d'euros sont prévus dans le cadre du Grand Emprunt. Le ministère veille à ce que le secteur fluvial soit bien représenté dans l'appel d'offres en cours.
Je rappelle, par ailleurs, que ce projet de loi vise à placer, pour plus d'efficacité, les agents de la voie d'eau sous une même autorité.
S'agissant de la propriété des voies, il n'existait pas vraiment de doute, monsieur Paul, mais on peut se réjouir que le principe soit explicitement consacré.
En ce qui concerne les filiales, il faut distinguer les cas dans lesquels la présence de la puissance publique est souhaitable, notamment pour les opérations d'aménagement, et ceux dans lesquels l'exigence d'une participation publique majoritaire dans le capital pourrait conduire à un blocage – je pense notamment à la production d'hydroélectricité. Le rapporteur présentera une solution à laquelle je suis favorable. Nous avons besoin d'aménagements rapides et souples, ainsi que d'un effet de levier dans certains cas.
La vanne secteur évoquée par Olivier Dosne contribue à la lutte contre les inondations de la Marne en amont de Joinville-le-Pont, notamment en cas de crue centennale. Elle est implantée dans l'écluse de Saint-Maur, à l'amont du tunnel du même nom qui permet de court-circuiter la boucle de la Marne. Pour participer de manière fiable à la protection des riverains contre les inondations, cet ouvrage, construit il y a plus de soixante-dix ans, doit être remplacé. La maîtrise d'ouvrage est assurée par le conseil général du Val-de-Marne, qui en a confié la maîtrise déléguée à Voies navigables de France. La vanne est, en effet, imbriquée dans l'écluse de navigation. Le préfet du Val-de-Marne veille à coordonner l'intervention de toutes les parties prenantes, notamment en matière de financement. Préalablement à la réalisation des travaux, une étude technique doit être réalisée pour déterminer le dimensionnement et les caractéristiques de la vanne, de façon à assurer son efficacité tant pour la navigation que pour la lutte contre les inondations, en amont et en aval. En raison de la dérivation du tunnel-canal de Saint-Maur et de la confluence avec la Seine, les effets hydrauliques nécessitent un examen approfondi. Le maître d'ouvrage a transmis, le 9 novembre dernier, une demande de subvention pour la réalisation de l'étude. Sous réserve de l'instruction du dossier, je confirme la participation de l'État au financement de l'étude à hauteur de 50 % du coût, par l'intermédiaire du fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, et au financement des travaux à hauteur de 25 %. Je m'associe par ailleurs au souhait que les travaux débutent dans les meilleurs délais. VNF recherche les financements complémentaires.
Monsieur Herth, la question de la qualification juridique de l'établissement est délicate : VNF restera un établissement public à double visage, exerçant des missions de service public de nature administrative ainsi que des missions de nature industrielle et commerciale. La discussion avec les représentants du personnel ayant permis de constater le poids désormais important des missions de service public et des agents de droit public, le Gouvernement propose de préserver l'équilibre actuel : VNF deviendra un établissement public administratif dérogatoire. Son coeur de métier sera certes administratif, mais il continuera d'exercer d'importantes fonctions industrielles et commerciales.
En matière d'expérimentation, le projet de loi maintient la possibilité que la loi de 2004, relative aux libertés et responsabilités locales, offre aux collectivités intéressées. L'ensemble du personnel sera d'abord placé sous l'autorité de VNF, puis il pourra rejoindre la collectivité territoriale.
Monsieur Duron, l'État respectera son engagement d'investir 840 millions d'euros dans la voie d'eau. Quant à la taxe hydraulique, elle a bien été augmentée. Il y aura certes une contribution à l'effort collectif de réduction des dépenses publiques, mais nous veillerons à ce que l'impact soit aussi limité que possible.
Comme le rapporteur et Paul Durieu, je suis issu d'une région où certains gouvernements ont bloqué des projets de voies navigables qui nous auraient permis d'être beaucoup mieux équipés aujourd'hui – je pense, en particulier, à la liaison du Rhin et du Rhône. Le lancement du canal Seine-Nord Europe, les montants investis dans la rénovation fluviale et ce projet de loi relatif à VNF démontrent que ce Gouvernement ne se limite pas aux discours : il passe aux actes en donnant la priorité au fluvial.
Merci beaucoup pour toutes ces précisions qui contribuent à éclairer le texte dont nous sommes saisis.
◊
◊ ◊
La Commission procède à l'examen des articles du projet de loi.
CHAPITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX MISSIONS ET A L'ORGANISATION DE VOIES NAVIGABLES DE FRANCE
La Commission est saisie de l'amendement CD 5 de M. Daniel Paul.
Nous souhaitons que les protocoles d'accord des 24 juin et 1er juillet dernier soient respectés : les personnels avaient souhaité un changement de nom de l'entité. Les coûts induits – remplacement des panneaux ou réimpression des enveloppes – ne constituent pas un argument recevable.
Je comprends les raisons de ce souhait, qui avait été initialement satisfait. Toutefois, je comprends également que l'on désire, pour plus de simplicité, conserver le nom de Voies navigables de France, désormais connu au plan national. Je rappelle que la SNCF et La Poste ont pu changer de statut sans changer de nom. Mon avis est donc défavorable.
Nous risquons de porter atteinte à la négociation difficile, mais équilibrée, qui a eu lieu.
Le Sénat a fait preuve de bon sens. Il n'y a pas que l'aspect financier : la notoriété de l'établissement public compte aussi. Rien ne justifie qu'on modifie son nom, même s'il ne sera plus un EPIC mais un EPA.
La Commission rejette l'amendement.
Article 1er (art. L. 4311-1, L. 4311-1-1 [nouveau], L. 4311-1-2 [nouveau], L. 4311-1-3 [nouveau], L.4311-2 et L. 4312-1 du code des transports) : Modification du statut de l'établissement public gestionnaire de la voie d'eau, définition de ses missions et des modalités d'élection des représentants du personnel à son conseil d'administration
La Commission est saisie de l'amendement CD 13 du rapporteur.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Elle en vient à l'amendement CD 14 du rapporteur.
La préservation des zones humides doit constituer l'une des missions principales de VNF : il faut protéger ces importants réservoirs de biodiversité. VNF doit, en outre, concourir à la prévention des inondations.
Cet amendement est pertinent. VNF a effectivement un rôle important à jouer dans la sauvegarde des zones humides et la préservation de la biodiversité.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Puis elle est saisie de l'amendement CD 11 de M. Philippe Duron.
Il s'agit de remettre à VNF la pleine propriété du domaine public fluvial attaché au réseau magistral, sujet sur lequel la loi « Grenelle 1 » demandait au Gouvernement de remettre un rapport au Parlement dans un délai de six mois.
Je n'ai pas besoin de rappeler les problèmes de ressources que connaissent les structures chargées de gérer de grandes infrastructures. Par ailleurs, si l'on permet la création de filiales pour développer une partie du domaine, pourquoi ne pas confier entièrement celui-ci à VNF ?
Je n'ai pas d'avis tranché sur la question, mais il me semble que ce transfert va dans le sens de l'histoire. M. Gest pourrait-il nous donner son avis en tant que président de VNF ?
Je me suis exprimé la semaine dernière en ma qualité de président de VNF. En tant que député, je me prononcerai par mon seul vote.
Je propose à Philippe Duron de supprimer le gage de son amendement, qui ne me semble pas nécessaire à sa recevabilité.
La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié, M. Daniel Paul votant contre.
Puis elle examine l'amendement CD 9 de M. Daniel Paul.
Le recours à la sous-traitance doit certes être autorisé, mais nous souhaitons privilégier la maîtrise de la gestion et de l'exploitation des voies d'eau par le personnel de l'établissement.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CD 18 du rapporteur.
Elle examine ensuite l'amendement CD 6 de M. Daniel Paul.
Avis défavorable. Les investissements à réaliser étant assez lourds, nous ne pouvons pas délibérément exclure des financements potentiels.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CD 15 du rapporteur.
Par cet amendement, je souhaite préciser que l'exploitation de l'énergie hydraulique ne doit pas nuire à la navigation.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CD 19 du rapporteur.
Puis elle examine l'amendement CD 16 du rapporteur.
Afin de garantir la compatibilité des opérations réalisées avec les orientations relatives à l'aménagement du territoire, le Sénat a introduit une référence aux schémas de cohérence territoriale (SCOT). Je propose de retenir plutôt les plans locaux d'urbanismes (PLU).
L'échelle des SCOT me semble plus pertinente que celle des PLU pour les travaux de nature hydraulique – ils dépassent souvent le ressort d'une seule commune. Pourquoi ne pas faire référence à la fois aux SCOT et aux PLU ?
Il doit y avoir une cohérence entre les PLU et les SCOT. Elle est d'ailleurs plus compliquée à réaliser qu'à l'époque des schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme (SDAU). N'alourdissons pas encore le dispositif !
