COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mercredi 16 mars 2011
La séance est ouverte à seize heures vingt.
(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)
La Commission procède à l'audition, ouverte à la presse, de M. Charles Beigbeder, président de la candidature d'Annecy aux Jeux olympiques d'hiver de 2018, accompagné de M. Pierre Mirabaud, directeur général de la candidature, et de M. Hervé Rey, directeur délégué.
Je vous souhaite la bienvenue, messieurs, devant notre commission des affaires culturelles et de l'éducation, qui a également le sport parmi ses compétences et qui est très désireuse de manifester ses encouragements au grand projet que vous portez.
Nous avons constaté avec le plus grand plaisir que la récente visite à Annecy et sur les sites olympiques de la commission d'évaluation du Comité international olympique (CIO) s'est achevée sur une note très positive et que les rencontres avec les autorités les plus éminentes de l'État ont su convaincre le CIO du soutien des pouvoirs publics à ce projet.
Nous souhaitons donc confirmer collectivement ce soutien qu'exprime bien sûr en permanence, à Paris comme à Annecy, le président de notre assemblée, M. Bernard Accoyer qui, retenu par d'autres obligations, est désolé de ne pouvoir être parmi nous.
Les prochaines échéances de la candidature sont proches : la commission d'évaluation rendra publique son appréciation technique le 10 mai, puis vous irez la semaine suivante défendre la candidature d'Annecy devant le CIO.
Vous allez donc nous dire comment vous préparez ces échéances, comment vous allez continuer à donner toutes ses chances à la candidature, comment vous avez résolu la question financière qui avait menacé un temps la conduite du projet. Enfin, nous attendons que vous illustriez votre conviction que la candidature d'Annecy peut emporter le vote du CIO le 6 juillet prochain à Durban en Afrique du Sud.
Rêvons un peu !
Dire que nous voulons organiser, en 2018, les Jeux olympiques et paralympiques d'hiver à la montagne peut paraître une plaisanterie. Loin s'en faut, car c'est une des très grandes forces de notre projet que de vouloir accueillir, à Annecy et à Chamonix, des compétitions de sports d'hiver, de glace et de neige, dans un cadre adapté pour cela, ce qui n'a pas été le cas depuis plusieurs olympiades d'hiver.
Ce projet – c'est une autre de ses grandes forces – bénéficie du soutien total de nos champions olympiques, de grands athlètes nationaux, mais aussi internationaux. En effet, les champions ne sont pas simplement là pour faire bon effet sur les brochures ou à la télévision : ils ont participé très étroitement à la conception des sites, ceux de compétition comme ceux de célébration. Cela se sait dans le monde entier et nous vaut le soutien de très nombreux athlètes, qui veulent que nous obtenions les Jeux d'hiver de 2018.
L'aspect environnemental est également très important : le changement climatique affecte aussi la montagne, et il faut aujourd'hui penser la montagne du XXIe siècle et les stations de sports d'hiver du futur. Les Jeux pourraient être l'occasion d'accélérer la nécessaire mutation de nos stations et de nos montagnes pour que les sports et le tourisme d'hiver soient encore plus respectueux de l'environnement qu'ils ne le sont aujourd'hui.
Le 10 janvier dernier, l'association loi de 1901 qui portait le projet de candidature est devenue le groupement d'intérêt public « Annecy 2018 ». Le comité directeur, qui en est l'organe décisionnel, m'a le même jour nommé président tandis que Pierre Mirabaud devenait directeur général. Siègent également à ce comité des représentants de ceux que j'appellerai les « fondateurs » du projet – Comité national olympique et sportif français (CNOSF), État, villes d'Annecy et de Chamonix, région Rhône-Alpes, conseil général de Haute-Savoie –, mais aussi des acteurs économiques, des athlètes et un certain nombre de personnalités, en particulier Gérard Masson, président de la Fédération handisport. C'est au sein de ce comité directeur, qui se réunit régulièrement, que se prennent les grandes décisions pour que tout soit fait pour que nous l'emportions à Durban en juillet prochain.
C'est également le 10 janvier que l'équipe qui a énormément travaillé depuis des mois sur le dossier extrêmement bien fait de candidature l'a déposé auprès du CIO, à Lausanne.
