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Commission des affaires économiques

Séance du 25 janvier 2012 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

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La commission a auditionné M. Xavier Niel, vice-président et directeur général délégué à la stratégie d'Iliad (Free).

PermalienPhoto de Serge Poignant

Nous commencerons logiquement l'audition de M. Xavier Niel, fondateur, actionnaire majoritaire et vice-président d'Iliad, société fondée en 1991 et devenue, avec Free, l'un des principaux groupes de télécommunications français, en évoquant la téléphonie mobile, puisque le lancement des offres de Free mobile occupe depuis quelques semaines le devant de l'actualité. Quand nous avions débattu, en 2009, de l'opportunité de délivrer une quatrième licence 3G, des réticences s'étaient élevées sur la rationalité de la construction d'un quatrième réseau physique et sur l'équité des conditions offertes à Free.

La compétitivité des offres proposées par Free mobile nourrira d'autres questions. Comment expliquer la différence entre ses prix et ceux des autres opérateurs ? Quel impact aura son entrée sur le marché mobile ?

Pour finir, nous aborderons non seulement la 4G, puisque, contrairement aux autres opérateurs mobiles, Free n'a pas obtenu en décembre de fréquences du dividende numérique, mais aussi la fibre optique, dont le déploiement donne lieu à des retards considérables.

PermalienXavier Niel, vice-président et directeur général délégué à la stratégie d'Iliad, Free

La création de Free reposait sur une idée simple. Nos foyers recevaient déjà des flux – électricité, eau, gaz – auxquels s'ajouterait bientôt internet, par lequel passeraient nos loisirs numériques et nos échanges avec le reste du monde. Après des débuts dans le minitel, nous avons ouvert fin 1993 le premier fournisseur d'accès à internet. C'est parce que nous considérions que ce flux deviendrait rapidement aussi nécessaire que les autres que nous avons créé Free. Si nous avons commencé dans le bas débit, notre but a toujours été d'amener ce nouveau flux de manière permanente dans l'ensemble des foyers.

Le problème, c'était de créer les usages. Nos équipes ont inventé la notion de box, qui a assuré le succès de l'internet en France. Cet équipement derrière une ligne à haut débit, permet de fournir la télévision, le téléphone et internet, ainsi que les jeux vidéo. Autant dire qu'il satisfait tous nos besoins numériques. On a découvert ensuite qu'à la différence des autres flux, internet pouvait être utilisé dans le cadre de la mobilité. C'est pourquoi, dès 2006, nous avons tout mis en oeuvre pour lancer en France un quatrième opérateur mobile. Nous y sommes parvenus en 2009 grâce à votre vote, dont je vous remercie.

Une fois en possession de la licence, nous avons considéré que le mobile devait, comme le fixe, reposer intégralement sur internet. Certes, aujourd'hui, la téléphonie mobile utilise un réseau téléphonique, sur lequel passent des SMS et la data, qui constitue une extension de l'histoire, mais nous pensons que toutes les télécommunications, même mobiles, doivent reposer sur un réseau internet véhiculant la voix, les minimessages et tout type de service.

Free a ceci d'original que son capital est détenu à 70 % par ses salariés, qui sont intéressés aux résultats, système dont je bénéficie évidemment. Ceux d'entre vous qui veulent supprimer les stock-options doivent tenir compte du fait que le partage de la richesse permet une grande valeur ajoutée pour les entreprises en création. Ce n'est pas le cas pour des établissements installés, dont les managers peuvent percevoir un intéressement de manière quasiment systématique sans grand risque.

Chez Free, le salaire le plus important s'élève à 300 000 euros, soit dix fois moins que chez nos concurrents. L'intéressement de la centaine de dirigeants d'Iliad repose sur les performances économiques de l'entreprise. C'est une entreprise différente, dans laquelle tout le monde est motivé, et heureux de travailler chez nous.

Une autre valeur de Free est l'innovation. Nous tentons sans cesse de nouvelles inventions pour assurer le succès de nos produits. En marketing comme dans le domaine technique, l'innovation est essentielle.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Je donne la parole aux quatre orateurs des groupes.

M. François Brottes m'a prié de l'excuser. Il est en effet retenu en Isère, où il assiste aux obsèques des militaires récemment tués en Afghanistan.

PermalienPhoto de Laure de La Raudière

Si l'offre de Free sur les mobiles fait l'affaire des consommateurs, son annonce, relayée par une campagne de communication réussie, a causé un choc à la filière numérique. La « révolution Free » consiste à offrir des prix inférieurs de 30 % à 80 % à ceux des autres opérateurs, et une entrée de gamme à deux euros. Ces tarifs intéressent particulièrement les plus démunis, puisque les télécommunications sont désormais une dépense contrainte : une famille de quatre personnes, qui se contentait, il y a dix ans, d'une seule ligne téléphonique, possède en outre, aujourd'hui, une ligne internet et quatre mobiles.

Cela dit, l'utilisation d'internet, en entraînant une consommation plus importante de bande passante, ne risque-t-elle pas de saturer les réseaux mobiles 3G ? Quelle utilisation faites-vous de vos infrastructures propres et du réseau Orange ? Entendez-vous couvrir tous les territoires ruraux ? Si le chiffre d'affaires des opérateurs mobiles se contracte, leur capacité d'investissement dans les réseaux ne va-t-elle pas diminuer ? Dans ce cas, comment gérer l'effet de ciseaux créé par l'augmentation du trafic et la baisse des investissements ?

Le lancement de l'offre a fait apparaître certains problèmes commerciaux. Êtes-vous désormais en mesure de les résoudre, notamment d'assurer la synchronisation de l'envoi de la carte SIM et de la portabilité du numéro ? Est-il exact que vous pourriez abandonner le déploiement de la fibre au profit du VDSL (Very high bit rate Digital Subscriber Line) ? Cette stratégie fondée sur le cuivre se limitera-t-elle aux zones moyennement denses ou s'étendra-t-elle aux zones très denses, que vous ambitionniez de couvrir par vos propres infrastructures ? Les conditions des opérateurs pour accéder au dégroupage ou à la fibre vous semblent-elles acceptables ?

Enfin, même si votre réseau est compatible avec la nouvelle norme d'adressage IPv6 (Internet Protocol version 6), vous utilisez encore un système de traduction d'IPv4 en IPv6. À quelle échéance offrirez-vous à vos abonnés une connexion IPv6 ? La pénurie annoncée des adresses IPv4 crée-t-elle un problème ? Le cas échéant, en quels termes se pose-t-il aux politiques que nous sommes ?

PermalienPhoto de Corinne Erhel

Quand nous débattions, en 2009, de l'attribution d'une quatrième licence, j'avais posé plusieurs questions sur la couverture mobile et les risques auxquels elle exposait la filière, ce qui avait suscité de vives réactions. Peut-être mon intervention était-elle provocatrice…

Le lancement de Free mobile fait date, au sens où il bouleverse, au moins à court terme, le marché du mobile. Vos concurrents ont rapidement réagi à son annonce en modifiant leurs tarifs avec ou sans engagement. Même si votre offre est limitée aux trois premiers millions d'abonnés, ce qui crée un doute sur son évolution, elle est non seulement attrayante, mais simple et lisible. Elle intègre la notion d'abondance, qui est un critère important. En outre, vous avez suscité l'attente et réussi votre campagne de communication.

À ce jour, combien de personnes se sont abonnées ? Que répondez-vous aux critiques relayées par la presse sur les problèmes qui découlent de l'activation du réseau et sur la difficulté que rencontre le groupement d'intérêt économique (GIE) pour gérer la portabilité, à cause de l'afflux des demandes ?

Sur une chaîne spécialisée, je vous ai entendu expliquer que le coût de gestion d'une boutique est modeste pour un opérateur, et que vous envisagiez d'en ouvrir un grand nombre. Est-ce pour répondre à un besoin ou afin de toucher une population peu technophile ?

Quelles marges réalisez-vous quand vous abaissez vos tarifs ? Est-il exact que vous vous ménagez une marge de 50 % même sur l'offre à deux euros ? Que répondez-vous quand on vous accuse de détruire de la valeur, puisque la baisse des prix se traduit in fine par une réduction des investissements dans la fibre optique ? Comment vous distinguez-vous en matière de recherche et développement ? Si les tarifs que vous proposez sont imputables à la légèreté de votre structure, quelle évolution prévoyez-vous en matière d'emploi ? Que pensez-vous du débat sur le filtrage ? Comment réagissez-vous à l'apparition en France de nombreuses procédures impliquant les FAI dans la mise en oeuvre des mesures de blocage ?

PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Le 5 février 2009, je vous avais donné rendez-vous, monsieur Niel, doutant que vous parviendriez à étendre votre réseau. Comme d'autres, je doutais des possibilités de développement économique et commercial de Free, dont je salue à présent la performance. Luc Chatel a tenu bon, pour faire intervenir un quatrième opérateur. Sa vision était la bonne, puisqu'elle a permis d'augmenter le pouvoir d'achat des ménages.

Aujourd'hui, où en est le développement du réseau ? Je ne pense pas que vous pourrez développer le réseau physique d'antennes dont vous avez besoin pour répondre aux obligations du cahier des charges de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP). Quelle proportion avez-vous développé en propre ? Quelles possibilités a ouvertes l'accord avec Orange ? Certains articles prétendent qu'à Paris, sur six sites ayant été déclarés ouverts, quatre ne fonctionnent pas. Au-delà des six ans pendant lesquels vous bénéficiez de l'obligation faite aux autres opérateurs de porter les messages, votre stratégie est-elle de créer un quatrième réseau physique ou d'être le premier opérateur de réseau mobile virtuel (Mobile Virtual Network Operator, MVNO) ?

Vous avez répété qu'il n'y aurait à terme que deux opérateurs légitimes : France Télécom-Orange, auquel vous êtes lié, et Free. Pour le libéral que je suis, cette vision oligopolistique n'est pas rassurante. Dans cette perspective, que devient le marché ?

Mes dernières questions rejoignent celles de Mme Laure de La Raudière. Quel débit réel proposez-vous au client ? Si vous innovez en matière technologique et commerciale, quelle qualité de service fournissez-vous ? Je regrette que votre offre ne soit pas précisée dans les conditions générales de vente. Comptez-vous développer un réseau de magasins ? Selon quel modèle et dans des villes de quelle taille ? Concrètement, y en aura-t-il un sur le boulevard de la République à Agen ? (Sourires.)

PermalienPhoto de Daniel Paul

Depuis 2009, nous n'avons cessé de demander qu'on évalue précisément les conséquences de l'ouverture à la concurrence, tant pour la téléphonie que pour l'énergie, le transport ferroviaire et la poste. Intéressons-nous à la vaste dérégulation des services publics, à l'heure où Free mobile s'appuie sur un accord avec l'ancien opérateur public pour proposer des offres alléchantes. Nous nous étions opposés aux conditions avantageuses dans lesquelles l'État a concédé à Free sa licence d'exploitation. En acceptant un montant inférieur à 250 millions d'euros, il a bradé son patrimoine immatériel.

Free verse à l'opérateur historique une somme proportionnelle à l'intensité du trafic, représentant environ 1 milliard sur six ans. Mais, selon un article paru le 23 janvier dans Les Échos, bon nombre de ses antennes sont hors service. La plupart ne fonctionnent plus depuis la fin de la semaine dernière, alors même que le réseau est censé couvrir le quart de la population. Autant dire que vous utilisez essentiellement les infrastructures d'Orange, avec qui vous avez signé en mars un contrat d'itinérance. Comment expliquez-vous de tels dysfonctionnements ? Quand Free a reçu sa licence, ses représentants ont assuré que leur objectif était d'assurer la couverture nationale, sans exclure les zones de faible densité. À les entendre, l'arrivée d'un quatrième opérateur augmenterait les investissements destinés à réduire les zones blanches. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Le lancement de l'offre commerciale a suscité un afflux de demandes que Free avait manifestement sous-estimé. De ce fait, des milliers de consommateurs, qui avaient résilié leur abonnement chez les opérateurs historiques, se retrouvent sans ligne téléphonique, faute d'avoir reçu leur carte SIM. Ils ne peuvent joindre aucun service commercial et ne reçoivent ni mail ni courrier de réponse à leur demande. Pourquoi ce silence ? Quand la situation reviendra-t-elle normale ? Quand les offres seront-elles accessibles sans délais abusifs ?

Depuis des années, le secteur des télécommunications ne vit qu'au prix de restructurations. L'arrivée de Free créera-t-elle des emplois, grâce à l'ouverture de centres d'appels ou au déploiement et à l'entretien du réseau 3G, ou en détruira-t-elle, sous l'effet d'une politique de réduction des coûts et d'externalisation ? Si vous créez des centres d'appels pour répondre à l'afflux des demandes, allez-vous les sous-traiter et seront-ils implantés en France ?

PermalienXavier Niel, vice-président et directeur général délégué à la stratégie d'Iliad, Free

Commençons par l'emploi, puisque le sujet vous est cher. Il y a quelques jours, dans Les Échos, le président de l'ARCEP a rappelé qu'entre 2000 et 2009, le nombre d'emplois dans les télécommunications s'était réduit de 160 000 à 130 000. Depuis qu'on nous a attribué la quatrième licence, il a cessé de diminuer, parce que la concurrence pousse chaque acteur à améliorer le service.

Nous employons plus de 5 000 salariés dont 4 000 en France, et nous avons créé deux centres d'appels supplémentaires en région parisienne, l'un à Colombes, l'autre à Vitry, qui sont internalisés. Free possède le dernier centre d'appels parisien, qui réunit plus de 1 000 salariés dans le huitième arrondissement. Nous disposons en propre de centres d'appels à Marseille et à Bordeaux. Dans chacun d'eux travaillent plus de 500 salariés. Pour le mobile, Free a créé plus de 1 000 emplois, sans parler des emplois indirects, puisque, comme tous les opérateurs du marché, nous sous-traitons la pose des antennes à des entreprises de BTP.

Iliad compte plus de 5 000 salariés pour un chiffre d'affaires de 2,2 milliards, quand Bouygues Télécom en compte 9 200 pour un chiffre d'affaires de 5,6 milliards. En d'autres termes, un salarié produit 431 000 euros de chiffres d'affaires chez Iliad, contre 612 000 chez Bouygues Télécom. Si cette société avait proportionnellement autant de salariés que la nôtre, elle emploierait 4 000 personnes de plus.

On prétend souvent que Free est une entreprise low cost. Non, nous sommes seulement une entreprise raisonnable, qui propose des offres basses, parce que les télécommunications sont une dépense contrainte. Mon salaire et celui de Maxime Lombardini, directeur général d'Iliad, sont vingt à trente fois inférieurs à celui de nos homologues ailleurs. Nous essayons de prendre en compte la juste valeur des choses. Dans une entreprise qui marche, la variation des salaires ne peut pas être d'un à cinquante, voire d'un à cent ou deux cents. Il faut penser différemment pour être un opérateur différent. L'arrivée de Free sera positive en termes d'emploi, car elle obligera les acteurs à embaucher. Il y a deux ans, Martin Bouygues avait prétendu que l'emploi chuterait dans le secteur. Or, dans sa société, le nombre de salariés a progressé.

J'en viens au problème du réseau et des antennes. L'ARCEP, dont l'indépendance ne peut être remise en cause, a constaté début décembre que le réseau que nous avons déployé couvre plus de 27 % de la population. Nous continuons à poser des antennes, car un opérateur de télécommunication doit détenir son réseau. Dans l'ADSL, quand la compétition s'est tendue, la plupart des opérateurs sans réseau ont disparu. Ceux qui subsistent se partagent aujourd'hui moins de 1 % du marché. Détenir un réseau évite l'accumulation des couches inutiles dans le fonctionnement de votre entreprise. À long terme, le seul moyen de nous développer et de nous différencier sera de déployer le nôtre.

Parallèlement, nous avons conclu avec France Télécom un accord commercial de type full MVNO, comme en signe, par exemple, Virgin Mobile. Il nous permet de couvrir quasiment l'ensemble de la population, en ajoutant la couverture d'Orange à celle qui nous est propre. Mais, si louer le réseau d'Orange ouvre des possibilités fantastiques, il ne s'agit pas pour moi d'un modèle viable, mon but étant, je le répète, de déployer notre propre réseau.

