La Commission entend Mme Christine Lagarde, ministre de l'Économie, des finances et de l'industrie, sur le plan d'aide en faveur de l'Irlande et sur le fonds européen de stabilité financière.
Je souhaite la bienvenue à Mme Christine Lagarde, venue nous parler du FESF, le Fonds européen de stabilité financière, lequel vient d'intervenir pour la première fois afin de financer un des volets du plan d'aide à l'Irlande.
En juin 2010, le Parlement a autorisé le Gouvernement à accorder, jusqu'en 2013, la garantie de l'État aux émissions obligataires du Fonds, dans la limite de 111 milliards d'euros. En novembre 2010, l'Europe et le FMI ont agréé un plan d'aide à l'Irlande de 85 milliards d'euros dont 17,7 milliards en provenance du FESF. La part que la France doit garantir est, comme pour les autres États, calculée en fonction de sa quote-part au capital de la Banque centrale européenne, majorée de 20 %. La première émission doit avoir lieu aujourd'hui ; elle porterait sur 5 milliards d'euros, pour une échéance fixée à juillet 2016.
Il est à noter que, pour prêter 17,7 milliards d'euros à l'Irlande, le Fonds devra emprunter 33 milliards, « en raison des mécanismes de rehaussement de crédit, indispensables pour assurer la notation triple A du FESF ». Pouvez-vous, madame le ministre, nous exposer le fonctionnement de ce mécanisme ? Nous souhaitons en particulier connaître le calendrier des émissions et leurs conditions de réalisation, mais aussi le différentiel entre émission réalisée et prêt consenti – un différentiel en quelque sorte exigé par les marchés pour que l'emprunteur puisse obtenir un taux satisfaisant. De même, nous aimerions connaître les conditions de prêt faites à l'Irlande et savoir quelles sont ses perspectives de remboursement compte tenu du plan d'austérité auquel elle s'est engagée. Nous notons que ce plan ne fait pas mention d'une hausse du taux d'impôt sur les sociétés en Irlande. Pour quelle raison les États membres ont-ils accepté la persistance de ce que d'aucuns jugent assimilable à du dumping fiscal ? Les temps pouvaient pourtant sembler mûrs pour obtenir de l'Irlande qu'elle cesse cette concurrence déloyale à l'égard de ses partenaires européens.
Au-delà du plan d'aide à l'Irlande, vous nous parlerez du devenir du Fonds, de sa pérennité et de son montant. Vous nous direz enfin l'appréciation que vous portez sur la toute récente suggestion de M. Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe, de permettre aux pays de l'Union en difficulté d'emprunter aux autres États européens à des conditions préférentielles aux fins de racheter leur propre dette à moindre coût.
Avant d'en venir au Fonds européen de stabilité financière, permettez-moi d'évoquer la situation dans la zone euro. S'il faut faire preuve d'humilité, il faut aussi reconnaître les avancées réalisées dans la zone euro et la force de notre devise commune. Pour mémoire, celle-ci a été introduite à une parité de 1,16 dollar pour un euro. Aujourd'hui, au plus bas, l'euro vaut 1,29 dollar, et dans les bons jours il se rapproche de 1,35 dollar. Il ne s'agit donc pas d'une monnaie faible.
Quelques observations également concernant la dette souveraine au sein des pays ayant adopté l'euro. Puisque l'on attend bien souvent de ces pays qu'ils fonctionnent comme un groupe homogène – on parle d'ailleurs de « la zone euro » sans faire de grandes distinctions entre ses membres –, il convient de mesurer le volume d'endettement à cette échelle. Son endettement global – public et privé – est d'environ 224 % du PIB, celui des États-Unis excède 241 %, et celui du Japon est de 364 %. De même, l'aggravation de la dette ou du déficit pendant la période de crise a été bien plus forte aux États-Unis que dans la zone euro – le déficit américain s'établit à 10,75 % de son produit intérieur brut. Á l'échelle de la zone, les chiffres européens du déficit et de la dette, nos deux principaux indicateurs dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, sont meilleurs qu'aux États-Unis.
