Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 4 mai 2011 à 15h00

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Henri Jibrayel, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Jibrayel

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Une fois de plus Marseille a été le théâtre de graves incidents qui se sont déroulés lundi après-midi, aboutissant malheureusement au meurtre d'un adolescent de quinze ans.

Voilà quelques semaines une femme de soixante-treize ans est décédée, victime de deux jeunes arracheurs de sac. À la suite de ce malheureux drame, la colère des habitants est montée d'un cran.

Les événements de lundi illustrent cet état de fait, que l'on ne peut accepter dans notre démocratie. Ce matin, le ministre de l'intérieur à déclaré vouloir agir rapidement. Face à cette situation brûlante, il est impératif, monsieur le Premier ministre, que vous répondiez concrètement sur vos véritables intentions, afin d'éviter que de telles dérives envahissent Marseille.

Au mois de novembre dernier, le ministre de l'intérieur s'était rendu dans la cité phocéenne et avait affirmé que la sécurité de Marseille et des Marseillais était au premier rang de ses préoccupations.

Plusieurs députés du groupe UMP. Guérini ! Guérini !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Jibrayel

Que comptez-vous faire rapidement et concrètement pour rassurer nos concitoyens ? Je tiens à saluer ici le travail des policiers, qui agissent chaque jour avec de maigres moyens. Quand allez-vous faire en sorte que Marseille soit dotée d'une présence policière, de jour comme de nuit, et que ses effectifs de police soient augmentés de manière réelle et surtout pérenne ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Monsieur Jibrayel, votre réflexion mérite d'être replacée dans un contexte de durée.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Je note ainsi que, depuis 2002, la délinquance à Marseille a reculé de 7 % (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et que les faits de délinquance donnant lieu à des initiatives policières, qui témoignent de l'engagement de la police, ont augmenté de 74 %.

Cependant, le drame que vous venez d'évoquer est clairement le signe, je le dis sans fard, d'une dégradation réelle de la situation.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Mon prédécesseur avait pris un certain nombre d'engagements à l'égard du maire de Marseille. Ces engagements ont été tenus. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il avait promis 117 adjoints de sécurité supplémentaires, 78 sont en place depuis le mois de mai. Il avait promis des renforts de CRS, ils ont été mis en place. Il avait promis la création d'un groupe spécialisé de police judiciaire pour lutter contre les trafics d'armes, il est en place. Il avait promis la création d'une antenne de l'Office central de lutte contre les stupéfiants, elle est en cours de constitution.

Je me rends demain à Marseille afin d'examiner avec les élus et les forces de police et de gendarmerie la situation et de prendre les mesures nécessaires.

La police d'agglomération, qui obtient de réels succès à Paris, verra le jour cet été à Marseille. Mais cela ne suffit pas, il faut aussi que les patrouilleurs se mettent rapidement au travail et que nous définissions très vite une stratégie de sécurité.

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Les effectifs ne sont pas tout. Ils sont bien sûr nécessaires. Peut-être en faudra-t-il davantage. Mais il y a déjà 5 000 policiers dans les Bouches-du-Rhône. Il faut les utiliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Qu'avez-vous fait depuis 2002 ? Il n'y avait aucune stratégie !

Debut de section - PermalienClaude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration

Depuis 2002, la délinquance a reculé de 7 %. Des mesures stratégiques seront nécessaires parce que, à Marseille comme ailleurs, ce sont les voyous qui doivent courber la tête. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Gaymard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Depuis maintenant plus de trois ans, le monde traverse la crise plus grave depuis la Deuxième guerre mondiale : crise alimentaire, économique, financière, énergétique.

Personne ne peut contester que, grâce à la capacité d'initiative et d'action du Président de la République, du Premier ministre et de son gouvernement, notre pays traverse cette période difficile beaucoup moins mal que d'autres pays européens ou du monde développé.

Cela étant, monsieur le ministre, chacun sait que pour beaucoup de Français en activité ou retraités, les fins de mois sont très difficiles du fait du niveau des loyers et de l'augmentation des prix de l'énergie, des transports et des produits alimentaires.

Le grand emprunt et le plan de relance ont permis de soutenir l'activité et l'emploi dans notre pays. Depuis trois ans, un certain nombre de mesures ont été prises pour soutenir le pouvoir d'achat.

Cela étant, avec la reprise de la croissance qui se profile,…

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

…au-delà des mécanismes d'intéressement et de participation qui existent, il est absolument indispensable que les salariés de notre pays puissent profiter des fruits de cette reprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Un certain nombre d'annonces ont été faites. Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce que le Gouvernement prévoit en la matière ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Plusieurs députés du groupe SRC. Et du chômage !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Vous l'avez dit, monsieur le député, l'ensemble des mesures que nous avons prises immédiatement face à la crise nous ont permis de mieux résister que d'autre pays. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Bien évidemment, la question du pouvoir d'achat se pose dans tous les pays. Même si, en France, la situation est différente, nous voulons continuer de prendre d'autres initiatives. (« Baratin ! Bonimenteur ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Ce n'est pas le Gouvernement qui fixe les salaires dans les entreprises, mais il est important que les discussions salariales aient lieu partout et qu'elles soient en mesure de progresser.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

En revanche, en ce qui concerne le pouvoir d'achat des retraités et surtout des retraités les plus modestes, nous veillons à ce que les pensions de retraite augmentent comme nous en avons pris l'engagement. Pendant le quinquennat, nous avons revalorisé le minimum vieillesse de 25%, mais nous voulons aussi garantir le pouvoir d'achat de l'ensemble des retraités.

La question de la prime relève d'une autre logique. C'est une question d'équité, de principe, et ce principe est très clair. Vous-même n'avez cessé de croire à l'engagement du général de Gaulle notamment en faveur de la participation. Nous nous inscrivons dans la même logique. Si l'entreprise réussit, c'est grâce à la place des actionnaires, à leur investissement de départ, mais grâce aussi aux salariés. S'il y a des bénéfices, si les dividendes progressent, il doit aussi y avoir plus pour les salariés. Ce n'est pas à la place des salaires – il y aura une négociation salariale distincte –, mais cela relève de la même logique que celle qui prévaut pour la participation : donner davantage aux salariés.

Le principe est très clair, les modalités et le montant seront discutés dans les entreprises. Cette prime aura un caractère obligatoire dans les entreprises de plus de cinquante salariés (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), là où la participation est obligatoire. Sur tous ces sujets, nous sommes au rendez-vous d'un meilleur partage de la valeur.

Vous avez eu raison, monsieur le député, de rappeler que c'est notre famille politique qui n'a cessé de porter ce meilleur partage. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Noël Mamère, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

Hier, madame la ministre de l'écologie, vous accompagniez le Président de la République lors de sa visite à la centrale nucléaire de Gravelines, l'une des plus importantes d'Europe. Au cours de cette visite, le Président de la République s'est livré à deux provocations. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) La première, en expliquant qu'il était venu apporter l'approbation des Français et de la France à la filière nucléaire. La deuxième, en adressant une sorte de pique à Mme Merkel et à tous ceux qui aujourd'hui imposent un moratoire dans la filière nucléaire en parlant d'un « choix moyenâgeux ». Le Président a bien pesé ses termes.

Nous voici donc confrontés, dans notre pays, à un choix qui nous est imposé et où l'on excommunie tous ceux qui mettent en cause la filière nucléaire en raison des incertitudes qu'elle engendre, tous ceux qui posent cette question essentielle selon laquelle, dans une démocratie, il ne peut y avoir de place pour l'incontrôlable.

Dans le même temps, Areva, avec le soutien du Président de la République et des grandes banques françaises, est en train d'imposer une filière nucléaire massive en Inde : je pense en particulier à ce qui se passe dans l'état de Maharashtra et dans la région de Jaïtapur, où le peuple est opposé à la construction de sept réacteurs EPR par Areva. Les paysans sont chassés de chez eux ; on veut leur acheter à vente forcée des terres qu'ils ne veulent pas abandonner. Avec le Président de la République, nous voulons imposer la filière nucléaire alors que l'Inde n'a pas signé le traité de non-prolifération nucléaire et qu'il peut y avoir des transferts militaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Noël Mamère

En outre, nous savons très bien qu'en Inde les instituts de contrôle ne sont pas indépendants et sont insuffisants.

Madame la ministre, allez-vous vous obstiner à imposer à un peuple qui déplore déjà un mort et plusieurs blessés dans des manifestations un choix dont il ne veut pas – en Inde comme ailleurs ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe GDR et du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Monsieur le député, je ne fais pas la même lecture que vous du déplacement du Président de la République, hier, à Gravelines, où je l'accompagnais avec Éric Besson. Ce n'est pas non plus la lecture des salariés d'EDF qui lui ont réservé le meilleur accueil et qui ont plébiscité son discours.

Puisque, contrairement à vous, j'y étais, je vais vous dire ce qui s'est précisément passé.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Le Président de la République a réaffirmé le choix du nucléaire comme gage d'indépendance énergétique. Comme gage aussi d'une énergie produite à un prix acceptable et dans des conditions de sûreté maximale. Ici, chez nous, mais également à l'étranger, nous sommes en situation de faire valoir le savoir-faire français.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

En France, le Premier ministre a lancé un audit. Les premiers résultats seront connus avant la fin de l'année. Il s'agit d'un audit très ouvert,…

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

…auquel seront associés les commissions locales d'information et le Haut comité pour la transparence. Et le Président de la République le disait aux ONG du Grenelle de l'environnement qu'il recevait lundi : pourquoi ne pas y associer des experts extérieurs ?

C'est aussi notre position à l'international.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

La France n'exporte pas ses centrales dans des conditions de sûreté inférieures à ce qu'elle prône pour la France.

Debut de section - PermalienNathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement

Nous prônons une sûreté maximale et en France, et à l'étranger. C'est la raison pour laquelle nous avons perdu certains marchés : nous savions que nos centrales, parce qu'elles étaient plus sûres, étaient plus chères, mais nous ne voulions pas baisser le niveau de sûreté sous prétexte qu'elles étaient implantés en dehors du territoire français.

Enfin, ce haut niveau de sûreté, nous faisons en sorte qu'il soit adopté par le plus grand nombre d'États, et si possible tous les États dans le monde. C'est l'objet du G20 du nucléaire que le Président de la République m'a demandé de conduire les 7 et 8 juin prochains à Paris afin que le principe d'une autorité de sûreté indépendante – ce n'est pas le cas de l'Inde, avez-vous dit – soit adopté par tous les États qui disposent de l'énergie nucléaire dans le monde. C'est un engagement de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture.

Le 13 mai 2011, nous fêterons, si l'on peut dire, le deuxième anniversaire de la loi HADOPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

L'objectif de cette loi, la protection des droits d'auteur dans une société où internet devient chaque jour davantage le média dominant, est louable et il est d'actualité.

Ces textes ont donné lieu à des débats passionnés dans notre hémicycle. Parlementaires, industriels, consommateurs et économistes ont été très nombreux à pointer les faiblesses congénitales de ces dispositifs législatifs.

Plusieurs parlementaires du Nouveau Centre, parmi lesquels je me range, ont alerté régulièrement le Gouvernement sur la difficulté de caractériser le délit de non-sécurisation de l'accès à internet et ont dénoncé le caractère inadmissible de la coupure d'accès sanctionnant ce délit.

Nous vous l'avions dit, cette loi est techniquement inapplicable et symboliquement inacceptable. Nous étions à l'époque bien seuls à klaxonner dans la majorité (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) : Lionel Tardy, Alain Suguenot et quelques autres. Aujourd'hui, nous sommes moins seuls : Jean-François Copé a exprimé publiquement des réserves et, la semaine dernière, le Président de la République lui-même a fait part de ses hésitations à propos du dispositif HADOPI à l'occasion de l'installation du Conseil national du numérique – qui est du reste une bonne idée.

Le Président de la République a ouvert la perspective d'une loi de remplacement et il a eu raison : errare humanum est, perseverare diabolicum.

Monsieur le ministre, deux ans après la promulgation du texte, nous vous posons quelques questions. Quels sont les résultats de la loi HADOPI ? Quel en est le coût ? Et, après les multiples rapports dont elle a fait l'objet, quel calendrier prévoyez-vous afin de la remplacer par une loi d'avenir ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

En effet, monsieur Dionis du Séjour, perseverare diabolicum. Nul n'est prophète en son pays : il n'y a que chez nous que l'HADOPI suscite tant de critiques et de caricatures. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

En Espagne, en Nouvelle-Zélande, la pédagogie et la protection de la création s'organisent sur les mêmes bases. À Hollywood, l'ensemble des producteurs et des cinéastes regroupés au sein de la Directors Guild of America observe avec la plus grande attention le fonctionnement de l'HADOPI.

Des dizaines de milliers de recommandations pédagogiques sont envoyées chaque semaine et les premières réactions des personnes ainsi averties sont positives. La labellisation des offres légales est en cours et dynamise la logique des échanges. L'HADOPI invente jour après jour la pédagogie de la responsabilité, essentielle à l'ère numérique, voulue par le législateur et le Président de la République.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

La prise de conscience des ravages du piratage, l'idée que la culture n'a pas seulement une valeur mais aussi un prix, la perception du rôle crucial joué par le droit d'auteur dans l'éco-système de la création sont autant de principes essentiels aujourd'hui enfin reconnus grâce à l'HADOPI.

Voilà pourquoi le Gouvernement apporte un plein et entier soutien à l'HADOPI.

Voilà pourquoi le Gouvernement demeure le protecteur de ceux qui composent, de ceux qui interprètent et de ceux qui créent.

Voilà pourquoi le Conseil national du numérique, récemment installé par le Président de la République, va permettre d'accompagner l'HADOPI dans l'extension de ses domaines d'expertise.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Le Président de la République ne s'est pas exprimé en ce sens !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Le ministre n'a pas dû comprendre ce que disait le Président !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Voilà enfin pourquoi l'expérience et les résultats de l'HADOPI, les perspectives qu'elle ouvre, nous serviront de référence à l'occasion du prochain G8 qui aura lieu à Deauville dans quelques semaines, avec l'appui complet du Président de la République. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur le Premier ministre, votre réforme des retraites ne passe pas : huit Français sur dix souhaite qu'elle fasse l'objet d'un nouveau débat. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce désaveu devrait au moins vous conduire à honorer votre propre parole s'agissant de la prise en compte de la pénibilité.

En octobre, vous avez refusé notre proposition de retenir l'espérance de vie comme critère, préférant adopter une approche exclusivement médicale, qui ne peut bénéficier qu'à ceux que la maladie a hélas rattrapés avant qu'ils ne partent à la retraite. La moindre des choses aurait été de tenir votre engagement pour les salariés justifiant d'un taux d'incapacité permanente de plus de 10 %.

Depuis janvier, au moyen de décrets d'application, vous avez au contraire rogné la portée de ce principe minimum : à l'invalidité, vous avez ajouté la nécessité d'une durée d'exposition minimale de dix-sept ans et vous exigez du salarié qu'il en apporte la preuve avec des documents fournis exclusivement par son employeur. Les conditions sont si restrictives que ce droit ne bénéficiera qu'à une infime minorité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

En matière de prévention, vous avez hier trahi votre engagement en multipliant les seuils d'exception, en n'assortissant les négociations d'aucune obligation de résultat et en minimisant les pénalités éventuelles pour les entreprises qui ne respecteraient pas la législation.

Devant tant de duplicité, je ne sais si le temps est encore aux questions. Pour sa part, le parti socialiste a pris l'engagement de rétablir l'âge légal de départ à la retraite à soixante ans. (Vives exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC. – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C'est la garantie d'apporter une protection à ceux qui ont commencé à travailler tôt en exerçant les métiers plus pénibles.

Monsieur le Premier ministre, la perte de confiance dans votre Gouvernement et dans votre majorité est abyssale. Et cette confiance, vous ne la retrouverez pas au prix d'une nouvelle trahison.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

La France qui se lève tôt a aussi de la mémoire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Monsieur le président Ayrault, le dossier des retraites ne mérite ni contrevérités ni approximations ; or vous venez, en quelques instants, de verser dans ces deux travers. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Il est vrai que vous êtes coutumier du fait, particulièrement en matière de retraites, sujet sur lequel le parti socialiste n'a guère d'états de service à présenter. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Jamais vous n'avez été au rendez-vous de la responsabilité ! Les socialistes qui se sont engagés en faveur des réformes, nous les trouvons en Espagne, en Allemagne, mais en France, il n'y en a jamais eu, jamais !

Sur la question de la pénibilité, vous avez toujours été aux abonnés absents. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Dans la réforme présentée par François Fillon figurait le dispositif relatif aux carrières longues, qui a permis à plusieurs centaines de nos concitoyens ayant commencé à travailler très jeunes de partir à la retraite avant soixante ans, récompensant ainsi la valeur travail : jamais vous n'avez rien voté de tel ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

La pénibilité n'est reconnue dans quasiment aucun pays. Pour la première fois en France, avec la réforme présentée par Éric Woerth, elle est prise en compte. Les conditions retenues sont exactement les mêmes que celles qui ont été votées dans la loi. Il est vrai que cette mesure de justice, qui vient compenser l'usure au travail, cette majorité l'a votée tandis que le parti socialiste était encore une fois aux abonnés absents. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Le dispositif relatif aux carrières longues et la prise en compte de la pénibilité concerneront 120 000 personnes chaque année, il faut le souligner.

S'agissant du retour de l'âge de départ de la retraite à soixante ans, les sondages sont constants : même ceux qui avaient l'intention de voter pour vous savent que vous n'êtes ni sincères ni crédibles. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Ils savent bien que vous n'y donnerez pas suite.

Mais quel est, monsieur Ayrault, le vrai sujet de votre question. En réalité, si vous avez choisi le thème de la retraite à soixante ans, c'est pour gêner M. Strauss-Kahn dans le bal des présidentiables du parti socialiste, parce que vous n'êtes pas tous sur la même longueur d'onde s'agissant des retraites. Cela a toujours été le cas. Vous êtes constants dans votre inconstance ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Lionel Tardy, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Lionel Tardy

Monsieur le secrétaire d'État chargé des transports, le 1er juin 2009, le vol Air France 447 reliant Rio à Paris s'abîmait en mer dans des circonstances tragiques et encore inexpliquées. Deux cent vingt-huit personnes de différentes nationalités se trouvaient à bord, dont soixante-treize Français, de nombreux Brésiliens et de nombreux Allemands.

Des débris de l'épave ont été repêchés au cours des premiers jours suivant l'accident, mais d'autres parties, essentielles pour en apprécier les causes, semblaient perdues, dont les fameuses boîtes noires.

Trois campagnes de recherche ont été engagées en deux ans, pour un coût total de 35 millions d'euros, afin de retrouver l'épave de l'avion. Ces trois campagnes étant restées infructueuses, une quatrième a été lancée fin mars.

Le 3 avril, soit un peu moins de deux ans après le drame, l'épave a enfin été localisée, à 4000 mètres de profondeur. Dimanche et lundi derniers, les deux boîtes noires ont été repêchées.

Aujourd'hui, de nombreuses questions se posent quant aux prochaines étapes du processus qui permettra d'analyser le déroulement de l'accident.

Les familles des victimes, en premier lieu, ont besoin de connaître toutes les circonstances de ce drame. Le monde aéronautique a lui aussi besoin de ces informations, afin de modifier, le cas échéant, la conception des avions et d'améliorer la formation des pilotes. Enfin, l'examen des boîtes noires devrait permettre d'établir les responsabilités d'Air France et d'Airbus, qui ont été mis en cause sans pouvoir se défendre.

Monsieur le secrétaire d'État, vous vous êtes particulièrement impliqué dans ce dossier en rencontrant à plusieurs reprises les familles des victimes et en lançant la quatrième campagne de recherche. Pouvez-vous détailler les initiatives que vous comptez prendre afin que ces questions trouvent une réponse dans les meilleurs délais ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Thierry Mariani, secrétaire d'État chargé des transports.

Debut de section - PermalienThierry Mariani, secrétaire d'état chargé des transports

En effet, monsieur Tardy, moins d'une semaine après le début de la quatrième phase d'exploration du champ des débris du vol Air France 447, les deux enregistreurs de vol ont été retrouvés – dimanche après-midi pour l'enregistreur des paramètres de vol, dans la nuit de lundi à mardi pour l'enregistreur des sons du cockpit.

Nathalie Kosciusko-Morizet et moi-même tenons d'abord à saluer la véritable prouesse technique (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP) qui récompense les efforts du Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'aviation civile. Près de deux ans après l'accident, par 3900 mètres de fond, deux enregistreurs de vol de vingt centimètres de long ont pu être retrouvés, alors que la surface explorée égalait la superficie de la Confédération helvétique !