Nous avons ensuite été la première ville candidate à recevoir la visite de la commission d'évaluation du CIO afin d'évaluer notre candidature sur 17 sujets aussi divers que les transports, la sécurité, l'hébergement, les villages olympiques, les centres médias, les sites de compétition et de célébration, la météo, etc. Nous avons ainsi été auditionnés, lors de 17 grands oraux d'une heure et demie, par 14 membres du CIO et par des experts, et tout s'est très bien passé. Nous avons bénéficié d'une météo fantastique lors des visites des sites : le lac d'Annecy et le Mont-Blanc étaient plus beaux que jamais, La Clusaz, le Grand-Bornand, le Semnoz étaient sublimes ! Les membres de la délégation se sont montrés admiratifs non seulement devant la beauté de notre territoire, mais aussi devant notre préparation, notre professionnalisme – de nombreux membres de la commission d'évaluation étant anglo-saxons, nous nous sommes efforcés de parler anglais aussi souvent que possible –, et devant l'implication sans précédent des grands athlètes lors des visites comme des présentations magistrales.
La visite s'est également très bien passée grâce au soutien des membres français du CIO, du CNOSF et des pouvoirs publics, dont la présence attestait que les grands services publics français en matière de santé, de sécurité, de transports, qui font l'admiration du monde entier, seront au rendez-vous des Jeux olympiques. Les ministres qui ont la charge de ces services étaient là, et il est tout particulièrement heureux que le Premier ministre ait accueilli la délégation et que le Président de la République l'ait saluée avant son départ, montrant ainsi que l'ensemble de la population française est derrière notre candidature.
Les réactions favorables de la commission d'évaluation ont été perceptibles et les médias se sont également montrés plutôt positifs, ce qui était heureux après les quelques difficultés de gouvernance que nous avons connues en décembre dernier.
Ainsi, le projet de candidature Annecy 2018 est de nouveau dans la course et, même si nous ne sommes toujours pas les favoris, il a toutes ses chances face aux deux autres villes candidates : Munich et Pyeongchang. Une agence internationale place aujourd'hui même les trois candidatures dans un mouchoir de poche. Nous pouvons gagner et nous allons tout faire pour cela !
Parce qu'il est très important que la population s'associe à la candidature, nous allons continuer à animer notre beau territoire, dont je salue les élus, en particulier Lionel Tardy.
Au-delà, nous devons l'emporter lors d'une élection à laquelle participent 104 membres du CIO, venant du monde entier. Il nous faut donc tous les rencontrer pour leur présenter nos arguments et les forces de notre candidature ; leur expliquer pourquoi nous voulons les Jeux à Annecy ; pourquoi cela serait bien pour notre territoire et pour notre pays, mais aussi pour la famille olympique et pour le monde. C'est surtout à cette dernière grande question que nous devons être capables de bien répondre.
Nous sommes aujourd'hui engagés dans ce « road show » et nous avons déjà commencé à rencontrer les membres du CIO. Certains sont des amis de la France, en particulier en Afrique francophone ; d'autres sont proches de nous pour diverses raisons, par exemple parce que nous les avons aidés à obtenir les Jeux à Sotchi ou à Rio. Claude Bébéar me disait hier que beaucoup des membres du CIO sont les mêmes que lors des candidatures françaises de 2001 et de 2005 ; il avait alors tissé des relations amicales avec certains d'entre eux et il va nous aider au cours de cette phase.
Nous allons aussi participer à un certain nombre de grands événements qui sont autant d'étapes sur la route de la candidature. Ainsi, nous présenterons le projet lors de la réunion des comités nationaux olympiques d'Océanie qui se tiendra à Nouméa le 26 mars. Nous serons également à Londres, du 3 au 8 avril, à l'occasion de SportAccord, cette convention de toutes les fédérations sportives internationales qui est un peu le Davos du sport. Notre présence à cette manifestation est d'autant plus importante que le bureau exécutif du CIO tiendra à cette occasion une session de deux jours.
Un événement encore plus important pour nous se déroulera à Lausanne du 17 au 19 mai où tous les membres du CIO seront présents, une semaine après la publication du rapport de la commission d'évaluation sur les points forts et les faiblesses éventuelles des trois candidatures. Nous ferons à cette occasion une présentation de 45 minutes, suivie de questions pendant la même durée. Nous espérons pouvoir convaincre, comme Rio l'avait fait lors d'une réunion analogue.
Nous participerons ensuite, le 27 juin, à la réunion des comités nationaux olympiques d'Afrique.
Enfin, c'est à Durban que le vote final interviendra le 6 juillet. Nous serons bien évidemment présents, d'autant qu'il sera encore possible de rencontrer individuellement les membres du CIO, ce dont nous ne nous priverons pas.
Nous avons voulu regrouper des sports de glace et de neige sur chacun des deux grands pôles d'Annecy et de Chamonix. Ne serait-ce que pour des raisons géographiques, une telle organisation est assez rare, qu'il s'agisse de certains Jeux olympiques d'hiver organisés dans le passé ou des dossiers qui sont en compétition avec le nôtre.
Le pôle d'Annecy accueillera donc des sports de glace – patinage artistique, patinage de vitesse, curling –, du ski nordique et du biathlon à La Clusaz et au Grand-Bornand, du ski acrobatique au Semnoz.
