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Commission des affaires européennes

Séance du 1er février 2012 à 16h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • assiette
  • cohésion
  • taxe
  • transaction

La séance

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mercredi 1er février 2012

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président de la Commission

La séance est ouverte à 16 h 15

PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

La proposition de directive présentée par la Commission européenne le 28 septembre dernier nous conduit quelques mois après l'adoption de notre résolution du 14 juin dernier visant à établir une taxe sur les transactions financières, au niveau mondial, si possible, et, à défaut, au niveau européen ou bien à celui de la zone euro, à réinscrire cette question à notre ordre du jour.

Il ne s'agit pas, en adoptant aujourd'hui une nouvelle proposition de résolution, de se déjuger, mais d'affiner, autant que le permettent les circonstances, notre point de vue.

Le constat reste, en effet, le même. La création d'une taxe sur les transactions financières est une réponse à la crise. Même si les éléments sont différents, la conclusion qu'avait déjà émise Keynes en 1936 puis Tobin au début des années 70, au moment de l'effondrement du système de Bretton Woods, reste valable. Il faut « refroidir » le marché des capitaux et introduire une certaine viscosité dans les transactions, avec un prélèvement adapté, car nous constatons une financiarisation excessive de l'économie avec un déséquilibre croissant entre les échanges financiers et le PIB mondial, essentiellement sur le marché des dérivés. Selon la formule de Tobin, il est nécessaire de verser du sable dans les rouages bien huilés de la spéculation. Ensuite, il convient par cette taxe de contribuer à la régulation financière en complétant les instruments législatifs et réglementaires déjà intervenus ou en cours de préparation au niveau européen, notamment l'obligation de compensation de l'essentiel des dérivés, ceux qui sont « standardisables », et de l'obligation de déclaration des autres dérivés, prévu par le futur règlement EMIR. La taxe vise clairement les transactions à haute fréquence qui n'ont aucune signification économique : plusieurs milliers d'opérations sur une valeur en une seconde. L'un de nos interlocuteurs a rappelé qu'aux Etats-Unis, le total des transactions sur un instrument financier avait atteint 60 000 dollars, soit l'ordre de grandeur du PIB américain, en 14 secondes. Enfin, il y a comme pour toute autre taxe un enjeu budgétaire. Les circonstances ne permettent aux Etats de ne négliger aucune ressource et il est vrai que, par leur développement les transactions financières, sont un élément, exonéré de TVA, qu'il devient de moins en moins justifiable de ne pas taxer. De plus, les excès du secteur financier étant à l'origine de la crise actuelle et du creusement spectaculaire des déficits publics ainsi que de l'augmentation tout aussi spectaculaire des niveaux d'endettements publics après 2008, il apparaît légitime de faire contribuer ce secteur à la « réparation » des dommages.

La nécessité d'une taxe Tobin a été perçue tant au niveau du Parlement européen, qui a notamment voté, dans un large consensus, une résolution en ce sens en mars dernier sur le rapport de Mme Annie Podimata (S&D, Grèce), qu'à celui des chefs d'Etat et de gouvernement puisque tant le Conseil européen, sur l'initiative du Président de la République et de la Chancelière allemande, que le G20 l'ont inscrite à l'ordre du jour. C'est un succès politique même si à la suite de l'échec du Sommet du G20 des 3 et 4 novembre derniers, en raison de l'opposition notamment des Etats-Unis, il n'y aura pas, ce qui aurait été l'idéal, de taxe mondiale.

Répondant donc à la demande du Conseil européen, et souhaitant également réformer et élargir pour la période 2014-2020 du prochain cadre financier pluriannuel le financement du budget de l'Union européenne, la Commission européenne a donc présenté sa proposition.

Le projet répond bien aux objectifs assignés à un tel prélèvement avec une assiette large et un taux faible. Les risques de délocalisation d'activité sont suffisamment connus et invoqués pour ne pas y revenir.

D'une manière plus précise, sur l'assiette, l'approche retenue est une approche dite « triple A », en anglais, « All markets ! All instruments ! All actors ». Les transactions financières sont définies de manière très large pour que la taxe s'applique également aux transferts d'actifs intragroupe, ainsi qu'aux transactions hors marchés réglementés ou organisés, les transactions OTC, de gré à gré.

Tous les acteurs sont impliqués. La taxe est prévue pour être perçue au niveau des établissements financiers et, techniquement, par le biais des systèmes informatiques des marchés financiers au sens large. La définition des établissements financiers retenue est donc elle aussi très étendue.

Naturellement tous les instruments financiers sont concernés, sous réserve de quelques exceptions dont une seule appelle un commentaire : celle des transactions de change au comptant. Les devises ne sont juridiquement pas, il est vrai, des instruments financiers, mais ce que craint la Commission européenne, c'est qu'une taxation ne soit contraire au principe de la libre circulation des capitaux. Certains observateurs et Etats membres sont d'un avis opposé, notamment pour ce qui concerne les devises des pays tiers. Sur ce point et sous réserve d'une expertise complémentaire, l'assiette pourrait, à l'occasion des négociations, bouger. Il y a également des demandes pour l'exonération à l'entrée et à la sortie des OPCVM et une demande forte des Pays-Bas pour une exonération des fonds de pension.

Si l'assiette apparaît déjà assez bien esquissée, la proposition de directive pourrait en revanche davantage évoluer, pour être utilement complétée, en ce qui concerne le principe de taxation. Celui qui est prévu est, en effet, le principe de résidence qui rend taxables, selon deux critères croisés, les transactions faites par les établissements financiers résidents etou celles effectuées par les investisseurs eux-mêmes résidents. C'est une approche qui a le mérite d'être très complète, mais qui présente l'inconvénient d'être sensible, potentiellement, aux délocalisations. Par conséquent, aussi bien la Commission européenne que certains Etats membres et également les observateurs vigilants que sont les organisations non gouvernementales qui souhaitent que le produit de la taxe soit utilisé pour les grandes urgences humanitaires, environnementales ou de développement, demandent de compléter ce principe par celui de la taxation selon le lieu d'émission ou de cotation. Selon ce schéma, l'impôt est exigible y compris lorsque les transactions interviennent au titre des pays tiers, pour les actifs enregistrés dans le pays de taxation. C'est le système du droit de timbre anglais, du stamp duty. 40 % du produit de ce droit sont collectés auprès des investisseurs étrangers. Pour les autres questions, je passe la parole à Pierre-Alain Muet, avec lequel nous nous sommes partagé la tâche.

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

L'idéal est effectivement la taxe qui soit la plus générale en ce qui concerne non seulement l'assiette mais aussi les pays qui l'appliquent car c'est le gage de son efficacité.

Après l'assiette, la deuxième question essentielle sur le format de la taxe, est celle du taux. La Commission européenne propose une différenciation avec un taux de 0,01 % sur les dérivés et un taux de 0,1 % sur les opérations au comptant, actions et obligations. Elle le justifie par le fait que l'assiette sera pour les dérivés non pas le montant effectivement payé lors de la transaction, mais le montant du notionnel, c'est-à-dire du sous-jacent. Ces taux appellent deux remarques : d'abord, ce sont des taux minimaux car la compétence européenne en la matière n'est qu'une compétence d'harmonisation et non de fixation du taux de l'impôt ; d'autre part, pour les transactions dans l'Union européenne, ces taux seront doublés puisque la taxe sera perçue à la fois du côté du vendeur et du côté de l'acquéreur. Avec ces taux effectifs de 0,2 % et 0,02 %, le rendement estimé pour les recettes est de l'ordre de 57 milliards dont 37,7 pour les dérivés. 12 % seraient prélevés en France.

Sur le niveau de l'imposition, la proposition de la Commission européenne n'est pas en phase avec la résolution votée par l'Assemblée nationale en juin dernier, qui prévoit, de même que le Parlement européen le demande, un taux unique de 0,05 % applicable aux opérations au comptant comme aux opérations sur les dérivés. Ce taux unique est plus efficace en terme de régulation puisqu'il a davantage d'impact sur les opérations sur les dérivés que sur les opérations au comptant ainsi que cela nous a été clairement indiqué à l'Autorité des marchés financiers (AMF).

D'abord, il est plus favorable aux actions et aux obligations, c'est-à-dire aux actifs financiers les plus utiles à l'économie ; ensuite, il offre, selon les simulations de la Commission européenne, un rendement bien meilleur de 71 milliards d'euros pour les vingt-sept Etats membres.

Les deux taux proposés par la Commission européenne ne sont donc pas la seule option possible. Le débat reste donc ouvert.