Monsieur Dionis du Séjour, je vous remercie d'avoir reconnu notre succès, auquel vous ne croyiez pas, il y a un an. Cela dit, nous nous heurtons à certains obstacles. Dans Paris intra muros, nous avons très peu d'antennes, car les procédures sont extrêmement longues. Serions-nous paranoïaques ? Nous pensons parfois que nos concurrents, qui bénéficient du statu quo, ont mis au point une stratégie pour que la ville ne nous délivre plus d'autorisation. Ne disposant dans la capitale que d'une couverture exécrable, nous faisons principalement appel à l'accord de roaming. En revanche, nous nous sommes développés dans des villes moyennes, notamment en signant un accord avec TDF et avec de grands bailleurs. Si certaines contestations se sont élevées, nous avons gagné tous les procès au tribunal administratif. Il peut toujours y avoir un revirement de la jurisprudence, mais nous continuerons à développer le réseau, avec la volonté de couvrir le plus tôt possible plus de 90 % de la population, parce que c'est ainsi que nous gagnerons de l'argent. Nous n'avons pas procédé différemment pour l'ADSL. Au début, nous avons dégroupé notre réseau en utilisant celui de France Télécom, et nous continuons à nous déployer. Ce sera plus facile pour le mobile, les poches étant plus faciles à résorber. Nous espérons anticiper notre engagement de couvrir 90 % de la population en 2018. Nous disposons déjà de 1 000 antennes actives, et nous avons commandé plus de 5 000 antennes, ce qui nous permettra de franchir un pallier important, en termes de couverture.

M. Paul, qui a cité un article des Échos, me permettra de m'abriter derrière un autre journal, qui a toujours soutenu Free. Le Canard enchaîné de ce jour écrit que « tous les moyens sont bons pour discréditer le petit nouveau. » Entre autres inventions, certains prétendent que Free n'a pas d'antenne, en produisant la photo d'une free-box. Cependant, ils n'allèguent aucun fait. Peut-être ont-ils du mal à justifier la rente de situation dont ils ont longtemps bénéficié… Loin de moi l'idée de m'acharner sur Bouygues Télécom, mais le prix de son forfait illimité était de plus de 178 euros par mois en mai 2009. Le forfait B&You illimité était à 39 euros en 2011. Les offres se situent aujourd'hui autour de 20 euros. Ne pensez-vous pas qu'on a longtemps pris les clients pour des vaches à lait ?

On leur a aussi fait croire que la France était l'un des pays les plus compétitifs, en termes de télécommunication. Toutes les études ont montré le contraire. En mars 2009, un document émanant de la Commission européenne constate que la France est le pays le plus cher d'Europe après l'Espagne. D'après une étude de l'UIT de septembre 2011, notre pays s'établit à la vingt-neuvième place pour le panier alloué aux nouvelles technologies, par rapport au revenu moyen par habitant. Ce mauvais classement s'explique par le prix élevé de la téléphonie mobile. En 2011, une étude de la Commission européenne pointe le retard français pour l'utilisation des clés 3G data. En juillet 2009, Viviane Reding reconnaît le manque de dynamisme du marché français des mobiles. Je pourrais encore citer les rapports trimestriels de l'ARCEP. En France, la téléphonie mobile est chère, et les prix n'ont pas baissé pour 90 % des abonnés.

Pour un prix d'abonnement moyen d'un peu plus de trente euros, Iliad verse chaque mois à ses actionnaires un dividende de trente à quarante centimes. Si France Télécom réduisait le dividende qu'il verse aux siens, en ne versant pas les dividendes correspondant à son activité de téléphonie mobile, ses prix baisseraient de 50 % à 60 %. Ces entreprises sont devenues des entreprises de rendement, alors que, dans un métier contraint, il faut arbitrer un partage de valeur entre les salariés, les consommateurs et les actionnaires. Nous incitons les autres opérateurs à le faire, tout en remettant en question leurs charges et leurs coûts.

PermalienPhoto de Serge Poignant

Nous recevrons la semaine prochaine les représentants de l'opérateur historique.

PermalienXavier Niel, vice-président et directeur général délégué à la stratégie d'Iliad, Free

Vous me disiez que j'avais estimé qu'il existe deux opérateurs légitimes : Free et France Télécom, qui apporte une réassurance, et dont les prix, supérieurs à ceux des autres acteurs, sont sentis comme légitimes. Les Français trouvent de l'innovation et des prix bas chez Free, et une réassurance chez France Télécom. Quant aux autres opérateurs du marché, je prétends qu'ils doivent non pas disparaître mais se réinventer, le modèle consistant à singer l'opérateur historique n'étant pas valide. Le nôtre est simple : il est basé sur la data.

Si M. Paul considère que nous avons bénéficié d'un prix de vente favorable, ce n'est pas l'avis des tribunaux, tant français qu'européens. Grâce à la vente du spectre 3G, l'État a perçu plus de 825 millions d'euros, alors qu'il n'aurait reçu que 619 millions si l'ensemble de la licence nous avait été attribué. Il a donc d'ores et déjà gagné 200 millions en créant un quatrième acteur.

Nous considérons que la data est essentielle et qu'elle répond à un véritable besoin. Nous disposons d'un spectre spécifique 3G en 900 MHz, qui permettra de couvrir facilement les zones peu denses en population. Nous avons été les premiers à l'utiliser. Parallèlement, parce que nous pensons que la consommation des données va exploser, nous avons obtenu du spectre 4G, essentiel pour apporter plus de débit. Il y aura sans doute deux divisions, la première concernant les acteurs qui disposent du spectre contigu le plus important. Orange et nous-mêmes en avons obtenu 20 MHz, quand les autres acteurs n'en possèdent pas plus de 15 MHz. Ce spectre est celui qui nous intéresse le plus : nous voulons les fréquences les plus larges, puisque les Français veulent avant tout du débit.

Si nous n'affichons pas de chiffres dans ce domaine, monsieur Dionis du Séjour, c'est parce que ceux-ci dépendent de plusieurs facteurs. Il est facile d'annoncer un débit mirifique : un réseau a été testé, qui offre jusqu'à 42 mégabits, mais presque personne n'y accédera, parce que, pour l'utiliser, il faut avoir un terminal approprié, être seul sur sa cellule, ce qui est exceptionnel, et uniquement sur notre réseau et non en itinérance sur celui d'un autre acteur. Consultez les tests réalisés sur internet : nos abonnés constatent que nous proposons chaque fois le meilleur débit. Nous offrons de la 3G, de la 3G + sur notre réseau, et nous mettons tout en oeuvre pour maximiser le débit. À la différence des autres opérateurs, Free a besoin du bouche à oreille, ce qui veut dire qu'il n'a aucun intérêt à ce que ses abonnés soient mécontents.

Je conviens que, les premiers jours, notre succès a dépassé nos prévisions. Nous avons reçu trois à quatre millions de demandes d'information, quand nous en attendions quelques dizaines de milliers. Nous ne savons pas répondre à une telle demande ; cela explique qu'il n'ait pas été possible de s'abonner le premier jour. Le site a ouvert avec vingt-quatre heures de retard.

Nous nous sommes aussi heurtés au problème de la portabilité. Les abonnés au téléphone portable souhaitant conserver le numéro de leur ancien opérateur doivent passer par un GIE. Or celui-ci regroupe l'ensemble des opérateurs, dont ceux auxquels nous prenons des abonnés. C'est pourquoi son fonctionnement nous inspire quelques doutes. Avant-hier soir, sur Europe 1, Stéphane Richard s'est félicité d'avoir déjà récupéré quelques dizaines d'abonnés. Dans ce contexte, il n'est pas difficile d'obtenir un tel résultat.

Certains abonnés – quelques centaines en tout – n'ont pas reçu leur carte SIM. Quand on adresse des centaines de milliers de courriers, il est inévitable que quelques-uns se perdent, et très compréhensible qu'on en entende beaucoup parler. C'est toujours le cas quand nous rencontrons des problèmes. Il faut croire que nos abonnés sont très bavards – ou que leur cas est monté en épingle. C'est de bonne guerre. L'essentiel est que nous ayons suscité un engouement.