Ce succès a également été rendu possible par les efforts financiers que le Gouvernement a consacrés à toutes les phases de recherche. Vous l'avez dit, monsieur Tardy : 35 millions d'euros ont été dépensés au service de la vérité, de la sûreté aérienne et de la justice.

Les boîtes noires se trouvent actuellement à bord du bâtiment de la marine nationale. Elles sont placées sous scellés et sous la surveillance continue d'un officier de police judiciaire. À leur arrivée au BEA, elles seront ouvertes afin d'en extraire le module mémoire. Si leur intégrité a été préservée, les données seront sauvegardées, puis analysées. Toutes ces opérations seront filmées, suivies en direct par les homologues américain, britannique et brésilien du BEA, et, naturellement, effectuées en présence d'un officier de police judiciaire.

À ce stade, il est impossible de savoir si les informations contenues dans les boîtes noires pourront être exploitées. Cela étant, outre la prouesse technique que j'ai saluée, nous pouvons tous d'ores et déjà nous féliciter d'avoir fait un pas de plus vers la vérité, pour les familles des victimes et pour la sûreté aérienne. (Applaudissements sur de nombreux bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, notre assemblée est une nouvelle fois en deuil. Je viens d'apprendre le décès de notre collègue Françoise Olivier-Coupeau.

C'est avec une grande tristesse que j'adresse à sa famille, à ses proches, à nos collègues du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche, les condoléances de l'Assemblée nationale tout entière.

Je vous invite à observer une minute de silence. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et observent une minute de silence.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-George Buffet

Je m'associe naturellement à ce moment de profonde émotion.

Monsieur le Premier ministre, le mot « salaires » semble tabou pour votre gouvernement. Pourtant, les luttes salariales se multiplient.

Comment s'en étonner ? Le pouvoir d'achat de nos compatriotes est malmené par la hausse des loyers et des produits alimentaires. Vous aviez vendu l'ouverture à la concurrence en invoquant la baisse des tarifs. Résultat : les prix du gaz et de l'électricité ne cessent de grimper.

Le pouvoir d'achat en berne, ce sont aussi les bas salaires. Depuis que vous êtes au pouvoir, les richesses produites par le travail sont allées aux dividendes, au détriment des salaires. Votre nouveau pacte européen va encore aggraver cette injustice.

Pendant ce temps, les patrons du CAC 40 se sont octroyé une augmentation de 24 %. Quel affront pour celles et ceux qui travaillent dur et comptent pour tout, y compris pour se nourrir ! Comment joindre les deux bouts avec seulement 1073 euros par mois – le montant net du SMIC ? Comment accepter la baisse du salaire réel des employés ? Comment ignorer les salaires de misère des femmes qui subissent un temps partiel imposé ?

Le « travailler plus pour gagner plus » du candidat de 2007 est devenu dans les faits : « Actionnaires, enrichissez-vous ; salariés, serrez-vous la ceinture ! »

Monsieur le Premier ministre, la justice sociale et le bien-être des familles appellent une augmentation des salaires. La sortie de crise et une véritable relance requièrent des salaires dignes et des emplois durables. Le temps des larmes de crocodile (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP) versées sur le pouvoir d'achat, le temps du « panier des essentiels » et de la prime aux salariés est révolu. Passez aux actes ! N'en déplaise au MEDEF, il faut une augmentation générale des salaires.

Allez-vous porter le SMIC à 1600 euros ? Allez-vous renoncer au gel du point d'indice de la fonction publique ? Allez-vous lancer une grande conférence nationale sur les salaires avec les partenaires sociaux et assurer l'égalité salariale entre les hommes et les femmes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Madame la députée, puisque vous voulez que nous parlions de la défense du pouvoir d'achat, il me semble important de renvoyer chacun à son bilan en la matière. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Les gouvernements auxquels vous avez participé sont ceux qui ont gelé les salaires à cause des trente-cinq heures ! On a voulu empêcher l'économie française de sombrer, mais au prix d'un blocage des salaires. Et qui en a fait les frais ? Les salariés, les employés, les ouvriers dont vous parlez si souvent et si bien, mais pour lesquels vous n'avez rien fait à l'époque où les trente-cinq heures ont été imposées avec la dureté que l'on sait. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Si les trente-cinq heures sont une telle calamité, vous n'avez qu'à les supprimer !

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Pour notre part, dans le prolongement de ce qu'a voulu notamment Gérard Larcher, nous avons fait en sorte que, dans huit branches sur dix – celles qui couvrent presque toutes les entreprises –, tous les minima salariaux soient supérieurs au SMIC. C'est nous qui l'avons fait, et personne d'autre !

Le SMIC ne concerne que 10 % des salariés. Nous préférons que tous les salariés bénéficient d'augmentations de salaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous auriez également pu parler de ce qui a été fait en matière de participation et d'intéressement grâce à la loi de décembre 2008, que vous n'avez hélas pas votée. (Même mouvement.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Cette loi a notamment permis de débloquer 1,8 milliard d'euros, qui ont été distribués aux salariés. (Même mouvement.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Vous parlez d'une meilleure répartition de la valeur ; passez donc aux actes !

Lorsque le texte permettant aux salariés de toucher une nouvelle prime en cas d'augmentation des dividendes vous sera soumis, ne versez pas dans l'incantation, dans la dénonciation ; faites ce qu'attendent les salariés de notre pays : rejoignez la majorité pour leur permettre d'avoir plus ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Voilà ce en quoi nous croyons.

Ce qui se passe aujourd'hui, un an avant l'élection présidentielle, est intéressant : il y a, d'un côté, ceux qui mènent une pré-campagne mais qui n'ont rien à proposer ; de l'autre, ceux qui, au Gouvernement et dans la majorité, agissent. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Nos choix ne sont pas simples ; ils doivent être responsables. Mais les Français verront bien la différence entre votre démagogie et notre action ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Ça, c'est vrai : ils verront la différence !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Monsieur le ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique, le Président de la République était hier en déplacement dans le Nord, accompagné des PDG d'EDF et de Total, de Nathalie Kosciusko-Morizet et de vous-même.

À Gravelines, lors de la visite de la centrale nucléaire la plus puissante d'Europe occidentale,…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Il s'est baigné dans la piscine ? (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

…Nicolas Sarkozy s'est engagé, devant les agents d'EDF, à continuer d'investir dans le nucléaire civil, gage d'indépendance énergétique de la France.

Faut-il rappeler qu'aujourd'hui, près de 80 % de l'électricité du pays est d'origine nucléaire ?

À l'issue de cette visite, lors d'une table ronde sur la politique énergétique, le chef de l'État a annoncé la construction d'un terminal méthanier sur le littoral dunkerquois, projet lancé en 2006 par EDF et plusieurs fois reporté.

Cet engagement pris par le Président de la République au moment de la fermeture de la raffinerie Total, et approuvé par l'ensemble des élus de ce territoire, a donc été tenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Non ! Ce n'est encore une fois qu'une annonce !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Decool

Cette décision est évidemment accueillie avec satisfaction.

Outre l'aspect énergétique, ce projet permettra de conforter les activités du port de Dunkerque et d'enclencher la réindustrialisation du bassin d'emploi. Le projet mobilisera jusqu'à 1 850 personnes pendant les travaux et créera 250 emplois directement liés à l'exploitation du terminal ou relevant des professions portuaires. Je forme le voeu que l'implantation du terminal bénéficie à la main-d'oeuvre locale, lourdement pénalisée ces derniers temps.

Je tiens à saluer l'engagement personnel du chef de l'État dans ce dossier porté par EDF, qui investira 1,5 milliard d'euros.

Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser devant la représentation nationale les motivations ayant conduit le Gouvernement à soutenir avec conviction l'installation d'un terminal méthanier sur le littoral dunkerquois ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique

Hier, comme vous l'avez dit, le Président de la République a en effet confirmé la construction d'un terminal méthanier à Dunkerque – vous y étiez. C'est une très bonne nouvelle pour Dunkerque et pour le Nord-Pas-de-Calais, et j'ai noté que les parlementaires de la majorité qui étaient présents, comme les parlementaires de l'opposition, en ont jugé ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Cela fait six ans qu'il est annoncé, ce terminal !

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique

Vous savez ce que représente un investissement de 1,5 milliard d'euros, consenti principalement mais pas uniquement par EDF.

Jusqu'en 2015, 2 000 personnes travailleront sur le chantier ; ensuite, il y aura 200 emplois pérennes.

Total a également annoncé une usine d'expérimentation de biocarburants de deuxième génération, confortant ainsi la tradition industrielle de Dunkerque et du Nord-Pas-de-Calais, à laquelle vous êtes attaché, et à laquelle le Président de la République a redit hier son attachement personnel.

C'est aussi une bonne nouvelle pour la sécurité de nos approvisionnements en gaz. Le gaz, vous le savez, représente encore 20 % environ de la consommation finale dans notre pays : la capacité de ce terminal méthanier correspond à un quart de nos besoins.

J'ajoute, et je le dis aussi à Noël Mamère, que le Président de la République ne s'est pas contenté de tenir les propos relevés par M. Mamère dans sa question, à laquelle Mme Kosciusko-Morizet a répondu. Il a posé une question simple : si nous sortons du nucléaire, comment allons-nous remplacer l'énergie nucléaire, et avec quelles conséquences pour l'environnement ? Et comment allons-nous expliquer cette décision à nos concitoyens, qui bénéficient d'une électricité 40 % moins chère que la moyenne des autres pays ? Ceux qui prétendent vouloir sortir du nucléaire doivent nous le dire. (Signes d'approbation sur les bancs du groupe UMP.) Voilà ce qu'a dit Nicolas Sarkozy, hier, à Gravelines. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Régis Juanico, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, ma question porte, après celle de Jean-Marc Ayrault, sur la pénibilité au travail. Permettez-moi, avec les collègues qui m'entourent, d'y associer, en hommage, notre ami Patrick Roy, qui s'est beaucoup battu sur ce dossier comme sur celui de l'amiante.

Monsieur Bertrand, pour le Gouvernement, la pénibilité, c'est un peu comme la prime de mille euros dans les entreprises : au fur et à mesure que les jours passent, le nombre de salariés qui peuvent en bénéficier se réduit comme une peau de chagrin.

À l'origine, le volet « incapacité physique » de votre réforme des retraites devait, selon vos chiffres, toucher 30 000 salariés, soit à peine 5 % des 700 000 Français partant en retraite chaque année. Or la DARES vient de publier une enquête qui montre que 35 % des 50-59 ans, soit 3 millions de personnes, déclarent avoir été exposés pendant quinze ans ou plus à l'une des quatre pénibilités.

Les décrets d'application restrictifs que vous êtes en train de faire passer, contre l'avis des syndicats, vont encore diminuer le nombre de bénéficiaires.

D'une part, les salariés qui ont un taux d'incapacité entre 10 et 20 % devront prouver, par eux-mêmes, devant une commission où ils ne seront pas représentés, une durée d'exposition à un facteur de pénibilité de dix-sept ans : ce sera un véritable parcours du combattant pour tous ceux qui voudront faire reconnaître leur incapacité.

D'autre part, les entreprises de plus de cinquante salariés – celles de moins de cinquante salariés ne sont pas concernées du tout – n'auront l'obligation de négocier sur la pénibilité que si plus de 50 % de leur effectif est exposé, ce qui est un seuil très difficile, voire impossible, à atteindre.

Ces décrets mesquins ferment un peu plus encore la porte aux mécanismes de compensation de la pénibilité au travail pour les salariés, qui se trouvent floués.

Sur la pénibilité, Monsieur Bertrand, c'est vous qui êtes approximatif, c'est vous qui êtes arrogant, c'est vous qui êtes aux abonnés absents. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. — Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Régis Juanico

Pour notre part, si nous l'emportons en 2012, nous nous engageons à revenir sur ces mesures injustes et à prendre en compte réellement la pénibilité au travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. — Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Je ne savais pas que mes mots avaient visé juste ; je ne savais pas que vous vous étiez senti visé. (« Arrogant ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC.) Si vous me permettez, je vous dirai que, pour parler de ces sujets, encore eût-il fallu que vous fassiez, vous, des propositions. Vous n'en avez jamais fait.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Pourquoi, d'ailleurs, quand vous parlez de pénibilité, n'abordez-vous pas la prévention de la pénibilité ? (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.) Est-ce que cela ne vous semble pas un véritable sujet ? Nous parlons, nous, de la façon dont nous voulons accompagner la santé des salariés ; nous voulons éviter de poser seulement la question de la compensation et de la réparation. Nous en avons parlé lors de la réforme des retraites, et nous continuons à en parler avec un texte consacré à la médecine du travail qui sera bientôt présenté. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Qui a pris l'engagement qu'il y aura, au 1er janvier, une pénalité financière si les négociations sur la pénibilité n'ont pas été engagées ? Ce n'est pas l'argent que cela peut rapporter qui m'intéresse ; je veux simplement que chacun s'y mette, pour que l'on puisse trouver des solutions. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Pensez-vous que nous sommes à même de juger comment on peut compenser, ou prévenir, la pénibilité dans telle ou telle entreprise ? Je crois aux vertus du terrain ; je crois aux partenaires sociaux ; je crois au dialogue social ; et c'est de cette façon que l'on peut apporter des solutions. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. — Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Les solutions ne viendront certainement pas des déclarations péremptoires de ceux qui n'ont jamais rien dit, jamais rien fait, jamais rien démontré en matière de justice sociale ou de réforme des retraites. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le député, vous avez employé le mot « arrogant ». Et qu'avez-vous dit ? « Si nous l'emportons en 2012… » Dites-vous bien une chose : les Français savent qu'il ne faut pas leur raconter d'histoires. Ceux qui prétendent que, demain, on reviendra en arrière sur tout et qu'on rasera gratis, ceux qui prétendent qu'il faut croire aux promesses du parti socialiste, oublient cette chose : le bon sens des Français, qui savent bien que, si l'on n'avait pas engagé cette réforme, demain et après-demain on ne payait plus les retraites. Cela, vous n'avez jamais eu le courage de le leur dire, mais ne vous inquiétez pas : les Français auront le bon sens de dire « non » à l'arrogance et aux mensonges du parti socialiste ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. — Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Michel Herbillon, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

L'agence régionale de santé d'Île-de-France et l'Assistance publique des hôpitaux de Paris projettent, comme vous le savez, monsieur le ministre, de fermer très prochainement le service de chirurgie cardiaque du centre hospitalier universitaire Henri-Mondor de Créteil, dans le Val-de-Marne.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Ce projet de fermeture crée dans notre département une très vive émotion, de l'incompréhension, de la colère même. La mobilisation contre cette décision est générale, tant chez les parlementaires et les élus de tous bords que chez les praticiens hospitaliers universitaires et les personnels. Cette mobilisation ne cesse de s'étendre dans la population.

Comment accepter une décision qui risque de déstabiliser non seulement le pôle de cardiologie extrêmement réputé de Mondor, mais aussi l'ensemble des activités de soins, de recherche et de formation de ce CHU ? Ce serait d'autant plus injustifié que le récent classement des hôpitaux place Henri-Mondor parmi les meilleurs hôpitaux de France, et au premier rang pour le traitement des affections cardiovasculaires.

Comment ne pas s'opposer à une décision qui aboutirait à fermer le seul service de chirurgie cardiaque de l'AP situé en banlieue alors que, dans le même temps, on maintient les trois services existants dans Paris intra muros ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Herbillon

Cette décision est ressentie comme une injustice par nos populations et par nos territoires. Elle est désobligeante pour la banlieue. Elle est en contradiction avec le Grand Paris voulu par le Président de la République. Elle heurte la logique d'aménagement du territoire et le principe d'égalité d'accès aux soins en dehors de Paris.

Monsieur le ministre, je vous demande solennellement aujourd'hui de suspendre cette décision (« Très bien ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC) et de nous préciser quelle attitude le Gouvernement entend adopter face à ce projet de fermeture néfaste pour les populations du Val-de-Marne et celles de l'Est parisien. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Monsieur le député, vous faites part d'une émotion dont certains parlementaires se sont également fait l'écho, à l'Assemblée nationale comme au Sénat.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Il s'agit d'une préoccupation légitime. Sur ce dossier, vous avez été particulièrement présent, monsieur Herbillon.

La première orientation de l'AP-HP était, il est vrai, de proposer la fermeture du service de chirurgie cardiaque de l'hôpital Henri-Mondor. J'ai décidé, au moment où je vous parle, de suspendre cette orientation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Avec Nora Berra, nous avons décidé de diligenter dans les jours qui viennent une mission de l'IGAS dont l'objectif sera de mettre en évidence, exactement et de façon totalement indépendante, la filière cardiologique dans son ensemble, notamment à l'AP-HP.

J'ai bien conscience que nous devons prendre en compte l'historique et l'évolution de ce service, qui est aujourd'hui en train de remonter en termes d'activité. Nous devons tenir compte aussi des évolutions à venir, notamment de la chirurgie cardiaque, sans oublier les développements de la cardiologie interventionnelle et les recommandations de la Haute autorité de santé, qui interviendront à l'automne, notamment sur les valves percutanées.

Je le dis très clairement, nous devons montrer que la question de la santé est traitée dans Paris intra muros, certes, mais aussi dans le Grand Paris, notamment dans l'Est parisien. Tous les projets que portera l'hôpital Henri-Mondor, tels les travaux envisagés sur les blocs, en réanimation et en chirurgie, feront l'objet d'un regard particulièrement bienveillant dans le cadre du plan Hôpital 2012. Nous voulons montrer, comme nous l'avons fait pour d'autres choix en matière d'aménagement du territoire, que la santé est aussi une question de proximité. Pour certaines activités programmées, la logique n'est pas forcément la même. La mission de l'IGAS nous permettra d'y voir clair et de répondre aux enjeux de santé, notamment dans l'Est parisien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Raimbourg

Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, et porte sur l'application de la réforme récente de la garde à vue.

La loi réformant la garde à vue est intervenue tardivement, alors que nous savions depuis 2007, par la condamnation de la Turquie, que nous allions devoir réformer notre système. À la précipitation est venue s'ajouter l'absence cruelle de moyens.

D'abord pour la gendarmerie et la police, tant pour l'aménagement des locaux que pour la mise à niveau de la police scientifique et technique rendue nécessaire par la modification du mode de travail des policiers et des gendarmes. Ensuite pour la justice : à ce jour, les procureurs, en faible nombre, ne sont pas en mesure d'assurer une permanence vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Le budget de l'aide juridictionnelle doit être mis à niveau. L'aide juridictionnelle permet de payer les indemnités des avocats de permanence qui assurent une présence en garde à vue. Aujourd'hui, d'ailleurs, ils protestent à ce sujet.

La presse fait état d'un projet de création d'un timbre fiscal de 30 euros, qui serait dû pour l'ensemble des procédures.

Envisagez-vous la création de ce timbre fiscal ? Frapperait-il toutes les procédures : divorces, contentieux de tout type – construction, prud'homal, disputes de voisinage ? Envisagez-vous de recréer les frais de justice et de revenir à une justice payante ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le député, je vous prie, tout d'abord, de bien vouloir excuser le garde des sceaux, qui participe actuellement au Sénat à la discussion d'une proposition de loi d'initiative sénatoriale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Hardy est au Sénat et Laurel à l'Assemblée nationale !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Vous avez tort de dire que les moyens affectés à la justice sont en diminution, puisque, avec l'enseignement supérieur et la recherche, c'est l'un des deux seuls budgets à avoir été sanctuarisé, préservé, protégé, et qui échappe à la réduction et à la maîtrise des dépenses.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Pour cet exercice budgétaire, l'augmentation a été de plus de 4 %.

Vous avez tort de mettre en accusation l'absence d'accompagnement du Gouvernement de la politique de l'aide juridictionnelle. Je rappelle rapidement l'origine de ce texte. Le Conseil constitutionnel a été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité. Il a rendu sa décision ; le Gouvernement, évidemment, a pris les mesures nécessaires pour rentrer dans le calendrier imposé par le Conseil. La loi, votée le 12 avril, a été promulguée le 14. La chancellerie et le ministère de l'intérieur ont adressé les circulaires pour application immédiate, ce qui était conforme aux souhaits de l'assemblée plénière de la Cour de cassation, ainsi qu'à la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l'homme.

Nous sommes actuellement en discussion avec le Conseil national des barreaux. La chancellerie et le garde des sceaux ont fixé un plafond de rémunération. Un décret est actuellement transmis par la chancellerie au Conseil d'État qui va fixer, s'agissant de l'aide juridictionnelle pour la garde à vue et pour les avocats présents dès la première heure, un plafond de 300 euros pour la présence de l'avocat lors de la garde à vue, un accompagnement complémentaire de 150 euros pour l'avocat qui va aider une personne victime en comparution face à un présumé coupable. Avec 300 euros en moyenne, le niveau sera supérieur à ce qui se pratique en Allemagne et dans les autres pays de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

De plus, nous sommes à situation équivalente, en accord aussi avec le Conseil national des barreaux, sur le coût horaire moyen de trois heures de présence de l'avocat en garde à vue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Et la taxe ? » sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation, il est très compliqué, trop compliqué d'administrer un commerce, un atelier, une entreprise, une exploitation agricole, bref une affaire en nom propre ou en société. La complexité administrative représente entre trois et quatre points du produit intérieur brut en frais induits et décourage beaucoup d'entreprendre.