Cela ne signifie évidemment pas que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Au sein de la zone euro, les dettes souveraines sont appréciées sur la base du capital de confiance que chacun des émetteurs a réussi à accumuler. Or, au cours des 18 derniers mois, nous avons vu, en Grèce puis en Irlande, les investisseurs amorcer un mouvement de retrait – même s'il s'est considérablement ralenti depuis l'intervention de la BCE et l'expression par les Européens de leur volonté de renforcer la gouvernance économique au sein de la zone.
Nous devons impérativement rester vigilants et faire preuve de détermination politique pour défendre une plus grande solidarité dans la zone euro. Dans ce débat, qui a lieu au niveau des chefs d'État et de gouvernement mais aussi, sur un plan plus technique, à celui des ministres des finances, les positions française et allemande sont évidemment déterminantes.
Je rappellerai rapidement la chronologie des interventions. Nous avons d'abord dû faire face à la crise grecque en utilisant, outre des fonds communautaires, des prêts bilatéraux intergouvernementaux ; puis, nous avons conçu, dans l'urgence, le Fonds européen de stabilité financière ; enfin, grâce à ce fonds, nous avons pu mettre en oeuvre un mécanisme d'aide au bénéfice de l'Irlande.
Le FESF, mis en place les 9 et 10 mai à la demande du Conseil européen, a été doté d'une capacité d'emprunt de 440 milliards d'euros. Le fonds s'associe au Mécanisme européen de stabilité financière, un programme communautaire permettant de lever jusqu'à 60 milliards d'euros, destiné initialement aux pays n'appartenant pas à la zone euro et que nous avions précédemment mobilisé en faveur de la Lituanie, de la Hongrie et de l'Ukraine. Enfin, le dispositif est complété par un engagement du Fonds monétaire international correspondant à 50 % des sommes ainsi agrégées. La capacité d'emprunt cumulée atteint donc 750 milliards d'euros.
Le FESF a reçu la note « triple A » de l'ensemble des agences de notation. Mais les agences ont souhaité que des mécanismes de garanties – ou « coussins » – soient intégrés au Fonds afin d'en assurer la capitalisation.
La première émission a eu lieu aujourd'hui. Le Fonds a émis pour 5 milliards d'euros d'obligations, et l'emprunt a été souscrit 9 fois, pour un taux supérieur de 40 points de base à notre taux ; c'est dire l'attrait qu'il exerce sur les investisseurs. De nombreux observateurs ont interprété ce succès comme un signe de confiance à l'égard de l'instrument lui-même et de la zone euro.
Mais le FESF a une durée de vie limitée puisque, à la demande de l'Allemagne notamment, il a été décidé qu'il cesserait d'exister en juin 2013. Cette option a suscité des interrogations chez les investisseurs. À la demande du Conseil européen des 16 et 17 décembre, nous avons donc commencé de travailler à la création d'un mécanisme européen de stabilité destiné à prendre le relais du FESF pour une durée indéterminée. Dans ce but, l'article 136 du traité de Lisbonne serait modifié.
Ce mécanisme serait associé à un certain nombre d'outils pour former un « paquet global ». Tout d'abord, nous devrons mettre en oeuvre une nouvelle batterie de tests de résistance afin de donner des signes forts et positifs sur l'état du secteur bancaire européen. Ensuite, nous devons mettre en place des mécanismes de gouvernance permettant d'avancer vers l'intégration économique. C'est l'objet des six textes actuellement en débat au Parlement européen, à la Commission et au Conseil, qui portent sur le renforcement du volet macroéconomique correctif, la mise en place d'un volet préventif, l'ajout aux critères de déficit et de dette d'un critère de compétitivité, le renforcement du critère de dette et de son appréciation et la mise en place de sanctions et de règles de discipline. Grâce à cette dernière mesure, le Conseil européen pourrait, si nécessaire, décider rapidement des sanctions.
Ces sanctions pourraient s'appliquer de manière préventive - en cas de non-respect des mises en garde – et de manière correctrice – dans le cas où un État ne respecterait pas les engagements pris à l'égard de ses partenaires. Elles auraient un caractère quasi-obligatoire, c'est-à-dire qu'elles s'appliqueraient de plein droit sauf opposition d'une majorité qualifiée des États membres.