Tel n'est pas le cas des éléments de la proposition de directive sur les modalités de recouvrement. Ils contiennent des éléments assez généraux et reposent principalement sur une exigibilité et un recouvrement immédiat de la taxe, ainsi que sur une clause de solidarité entre les parties à la transaction pour éviter tout risque de fraude.

La négociation qui s'annonce sur ce texte est assez délicate et se noue autour de trois questions essentielles.

Sur le champ territorial, d'abord, la résolution précitée no 680 adoptée en juin dernier le mentionnait déjà, l'objectif est une application par les Vingt-sept ou, à défaut, la zone euro, ou autour d'une coopération renforcée autour de la France et de l'Allemagne, avec l'objectif d'un extension la plus large possible sans s'arrêter à ce stade. Une taxe sur les transactions financières est d'autant plus efficace que le champ territorial auquel elle s'applique est étendu.

A défaut de pouvoir obtenir le niveau mondial comme on l'a vu, il faut donc essayer de parvenir à une application au niveau des vingt-sept et, en l'absence d'autre solution, au niveau de la zone euro. Plusieurs Etats membres sont opposés à la taxe et l'ont manifesté clairement, notamment le Royaume-Uni et la Suède. Au Royaume-Uni, l'élément politique n'est pas absent puisque Gordon Brown alors Premier ministre s'y était déclaré favorable, parmi les premiers lorsque de la crise financière s'est déclenchée. Le pays est important puisque la City est le premier marché financier d'Europe. La Suède également y est opposée car elle a fait l'expérience négative de la taxation dans un seul pays.

Certains pays opposés à la taxe sont également membres de la zone euro. C'est en l'état le cas des Pays-Bas. La raison en est principalement la taxation des fonds de pensions. C'est un problème puisque qu'en raison de l'intégration des bourses avec Euronext, le marché est avec eux unifié.

Sur la question de l'affectation de la taxe, la Commission européenne propose une affectation d'une partie du produit au budget de l'Union européenne comme ressource propre détachée des contributions nationales. C'est un débat de fond puisque le poids des ressources propres de l'Union s'est réduit avec le temps dans le financement des budgets de l'Union. Entre l'affectation aux budgets nationaux et l'affectation à l'Union, il faut trouver un juste milieu.

Dans le cadre de ses propositions pour le prochain cadre financier pluriannuel, la Commission européenne a, en effet, suggéré de moderniser le financement de l'Union en créant de nouvelles ressources propres à partir d'une nouvelle recette TVA et d'une affectation d'une fraction du produit de la future taxe sur les transactions financières, à hauteur des deux tiers. L'intérêt est que, de même que pour les droits de douane, les sommes en question viendraient en déduction des actuelles contributions nationales assises sur le RNB et à budget constant viendraient ipso facto réduire le déficit budgétaire en se substituant à une partie de ces mêmes contributions nationales RNB.

Pour l'instant, les discussions ne font que commencer et on ne peut naturellement aller au-delà de cette brève présentation, si ce n'est pour indiquer que tous les Etats membres participent aux discussions.

On mentionner deux autres avantages d'une affectation européenne. D'abord, cette modernisation du financement du budget de l'Union européenne pourrait permettre de financer à terme davantage d'actions européennes, et notamment les nouvelles politiques prévues par le traité de Lisbonne qui ne le sont pas, en l'état. Elle pourrait aussi donner à l'Europe une capacité d'action pour soutenir la croissance, par exemple par l'investissement. Ensuite, et c'est en relation avec les préoccupations des associations et des ONG, on peut envisager une participation avec les financements innovants aux biens publics mondiaux, aux enjeux environnementaux ou sanitaires, et au développement. Néanmoins, il faut être prudent. Ces décisions sont à l'unanimité des Etats membres, et il faut ensuite la ratification des parlements nationaux.

C'est un sujet qui demande du temps. Le calendrier d'examen et d'adoption éventuel de cette proposition de directive est clairement incertain, même si la Commission européenne mise sur la fin de l'année, ce qui laisse différentes possibilités aux Etats membres. Comme ces éléments ne font pas l'objet d'un consensus entre nous, ils n'ont pas vocation à être abordés dans résolution.

Il y a d'abord l'option allemande qui vise à s'assurer, selon les déclarations gouvernementales, au préalable et assez rapidement, pour les mois qui viennent, de la faisabilité de la taxe au niveau de l'Union européenne.

Il y a aussi la voie française d'une initiative nationale fondée sur la volonté de marquer combien notre pays tient à cette taxe et de créer un effet d'entraînement par un comportement pionnier

Mais c'est là un débat de politique interne. A titre personnel, je m'en tiendrai à rappeler que l'on peut craindre qu'une initiative purement nationale ne conduise qu'à un rétablissement de l'impôt sur les opérations de bourse supprimé en 2008 ou qu'à un Stamp duty britannique, c'est-à-dire à une taxe qui n'est pas optimale car ne portant pas sur les dérivés. Le risque est alors de casser la dynamique européenne qui vise un objectif plus large en s'alignant sur le régime en vigueur au Royaume-Uni depuis plusieurs siècles alors que comme l'a souligné hier le Président Lamassoure, le processus européen a une certaine probabilité d'aboutir dans de bonnes conditions.

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Votre exposé était très intéressant, mais je suis en désaccord sur le dernier point que vous avez évoqué, sans donner de précisions. Le Président de la République souhaite bien évidemment que cette taxe sur les transactions financières soit adoptée par un maximum de pays de l'Union européenne, mais un certain nombre de pays s'y oppose. La position de la France n'est pas de vouloir adopter seule une telle taxe, elle considère simplement que l'on ne va pas se regarder en chiens de faïence pendant des mois et des années : il faut bien que quelqu'un se lance ! Elle le fera sur la base d'objectifs - que l'on peut qualifier de raisonnables - visant à éviter les délocalisations, et également afin d'inviter d'autres pays à nous rejoindre.

De plus, la position allemande n'est actuellement pas connue. Si la Chancelière Angela Merkel y est en effet favorable d'un point de vue personnel, toute sa coalition, le parti libéral, ne partage pas son point de vue.

Laissons de côté nos considérations de politique intérieure ! C'est la France qui montre la voie à l'ensemble des pays de l'Union européenne ; elle l'a même fait au-delà de ses frontières, au sein du G20, où elle a défendu le principe de cette taxe avec l'Allemagne.

D'autres pays, tels que l'Espagne, sont prêts à nous suivre, mais il faut en entraîner d'autres encore. C'est la raison pour laquelle la proposition de résolution que nous allons adopter doit être nettement compatible avec la position française, défendue par le Président de la République. Nous devons aller de l'avant, et convaincre nos partenaires, même si la position des Pays-Bas et l'opposition totale du Royaume-Uni ne facilitent pas les choses !

Pour ma part, j'approuve totalement l'initiative de la France. Lorsque d'autres pays seront d'accord pour entrer dans le dispositif, il sera alors possible de modifier les modalités de la taxe ; mais pour le moment nous sommes seuls.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Il a déjà été dit qu'on ignore le délai de mise en oeuvre de cette taxe, ce qui constituait l'une de mes interrogations. Je suis favorable à cette initiative, visant à instaurer une taxe qui a pour double objectif de lutter contre la financiarisation excessive de l'économie et d'augmenter les ressources budgétaires. Mais, nous aurons beaucoup de mal à la faire adopter par l'ensemble de l'Union européenne, et il faut faire quelque chose. Je ne peux donc que me réjouir que la France le fasse, mais je demeure sceptique quant à l'effet d'entraînement que cette initiative aura. Souvenons-nous de la taxe « Chirac » sur les billets d'avion, destinée à favoriser l'aide aux pays en développement : en définitive, beaucoup de pays ne l'appliquent pas. J'y suis donc favorable - il faut bien passer à l'acte à un moment donné ! - même si je sais que cela aura peu d'effet : la France et l'Italie représentent peu à l'échelle européenne…

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

On ne peut, au départ, savoir précisément quel sera l'effet d'entraînement, mais ne rien faire se traduirait par un scepticisme total !

PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Il s'agit d'un sujet complexe et intéressant, que les rapporteurs ont eu pour mérite de rendre accessible. J'ai pris note des positions des autres pays, notamment du Royaume-Uni et des Pays-Bas, sur lesquelles je m'interrogeais.

Par ailleurs, l'objet de cette taxe est-il de limiter les transactions, ou bien de récupérer des ressources ?

L'affectation au sein du budget de l'Union européenne est-elle précisée ? Existe-t-il, selon vous, d'autres possibilités, tel que le reversement au mécanisme européen de stabilité, ou l'allocation à des Etats membres ? Et quels sont les éléments qui permettent de choisir entre ces trois options ?