Il y aura un avant et un après. Aucun opérateur ne déposera le bilan. L'emploi ne se réduira pas dans le secteur. Mais certains acteurs se poseront des questions. Des syndicats de salariés, qui doutent de l'ARCEP, lui demandent de contrôler l'étendue de notre couverture. Bouygues Télécom a envoyé des huissiers en Bretagne pour vérifier que nos antennes sont allumées. Au lieu d'engager ce type de dépenses, nos concurrents feraient mieux de reverser de l'argent à leurs abonnés. Ce serait tout de même plus productif ! Je répète que notre contrat avec Orange est commercial, et que nous l'enrichissons par ce biais. Un milliard d'euros représente une marge confortable pour l'opérateur dont nous utilisons le réseau en itinérance.

Nous avons quatre boutiques et projetons d'en créer une à Agen, peut-être sur le boulevard de la République. (Sourires.) Nous en ouvrirons aussi une très grande à Paris au cours du premier semestre. Nous projetons d'en ouvrir une centaine en tout.

Grâce à leur rapport annuel, nous savons combien les acteurs ont consacré en 2010 à la fibre optique. France Télécom y a investi 80 millions, SFR 120 et Free 216. La même année, à France Télécom, l'investissement représente 13 % du chiffre d'affaires, chez Vivendi 12 % et chez Bouygues 6 %, contre 37 % chez nous. La totalité de notre cash est réinvestie, car les réseaux sont notre priorité, c'est notre « truc », tant pour le mobile que pour la fibre optique ou l'ADSL. C'est parce que nous sommes propriétaires de notre réseau que nous existons encore, et que nous pouvons capter la totalité de la chaîne de valeurs. Pour moi, un opérateur est quelqu'un qui investit pour posséder un réseau. Même si la demande du public n'est pas très forte, nous continuerons à développer la fibre optique. Par ailleurs, nous avons signé des accords de codéploiement avec Orange, et nous solliciterons toutes les bonnes volontés.

Nous croyons aussi à la montée en débit. Pour les consommateurs habitant trop loin d'un site technique pour bénéficier d'un dégroupage, il faut créer de plus petits répartiteurs. C'est ainsi qu'on apportera du réseau aux zones peu denses. Tous les Français veulent accéder à internet avec un bon débit, et s'ils ne sont pas favorables à la fibre optique c'est sans doute parce qu'on a collectivement déployé dans notre pays de l'ADSL de bonne qualité. En effet, c'est en France qu'on trouve le haut débit le moins cher et le plus complet du monde.

Nous sommes demandeurs car nous savons que nous gagnerons quand nous pourrons déployer du réseau sur ces zones. En matière de dégroupage, nous n'avons jamais cessé d'augmenter la cadence. In fine, nous souhaitons dégrouper la totalité des répartiteurs français en ADSL, et le remplacer progressivement sur tout le territoire par de la fibre optique. Pour l'heure, sous l'égide de l'ARCEP, les opérateurs se sont mis d'accord pour aller plus loin dans le dégroupage, afin de garantir à tous les Français un minimum de quatre à huit mégabits.

PermalienPhoto de Lionel Tardy

Allez-vous relever le montant de vos forfaits quand vous ne bénéficierez plus d'une terminaison d'appel préférentielle ? Vous avez annoncé le SMS à un centime, soit le montant de la terminaison SMS régulée par l'ARCEP pour les trois opérateurs mobiles préexistants. Quel est le montant de la terminaison d'appel SMS que vous demandez à l'ARCEP ? Est-il cohérent avec le tarif que vous annoncez ? Le réseau Free est-il totalement ouvert ? Quel pourcentage du trafic voix et du trafic data de vos clients transportez-vous sur votre propre réseau ?

Vous avez critiqué l'offre sociale du Gouvernement, mais votre offre à deux euros pour les plus démunis soulève plusieurs questions. Est-il exact que le suivi de consommation ne fonctionne pas, et que vous demandiez une garantie de 200 euros, soit cent mois d'abonnement, aux clients qui refusent le prélèvement automatique ? Est-il vrai que, pour acheter un mobile sur vingt-quatre ou trente-six mois, les clients doivent faire agréer un dossier de financement par les établissements de crédits à la consommation avec lesquels vous travaillez, ce qui exclut les allocataires du RSA ? Avez-vous mis en place un système d'alerte et de blocage des consommations, particulièrement utile pour éviter les bill shocks et obligatoire pour bénéficier du label « tarif social » ? Comment faites-vous pour offrir à vos clients trois gigas de fair use, alors que l'opérateur dont vous utilisez le réseau n'en propose qu'un à ses clients ?

Dans Paris, les MMS ne fonctionnent pas sur internet, ce qui oblige les clients à basculer en wifi. Comment ferez-vous cesser ce manquement à la promesse contractuelle des forfaits ?

Enfin, en proposant des forfaits sans engagements mais des mobiles payables à crédits, très coûteux pour les consommateurs, ne contournez-vous pas la loi Chatel, qui permet au consommateur de se libérer d'un engagement de téléphonie mobile au bout d'un an ?

PermalienPhoto de Jean Gaubert

Merci d'avoir rappelé que parler de débit initial n'a pas grand sens, puisque le débit dépend du nombre d'utilisateurs. De même, dans le circuit d'eau d'un immeuble, la pression tombe nécessairement si tout le monde prend sa douche au même moment.

Pensez-vous développer la fibre au-delà des zones rentables, que tous les opérateurs s'empresseront de couvrir ? Étant le seul utilisateur de mon terminal dans une zone rurale, je pourrais encore me passer de fibre pendant de longues années, mais, non loin de chez moi, des entreprises situées dans un territoire où il ne sera jamais rentable de la déployer en ont réellement besoin. Dans ce cas, qui doit payer : les opérateurs ou les collectivités ? Si celles-ci doivent, pour ce faire, recourir à l'impôt, ce sera une nouveauté car tous les réseaux ont été développés grâce à l'autofinancement. En milieu rural, les réseaux électriques sont financés par une taxe sur la rentabilité des réseaux urbains. Une telle solution est-elle envisageable pour la fibre optique ?

PermalienPhoto de Alain Suguenot

Historiquement, France Télécom a connu d'autres difficultés que vous. Il lui a fallu équiper le territoire. En outre, le statut de ses salariés n'est pas sans incidences sur les coûts de production. Free a fait le buzz, mais aussi le bug, peut-être à cause des réticences de certains opérateurs. Mais, même si Stéphane Richard a parlé de win back, en voyant certains clients, dont la demande n'a pas abouti chez Free, revenir chez l'opérateur historique, je pense que l'avenir est devant vous.

Dès lors, vous ne pouvez pas vous désintéresser de la fibre, puisqu'il n'existe pas d'autres moyens de couvrir certaines zones rurales profondes où sont implantées des entreprises de haute performance. Où avez-vous investi ? À Beaune, certaines entreprises ont besoin du très haut débit et de la fibre. Si l'on veut les impliquer, il faut leur fournir de vraies réponses. Où implantez-vous votre réseau ? Avez-vous l'intention de travailler avec la 4G, grâce à une licence de SFR ? Enfin, quel sentiment vous inspire l'enterrement de première classe, par le Congrès américain, du Protect IP Act (PIPA) et du Stop Online Piracy Act (SOPA) ?

PermalienPhoto de Frédérique Massat

Le Gouvernement a fixé un cahier des charges aux opérateurs de téléphonie : le forfait social propose, pour dix euros par mois, quarante minutes d'appel et quarante SMS. Le vôtre offre, pour deux euros, soixante minutes d'appel et soixante SMS. Qu'en conclure, sinon que vous tuez le forfait social du Gouvernement tout en réalisant une marge de 50 %, et que, de leur côté, les opérateurs qui proposent le forfait à dix euros perçoivent un bénéfice considérable ?

Vous avez rappelé votre objectif de couvrir 90 % de la population en 2018. Peut-on connaître plus précisément votre calendrier ? Quelles sont les grandes lignes de l'accord d'itinérance que vous avez signé avec Orange ? Est-il exact que la hotline de Free ne fonctionne pas de manière optimale ? Disposez-vous de centres d'appels en France ou à l'étranger ? Enfin, qu'en est-il du système de crédit que vous proposez, dont UFC Que choisir, qui est pourtant l'un de vos fervents défenseurs, souligne l'opacité ?