Deux conditions me semblent indispensables pour informer les investisseurs de la stabilité de la zone euro. La première concerne les tests de résistance destinés à éprouver la solidité du système bancaire. Ces tests, menés une première fois l'été dernier, ont conduit à recapitaliser un certain nombre de banques, notamment en Espagne et en Allemagne, pour un total de 8 milliards d'euros. Toutefois, ils n'ont pas permis de signaler la fragilité de la situation des banques irlandaises. Si l'Irlande est aujourd'hui affectée par un déficit public équivalent à 30 % de son produit intérieur brut et par un endettement qui a augmenté de près de 30 points en un an, c'est notamment parce qu'elle a été contrainte de recapitaliser massivement son système bancaire.
De telles déconvenues devraient être évitées avec le nouveau programme de tests qui sera lancé à partir de février. Il sera conduit sous la supervision de l'Autorité bancaire européenne, qui pourra vérifier que chacun des pays concernés – non seulement dans la zone euro, mais aussi au-delà – applique les critères de test de manière solide et cohérente.
Afin de renforcer la confiance des investisseurs à l'égard de la zone, il est également indispensable de poursuivre le travail de régulation financière engagé par la Commission et le Conseil sur certaines questions fondamentales : révision des textes applicables aux agences de notation, interdiction des ventes à découvert au niveau européen, modification de certaines réglementations financières relatives aux chambres de compensation, etc. Nous devons avancer en 2011, pour créer un socle réglementaire européen véritablement contraignant, comparable aux dispositions de la directive européenne dite « CRD 3 », qui étendra à l'ensemble du secteur bancaire de nouvelles règles de fonds propres.
Parallèlement, nous devons adopter des programmes de consolidation budgétaire et travailler sérieusement à la réglementation financière pour qu'aucune ambiguïté ne perdure sur la solidité du système bancaire européen.
M. Emmanuelli a semblé surpris par l'écart entre le montant de la dotation du FESF, 440 milliards d'euros, et celui des prêts que le Fonds peut effectivement faire. Il est exact qu'afin d'adresser un message clair aux investisseurs, nous avions veillé à doter le FESF d'une force de frappe suffisante pour affronter la situation – hypothétique – dans laquelle un autre pays européen serait confronté aux mêmes difficultés que la Grèce et l'Irlande. Mais il est un fait que nous devons conserver une partie des sommes disponibles pour que le Fonds continue à bénéficier de la notation « triple A ».
Avec 750 milliards d'euros, la capacité d'emprunt avait été calculée pour couvrir le risque représenté par la situation de la Grèce, de l'Irlande, éventuellement du Portugal, et celle d'un, voire de deux pays de moyenne dimension. Dans la mesure où une partie de la dotation du FESF est immobilisée sous forme de « coussins », n'est-il pas nécessaire d'envisager une augmentation de la capacité d'emprunt ? Dans ce cas, il faudrait en passer par une nouvelle loi de finances rectificative.
Cette perspective est très clairement envisagée dans le cadre de ce que j'ai appelé le « paquet global ». Mais, pour l'instant, le consensus ne s'est pas fait sur les modalités d'une augmentation de la capacité de prêt – laquelle ne signifie pas nécessairement l'augmentation de la dotation du Fonds lui-même.
J'en viens à la question du taux irlandais d'impôt sur les sociétés. Les négociations entre l'Irlande et les États de la zone euro ont été menées conjointement avec le Fonds monétaire international – le FMI – et en étroite concertation avec la Banque centrale européenne. Un vif débat a eu lieu sur la question de savoir à quel moment l'Irlande devrait à nouveau subir les contraintes du pacte de stabilité et de croissance : nous avons fini par nous accorder sur l'année 2015, ce qui, à mes yeux, est une bonne chose. En effet, même avec des conditions aussi fortes que celles prévues par le deuxième plan irlandais, l'objectif doit rester soutenable.