S'agissant des marchés visés, qui peuvent se voir appliquer des taux différents, faut-il distinguer le marché des actions et obligations, et celui des produits dérivés ?

Enfin, même s'il faut bien prendre l'initiative, ne faut-il pas considérer que le dispositif ne pourra bien fonctionner que s'il existe une réciprocité ? En 2002 déjà, cette taxe avait été introduite dans le Code général des impôts, sous condition de réciprocité…

PermalienPhoto de Michel Piron

Je rejoint l'intervention liminaire de ma collègue : il y a clairement deux objectifs, celui de créer une ressource budgétaire et celui de freiner, ou du moins de contrôler, les transactions. J'aimerais connaître la position de l'Italie, qui joue nécessairement un rôle important dans cette négociation.

PermalienPhoto de Dominique Dord

Il est certainement un peu frustrant pour les rapporteurs de s'en tenir à certains aspects de cette question ! Mais l'actualité commande… La position française me semble juste et intéressante en elle-même. Il faut mettre en place cette taxe, même si c'est seulement au niveau national. Une telle démarche aura plutôt, a priori, un effet d'entraînement qu'un effet paralysant sur les autres, même si l'on ne peut être sûrs que cet effet d'entraînement va se concrétiser.

La seule faiblesse de la position française tient au risque de faire fuir l'objet même de la taxation. En prenant une position courageuse et juste, même si elle doit rester isolée, la France ne risque-t-elle pas que les produits que l'on veut taxer se délocalisent ? Certes, on encourra de toute façon ce risque, même si tous les pays européens créent cette taxe, du fait de l'opposition des Etats-Unis. Comment le combattre ?

PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Je soulève également cette question de la délocalisation. Il était temps que l'on crée cette taxe, mais elle n'a plus rien à voir avec la « taxe Tobin ». Il est important de corriger les excès de la sphère financière, et les autorités françaises font preuve de courage en ce domaine. Les conséquences d'une telle taxation par la France seule ont-ils été évalués ? La taxe va-t-elle frapper les petits porteurs ?

PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Ne croyez pas que je sois contre le fait que la France porte cette initiative ! Mais il faut être conscient qu'une taxe sur toutes les transactions financières procurerait de l'ordre de 10 milliards d'euros à la France, tandis qu'une taxe qui ne porterait que sur les transactions qui ne sont pas « délocalisables » – qui existait autrefois en France, l'impôt de Bourse – ne rapporterait qu'un milliard d'euros et ne frapperait pas les transactions les plus dangereuses.

S'engager seuls dans cette démarche présente un risque non pas de délocalisation – car le taux envisagé est suffisamment faible – mais d'arrêter le processus. Si la France instaure une taxe de type stamp duty à l'anglaise, le dispositif laissera de côté toutes les transactions qu'il faut impérativement taxer car elles sont dangereuses. Si l'on inclut les dérivés dans son champ, on réduira à coup sûr leur nombre – la Commission européenne estime qu'on pourra ainsi les réduire de 80 %. Le risque est d'aboutir à quelque chose qui n'a rien à voir avec une véritable « taxe sur les transactions financières ».

L'Italie suit la position française, d'autres pays également. Il faut trouver une solution pour éviter une taxation trop limitée qui frapperait les transactions financières les plus utiles à l'économie et pas les plus spéculatives.

Sur ce sujet fondamental, il faut s'efforcer d'obtenir l'accord du plus grand nombre de pays possible, pour élargir au maximum l'assiette et pour taxer les transactions nuisibles, et non pas rétablir l'impôt de Bourse.

PermalienPhoto de Michel Piron

Comme l'écrivait Spinoza, toute idée perd en compréhension ce qu'elle gagne en extension !

PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Nous avons des positions divergentes. Je pense que l'initiative de la France est bonne, soutenu dans cette conviction par M. Alain Lamassoure, que nous avons auditionné et qui s'est dit confiant dans l'effet d'entraînement qu'elle peut avoir.

S'agissant du problème de la territorialité et du risque de délocalisation, il est envisagé dans la proposition de tenir compte de deux éléments : non seulement le principe de résidence, avec à la fois la résidence de l'établissement financier etou de l'investisseur, mais aussi, idée intéressante, le lieu d'émission, pour cerner encore plus la matière taxable. On serait ainsi plus à l'abri du risque de délocalisation. Ce point est très important.

L'objectif est bien double : il s'agit évidemment de limiter la « sur-financiarisation » de l'économie, en mettant du sable dans les rouages pour reprendre l'expression de James Tobin, et de produire une ressource. C'est une idée très moderne d'impôt, avec une assiette extrêmement large, dont le produit pourrait bénéficier au budget de l'Union européenne – sujet sur lequel notre commission sera amenée à revenir.

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Je ne comprends pas le plaidoyer de M. Muet ! Si l'on attend l'ensemble des pays européens, on n'y arrivera jamais.

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Mais si l'on ne part pas seul, il n'y aura personne d'autre. Même si nous essayons toujours dans notre commission de chercher le consensus, je propose d'introduire dans la proposition de résolution un paragraphe saluant le fait que la France lance la dynamique en commençant par créer cette taxe au niveau national dans l'intention de l'étendre à un groupe pionnier d'Etats membres ou à la zone euro. J'approuve pleinement l'initiative du Président de la République.

PermalienPhoto de Marietta Karamanli

Faut-il introduire cet élément dans la résolution ? Il serait plus juste d'y mentionner les deux stratégies présentées dans le rapport, à savoir l'option allemande, qui est de s'assurer au préalable que la démarche est engagée au niveau européen, et la voie française. Votre amendement, Monsieur le Président, ne ferait état que de la seule option française, qui n'est pas forcément la meilleure position.

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

La position de la chancelière allemande est de dire : je suis d'accord pour créer cette taxe, mais je dois convaincre ma coalition. Mme Merkel a réussi à faire progresser considérablement la gouvernance économique et la solidarité dans la zone euro malgré l'opposition de départ du Parlement allemand, y compris la CDU-CSU. On peut donc espérer qu'elle va également les convaincre sur cette question. La position italienne a évolué à partir des propositions françaises. Je soumets donc cet amendement à votre approbation.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Il me semble qu'on pourrait ajouter à cet amendement que la France lance cette initiative « en s'assurant de la faisabilité » de cette taxe à l'échelle européenne.

PermalienPhoto de Michel Piron

On peut effectivement ajouter « dans le but de », pour nous mettre d'accord.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

« Dans le but d'entraîner le maximum de pays » !

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Je formule donc ainsi l'amendement : « Estime justifiée que la France lance la dynamique visant à la mise en place d'une taxe sur les transactions financières, dans le but de l'étendre à un groupe pionnier d'Etats membres ou à la zone euro ».

Puis la Commission a approuvé la proposition de résolution suivante :

« L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la résolution relative à l'introduction d'une taxe sur les transactions financières en Europe adoptée par l'Assemblée nationale le 14 juin 2011 (TA no680),

Vu la proposition de directive du Conseil établissant un système commun de taxe sur les transactions financières et modifiant la directive 20087CE (COM [2011] 594 finalno E 6659),

Vu la communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions intitulée « Un budget pour la stratégie Europe 2020 » (COM [2011] 500 final),

Vu la proposition de décision du Conseil relative au système des ressources propres de l'Union européenne (COM (2011) 510 finalno E 6405), en ce qu'elle propose un financement partiel du budget de l'Union européenne par une fraction du produit de la taxe sur les transactions financières,

Vu la directive 20087CE du Conseil du 12 février 2008 concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux,

Considérant qu'il convient de corriger les excès résultant d'un développement trop important de la sphère financière et qu'une taxation des transactions financières en constitue incontestablement l'un des moyens les plus appropriés ;

Considérant également qu'une telle taxe est le complément des instruments de régulation visant à réduire le volume des transactions de gré à gré sur les dérivés ;

Considérant aussi son intérêt pour modérer le recours aux transactions à haute fréquence par les opérateurs ;

Constatant que l'absence de taxe générale sur les transactions financières apparaît comme de moins en moins compréhensible eu égard à la taxation des transactions non financières et des besoins financiers des Etats membres, pressés par les marchés financier de réduire le niveau de leur déficit public comme le volume de leur endettement ;

Considérant qu'en l'absence de solution mondiale, une taxe sur les transactions financières doit être mise en place au niveau de l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne et, à défaut, au niveau des Etats membres ou d'une partie d'entre eux ;