Votre prédécesseur, Hervé Novelli, en créant le statut d'auto-entrepreneur, a redonné aux Français le goût d'entreprendre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le secrétaire d'État, vous avez entrepris de consulter, dans chaque région de France, tous les créateurs d'emplois. Vous avez annoncé, vendredi dernier, des mesures très importantes de simplification pour libérer les énergies de tous ceux qui entreprennent afin qu'ils puissent consacrer l'essentiel de leur temps à la croissance et au développement de leur entreprise, donc à la création d'emplois. Car c'est bien la croissance et le travail qui créent l'emploi et non l'inverse.

Pouvez-vous détailler ces mesures et en souligner les plus importantes ? Elles sont attendues par tous les entrepreneurs de France, petits et grands, et représentent un ballon d'oxygène porté par un souffle de confiance, de liberté et de reconnaissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Allô ? Allô ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.

Debut de section - PermalienFrédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation

Monsieur le député, vous avez parfaitement expliqué la situation de notre pays. Je le rappelle, la France est la cinquième puissance économique mondiale, mais elle est au cent vingt-septième rang en matière de paperasserie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Roman

Cela fait dix ans que vous êtes au pouvoir ! Qu'avez-vous fait ?

Debut de section - PermalienFrédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation

Comme vous l'avez dit, il y a une attente des chefs d'entreprise. C'est la raison pour laquelle j'ai nommé des correspondants PME dans chaque département (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) J'ai demandé à ces fonctionnaires volontaires de faire des stages d'immersion en entreprise, auprès des chefs d'entreprise.

Les propositions qu'ils ont recueillies et l'ensemble des propositions faites par les organisations professionnelles ont permis d'alimenter le travail dans vingt-deux régions par le biais d'assises régionales.

Nous nous sommes retrouvés pour des assises nationales où la méthode a changé. J'ai souhaité que ces assises soient coprésidées par un membre du Parlement, le président de la commission des lois, Jean-Luc Warsmann, à qui le Président de la République a confié une mission sur la simplification des lois, et par Jean-Michel Aulas.

Nous avons décidé tous ensemble, Gouvernement, Parlement, entreprises, plutôt que de sortir des mesures des tiroirs de l'administration, d'aller chercher dans les entrepôts, dans les boutiques, dans les entreprises,…

Debut de section - PermalienFrédéric Lefèbvre, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation

…des idées de simplification.

Quelles sont ces simplifications ? D'abord, il s'agit d'un coffre-fort numérique. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Une fois par an, les entreprises donneront les informations nécessaires, alors qu'actuellement il existe soixante-dix déclarations différentes.

Par ailleurs, le bulletin de salaire sera simplifié. Nous allons diviser par deux le nombre de lignes qu'il comporte.

Enfin, il y aura une déclaration sociale unique et non plus trente.

Au total, ce sont quatre-vingts mesures chiffrées par le cabinet Ernst & Young pour un montant d'un milliard d'euros.

Vous le voyez, il faut être aux côtés de la France qui se bat et qui résiste à la crise ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, pensez à l'image que vous donnez lorsque vous hurlez. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je vous le dis parce que je reçois de plus en plus de courrier à ce sujet et qu'il est de notre responsabilité de maintenir l'image que nous devons aux Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Bianco

Monsieur le président, cela vaut des deux côtés de l'hémicycle !

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Gérard Charasse, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Charasse

Monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, la représentation nationale s'inquiète du tour que prennent les négociations du cycle dit de Doha. Il est au bord de l'échec, a déclaré Pascal Lamy, directeur général de l'Organisation mondiale du commerce en avril dernier. Le dernier point de blocage des négociations porte sur la baisse des droits de douane applicables aux produits industriels.

Ce sujet, pour lequel l'Union européenne a pris une position que nous ne connaissons pas, s'ajoute aux divergences fondamentales qui existent aussi sur l'agriculture et sur les services. Je doute par conséquent que nous soyons en mesure de signer avant le sommet de Cannes en novembre, comme le président Sarkozy en avait pris l'engagement dans le cadre de sa présidence du G 20.

Un nouvel échec entamera ce qui reste de crédibilité à l'OMC et lèvera de fait les règles existantes. Parallèlement, les États vont naturellement rechercher d'autres accords régionaux, voire bilatéraux, tous préjudiciables à des relations saines et porteuses de progrès, chères aux radicaux.

Un nouvel échec constituerait une vraie menace pour les équilibres sociaux du monde, pour notre agriculture et notre industrie.

Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous dès lors nous indiquer ce que vous envisagez pour sortir de cette impasse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Pierre Lellouche, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur.

Debut de section - PermalienPierre Lellouche, secrétaire d'état chargé du commerce extérieur

Monsieur le député, je tiens à vous remercier pour votre question extrêmement pertinente. Et parce qu'elle est pertinente et importante, je veux apporter une correction.

Le Président de la République n'a pas pu s'engager à un accord OMC au mois d'avril. Cet accord est le résultat de dix années de négociations entre 190 pays.

En novembre dernier, à Séoul, les chefs d'État du G 20 ont demandé une accélération des négociations. C'est ce que nous avons fait.

Je peux vous assurer que la France est très attachée à ces négociations ; nous y travaillons énormément. Pascal Lamy était à Paris tout récemment. Il a été reçu par le Président de la République et par moi-même. J'étais en contact avec Karel de Gucht. J'ai vu nos homologues brésiliens et, hier, j'ai rencontré à Washington mon homologue américain.

Si le cycle de Doha échoue, ce sera un échec pour l'OMC. Or nous avons tous besoin d'une organisation mondiale du commerce et de règles, notamment en matière de rupture en cas de différends. Par ailleurs, ce sont les pays les plus pauvres qui perdraient le plus.

Pascal Lamy a proposé une dernière tentative sur un mois avec une initiative européenne. Nous le faisons, mais pas à n'importe quelles conditions. À cet égard, la France n'entend pas que l'Union européenne fasse des concessions supplémentaires sur un éventuel accord entre Chinois et Américains en matière de droits de douane sur les produits industriels. J'ai redit ces lignes rouges à M. Karel de Gucht : il n'y aura pas de concessions sur l'agriculture dans le cadre d'un accord OMC.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Michel Ferrand, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Ferrand

Monsieur le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, dans son dernier rapport de septembre 2010 sur la sécurité sociale, la Cour des comptes a lancé une mise en garde à propos de suspicions de fraude concernant les pensions de retraite versées à des personnes résidant en Algérie.

Elle a en effet constaté que, selon la direction de la sécurité sociale, le nombre de centenaires pensionnés du régime général dans ce pays est supérieur à celui recensé par les services chargés du recensement pour toute l'Algérie.

Cette anomalie statistique laisse craindre, à l'évidence, des dissimulations. Des contrôles renforcés ont été décidés en application d'un décret d'octobre 2009 qui prévoit qu'une attestation d'existence pourra être exigée d'une à quatre fois par an et que des contrôles pourront être diligentés par des correspondants agréés.

Cependant, le ciblage prioritaire de ces contrôles, tel qu'il a été décidé au sein de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, porte sur la Tunisie, pays qui ne se signale pas particulièrement par des incohérences statistiques.

Il me paraît donc indispensable de contraindre tous les bénéficiaires de pensions de retraite vivant à l'étranger de se rendre au moins une fois par an auprès de nos services consulaires, afin que ceux-ci leur délivrent un certificat de vie à adresser à la Caisse nationale d'assurance vieillesse, qui ne poursuivra le versement de la pension de retraite qu'au vu de ce document.

Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelles mesures vous envisagez de prendre en ce sens ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Monsieur le député, nous évoquons des personnes qui ont travaillé, cotisé et donc acquis leurs droits à la retraite en France et qui touchent leur pension alors qu'elles sont installées à l'étranger. Dix bénéficiaires sur cent d'une pension de retraite se trouvent dans cette situation, la moitié résidant en Europe et l'autre moitié dans le reste du monde.

Vous avez raison de souligner qu'en France l'état civil informe automatiquement les caisses de retraite de la disparition d'une personne. Dans de nombreux pays, cette procédure n'est pas automatique ou n'est pas prévue. Nous avons donc décidé, le décret de 2009 l'atteste, de changer le dispositif en travaillant avec des correspondants locaux, à savoir des assureurs. Or ce système ne fonctionne pas et n'est pas voué à bien fonctionner.

Nous pensons, avec le ministère des affaires étrangères, que c'est avec nos postes diplomatiques et en particulier nos consulats que nous devons travailler, en demandant ce que l'on appelle des certificats de vie pour s'assurer que les pensions ne sont pas versées à des bénéficiaires qui auraient disparu entre-temps.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Cette façon de procéder est tout aussi légitime que le versement des pensions.

Nous estimons en revanche que, pour nous montrer précis et efficaces, nous devons nous intéresser aux cas pour lesquels le plus de questions se posent. J'ai ainsi demandé à la branche vieillesse et à la branche retraite d'établir des critères comme le lieu de résidence, le montant de la pension ou bien l'âge. On me signale que la mise en place d'un tel dispositif sera très longue et ne pourrait aboutir avant 2012.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

J'ai exigé qu'il soit mis en oeuvre dès cette année 2011 dans tous les pays, de façon à effectuer tous les contrôles nécessaires dès lors que sont versées des pensions.

Je suis très attaché à la lutte contre les fraudes partout et pour tous. Il s'agit d'une exigence de justice. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

Monsieur le Premier ministre, si l'emploi est la priorité des Français, il ne l'est pas dans la politique menée par le Gouvernement depuis le début de la législature : destruction des emplois publics, austérité salariale, encouragement aux heures supplémentaires, affaiblissement du code du travail ou encore absence de relance de la consommation.

Malgré tous vos efforts de communication (Un certain nombre de députés des groupes UMP et NC quittent l'hémicycle),…

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, la séquence des questions n'est pas tout à fait terminée !

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

…la courbe du chômage continue inexorablement d'augmenter, que vous le vouliez ou non, puisque l'on compte près de 5 millions de sans-emploi, soit un taux plus élevé que la moyenne européenne.

Le nombre des demandeurs d'emploi en activité réduite a augmenté de 10 % en un an. Je pense aux plus de cinquante ans : combien rencontrons-nous, dans nos permanences, d'hommes et de femmes qui, après de longues années de travail, se retrouvent sans emploi et ne savent plus où se diriger pour retrouver un minimum de dignité ? Que dire des titulaires d'un contrat aidé qui peut être rompu du jour au lendemain ?

Ces tendances révèlent une triste réalité née de la crise et de l'absence de mesures fortes pour la résorber. La précarité explose. Dans ce contexte, vous lancez des initiatives aussi saugrenues qu'inefficaces : ici la prime de mille euros, là l'exigence pour les bénéficiaires du RSA d'une contrepartie, celle de travailler gratuitement. Non, décidément, votre bilan économique et social est voué à rester catastrophique.

L'heure du bilan approche et les Français verront la sincérité et l'efficacité du projet des socialistes dans ce domaine (Exclamations sur les bancs du groupe UMP),…

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Biémouret

…alors que l'on découvre les effets indécents du bouclier fiscal, qui a permis la redistribution de près de 600 millions d'euros aux plus hauts revenus.

Monsieur le Premier ministre, allez-vous définitivement entreprendre une politique de l'emploi pour redonner confiance à nos compatriotes ? Allez-vous définitivement combattre le chômage ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Madame la députée, il ne faut pas tenir un double langage. (Plusieurs députés des groupes SRC et GDR quittent l'hémicycle.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, pourriez-vous avoir la correction d'écouter les questions et les réponses ? Les questions ne sont pas terminées. (Exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienXavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé

Quand le chômage baisse dans vos circonscriptions, dans vos départements, vous êtes les premiers à vous en réjouir localement, tout en dénonçant la politique du Gouvernement. Je dis par conséquent « non » au double langage.

Ce qui est vrai, c'est que, depuis trois mois, le chômage baisse en France, ce qui ne s'était pas produit depuis le début de l'année 2008. C'est une bonne nouvelle pour toutes celles et tous ceux qui ont retrouvé un emploi. Je ne nie pas cependant que la situation n'est pas encore parfaite et que de nombreux efforts restent à fournir ; c'est pourquoi nous avons mis en place de nouvelles mesures.

Nous avons notamment consacré un demi-milliard d'euros pour proposer des offres de formations ou des contrats aidés avec une double priorité : la lutte contre le chômage des jeunes, lequel recule – pas encore assez pour moi, mais il recule –, et la lutte contre le chômage des plus de cinquante ans, pour laquelle nous avons besoin d'intensifier les efforts.

Puisque vous avez évoqué d'autres catégories, laissez-moi vous signaler que je préfère qu'une personne retrouve une activité même réduite plutôt que pas d'activité du tout. Le RSA, voté par cette majorité, garantit le maintien du pouvoir d'achat. Voilà une vérité que vous avez oublié de mentionner, à moins que vous n'en ayez pas eu le temps ; je le rappelle donc à votre place. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Vous voulez comparer les bilans. Celui du gouvernement Jospin a été d'estimer que l'État ne pouvait pas tout ; M. Mitterrand lui-même avait déclaré qu'on avait tout essayé face au chômage. Nous pensons, nous, que non. Aussi continuerons-nous de prendre nos responsabilités et de contribuer à la baisse du chômage, ce que vous n'avez pas su faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous avons terminé les questions au Gouvernement. Permettez-moi, mesdames et messieurs les ministres, et vous, chers collègues qui êtes restés jusqu'à la fin des questions, de vous en remercier. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Précarité

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques (nos 3253, 3333, 3330, 3329).

Hier, l'Assemblée a entendu les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, mesdames, messieurs les députés, comme je l'ai rappelé plusieurs fois devant vous, les bons résultats observés en matière de réduction du déficit public, qui témoignent d'une avancée par rapport aux objectifs de la loi de programmation pluriannuelle, confortent indiscutablement la volonté sans faille du Gouvernement d'effacer au plus vite les traces laissées par la crise dans nos finances publiques. Avec ce projet de loi constitutionnelle, nous souhaitons aller plus loin et pérenniser cette démarche, vous l'avez compris, en mettant en oeuvre de façon permanente une gouvernance efficace de nos finances publiques.

Hier, la discussion générale a permis à chacun d'exprimer ses positions et d'exposer plusieurs points sur lesquels je reviendrai rapidement.

Je rappelle une fois encore que le Président de la République avait confié la réflexion à un groupe de travail transpartisan. Il comprenait des gens de gauche et des gens de droite, et était piloté par Michel Camdessus, homme d'une grande expérience en matière de finances publiques, y compris sur le plan international.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Le Gouvernement a retenu l'essentiel des conclusions de ce groupe de travail transpartisan. L'objectif de la réforme n'est donc pas de chercher un quelconque clivage entre majorité et opposition, mais de s'atteler à une solution de compromis la plus consensuelle possible.

Je veux profiter de la suite du débat, aujourd'hui, pour convaincre celles et ceux qui auraient manifesté quelques réticences.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

L'opposition, notamment par les voix de M. Cahuzac, de M. Dosière, de Mme Filippetti, nous reproche d'avoir attendu la fin de la mandature pour commencer à agir. Rien n'est plus faux : toutes les préconisations du rapport de M. Camdessus qui pouvaient connaître un début de mise en oeuvre à cadre constitutionnel inchangé ont été appliquées sans attendre.

La proposition relative au monopole des dispositions fiscales, inscrite dans notre loi fondamentale, n'est que la traduction d'une circulaire du Premier ministre, du mois de juin dernier, qui a permis au Gouvernement comme à la représentation nationale de discuter de toutes les mesures de nature fiscale ou relatives aux recettes sociales dans le cadre de nos deux textes fondamentaux, la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale.

La loi de programmation des finances publiques pour les années 2011-2014 a esquissé ce que pourraient être les futures lois-cadres d'équilibre des finances publiques. Là encore, cela a été fait sans attendre, et donc sans calcul.

Enfin, pour la première fois, le programme de stabilité a été examiné par le Parlement – c'était lundi dernier à l'Assemblée, la semaine dernière au Sénat – avant transmission à la Commission européenne.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Au fond, la révision constitutionnelle qui vous est proposée aujourd'hui ne fait que traduire ce que nous avons déjà mis en oeuvre.

Ce projet de loi constitutionnelle – j'espère pouvoir le dire sans provoquer d'éclats de rire de la part de M. Mallot –…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je ne fais que reconnaître votre humour, monsieur le ministre ! Et votre talent, car il en faut pour dire tout cela sans rire !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…n'est donc en aucune manière un texte de circonstance. Il s'inscrit au contraire dans une démarche de long terme, autant que possible transpartisane, qui vise à garantir notre modèle social et notre souveraineté nationale pour les générations futures. Comme je le disais hier – et je ne comprends toujours pas que cet argument ne vous ait pas conduits à modifier votre position –, ce texte est animé par un esprit de responsabilité vis-à-vis des générations futures.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Ce qui est étonnant, c'est que cet esprit de responsabilité apparaisse maintenant, et qu'il ne se soit pas manifesté il y a dix ans.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Qu'est-ce qui vous empêche d'accompagner le Gouvernement dans cette démarche ? Peut-être un état d'esprit un peu fébrile à l'approche de primaires à l'intérieur de votre propre formation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Les primaires ? Vous savez que j'ai de grandes chances de les remporter ?

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

À cet égard, je veux saluer votre rapporteur général, M. Carrez, à la fois pour l'ensemble de son oeuvre…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…et pour son engagement sur ce texte en particulier, ainsi que M. Michel Bouvard. Tous deux ont rappelé le précédent pertinent de la LOLF. Que je sache, la LOLF était une initiative transpartisane, dont l'impulsion a été donnée par des hommes très engagés au sein de la commission des finances, qu'ils fussent de droite ou de gauche. Vous étiez alors aux affaires, et nous l'avons votée. Elle est aujourd'hui en application.

Dans ces conditions, je souhaiterais insister sur deux points importants.

Au sujet des lois-cadres d'équilibre des finances publiques, le coeur du travail du groupe Camdessus a consisté à formaliser la volonté d'inscrire dans le marbre l'effort structurel réalisé sur le périmètre contrôlé par le Parlement, c'est-à-dire le budget de l'État et celui de la sécurité sociale. À cet effet, l'objectif final de la réforme est bien de rendre les normes d'effort structurel intangibles et opposables aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale. Tout amendement qui n'est pas en contradiction avec cet objectif et qui peut même contribuer à l'atteindre est acceptable aux yeux du Gouvernement, comme il doit l'être aussi à vos yeux, mesdames et messieurs les députés de l'opposition. C'est notamment le cas de l'idée d'un compte de contrôle, ou encore celle, défendue par M. le président de la commission des lois, visant à constitutionnaliser les caractéristiques de l'effort structurel des lois-cadres, avec, en dépenses, des plafonds de dépenses pour les crédits autorisés en lois de finances et le montant maximal des dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, pour les lois de financement de la sécurité sociale ; et, en recettes, l'impact minimal cumulé, c'est-à-dire un plancher, de mesures nouvelles en prélèvements obligatoires.

C'est la raison pour laquelle, à l'initiative du président Warsmann et des rapporteurs pour avis Carrez et Bur, des amendements ont été déposés, auxquels le Gouvernement ne verra pas d'objection.

Toutefois, le fait de vouloir calquer les lois-cadres sur les programmes de stabilité, en les rendant ajustables chaque année, n'est pas vraiment en phase avec le sens initial de la réforme telle que la souhaite le Gouvernement. En effet, si la loi-cadre devait être révisée annuellement, elle ne constituerait plus une contrainte forte sur les lois financières. Bien évidemment, dans tout dispositif, il faut de la souplesse, et il sera toujours possible de réviser une loi-cadre en cours d'exécution, mais ces révisions doivent correspondre à des situations circonscrites, par exemple une crise économique, une catastrophe naturelle ou un changement de majorité parlementaire.