Le pôle de Chamonix sera l'hôte des épreuves de ski alpin et de hockey sur glace.
Un pôle secondaire sera destiné aux épreuves de luge, de bobsleigh et de skeleton, pour lesquelles nous allons, dans un souci de rentabilité, réutiliser les équipements de La Plagne qui avaient servi lors des Jeux d'Albertville.
Pour les Jeux paralympiques, nous proposons – et c'est une première – que l'ensemble des épreuves se déroulent sur le seul pôle d'Annecy : le ski à La Clusaz et au Grand-Bornand, les sports de glace à Annecy. Les athlètes seront hébergés dans le même village.
Nous aurons trois villages olympiques : 2 500 lits à Annecy, 1 400 à Chamonix, 1 200 à Saint-Jean-de-Sixt entre La Clusaz et le Grand-Bornand. Une capacité d'hébergement de 600 lits est également prévue à La Plagne.
Dans toute la mesure du possible, nous essayons d'utiliser les équipements préexistants. Tel est notamment le cas pour les épreuves de ski, avec, pour le slalom et la descente, les pistes de Chamonix, qui nécessiteront simplement quelques aménagements, et, pour le ski nordique, le stade qui vient d'être ouvert au Grand Bornand et qui a été utilisé le week-end dernier pour une épreuve de coupe d'Europe de biathlon. En revanche, nous devrons construire un tremplin de saut à ski à la Clusaz.
La patinoire de Chamonix, qui ne répond plus aux besoins, sera refaite ; la patinoire provisoire construite à Passy sera ensuite transformée en piscine. Le pôle d'Annecy disposera à Annecy-le-Vieux d'une patinoire qui sera ultérieurement transformée en équipements sportifs pour l'université, laquelle se consacre tout particulièrement à l'accueil et à la réinsertion des sportifs professionnels. Nous construirons également à Seynod, à proximité immédiate d'Annecy, une patinoire dotée d'un anneau de vitesse de 400 mètres. Un tel équipement n'existe actuellement ni en France ni dans certains pays voisins, et nous espérons qu'il permettra de développer le patinage de vitesse dans notre pays et qu'il sera utilisé par des athlètes des pays en question.
Les villages olympiques seront construits ex nihilo. Une partie importante de la capacité pourra ensuite être transformée en logements, l'autre partie étant démontée à l'issue des Jeux.
Le budget total proposé est de 3,9 milliards d'euros. Le comité d'organisation (COJO) aura à sa charge 1,4 milliard, qui proviendra pour l'essentiel de financements d'origine privée : sponsoring, partenaire du CIO, CIO lui-même, billetterie, l'État et les collectivités territoriales participant seulement à hauteur de 3 %, principalement pour couvrir le déficit des Jeux paralympiques. Le budget hors COJO, soit 2,5 milliards, couvrira la création des équipements, les travaux d'infrastructure et certains frais de fonctionnement, liés surtout à la sécurité.
S'agissant de l'impact des Jeux, on estime l'injection de richesse dont bénéficierait le territoire national à 4,5 milliards d'euros, dont 1,8 milliard pour la Haute-Savoie. Au total, 35 000 emplois non permanents seraient créés, dont une partie devrait perdurer grâce à la dynamisation du territoire.
Nous essaierons également de mener une action éducative et culturelle : un programme sera en particulier conduit avec le ministère de l'éducation nationale afin de transmettre les valeurs de l'olympisme aux élèves du département et de l'académie.
Le financement du comité de candidature est aujourd'hui assuré à hauteur de 24 millions d'euros, pour moitié par les financeurs publics – État, à travers le Centre national pour le développement du sport, et collectivités territoriales – et pour moitié par des recettes de partenariat dont 6,5 millions en numéraire et le reste en nature, notamment par la mise à disposition gratuite d'espaces publicitaires, dont on a vu récemment l'illustration lors des campagnes de publicité diffusées sur France Télévisions, sur les chaînes du groupe Bolloré et dans certaines gares SNCF.
Nous continuons à chercher des partenaires. Le président Beigbeder vient ainsi de signer, en présence de Mme Jouanno, une nouvelle convention avec la Caisse des dépôts. D'autres discussions sont en cours afin de compléter notre financement et d'aller jusqu'à Durban dans les meilleures conditions possibles.
La ministre des sports a fait récemment du « rayonnement international et de la crédibilité du sport français » une de ses priorités. Elle a toutefois rappelé que la France a déjà essuyé plusieurs échecs, en particulier pour l'organisation des Jeux olympiques de 2008 et de 2012, mais aussi pour celle du championnat du monde de handball 2015, qui a été attribuée au Qatar bien que nous ayons la meilleure équipe du monde.