PermalienPhoto de Francis Saint-Léger

UFC Que Choisir considère, comme l'a rappelé Mme Massat, que votre offre est loin d'être révolutionnaire, en raison de nombreux défauts qui peuvent rapidement faire monter la facture, comme l'envoi payant de la carte SIM, le renvoi d'appel payant, le versement d'un dépôt de garantie de 200 euros hors prélèvement automatique, des terminaux plus chers, sans compter des clauses floues ou abusives et des problèmes de service après-vente.

Quel est votre nombre d'abonnés ?

PermalienPhoto de Michel Lefait

Quel est le rôle de la fondation Free ?

Où en est le dégroupage en Corse et dans les DOM-TOM ? Envisagez-vous un développement à l'étranger ?

La hotline et son support technique restent perçus comme le point noir de Free, en dépit des améliorations constatées : comment comptez-vous résoudre les problèmes qui subsistent ?

PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Monsieur Niel, vous êtes le père Noël des consommateurs puisque vous obligez vos concurrents à baisser leurs tarifs, considérés désormais comme abusifs. Ne pensez-vous pas toutefois qu'ils pourraient, sous peu, améliorer la qualité de leurs services, voire multiplier les services innovants ? Quelle pourrait être alors votre réaction ?

Vous détenez 30 % de l'infrastructure réseaux et avez passé un marché d'itinérance avec Orange. Or depuis le lancement de votre offre, certains clients ont fait part de leur insatisfaction, s'agissant notamment du temps d'attente des nouvelles cartes SIM et de la portabilité des numéros : que répondez-vous ?

Par ailleurs, 50 % de la population n'a pas accès aux offres triple play : ces ménages paient donc des abonnements internet plus onéreux tout en bénéficiant de prestations inférieures. Quelle proposition Free peut-il avancer pour supprimer une telle iniquité ?

PermalienPhoto de Anne Grommerch

La vente des smartphones mobiles sur le site de Free a été retardée. Quelles en seront les conditions d'achat à crédit ?

L'accès à internet et les MMS ne sont pas inclus dans le forfait social. De plus, l'heure supplémentaire est facturée 3 euros. Votre option data à 1,99 euro est valable, quant à elle, pour un crédit de vingt méga-octets alors que les téléphones exigent aujourd'hui au moins 50 méga-octets, ce qui entraîne des dépassements. Enfin, le forfait n'est pas bloqué, ce qui ne laisse aucun droit à l'erreur. S'agit-il vraiment d'un forfait social, compte tenu de l'absence de barrière de sécurité ?

Par ailleurs, quel est le nombre de collaborateurs Free mobile dédiés au service client et quelle est leur proportion réelle dans les centres situés en France ?

PermalienPhoto de Jean-Michel Villaumé

Quelle sera votre stratégie à l'égard des opérateurs MVNO ? Envisagez-vous de vous rapprocher d'eux, voire de les accueillir sur votre réseau ?

On s'est interrogé sur le fait que vous ayez limité à 3 millions le nombre de forfaits Free Mobile mis sur le marché : à quelle vitesse ce nombre sera-t-il atteint et que se passera-t-il alors ? Qu'en est-il d'un éventuel duopole avec Orange ?

La non-attribution des fréquences 4 G ne vous interdit-elle pas de vous développer ?

S'agissant de la fibre optique, que pensez-vous des réseaux d'initiative publique ? Que préconisez-vous pour favoriser le nécessaire développement du très haut débit ?

PermalienPhoto de Alfred Trassy-Paillogues

J'ai toujours été partisan de votre arrivée sur le marché et je n'ai pas changé d'avis.

Pensez-vous avoir respecté votre plan d'affaires initial ?

En matière de recherche et développement, empruntez-vous des pistes originales par rapport aux autres opérateurs ?

Quelle peut être votre contribution à l'arrivée du très haut débit, notamment dans les zones d'activités ?

PermalienPhoto de Catherine Coutelle

La presse s'est fait l'écho, mi-janvier, de l'inquiétude de la population de Poitiers en raison de votre souhait d'installer des antennes relais sur les HLM, alors même que, d'une part, une enquête nationale a révélé que les cités HLM sont dix fois plus couvertes d'antennes que les zones pavillonnaires ou les quartiers plus aisés et que, d'autre part, l'Association santé environnement France – ASEF – a indiqué que ces antennes provoquent des troubles chez les habitants, qui ne les ressentent plus lorsqu'ils s'éloignent de leur quartier. N'est-il pas possible d'utiliser les antennes déjà existantes d'autres opérateurs ? Des accords sont-ils signés à cette fin ?

Par ailleurs, vous avez affirmé que le réseau était votre « truc » et que vous vouliez l'étendre. La région Poitou-Charentes a en construction une ligne LGV Tours-Poitiers-Bordeaux – une autre sera peut-être construite entre Poitiers et Limoges. Or de la fibre optique passe par ces lignes. Les opérateurs pourraient-ils l'utiliser pour apporter l'ADSL à des zones traversées par la ligne et qui ne sont pas prioritaires, faute d'être situées dans les centres ville ou de faire partie du plan numérique car étant trop isolées ? Il faut savoir que dans le voisinage immédiat de grandes villes, l'ADSL haut débit n'est pas toujours accessible. Pourriez-vous passer un accord avec RFF ou assumer vous-même ce réseau ?

PermalienPhoto de René-Paul Victoria

Monsieur Niel, vous avez déclaré avoir une grande ambition. Quelle est-elle pour les territoires ultramarins ? Avez-vous des projets notamment pour la Réunion, avec ou sans partenariat avec les opérateurs présents – je pense en particulier à Orange avec lequel vous entretenez des liens sur le plan national ?

PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Vous avez déclaré réinvestir 37 % de votre chiffre d'affaires : vos tarifs cassés vous permettront-ils de poursuivre vos investissements dans les réseaux de téléphonie mobile ?

Le tarif social à deux euros par mois sera-t-il conservé ad vitam aeternam ?

PermalienPhoto de Marie-Lou Marcel

Il semble que le diable se cache dans les détails de votre offre présentée comme révolutionnaire. Je pense aux frais annexes : l'envoi de la carte SIM ou des mobiles coûte 10 euros. Les appels depuis l'étranger sont plus chers et les appels vers certaines destinations sont réservés à des numéros de lignes fixes. Quant au prix des téléphones, il est également plus élevé.

En outre, des reproches vous ont été adressés sur la qualité du service après-vente ou pour le retard dans les livraisons.

Par ailleurs, aucune facturation papier n'est prévue, ce qui est contraire à la législation relative aux factures téléphoniques. Quant au paiement, le prélèvement automatique est rendu quasiment obligatoire puisque l'abonné qui souhaite payer par carte bancaire ou par chèque devra effectuer un dépôt de 200 euros.

Enfin, vous vous présentez comme un acteur de téléphonie agissant en faveur des plus modestes, tout en excluant les personnes surendettées. Celles qui ont des dettes à l'égard d'un autre opérateur étant fichées chez Préventel, il ne leur reste comme solution que d'acheter des cartes prépayées dont le coût est infiniment plus élevé que celui des abonnements. Ils bénéficient donc de prestations téléphoniques inférieures qu'ils paient plus cher, ce qui est une double absurdité. Que pensez-vous du fichage Préventel ?

Question annexe : quand déploierez-vous une antenne et ouvrirez-vous une boutique Free dans le département de l'Aveyron ?

PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Votre offre est innovante et votre communication performante. En revanche, je vous trouve nettement moins innovant et performant en matière de réseau – vous bénéficiez du réseau d'opérateurs qui étaient là avant vous – et, surtout, en matière d'antennes, pour le déploiement desquelles vous employez les mêmes mauvaises méthodes que vos concurrents, à savoir l'installation sans concertation. Vous déclarez agir en faveur des plus modestes : or ce sont aussi les plus modestes qui subissent les nuisances. On attendrait d'un nouvel opérateur tel que vous une démarche plus originale. Il ne s'agit pas d'être anxiogène, mais ne conviendrait-il pas de faire de la recherche et développement sur le sujet ?

PermalienPhoto de Patrick Lebreton

Vous avez annoncé que les appels de la métropole à destination de l'outre-mer seraient au même tarif que les appels passés à l'intérieur de la métropole. C'est à nos yeux un élément fondamental de la continuité territoriale. Or, à ce combat permanent des parlementaires ultramarins, il a toujours été opposé une impossibilité technique et financière. Qu'est-ce qui vous permet d'atteindre désormais un tel niveau tarifaire ? Qu'est-ce qui interdit à la concurrence de le pratiquer ?