Au sujet du monopole fiscal, le point de départ de cette disposition repose sur un souci que partage la majorité, mais aussi, j'ose l'espérer une fois de plus, une partie de l'opposition : il faut en finir avec la prolifération des niches fiscales et sociales.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Cet objectif est partagé. Tout le monde se drape dans la vertu, sur le thème : ça suffit ! Mais, dès qu'on en vient à l'examen de chaque niche, des points de vue différents, pour ne pas dire opposés, s'expriment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il n'y a pas assez de vertu pour tout le monde !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Le Gouvernement demeure bien évidemment soucieux de respecter l'initiative parlementaire en matière de recettes fiscales et sociales.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Et je serai bien entendu ouvert à la discussion, dans la mesure où elle nous permet d'apporter une solution concrète et réaliste au problème que j'évoquais à l'instant et qui nous concerne tous. Toutefois, nous ne devons pas perdre de vue notre objectif, et nous devons rechercher une solution qui impose de donner un statut spécifique à la création de toute nouvelle disposition dérogatoire en matière fiscale ou sociale.

À cet égard, je tiens à rappeler que les textes financiers, la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale, rassemblent déjà la très grande majorité des articles fiscaux promulgués.

Par ailleurs, cette réforme n'empêche nullement une évolution des pratiques. Ainsi, lorsque des réformes fiscales ou budgétaires importantes exigeront un débat parlementaire spécifique et prolongé, le Gouvernement pourra déposer un projet de loi financier ad hoc. L'histoire récente démontre que cela arrive de manière récurrente, à tel point que c'est presque devenu une habitude, voire une norme. C'est ce qui se passera cet été, puisque le Gouvernement vous proposera un collectif budgétaire consacré à la réforme fiscale et contenant des ajustements de crédits, ainsi qu'un collectif social concernant la question du financement de la répartition de la valeur dans les entreprises.

Je voudrais rappeler que plusieurs de nos partenaires européens se sont dotés de telles règles d'équilibre des finances publiques ou ont annoncé leur intention de modifier leur droit national en ce sens. La nécessité d'une convergence économique dans la zone euro nous invite, tout naturellement, et sans sectarisme, à progresser rapidement dans cette voie.

L'intention du Gouvernement est donc de mettre en oeuvre cette réforme dès que possible. Aussi, si la loi constitutionnelle est adoptée cet été, le projet de loi organique relative aux lois-cadres pourrait être discuté dès la prochaine session parlementaire, à l'automne 2011. Le premier projet de loi-cadre pourrait ainsi être déposé dès l'adoption de la loi organique.

Sur un sujet d'une telle importance, qui doit dépasser les clivages politiques et sur lequel nous devrions arriver à un consensus, que ce soit à gauche, au centre ou à droite, chacun aura une responsabilité devant l'histoire.

Je voudrais, pour conclure, m'interroger sur la pertinence d'un argument que j'ai entendu développer par certains d'entre vous, à gauche de cet hémicycle. Vous dites que le Gouvernement utilise en permanence la crise comme un argument un peu facile.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est vrai, monsieur le ministre ! C'est même incontestable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Vous vous drapez, là encore, dans une vertu que vous n'avez pas,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Apprécier la vertu des autres est un exercice risqué, monsieur le ministre !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…en expliquant que la question des déficits structurels domine largement l'impact de cette crise sur nos recettes. Permettez-moi de vous retourner le compliment et de vous poser la question : si la crise n'y est pour rien, pourquoi la Grèce a-t-elle été attaquée ? Pourquoi l'Irlande a-t-elle été secouée ? Pourquoi le Royaume-Uni a-t-il été contraint de prendre le train de mesures que l'on sait ? Pourquoi l'Espagne est-elle dans la même situation ? Et le Portugal ?

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

C'est bien parce que la crise est passée par là. Pourquoi aurait-elle épargné notre pays ? Je vous propose donc de retirer vos lunettes, d'en effacer la buée, de regarder plus lucidement et plus précisément la réalité de l'impact de la crise sur la situation budgétaire. Ce que nous vous proposons n'est pas un tour de passe-passe, c'est un engagement commun touchant aux déficits et qui, devenu constitutionnel, serait partagé par tous. Car, si nous allons jusqu'au bout de votre logique, nous voyons bien qu'il vous faudra assumer le fait que, en votant contre un texte qui vise à maîtriser les finances publiques, vous êtes naturellement, et par déclinaison évidente, favorables à l'aggravation des déficits, à l'aggravation de la baisse des recettes et à l'augmentation des dépenses publiques.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

C'est-à-dire que vous n'avez rien appris et rien oublié, et que vous ne proposez que le statu quo. Nous vous proposons, en vous tendant la main, de vous accompagner sur un chemin plus vertueux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce rappel au règlement tient au déroulement de notre séance. François Baroin se donne de la peine, il s'instaure docteur en vertu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je me demande comment il va graduer son échelle. Se référera-t-il à la littérature du XIXe siècle pour établir son classement, des dames de petite vertu jusqu'aux vieilles prudes dont parlait Victor Hugo ?

Tout à l'heure, il nous a joué l'apaisement : « Nous sommes des frères », semblait-il dire. Mais il y a les faux frères ! Il ne faut pas les oublier, ceux-là ! Vous, vous êtes les frères du grand capital.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Quel est le rapport avec le règlement, cher collègue ? Il paraît très lointain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, vous permettrez qu'il y ait des prolégomènes, des déviations.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Laissez-moi y venir. Je voudrais dire au ministre que son ton patelin, benoît, ne change rien. Il a beau prêcher l'oecuménisme, tout cela n'est pas crédible et il n'arrive pas à dissimuler le fond de l'affaire : il s'agit d'introduire, dans notre loi fondamentale, des contraintes destinées à bâillonner l'expression souveraine du peuple dont nous sommes les représentants.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'appelle, dans le texte du Gouvernement, les articles du projet de loi constitutionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 71 , tendant à introduire un article additionnel avant l'article 1er.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. le ministre veut nous imposer des contraintes, mais il y a d'abord des droits fondamentaux dans ce pays qui a fait la révolution il y a plus de deux siècles. Le Gouvernement cherche à rendre pérenne une politique régressive fondée sur la réduction des dépenses et la baisse de la fiscalité, pour limiter le pouvoir des parlementaires. Le Conseil constitutionnel est composé de membres qui, aussi brillants soient-ils – je pense en particulier à son président –, n'ont pas de souveraineté populaire. Pourtant, il lui incomberait de contrôler le budget voté par les parlementaires alors que lui-même estime qu'il « ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement » sur le montant des autorisations d'engagement et des crédits de paiement votés. On reconnaît bien là le discours de notre ancien président.

Nous ne pouvons laisser faire cela, et il faut garantir des droits sociaux fondamentaux que l'État se doit de prendre en charge. Puisque vous souhaitez changer le texte de la Constitution, nous pensons que cela devrait se matérialiser par la création du concept de « besoins vitaux », qui sont l'eau, la nourriture, le logement, la santé, l'éducation, l'énergie, les transports et les télécommunications, dont aucun citoyen ne saurait être privé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je reconnais bien votre pudibonderie, monsieur de Courson ! (Rires.) « Cachez ce sein que je ne saurais voir ! » Moi, je suis plus libéral que vous.

J'en reviens aux besoins fondamentaux. Ces besoins vitaux sont les stabilisateurs automatiques dont parle Joseph Stiglitz, qui ont permis de réduire l'impact de la crise sur les citoyens, et je propose que cela soit inclus dans la révision constitutionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 71 .

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je suis surpris que la commission émette un avis défavorable. Depuis plusieurs jours, comme tous nos collègues, j'entends un membre du Gouvernement, qui nous distrait toujours beaucoup par ses écrits et ses interventions médiatiques, M. Frédéric Lefebvre, plaider pour la mise en place de ce qu'il appelle le « panier des essentiels ». Avec ce dispositif, ceux de nos concitoyens qui souffrent de la baisse du pouvoir d'achat, malgré les promesses du candidat Sarkozy en 2007, et de la hausse vertigineuse du prix de l'énergie, et qui voient leurs revenus absorbés par leurs dépenses de logement, disposeraient d'une sorte de kit de survie pour les pauvres. Ce panier des pauvres comporterait en effet les éléments de base pour que ceux qui sont frappés par la crise puissent continuer à se nourrir.

La philosophie sous-jacente à la mise en place du « panier des essentiels » me paraît se retrouver dans l'amendement de notre collègue Brard : voilà pourquoi je ne comprends pas que le Gouvernement, représenté par le ministre du budget, se désolidarise de la politique conduite par le secrétaire d'État Frédéric Lefebvre – je ne cite pas l'intitulé de ses attributions, cela serait beaucoup trop long et je dépasserais très largement mon temps de parole. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

N'est-il pas invraisemblable d'oser dire, comme le président de la commission des lois, que la reconnaissance de tels droits n'emporterait aucune conséquence effective ? Reconnaître de tels droits – le droit de se chauffer, le droit à l'éducation, le droit de se soigner –, on voit bien ce que cela entraînerait. Il est d'autant plus important de les reconnaître que, avec le forfait hospitalier, par exemple, vous les avez entamés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. de Courson veut faire figurer la culture parmi les droits fondamentaux. Parlez-en au Président de la République : qu'il la pratique avant qu'elle ne devienne un droit reconnu pour tous, ce que, pour ma part, je souhaite en effet !

Je ne comprends pas la réponse laconique du président de la commission des lois, à moins de penser qu'il est tellement en difficulté qu'il ne veut pas argumenter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

rapporteur. Le préambule de la Constitution de 1946 prévoit le droit à l'emploi : je ne crois pas que le Conseil constitutionnel ait déclaré le chômage contraire à la Constitution. (Rires.) Cela prouve bien le caractère « proclamatoire » de certains amendements qui ne règlent pas les problèmes concrets.

(L'amendement n° 71 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 72 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet amendement est très différent du précédent. Monsieur le ministre, il fut un temps où vous nous renvoyiez souvent, dans nos interventions, à l'Est. Je vous propose maintenant d'aller à l'Ouest, et de vous inspirer des meilleures expériences qui se font ailleurs, et en particulier aux États-Unis.

Le paiement de l'impôt est l'une des expressions de la citoyenneté. Il est inacceptable que des sportifs connus, des chanteurs, de grandes fortunes, qui prétendent représenter la France et en tirent en tous les cas profit, se jouent de nos lois fiscales en partant se domicilier à l'étranger, et participent ainsi à grever les finances publiques, renouant avec l'horrible tradition des Coblençards.

Cet amendement propose d'inscrire en droit français un dispositif existant entre autre aux États-Unis, celui de l'income tax, visant à ce que tous les citoyens français paient une contribution sur les revenus qu'ils ont acquis en France ou à l'étranger, afin d'augmenter les ressources de nos finances publiques, et diminuer l'exil fiscal. Vous savez comment cela fonctionne aux États-Unis : si vous voulez échapper à cette contrainte, vous êtes obligés de renoncer à votre citoyenneté américaine. Que tous ceux qui ont l'honneur et le privilège d'être français acceptent de contribuer, au sens de la Déclaration des droits de l'homme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

rapporteur. Pour établir une contribution des Français à l'étranger, il ne faut pas changer la Constitution, mais remettre en cause les accords proscrivant les doubles impositions signés par la France, qui sont généralement adoptés à l'unanimité par cette assemblée. Cela paraît un tout autre débat. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je suis tout à fait scandalisé par l'amendement de notre collègue. Si nous l'adoptions, nous exonérerions tous les citoyens non français résidant en France. C'est scandaleux, monsieur Brard, c'est à la limite du racisme !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je vois que, dans l'exposé sommaire de l'amendement de M. Brard, il est fait référence à l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme. Je saisis l'occasion pour regretter que M. le ministre n'ait pas répondu à l'une des questions que je lui ai posée dans la discussion générale, et qui concernait les conséquences de la mise en marche de l'usine à gaz qu'il nous propose.

Dans l'articulation entre le programme de stabilité européen, les lois pluriannuelles, les lois-cadres d'équilibre, les lois de finances et les lois de financement qui doivent être conformes, le tout combiné à la règle du monopole, sur laquelle nous reviendrons tout à l'heure, les représentants du peuple se verront privés de marge d'initiative et de marge de décision. Pourtant, la Déclaration des droits de l'homme, référence de base de la Constitution, leur confie le droit de constater « la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ». Je regrette que M. le ministre n'ait pas jugé utile de répondre à la réserve que j'ai formulée : cela me paraît pourtant un point fondamental de notre débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous connaissons bien François Baroin : il a des convictions et, quand il partage les nôtres, il se tait, puisqu'il est membre du Gouvernement. C'est ce qu'il vient de faire.

Monsieur le président, il faut vraiment tout l'aplomb de Charles-Amédée de Courson pour oser dire ce qu'il a dit. Je vous assure que nous regrettons son aïeul, Lepeletier de Saint-Fargeau, qui fut victime du respect de ses convictions, et qui fut assassiné pour cela, ce qui ne risque pas d'arriver à Charles de Courson, évidemment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On ne le lui souhaite évidemment pas, mais M. de Courson est solidaire avec ceux qui trahissent la France, avec les Alain Delon, les Alain Prost, qui veulent gagner et ne jamais donner un sou pour la solidarité, pour payer l'école et la santé. Il faut que les gens le sachent ! Pourquoi ce qui est possible aux États-Unis ne le serait pas ici ?

(L'amendement n° 72 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article 1er.

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur Brard, si vous pouviez vous dispenser de certains propos qui montrent votre méconnaissance volontaire de l'histoire, je vous en serais reconnaissant. Mon grand-père a siégé sur ces bancs. Il est mort pour la France. Il a voté contre les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Alors ne dites pas cela, ou retirez vos propos !

Venons-en à des choses sérieuses : si j'ai demandé à prendre la parole sur l'article 1er, c'est parce que les centristes se battent depuis dix ans pour inscrire la règle d'or dans la Constitution. Le Gouvernement propose une règle d'or atténuée : en effet, ce n'est pas la règle d'or elle-même qui doit figurer dans la Constitution, mais une loi-cadre de programmation visant à revenir vers l'équilibre, sans qu'il soit dit que l'on doit y revenir. Nous aurions préféré quelque chose de plus dur, à l'allemande, mais il s'agit tout de même d'un réel progrès.

Il serait bon que M. le ministre confirme que la loi organique fixera les plafonds de dépenses et les mesures nouvelles concernant les recettes, de façon qu'une politique sérieuse puisse être suivie par les gouvernements, de quelque bord qu'ils soient. Nous affirmons ensemble, depuis des années, que l'on ne peut endetter l'État français pour financer des dépenses de fonctionnement, car c'est conduire le pays au gouffre et mettre en cause le principe même de la démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Nous vivons depuis hier une situation assez étrange. Les instituts de conjoncture économique indiquent les progressions de croissance, les possibilités de l'économie, et chaque année, depuis quelque temps, les budgets présentés par le Gouvernement sont insincères car ils ne tiennent pas du tout compte de ces projections et s'appuient sur des chiffres largement surévalués. La majorité vote ces budgets insincères, certes en renâclant et en essayant de les modifier à la marge, mais elle les vote.

À présent, vous vous demandez comment vous pourriez vous donner bonne conscience. Ce que vous avez pratiqué depuis des années, tout à coup, il faut le bannir, comme si vous perdiez toute confiance dans la capacité qu'ont les parlementaires de rectifier les choses.

Je comprends qu'il soit difficile de prendre des mesures auxquelles votre électorat traditionnel n'est guère favorable. La Cour des comptes vous avait indiqué un certain nombre de pistes simples pour dégager entre 15 et 30 milliards de recettes. Vous ne l'avez pas suivie ou, s'agissant des niches fiscales, vous avez raboté à la marge. De même, pour le bouclier fiscal, dont nous demandons depuis des années la suppression, la pression populaire est passée par là et vous tentez de faire croire que vous le supprimez, mais en redonnant d'une main ce que vous prenez de l'autre, avec l'ISF, et en choisissant le moment opportun, alors que vous nous reprochez de penser au calendrier électoral. Je confirme que nous y pensons.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vergnier

Vous aussi, et vous avez raison d'y penser. Je rappelle simplement que le moment du calendrier électoral, c'est celui des Françaises et des Français, qui se prononceront librement pour les années à venir. Et ils ne seront pas dupes !

Appliqué à la lettre, le principe que vous proposez aujourd'hui conduirait à l'asphyxie complète de l'économie. Que se passera-t-il lors d'un retournement de la conjoncture ? L'alinéa prévoyant que la loi-cadre pourra être révisée chaque année par les assemblées aboutit à changer la Constitution pour faire la même chose qu'aujourd'hui. C'est une réforme pour rien, un affichage de plus.

Cependant, cela s'inscrit dans la même ligne que la modification de notre règlement, celle de la réduction des droits du Parlement. En effet, les modifications fiscales et sociales seront désormais réservées aux seules lois de finances et lois de financement de la sécurité sociale.

À mes yeux, le redressement des comptes publics relève d'une volonté politique – les choses ne s'étaient d'ailleurs pas mal passées jusque-là. Votre projet est un véritable acte de défiance envers les parlementaires. Ce n'est pas en ajoutant à l'arsenal juridique que vous avez créé depuis dix ans que l'on réduira le déficit.

Ironie mise à part, je ne vois pas pourquoi vous voulez modifier l'article 34 de la Constitution, par l'instauration de mécanismes juridiques très complexes, alors que le Gouvernement a constamment violé les règles qu'il avait lui-même édictées.

Je pense que ce projet est non seulement inutile mais, pour chacun d'entre nous, quoi qu'il se passe en 2012, dangereux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

L'article 1er est celui qui introduit dans la Constitution les fameuses lois-cadres d'équilibre des finances publiques, innovation de ce projet de loi.

Si le Gouvernement avait choisi d'appeler ces textes « lois-cadres des finances publiques », pourquoi pas, même si les lois pluriannuelles remplissent déjà cet office ? Mais l'emploi du terme « équilibre » relève quasiment de la publicité mensongère, puisque rien n'indique que ces lois-cadres prévoiront l'équilibre des finances publiques, c'est-à-dire des recettes et des dépenses.

L'exposé des motifs explique qu'elles préciseront « le montant maximum des dépenses de l'État et de la sécurité sociale », « l'enveloppe des mesures nouvelles relatives aux prélèvements obligatoires », mais il n'est prévu à aucun moment que ces documents soient en équilibre. Ils prévoiront d'ailleurs bien un déficit et seulement – comme vous l'avez fait pour les lois de financement de la sécurité sociale à une certaine époque – la perspective d'un retour, un jour, à l'équilibre. Nous savons ce qu'il en est de la ligne d'horizon, qui recule au fur et à mesure que l'on avance ! Le terme d'« équilibre » est employé de façon abusive.

Par ailleurs, je crois qu'il eût été de bonne gestion que le Gouvernement nous « présentât », comme dirait notre ami Jean-Pierre Brard (Sourires), l'ébauche, au moins, d'un projet de loi organique, pour que nous sachions ce qu'il entend y mettre. Soumettre à débat la création d'une loi organique sans dire ce que l'on compte mettre dedans, cela revient à demander un chèque en blanc.

Enfin, je ne peux m'empêcher de relever une expression particulièrement savoureuse de l'exposé des motifs, dans le passage évoquant ce que pourraient contenir ces fameuses lois-cadres. Vous prévoyez une fongibilité entre plafonds de dépense et mesures nouvelles. Et le texte de préciser : « Les autres dispositions auront un caractère programmatique, constituant un engagement politique ne liant pas, juridiquement, le législateur financier ordinaire. » De sorte qu'il y aurait, d'un côté, des dispositions constituant un engagement juridique opposable et, de l'autre, des dispositions à caractère politique qui ne lieraient pas, ne créeraient aucune obligation. Cela en dit long sur votre conception du terme « politique » !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je profiterai de mon intervention sur cet article pour répondre à M. Baroin.

Le débat a un caractère assez surréaliste : la majorité qui nous propose d'inscrire dans le marbre de la Constitution la réduction des déficits publics, par le biais d'une loi-cadre qui s'imposerait aux lois de finances initiales, est celle qui, en dix ans, aura doublé la dette de notre pays, aura été sept années en déficit excessif et aura toujours dépassé le seuil de 60 % de dette par rapport au PIB. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.) La gauche, à la fin du gouvernement Juppé, avait trouvé la dette au-delà de 60 % et l'avait ramenée à 58 %.

Le présent exercice n'est pas du tout une règle d'or comme celle dont rêve M. de Courson, qui plaide depuis longtemps pour une telle règle, qui ne permettrait de s'endetter que pour investir. Ce n'est pas du tout ce que prévoit ce projet et je ne comprends même pas que M. de Courson puisse le voter. Il s'agit simplement d'une loi de programmation qui s'impose aux lois de finances.

À quelles lois de finances, d'ailleurs : aux lois de finances initiales, aux lois de règlement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

C'est une vraie question. Je ferai d'ailleurs remarquer que, depuis 2002, aucune programmation n'a été respectée, ni dans une loi de finances initiale ni – encore moins ! – dans une loi de règlement, sauf en 2010.