Vous êtes, monsieur Beigbeder, un chef d'entreprise et vous allez naturellement vous intéresser à la question des moyens. Mais, au-delà de l'argent, comment comptez-vous montrer que l'ensemble de la population soutient Annecy 2018 ?
Avant votre nomination, nous avons assisté aux errements de cette candidature. Lorsqu'elle a été déposée, les Français ont même entendu les commentaires négatifs de certains anciens sportifs. Nous ne doutons ni de votre passion, ni de celle des habitants d'Annecy et de leurs élus. Cependant, si vous souhaitez comme vous l'avez dit « accueillir le monde entre les pentes du Mont-Blanc et les eaux pures du lac d'Annecy », ne croyez-vous pas qu'avant de parler de rayonnement international il faut d'abord susciter l'adhésion de tout un pays ? Comment développer en France une vraie culture de l'olympisme ? De quels moyens disposez-vous pour mobiliser, en cette période de crise économique et financière, nos concitoyens en faveur d'un événement sportif aussi lointain ?
Enfin, il semble que vous n'avez que tardivement pensé à associer Jason Lamy-Chapuis à la candidature. Son titre de champion du monde de combiné nordique et sa victoire dans la coupe du monde ne sont sans doute pas étrangers à votre décision…
Au total, comment créer l'élan qui porterait la candidature d'Annecy au-delà de nos frontières ?
Vous l'avez dit, la candidature était mal partie et il y a eu des problèmes de gouvernance. Quels sont les éléments qui vous permettent aujourd'hui de vous montrer plus confiant ? Comment avons-nous « remonté la pente » ? Au-delà de vos actions de lobbying pour emporter la conviction des membres du CIO, quels sont les éléments qui distinguent favorablement la candidature d'Annecy de celle de ses concurrentes ?
Votre désignation est intervenue dans un contexte un peu particulier et il semble que ni le mouvement sportif ni la région – qui sera pourtant le premier financeur public territorial du projet – n'y ont été associés.
Ces Jeux se veulent bien sûr particulièrement écologiques et c'est une bonne chose. Il semble toutefois que les associations de défense de l'environnement soient curieusement absentes de la direction du GIP.
Par ailleurs, il semble également que le CIO impose en toutes circonstances la production de neige artificielle. Pour alimenter le Semnoz, espace protégé intégré au parc naturel régional des Bauges et situé à 1 600 mètres d'altitude, il faudra ainsi acheminer l'eau depuis le lac d'Annecy, qui ne se trouve qu'à 400 mètres d'altitude. Quels risques de pollution chimique la production de neige artificielle fait-elle peser sur la qualité de l'eau d'un lac réputé pour sa pureté ?
En dépit des effets d'annonce sur la qualité de l'atmosphère en pays de Savoie, le seuil d'alerte a été franchi dans l'agglomération d'Annecy en raison de la pollution liée à la combustion des carburants. Or, le trafic de milliers d'autocars et de voitures officielles à l'occasion des jeux Olympiques aggravera à l'évidence la pollution des sites et des fonds de vallée.
On craint aussi le bétonnage de lieux protégés et préservés, ainsi que l'urbanisation du massif. Avec la création d'une structure de 42 000 places pour les seules cérémonies, le bétonnage frappera particulièrement l'esplanade du Pâquier – que je ne connais pas mais que j'espère découvrir si nous gagnons, et nous allons tout faire pour cela –, espace vert unique en bordure du lac, lieu de détente et de loisirs pour les habitants comme pour les touristes.
Comment ne pas s'interroger également sur ce que seront les activités des agriculteurs après tous les morcellements qui ne manqueront pas d'intervenir ?
Comment parler de développement durable et d'écologie dans de telles perspectives ?
J'aurais par ailleurs aimé que vous nous parliez des avantages et des inconvénients du « contrat ville hôte », ainsi que de ses répercussions financières.
Il me semble que c'est bien par le biais du sport, élément véritablement fédérateur, que l'on peut parvenir à mobiliser les Français. Ils le sont d'ailleurs d'ores et déjà : les sondages montrent qu'ils nous soutiennent à 70 %, au niveau national comme local, le soutien local pouvant toutefois varier au gré de certaines polémiques. Même si certains demeurent hésitants, la majorité de nos concitoyens supporte le projet.
Bien sûr, on peut souhaiter que cette mobilisation se renforce et qu'elle se diffuse dans les médias. Créer une telle dynamique est précisément notre travail, et j'espère que nous progresserons au fur et à mesure que le suspense ira crescendo sur notre chemin vers Durban.