Outre-mer, le marché de la téléphonie et de la fourniture d'accès à internet est très peu concurrentiel – France Télécom a même été condamné à ce sujet en 2009 – : il en résulte des pratiques tarifaires défavorables aux ultramarins, notamment dans les communications vers la métropole puisque la moyenne des tarifs pratiqués est de 1,5 à 2 fois plus élevée outre-mer qu'en métropole et qu'il n'existe aucune offre comparable à votre tarif social, alors que celui-ci nous intéresserait. Pensez-vous présenter rapidement de telles offres outre-mer et à quelles conditions ? Avez-vous rencontré des barrières ?

PermalienPhoto de Jean-Louis Gagnaire

Je tiens à vous remercier, monsieur Niel, d'avoir spontanément révélé votre rémunération : cela fait partie du standard que la commission des affaires économiques devrait exiger dans une société démocratique avancée. La question de la rémunération des dirigeants est essentielle en matière de compétitivité des entreprises. Est-il normal qu'un PDG ait une rémunération huit fois supérieure à celle d'un de ses concurrents étrangers ? Cela étant, je suis évidemment conscient que cette révélation participe du marketing de votre entreprise, car elle améliore l'image de Free.

Deux organisations syndicales présentes chez vos trois concurrents ont saisi hier l'ARCEP : comment réagissent les représentants, chez Free, de ces mêmes organisations ? Se coordonnent-elles ? Ce n'est pas la première fois que des syndicats interviennent dans le débat sur les extensions de réseaux et les délégations de service public. Les manifestations de salariés sont évidemment toujours spontanées...

Je tiens également à évoquer le blocage-filtrage et la fermeture du site Megaupload : nous ne souhaitons pas que les opérateurs deviennent les policiers de l'internet. Comment rémunérer cependant la création artistique, musicale, à l'ère du numérique ? Avez-vous une position innovante en la matière ? Êtes-vous favorable à une contribution pour le développement légal des échanges de musique et de films sur internet ?

PermalienXavier Niel, vice-président et directeur général délégué à la stratégie d'Iliad, Free

Le fait de divulguer les salaires est un marketing original, puisque nous le payons à titre personnel, ce qui est assez rare dans les entreprises ! Nous avons d'autres types d'intéressement qui sont liés directement aux performances et qui ne sont pas contestables. Tel est notre mode de fonctionnement, qui est habituel dans les entreprises américaines de nouvelles technologies. Je rappelle que mon salaire s'élève à 173 000 euros bruts annuels. Il est désormais public et doit être comparé aux 313 millions d'euros de profit réalisés l'année dernière.

Les syndicats présents chez Free ne font pas le même constat que leurs homologues des autres opérateurs. Peut-être sont-ils mieux informés et qu'ils ont confiance en l'ARCEP. Je n'ai toutefois pas à parler à leur place : ils sont indépendants de la direction.

S'agissant du blocage et du filtrage, nous sommes gênés par certaines lois dont l'objet affiché est de lutter contre la pédophilie ou d'autres fléaux, mais qui comportent des risques, notamment celui de couper des sites sans passer devant le juge, c'est-à-dire sans recours au contradictoire. Or nous sommes très attachés au contradictoire. En cas de blocage-filtrage, l'intervention du juge est nécessaire. Certes, il y avait des contenus pirates sur Megaupload, mais également des contenus légaux et le blocage du site ne peut être sans conséquences pour ces derniers. Tel est le problème que nous avons rencontré avec HADOPI : il est légitime de lutter contre le piratage – je suis moi-même propriétaire de droits intellectuels mondiaux –, mais le juge doit intervenir à une étape du processus. La coupure de l'accès à internet est aujourd'hui aussi grave que celle de l'accès à l'électricité. Il s'agit de l'encadrer de manière très stricte. Nous sommes pour la propriété intellectuelle, mais sa rémunération peut prendre différents formats.

Les fournisseurs d'accès à internet sont fortement mis à contribution pour financer la création – nous nous plaignons d'ailleurs chaque fois que vous nous imposez une nouvelle taxe, et elles sont nombreuses ! À notre sens, lorsque l'État souhaite subvenir à une activité, notamment dans le domaine de la création, il doit le faire sur le budget général du pays sans passer par l'artifice des taxes. En effet, leur complexité devient telle qu'elles finissent par être contournées, ce qui entraîne l'adoption d'une nouvelle taxe l'année suivante ! Je vous rappelle qu'Universal, grand groupe de création musicale, a battu des records en termes de profit, contrairement à la plupart des artistes, situés à l'autre bout de la chaîne – les plus nantis quittant souvent la France. Free aime bien les artistes : ils sont souvent abonnés chez nous et nous discutons avec eux. Pourquoi l'État ne taxerait-il pas également EDF, l'électricité étant indispensable au fonctionnement d'internet ?

Nous avons connu des difficultés pour relier par fibre optique le continent à la Corse et sécuriser notre réseau, au niveau de la Sardaigne. Nous déployons actuellement un réseau en dégroupage grâce à France Télécom qui a une convention à cette fin avec le département et la région. Notre couverture de l'île de Beauté sera importante dans les mois qui viennent.

S'agissant de l'outre-mer, SFR a été condamné hier pour son activité sur Mayotte, très petit territoire, à 2 millions d'euros d'amende. Cela prouve que certains acteurs abusent plus que de raison dans certaines zones.

Nous n'avons pas de licence mobile pour les départements d'outre-mer mais nous réclamons, depuis des années, pour l'internet fixe, une fibre accessible en termes de prix qui nous permettrait de déployer les mêmes services qu'en métropole. Pour des raisons locales, politiques et juridiques complexes, tel n'est pas encore le cas. Si nous pouvions, demain, disposer dans les DOM à un prix raisonnable d'une fibre qui amène le haut débit, il va de soi que nous les ferions bénéficier de la totalité de nos offres.

Nous pensons d'ailleurs à tel point que l'outre-mer, c'est la France, que nous avons décidé d'inclure depuis 2006 ou 2007 dans nos offres fixes-ADSL les appels de la métropole vers les DOM. S'agissant des mobiles, nous avons également décidé d'inclure les appels vers les DOM dans nos offres illimitées, tout simplement parce qu'un appel de Paris vers Fort-de-France ou Pointe-à-Pitre ne nous coûte pas plus cher que vers Marseille ou certaines destinations étrangères, que nous incluons également. Si les autres opérateurs vendent ces appels plus chers, c'est que les abonnés acceptent de payer. Nous voulons changer cette habitude, avec une double finalité, marketing et économique, en vue d'assurer la continuité territoriale.

S'agissant du déploiement des antennes relais, je rappelle que nous avons l'obligation de couvrir le plus vite possible la plus grande partie de la population. Je reconnais qu'en raison de l'urgence, nous n'avons pas fait preuve d'esprit d'innovation en la matière mais nous tenons nos engagements et je réfute toutes les accusations à ce sujet.

Si les antennes sont déployées principalement sur les immeubles HLM, c'est que les villes ont pris l'habitude d'y réserver des espaces aux opérateurs. S'il existe un risque antenne, il faut savoir que ceux qui habitent sous les antennes sont les moins exposés, puisque celles-ci agissent comme des parapluies. Il faut savoir aussi que la demande de débit est très forte dans les barres HLM dont la population est particulièrement dense.

Nous avons signé des accords avec l'ensemble des acteurs pour partager les points hauts et sommes demandeurs d'un accord sur le partage des antennes – certains concurrents, qui n'ont pas déployé les leurs, cherchent à freiner le déploiement des réseaux. Nous avons du reste déjà testé le partage des antennes, mais il exige la bonne foi et la bonne volonté de chacun. Un tel partage améliorera le déploiement du réseau.

Nous avons déjà, me semble-t-il, une antenne dans l'Aveyron. Nous sommes présents dans les villes moyennes où nous déployons notre réseau avec notre partenaire TDF.

S'agissant des terminaux, les opérateurs ont, jusqu'à aujourd'hui, fait du crédit déguisé en contradiction avec la loi sur le crédit à la consommation puisqu'ils offrent le téléphone à leurs abonnés en leur demandant de s'engager pour vingt-quatre mois. Nous demandons, dans le cadre de ce type d'offres, qui sont liantes, que soient appliquées les règles du crédit à la consommation afin de protéger le consommateur.