J'ai posé en commission une question que je souhaite poser de nouveau, au ministre ou au rapporteur général. Que fera le Conseil constitutionnel quand une loi de règlement ne sera pas conforme à une loi de programmation ? Il n'appartient pas à ses missions de s'exprimer sur une loi de finances publiques. La plupart du temps, il refuse – et c'est bien compréhensible – de s'exprimer sur la validité des hypothèses économiques ou sur la sincérité des comptes. Entendez-vous transformer le Conseil constitutionnel en une Cour des comptes bis ?

Nous aimerions comprendre un peu ce que vous êtes en train de faire. Nous avons le sentiment qu'il s'agit d'une opération de communication, d'une opération purement politique, car nous ne voyons pas où vous voulez en venir avec cette règle.

Quant au monopole des lois de finances, nous voyons bien que cela limiterait fortement les droits du Parlement. Or, comme l'a fort bien dit M. Warsmann, 80 % des dérives budgétaires sont du fait du Gouvernement…

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

C'est cela, merci, monsieur le président de la commission des lois : 85 % sont du fait du Gouvernement car elles apparaissent dans les lois de finances initiales ou les lois de financement de la sécurité sociale. Quant aux 15 % restants, il s'agit surtout d'amendements gouvernementaux. Ce n'est donc pas le Parlement qui est responsable des dérives financières, mais le Gouvernement.

Cela prouve bien que la réduction des déficits est une question de volonté politique, et non de règle.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 42 et 60 .

La parole est à M. Pierre-Alain Muet, pour soutenir l'amendement n° 42 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Il s'agit d'un amendement de suppression de l'article 1er.

Toutefois, j'aimerais que quelqu'un réponde à ma question, s'agissant des lois de règlement. Nous débattons sans savoir où nous allons. Peut-être M. de Courson répondra-t-il ? En tout cas, je n'ai jamais entendu le ministre sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à Mme Martine Billard, pour soutenir l'amendement n° 60 .

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le ministre, dans votre réponse à la discussion générale, vous avez affirmé ne pas comprendre notre opposition, le projet se bornant, selon vous, à inscrire une règle dans la Constitution. Comme si la Constitution était quelque chose d'anecdotique ! C'est justement la raison de notre désaccord : nous ne voulons pas de cette inscription dans la Constitution.

L'article 1er crée le monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale sur les impositions de toute nature et sur les principes fondamentaux concernant les ressources la sécurité sociale. Cela signifie – cela a été tout le débat en commission des finances et en commission des affaires sociales – que le Parlement ne peut quasiment plus légiférer !

Ainsi, on ne peut plus voter une loi de programmation, qui a des conséquences financières. Pour la partie financière, il faudra attendre le débat budgétaire.

Votre loi sur les retraites a été discutée en septembre, juste avant le débat budgétaire. Avec la présente réforme, vous n'auriez jamais pu la présenter en janvier, par exemple, car la partie financière n'aurait pas été applicable. Allez-vous concentrer toutes les lois ayant des conséquences financières sur le mois de septembre, pour que les volets financiers, les volets fiscaux, les volets relatifs aux cotisations soient transférés dans les lois de finances et de financement, à l'automne ?

L'opposition a déjà peu de moyens pour s'exprimer sur les volets financiers, en raison d'une application de plus en plus dure de l'article 40. Pour les amendements de la majorité, le Gouvernement peut toujours lever le gage, ce qu'il a constamment fait pour les propositions profitant à l'électorat de la majorité.

La réforme de la garde à vue – autre exemple – a elle aussi des conséquences sur les finances, avec le problème de la rémunération des avocats assurant les gardes à vue. Toutes les lois, ou du moins une immense majorité d'entre elles, ont des conséquences financières.

Vous indiquez que vous multiplierez les lois de finances rectificatives. À quoi bon ? Gardons le système actuel. La question de l'équilibre budgétaire et de la dette, qu'il ne convient pas de creuser inutilement mais qui peut être pertinente dans certaines situations – parce qu'il y a un besoin de relance ou parce que la dette permettrait tels ou tels investissements –, c'est affaire de volonté politique. Comme cela a été rappelé à de nombreuses reprises hier, ce sont les gouvernements de droite qui ont le plus creusé la dette dans ce pays, et pas du tout les gouvernements de gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Un mot pour terminer. Aujourd'hui, dans notre assemblée, le budget est de moins en moins examiné en séance publique et de plus en plus en commission, avec peu de temps pour travailler. Cela veut dire que les débats budgétaires de la République se dérouleront dans une indifférence assez générale. Je pense que ce sera très mauvais pour la démocratie !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Monsieur Pierre-Alain Muet, il n'est pas question de permettre de censurer une loi de règlement pour non-respect d'une loi-cadre. Cela n'aurait aucun sens de censurer une loi de constatation. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Je partage bien sûr l'avis du président de la commission des lois sur la nature de la loi de règlement. Monsieur Muet, décliner sur le même plan la comptabilité publique et l'application de la norme M14 pour les collectivités locales, cela revient à confondre le compte administratif et le compte de gestion.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Peut-on contester un compte de gestion, c'est-à-dire la constatation de faits ? Vous faites exactement la même confusion dans votre positionnement politique. Vous dites, avec Mme Billard, que c'est la droite qui, aux affaires, a creusé le plus les déficits.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Dans ce cas, que diriez-vous de Gordon Brown et de Tony Blair ? Que c'est un gouvernement de gauche qui a causé l'effondrement des finances publiques de la Grande-Bretagne et a amené à prendre des mesures impopulaires ? (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.) Que dites-vous du gouvernement de M. Zapatero, de vos amis socialistes au pouvoir en Espagne, qui ont pourtant pris les mesures les plus difficiles, en réduisant le traitement des fonctionnaires et en effectuant des coupes drastiques dans les finances publiques ? Et que pensez-vous de M. Sócrates, qui n'a plus de majorité et expédie aujourd'hui les affaires courantes en se félicitant du soutien de l'Union européenne ? (Mêmes mouvements.) Je vous renvoie donc le compliment. Soyez cohérent et sortez de la confusion : soit la crise a eu un impact, y compris pour vos amis aux responsabilités en Europe, et, dans ce cas, accompagnez le mouvement européen de mise en place d'une règle d'or dans l'ensemble des lois fondamentales des pays membres de l'Union et soutenez le Gouvernement ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Vous parlez comme s'il n'y avait pas de déficit avant la crise !

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…soit vous assumez de creuser les déficits, ce qui est un choix politique, et je vous donne rendez-vous dans douze mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

M. Muet soulève une vraie question : le statut des lois de règlement. Celles-ci constituent une catégorie des lois de finances, mais quelle serait la portée d'un rejet ou d'une censure d'une loi de règlement ? Vous êtes-vous déjà posé la question, monsieur Muet ? Il n'y aurait qu'une seule conséquence, purement symbolique : le déficit ne pourrait pas être reporté dans le déficit général de l'État. Est-ce si grave ? C'est arrivé une fois dans l'histoire de la République, au XIXe siècle, et cela n'aurait aucune portée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Ce qui n'a aucune portée doit faire plaisir à un centriste ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Bien évidemment, la position du ministre est de bon sens. Cela n'a jamais été fait, mais, si vous et vos collègues voulez, pour vous amuser, déférer une loi de règlement devant le Conseil constitutionnel, pour tel ou tel motif – par exemple pour non-conformité, parce que le déficit serait supérieur à celui qui aurait été programmé –, vous pouvez le faire. Mais le Conseil constitutionnel estimera que c'est nul et non avenu.

J'en viens à l'intervention de notre collègueMartine Billard. Le texte actuel de l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution dispose que les lois de programmation des finances publiques « s'inscrivent dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques ». C'était d'ailleurs une demande des centristes, même si nous voulions aller plus loin. Il y a une différence entre cette disposition et le texte qui nous est proposé : une fois que la majorité aura voté ces nouvelles lois de programmation, les lois-cadres s'imposeront aux lois de finances. Pour modifier les lois de finances, il faudra donc, au préalable, modifier les lois-cadres. L'intérêt d'une telle mesure, c'est qu'elle va obliger les parlementaires à adopter une vision pluriannuelle et à en finir avec cette politique à la petite semaine qui considère qu'il n'est pas grave de relâcher un peu la bride dans tel ou tel texte : quand on fait le total des sommes ainsi dépensées, on constate que le pays est mené à la ruine. C'est donc tout de même un progrès.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je n'ignore pas qu'une loi de règlement constate, mais, quand on examine la dérive des déficits, on constate qu'elle n'est presque jamais due à la loi de finances initiale, mais à son application, validée par la loi de règlement. Vous inventez donc une usine à gaz pour faire en sorte que la loi de finances initiale respecte une loi de programmation, alors que toute la dérive des déficits se produit au cours du passage de la loi de finances initiale à la loi de règlement. C'est une façon de reconnaître que ce dont nous discutons ici ne sert à rien ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Par ailleurs, vous avez dit que j'ignorais l'existence de la crise. Non, je ne l'ignore pas, et je m'appuie sur les chiffres de Bercy, présentés lundi par vous-même et débattu dans cet hémicycle : déficit de 7 % en 2006, dont un déficit structurel de 5,1 %, c'est-à-dire le déficit qu'aurait connu la France si la croissance potentielle s'était réalisée, s'il n'y avait pas eu la crise. Je n'ai donc rien à changer aux propos que j'ai tenus : s'il n'y avait pas eu la crise, votre majorité aurait tout de même été cette année en déficit excessif. Votre projet de loi est une pure opération politique, une pure manipulation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas nous accuser, ni Jean-Pierre Brard ni moi-même, d'être responsables des politiques menées par les partis socialistes dans les autres pays. Quel que soit le travail en commun que nous menons avec les socialistes, nous avons des désaccords sur un certain nombre de sujets de politique économique. (« Ah ! » sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Rappelez-le plus souvent !

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Et puis, surtout, nous sommes en France. Je vous rappelle qu'il n'y avait pas de déficit en Irlande, et qu'elle a pourtant été frappée par la crise. Quelle est l'origine de la crise ? C'est un vrai sujet de débat. En France, la cause du déficit n'est pas à rechercher dans l'augmentation monstrueuse des dépenses, mais dans la diminution des recettes, diminution que votre majorité a orchestrée depuis 2002. Vous avez multiplié les cadeaux fiscaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Voilà ce qui explique la crise actuelle. La part des recettes par rapport au PIB a diminué de sept points entre 1981 et 2009. C'est cette chute des recettes qui explique les difficultés de nos finances publiques. Nous, au parti de gauche et au front de gauche, nous savons comment retrouver les moyens d'une autre politique, avec une réforme fiscale de fond dès 2012. C'est la différence entre vous et nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est clair ! Très bien !

(Les amendements identiques nos 42 et 60 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de six amendements, nos 1 , 14 , 37 , 43 , 74 et 38 , pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements n° 1 , 14 , 37 , 43 et 74 sont identiques.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 1 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je souhaite que soit adopté l'amendement n° 81 portant article additionnel après l'article 2. En conséquence, je retire l'amendement n° 1 .

(L'amendement n° 1 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Yves Bur, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour soutenir l'amendement n° 14 .

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

La commission a adopté cet amendement, estimant que le choix du monopole conféré aux lois de finances et aux lois de financement de la sécurité sociale pour toute disposition mettant en jeu des recettes fiscales ou sociales mettait à mal les droits du Parlement. L'aménagement des dispositions de l'article 41 de la Constitution, proposé par le président de la commission des lois à l'amendement n° 81 , apporte une réponse qui prend en compte la double exigence du respect des droits du Parlement et de la rigueur financière que nous devons nous imposer. Par conséquent, je proposerai de retirer cet amendement.

Par ailleurs, j'ai indiqué, dans la discussion générale, qu'une autre option avait été défendue par la commission des finances : prévoir des lois de prélèvement obligatoire pour permettre malgré tout au travail parlementaire d'exister en ce domaine en dehors de l'examen des projets de loi de finances et des projets de loi de financement.

Le débat montrera quelle solution sera finalement retenue, mais je note que, pour l'adoption, dans les prochaines semaines, de la prime « dividendes » proposée par le Président de la République, la commission des affaires sociales sera amenée à discuter, pour la première fois depuis 1996, d'une loi de financement rectificative. Il s'agit d'une procédure extrêmement lourde pour une petite modification.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Les 1 000 euros n'atteindront même pas les 1 000 euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il fallait le dire, monsieur Bur : ce ne sera qu'une poignée de cacahuètes !

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Il faut donc absolument que nous ayons la possibilité de légiférer avec souplesse sur les dépenses et sur les recettes. Le moment venu, je retirerai l'amendement qui a été adopté par la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en venons à l'amendement n° 37 .

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, saisie pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Monsieur le président, je défendrai en même temps l'amendement n° 38 , qui fait lui aussi l'objet de la discussion commune.

J'ai du mal à imaginer que nous n'arrivions pas à nous mettre d'accord, mais je crains pourtant que ce ne soit le cas. Il me semble en effet que nous partageons un principe, avons les mêmes souhaits et peut-être même un objectif identique.

Le principe que nous avons en commun, c'est bien évidemment le respect de l'initiative parlementaire, c'est-à-dire du droit pour chaque membre de la représentation nationale d'exercer son mandat. Cela comprend une capacité d'initiative qui n'est pas négociable et qu'il paraît abusif de vouloir supprimer.

Nous pourrions aussi partager le souhait que l'initiative parlementaire soit cohérente et lisible, qu'il s'agisse d'amendements ou de propositions de loi. Or, si la révision constitutionnelle proposée par le Gouvernement est adoptée, chacun voit bien que les initiatives parlementaires comportant des réformes de nature fiscale devront faire l'objet d'un second texte, examiné à un autre moment. La cohérence et la lisibilité des mesures ainsi proposées dans le cadre d'une initiative parlementaire ne me paraissent donc pas assurées.

Enfin, nous avons probablement en commun un objectif : la maîtrise de la dépense publique. Il ne s'agit pas de respecter un quelconque gold dogma, dont je vois d'ailleurs mal comment on pourrait éventuellement le corriger. Le ministre a repris une argumentation que nous avons souvent développée : avec une dette détenue à plus de 70 % par des investisseurs étrangers, notre pays est arrivé à un taux d'endettement tel qu'on peut craindre que les politiques publiques choisies par nos compatriotes ne puissent être mises en oeuvre parce que la contrainte extérieure ne le permettrait pas. Il convient donc d'assainir nos finances publiques et, pour cela, il faut commencer par éviter de les dégrader davantage. Je vous rappelle, chers collègues, que cette année et l'année prochaine, elles continueront à se dégrader puisque, dans le meilleur des cas, le reflux n'interviendrait qu'à partir de 2013.

Dès lors que nous avons un principe commun – l'initiative parlementaire –, un souhait que je crois acceptable par tous – qu'elle soit lisible et cohérente – et un objectif partagé, à savoir l'assainissement de nos finances publiques, puisque la souveraineté nationale est à ce prix, je vois mal comment la solution proposée par le Gouvernement pourrait être préférée à celle proposée par des parlementaires en vertu de leur droit d'initiative.

Je propose donc, à l'amendement n° 37 , la suppression du monopole tel qu'envisagé par le Gouvernement.

Dans l'amendement n° 38 , je suggère que nous retrouvions de la cohérence en ne prévoyant l'activation de dispositions fiscales que dans le cadre de lois de finances et l'activation de mesures sociales que dans le cadre de lois de financement de la sécurité sociale. Une double cohérence serait ainsi respectée.

La première, qui n'est pas contestable, c'est que le Parlement aurait ainsi une vision complète de l'ensemble des dispositions fiscales, recettes ou dépenses, dont le principe aurait été voté. En fin d'année, les comptes pourraient être faits : comment mieux responsabiliser chacun qu'en l'amenant à faire des additions pour mieux savoir s'il convient de diminuer l'endettement du pays, de le contenir ou, le cas échéant, de l'aggraver. La fin de l'année serait donc l'occasion d'une mise en cohérence globale des dispositions fiscales. Celles-ci ne seraient applicables l'année suivante qu'après avoir été confirmées en loi de finances ou en loi de financement. Une telle cohérence est souhaitable.

En outre, l'initiative parlementaire retrouverait sa cohérence puisque les dispositions votées dans ce cadre seraient reprises dans les lois de finances et les lois de financement, et activées par le Parlement en fin d'année ou à l'occasion de lois de finances rectificatives ou de ces lois de financement de la sécurité sociales rectificatives auxquelles il vient d'être fait allusion à propos de ce que l'on appelle la « prime de 1 000 euros », qui sera l'objet d'un texte que vous qualifiez, sans doute avec justesse, d'assez lourd.

Dans le cadre de l'initiative parlementaire et tant que celle-ci est possible, l'amendement n° 38 propose de préserver cette double cohérence : celle de l'initiative parlementaire dans son ensemble – à telle disposition correspond tel moyen de financement – et la cohérence budgétaire et financière en fin d'année consistant à faire le compte des dépenses et des recettes afin de savoir ce qu'est réellement le choix du Parlement, plutôt que de lui voir faire des choix sectoriels, fragmentés, tels que la baisse de la TVA dans la restauration.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre l'amendement n° 43 .

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Nous débattons d'un point central de ce texte touchant aux droits du Parlement.

Monsieur le ministre, de nombreux leviers vous permettent déjà de jouer sur les droits du Parlement. Avec la Gouvernement, vous êtes maître de l'ordre du jour, à quelques exceptions près. Vous n'aviez pas encore la maîtrise du temps, mais votre Gouvernement a fait modifier le règlement afin de limiter le temps de parole des parlementaires. Si cela ne suffisait pas, l'article 40 permet de limiter considérablement le droit d'amendement ou de proposition des parlementaires, même s'il s'exerce sous la haute autorité du président de la commission des finances

De plus, vous avez le droit de demander une seconde délibération. Disons-le très amicalement : je vous en veux pour cela, monsieur le ministre. Ce droit, vous en avez usé et même abusé…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

…nous l'avons constaté peu après votre arrivée dans ce gouvernement.

Le Gouvernement maîtrise vraiment beaucoup de choses par rapport aux parlementaires et cela n'est plus supportable. Vous voulez en rajouter une couche : nous n'aurions même plus la faculté de déposer quelques propositions de lois. Des exemples ont été cités. Prenez celui du coup de pouce au SMIC : une telle mesure n'est pas sans conséquences budgétaires, puisque certaines exonérations sociales pesant sur la loi de financement de la sécurité sociale sont calculées en fonction du SMIC et représentent entre 1 et 1,6 fois son montant.

Tout devient impossible pour les parlementaires. C'est pourquoi nous proposons de supprimer les alinéas 2 à 6 de l'article 1er. Mon collègue Pierre-Alain Muet y reviendra peut-être pour soutenir l'amendement du président Cahuzac.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour défendre l'amendement n° 74 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je tiens tout d'abord à dire à notre collègue M. de Courson que, en aucun cas, je n'ai évoqué son grand-père mais une figure héroïque de la Révolution, Lepeletier de Saint-Fargeau. Certainement notre collègue avait-il la tête et les oreilles ailleurs quand il a entendu des propos que je n'ai pas tenus.

Le présent projet de loi constitutionnel vise à instaurer le monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale pour régir le domaine de la fiscalité et celui des recettes de la sécurité sociale.

La mise en place d'un tel monopole aurait deux graves répercussions. La première conséquence fâcheuse serait de limiter le pouvoir des parlementaires. Comme je le disais hier, nous en revenons au corps législatif bonapartiste. Il ne reste plus qu'à nous donner notre uniforme de décoration pour faire croire que nous jouons un rôle, mais en réalité nous n'aurons plus d'effet sur la construction de la loi. Les parlementaires ne seraient plus à même de voter des textes ayant des conséquences financières ou fiscales en dehors des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.

D'autre part, à l'heure où l'intelligibilité de notre droit est une de nos priorités, une telle mesure nuirait à la cohérence des réformes amorcées par le Parlement. En effet, lors de l'adoption d'une loi, il faudrait opérer une séparation entre les mesures non fiscales et non financières qui iraient dans une loi simple, et inscrire dans une loi de finances ou une loi de financement de la sécurité sociale le volet financier et fiscal. Pour ce qui est du rapport avec les citoyens, je ne vois pas trop où est l'amélioration.

Parce que le monopole porte atteinte à l'initiative parlementaire et à l'intelligibilité de nos lois, et parce qu'aucune modalité d'application de cette disposition n'est jusqu'à présent définie, nous demandons, par le présent amendement, la suppression d'une telle règle.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Je pense que les amendements de nos collègues posent une vraie question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

On ne peut pas dire qu'on a entendu de vraies réponses !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Comment articuler le droit d'initiative parlementaire en matière financière avec le monopole – que nous défendons et que nous soutenons – des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale en matière de recettes ?