Je rappelle que ces opérations d'aménagement ne peuvent se concevoir qu'en parfaite coordination avec les collectivités territoriales concernées, lesquelles appliquent évidemment les règles d'urbanisme qu'elles ont établies. Ce qu'a prévu le Sénat me paraît donc superfétatoire : on ne peut pas imaginer d'opérations d'aménagement qui ne s'inscriraient pas dans le cadre des documents d'urbanisme.
Je fais remarquer que si nous adoptons cet amendement, plusieurs amendements de coordination seront nécessaires.
Avant d'adopter cet amendement, il serait préférable d'examiner plus précisément ses conséquences juridiques.
L'amendement CD 16 est retiré, de même que l'amendement CD 20 du rapporteur.
La Commission examine ensuite l'amendement CD 17 du rapporteur.
Le Sénat a prévu que VNF pourrait « créer des filiales à capitaux majoritairement publics ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes à capitaux majoritairement publics en vue de réaliser toute opération utile à ses missions… ».
Après le mot : « filiales », je vous propose d'ajouter les dispositions suivantes : « ou prendre des participations dans des sociétés, groupements ou organismes en vue de réaliser toute opération utile à ses missions. Ces filiales créées par l'établissement public et ces sociétés, groupements ou organismes dans lesquels l'établissement public prend des participations, doivent être à capitaux majoritairement publics lorsqu'ils ont vocation à réaliser des opérations d'aménagement. »
Je peux comprendre l'objectif de cet amendement, en particulier pour les investissements de nature énergétique, mais je suis gêné par l'ambiguïté de sa rédaction : on ne sait pas quel est l'objet de ces sociétés, groupements et organismes.
Il est clairement indiqué que seules sont concernées des opérations d'aménagement.
Par ailleurs, je rappelle que nous avons souhaité conserver les orientations retenues par la nouvelle majorité sénatoriale afin de favoriser un travail en bonne intelligence entre les deux assemblées. Je crois qu'il peut y avoir un consensus autour de cette rédaction.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité, M. Daniel Paul s'abstenant.
Elle examine ensuite l'amendement CD 7 de M. Daniel Paul.
Je propose d'instituer un conseil de service aux usagers pour suivre les problèmes de sécurité, d'hygiène et de cadre de vie dans l'ensemble du réseau.
Sur le fond, je suis d'accord avec vous : j'ai l'intention de déposer un amendement en séance publique tendant à créer une interprofession pour favoriser ce dialogue. Je vous suggère donc de retirer votre amendement. Si le mien ne vous convenait pas, vous pourriez évidemment redéposer le vôtre.
Je suis défavorable à l'amendement de Daniel Paul pour des raisons de forme : il existe déjà des comités régionaux de bassin que VNF souhaite faire mieux fonctionner en redessinant leurs contours. Tout cela relevant du fonctionnement interne de VNF, il ne serait pas judicieux de légiférer. Laissons un peu de marge de manoeuvre à l'établissement ! Les mesures que nous pourrions adopter risquent de bloquer la situation.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement de précision CD 21 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 1er ainsi modifié.
La Commission réserve la discussion du chapitre II.
CHAPITRE III
DISPOSITIONS RELATIVES A LA DÉCENTRALISATION, A LA GESTION DOMANIALE ET A LA POLICE DE LA NAVIGATION INTÉRIEURE
Article 3 (art. L. 4241-3 [nouveau], L. 4272-1 [nouveau] et L. 4313-3 du code des transports, L. 774-2 et L. 774-6 du code de justice administrative) : Police de la navigation intérieure
La Commission adopte l'article 3 sans modification.
Article 4 (art. L. 2132-23 et L. 3113-1 du code général de la propriété des personnes publiques) : Constat des contraventions de grande voirie. Restriction du transfert des ports intérieurs
La Commission adopte l'article 4 sans modification.
Article 4 bis (nouveau) (art. L. 4211-1 du code des transports) : Navigation des bateaux traditionnels dans les eaux intérieures
La Commission est saisie de l'amendement CD 12 de M. Serge Grouard, portant article additionnel après l'article 4.
Cet amendement, cosigné par Fabienne Labrette-Ménager, vise à remédier à une difficulté qui concerne la batellerie traditionnelle, dite de « patrimoine », malencontreusement assimilée aux embarcations classiques alors qu'elle ne peut matériellement pas respecter la même réglementation en termes de sécurité. De même qu'on n'impose pas aux voitures anciennes de ne circuler qu'à condition d'être pourvues de ceintures de sécurité, nous souhaitons faire en sorte que les bateaux traditionnels, souvent restaurés par des associations de bénévoles, puissent continuer à naviguer.