Nous proposons un autre type d'offre : un abonnement sans engagement, le consommateur achetant son terminal où il veut, comme il veut et en étalant son paiement, comme il le souhaite, sur douze, vingt-quatre ou trente-six mois. Nous ne vendons pas de terminaux à l'heure actuelle parce que nous n'avons pas encore comblé notre retard en matière de portabilité. Certes, d'un point de vue commercial, nous devrions tout faire pour avoir des abonnés supplémentaires, mais nous risquerions de ne pas pouvoir répondre à la demande. Tant que le GIE chargé de la portabilité ne fera pas preuve de bonne volonté pour solder le retard, nous ne vendrons pas de terminaux. J'en suis désolé pour nos abonnés, mais c'est un choix délibéré. Le jour où nous aurons des délais normaux de portabilité, c'est-à-dire moins de trois jours, nous mettrons en vente des terminaux. Le fait qu'ils achètent leurs terminaux ailleurs que chez nous ne nous pose aucun problème. Contrairement à d'autres opérateurs, nous ne dissimulons pas notre métier de vente de téléphonie derrière la vente de terminaux – la vente d'iPhone, par exemple, a permis de vendre des forfaits de vingt-quatre mois. Ces engagements trop longs sont contraignants pour le consommateur. La solution que nous avons adoptée est bonne.

S'agissant de prétendus frais cachés, nous pratiquons au contraire la transparence en reportant nos frais, notamment les frais d'envoi, sur l'abonné. N'oubliez pas qu'il s'agit d'offres sans engagement et qu'il suffit de s'inscrire sur internet pour ne pas avoir à verser dix euros pour l'envoi de la carte SIM. Nous facturons le coût réel de gestion.

Un forfait accessible ne doit pas aboutir à vendre la minute plus cher aux abonnés les moins aisés qu'aux plus aisés. À l'heure actuelle, l'abonné social paie, lorsqu'il dépasse son forfait, la minute quelque 35 centimes et le SMS dix centimes, c'est-à-dire plus cher que le prix du dépassement dans les autres forfaits – le SMS étant alors souvent offert. Cela nous a rendus mal à l'aise et nous avons réagi en proposant, pour les dépassements, des tarifs très peu élevés : 3 euros l'heure supplémentaire et 1 euro les 100 SMS supplémentaires. Du reste, personne ne tente de descendre à ce prix symbolique des deux euros, en raison de l'ARPU - average revenue per user -, le revenu moyen par utilisateur, car notre offre est tueuse d'ARPU.

La fonction data est bloquée par défaut : on peut l'activer au travers de sa console. Le suivi de consommation sera, quant à lui, installé d'ici à quelques jours – nous avons été débordés par les demandes.

Je ne vous donnerai pas le nombre des abonnés : il se chiffre en centaines de milliers.

Nous allons très vite améliorer encore ce forfait, pour répondre aux attentes des consommateurs, en matière de blocage notamment, même si nous sommes opposés par principe à priver un abonné de communication : nous allons trouver des idées originales.

Ce forfait n'est pas d'une rentabilité extraordinaire mais il améliore notre image commerciale et d'entreprise citoyenne. De plus ces abonnés sont susceptibles de souscrire demain à nos autres offres. Le forfait à deux euros est adapté à un enfant de huit à dix ans. Quand il sera plus grand, il aura besoin d'un smartphone ou de data : Free aura des forfaits à lui proposer, d'autant qu'il aura pris goût à notre marque. Notre offre repose donc sur un vrai marketing.

Le forfait ne propose les destinations internationales, à l'exception des États-Unis et du Canada, que pour les lignes fixes, parce que les prix de terminaison d'appels sont actuellement trop élevés pour être inclus en illimité : dès qu'ils baisseront, nous les inclurons. Il faut savoir que le nombre des appels internationaux passés en France à destination de lignes fixes est colossal.

La loi nous impose de conserver la facture sur un support durable, ce qu'est, à nos yeux, un e-mail ou l'accès à une console de gestion – nous ne sommes pas les seuls à procéder ainsi. Vous êtes le législateur : vous pouvez changer la loi. Nous n'avons pas un grand nombre de plaintes à ce sujet.

Nous n'avons jamais appliqué le dépôt de garantie. Il est du reste prévu non pour des abonnés ayant des problèmes financiers mais en cas de fraude. Il existe deux moyens de paiement direct : le prélèvement direct ou le prélèvement par carte bancaire.

Il est vrai qu'il y a un problème de bancarisation des personnes les moins aisées ou surendettées : il convient de répondre à leurs besoins par des offres prépayées agressives. Lorsque le flux d'abonnements aura baissé et que le problème de portabilité aura été réglé, nous nous attaquerons aux terminaux et travaillerons sur le prépayé, qui fait l'objet de nombreux abus.

Actuellement, nous n'interrogeons pas Préventel pour les forfaits à deux euros.

Nous avons limité l'offre Free Mobile à 3 millions d'abonnés pour nous réserver la possibilité de dresser un premier bilan sur nos hypothèses de consommation et nous donner, éventuellement, la faculté de changer nos offres pour les abonnés suivants – nous manquons encore de recul sur le forfait à 19,99 euros. Nous avons inventé l'ADSL à 29,99 euros, qui a bien fonctionné en France durant une dizaine d'années. Nous serions fiers d'inventer un forfait équivalent pour le mobile.

Nos tarifs nous permettent de poursuivre de réels investissements. Nous avons investi en 2011 plus de 37 % de notre chiffre d'affaires et nous continuerons de le faire les années suivantes. C'est notre raison d'être. Notre équipe a fondé Free non pas pour exercer une activité de rendement mais pour créer des activités de croissance, lesquelles exigent de réels investissements – de 30 % à 50 % du chiffre d'affaires. D'ailleurs, tous nos forfaits sont rentables. Nos centres d'appels sont situés en France et seuls des salariés de Free y travaillent – nous ne recourons à la sous-traitance que rarement, en cas de débordement. La sous-traitance à l'international, notamment au Maroc, ne concerne le support que pour contourner des difficultés tenant à la législation française sur le travail de nuit et le dimanche, les appels en surnombre et les réponses écrites au courrier reçu.

S'agissant des partenariats en Outre-Mer, les acteurs locaux ne souhaitent pas entretenir de partenariat avec une entreprise aussi remuante que Free.

Nous achetons déjà de la fibre optique à RFF et l'utilisons pour relier des noeuds de raccordement d'abonnés – NRA. Toutefois, ces lignes ne vont pas directement jusqu'aux sites de dégroupage. Nous avons dû redéployer du réseau mais RFF, je le répète, fait partie de nos fournisseurs depuis maintenant dix ans. Le vrai sujet demeure le déploiement capillaire local plutôt que les lignes longues distances.

Notre plan d'affaires initial repose sur le déploiement très rapide de notre propre réseau pour la simple raison que lorsque nous utilisons un autre acteur, nous lui abandonnons presque 100 % de la marge.

Notre recherche et développement visant à proposer de nouvelles offres à nos abonnés, nous ne faisons que peu de recherche fondamentale. Nos chercheurs utilisent nos produits et souhaitent innover dans le fixe comme dans le mobile. Il faut savoir que, s'agissant du mobile, l'innovation a souvent été prise par le concepteur du terminal.

Concernant la fibre optique et le très haut débit, nous déployons en propre et en concurrence avec les autres acteurs entre 4 et 5 millions de prises dans les zones denses. Dans le cadre d'un accord avec Orange et, peut-être avec SFR, nous déploierons 10 millions de prises en fibre optique supplémentaires. Nous aurons donc atteint 15 millions de foyer. Comment passer ensuite de 15 à 25 millions de foyers ? Nous devons nous poser la question. La fibre optique ne sera pas rentable sur tout le territoire, même si tous les acteurs s'entendent. C'est pourquoi il faudra conjuguer intelligence, concertation et bonne foi collective – l'entreprise Free vous ayant elle-même parfois abreuvé de notes pleines de mauvaise foi. Il faudra une génération pour couvrir la totalité du territoire national en fibre optique. Vos difficultés locales sont à prendre en considération mais le déploiement de la fibre optique n'a véritablement commencé qu'en 2006 en France. Six ans plus tard, Paris n'est toujours pas couvert à 100 %.