Rappelant enfin que le produit de la taxe a également vocation, dans les termes de la résolution no 680 précitée, à contribuer aux financements innovants, notamment pour le développement et la lutte contre le changement climatique ;

1. Salue la proposition de directive précitée en ce qu'elle vise à instituer dans tous les Etats membres de l'Union européenne, à ce stade, une taxe sur les transactions financières ayant une assiette large incluant à tous les instruments financiers, et applicable à l'ensemble des marchés et des transactions, y compris aux transactions de gré à gré, ainsi qu'à tous les acteurs, notamment à tous les établissements financiers ;

2. Estime cependant que le principe de résidence pourrait être complété par celui du lieu d'émission, pour renforcer l'efficacité du futur dispositif face aux tentatives d'évasion fiscale qui risqueraient, en leur absence, de se développer ;

3. Juge également nécessaire, en l'absence confirmée d'obstacle juridique, d'inclure, dans le champ de la taxe, les transactions au comptant sur les marchés des changes, notamment les opérations sur les devises de pays tiers, à l'occasion des ajustements d'assiette susceptibles d'intervenir au cours des négociations ultérieures ;

4. Considère aussi quela différenciation des taux entre les dérivés, taxés à 0,01 %, et les opérations au comptant, taxées à 0,1 %, soit des taux effectifs de 0,02 % et 0,2 % pour les opérations n'impliquant que des résidents, ne s'impose pas nécessairement comme la seule option possible, eu égard aux avantages intrinsèques d'une taxation généralisée au taux unique de 0,05 % ;

5. Souligne enfin l'intérêt des discussions en cours sur la proposition de la Commission européenne d'affecter une part très significative du produit de la taxe sur les transactions financières au budget de l'Union européenne, comme ressource propre détachée de la contribution RNB des Etats membres ;

6. Estime justifié que la France lance la dynamique visant à la mise en place d'une taxe sur les transactions financières, dans le but de l'étendre à un groupe pionnier d'Etats membres ou à la zone euro. »

PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

La proposition de directive de la Commission européenne visant à établir une assiette harmonisée commune aux Etats membres pour l'impôt sur les sociétés, présentée en mars dernier, est l'aboutissement d'un projet ancien.

Les premiers travaux préparatoires ont, en effet, débuté en 2001, et, si l'on remonte plus loin, dès les débuts du marché intérieur, dès les années 1960, avec le rapport Neumark.

L'objectif est d'aller au-delà de la situation actuelle où l'Union européenne intervient en matière d'imposition des résultats des entreprises sur des questions précises, sans politique d'ensemble. Actuellement, il y a en la matière, d'une part, des textes sectoriels, avec les trois directives « intérêts et redevances », « mères-filiales » et « fusions et autres opérations de restructuration », d'autre part, les actions du groupe « code de conduite » contre la concurrence fiscale dommageable, par ailleurs le contrôle des aides d'Etat à caractère fiscal et, enfin, des éléments de jurisprudence de la Cour de Justice, par exemple avec l'arrêt Marks&Spencer sur l'imputation des pertes réalisées dans un autre Etat membre.

Même si c'est de manière moins claire que pour les impôts indirects, le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne donne une base juridique pour une telle harmonisation en matière d'impôt direct, à son article 115. La procédure est, comme pour les impôts indirects, assez exigeante, avec une décision du Conseil à l'unanimité des Etats membres et un rôle consultatif du Parlement européen.

La situation exige une telle harmonisation européenne. Actuellement en effet, les taux nominaux sont très différents, allant en 2009 de 10 % à Chypre à 35 % à Malte. En France, le taux est cette même année de 34,43 %, avec les majorations. En Allemagne, il est de 15 % au niveau fédéral et de 29,83 % au total avec l'imposition locale (l'équivalent de notre contribution économique territoriale). Le taux est enfin de 12,5 % en Irlande.

Comme les bases d'imposition sont elles aussi diverses, avec des différences essentiellement sur la territorialité, les amortissements, les provisions, les produits et frais financiers, les plus-values ou les reports déficitaires, on ne peut simplement pas évaluer de manière incontestable le poids de l'impôt. Lorsqu'on le fait avec la part de l'impôt sur les sociétés dans le PIB ou, par des méthodes complexes, avec le taux effectif de l'impôt, la France est d'ailleurs plus proche de la moyenne européenne.

De manière générale, le taux de l'impôt sur les sociétés apparaît en Europe inférieur à ce qu'il en est dans les pays comparables : aux Etats-Unis, avec 35 % de taux fédéral pour la tranche la plus élevé, et plus de 41% avec l'impôt local ; au Japon, 38 % surtaxes comprises ; au Mexique, 30 %.

KPMG a ainsi calculé en 2009 que le taux moyen de l'impôt sur les sociétés en Europe est, avec 23,22 % en 2009, inférieur à la moyenne de l'OCDE (26,30 %), et inférieur à ce qu'il est en moyenne dans les économies émergentes : 26,91 % en Amérique latine et 27,49 % dans la zone Asie-Pacifique.

Lorsque l'on examine la question sur plusieurs années, on constate que l'Europe a été l'initiatrice du mouvement de baisse mondiale du taux de l'impôt sur les sociétés, tout simplement parce que les Etats membres se font une concurrence fiscale réelle mais mal maîtrisée, où les taux nominaux jouent un rôle très important. C'est paradoxal car l'impôt sur les sociétés n'est pas le principal élément de la compétitivité des entreprises. Il n'intervient en effet qu'in fine dans le processus économique. Les représentants des entreprises françaises l'ont d'ailleurs dit : c'est dans notre pays l'empilement des impôts spécifiques, tels que le versement transports, qui posent davantage problème.

Sur le fond, cette concurrence fiscale est de beaucoup le fait des Etats, notamment des petits Etats et de certains nouveaux Etats membres, qui souhaitent reproduire le « modèle irlandais ». La réussite de ce pays a été fondée sur le caractère attractif des faibles taux nominaux, avec d'abord des bas taux spécifique, puis un taux unique de 12,5%. Elle fascine.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Dans ce contexte, la proposition de directive relative à une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS), commune aux 27 Etats membres, offre des perspectives satisfaisantes.

En premier lieu, elle prévoit, pour l'assiette commune harmonisée, un mode de calcul classique du résultat imposable et qui aboutit, en outre, pour l'ensemble des Etats membres, sauf deux (l'Irlande et Chypre), à une assiette plus large qu'actuellement.

Pour les pays européens, elle devrait ainsi amorcer une certaine convergence des taux à recettes constantes. On peut penser que les taux les plus faibles augmenteront et que les taux les plus élevés diminueront, avec un peu d'optimisme.

Pour les entreprises, l'ACCIS entraîne une simplification des déclarations lorsqu'elles exercent leurs activités dans plusieurs Etats membres et aussi un élément de stabilité des règles fiscales, lesquelles sont considérées en France comme changeant trop souvent. Les représentants des entreprises ont bien insisté sur ce point.

En deuxième lieu, la proposition prévoit aussi une consolidation de l'assiette entre les différentes entités des groupes d'entreprises établies dans différents Etats membres. C'est, pour les groupes, l'avantage de la compensation des pertes et des profits, ainsi que la perspective d'un règlement de la question des prix de transfert, c'est-à-dire des prix de facturation entre entreprises liées d'un Etat membre à l'autre.

Pour les Etats membres, la répartition du droit d'imposer se ferait a'après une formule avec trois facteurs, à raison d'une pondération d'un tiers pour chacun d'entre eux : le personnel (avec pour moitié les effectifs et pour moitié la masse salariale) ; les immobilisations, c'est-à-dire le capital ; le chiffre d'affaires avec les ventes par destination, c'est-à-dire par pays de vente et non d'achat, en cas de transaction transfrontalière. C'est un facteur reconnexion entre l'impôt et le territoire où s'exerce l'activité.

En troisième lieu, la conception de la proposition autorise une distinction du calcul de l'assiette et du recouvrement, ce qui permettra aux Etats membres de mener dans la transparence une politique fiscale autonome, avec des dispositifs de type crédit d'impôt.

Dans l'ensemble, les entreprises gagnent sur le plan financier avec l'élimination des doubles impositions et des coûts administratifs inhérents à plusieurs systèmes de déclaration.

Dans ces circonstances, la proposition de la Commission, européenne n'appelle pas de modification majeure, mais certaines améliorations, uniquement.

La première à envisager tient au calendrier de mise en oeuvre de l'ACCIS. La Commission européenne prévoit de coupler le passage à l'assiette commune de l'impôt et la consolidation. Les deux éléments peuvent être disjoints. C'est vraisemblablement nécessaire pour éviter trop de difficultés d'adaptation, de même que, pour certains Etats membres, les risques de transfert d'assiette et donc de pertes de recettes.