Je rappelle par ailleurs qu'à défaut d'avoir obtenu l'organisation des championnats du monde de handball, la France a remporté celle de l'Euro 2016 de football… Elle est donc reconnue comme terre d'accueil des grands événements sportifs internationaux. La commission d'évaluation a d'ailleurs dit clairement qu'il n'y avait pas de doute quant à notre aptitude à organiser des Jeux d'hiver.
Nous sommes confiants dans notre capacité à l'emporter d'abord parce que nous sommes les seuls à proposer des Jeux olympiques d'hiver à la montagne, ce qui ne s'est pas produit depuis Lillehammer, les Jeux étant le plus souvent organisés dans de grandes villes, parfois en bord de mer comme Vancouver, tandis que Sotchi est une station balnéaire qui n'a aucune culture des sports d'hiver. Je suis persuadé que les athlètes et le public veulent que l'on revienne aux sources et que le CIO peut entendre qu'il est nécessaire que le mouvement olympique retrouve ses origines pour poursuivre son développement. De ce point de vue, un retour vers Chamonix, qui a accueilli les premiers Jeux olympiques d'hiver en 1924, serait un symbole assez fort.
Nous proposons également d'organiser les Jeux dans un territoire d'une beauté inégalée. Les supports de communication que nous utiliserons à l'occasion des grands événements qui se dérouleront jusqu'à Durban insisteront beaucoup sur cet aspect « carte postale » : nous y montrerons notre lac, nos montagnes, la beauté de nos sites, notre tradition hôtelière et gastronomique – cela peut jouer car les membres du CIO et leurs conjoints préfèrent sans doute passer deux mois dans un territoire très accueillant et très agréable à vivre.
Le mouvement en faveur de Jeux à taille humaine emporte également l'adhésion des athlètes. Le fait que les sites aient été conçus en étroite collaboration avec nos champions commence à être connu et c'est pour nous un avantage.
Chaque candidat affiche bien sûr sa volonté d'organiser des Jeux « verts », mais nous allons au-delà dans le respect de l'environnement puisque nous avons développé avec une ONG européenne le concept d'« éco-station », dont nous entendons que les Jeux d'Annecy favorisent le développement, avant de laisser cet héritage au monde des sports d'hiver.
Nous pouvons aussi compter sur l'engagement des membres français du CIO, Guy Drut et Jean-Claude Killy. Ce dernier donne beaucoup de son temps à la famille et à la cause olympiques : il a été plusieurs fois président d'un comité de coordination de Jeux d'hiver et jouit d'une immense crédibilité dans le monde olympique. Il est avec nous et nous soutient ; c'est aussi ce qui nous donne confiance dans nos chances de l'emporter à Durban.
Nous avons bien sûr associé un certain nombre d'associations de défense de l'environnement au projet, ce qui a d'ailleurs conduit à le modifier au fur et à mesure. Un comité de développement durable entretient cette concertation et ces échanges. Aujourd'hui, le projet est soumis à l'examen du CIO. Si nous sommes retenus, il pourra être quelque peu modifié. Mais jusqu'à la décision du CIO, il est intangible.
Nous avons essayé de limiter au maximum les emprises foncières, le bétonnage, de préserver les espaces naturels, et nous avons prévu, en cas d'installations provisoires, de remettre certains espaces en l'état antérieur. Il me semble que nous avons été bien compris de la plupart des associations avec lesquelles nous travaillons. Nous avons, par exemple, beaucoup travaillé avec le Parc naturel régional du massif des Bauges, au sud d'Annecy, parc qui englobe notamment le site du Semnoz ; un accord sera officialisé dans les toutes prochaines semaines.
De leur côté, des associations de protection de la nature ont souhaité profiter du coup de projecteur mis sur la candidature d'Annecy pour revenir sur la protection de certains sites comme, par exemple, ceux du Mont Blanc ou des Aravis. Un dialogue s'est noué entre associations, collectivités territoriales et État et a abouti à des décisions qui ne relèvent en rien du comité de candidature. Reste que notre projet est parfaitement respectueux des espaces qui sont ainsi ciblés et pour lesquels des procédures ont été lancées, comme l'a indiqué la ministre de l'écologie devant la commission d'évaluation du CIO.
Certes, des associations ou des personnes peuvent avoir des réserves à l'égard de notre projet. Toutefois, nous l'avons construit en essayant de faire en sorte de limiter son impact sur les milieux naturels, notamment en nous inscrivant systématiquement dans des sites déjà occupés.