Il existe trois solutions. L'une, très mauvaise, consiste à supprimer toutes ces dispositions, comme le proposent plusieurs amendements déposés par la majorité ou l'opposition. Cette solution n'en est pas une, puisqu'elle consiste à maintenir la situation actuelle alors que tout le monde regrette ces multiples lois dans lesquelles on introduit – parfois à l'initiative du Gouvernement – des dispositions qui vont déstabiliser la loi de finances. S'il fallait expliquer comment elles s'intègrent dans une loi de programmation pluriannuelle, le Gouvernement ne serait pas à l'aise pour défendre sa thèse. Il faut donc écarter cette première solution.

La deuxième solution, celle du président de la commission des finances, est astucieuse : on laisse voter des dispositions qui n'entreront en vigueur qu'à la prochaine loi de finances rectificative ou initiale.

Cette solution comporte quand même plusieurs inconvénients. Grosso modo, l'application de toute mesure votée en cours d'année sera reportée au 1er janvier. Alors qu'il peut y avoir des urgences, sans loi de finances rectificative, la mesure ne sera pas applicable au 1er janvier.

Le deuxième inconvénient, plus grave, est d'inciter le Parlement à se dédire : on vote dans un sens, puis on annule les mesures lors de l'examen de la loi de finances. Voyez un peu la situation politique ! On va demander à ceux qui ont voté en faveur de mesures lors de l'examen d'un texte particulier de voter contre ces mêmes dispositifs…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

C'est pourquoi cette idée sympathique, à laquelle plusieurs collègues – dont certains de la majorité – avaient songé ne tient pas la route.

Il reste la seule bonne solution, celle proposée dans l'amendement n° 22 par notre rapporteur général. Cette solution équilibrée consiste à créer une nouvelle catégorie, la loi de prélèvements obligatoires, qui permet le respect de l'initiative parlementaire. Une proposition de loi comportant des dispositions sur les ressources sera scindée en deux textes qui seront discutés en même temps. C'est la seule solution pour résoudre le problème posé.

C'est pourquoi nous voterons contre tous ces amendements pour nous rallier à l'amendement n° 22 de Gilles Carrez, comme nous l'avons annoncé en commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je souhaiterais avoir un débat peut-être un peu plus constructif avec le rapporteur de la commission des lois et le ministre du budget sur cette question essentielle. Nous sommes tous d'accord pour préserver l'initiative parlementaire. Nous souhaitons tous qu'il y ait un peu de cohérence dans ces textes d'initiative parlementaire, qu'il s'agisse d'amendements ou de propositions de loi. Nous pensons tous que les finances publiques doivent faire l'objet de soins attentifs.

La solution que je me permets de proposer répond au souhait du Gouvernement de mettre un frein à la dépense fiscale. D'ailleurs, ce serait encore mieux s'il appliquait ce frein à sa propre action, les statistiques données par le président de la commission des lois sont éloquentes à cet égard. À supposer que ce soit le Parlement qui soit exagérément dépensier, puisque telle est notre hypothèse de travail, alors les solutions qui sont proposées à la place de la proposition gouvernementale me paraissent répondre à ces souhaits.

La solution qui se dessine me semble poser des problèmes supplémentaires. M. Warsmann, en qualité de président de la commission des lois, a proposé des textes de loi d'initiative parlementaire de simplification du droit. La chose ne sera plus possible en matière fiscale ou sociale. Nous ne pourrons plus simplifier si le texte est adopté tel qu'il est aujourd'hui. Est-ce souhaitable ? Pour ma part, je ne le crois pas, ou alors il faudrait a posteriori condamner l'action de simplification du droit. Je ne vois pas au nom de quoi cette action de simplification ne s'exercerait qu'en matière juridique et pas en matière sociale ou fiscale.

La distribution d'une réforme en plusieurs textes – choix privilégié par notre collègue Charles de Courson – ne conduirait pas à une particulière simplification du travail parlementaire. Il est évidemment possible d'étudier deux textes au lieu d'un. Je ne prétends pas que c'est au-delà des capacités de travail des parlementaires, mais cela ne relève pas d'une simplification aboutie de notre travail, contrairement à la solution que je crois pouvoir continuer à vous suggérer.

Enfin, toute initiative d'une proposition ou d'un amendement relatifs aux cotisations sociales, en dehors d'un PLFSS, devient totalement impossible. Je ne crois pas que cette formidable rigidité soit nécessaire à la maîtrise de la dépense publique, notamment de la dépense fiscale, souhaitée probablement par une majorité d'entre nous.

Autant je peux comprendre les objectifs, autant je conteste les moyens privilégiés par le Gouvernement. Si un compromis doit être trouvé, et si l'amendement que je propose n'était pas adopté par notre assemblée, alors, à titre personnel, je suggérerais d'adopter la solution préconisée par Gilles Carrez, c'est-à-dire des lois de prélèvements obligatoires. Le travail parlementaire s'en trouvera complexifié, mais, au moins, nous préserverons l'initiative parlementaire et sa cohérence s'agissant des mesures proposées et de leur financement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Le président Warsmann l'a rappelé : 85 % de la dépense résulte des lois de finances ou de financement de la sécurité sociale ; pour le reste, les déficits sont essentiellement à l'initiative du Gouvernement. Ayant ces chiffres en tête, on se dit qu'il n'y a vraiment rien à changer dans notre règle actuelle. L'article 40 est suffisamment important pour limiter la dérive. Par conséquent, je ne vois pas au nom de quoi on veut imposer le monopole des lois de finances ou des lois de financement.

Si cette voie doit être choisie, la proposition du président de la commission des finances présente au moins le mérite de conserver un peu de cohérence au texte en discussion.

Souvenez-vous, le débat sur les retraites a été tronqué puisqu'une réforme des retraites implique naturellement des financements. Il s'agit de tout un ensemble de réformes et pas seulement de moyens financiers, mais, lorsque l'on discute d'un texte, il est important d'en avoir une vision d'ensemble. Avec le monopole absolu, nous allons la perdre complètement : on nous expliquera que le détail sera dans la loi de finances – c'est ce qui se fait en partie, par anticipation en quelque sorte. Nous ne pourrons pas avoir un débat d'ensemble sur une réforme.

La proposition du président de la commission des finances permet au moins de garder à un texte sa cohérence d'ensemble et de valider les opérations financières dans une loi spécifique présentant l'avantage d'être une loi de financement et permettant d'avoir aussi une vision globale.

Cela étant, cela complique énormément le débat parlementaire et cela limite beaucoup l'initiative parlementaire pour des résultats qui, en réalité, seront complètement dérisoires en matière de réduction des déficits.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-huit heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Christian Eckert, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Sans en faire un fromage, je remarque que la suspension de séance, annoncée d'un quart d'heure, a duré une demi-heure. J'espère que vous ferez preuve de la même clémence, monsieur le président, quand l'opposition vous demandera une suspension de séance. En général, il ne lui est même pas accordé le temps demandé.

Cela étant, je trouve le procédé un peu discourtois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…qui marche au doigt et à l'oeil. Or, malgré cela, il lui faut se livrer à des conciliabules, comploter au salon Pujol pour se mettre d'accord.

Ne nous dites pas, chers collègues de la majorité, que vous deviez vous concerter avec les centristes puisque vous n'avez pas besoin d'eux pour nous imposer votre volonté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je veux appeler l'attention de nos collègues sur un point, toujours dans un objectif de pédagogie politique.

Le Gouvernement et sa majorité proposent de réviser la Constitution. C'est dire si le texte que nous examinons est important. Or nos amendements, des uns et des autres, n'obtiennent qu'une réponse laconique du président de la commission des lois et qu'une confirmation de cette réponse laconique par le ministre. Le Gouvernement ne veut pas qu'il y ait de débat. Il ne veut pas éclairer l'opinion sur ce qu'il y a véritablement derrière son projet.

Mes propos n'ont pas pour but de convaincre le Gouvernement et sa majorité, qui sont « inconvaincables » ! Ils sont destinés aux personnes qui nous regardent grâce à internet et à la TNT, afin qu'ils comprennent que le Gouvernement et la majorité sont en train de fomenter un coup tordu contre les libertés de la République et contre le modeste pouvoir qu'il reste aux parlementaires de faire la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

C'est plus qu'un coup tordu, c'est un coup de massue !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Avant la suspension de séance, nous examinions les amendements identiques nos 14 , 37 , 43 et 74 et l'amendement n° 38 , pouvant être soumis à une discussion commune.

(Les amendements identiques nos 14 , 37 , 43 et 74 ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous en revenons à l'amendement n° 38 .

La parole est à M. Christian Eckert.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Je voudrais répondre aux arguments qui ont été opposés à cet amendement.

M. de Courson a souligné le risque que le Parlement ne se dédie si on procédait en deux temps. Mais l'amendement n° 22 du rapporteur général, que vous vous apprêtez peut-être à voter, mon cher collègue, présente le même risque puisqu'il prévoit d'étudier deux textes différents. On peut très bien imaginer que le premier soit adopté et que les lois de finances et de financement de la sécurité sociale auxquelles vous voulez donner la préséance en matière de prélèvements obligatoires ne le soient pas. Donc, votre argument ne tient pas.

Par ailleurs, je vous mets en garde, chers collègues de la majorité, sur le fait que les dispositions que vous vous apprêtez à prendre empêcheraient aussi l'adoption de tout amendement et de toute proposition de loi prévoyant des recettes supplémentaires. Si on vous proposait, par exemple, de supprimer le bouclier fiscal, vous pourriez nous répondre que ce n'est pas possible parce que cela aurait des conséquences financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

On pense généralement que les modifications de dispositions fiscales et sociales entraînent nécessairement un alourdissement de charges. Elles peuvent aussi avoir pour but de générer des recettes.

(L'amendement n° 38 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 67 rectifié .

Défendez-vous cet amendement en même temps que le suivant, monsieur Brard ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non, monsieur le président. Même en défendant nos amendements un par un, nous ne trouvons pas d'oreilles attentives. Si j'en faisais un lot, j'entretiendrais la confusion dans les esprits de nos collègues de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet amendement propose, dans la droite ligne de celui de M. Warsmann, de supprimer les dispositions créant un monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale en matière de prélèvements obligatoires. Mais alors que le président-rapporteur de la commission des lois juge ces dispositions simplement inutiles puisque les lois-cadres fixeront un plancher de recettes, nous les considérons comme dangereuses.

Nous estimons en effet qu'un tel monopole viderait un peu plus le travail parlementaire de toute pertinence, en le limitant à l'exercice de fonctions tribuniciennes, au vote de résolutions et – pourquoi pas ? – de simples voeux que nous déposerions aux pieds du Président de la République. Nous ne débattrions plus que de projets de loi ou de propositions amputés de leur volet financier, vidés de leur substance.

C'est inadmissible sur le plan des principes car ce monopole porterait atteinte aux droits du Parlement. Il aurait en outre des conséquences désastreuses sur le plan de la cohérence des réformes entreprises, comme plusieurs collègues l'ont déjà souligné.

En proclamant ce monopole, vous ne voulez, en réalité, qu'encadrer, brider davantage les parlementaires, de manière encore plus stricte que ne le fait déjà l'article 40, comme l'a fait remarquer le président Cahuzac, afin de contraindre le Parlement à n'être plus que la chambre d'enregistrement de mesures d'austérité.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Je voudrais simplement prendre date.

Le monopole que vous proposez, monsieur le ministre et mes chers collègues de l'UMP, aura une conséquence très simple dans notre assemblée : la disparition progressive, dans un premier temps, de six commissions permanentes sur huit, pour aboutir, dans un second temps, à la présence d'une seule commission permanente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

À l'évidence, les débats dans les commissions des affaires économiques, des affaires culturelles, de la défense, des affaires étrangères, du développement durable et des lois n'auront plus aucun intérêt. On ne pourra plus examiner de dispositions législatives ayant des répercussions fiscales, budgétaires ou sociales de quelque nature que ce soit. Dans ces six commissions, les débats se réduiront à d'aimables conversations, voire à de stimulants colloques. Mais ils n'intéresseront rigoureusement personne puisque rien ne se passera.

Dans un second temps, selon un mouvement que l'on voit bien, la commission des affaires sociales sera absorbée par la commission des finances puisque la consolidation des lois de financement de la sécurité sociale et des lois de finances se produira naturellement.

Il n'y aura plus qu'une commission dans cette assemblée : celle des finances. Et les autres regarderont, à la télévision, les débats de ladite commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

J'ai déjà dénoncé le fait que nous n'obtenions pas de réponse à nos amendements. Qu'est-il en effet répondu à l'amendement que je viens de défendre par le président de la commission des lois ? « Avis défavorable » ! Que répond M. François Baroin ? « Même avis » !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il y a, dans les tribunes, des adultes et des élèves. Et bientôt se tiendra le Parlement des enfants, au cours duquel ils présenteront des propositions de loi dont l'une deviendra effectivement loi.

Je me mets à la place de ces enfants. Imaginons que le maître, dans sa classe, réponde aux propositions qui lui sont faites « défavorable », « incapables », « bons à rien » !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il faut, au moins, expliquer ! Mais, quand on n'a pas d'arguments et encore moins de conviction, on n'explique évidemment pas !

Si le ministre et le président de la commission des lois veulent encore un peu plus économiser leur énergie, je leur suggère de ne plus dire « défavorable » et de se borner à faire un signe de tête indiquant qu'ils acceptent ou refusent l'amendement. Cela donnera la mesure exacte de la considération qu'ils ont pour le Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je ne voulais pas être désagréable avec mon collègue Brard. Mais s'il préfère que je lui explique ma position, je lui ferai remarquer qu'il ne supprime pas le bon alinéa pour atteindre le but qui est le sien : supprimer le monopole.

Si vous préférez, monsieur Brard, que je vous réponde, je le fais : je crains qu'il n'y ait une erreur dans la manière dont vous avez rédigé votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. le président de la commission des lois fait des progrès !

(L'amendement n° 67 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 73 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Si le président de la commission des lois était coopératif,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…il aurait pu sous-amender mon amendement, qu'il trouve mal formulé.

Quand on sait le temps qu'il consacre à ses activités de député – ce qui est tout à son honneur –, nul doute qu'il aurait pu faire oeuvre utile. Mais il ne l'a pas fait car il ne veut pas s'engager dans le débat, tellement le projet de loi gouvernemental est pervers.

Le système fiscal français – les Français qui se lèvent tôt et travaillent dur le savent – s'avère injuste, non parce qu'il faudrait verser des larmes de crocodile sur les fins de mois difficiles des assujettis à l'impôt sur la fortune, mais parce que notre fiscalité est de plus en plus proportionnelle et de moins en moins progressive.

Cette proportionnalité, que l'on retrouve principalement au travers de la TVA ou de la CSG, fait peser le financement des ressources publiques plus lourdement sur le dos des plus pauvres ou de la classe moyenne que sur celui des plus riches. Une baguette de pain ne coûte pas plus cher pour mamie Liliane que pour l'ouvrier qui habite une cité HLM de Montreuil. Pourtant, leurs revenus ne sont pas les mêmes. Vous voyez bien que votre système, messieurs de la majorité, est complètement injuste.

C'est pour lutter contre cette injustice manifeste tendant à la proportionnalité de l'impôt que l'amendement qui vous est proposé vise à écrire dans notre loi fondamentale que la politique fiscale devra favoriser la progressivité de l'impôt.

Comme il y a des enfants dans les tribunes, je ferai à nouveau oeuvre pédagogique en précisant la différence entre progressif et proportionnel. Progressif signifie que, plus on a de sous, tellement on est riche, et plus on peut donner pour ceux qui ont besoin.

Votre gouvernement refuse de faire cela. Avec lui, plus on est riche et moins on contribue, sa politique étant l'égoïsme constitutionnalisé !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je répondrai à M. Brard qu'il serait plus convaincant si les gouvernements qu'il a soutenus avaient modifié le taux de TVA sur le pain, ce qu'ils n'ont pas fait. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Carayon

Vous faites partie des affameurs, monsieur Brard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Par ailleurs, la jurisprudence du Conseil constitutionnel a reconnu le caractère progressif du montant de l'imposition globale de l'IRPP. C'est un principe, notamment pour la CSG, dont le Conseil constitutionnel vérifie le respect.

Avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Défavorable.

(L'amendement n° 73 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 75 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est vraiment à désespérer ! Heureusement que nous sommes habités par la conviction car nous n'avons jamais de réponse convaincante, nous n'avons jamais de vrai débat avec nos collègues de l'UMP, pour lesquels j'ai beaucoup de compassion puisqu'ils sont obligés d'être vissés à leur fauteuil sans jamais pouvoir prendre la parole, sauf à se faire réprimander ensuite.

L'amendement qui vous est proposé est un amendement de raison. Il s'agit, ni plus ni moins, de plafonner les montants des salaires dans un rapport d'une à vingt fois le SMIC.

Ce rapport de 1 à 20 serait valable aussi bien pour les patrons des entreprises publiques que pour ceux des entreprises privées. Il faut veiller à ne pas faire de discrimination dès lors qu'on veut limiter le versement de salaires démesurés et garantir une meilleure répartition des richesses.

Il est vrai que les patrons du CAC 40 perçoivent une rémunération nettement supérieure aux 360 000 euros que représentent nos 20 SMIC bruts, puisqu'ils ont, en moyenne, gagné 2,5 millions d'euros chacun cette année.

Je vais vous faire une confidence : l'objectif de cet amendement est justement de rompre avec les fortunes indécentes que se versent les principaux dirigeants du capitalisme français. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ma chère collègue, vous qui haussez les épaules, allez donc dire aux gens modestes de votre circonscription qu'il est légitime que le patron de la Société Générale gagne 5 millions d'euros par an ! J'entends également les dirigeants de GDF Suez – je vous ai dit que j'étais avant-hier à l'assemblée générale des actionnaires – dire qu'ils gagnent, en fin de compte, avec seulement 2 ou 3 millions d'euros par an, moins que leurs compères des autres grands groupes cotés au CAC 40. Trouvez-vous cela normal, vous ? Quelle image donne-t-on à la jeunesse de notre pays ? Celle d'un pays où certains ont l'argent facile tandis que d'autres n'arrivent pas à joindre les deux bouts à la fin du mois !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Nous pourrions tous dénoncer avec des trémolos dans la voix des rémunérations excessives. Néanmoins, ce n'est pas, en France, la Constitution qui fixe les salaires.

La commission émet donc un avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

À l'automne 2008, le Président de la République, dans son fameux discours de Toulon, prononcé dans le cadre d'un meeting de l'UMP, a annoncé qu'il allait « moraliser le capitalisme ».

Très certainement, il n'a pas suivi une formation en alternance. Si tel avait été le cas, il aurait appris non seulement les principes du capitalisme mais aussi à en manipuler les rouages pour essayer, même en restant dans sa logique, de remettre tout cela d'aplomb. Or cela n'a pas été fait.

Le président de la commission nous dit que ce n'est pas dans la Constitution que l'on règle la question. Je le lui demande : pourquoi pas ? Il appartient au législateur de le décider !

Plusieurs députés du groupe UMP. C'est l'Union soviétique !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous savez ce que Montesquieu disait : il ne faut toucher à la loi que d'une main tremblante. En la matière, nous pouvons y toucher d'une main assurée car il s'agit de morale et de justice.

Las, Montesquieu vous fait aujourd'hui frémir. La preuve en est qu'il disparaît l'an prochain des programmes de l'éducation nationale et qu'il ne restera des Lumières que Voltaire – sans doute Zadig et Candide –, Rousseau et Diderot. Le Gouvernement est cohérent : il essaie de lobotomiser les intelligences en même temps qu'il préserve les coffres-forts.

(L'amendement n° 75 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 76 .

Je suppose, monsieur Brard, qu'il est défendu…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ah non, monsieur le président ! Vous n'allez pas, à votre manière, prêter la main à ces turpitudes en essayant de m'empêcher de parler.

Nous devons mettre en place une meilleure répartition des richesses. Pour cela, comme je l'ai proposé, il faut plafonner les revenus annuels de l'épargne à vingt fois le SMIC annuel. Nous sommes très cohérents : les revenus du travail seraient plafonnés et ceux de l'épargne le seraient aussi, sauf ceux qui sont réinvestis dans l'économie, dans l'emploi et dans la recherche, car il n'est pas normal qu'une minorité s'accapare les revenus et n'en fasse pas profiter l'ensemble des Français.

Vous savez ce que disait Anatole France, et vous reconnaîtrez dans ces propos des gens que vous fréquentez régulièrement et qui auraient pu les tenir : « Donner quand on possède, voilà qui est difficile ! » Il faut donc obliger ceux qui possèdent à faire le choix difficile de réinvestir leur argent.

