Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a examiné en nouvelle lecture, sur le rapport de M. Éric Diard, la proposition de loi relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers (n° 4362).
Mes chers collègues, il me semble utile de revenir en quelques mots sur le contexte de notre réunion qui a pour objet l'examen, en nouvelle lecture, de la proposition de loi relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien. L'Assemblée nationale a adopté ce texte en première lecture, le 24 janvier 2012. Le Sénat l'a rejeté, le 15 février dernier, au moyen d'une question préalable. En conséquence, le Gouvernement, qui avait déclaré la procédure accélérée, a convoqué la réunion d'une commission mixte paritaire (CMP), en application de l'article 45, alinéa 2, de la Constitution. Cette commission, réunie ce jour à l'Assemblée nationale, vient d'échouer.
En conséquence, notre commission est amenée à examiner ladite proposition de loi en nouvelle lecture, en application de l'article 114 du Règlement, avant son examen en séance publique prévu demain mercredi 22 février dans l'après-midi. C'est la première fois depuis la création de la commission du développement durable que cette procédure est suivie, puisque les précédentes commissions mixtes paritaires avaient abouti à un texte de compromis.
Je précise d'une part que nous examinons ce texte dans sa rédaction issue de son adoption, en première lecture, par notre assemblée, et d'autre part que, compte tenu de la réunion de la CMP un peu plus tôt dans l'après-midi, il n'y a pas eu de délai fixé pour déposer de nouveaux amendements. Au total, quatorze amendements ont finalement été déposés, dont dix du rapporteur, Éric Diard. Aucun amendement n'a été envoyé en recevabilité à la commission des finances.
Les modifications au texte adopté par notre assemblée le 24 janvier, que je suis amené à proposer par voie d'amendement, se résument en trois mots : améliorer sa cohérence. Comme vous l'avez rappelé, le Sénat l'a rejeté en opposant la question préalable à la délibération de la proposition, alors même qu'à l'issue du débat en séance publique à l'Assemblée, nous avions réussi à établir un texte équilibré. J'ajoute que des évolutions restent possibles, évolutions que nous examinerons au cours des débats.
Pouvez-vous préciser à quelles évolutions vous songez ? Étant interpellé par le rapporteur, je me dois de lui répondre : je veux d'abord souligner la précipitation avec laquelle les sénateurs et les députés de la majorité ont scellé l'échec de la CMP, alors qu'un accord aurait à mon sens été possible. Le texte dont la commission du développement durable est saisie manque de cohérence, je fais référence ici à la disposition dite « des 24 heures », qui transforme le droit de grève des salariés en devoir de grève.
Je remarque que le Sénat a rejeté le texte dans sa globalité, rendant par avance délicate, voire impossible, la tâche de la CMP, car amender un texte virtuel constitue à tout le moins un exercice hasardeux et délicat… Je vous propose donc d'aborder l'examen des articles et des amendements.
La Commission procède à l'examen des articles.
Article 1er : Champ d'application de la loi
La commission se saisit de l'article 1er, dont elle confirme la suppression.
Article 2 A : Ratification d'ordonnances relatives au code des transportsi
La commission adopte l'article 2 A sans modification.
Article 2(articles L. 1114-1 à L. 1114-5 [nouveaux] du code des transports) : Prévention des conflits et information des passagers du transport aérien
Puis la commission examine, à l'article 2, l'amendement CD 5 de M. Alain Vidalies.
Cet amendement vise à supprimer l'article 2. Comme l'a rappelé le rapporteur du Sénat, Claude Jeannerot, nous restons opposés à l'obligation faite aux salariés désireux de se mettre en grève, et dont l'absence est de nature à affecter directement la réalisation des vols aériens, de se déclarer au plus tard 48 heures avant de participer au mouvement. Nous considérons que ce délai porte atteinte au droit de grève, puisqu'il l'encadre.
Mon avis sur cet amendement, que notre commission avait déjà rejeté en première lecture lors de l'examen en commission, est défavorable. La suppression de cet article, véritable coeur de la proposition de loi, reviendrait de plus à se priver du moyen de prévention fort utile que forme la signature d'un accord-cadre organisant une prévention des conflits, c'est-à-dire « l'alarme sociale », mais aussi de l'information des passagers par les compagnies aériennes 24 heures avant le début d'une perturbation.
Comme l'a dit Jean-Paul Chanteguet, cet article porte directement atteinte à l'exercice du droit de grève des salariés concernés, considérant que le transport aérien n'a pas les caractéristiques d'un service public, et ce au-delà du raisonnable. Je relève le paradoxe qui consiste à imposer par la loi un dialogue social que nie justement le texte, car il a été déposé en dehors de toute négociation sociale, et qu'il contourne, parce qu'il s'agit d'une proposition et non d'un projet de loi, l'application de l'article L. 1 du code du travail, comme il fait fi des compétences de la commission des affaires sociales, qui aurait dû l'examiner.