Je tiens à vous dire deux mots sur Le Pâquier. Cet espace situé au bord du lac d'Annecy est un grand lieu de promenade et accueille des fêtes et des manifestations, comme les Fêtes du lac qui rassemblent l'été 30 000 à 40 000 personnes. Il a été retenu pour construire le « Stade » olympique, dont les tribunes pourraient accueillir 40 000 spectateurs et dont la scène serait construite en bonne partie sur pilotis. Ce stade ressemblerait à une conque ouverte vers le lac et les montagnes, un site tout à fait exceptionnel. Mais toutes les installations seront démontées à l'issue des Jeux et les habitants d'Annecy pourront récupérer cet espace qui est cher à leur coeur. Je précise d'ailleurs que, pendant la phase de travaux, il sera la plupart du temps ouvert au public.
Contrairement à ce qui a été dit, ce site olympique ne servira pas uniquement à la cérémonie d'ouverture et de clôture, puisque c'est là que devrait avoir lieu la remise des médailles pour le pôle d'Annecy. Il accueillera donc tous les soirs des remises de médailles, des fêtes et des manifestations. Il servira pour les Jeux olympiques et pour les Jeux paralympiques pendant un mois et demi environ. Nous sommes en train de voir s'il est possible d'utiliser en partie ses tribunes pour d'autres manifestations propres à Annecy, comme les Fêtes du lac de l'été 2017.
Le CIO nous impose en effet de disposer sur tous les sites de neige de systèmes de production de neige artificielle. Heureusement, sur la plupart des sites proposés par « Annecy 2018 », ces systèmes existent déjà et ne nécessitent que de petits aménagements. Il est vrai que ce n'est pas le cas du site du Semnoz, où nous avons prévu d'installer un système de production de neige qui sera 100 % temporaire. Il sera connecté au réseau, non pas au niveau du lac, mais à mi-distance entre le Semnoz et le lac d'Annecy, puisque des réseaux desservent déjà de nombreuses habitations en pied de montage.
Je crois sincèrement qu'il n'y a aucun risque de pollution. D'abord, tous nos sites se situent à plus de 1 000 mètres d'altitude : c'est d'ailleurs ce qui fait la différence entre le dossier d'« Annecy 2018 » et ceux de nos concurrents. Pour nous, la probabilité de devoir produire de la neige est donc extrêmement faible. Ensuite, sur le site du Semnoz, nous travaillons d'ores et déjà avec le Parc naturel régional des Bauges et le Conseil national d'orientation et de développement durable pour nous assurer que si nous devions effectuer un quelconque traitement sur la neige produite, il n'aura aucun impact.
S'agissant de la qualité de l'air, ce serait mentir de dire qu'il n'y aura pas de nuisances, aucune émission de C02 pendant les Jeux. Cependant, afin de les limiter, nous sommes en train de mettre en place un programme visant à réduire ces nuisances et d'élaborer un plan visant à privilégier les transports en commun, avec pour objectif 100 % des spectateurs en transports en commun sur site. L'État et les collectivités locales réalisent actuellement des investissements importants pour renforcer le système ferroviaire, notamment entre le pôle d'Annecy et celui de Chamonix, afin de pouvoir acheminer 6 000 spectateurs par heure et par sens entre ces deux pôles.
Par ailleurs, nous nous projetons au-delà des Jeux en essayant d'amorcer de nouvelles pratiques d'accès aux stations de montagne. Il s'agit de réduire les nuisances dans le long terme – même si la candidature d'Annecy n'est pas retenue.
Enfin, dans le cadre de cette candidature, nous avons effectué un bilan carbone et nous nous sommes d'ores et déjà engagés en budgétant une compensation de 100 % des émissions de C02 que pourraient générer les trajets des spectateurs et des athlètes, depuis leur lieu d'origine jusqu'à d'Annecy, et l'ensemble des trajets durant la période des Jeux. Cet aspect des choses n'est évidemment pas à négliger.
D'ailleurs, la Caisse des dépôts et consignations nous accompagne pour mettre au point notre plan de neutralisation des émissions de carbone liées aux Jeux.
Monsieur Beigbeder, vous avez évoqué les atouts d'Annecy par rapport aux autres candidatures. Mais quels sont les critères d'appréciation des personnes qui vont voter ? Quelle peut être la part de la subjectivité dans ce vote et quelles actions ont été mises en place pour la prendre en compte ?
Lorsque la candidature d'Annecy a été retenue en juin dernier, elle était assortie d'un certain nombre de demandes d'amélioration significatives, notamment concernant la répartition des sites sportifs. Ont-elles été prises en considération ?
En termes de lobbying, avez-vous retenu les leçons de l'attribution à l'Angleterre des prochains Jeux olympiques d'été ? A-t-on résolu ce problème ?
Enfin, quel est notre principal concurrent ?