La deuxième modification concerne l'optionalité. La proposition de directive prévoit en effet que l'ACCIS sera optionnelle pour les entreprises. Ce n'est pas une solution satisfaisante si elle doit être pérenne. En effet, même si l'option est prévue pour 5 ans, dès lors que deux systèmes sont en vigueur dans un même Etat, on a affaire à une situation d'une grande complexité, tant pour les professionnels que pour les services fiscaux : il faut d'une certaine manière tout dédoubler. En outre, il y a des facultés d'optimisation avec passage d'un système à l'autre. Si certains Etats membres conservent un système national à côté du dispositif européen, ils peuvent également pratiquer le « dumping » fiscal. Dans ces circonstances, il apparaît nécessaire de limiter à une période transitoire la coexistence de deux corps de règles, dans tous les Etats membres, pour éviter la tentation du « dumping » fiscal, et également permettre une généralisation progressive de l'ACCIS.

Ensuite, différents aménagements plus techniques sont nécessaires.

Tel est d'abord le cas sur l'assiette, sachant qu'elle doit en tout état de cause rester large, reposer sur la réalité économique, notamment en matière d'amortissement, et être sécurisée par des mesures anti-abus efficaces.

Tel est également le cas sur la consolidation. Dès lors que les déclarations fiscales de groupe seront déposées auprès de l'administration fiscale d'un seul Etat membre, il convient de prévoir une grande homogénéité des règles de gestion administrative, pour éviter tout risque de « dumping administratif » et toute difficulté dans l'exercice du contrôle fiscal pour les autres Etats membres d'implantation du groupe. C'est une question de confiance entre les pays.

Sur le plan de la procédure, la proposition de directive doit être adoptée, comme on l'a vu, à l'unanimité. Il n'est pas certain que cela puisse être le cas. D'abord, un Etat membre y est clairement opposé, c'est l'Irlande. Ensuite, on a pu constater qu'un nombre inhabituellement élevé de Parlements nationaux a jugé qu'il y avait atteinte au principe de subsidiarité.

Dans ces circonstances, même si c'est naturellement sans vouloir brusquer les choses, il convient d'envisager clairement le passage à la coopération renforcée lorsque les circonstances en seront réunies.

Une convergence fiscale entre Etats membres est en effet possible dès lors que la volonté des gouvernements est là.

Nous avons l'expérience en cours de la convergence franco-allemande.

Tels sont les éléments que la proposition de résolution propose de reprendre.

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Je partage l'inquiétude des rapporteurs sur l'enjeu des exonérations qui viendraient affaiblir les progrès portés par la définition d'une assiette commune, et sur notre nécessaire vigilance à cet égard. Par ailleurs, la compétitivité dépasse largement la seule question de l'imposition des sociétés. Les choix de localisation des entreprises répondent en effet à des préoccupations beaucoup plus fondamentales, sur la qualité des infrastructures du pays d'accueil, sur la formation dispensée, sur les modalités d'occupation des sols, etc.

PermalienPhoto de Michel Piron

Il importe aussi, à côté du débat sur la définition de l'assiette qui ressortit clairement à une analyse microéconomique, de prendre en compte les aspects macroéconomiques que soulève la question de l'harmonisation fiscale, qui n'aura évidemment pas le même impact selon que les pays privilégie telle ou telle type d'activités, ici l'industrie productive, là les activités de service… L'incidence de nos choix fiscaux sur ces stratégies essentielles mérite que l'on s'y arrête un instant.

PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Monsieur Piron, pour les groupes transfrontaliers, l'assiette de l'IS se répartit en trois tiers : c'est un peu plus compliqué dans le détail mais, pour faire simple, il est tenu compte du chiffre d'affaires, de la main-d'oeuvre et des immobilisations.

La Commission européenne a calculé que l'harmonisation de l'ACCIS générerait 1,3 milliard d'euros d'économies d'impôt. Si l'on ajoute les 700 millions d'économies administratives, le total atteint environ 2 milliards.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Monsieur Piron, le contexte local compte, c'est vrai. Pour la France, le critère de répartition selon les ventes ne serait pas désavantageux car, en France, nous vendons davantage que nous ne produisons. De toute façon, les services de Bercy sont très mesurés, ils y vont à tous petits pas. C'est en marchant que nous trouverons la voie.

Monsieur Gaubert, la fiscalité n'est évidemment pas le seul facteur de compétitivité des entreprises. Mais nous avons remarqué que ces dernières, petites, moyennes ou grandes, sont tout de même sensibles au taux de prélèvement : elles sont attirées par les pays où il est faible, comme l'Irlande. Considérer uniquement le taux en négligeant l'assiette ne signifie pas grand-chose mais les entreprises qui délocalisent ne sont pas forcément au courant des détails de l'assiette. Avec l'ACCIS, il sera possible de choisir en connaissance de cause car l'assiette comme les taux en vigueur dans chacun des pays seront connus – ceux-ci finiront d'ailleurs par se rapprocher.

La Commission a ensuite approuvé la proposition de résolution suivante :

« L'Assemblée nationale,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, notamment ses articles 113 et 115,

Vu la proposition de directive du Conseil concernant une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS) (COM [2011] 121 finalno E 6136),

Vu également la proposition de directive du Conseil concernant un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts et de redevances effectués entre des sociétés associées d'Etats membres différents (COM [2011] 714 finalno E 6802), de refonte,

Considérant qu'en l'absence d'harmonisation de l'assiette de l'impôt sur les sociétés et de méthode simple permettant de comparer les taux nominaux d'une manière rigoureuse, il est impossible de connaître les taux réels de l'impôt sur les sociétés dans les Etats membres,

Considérant que ces conditions conduisent à une concurrence fiscale non maîtrisée qui se traduit par des niveaux affichés de taux nominaux nettement inférieurs à ceux des principaux partenaires économiques des Etats membres,

Considérant également qu'une harmonisation est indispensable pour rétablir les conditions d'une concurrence fiscale claire loyale et transparente, allant également dans le sens d'un renforcement de la gouvernance de la zone euro et apportant aux entreprises davantage de simplicité dans le fonctionnement du marché intérieur,

1. Demande l'adoption de la première des propositions précitées en ce qu'elle prévoit une assiette commune pour l'impôt sur les sociétés et, s'agissant de la consolidation, des modalités de répartition de l'assiette consolidée, entre les différentes sociétés et établissements des groupes et sociétés établis dans plusieurs Etats membres, permettant une répartition équitable de son produit ;

2. Considère cependant que l'entrée en vigueur des dispositions sur la consolidation peut intervenir d'une manière différée, compte tenu des difficultés de mise en oeuvre, ainsi que des enjeux budgétaires pour les Etats membres ;

3. Estime également que la faculté d'option offerte aux entreprises entre une assiette nationale de l'impôt sur les sociétés et l'ACCIS doit être davantage encadrée, de manière à limiter la coexistence des deux corps de règles en Europe, qui ne sera que transitoire, pour permettre une extension progressive de d'application de l'ACCIS ;

4. Juge que l'ACCIS devra permettre de garantir une assiette large, reposant sur une réalité économique, notamment en matière d'amortissement, et sécurisée par des mesures anti-abus efficaces ;

5. Attire spécifiquement l'attention du gouvernement sur le fait que la mise en oeuvre de l'ACCIS ne devra pas engendrer de complexité excessive, notamment en matière déclarative, ni entraîner non plus d'insécurité juridique ;

6. Considère comme indispensable, dans le cadre du guichet unique, de garantir l'homogénéité des règles de gestion administrative et d'éviter tout risque de « dumping administratif », comme toute difficulté dans l'exercice du contrôle fiscal ;

7. Juge enfin qu'à défaut d'unanimité des Etats membres, le recours à la procédure de coopération renforcée ne doit pas être exclu. »

PermalienPhoto de Valérie Rosso-Debord

Ces deux textes visent à reprendre sur d'autres bases les textes originaux du « paquet médicaments » ou « paquet pharmaceutique » relatif à l'information des patients en raison de l'importance des amendements souhaités par le législateur communautaire, notamment le Parlement européen.

Les circonstances l'y conduisant, la Commission européenne a également introduit dans chacun de ces deux textes des dispositions relatives à la pharmacovigilance afin de combler les lacunes identifiées à l'occasion du « test de résilience » réalisé pour le Médiator.

Pour ce qui concerne la pharmacovigilance, les propositions de la Commission européenne visent à combler trois lacunes du dispositif tel qu'il vient d'être révisé en 2010.