Nous avons déjà eu ce débat sur le choix de la commission permanente saisie au fond : la commission des affaires sociales n'a pas souhaité se saisir pour avis de cette proposition de loi, et son choix en la matière est souverain. L'objet de notre débat ne concerne évidemment pas un service public mais un secteur concurrentiel. Pour cette raison, tout mécanisme de prévention des conflits ne peut, à peine d'inconstitutionnalité, qu'avoir un caractère optionnel et non obligatoire.
La commission rejette l'amendement CD 5.
Puis la commission examine l'amendement CD 11 du rapporteur.
Il s'agit d'un amendement rédactionnel qui précise qu'une organisation syndicale représentative peut procéder seule à la notification à l'employeur des motifs pour lesquels elle envisage le recours à l'exercice du droit de grève prévu par l'accord-cadre.
La commission adopte l'amendement CD 11.
Puis la commission examine l'amendement CD 10 du rapporteur.
Cet amendement de cohérence rédactionnelle a pour objet de préciser, qu'à compter de la notification, la négociation préalable prévue par l'accord cadre s'engage entre la ou les organisations qui ont procédé à la notification et l'employeur.
La commission adopte alors l'amendement CD 10.
Puis la commission examine l'amendement CD 9 du rapporteur.
La commission adopte alors l'amendement CD 9.
Puis elle examine l'amendement CD 6 de M. Alain Vidalies.
J'y suis évidemment défavorable, cette disposition formant, je l'ai dit, le coeur de ma proposition de loi.
La commission rejette l'amendement CD 6.
Puis elle examine l'amendement CD 7 de M. Alain Vidalies.
Cet amendement vise à supprimer la déclaration, 24 heures à l'avance, qui serait imposée au salarié souhaitant, soit renoncer au mouvement de grève qu'il a rejoint, soit reprendre le travail.
J'y suis également défavorable, car l'adoption de cet amendement priverait l'employeur de l'information relative à un salarié en grève décidant de reprendre son service. Cette disposition, introduite en première lecture, doit à mon avis être maintenue.
Je suis au regret de confirmer au rapporteur qu'il se trouve en contradiction avec le ministre chargé des transports, qui a affirmé dans la presse que cette disposition reviendrait à prolonger tout mouvement de grève de 24 heures. « Il faut donc trouver autre chose », a-t-il dit. L'article dont est extraite cette citation juge par ailleurs la disposition absurde. Peut-être nous annoncera-t-on demain que le ministre a effectivement « trouvé autre chose », mais le travail en commission servant d'abord à préparer les débats qui ont lieu dans l'hémicycle, il eût été préférable d'y présenter « les bonnes bouteilles de derrière les fagots », plutôt que d'attendre l'examen en séance publique.
Nous attendrons la séance pour sortir « les bonnes bouteilles de derrière les fagots », comme vous dites. Cela permettra d'optimiser la rédaction définitive de ladite disposition.
La commission ayant effectué un important travail d'amélioration et de précision du texte, je pense que la séance de demain permettra effectivement de trouver, sur ce point, une solution satisfaisante.
Puis la commission rejette l'amendement CD 7.
La commission examine ensuite l'amendement CD 14 du rapporteur.
Cet amendement précise que la sanction disciplinaire n'est encourue qu'en cas de manquement répété à l'obligation de déclaration individuelle de renonciation à participer à la grève ou à l'obligation de déclaration de reprise de service après participation à la grève.
La commission adopte cet amendement, ainsi que deux autres amendements de précision du rapporteur, CD 4 et CD 12.
Puis elle adopte l'article 2 ainsi modifié.
Article 2 bis : Mise en oeuvre des règles européennes sur l'information des passagers en matière de tarifs aériens
La commission examine l'amendement CD 15 du rapporteur visant à supprimer cet article.
Cet amendement se justifie par le fait que le dernier alinéa de l'article L. 113-2 du code de la consommation, qui reproduit l'article L. 410-1 du code de commerce, mentionne « toutes les activités de production, de distribution et de services ». Il n'apparaît donc pas nécessaire de compléter le deuxième alinéa de l'article L. 113-3 du code de la consommation par des dispositions particulières au transport aérien de passagers.
Je suis surpris par cette argumentation. Cet article est en effet issu d'un amendement que j'avais déposé sur le projet de loi renforçant les droits, la protection et l'information des consommateurs au mois de septembre 2011, et que le Gouvernement soutenait : il s'agit de pouvoir sanctionner d'une amende administrative les manquements à plusieurs règlements européens relatifs aux transports, dont celui du 24 septembre 2008.
Je suis donc opposé à la suppression de cet article.
Je souscris naturellement aux objectifs visés par cet amendement, mais il me semble que le droit existant permet d'ores et déjà de répondre aux préoccupations de son auteur.
Je suggère au rapporteur de retirer cet amendement, de sorte que nous puissions revenir sur le sujet en séance publique et en présence du Gouvernement.
Après que le rapporteur eut retiré l'amendement CD 15, la commission adopte l'article 2 bis sans modification.
Article 2 ter : Habilitation des agents de la DGCCRF à contrôler les manquements à un règlement communautaire sur les services aériens
La commission adopte l'amendement CD 16 de précision du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 2 ter ainsi modifié.