Prenons l'exemple de mamie Liliane. Quand on possède des yachts, une Rolex, l'île…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Non, monsieur de Courson ! C'est qu'on n'a pas vécu d'une façon morale et que l'on s'est enrichi sur le dos de ceux qui travaillent. Mais vous êtes fidèle à la tradition de votre classe !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous demandons donc de limiter à 360 000 euros par an les revenus de l'épargne, plafond calculé en retenant pour le SMIC un montant mensuel de 1 500 euros. Personne n'a besoin de plus que ce plafond, sauf notre économie, et c'est pourquoi nous proposons qu'il ne s'applique pas à ceux qui réinvestissent le produit de leur épargne.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Défavorable.

(L'amendement n° 76 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 77 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

La richesse de la langue française devrait au moins vous permettre de renouveler votre lexique et de trouver des mots qui témoignent de votre culture qui, j'en témoigne, est réelle.

S'il est un domaine où il ne peut y avoir ni fatalité ni résignation, c'est bien celui des licenciements boursiers. Il est inconcevable et inacceptable qu'une entreprise, aussi importante soit-elle, puisse licencier ses salariés pour complaire à ses actionnaires et faire monter son cours en bourse. Une entreprise qui préfère verser des dividendes à ses actionnaires plutôt que développer son outil industriel et investir dans la recherche et le développement n'a pas le droit de licencier impunément !

Le présent amendement vise à supprimer ces injustices et ces politiques iniques de direction d'entreprise en interdisant à toute entreprise qui a hypothéqué son avenir en versant des émoluments somptueux à ses actionnaires lors d'un de ses trois derniers exercices d'adopter un plan de licenciement collectif.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Opposé. (Sourires.)

(L'amendement n° 77 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 78 .

Peut-être nous épargnerez-vous sa présentation, monsieur Brard ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, le terme d'épargne est bien approprié, et si vous réinvestissez votre épargne, anticipant le partage avec tous ceux qui en ont besoin, vous en aurez plus.

L'État a vocation à intervenir partout, monsieur le ministre. Vous vous inscrivez vous-même dans une tradition plutôt interventionniste,…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Ce n'est pas ce qu'on me reproche, habituellement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…même si ce souvenir commence à se faire plus ténu dans votre esprit, comme nous l'avons déjà remarqué depuis que vous avez consenti, certainement pour sauver la France, à intégrer ce gouvernement. Vous êtes en train de perdre votre âme. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Monsieur le ministre, je viens d'entendre quelqu'un, sur les bancs de l'UMP, dire que vous l'aviez déjà perdue auparavant ! Je trouve que c'est très désobligeant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'État a vocation à intervenir partout où l'intérêt général est présent. L'exemple le plus frappant est celui des banques. Ce sont elles les responsables de la crise qui provoque le désastre que nous connaissons. Le Gouvernement, en parfait accord avec son idéologie capitaliste, les a sauvées et, aujourd'hui, elles spéculent sur les dettes souveraines des États européens ; les établissements bancaires français ne sont pas les derniers à le faire. C'est une honte !

Il faut donc nationaliser les principales banques (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC) et créer un pôle financier public pour participer, par le crédit, au développement de l'industrie et aider au financement des TPE et des PME. Cela seul permettra d'éviter les dérives de ces institutions financières.

L'industrie pharmaceutique, notamment les laboratoires Servier, offre un autre exemple de nationalisation possible.

Je sais que « nationalisation », « indépendance nationale » sont pour vous des gros mots et que la seule mention de ces possibilités vous fait frissonner. Eh bien nous, nous sommes fidèles à l'héritage de notre nation.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Hostile. (Sourires.)

(L'amendement n° 78 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 61 .

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Cet amendement a pour objet de supprimer les alinéas 3 et 4 de l'article 1er, qui introduisent le principe de subordination du budget de la sécurité sociale aux lois-cadres. Comme l'indique le rapport Camdessus, « chaque mesure coûteuse serait appréciée non seulement au regard de ses effets sectoriels », c'est-à-dire non seulement au regard de ses effets dans le cadre du PLFSS, « mais également sur le solde des administrations publiques », c'est-à-dire globalement, par rapport à l'ensemble du budget. Finalement, nous nous retrouvons dans une situation où, pour respecter l'équilibre global défini, des efforts pourraient être imposés dans le cadre du PLFSS à la suite de dépenses inscrites dans le PLF qui seraient trop importantes au regard de la loi-cadre. Il n'est plus question des besoins en termes de santé, il ne reste plus qu'une approche purement comptable.

Pourtant, il existe déjà un cadrage financier en matière de dépenses sociales, notre collègue Charles de Courson le rappelait en me répondant. La Constitution impose en effet l'équilibre du PLFSS, mais cette exigence est contournée grâce à la CADES et à la prolongation de sa durée. Or pareil contournement pourrait tout à fait être réitéré. Pourquoi donc inscrire cet équilibre global dans la Constitution ?

En outre, cette vision globale financière est arrêtée alors que la nouvelle loi de santé publique n'a toujours pas été présentée, ce qui contrevient aux engagements pris dans le cadre de la précédente. On ne discute jamais santé publique dans ce Parlement, mais on fait des lois de financement de la sécurité sociale tous les ans, terriblement financières, et les lois-cadres aggraveront encore la situation !

Enfin, le contrôle de l'évolution des dépenses, tant du régime de l'UNEDIC que des complémentaires retraite, entre désormais dans le champ des prérogatives non du Parlement mais, directement, du Gouvernement. C'est donc Bercy qui décidera toujours davantage quelle doit être la politique des complémentaires retraite et celle qu'il faudra suivre en matière de financement des indemnités chômage et de santé. En fait de politique de santé, il ne restera plus, dans ce pays, qu'une politique financière.

(L'amendement n° 61 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 68 rectifié .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 5 à 7 de l'article 1er. La volonté d'inscrire la loi de finances dans un cadre fixé par la Constitution et sanctionné par le Conseil constitutionnel non seulement va au-delà des critères fixés par le pacte de stabilité, qui reconnaît l'existence d'économies nationales, mais porte une atteinte intolérable à ce qui constitue le coeur même de l'activité du Parlement : le vote de la loi de finances. Voter l'impôt et décider de l'affectation des recettes est l'acte politique par excellence, celui qui fonde la légitimité de tout régime parlementaire. Or vous prétendez aujourd'hui dépolitiser la discussion budgétaire et faire en sorte que les choix politiques fondamentaux ne relèvent plus d'une décision démocratique et qu'ils soient préalablement validés par les marchés financiers, car c'est à eux que vous confiez les clés du redressement de notre économie, en oubliant un peu vite que les banques et les marchés ont été à l'origine de la crise dont les peuples paient aujourd'hui la facture.

Depuis trente ans, toute la logique du système capitaliste dénoncée au mois de septembre 2008 par le Président de la République a constitué à rétablir le taux de profit en ne redistribuant les gains de productivité ni aux salariés ni à la collectivité et en versant toujours davantage de dividendes. Aujourd'hui, alors que nous pourrions faire jouer à l'État et aux collectivités le rôle d'investisseurs au bénéfice de l'intérêt général et qu'il est urgent de relever les salaires, vous nous dites que l'heure est à l'austérité.

Au fond, en constitutionnalisant l'interdiction des déficits, vous voulez graver dans le marbre l'un des principes fondateurs d'un système qui a fait naufrage en 2008. Ce n'est pas l'austérité au service des forces du marché qui peut être créatrice de richesses ; pour réduire les déficits, il faut relancer l'économie nationale et la demande intérieure.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Négatif. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je suis d'accord avec le président de la commission des lois, qui a bien compris le sens de notre amendement : c'est en effet la remise en cause des lois-cadres telles qu'elles sont évoquées dans le projet de loi.

Par ailleurs, je remercie le ministre pour la variété de son vocabulaire, mais je lui recommande, pour l'agrément nos débats, d'essayer de former des phrases complètes.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

J'appelle l'attention de l'Assemblée sur le fait que l'obligation de recourir à une loi de finances ou de financement pour adopter des dispositions relatives aux prélèvements obligatoires risque de rigidifier l'organisation du travail législatif et de porter atteinte aux droits du Parlement. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le rapporteur général du budget dans la présentation de son amendement n° 22 . Le président de la commission des lois, lui aussi, vient de dire que cette disposition, qui est au coeur du projet, porte atteinte aux droits du Parlement.

Monsieur le ministre, je ne peux m'empêcher de vous demander où est la cohérence entre ce projet attentatoire et la réforme constitutionnelle de 2008, dont la vocation était précisément de revaloriser le rôle du Parlement. Ne pensez-vous pas que d'une révision constitutionnelle à l'autre la cohérence se perd ?

(L'amendement n° 68 rectifié n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 22 .

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, saisie pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Le souci de la commission des finances se résume à un seul objectif : protéger au mieux le droit d'initiative parlementaire. Tel a été le fil conducteur de ses travaux.

En effet, le monopole conféré aux seules lois de finances et de financement réduit considérablement la marge de manoeuvre des parlementaires. D'abord, les lois de finances et de financement sont exclusivement d'initiative gouvernementale. Ensuite, elles ne peuvent comporter que des mesures financières, et vous savez tous à quel point le Conseil constitutionnel est vigilant pour annuler les rares cavaliers budgétaires qui ont pu passer. Enfin, les lois de finances et de financement sont totalement contraintes dans le temps : il est systématiquement fait recours à la procédure d'urgence et les délais sont extrêmement réduits.

Pour ces raisons, nous avons estimé qu'il fallait tenter de préserver un peu de marge de manoeuvre pour les parlementaires, malgré l'objectif – que nous partageons – de mettre de l'ordre dans nos finances. D'où l'idée d'introduire au sein de ce monopole, à côté de textes qui sont uniquement d'initiative gouvernementale, des lois ordinaires, autrement dit des lois que n'importe lequel d'entre nous peut proposer. Ces lois, que nous appellerions « lois de prélèvements obligatoires », porteraient sur les recettes.

Si l'un d'entre nous, par exemple, souhaite présenter une proposition de loi sur l'amélioration de la gestion de l'eau en France, elle traitera de l'organisation des agences de bassin, de la qualité de l'eau, bref de sujets qui, pour 90 % d'entre eux, ne sont pas d'ordre financier. Mais pour être opérationnel, il faudra peut-être y greffer une petite majoration de la redevance des agences de l'eau. Or, dans le cadre d'un monopole strict des lois de finances et de financement, un parlementaire ne pourra pas présenter une telle proposition.

En revanche, avec la solution proposée par la commission des finances, ce parlementaire pourra présenter sa proposition de loi sur l'amélioration du régime de l'eau et lui adjoindre une proposition de loi de recettes portant sur la petite augmentation de la redevance. Ainsi, il conservera, en toute cohérence, son droit d'initiative.

Comme vous pouvez le constater, nous sommes très scrupuleux. Il est exact que si tout est concentré dans les lois de finances, cela augmente forcément les responsabilités de la commission des finances, puisque c'est elle qui est compétente en la matière. Nous nous sommes donc dit qu'il fallait respirer un peu en dehors des lois de finances et maintenir le droit d'initiative à tous nos collègues. D'où cet amendement qui, certes, peut donner le sentiment d'une certaine complexité…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…car il faut dédoubler le texte et, de ce fait, il y aura deux rapporteurs. Cela étant, je parie sur le bon sens et la qualité du travail des parlementaires que nous sommes. Nous avons toujours été capables de fonctionner en équipe afin que tout chemine sûrement.

Par ailleurs, je rassure le Gouvernement, avec cette proposition d'ouvrir le monopole à des lois ordinaires de recettes, nous gardons, monsieur le ministre, la maîtrise des recettes. Quel est en effet le problème auquel nous sommes confrontés depuis dix ou quinze ans ? On a multiplié les mesures de recettes, que l'on appelle dépenses fiscales et sociales, dans des dizaines de textes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ainsi, lorsque nous faisons une loi de finances, nous nous battons pour gagner 10, 50 ou 100 millions d'euros. Nous y passons quarante jours,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…et ce pour tenter de réduire le déficit. Or, au même moment, une loi sur le tourisme peut, en quelques jours, abaisser la TVA sur la restauration, ce qui constitue un enjeu de 3 milliards d'euros ! Et je ne parle pas de toutes les niches fiscales dispersées dans nombre de textes…

Monsieur le ministre, nous gardons, avec ces lois de recettes, la cohérence que vous souhaitez. Telle est la proposition de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

La commission des lois n'a pas été convaincue par l'argumentation de Gilles Carrez, tout en étant persuadée qu'il existe bien un problème de fond, qu'elle a d'ailleurs elle-même soulevé, comme la commission des finances. En effet, un parlementaire doit pouvoir, demain, déposer une proposition de loi sur un sujet donné, même si elle comprend des dispositions d'ordre fiscal ou portant sur les cotisations sociales. C'est le sens de notre amendement n° 81 , que nous examinerons tout à l'heure.

Si nous n'avons pas été convaincus par le dispositif du rapporteur général, c'est qu'il reviendrait à couper en deux la quasi-totalité des réformes. Chaque fois que nous aurions à discuter d'un sujet dans l'hémicycle, par exemple, d'une réforme sur le logement, il faudrait un premier texte de loi sur toutes les dispositions concernant le logement, avec un rapporteur au fond de la commission des affaires économiques et, au banc, le ministre chargé du logement. Une fois ce premier texte voté, nous passerions, le lendemain ou la semaine suivante, à un deuxième texte sur cette même réforme, mais portant sur les mesures fiscales ou les cotisations sociales, avec le ministre du budget – sauf si l'organisation du Gouvernement changeait et, dans ce cas, il y aurait deux ministres concernés par ce deuxième texte – et avec deux rapporteurs au fond, l'un issu de la commission des finances sur les articles concernant les problèmes fiscaux, l'autre de la commission des affaires sociales sur les articles concernant les cotisations.

Chacun conçoit que cela rendrait plus complexe le travail quotidien du Parlement. Et – oserai-je faire de l'humour ? – cela généraliserait la situation devant laquelle je suis navré que vous vous trouviez, c'est-à-dire avoir devant vous deux rapporteurs sur le même texte en train de vous donner des arguments qui diffèrent ! Si nous adoptions l'amendement de Gilles Carrez, cette situation s'étendrait à l'ensemble des textes puisque nous aurions non seulement des rapporteurs différents, mais aussi des ministres différents ! Cela pose donc vraiment un problème de fond.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Enfin, nous sommes toujours très prudents à la commission des lois s'agissant de l'initiative parlementaire, mais l'objet de ce texte est de mettre en place des lois-cadres. Or l'objectif des lois-cadres, c'est que le Parlement vote pour une durée d'au moins trois ans et pour chaque année un minimum de recettes pour la France et un maximum de dépenses pour la sécurité sociale et pour l'État. Si l'on devait voter des lois de prélèvements obligatoires représentant les demi-réformes de chacune des réformes, vous n'auriez pas, dans ces lois, le chiffrage de chacune des mesures, vous n'auriez pas leur impact sur les pertes de recettes ou l'augmentation des dépenses et vous n'auriez pas un nouveau calcul du solde.

Imaginons à nouveau que nous examinons une proposition de loi sur le logement. Dans la deuxième partie du texte, celle portant sur les mesures fiscales, nous proposons un amortissement sur l'impôt sur le revenu permettant de favoriser les investisseurs privés qui construisent de nouveaux logements. Si nous votons cette mesure dans le cadre d'une loi de prélèvements obligatoires, nous l'autorisons. Si nous la votons dans une loi de finances rectificative, nous l'autorisons aussi mais nous devrons en outre calculer combien elle va coûter pour l'année en cours, si elle entraîne une perte de recettes et si nous respectons le plancher de recettes. À l'inverse, nous devrons calculer, au cas où elle entraîne des dépenses, si elle ne nous fait pas dépasser le plafond de dépenses voté dans la loi-cadre. Et, en l'état actuel de nos finances publiques, nous devrons enfin calculer si elle accroît ou non le déficit de notre pays.

Je me félicite que le ministre ait dit à cette tribune qu'il se ralliait à notre idée ; nous nous sommes en effet battus pour qu'il y ait, dans les lois-cadres, ce minimum de recettes car, comme l'a dit Gilles Carrez, un des problèmes de notre pays depuis dix ans, c'est qu'on a grignoté les recettes par des exonérations en tout genre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je le répète, nous nous sommes battus pour qu'il y ait un minimum de recettes et un plafond de dépenses, et quelques minutes après avoir rejeté les amendements de notre collègue Jean-Pierre Brard visant à mettre par terre les lois-cadres, voici que l'on s'apprête à mettre en place une autoroute de contournement des lois-cadres en autorisant des dépenses fiscales supplémentaires qui ne seraient pas prévues dans le mécanisme !

Ce dispositif nous semble extrêmement lourd en termes de procédure. C'est une usine à gaz pour l'ensemble des textes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Vous êtes dur envers le rapporteur général…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Cet amendement nous a paru également contradictoire avec l'objectif de réforme du Gouvernement.

Enfin, et ce n'est pas le moindre argument, nous pouvons protéger autrement la liberté de déposer une proposition de loi.

Voilà pourquoi, tout en partageant sur le fond nombre de convictions avec Gilles Carrez, nous ne le suivons pas sur cet amendement. Gardons à l'esprit que si ce texte est voté, il s'appliquera. Or nous devons continuer à pouvoir travailler normalement dans cet hémicycle.

Et voilà pourquoi, à mon grand regret, si cet amendement est maintenu, la commission des lois émettra un avis défavorable.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Je veux d'abord, devant la représentation nationale, saluer les efforts louables du rapporteur général pour accompagner ce qu'il défend depuis de nombreuses années à titre personnel,…

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

…c'est-à-dire une meilleure maîtrise du montant de nos recettes et de l'évolution de nos dépenses. Je veux saluer, de ce point de vue, son degré d'implication personnelle à chaque discussion budgétaire.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Saluer plus précisément cet effort louable du rapporteur général qui, souhaitant répondre à un double objectif, celui du Gouvernement d'inscrire dans la Constitution un monopole des dispositions fiscales tout en respectant l'esprit de la révision constitutionnelle de 2008, qui confère plus d'initiative au Parlement, a tenté de proposer une solution : les lois de prélèvements obligatoires.

Cependant, il nous semble que, pour éviter un obstacle, cette mesure risque de se précipiter au moins sur deux autres.

Le premier obstacle auquel se heurterait la loi de prélèvements obligatoires, c'est que, comme l'a très justement dit le président Warsmann, elle affaiblirait le premier dispositif de cette révision constitutionnelle, celui des lois-cadres. Au fond, les lois-cadres se substitueraient dans notre Constitution aux actuelles lois de programmation des finances publiques. Autrement dit, on passerait de l'actuelle faculté de respecter cette trajectoire à une obligation constitutionnelle qui serait opposable par le Conseil constitutionnel à toutes les lois de finances et de financement de la sécurité sociale qui ne respecteraient pas ladite trajectoire.

Deuxième obstacle, cette loi de prélèvements obligatoires est intéressante du côté parlementaire, mais elle prendrait le risque d'échapper à toute initiative de nature parlementaire portée par d'autres commissions que celle des finances. C'est peut-être là la faiblesse du dispositif et c'est l'une des raisons pour lesquelles le Gouvernement s'est plutôt rapproché de la réflexion autour de la modification de l'article 41 de la Constitution, qui confère d'ores et déjà au président de l'assemblée saisie ou au Gouvernement la faculté de juger irrecevable tel ou tel amendement de nature parlementaire s'il est d'ordre réglementaire et non législatif. À tout moment, je me permets de le rappeler, les présidents de l'Assemblée et du Sénat ou le Gouvernement peuvent opposer cette irrecevabilité et, s'ils sont en désaccord, saisir le Conseil constitutionnel pour lui demander de trancher. Il s'agirait donc de compléter le champ de l'article 41 en ajoutant à la protection du domaine réglementaire celle du monopole des lois de finances et de financement de la sécurité sociale.

Nous pensons que le renforcement de l'article 41 de la Constitution et les propositions gouvernementales venant accompagner l'effort, l'engagement et la ténacité du rapporteur général sont mieux à même d'atteindre ce but, que nous partageons tous, qui est de renforcer la loi fondamentale pour atteindre notre objectif de réduction des déficits. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Nous arrivons là à un point nodal, comme nous disions autrefois, de cette discussion. La question est la suivante : veut-on, oui ou non, maintenir la possibilité pour un élu ou un groupe parlementaire de déposer une proposition de réforme en la scindant en deux volets, dont le second serait constitué par une loi d'une nouvelle catégorie : les lois relatives aux prélèvements obligatoires ? Si vous répondez non, vous devez voter contre l'amendement Carrez. Vous ne vous plaindrez pas alors de voir votre droit d'initiative restreint !