La France a demandé qu'une modification du taux de l'impôt sur les sociétés fasse partie des conditions posées car, à 12,5 %, ce taux peut en effet être considéré comme trop nettement en dessous de la moyenne européenne. Mais, dans la mesure où ce taux d'impôt sur les sociétés a représenté un facteur d'attractivité évident pour les investisseurs étrangers, il est apparu qu'une augmentation du taux d'impôt sur les sociétés ne serait pas opportune à un moment où le pays doit appliquer un programme de restrictions budgétaires particulièrement contraignant. En revanche – et nous l'avons indiqué dans le cadre des négociations –, à partir du moment où l'Irlande parviendra à sortir de la situation dans laquelle elle se trouve, elle devra reconsidérer souverainement son taux d'impôt sur les sociétés et le rapprocher de ceux pratiqués sur le continent.
La comparaison que vous avez faite, madame la ministre, entre la zone euro, les États-Unis et le Japon permet de mettre le doigt sur le problème européen. Nous avons un niveau d'endettement comparable au leur et même un peu inférieur, mais nos dettes sont nationales. Le Japon bénéficie de taux d'intérêt très bas parce que sa dette est détenue par des Japonais qui se satisfont d'une faible rémunération. La crise sera-t-elle, comme le recommandent M. Juncker ou encore l'Institut Bruegel, l'occasion d'« européaniser » la dette de la zone euro, à hauteur de 60 % par exemple, cette quote-part obtenant le « triple A », et le reste étant porté par les États membres ? Outre que les critères de stabilité seraient ainsi mieux respectés, l'Europe doit en finir avec les dettes nationales.
Pourquoi les banques qui ont prêté à des États devenus insolvables ne participent-elles pas à leur redressement, par restructuration ou rééchelonnement de la dette ? Le procédé existe pour les pays en développement, au sein du Club de Paris où les créanciers négocient avec leur débiteur la durée de leurs concours et parfois les taux. Au nom de quoi fait-on une nouvelle fois payer les peuples à la place des créanciers, en déresponsabilisant les banques ? Le libéralisme ne consiste pas à laisser les banques prêter inconsidérément puis appeler le contribuable à la rescousse, avant de le renvoyer dans ses foyers aussitôt que la situation s'est améliorée ! Et, surtout, madame la ministre, ne m'objectez pas que la crédibilité du système bancaire est en jeu !
Par ailleurs, le gouvernement grec respecte-t-il les engagements qu'il a pris dans le cadre du plan de redressement ? Disposez-vous d'informations fiables à ce sujet, madame la ministre ?
Lors de votre audition par la commission d'enquête sur les mécanismes de spéculation, vous avez déclaré, madame la ministre, que vous faisiez du taux d'impôt sur les sociétés irlandais un point capital et vous semblez être toujours sur cette ligne. Pourtant, le Premier ministre irlandais a catégoriquement exclu de modifier le taux de cet impôt, affirmant que M. Sarkozy comprenait cette position. Qui croire ?
Comme M. de Courson, nous étions d'emblée partisans d'une restructuration de la dette grecque dans la mesure où le plan d'aide « à la Grèce » a surtout profité aux banquiers et aux marchands d'armes. La règle veut pourtant que le créancier négocie avec son débiteur défaillant ; or, on continue d'engraisser ceux qui se sont déjà largement enrichis. Cette politique est un véritable encouragement à la spéculation contre les États. Après la Grèce et l'Irlande, qui sera le prochain sur la liste ? Ne faut-il pas, madame la ministre, mettre les créanciers à contribution ?