Article 2 quater : Renforcement des obligations déclaratives des salariés en cas de grève dans les entreprises de transport terrestre de voyageurs
La commission examine l'amendement CD 8 de suppression de cet article, présenté par les membres du groupe SRC.
Je rappelle que l'article porte sur les transports terrestres et non aériens. Les difficultés rencontrées dans l'application de la loi de 2007 doivent être résolues avec les partenaires sociaux et la procédure de déclaration de reprise du travail pourrait conduire à une situation absurde, prolongeant mécaniquement et artificiellement une grève de vingt quatre heures – même en cas d'issue positive du conflit.
Avis défavorable, cela aboutirait à supprimer un mécanisme et une obligation d'information votés en première lecture.
Nous voulons aider la majorité à sortir de l'impasse dans laquelle elle s'est enfermée. Il faut apporter une réponse à un dysfonctionnement déjà identifié en 2007 et à une faille connue depuis longtemps. Résoudre un dysfonctionnement par un autre dysfonctionnement n'a jamais constitué une bonne solution (sourires).
Puis la commission rejette l'amendement CD 8.
Après avoir adopté deux amendements de précision du rapporteur CD 3 et CD 17, la commission adopte l'article 2 quater ainsi modifié.
Article 3 : Obligation pour les salariés de déclarer leur intention de participer à une grève
La commission confirme la suppression de l'article 3.
Article 4 : Droit des passagers à être informés sur le service assuré en cas de grève
La commission confirme la suppression de l'article 4.
◊
◊ ◊
La commission adopte l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.
AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION
Amendement CD 3 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2 quater
À l'alinéa 3, substituer au mot : « utiliser », le mot : « affecter ».
Amendement CD 4 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
À l'alinéa 28, substituer à la référence : « L. 2523-10 », la référence : « L. 2523-9 ».
Amendement CD 5 présenté par M. Alain Vidalies, Jean-Paul Chanteguet, Jean Mallot, Marie-Line Reynaud, Philippe Plisson et les membres du groupe SRC :
Article 2
Supprimer cet article.
Amendement CD 6 présenté par M. Alain Vidalies, Jean-Paul Chanteguet, Jean Mallot, Marie-Line Reynaud, Philippe Plisson et les membres du groupe SRC :
Article 2
Supprimer les alinéas 19 à 29.
Amendement CD 7 présenté par M. Alain Vidalies, Jean-Paul Chanteguet, Jean Mallot, Marie-Line Reynaud, Philippe Plisson et les membres du groupe SRC :
Article 2
Supprimer l'alinéa 23.
Amendement CD 8 présenté par M. Alain Vidalies, Jean-Paul Chanteguet, Jean Mallot, Marie-Line Reynaud, Philippe Plisson et les membres du groupe SRC :
Article 2 quater
Supprimer cet article.
Amendement CD 9 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
À l'alinéa 18, substituer aux mots : « des organisations », les mots : « de la ou des organisations ».
Amendement CD 10 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
I.– À l'alinéa 13, après les mots : « représentatives », insérer les mots : « qui ont procédé à la notification ».
II.– En conséquence, procéder à la même insertion aux alinéas 14, 15, 16 et 18.
Amendement CD 11 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
I.– À l'alinéa 12, substituer aux mots : « les organisations », les mots : « la ou les organisations ».
II.– En conséquence, procéder à la même modification aux alinéas 13, 14 et 16 et à l'alinéa 15, substituer au mot : « aux », les mots : « à la ou aux ».
Amendement CD 12 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
Dans la première phrase de l'alinéa 29, substituer aux mots : « les motifs figurant dans le préavis et portant sur la poursuite de la grève », les mots : « les motifs de la grève et portant sur la poursuite de celle-ci ».
Amendement CD 14 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2
Dans la seconde phrase de l'alinéa 27, avant les mots : « n'a pas informé », insérer les mots : « , de façon répétée, ».
Amendement CD 15 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2 bis
Supprimer cet article.
Amendement CD 16 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2 ter
Rédiger ainsi le début de l'alinéa 2 : « 6° De l'article 23 du règlement ».
Amendement CD 17 présenté par M. Éric Diard, rapporteur :
Article 2 quater
À l'alinéa 7, avant les mots : « n'a pas informé », sont insérés les mots : « , de façon répétée, ».
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 21 février 2012 à 17 h 30
Présents. - M. Philippe Boënnec, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Éric Diard, M. Didier Gonzales, M. Serge Grouard, M. Antoine Herth, M. Yanick Paternotte, Mme Marie-Line Reynaud
Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Yves Besselat, M. Jean-Claude Bouchet, M. Philippe Briand, M. André Flajolet, M. Jean-Claude Fruteau, M. Joël Giraud, M. Michel Havard, Mme Fabienne Labrette-Ménager, M. Jean Lassalle, M. Philippe Meunier, M. Bertrand Pancher, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Max Roustan, M. André Vézinhet
Assistaient également à la réunion. - M. Jean Mallot, M. Alain Vidalies