J'ai la chance d'être plus particulièrement concerné, avec Bernard Accoyer et Martial Saddier, par ces Jeux. Je ne reviendrai pas sur le dossier technique déposé en janvier dernier. Il est très bon, même s'il n'est pas assez connu. Je crois que le CIO et la commission d'évaluation ont été convaincus. Mais pour moi, le grand chantier d'aujourd'hui, c'est effectivement le lobbying.
En tant que politiques, nous n'avons pas à interférer sur le travail du comité de candidature, mais, si important soit-il, ce travail ne suffit pas. Il faut en plus créer un élan populaire, diffuser plus largement l'information et se demander ce que nous pouvons faire pour appuyer la candidature d'Annecy – sujet sur lequel j'ai interrogé plusieurs fois la ministre des sports.
La candidature mise beaucoup sur les sportifs, ce qui est un très bon choix. Toutefois, je reste convaincu qu'en fin de compte, la décision sera politique. Davantage de lobbying politique, notamment de la part des députés et des sénateurs, serait donc utile. Nous sommes tous membres de groupes d'amitié, de groupes d'études, et nous participons à des réunions internationales : chacun d'entre nous pourrait, dans ce cadre, offrir la brochure sur « Annecy 2018 », un pin's, un autocollant, plutôt que des produits du terroir comme c'est le cas actuellement. Ce serait un « plus » en faveur de notre candidature. Cela aurait pu être fait depuis deux ans. Or je crains que nous n'ayons laissé passer des occasions car nous ne reverrons plus certaines personnes avant le vote du 6 juillet 2011. Bien sûr, on nous dit que les membres du CIO prennent leur décision en complète indépendance, mais on sait très bien comment cela se passe dans la réalité : untel qui vote ou qui a voté pour tel ou tel pays en attend un retour…
Voilà pourquoi, madame la présidente de la Commission, je souhaiterais que soit organisée une réunion avec l'ensemble des sénateurs et des députés au cours de laquelle seraient présentés le site du Pâquier et celui du Semnoz, qui sont vraiment fantastiques. À l'issue de cette réunion, tous seraient capables de parler de la candidature d'Annecy et pourraient ainsi, intelligemment et discrètement, en glisser un mot aux ministres ou aux chefs d'État qu'ils pourraient rencontrer. Cela ne coûte rien de montrer que les parlementaires se sentent impliqués. Maintenant que la candidature de la ville d'Annecy est devenue une candidature nationale, chacun se doit de la promouvoir.
Il ne s'agit pas de nous mêler du travail du comité technique, mais nous pouvons faire du lobbying. Les sportifs seuls ne suffiront pas, car leur carnet d'adresses n'est pas assez étoffé.
Tel est le message que j'essaie de faire passer depuis près de deux ans. Il est temps de s'y mettre !
Je voudrais d'abord remercier le président, le directeur et l'encadrement du comité de candidature, car ils ont su relever le défi. Rappelons-nous les débuts difficiles de cette candidature : personne n'y croyait ; quelques collectivités territoriales étaient même défavorables au choix d'Annecy. Il s'est passé la même chose que lorsque nous avons déposé la candidature de Marseille comme « capitale de la culture 2013 » : personne n'y croyait non plus. Et pourtant, nous avons gagné.
Comme l'a fait remarquer Lionel Tardy, c'est une candidature nationale. Il faut y croire et tout faire pour qu'Annecy gagne. Je souhaite de tout coeur cette victoire pour notre pays. Et pour l'obtenir, vous pouvez compter, monsieur le président, sur la participation des parlementaires. De même, il ne faudra pas oublier de rappeler que si ces Jeux olympiques d'hiver ont lieu à Annecy, ils se dérouleront à la montagne.
De fait, nous n'étions pas très bien partis. Mais vous avez su, monsieur le président, redonner de la crédibilité à cette candidature et fait naître l'espoir. Merci d'avoir accepté de relever ce défi.
Élue parisienne, j'ai retenu les leçons de la candidature malheureuse de Paris, notamment en matière de communication. Or quand vous nous dites que de grandes personnalités sont associées au projet que vous portez, je ne peux m'empêcher de penser au film présenté par Paris et à celui présenté par Londres : alors que nous avions fait appel à des acteurs et des actrices célèbres – mais âgés de plus soixante-dix ans – pour vanter les mérites de la France, les Anglais, eux, avaient tourné un film plein d'espoir et de dynamisme dans lequel ils montraient des enfants de toutes origines et que l'on avait envie de suivre quand ils se mettaient à courir… Eh bien, pour remporter la victoire, il faut donner espoir, il faut donner envie. Un bon dossier ne suffit pas.
Enfin, cette entreprise n'est pas l'apanage d'un parti politique : elle implique tous les partis et tous les Français. C'est un peu ce qui avait manqué dans le cas de la candidature de Paris. Cette fois, il faut y aller tous ensemble.