Il est étrange que l'on n'ait rien su pendant des lustres de la situation réelle de la Grèce, et que la lumière ait jailli brutalement au moment même où le gouvernement grec changeait… J'ai retenu de vos explications, madame la ministre, que les fonds levés au-delà des 255 milliards d'euros qui permettront de venir effectivement en aide aux pays en difficulté sont mis en réserve, à titre de garantie. Il est grand temps d'ouvrir le débat sur la dépendance à l'égard des agences de notation et des marchés. Selon la thèse libérale, les banques centrales devaient être indépendantes pour être à l'abri des arrangements politiques. Le résultat, c'est que les marchés dictent désormais les politiques publiques. Ne peut-on envisager, pour ne plus avoir à se soumettre aux diktats des marchés, que la Banque centrale européenne achète de la dette souveraine sur le marché secondaire, non plus en catimini mais officiellement, ou bien – ce qui revient à peu près au même – que l'on européanise la dette ? Pourquoi s'interdire, au détriment des contribuables, de se servir d'un instrument commode ? À défaut, on se prépare des années et des années d'austérité car rien ne garantit que les pays qui ont fait l'objet de plans de sauvegarde soient en mesure de respecter tous leurs engagements.
Je m'associe à la question posée par M. Emmanuelli sur le rôle possible de la BCE. Par ailleurs, le taux de croissance de la Grande-Bretagne au dernier trimestre 2010 est une mauvaise nouvelle, qui laisse entrevoir le risque de « double dip » – sans parler de la situation de la Grèce. À moyen terme, le remboursement de la dette publique n'est garanti que par la croissance, soit nominale - l'inflation -, soit réelle. Or la position, très dure, du FMI ne risque-t-elle pas d'avoir des effets macroéconomiques nocifs, tels que les économies « aidées » pourraient ne pas se relever ?
J'aimerais savoir si la Grèce respecte ses engagements. D'autre part, est-il raisonnable de persister à ne pas ouvrir le débat sur la restructuration de la dette, repoussé au motif qu'il fallait ne pas semer le doute sur la qualité de la signature des États ? Où en est exactement le Portugal, dont la dette semble intéresser les Chinois ?
La situation de l'Irlande est-elle aujourd'hui stabilisée ? Une structure publique de cantonnement a repris pour 53 milliards d'euros des créances douteuses d'une valeur nominale de 77 milliards ; les recettes fiscales annuelles de l'État étant de 33 milliards, on mesure l'effort à consentir. De surcroît, il faudra renflouer les cinq principales banques du pays, notamment l'Anglo-Irish Bank. Quel sera le montant total de la facture ? Pourra-t-elle être honorée ? Avant la crise, la dette publique de l'Irlande ne dépassait pas 20 % du PIB ; le pays doit donc faire face à une dette nouvelle considérable, alors qu'il ne compte que 4,5 millions d'habitants. Aurait-on les moyens d'agir – et comment ? - si le Portugal flanchait et en même temps l'Espagne, dont la population est dix fois supérieure à celle de l'Irlande et qui a connu une bulle immobilière comparable ?
Nous ne sommes pas seuls à décider. La zone euro compte 17 membres, parmi lesquels, l'Allemagne, le pays qui, dans les formules de mutualisation, apporte le plus.
Nous ne sommes pas non plus seuls à emprunter. De ce fait, même si la dette des pays européens n'est pas sans attrait, les investisseurs peuvent emprunter ailleurs. Quant au Club de Paris, on n'y envisage de restructuration qu'ex post.
S'agissant des obligations européennes, les eurobonds, la proposition Juncker-Tremonti est très intéressante, tout comme l'est celle de Jacques Delpla – qui suggère d'échanger une partie de la dette publique de certains pays de la zone euro en dette senior dite « bleue » et en dette junior dite « rouge », mais ces deux propositions me semblent prématurées. Il faut d'abord que les Dix-Sept adhèrent à une discipline collective en vue d'une convergence budgétaire suffisante. Un accord sur les eurobonds sera envisageable dès que la solidarité européenne aura fait ses preuves et qu'une forme de fédéralisme économique aura vu le jour.
S'agissant de la participation des créanciers à l'effort de redressement, j'observe que certains actionnaires, notamment irlandais, ont largement été sollicités dans le cadre des opérations de sauvetage.