Il s'agit, en premier lieu, de rétablir l'automaticité de la procédure européenne lorsqu'un Etat membre ou la Commission européenne envisage la suspension ou le refus de renouvellement d'une AMM. Les dispositions adoptées en 2010 n'impliquent, en effet, une telle procédure de réévaluation que si l'Etat membre concerné estime qu'il y a une mesure d'urgence à prendre.

L'objectif est, en deuxième lieu, d'obliger le titulaire d'une AMM d'indiquer les raisons pour lesquelles il retire un médicament du marché ou ne demande pas le renouvellement de son AMM, de manière à éviter les procédures subreptices et à obliger en amont à produire un dossier de demande d'AMM plus rigoureux. Pour sa part, la France a déjà une disposition similaire, dans le cade de l'article 12 de la loi no 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire.

La Commission européenne propose en troisième lieu de prévoir l'extension du champ des médicaments figurant d'office sur la liste publique des médicaments sous surveillance, sans même que l'intervention d'une instance d'expertise ne soit nécessaire.

Le Gouvernement est favorable aux deux premières dispositions, mais réservé sur la troisième, car il craint, et c'est un sentiment que l'on peut partager, qu'en l'absence d'examen au cas par cas, la liste ne s'accroisse dans des conditions telles que l'on ne puisse plus distinguer à terme les éléments essentiels.

Par ailleurs, les propositions de la Commission européenne ne contiennent aucune disposition sur la question des conflits d'intérêts au sein des instances d'expertise du médicament. Il convient par conséquent de s'en remettre à la procédure de codécision, et notamment au Parlement européen, pour que celles-ci soient introduites.

Pour la France, il faut rappeler que la loi précitée du 28 décembre 2011 prévoit, en la matière, des dispositions dont les décrets d'application sont indiqués par le ministère comme en cours d'élaboration.

Pour ce qui concerne l'information des patients sur les médicaments soumis à prescription, la proposition de la Commission européenne reprend plusieurs amendements.

En dépit de ces éléments, une très grande majorité des Etats membres a manifesté dès les réunions du groupe « médicaments et dispositifs médicaux » des 25 octobre et 8 novembre derniers le maintien de leur opposition aux textes.

Du point de vue de la France, il n'y a pas d'amélioration substantielle par rapport au projet initial :

– la question primordiale de la différence entre l'information et la publicité n'est pas tranchée ;

– le contrôle prévu par les autorités compétentes, notamment celui des sites Internet, apparaît hors de portée, sauf à y consacrer des moyens humains et financiers que les circonstances ne permettent pas d'envisager.

Certains Etats membres, en outre, ne peuvent envisager de mettre en place, pour des raisons constitutionnelles, un mécanisme de contrôle de l'information.

Dans ces circonstances, il convient de disjoindre ces dispositions de celles relatives à la pharmacovigilance.

Dans ces circonstances, je vous propose d'approuver ces textes, sous le bénéfice de ces observations et, particulièrement, sous réserve de la disjonction du reste des textes, des dispositions relatives à l'information des patients.

PermalienPhoto de Yves Bur

Je voudrais faire deux remarques sur ces dispositions. L'automaticité de la remontée de l'information au niveau européen constitue une avancée et un progrès pour l'information réciproque des Etats membres. Il n'en reste pas moins que demeure posée la question de la transparence et du risque de conflits d'intérêts. Ainsi, l'année dernière, dans le cadre d'une mission sur les agences sanitaires , je me suis rendu en Grande Bretagne où j'ai fait une visite de l'Agence européenne du médicament. A cette occasion, il m'a été dit que les problèmes de ce type avaient été résolus. Or le lendemain, j'apprenais que le Parlement européen avait refusé de voter les crédits de cette agence car il ne lui avait pas été fourni des réponses précises et claires sur la question des conflits d'intérêts. Il faudrait donc être très exigeant pour que les nouvelles dispositions soient conformes à celles qui sont en vigueur en France. Enfin, s'agissant de l'information sur les médicaments sur Internet, il est nécessaire de lever toute l'ambiguïté sur ce qui s'apparente à de la publicité et dans lequel les laboratoires rêvent de s'engouffrer.

PermalienPhoto de Jacques Myard

De manière corrélative, je voudrais insister sur la garantie sanitaire qui est offerte par le système de vente et de distribution des médicaments en France même s'il est critiqué à Bruxelles. Les médicaments ne sont pas de la lessive et ne peuvent donc pas être vendus en grande surface.

Sous le bénéfice des informations apportées par Mme Valérie Rosso-Debord, et sous réserve de la disjonction des dispositions relatives à l'information des patients, la Commission a approuvé ces textes.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Je présenterai la première partie de notre rapport, la deuxième l'étant par Mme Pascale Gruny.

La proposition de politique de cohésion 2014-2020 ne présente pas de changements significatifs par rapport à celle actuellement en vigueur et qui court jusqu'en 2013.

Trois objectifs avaient été retenus par la politique de cohésion 2007-2013 qui concerne 271 régions européennes :

- convergence solidarité entre les régions ;

- compétitivité régionale et emploi ;

- coopération territoriale et emploi.

L'objectif « Convergence » solidarité entre les régions » concerne les régions les moins développées de l'Union européenne, celles dont le produit intérieur brut (PIB) est inférieur à 75 % du PIB moyen de l'Union.

Il bénéficie aussi, à titre transitoire, aux régions dont le PIB moyen est devenu supérieur à 75 % de la moyenne européenne du fait de l'élargissement à des pays moins riches. Au titre de cet objectif sont financés, notamment, l'amélioration des infrastructures de base, l'aide aux entreprises, la création d'emplois, la formation.

Toutes les régions ultrapériphériques (RUP) de l'Union dont, les départements d'Outre-mer français, bénéficient de cet objectif compte tenu de leur situation géographique.

Les 99 régions éligibles à cet objectif regroupent 170 millions d'habitants et bénéficient de 283,3 milliards d'euros, soit 81,5 % de l'enveloppe totale « Cohésion », soit 858 euros par habitant.

L'objectif « Compétitivité régionale et emploi » bénéficie à 172 régions regroupant 330 millions d'habitants auxquelles sont affectés 55 milliards d'euros, soit 16 % de l'enveloppe totale, ce qui représente 166 euros par habitant. Il vise à créer des emplois en favorisant la compétitivité économique de ces régions. Toutes les régions d'Europe ne relevant pas de l'objectif « Convergence » sont concernées.

Au titre de cet objectif sont financés, notamment, les transports propres, les universités, l'aide à la création de petites et moyennes entreprises.

L'objectif « Coopération territoriale européenne » a pour but d'encourager la coopération transfrontalière européenne. Toutes les régions européennes sont concernées, 8,7 milliards d'euros y étant consacrés, soit 2,50 % du budget total. Les types de projets financés sont, notamment, le développement des langues et des cultures de régions limitrophes, le soutien de pôles d'excellence partagés.

Compte tenu des difficultés d'élaboration des dossiers, un instrument juridique particulier, le Groupement européen de coopération territoriale (GECT), a été créé pour faciliter cette coopération transfrontalière. Ainsi la région Midi-Pyrénées a-t-elle utilisé cette facilité en concertation avec les régions espagnoles limitrophes.

Ces trois objectifs sont financés par trois Fonds : le Fonds européen de développement régional (FEDER), le Fonds social européen (FSE) et le Fonds de cohésion.

Le FEDER, doté de 198,8 milliards d'euros, intervient pour les trois objectifs dont 160 milliards d'euros au titre de la « Convergence », 31 milliards d'euros au titre de la « Compétitivité régionale et emploi» et 7,8 milliards d'euros au titre de la «Coopération territoriale européenne»

Le FSE vise à améliorer l'emploi dans l'Union européenne et intervient uniquement dans le cadre des deux premiers objectifs. Sa dotation a été fixée à 76 milliards d'euros, dont 52 milliards d'euros pour l'objectif « Convergence » et 24 milliards d'euros pour l'objectif « Compétitivité régionale et emploi ».

Le Fonds de cohésion aide les Etats membres, dont le PIB par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne communautaire, à réduire leur retard économique et social. Il s'adresse à quatorze pays dont, notamment, la Bulgarie, la Roumanie, la Grèce, le Portugal où il finance des actions dans le domaine des réseaux transeuropéens de transport et de l'environnement.