Le vote pour les Jeux d'hiver est un peu différent de celui pour les Jeux d'été. En effet, sur les 112 membres du CIO, il faut retirer les Allemands, les Coréens et les Français, et le président du CIO, Jacques Rogge, qui a déclaré qu'il ne voterait pas. Il n'y aura donc que 103 votants qui, dans leur majorité, ne sont pas intéressés par les sports d'hiver, n'étant parfois même jamais allés à la montagne. De ce fait, la part de subjectivité dans le vote qui sera émis sera très importante. Voilà pourquoi il faut jouer sur le registre émotionnel. Notre message devra susciter de l'espoir et démontrer pourquoi il faut voter pour nous : pourquoi Annecy ? Pourquoi la France ? En quoi ce vote est-ce important pour la famille olympique et pour le monde entier ? C'est en ce sens que nous travaillons avec les membres français du CIO, les agences de publicité, les communicants, les experts et les parties prenantes sur le film que nous projetterons à Durban. Il est évident que ce serait se fourvoyer que de présenter un film à très gros budget qui mette uniquement en avant la beauté de notre territoire.
Si nous arrivons à démontrer pourquoi il faut voter en faveur de notre candidature, nous pouvons tout à fait l'emporter. Techniquement, il n'y a pas de problème, d'autant que nous disposons encore de sept ans pour corriger certaines faiblesses. Par exemple, on nous reproche de ne pas disposer d'un hôtel assez vaste pour y loger tous les membres du CIO, mais nous pouvons en faire un atout en mettant en avant le fait qu'il est plus agréable de loger dans des hôtels à taille humaine, plus conviviaux. Quoi qu'il en soit, la différence se fera sur des critères irrationnels et sur notre capacité à raconter notre histoire.
Je reviens sur la leçon à tirer de l'échec de la candidature de Paris aux Jeux olympiques d'été. Paris avait été considérée comme la ville favorite et des hauts responsables du CIO nous avaient laissé entendre que la victoire était acquise. Peut-être nous sommes nous reposés sur nos lauriers, avons-nous été arrogants et avons-nous négligé l'international. La leçon à tirer de cet échec, c'est qu'il faut se tourner vers l'international et être humble – ce qui est plus facile quand on est en position de challenger.
Nous devons donc aborder les choses avec professionnalisme, avec humilité, mais aussi avec un immense espoir, avec l'envie d'accueillir ces Jeux, en expliquant l'intérêt de notre candidature et en nous positionnant résolument par rapport à l'international.
Quel est notre principal concurrent ? Selon les classements établis par des agences de presse, les trois villes candidates se tiennent dans un mouchoir de poche s'agissant des critères objectifs.
Monsieur Tardy, si l'un d'entre vous a rencontré le beau-frère d'un des membres du CIO de Zambie et a oublié de lui parler de la candidature d'Annecy, qu'il se rassure, il aura l'occasion de le faire un mois avant le vote ; il l'aurait fait plus tôt, il y avait un risque d'oubli. Il n'est donc pas trop tard. Mais c'est maintenant qu'il faut se mobiliser.
Mesdames, messieurs les parlementaires, utilisez vos réseaux pour nouer des contacts. Les membres du CIO sont des hommes et des femmes qui ont des responsabilités. Il y a parmi eux d'anciens ministres, d'anciens parlementaires, des athlètes célèbres, des présidents de fédération… Bref, nombre d'entre eux sont connus. Nous pouvons vous communiquer une liste établie par continent, par pays, par centre d'intérêts, vous permettant d'identifier ceux que vous pouvez connaître ou qui peuvent appuyer la candidature d'Annecy.
C'est un discours que je tiens à tous les grands acteurs économiques. Notre pays à la chance d'avoir des grands dirigeants d'entreprises de taille mondiale, lesquelles ont des filiales dans le monde entier ; or le président d'une de ces filiales peut connaître le membre du CIO du pays où elle est implantée et le convaincre de la pertinence de notre candidature. Et même si ce membre répond qu'il votera pour l'Allemagne, rien n'empêche de lui demander, comme un service, de voter pour la France si l'Allemagne était éliminée au premier tour. De la sorte, nous pouvons augmenter nos chances de l'emporter à Durban.
Monsieur Tardy, nous pouvons tout à fait envisager de réunir les parlementaires pour leur présenter le dossier de la candidature d'Annecy. Reste que la démarche sympathique et enthousiaste d'un certain nombre d'entre nous ne doit pas nuire à la candidature d'Annecy.
Pour éviter que ce soit le cas, c'est très simple : il ne faut pas harceler les membres du CIO chez eux à six heures du matin ni – c'est une règle – utiliser le canal des ambassades.
La séance est levée à dix-sept heures trente.