Nous étudions l'éventualité d'aligner la durée du plan grec sur celle du plan irlandais. Avant le décaissement de la troisième tranche du prêt à la Grèce, la Commission européenne et le FMI sont allés contrôler sur pièces et sur place la mise en oeuvre du plan grec. Les deux instances ont conclu de leurs vérifications que le gouvernement grec respecte les engagements pris, à ceci près que les recettes fiscales sont légèrement inférieures aux prévisions. Ce n'est pas faute de lutter contre la fraude : mon homologue grec se livre à un travail considérable pour exploiter tous les renseignements qui lui sont fournis par les autres États membres sur les contribuables et les ressortissants grecs. La Grèce a tenu compte de cette disparité entre prévisions de recettes et réalisations et ajusté son budget 2011 en conséquence.
Oui. Ce furent des missions longues, et nous avons posé à la Commission les mêmes questions que vous.
À l'Irlande, nous avions demandé au cours des négociations, qu'elle relève le taux d'impôt sur les sociétés, qui est actuellement de 12,5 %. Sans être seuls, nous étions néanmoins minoritaires, d'autres jugeant qu'au moment où l'Irlande se débattait dans de graves difficultés économiques, le moment n'était pas venu d'exiger d'elle pareille mesure. Le Président de la République a répété publiquement il y a une dizaine de jours que ce taux n'est pas acceptable et qu'il devrait être haussé.
Je souligne que le redressement des marchés et le rétrécissement des spreads des emprunts contractés par le Portugal, l'Espagne et l'Italie ont été consécutifs aux rachats engagés par la Banque centrale européenne sur le marché secondaire. Quant aux souscriptions sur le marché primaire, elles n'ont pas à être envisagées puisque le FESF a été créé.
Le taux de croissance de l'économie britannique au quatrième trimestre n'est assurément pas une bonne nouvelle, mais il est encore trop tôt pour dire si le lien avec le plan drastique qui vient d'être annoncé est certain. Plusieurs explications sont plausibles, notamment les conditions climatiques exceptionnelles. On peut estimer que les effets à attendre des décisions politiques ne devraient pas se produire avant le deuxième trimestre 2011.
Pour l'instant, le Portugal n'a pas formulé de demande de soutien. La campagne électorale s'achève tout juste et les autorités viennent de lever des fonds importants dans des conditions beaucoup plus favorables que précédemment. L'intervention de la BCE et l'information selon laquelle nous travaillons à un paquet global ont quelque peu rassuré les marchés et contribué à une détente des taux pour le Portugal.
Enfin, la réalité de l'efficacité du plan irlandais ne pourra se mesurer qu'au cours du prochain semestre, une fois passées les élections et votés les collectifs budgétaires qui suivront. Nous saurons alors si l'Irlande est déterminée à poursuivre sa politique qui se traduit par des coupes claires très brutales dans les rémunérations, les pensions et les concours à l'économie.
Les futurs tests de résistance permettront-ils effectivement une meilleure prise en compte du risque systémique ?
L'effondrement des banques irlandaises tient à ce qu'elles étaient très exposées à l'étranger, notamment en Europe centrale et dans les pays d'Europe de l'Est. Par ailleurs, l'explosion de la bulle immobilière a entraîné une décote de 40 % à 50 % de la valorisation de leurs avoirs immobiliers qu'elles ont répercutée tardivement dans leurs comptes. Les futurs tests seront élaborés, sous la supervision européenne, de façon à prendre en compte, de manière appropriée, le risque systémique.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mardi 25 janvier 2011 à 16 h 15
Présents. - M. Jean-Marie Binetruy, M. Michel Bouvard, M. Jean-Pierre Brard, M. Jérôme Cahuzac, M. Bernard Carayon, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Charles de Courson, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, Mme Aurélie Filippetti, M. Jean-Claude Flory, M. Jean-Michel Fourgous, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Georges Ginesta, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. Laurent Hénart, M. Jean Launay, M. Jean-François Mancel, M. Patrice Martin-Lalande, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, M. Hervé Novelli, M. Jacques Pélissard, M. Nicolas Perruchot, M. Camille de Rocca Serra, M. François Scellier, M. Michel Vergnier, M. Gaël Yanno
Excusés. - M. Dominique Baert, M. Jean-Pierre Balligand, M. Pierre Bourguignon, M. Victorin Lurel