Dans la future politique de cohésion, dont la préparation a débuté en 2009, la Commission propose de remplacer les trois objectifs par une nouvelle distinction ternaire :

- les régions les moins développées dont le PIB est inférieur à 75 % du PIB moyen de l'Union européenne, ce qui est la même distinction que pour l'objectif « Convergence » ;

- les régions en transition dont le PIB se situe entre 75 % et 90 % du PIB moyen de l'Union, ce qui est plus restrictif que l'objectif « Compétitivité régionale et emploi » ;

- les régions les plus développées dont le PIB est supérieur à 90 % du PIB moyen européen.

Un certain nombre d'évolutions vont donc avoir lieu, engendrant peut-être quelques mécontentements : ce sera le cas des régions qui vont sortir de l'objectif « Convergence » et se trouver dans la catégorie « régions en transition » en perdant des crédits. Il en sera de même pour les régions sortant de l'objectif « Compétitivité régionale et emploi » en entrant dans la catégorie « régions les plus développées ».

Ce nouveau découpage a été accueilli plutôt favorablement par les Régions, le gouvernement français estimant que celui-ci ne peut être traité indépendamment du montant de l'enveloppe globale de la politique de cohésion.

Pour la période 2014-2020, la Commission exige qu'un contrat de partenariat soit conclu entre elle et les Etats liant l'utilisation des fonds aux performances à réaliser, ces contrats devant être prolongés au niveau local, donc au niveau des régions en France.

L'articulation des négociations entre la Commission et les Etats n'est pas encore déterminée mais on peut penser qu'il y aura une négociation simultanée entre l'Etat et les régions qui doivent trouver toute leur place dans l'élaboration de cette politique de cohésion. On passe certes du contrat de plan au contrat de partenariat, mais cela ne devrait pas beaucoup changer la situation actuelle.

Il faudra cependant rester vigilant sur ce contrat de partenariat qui traduirait au niveau national la stratégie « Europe 2020 » en liaison avec le Programme national de réforme (PNR).

Dans la stratégie « Europe 2020 », chaque programme opérationnel aurait l'obligation, ce qui n'est pas non plus nouveau, de cibler un nombre restreint de priorités en liaison avec le PNR dans le respect du Pacte de stabilité et de croissance.

Ce qui est par contre nouveau, et qui est une bonne chose, est qu'un cadre interfonds serait créé pour favoriser les synergies comprenant le FEDER, le FSE, le Fonds de cohésion et aussi le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) ainsi que le Fonds européen pour la pêche (FEP).

PermalienPhoto de Pascale Gruny

La Commission européenne propose d'affecter 376 milliards d'euros à cette politique de cohésion pour la période 2014-2020.

Sur cette somme, 40 milliards d'euros, auxquels s'ajouteront 10 milliards d'euros en provenance du Fonds ce cohésion, soit 50 milliards d'euros, seront affectés à un nouveau Fonds « Infrastructures ». Ce fonds géré au niveau européen financera de grandes infrastructures de transports (31,7 milliards), d'énergie (9 milliards) et de télécommunications (9,2 milliards), les petites infrastructures restant financées au niveau des régions par le FEDER.

Il restera donc pour la politique de cohésion stricto sensu 336 milliards d'euros, soit moins que pour la période 2007-2013 (347 milliards d'euros) et 32 % du budget européen total contre 35 %. C'est un niveau acceptable compte tenu de la difficile période actuelle.

Cependant, il faudra rester vigilant pendant les négociations et veiller à maintenir ce chiffre car la politique de cohésion a comme but de lutter contre les disparités économiques, sociales et territoriales entre les régions.

Les 336 milliards seront répartis de la façon suivante : 162,6 milliards pour les Régions les moins développées, 53,1 milliards pour les Régions les plus développées, 39 milliards pour les Régions en transition, 11,7 milliards pour la coopération territoriale, 68,7 milliards pour le Fonds de cohésion et 0,926 milliard pour les RUP.

Concernant les RUP, le Commissaire chargé de la politique régionale, M. Johannes Hahn, a précisé qu'ils bénéficieraient d'une plus grande dotation du FEDER passant de 150 à 275 millions d'euros avec un cofinancement communautaire à 85 %, cette augmentation rencontrant notre agrément.

Il n'en est par contre pas de même concernant l'allocation additionnelle dont bénéficient ces RUP pour tenir compte de leurs difficultés particulières, qui passerait de 35 euros par habitant, actuellement à 25 euros.

PermalienPhoto de Pascale Gruny

Tout à fait, car ils sont concernés comme nous.

L'évolution du montant des Fonds est la suivante : les dotations du FSE augmentent de 76 à 74 milliards d'euros, tandis que celles du FEDER passent de 57,29 à 54,55 milliards d'euros, celles du Fonds de cohésion passant de 69,9 milliards à 68,7 milliards d'euros.

Le FSE représentera ainsi 25 % du budget total de la politique de cohésion. Il faut noter que le FSE ne disposait pas jusqu'à maintenant de ligne budgétaire propre, certains Etats membres utilisant la totalité de leur enveloppe « politique de cohésion » pour le FEDER et rien pour le FSE. Cette situation devrait heureusement changer, car les dépenses au titre de ce Fonds sont directement affectées aux personnes humaines en difficulté.

Onze objectifs thématiques sont prévus pour mieux cibler les fonds, parmi lesquels, la recherche, l'environnement, l'emploi, la lutte contre la pauvreté…

Aujourd'hui, certains Etats membres ont des difficultés pour absorber les fonds. Ainsi, à la cinquième année de la programmation 2007-2013, certains Etats membres n'ont encore absorbé qu'à peine 25 % des fonds, cas, par exemple, de la Roumanie. C'est la situation aussi des Etats membres dont le contexte fiscal empêche un cofinancement national.

Plusieurs mesures sont prévues pour faciliter l'absorption des fonds : dotations de cohésion limitées à 2,5 % du PIB (3,8 % aujourd'hui) ; plafonnement des taux de cofinancement (à 85 % pour les régions les moins développées, 60 % pour les régions en transition, 50 % pour les régions les plus développées) ; contrats de partenariat prévoyant, notamment, l'amélioration des capacités administratives.

Certaines de ces mesures vont entraîner des difficultés pour les pays ayant vu diminuer leur PIB comme la Hongrie alors qu'un relèvement du taux de cofinancement est prévu pour les Etats membres se trouvant dans une situation difficile comme la Grèce.

Des conditionnalités sont mises en place pour ces financements.

Des mesures nouvelles, des conditions ex ante, qui feront partie intégrante du contrat de partenariat, seront mises en place pour s'assurer d'une bonne utilisation des fonds.

Elles pourront concerner la transposition en droit interne des directives ou l'existence de stratégies nationales ou de politiques dans certains domaines. Ainsi, par exemple, des fonds européens pour la gestion de l'eau ne pourraient être accordés que si les directives correspondantes ont été transposées en droit interne. Il serait aussi possible d'indiquer des échéances pour le début de la programmation en tenant compte des transpositions.

Des conditions ex post consisteront en indicateurs de performances en fonction de la réalisation des objectifs.

5 % de la dotation nationale de chaque fonds constituera une réserve de performance qui sera réservée et allouée aux Etats membres ayant atteint les résultats prescrits. L'évaluation sera faite en 2017 pour un éventuel versement en 2019, les fonds non répartis constituant une réserve de croissance et de compétitivité attribuée aux Etats ayant atteint les meilleurs résultats. La Commission se réserve un pouvoir de sanction en cas de manque de résultats qui se traduira par la suspension des aides ou leur annulation si les résultats sont inférieurs aux objectifs.

Enfin, est prévue l'instauration d'une condition macroéconomique qui permettrait de suspendre ou d'annuler une partie des aides quand serait constaté un déséquilibre macroéconomique ou un déficit excessif, sauf pour les Etats en cause à mettre en place des mesures correctrices. Cette condition a suscité beaucoup de réactions. Elle a été approuvée par la France, l'Allemagne et la Bulgarie, tous les élus locaux y étant par contre opposés.

Nous ne sommes pas très favorables à cette condition. Il est peut-être nécessaire d'instaurer une telle condition pour les Etats mauvais gestionnaires mais si des difficultés se présentent, il serait sans doute préférable de prévoir un accompagnement par des experts. Car il ne faut pas oublier que ce sont des personnes humaines dans des régions en difficulté qui seront pénalisées, une telle condition ne leur apportant finalement aucune aide.

En conclusion, nous estimons que la future politique de cohésion disposera de montants acceptables, le renforcement du FSE avec 25 % des engagements financiers étant tout à fait positif, comme l'est la création de la catégorie des régions en transition.

Les conditionnalités sont prévues pour une meilleure gestion des fonds.