Nous respectons nos engagements en ouvrant notre réseau aux MVNO. Nous publierons sous peu une offre leur permettant d'y accéder.

Il n'y a aucun risque de voir surgir un duopole qui, d'ailleurs, ne serait pas sain en termes de concurrence. Compte tenu des profits que les autres acteurs dégagent, je ne suis pas inquiet pour eux.

Le déploiement de la fibre optique dans le cadre des partenariats public-privé ou des réseaux d'initiative publique se révèle souvent compliqué : lorsque ce sont nos concurrents qui profitent des attributions, la négociation est rendue difficile, et lorsque ce sont des sociétés indépendantes, la rédaction de l'appel d'offres ou l'engagement à long terme sur les tarifs ne correspondent pas à ce que nous étions en droit d'attendre. Peut-être devrions-nous travailler davantage la question. Nous n'avons aucune opposition de principe.

Les envois de MMS dans le cadre de nos forfaits ne connaissent de problèmes qu'avec Bouygues Télécom, qui a retardé notre interconnexion. Compte tenu de la bonne foi de cette entreprise et du professionnalisme de ses techniciens, je suis certain que ces problèmes seront réglés avant même la fin de mon audition…

Nous employons aujourd'hui plus de 1 000 salariés, en grande majorité sur le support technique, et continuons de recruter. Les syndicats se plaignent évidemment de la faiblesse des salaires, c'est de bonne guerre. Les salariés de Free sont fiers d'y travailler car ils ont l'impression de faire bouger les choses.

Je tiens à préciser que nous sommes le dernier acteur à avoir dans Paris et sa région des centres d'appels, qui emploient des milliers de salariés, provenant en grande partie des centres d'appels que les autres acteurs ont fermés. Ce sont autant d'emplois préservés. C'est le métier le plus dur – ce sont les OS d'aujourd'hui. Contrairement à ce qui se passe dans la grande distribution, ils travaillent en horaire continu. Encore une fois, nous faisons très peu appel à la sous-traitance.

Le temps d'attente sur les hotlines, qui est mesuré par l'ARCEP, a pu être très long ces jours derniers mais nous nous situons dans la bonne moyenne.

La fondation Free a été créée grâce à un financement de l'entreprise et à des financements, à titre personnel, de dirigeants de Free, en vue de faciliter l'accès au haut débit en France. Vous pouvez consulter son site internet.

L'UFC Que Choisir, que nous avons rencontrée hier, et qui nous a toujours soutenus, c'est vrai, pour la quatrième licence mobile, nous reproche des clauses floues, notamment celle qui se réfère à l'« usage en bon père de famille » de la ligne téléphonique. Or une telle restriction est encadrée par la jurisprudence et elle laisse une grande liberté aux juges. Nous continuons de discuter avec l'UFC pour trouver une solution.

L'accord d'itinérance avec Orange n'était pas le mieux-disant sur le plan financier – deux autres acteurs nous avaient fait des propositions – mais nous avons privilégié la qualité du réseau. C'est également l'entreprise dont nous nous sentons la plus proche – nous travaillons avec elle depuis vingt-cinq ans –, d'autant qu'Orange a su investir pour maintenir une bonne qualité de service. Nous entretenons en outre des rapports de confiance avec ses équipes.

Ce contrat commercial prévoit des variations en fonction de la consommation, et des avances de paiement significatives. Il s'est déclenché à partir du moment où nous avons assuré une couverture, contrôlée par l'ARCEP, supérieure à 27 %. Il fonctionne par tranches de débit, de minute et de SMS. Selon les déclarations d'Orange, il devait rapporter cette entreprise à l'origine 1 milliard d'euros et lui rapporterait désormais 1,5 milliard

Le forfait social engendre une marge indirecte en termes de marketing et une marge directe qui dépend de la consommation.

Contrairement à ce que prétendent nos concurrents, Free est l'acteur qui dispose de la plus grosse portion de spectre 4G en propre de manière contiguë : vingt mégahertz. C'est ce que nous souhaitions, car ce spectre de densification nous permettra d'apporter le plus de débit possible aux consommateurs. Nous avons déjà du spectre 3G pour assurer la couverture.

Vous avez raison, le débit est partagé entre les différents mobiles sur une même antenne, alors que, s'agissant du fixe, le réseau est dimensionné pour que chacun dispose d'un débit important. Nous avons toujours défendu la technologie point-à-point, que nous utilisons notamment pour effectuer nos co-déploiements en province. Aujourd'hui le point à point a gagné.

Notre réseau nous permet d'utiliser les technologies les plus avancées – quarante-deux mégabits en 3G, mais les terminaux sont malheureusement limités bien en deçà. Free accède au réseau Orange au même titre que les abonnés de celui-ci, ce qui nous permet de bénéficier de son débit.

C'est un groupe d'intérêt économique qui gère la portabilité des numéros. Le nombre de traitements est passé de 30 000 à 40 000 et il devrait atteindre les 80 000 d'ici à la fin de la semaine, ce qui nous permettrait de rattraper notre retard. Je rappelle que la portabilité est payée par les opérateurs. Le GIE sous-traite la prestation à Steria, qui semble de très bonne volonté pour développer les systèmes. Le retard se situe donc plutôt au niveau du GIE lui-même, ce qui a provoqué des résiliations d'abonnés qui étaient lassés d'attendre la portabilité. Free n'est donc pas visé en tant que tel par ces résiliations.

S'agissant des SMS, nous demandons aujourd'hui un prix de terminaison d'appel de 2,85 centimes d'euro pour les six premiers mois d'exploitation, puis de 2,35 centimes pour les six mois suivants, ce qui correspond à la réalité de nos coûts. Alors que durant quatorze ans Bouygues Télécom a bénéficié d'une terminaison d'appel asymétrique avec Orange et SFR, nous serons quant à nous moins aidés puisque notre asymétrie durera bien moins longtemps.

Des systèmes d'alerte existent sur le forfait à deux euros – il n'y en a pas besoin sur le forfait « illimité » à dix-neuf euros.

S'agissant de la formule 3 Giga, qui couvre tous les usages d'internet sur le mobile, elle est courante à l'étranger et ne surprend qu'en France, alors qu'internet sur le mobile correspond à un vrai besoin. C'est pourquoi nous avons décidé d'inclure les 3 Giga dans le forfait, ce qui permet d'ouvrir le mobile à tous les usages d'internet – le peer to peer compris si l'abonné n'est vraiment pas malin ! En effet, internet, ce sont des milliers d'applications innovantes ou originales, ce n'est pas simplement le web ou les mails.

Je ne répondrai pas plus à la question sur le pourcentage de trafic qui passe par notre réseau que sur le nombre d'abonnés. Nous réservons l'exclusivité de ces chiffres à l'ARCEP. Notre réseau fonctionne et laisse passer une part significative de notre trafic.

Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 25 janvier 2012 à 10 heures

Présents. - M. Jean-Paul Anciaux, M. Jean Auclair, M. Thierry Benoit, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Pierre Decool, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Claude Gatignol, M. Jean Gaubert, M. Bernard Gérard, M. François-Michel Gonnot, M. Jean-Pierre Grand, M. Jean Grellier, Mme Anne Grommerch, M. Louis Guédon, M. Gérard Hamel, Mme Conchita Lacuey, Mme Laure de La Raudière, M. Pierre Lasbordes, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Michel Lefait, M. Jean-Marc Lefranc, M. Jacques Le Guen, M. Michel Lejeune, Mme Annick Le Loch, M. Jean-Louis Léonard, Mme Jacqueline Maquet, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Kléber Mesquida, M. Jean-Marie Morisset, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Daniel Paul, M. Germinal Peiro, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Michel Raison, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Francis Saint-Léger, M. Alain Suguenot, M. Lionel Tardy, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues, Mme Catherine Vautrin, M. René-Paul Victoria, M. François-Xavier Villain, M. Jean-Michel Villaumé

Excusés. - M. Alfred Almont, M. François Brottes, M. Yannick Favennec, Mme Geneviève Fioraso, M. Pierre Gosnat, M. Henri Jibrayel, M. Serge Letchimy, M. Louis-Joseph Manscour, M. Bernard Reynès

Assistaient également à la réunion. - Mme Marietta Karamanli, M. Patrick Lebreton, M. Éric Straumann