À l'image de ce que nous avons décidé pour les véhicules de collection, cet amendement permettra la conservation, la restauration et l'utilisation des bateaux traditionnels. C'est une question de patrimoine, mais aussi de tourisme.
Pour faire un tour en gabare sur la Dordogne, faudra-t-il être membre de l'association qui gère ce bateau ?
L'objet de l'amendement est de permettre à ceux qui entretiennent et restaurent ces bateaux de naviguer. La question que vous posez ne nous a pas échappé, mais elle est marginale par rapport au problème auquel on se heurte aujourd'hui.
Comment se fera la classification ? Dans le cadre du dispositif concernant les « bateaux d'intérêt patrimonial », qui fonctionne bien, elle est assurée par un organisme – elle ouvre droit, en effet, à certains avantages fiscaux, notamment en matière de droit de francisation.
Imaginons qu'il y ait, d'une part, une association gérant des bateaux anciens et transportant quelques touristes pour se procurer des subsides supplémentaires et, d'autre part, une entreprise à but lucratif qui exploite des navires moins anciens. Que passera-t-il ?
L'amendement vise des associations dont seuls les membres ont vocation à embarquer à bord, ce qui évitera toute concurrence subreptice. Dans l'hypothèse que vous évoquez, monsieur Paul, le bateau a vocation à être soumis à la réglementation de droit commun. On peut d'ailleurs penser que les modifications réalisées pour accueillir des passagers ne permettront plus au bateau d'être considéré comme présentant un intérêt patrimonial.
Monsieur Boënnec, nous nous orientons vers le type d'organisation que vous évoquiez.
Je rappelle que la fondation présidée par Gérard d'Aboville est tournée, pour le moment, vers les bateaux maritimes. Elle commence toutefois à s'intéresser également aux bateaux fluviaux.
La Commission adopte l'amendement à l'unanimité.
Mme Fabienne Labrette-Ménager, vice-présidente, remplace M. Serge Grouard à la présidence de la Commission.
La Commission revient à la discussion du chapitre II, précédemment réservé.
CHAPITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AU PERSONNEL DE VOIES NAVIGABLES DE FRANCE
Article 2 (art. L. 4312-3, L. 4312-3-1 [nouveau], L. 4312-3-2 [nouveau], L. 4312-3-3 [nouveau] et L. 4312-3-4 [nouveau] du code des transports : Pouvoirs du directeur général, composition du personnel. Instances représentatives du personnel. Emploi et recrutement du personnel. Organisation et aménagement du temps de travail des agents de droit public
La Commission examine l'amendement CD 8 de M. Daniel Paul.
Nous demandons que les besoins permanents de VNF soient pourvus par des fonctionnaires ou des agents de statut assimilé.
Cet amendement souhaite un recrutement des salariés de droit privé de VNF par VNF. Je ne vois pas comment il pourrait en aller autrement. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CD 22 et CD 23 du rapporteur.
Elle est ensuite saisie, en présentation commune, des amendements CD 1, 4, 2 et 3 de M. Alain Gest.
Si vous le voulez bien, je présenterai en même temps plusieurs amendements relatifs au Comité technique unique, qui ont été cosignés par Jérôme Bignon.
L'amendement CD 1 précise de quels moyens disposera la formation représentant les salariés de droit privé au Comité technique unique. Nous souhaitons pérenniser les possibilités d'intervention dont bénéficient les salariés.
L'amendement CD 4 accorde à cette même formation la personnalité morale, ce qui lui permettra de continuer de gérer des oeuvres culturelles et sociales.
Enfin, les amendements CD 2 et 3 garantissent que les mandats des salariés de droit privé ne seront pas noyés dans la nouvelle organisation – ces salariés, qui ne représentent que 10 % des effectifs, risquent en effet de ne plus être représentés.
Toutes ces dispositions sont conformes aux accords signés par la direction générale de VNF, qui ne sont pas repris par le projet de loi. Nous devons pourtant les respecter.
Sur l'amendement de précision CD 1, mon avis est favorable. En revanche, je suis défavorable aux amendements CD 4, CD 2 et CD 3. Je comprends les inquiétudes qui peuvent s'exprimer, mais il me semble que ce texte vise à rapprocher les agents publics des salariés de droit privé. Je ne crois pas qu'il faille créer un fossé supplémentaire entre chaque catégorie, même si le texte prévoit que chacune d'entre elles conservera ses conditions d'emploi et de statut.