La discussion de cette nouvelle politique de cohésion n'en est qu'à ses débuts mais il faut rester vigilants et il faut associer, au niveau régional, les pouvoirs locaux à sa mise en place.

PermalienPhoto de Jacques Myard

Je ferai une remarque liminaire : l'Europe ne comporte pas 92 régions mais 27 Etats, ce point est fondamental. Quand nous écoutons nos rapporteurs, j'ai le sentiment que nous sommes en train d'élaborer une usine à gaz alors que nous pourrions recourir à une autre méthode plus simple, par exemple celle des protocoles financiers. Cette machinerie est lourde et le critère ex ante est révoltant, inacceptable, aux antithèses de l'esprit européen. Enfin, je souhaiterais que les propositions de conclusions soit rédigée sous la forme de « considérants ».

PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Les rapporteurs pourraient-ils nous indiquer si le point 2 de leurs conclusions s'adresse à la Commission européenne ou aux Etats et en ce qui concerne le point 7, pourraient-ils nous préciser ce qu'ils entendent par « mécanisme de contrôle trop paralysant », notion qui paraît difficile à justifier sur le plan juridique.

PermalienPhoto de Pierre Forgues

Je ne suis pas favorable à des discussions directes entre l'Union européenne et ses 271 régions qui sont extrêmement variées. En réponse à Michel Diefenbacher, le point 2 de nos conclusions s'adresse à l'Etat car nous demandons que ce dernier agisse de manière concomitante ou en partenariat avec les régions. En effet, les projets ne peuvent être élaborés qu'en étroite concertation avec elles. Le délégué interministériel à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale, le préfet Berthier, nous a assuré de la qualité de la concertation. S'agissant des sanctions prévues, il me semble que le système de performance sera plus avantageux pour les régions les plus développées. Il faudra que les textes soient plus précis et je suis assez réservé sur le fond car il me semble difficile de sanctionner une région qui n'aurait pas utilisé l'ensemble de ses crédits.

PermalienPhoto de Pascale Gruny

La raison pour laquelle nous insistons sur les termes « trop paralysant » est que nous estimons qu'il y a trop de contrôle et que nous devons aller vers un travail axé d'abord sur la performance.

PermalienPhoto de Pierre Lequiller

Je proposerai que nous intégrions dans les propositions de conclusions les termes « trop lourde » plutôt que « trop paralysant » et je tiens à souligner que la France va gagner, grâce à cette réforme, car neuf régions vont rentrer dans le secteur intermédiaire. Il convient également de faire attention à ce que nos régions ultrapériphériques ne soient pas pénalisées et, enfin, je soulignerai que l'excès de contrôle vient souvent de nos propres administrations.

La Commission a adopté les conclusions suivantes :

« La Commission,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes relatives au Fonds européen de développement régional, au Fonds social européen, au Fonds de cohésion, au Fonds européen agricole pour le développement rural et au Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche relevant du cadre stratégique commun, portant dispositions régional, au Fonds social européen et au Fonds de cohésion, et abrogeant le règlement (CE) no 10832006 (COM [2011] 615 finalno E 6706),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux dispositions particulières applicables au Fonds européen de développement régional et à l'objectif « Investissement pour la croissance et l'emploi », et abrogeant le règlement (CE) no 10802006 (COM [2011] 614 finalno E 6691),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds social européen et abrogeant le règlement (CE) no 10812006 (COM [2011] 607 finalno E 6685),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds de cohésion et abrogeant le règlement (CE) no 10842006 du Conseil (COM [2011] 612 finalno E 6690),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au Fonds européen d'ajustement à la mondialisation pour la période 2014-2020 (COM [2011] 608 finalno E 6686),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions particulières relative à la contribution du Fonds européen de développement régional à l'objectif « Coopération territoriale européenne » (COM [2011] 611 finalno E 6689),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) no 10822006 du Parlement et du Conseil du 5 juillet 2006 relatif à un groupement européen de coopération territoriale (GECT) en ce qui concerne la clarification, la simplification et l'amélioration de la constitution et de la mise en oeuvre de groupements de ce type (COM [2011] 610 finalno E 6688),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant un programme de l'Union européenne pour le changement social et l'innovation sociale (COM [2011] 609 finalno E 6687),

Vu la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions (COM [2011] 611 final),

1. Rappelle que la politique de cohésion est un élément fondamental de la construction européenne ;

2. Souligne l'absolue nécessité d'associer étroitement les régions et leurs élus à la définition et à la mise en oeuvre, niveau national, de la politique de cohésion ;

3. Approuve la création de la nouvelle catégorie de régions en transition ;

4. Se félicite que les propositions de la Commission pour la politique de cohésion 2014-2020 prennent en compte l'ensemble des régions européennes quel que soit leur niveau de développement ;

5. Accueille très favorablement que près de 50 % des fonds soient affectés aux régions les moins développées ;

6. Soutient la volonté de la Commission de veiller à l'utilisation la plus efficace possible des fonds ;

7. Insiste pour que ne soient pas créées de nouvelles procédures de contrôle trop lourdes ;

8. Souhaite très vivement que la dotation additionnelle des régions ultrapériphériques (RUP) ne diminue pas, compte tenu de leur situation difficile. »

Sur proposition du Président Pierre Lequiller, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

l Textes « actés »

Aucune observation n'ayant été formulée, la Commission a approuvé les textes suivants :

Ø Commerce extérieur

- proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (CE) no 200897, (CE) no 77998 et (CE) no 150698 du Conseil dans le domaine des importations d'huile d'olive et d'autres produits agricoles originaires de Turquie en ce qui concerne les compétences déléguées et les compétences d'exécution à conférer à la Commission (E 7018) ;

- règlement délégué (UE) de la Commission du 9.1.2012 modifiant le règlement (UE) no 9732010 du Conseil portant suspension, à titre temporaire, des droits autonomes du tarif douanier commun à l'importation de certains produits industriels dans les régions autonomes des Açores et de Madère (E 7035).

Ø Politique régionale

- projet de décision du Conseil européen modifiant le statut à l'égard de l'Union européenne de Mayotte - consultation de la Commission (E 6873).

Ø Protection des consommateurs

- directive (UE) de la Commission modifiant la directive 988CE du Parlement européen et du Conseil aux fins de l'inscription de la méthylnonylcétone en tant que substance active à l'annexe I de ladite directive (E 7025) ;

- décision de la Commission concernant la non-inscription du naled pour les produits de type 18 à l'annexe I, I A ou I B de la directive 988CE du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits biocides (E 7026) ;

- directive (UE) de la Commission modifiant la directive 988CE du Parlement européen et du Conseil aux fins de l'inscription de l'acide chlorhydrique en tant que substance active à l'annexe I de ladite directive (E 7027) ;

- décision de la Commission concernant la non-inscription du dichlorvos pour le type de produits 18 à l'annexe I, I A ou I B de la directive 988CE du Parlement européen et du Conseil concernant la mise sur le marché des produits biocides (E 7028) ;

- directive (UE) de la Commission modifiant la directive 988CE du Parlement européen et du Conseil aux fins de l'inscription de l'extrait de margousier en tant que substance active à l'annexe I de la dite directive (E 7029).

Ø Questions fiscales

- proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement d'exécution (UE) no 2822011 en ce qui concerne les régimes particuliers applicables aux assujettis non établis qui fournissent des services de télécommunication, de radiodiffusion et de télévision ou des services électroniques à des personnes non assujetties (E 7019).

Ø Sécurité alimentaire

- règlement (UE) de la Commission modifiant l'annexe II du règlement (CE) no 13332008 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les conditions d'utilisation et les limites d'emploi du jaune de quinoléine (E 104), du Sunset Yellow FCFJaune orange S (E 110) et du ponceau 4R, rouge cochenille A (E 124) (E 6786).

Ø Transports

- décision de la Commission relative à la seconde série d'objectifs de sécurité communs pour le système ferroviaire (E 7011).

Sur proposition du Président Pierre Lequiller, la Commission a nommé rapporteurs d'information :

- M. Patrick Bloche, sur la proposition de résolution européenne no 4195 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel au sein de l'Union européenne, notamment dans le cadre de la réforme de la directive 9546CE ;

- M. Philippe Gosselin, sur la proposition de résolution européenne no 4227 sur la proposition de règlement relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;

- Mme Elisabeth Guigou, sur la proposition de résolution européenne no 4196 de M. Jean-Marc Ayrault, Mme Elisabeth Guigou, M. Christophe Caresche et les membres du groupe SRC, pour la relance européenne et le renforcement du contrôle démocratique.

La séance est levée à 18 h 20