Sans la personnalité morale, la formation représentant les salariés de droit privé au sein du Comité technique unique ne pourra pas avoir une gestion libre des oeuvres culturelles et sociales. Dès lors, ce qui a été convenu pourra ne pas être respecté.
Madame le rapporteur, une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec votre analyse. Il me semble en effet que sur ces questions, le texte a trouvé un équilibre. Bien sûr, le respect des statuts des personnels de droit privé est nécessaire. Mais dans d'autres établissements ou entreprises publics au sein desquels cohabitent des personnels de statuts différents, nulle part la division en termes d'organisations syndicales n'est consacrée. Dans ce domaine, il faut permettre aux salariés de s'organiser au mieux pour tendre progressivement vers l'unité.
Comme Philippe Duron, je soutiens Alain Gest. Et le plaidoyer de Daniel Paul m'y encourage encore davantage. Contrairement à lui, je pense qu'il faut donner des garanties à cette partie du personnel qui sera minoritaire dans l'entreprise. Elle mérite autant que les autres de bénéficier d'un cadre légal qui la rassure sur son avenir au sein de VNF.
L'équité et l'équilibre auraient été parfaits si le dialogue avec les salariés de l'établissement public VNF d'aujourd'hui avait été aussi approfondi que celui qui s'est instauré avec les agents publics du ministère. Dans la mesure où tel n'a pas été le cas, il est souhaitable que des garanties soient données aux quelque 370 salariés actuels de l'établissement, qui sont globalement favorables à l'évolution de celui-ci alors qu'ils savent très bien qu'ils représenteront demain moins de 10 % de ses effectifs, et qui veulent que les engagements pris envers eux soient respectés. Les amendements que j'ai rédigés avec Jérôme Bignon ont pour objet d'assurer par écrit le respect de ces engagements.
Monsieur Gest, certes des engagements ont bien été pris au printemps dernier, mais le Parlement a aussi le droit d'imprimer sa volonté. Vous avez vous-même souhaité conserver le nom VNF, contre la lettre même de ces engagements. Pour nous, le texte, qui a fait consensus – nous avons nous aussi rencontré les personnels –, assure la représentativité et le respect des garanties souhaitées. Nous ne pouvons pas aller au-delà. Je réitère donc mon avis défavorable aux amendements CD 4, CD 2 et CD 3.
La Commission adopte l'amendement CD 1 à l'unanimité, puis elle adopte successivement les amendements CD 4, CD 2 et CD 3.
La Commission adopte ensuite les amendements rédactionnels CD 24, CD 25, CD 26, CD 27, CD 28 et CD 29 du rapporteur.
La Commission adopte alors l'article 2 ainsi modifié.
CHAPITRE IV
DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES
Article 5 : Transfert des services aux collectivités territoriales devenant gestionnaires de voies d'eau
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 6 : Transfert des services ministériels déconcentrés à Voies navigables de France
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 7 : Modalités de transfert des personnels, statut et régime transitoire d'organisation et d'aménagement du temps de travail des personnels transférés
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 8 : Régime transitoire des instances représentatives du personnel
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 9 : Coordination législative
La Commission maintient la suppression de l'article.
Article 10 : Abrogation d'une disposition devenue inutile
La Commission adopte l'article sans modification.
Article 11 : Règles d'entrée en vigueur de la loi
L'amendement CD 46 du rapporteur est retiré.
La Commission adopte ensuite l'article 11 sans modification.
◊
◊ ◊
Enfin, la Commission adopte l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 15 novembre 2011 à 17 h 30
Présents. - M. Yves Albarello, M. Philippe Boënnec, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Stéphane Demilly, M. Olivier Dosne, M. Paul Durieu, M. Philippe Duron, M. Daniel Fidelin, M. Alain Gest, M. Serge Grouard, M. Antoine Herth, Mme Fabienne Labrette-Ménager, M. Jacques Le Nay, M. Gérard Menuel, M. Yanick Paternotte, M. Daniel Paul, M. Philippe Plisson, M. Joël Regnault, M. Max Roustan
Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Jérôme Bignon, M. Philippe Briand, M. Yves Cochet, M. Jean-Claude Fruteau, M. Joël Giraud, M. Jean Lassalle, M. Apeleto Albert Likuvalu, M. Jean-Pierre Marcon, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Bertrand Pancher, M. Christophe Priou, M. Jean-Marie Sermier