Je me permets, au reste, de rappeler que les lois de prélèvements obligatoires proposées par Gilles Carrez se verront appliquer l'article 40 de la Constitution. Ainsi, toute baisse de recettes devra être compensée et le Conseil constitutionnel pourra être saisi pour vérifier si le gage est réel. Je veux ainsi répondre aux collègues de l'opposition qui considèrent que toute loi de finances pourra être votée dans un prétendu respect de la loi-cadre, mais que son exécution donnera lieu à une dérive complète en matière de dépenses ou de recettes. Non, mes chers collègues ! En effet, dans la loi organique figure le principe de sincérité, que le Conseil constitutionnel s'est contenté d'invoquer à plusieurs reprises sans, pour autant, prononcer d'annulation. Sa jurisprudence est, en effet, de tolérer les écarts de quelques centaines de millions.

Je rappelle à ce propos qu'il y a non seulement l'initiative parlementaire – proposition de loi – mais également l'initiative gouvernementale – projet de loi. Ainsi, des mesures d'initiative gouvernementale de réduction des recettes sans compensation, qui auront donc pour conséquence d'augmenter le déficit budgétaire, pourront être considérées par le Conseil constitutionnel comme non conformes à la loi-cadre. Aussi est-il faux d'affirmer, chers collègues de l'opposition, que la loi-cadre ne sert à rien. Elle s'appliquera aux parlementaires tout comme au Gouvernement, qui pourrait être pris de faiblesse sous la pression d'intérêts catégoriels, comme cela arrive parfois même si c'est très rare…

Cette solution imaginative, qui n'était pas évidente à trouver, est, je le pense, équilibrée. Elle protège l'initiative gouvernementale, mais aussi les finances publiques grâce à l'article 40 qui s'appliquera à ces lois de prélèvements obligatoires.

J'en viens maintenant à l'amendement n° 81 du président de la commission des lois, dont on nous dit qu'il résout le problème. En réalité, la mesure proposée durcit, au contraire, le dispositif de contrôle existant dans l'actuelle version de l'article 41. Mais je ne suis pas contre ce renforcement. Je suis à la fois pour l'amendement n° 11 , pour l'amendement n° 22 et pour l'amendement n° 81 . Tout à l'heure, un collègue parlait de bretelles et de ceinture. Je parlerai, quant à moi, de bretelles, ceinture et parachute car, nous le verrons en examinant l'amendement n° 81 , il y a en réalité trois dispositifs.

Au nom de mon groupe, je soutiendrai donc l'amendement n° 22 de notre rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Je m'exprimerai également en faveur de l'amendement du rapporteur général.

L'intervention du ministre après celle du président de la commission des lois a permis d'éclairer le débat. Nous avons le choix entre deux dispositifs, l'un qui est, à mon avis, excessivement sévère à l'égard de l'initiative parlementaire et l'autre qui donne du souffle à l'initiative parlementaire tout en garantissant l'équilibre budgétaire.

Le dispositif proposé dans l'amendement n° 81 , que nous examinerons tout à l'heure, rendrait totalement inopérante toute proposition de loi tendant à modifier l'équilibre des finances publiques, puisque des mesures de cette nature devraient être votées dans une loi de finances ou une loi de financement de la sécurité sociale. Ainsi, la plupart des propositions de loi seraient discutées pour la forme, mais n'auraient strictement aucune chance d'aboutir, car déclarées irrecevables. Quel sens aurait alors l'initiative parlementaire ?

Grâce au découplage proposé par Gilles Carrez – à savoir un texte relatif aux dispositions ordinaires, l'autre aux recettes – l'initiative parlementaire pourra aller jusqu'à son terme au prix, il est vrai, mais c'est inévitable, d'une certaine complexité. Si on ne suit pas le rapporteur général, la plupart de nos propositions de loi seront déclarées irrecevables. La suggestion de Gilles Carrez a le mérite de faire apparaître très clairement ce qui affecte l'équilibre des finances publiques. La deuxième proposition de loi sur les recettes apportera des clarifications en la matière. Le fait que deux commissions soient saisies, voire trois dans certains cas, permettra à chacun de se prononcer et la disposition proposée pourra alors avoir un impact sur l'équilibre des finances publiques.

Charles de Courson a raison de dire qu'en tout état de cause, l'article 40 subsiste. Nous devons également anticiper la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui sanctionnera tout écart par rapport aux lois-cadres, lesquelles auront une autorité supérieure à celle des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.

Si nous voulons maintenir un minimum d'initiative parlementaire, nous devons adopter l'amendement du rapporteur général. Le dispositif proposé est certes contraignant, mais il nous rapproche de l'objectif d'équilibre des finances publiques. C'est la seule proposition qui donne un sens non seulement au travail de la commission des finances et de la commission des affaires sociales, mais à celui de l'ensemble de nos commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je réagirai aux propos que vient de tenir M. Goulard. Le point central est effectivement de savoir s'il y a un droit à l'initiative parlementaire. Quels débats y aura-t-il dans notre hémicycle si les députés savent qu'il n'y a pas de vote possible à la sortie ? Ce sera dramatique et cela tuera, si ce n'est déjà fait, le fonctionnement de notre parlement ! Nous voyons, en effet, ce qui se passe lors des séances d'initiative parlementaire réservées à l'opposition : les votes sont reportés au mardi et ne sont présents dans l'hémicycle que les députés qui défendent leurs propositions de loi, ceux de la majorité jugeant inutile de s'embêter sur les bancs le jeudi puisqu'ils ne voteront que le mardi !

Le président de la commission des lois considère que la proposition du rapporteur général entraînerait la nomination de deux rapporteurs et la présence de deux ministres. Je vous ferai remarquer, monsieur Warsmann, que tel a été le cas de la loi sur les retraites. Je ne vois d'ailleurs pas comment vous pourriez faire autrement, même avec votre proposition ! En effet, que se serait-il passé pour la loi sur les retraites si votre dispositif s'était appliqué ? Les dispositions financières auraient été, certes, intégrées à la loi de finances ou à la loi de financement de la sécurité sociale, mais certaines mesures ne relèvent ni de l'une ni de l'autre. Toute tentative de les y intégrer aurait été sanctionnée par le Conseil constitutionnel, car la Constitution l'interdit. Or nous devons bien en débattre ! Vous dites qu'il est impossible d'avoir d'abord un débat sur le fond, puis un débat sur la partie financière, mais vous proposez qu'il y ait d'abord le débat financier et ensuite le débat sur le fond. Je ne vois pas où est l'amélioration.

Enfin, notre groupe a déposé une proposition de loi relative à la fiscalité écologique consistant à augmenter les recettes. Inscrire la mesure que vous nous suggérez dans la Constitution ne nous permettrait plus de déposer de tels textes. Avouez que c'est absurde !

L'amendement n° 81 de la commission des lois ne règle donc pas le problème. Nous voterons par conséquent celui du rapporteur général, dont ne nous considérons pas qu'il est fantastique, mais qu'il tente d'éviter le pire.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

On mesure, à travers cette discussion, à quel point ce projet de réforme pourra pénaliser l'initiative parlementaire. En effet, comme nombre de nos collègues l'ont souligné, si nous nous en tenons à la rédaction actuelle de l'alinéa 6, il n'y aura pratiquement plus de possibilité d'initiative parlementaire, à moins que le président de la commission des finances, avec l'accord du Gouvernement, ne modifie totalement la lecture de l'article 40 de la Constitution, ce qui serait d'ailleurs de portée limitée.

Je crains malheureusement que la solution proposée par le rapporteur général ne règle pas le problème. En effet, il y aura découplage entre le fond du texte proposé – il a évoqué, par exemple, les agences de l'eau – et les dispositions à caractère fiscal ou financier impliquant souvent le gage. À partir du moment où ces dernières dispositions seront découplées du texte principal, l'article 40, dans sa rédaction actuelle, s'y opposera fatalement. Je crains donc que cela ne résolve absolument pas le problème.

Enfin, Mme Billard a très justement posé la question des cavaliers budgétaires. Là aussi, si les dispositions ayant une incidence budgétaire ne peuvent être examinées que dans le cadre des lois de finances ou de financement de la sécurité sociale, il convient de revoir complètement la doctrine et la jurisprudence sur les cavaliers budgétaires. Cela montre bien à quel point le texte qui nous est proposé n'a pas été sérieusement préparé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jérôme Cahuzac, président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Nous devons revenir à quelques vérités que nous sommes, me semble-t-il, en train d'oublier.

Depuis 1958 et l'instauration du parlementarisme rationalisé, les parlementaires ne sont pas, dans la majorité des cas, les responsables de la dérive des finances publiques. C'était le cas auparavant, ce n'est absolument plus le cas depuis 1958. L'article 40 y a pourvu, qui interdit à un parlementaire d'aggraver la charge publique par des dispositions qu'il pourrait soumettre à l'ensemble de ses collègues. Cette disposition a remarquablement fonctionné et les statistiques de Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois, sont éclairantes : sur 100 euros de dépenses qui pourraient paraître aujourd'hui excessives, 85 le furent à l'initiative du Gouvernement et 15 à l'initiative des parlementaires. Donc, l'encadrement de l'initiative parlementaire en matière de maîtrise de la dépense publique est efficace. La seule perspective qui reste aux parlementaires est de déposer des textes permettant de financer via de nouvelles recettes fiscales soit des mesures budgétairement coûteuses, soit des dépenses fiscales, entraînant donc une diminution de la recette, mais, même dans ce cas, il n'y a pas d'aggravation de la charge publique, étant entendu qu'une diminution de la recette fiscale doit impérativement être gagée.

Le seul objectif reconnu du projet de loi est bien de maîtriser la dépense publique et non d'encadrer davantage l'initiative parlementaire. Permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, que, si fuite il y a eu, elle ne provient pas du Parlement, même si, in fine, ce sont les parlementaires qui ont voté des dispositions peut-être un peu coûteuses pour les finances publiques. Quelles qu'aient été les majorités, ils ne l'ont fait qu'à la demande du gouvernement qu'ils soutenaient et non pas de leur propre initiative.

Je comprends donc mal la discussion que nous avons, qui consiste non pas à mieux encadrer l'initiative gouvernementale afin de rappeler le Gouvernement à certaines règles de finances publiques – et la chose aurait peut-être été utile ces dernières années – mais qui n'a qu'un but : encadrer davantage encore une initiative parlementaire dont nous savons tous qu'elle n'est pas à l'origine, pour l'essentiel, de la dérive des comptes publics.

Le compromis proposé par Gilles Carrez à la commission des finances, avec l'instauration d'une loi de prélèvements obligatoires, miroir de la loi ordinaire, qu'elle soit sur l'eau ou sur d'autres sujets, me semble permettre au Gouvernement de préserver l'esprit du texte qu'il nous présente. Une loi de prélèvements obligatoires devrait être votée pour autoriser des dépenses si celles-ci étaient proposées par des parlementaires, et rien n'interdirait alors, monsieur le président de la commission des lois, d'avoir une vision globale et cohérente de l'ensemble des dépenses jusqu'alors exposées. Votre argument selon lequel il faut nécessairement des collectifs ou des lois de finances initiales pour faire un tel bilan ne convainc pas les parlementaires de la commission des finances, de toutes sensibilités, je peux vous l'assurer. Le bilan serait fait de façon totalement satisfaisante à l'occasion de la discussion des lois de prélèvements obligatoires et votre argument n'est donc absolument pas recevable.

Supposons cependant que le problème soit vraiment d'encadrer l'initiative des parlementaires en faisant semblant de croire que les dérives en matière de finances publiques ne viendraient que de leurs bancs et examinons la proposition du président de la commission des lois, qui consiste à s'appuyer sur l'article 41. Mesurons-en bien les conséquences ! Cela signifie que, certes, un amendement ou une proposition de loi coûteux sur le plan fiscal pourraient être imprimés et déposés, mais ils ne pourraient certainement pas être examinés et discutés, et en aucun cas votés.

La seule issue qui nous est proposée gentiment, avec l'approbation du Gouvernement, si je comprends bien, est purement formelle. Si cet amendement est rejeté et si celui de la commission des lois est adopté, on ne reconnaîtrait qu'un seul droit aux parlementaires, celui de faire imprimer un amendement ou une proposition de loi et de les déposer sur le bureau, pour entendre ensuite le Gouvernement invoquer la réforme constitutionnelle, si elle était adoptée, et expliquer qu'ils ne peuvent en aucun cas être examinés car ce serait contraire à la Constitution.

Le verrou est tellement puissant, de façon si exagérée, que, par un amendement que le Gouvernement va présenter, une sécurité supplémentaire est ajoutée. Il va nous proposer, en cohérence avec la proposition du président de la commission des lois, que, dans l'hypothèse où, par sympathie, par compréhension du besoin pour les parlementaires de s'exprimer parfois et d'exercer leur mandat, il accepterait, dans sa grande magnanimité, la discussion et, le cas échéant, le vote de dispositions d'initiative parlementaire pouvant être coûteuses, celles-ci soient déférées systématiquement au Conseil constitutionnel.

Or la réforme de la Constitution est très claire à cet égard, et la censure du Conseil constitutionnel sera mécanique, systématique, automatique et universelle. Toutes les propositions d'initiative parlementaire dont le Gouvernement aurait accepté la discussion et, le cas échéant, le vote, seraient censurées par le Conseil constitutionnel. L'exercice sera tenté une fois, deux fois, trois fois, puis plus jamais.

Le parlementarisme rationalisé voulu en 1958 évoluerait alors vers une forme plus sévère ne garantissant en rien la maîtrise de la dépense publique puisque, et c'est ma conclusion, ce n'est pas de ces bancs que sont venues les dispositions ayant mis les finances publiques dans cet état périlleux, c'est en partie la crise et ce sont beaucoup les initiatives gouvernementales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

La position du président de la commission des finances n'est pas toujours celle du groupe socialiste mais, cette fois, c'est le cas, je vous rassure.

La discussion que nous venons d'avoir est dans la droite ligne de ce que nous vivons depuis hier. Nous sommes dans l'irresponsabilité, le surréalisme complet. Nous discutons avec passion, avec des arguments très techniques, très précis, et c'est intellectuellement toujours agréable, d'un texte dont nous sommes à peu près sûrs qu'il ne sera jamais adopté.

Je vous rappelle que nous avons écarté d'un revers de main l'amendement n° 38 du président de la commission des finances, qui permettait de répondre à la même préoccupation en différant l'application d'un texte ayant des conséquences financières jusqu'à l'adoption de ses dispositions financières dans la loi de finances rectificative ou la loi de finances initiale qui suivrait.

Nous sommes vraiment dans un monde que plus personne ne comprend et ne comprendra, d'autant plus que nous connaissons la complexité du dispositif de nos lois de finances. Il y a les lois de finances, les lois de finances rectificatives, les lois de finances pluriannuelles, les lois-cadres et on ajoute encore, entre les deux premières, les lois de prélèvements obligatoires. Imaginons un peu comment nos concitoyens vivront les débats chaque fois recommencés sur des dispositions d'une telle complexité.

Bien qu'il ne se soit pas encore exprimé sur l'amendement n° 81 , le Gouvernement a laissé entendre qu'il pourrait l'accepter, mais le silence du ministre est bien embarrassé. Dans son exposé sommaire, il est écrit qu'à tout moment, le Gouvernement ou le président de l'assemblée concernée peut interrompre la progression d'un texte.

Nous vivons donc des heures absolument sidérantes. Nous discutons d'un texte dont nous sommes à peu près sûrs qu'il ne sera jamais voté. Cela a été longuement expliqué, et pas seulement par des gauchistes : nous avons le choix entre nous faire hara-kiri en nous disant qu'il n'y aura plus jamais de véritables initiatives parlementaires, et prévoir des dispositions complexes. Je le regrette mais, un peu à reculons, nous nous replierons sur l'amendement n° 22 du rapporteur général, que j'invite mes collègues du groupe SRC à voter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous sommes dans une discussion un peu surréaliste car, en fin de compte, si vous voulez constitutionnaliser, c'est pour essayer de trouver une solution pour vous survivre à vous-mêmes. Vous voyez la possibilité que votre logique financière, économique et fiscale régressive soit mise en cause par les prochaines échéances électorales et vous essayez de trouver un subterfuge pour contraindre le Parlement de telle manière qu'une nouvelle majorité ne puisse pas mettre en oeuvre la politique pour laquelle elle aura été élue ; mais c'est illusoire, cela ne se passera jamais ainsi parce qu'on ne peut pas résister à la volonté d'un peuple comme le nôtre qui, lorsqu'il a des convictions, est capable de renverser des montagnes après avoir renversé la Bastille.

Quand j'écoute Gilles Carrez, il me fait penser aux percherons de ma Normandie natale qui ont blanchi sous le harnais. (Sourires.) Il sait comment on trace le sillon. Même quand le fermier lui dit qu'il y a la haie, il sait que c'est par là que passe le sillon. Heureusement qu'il y a des gens comme lui, qui ont l'esprit terrien, les pieds dans la glèbe, pour essayer de limiter les dégâts.

Dans sa filiation politique, il devait y avoir le préfet Lépine. Rappelez-vous les efforts qu'il a faits au moment où l'on parlait de la TP. Il avait démantelé le projet gouvernemental pour faire quelque chose de beaucoup plus travaillé, réfléchi, cohérent, utile, moins terrible que ce que le Gouvernement avait proposé. Gilles Carrez, que nous connaissons tous et que nous apprécions, même si nous partageons rarement ses opinions, est toujours dans cette logique. Dans ce cas particulier, son ambition est de nous faire échapper à un monopole strict qui reviendrait pour le Gouvernement à atteindre totalement ses objectifs.

Son ambition est modeste, il veut faire respirer un peu l'initiative de ses collègues. Pour François Goulard, sa proposition permet de donner un sens au travail parlementaire. Je pense qu'il est trop optimiste. Il serait plus objectif de dire qu'elle permet de ne pas vider totalement le travail parlementaire de sa dimension d'initiative.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

C'est le verre à moitié plein ou à moitié vide !

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Je voudrais attirer l'attention de mes collègues sur le sort qui serait réservé aux propositions de loi.

Pendant les deux années où j'ai exercé la vice-présidence de cette assemblée dans la législature précédente, ma délégation consistait à accepter ou à refuser les propositions de loi, car c'est un rôle qui revient à un vice-président de l'Assemblée. J'en ai donc vu passer un grand nombre. On accepte qu'elles prévoient des gages. Heureusement qu'il existe des impôts sur le tabac, et l'imagination de nos collègues en ce domaine est très grande.

Le texte tel qu'il est rédigé ne permettra plus le dépôt de telles propositions de loi, et le vice-président de l'Assemblée sera dans l'obligation de les refuser systématiquement.

Si l'amendement du rapporteur général est voté, ce sera un peu plus facile. Par contre, et l'argumentation du président de la commission des finances est tout à fait pertinente, si l'amendement n° 81 de Jean-Luc Warsmann est voté, on pourra sûrement imprimer des propositions de loi mais elles ne pourront jamais être discutées.

Je ne vois pas quel sera l'intérêt de déposer une proposition de loi quand n'importe qui pourra souligner que cela ne sert à rien puisqu'elles ne peuvent jamais être discutées. Aujourd'hui, on ne sait pas à l'avance quelles propositions de loi pourront être discutées, mais il n'y a pas de refus dès le dépôt.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Ce n'est pas seulement aux parlementaires que l'on impose des contraintes, monsieur le président de la commission des finances. Le projet encadre autant les membres du Gouvernement. Pour tout texte impliquant les recettes, que ce soit un projet ou une proposition de loi, on doit recourir à une loi de finances. Expliquer que l'on encadre uniquement les parlementaires est donc totalement erroné.

Si ce texte a effectivement des inconvénients en encadrant davantage le travail des parlementaires comme celui des membres du Gouvernement, il donne en revanche beaucoup plus de lisibilité parce que l'on concentre à un moment donné toutes les dispositions ayant des implications sur le budget et les finances publiques, et on voit bien la nécessité d'avoir une telle lisibilité plutôt que de discuter de différents textes au fil de l'année.

L'objectif que vous recherchez, monsieur Carrez, laisser le plus possible aux parlementaires la possibilité de prendre des initiatives, d'intervenir et de faire des propositions, je pense que nous le partageons tous, et les membres de la commission des finances ont travaillé dans cet esprit.

Je me pose quelques questions sur sa présentation, qui – il l'a reconnu – est complexe. Elle vise systématiquement à découper les textes. Nous nous trouverons dans une situation où sur chaque texte présenté, deux, voire trois rapporteurs seront systématiquement saisis au fond. Cela entraînera donc un double ou un triple travail. Je sais parfaitement que ce n'est pas l'objectif recherché, mais il y aura une prédominance de la commission des finances par rapport aux autres commissions.

Je m'exprime en tant qu'ancien président d'une commission. Si l'on siège au sein de la commission des affaires économiques et que l'on examine un texte concernant l'agriculture ou les PME, ou si l'on est membre de la commission du développement durable et que l'on traite des textes concernant les transports ou les énergies renouvelables, on subira systématiquement la prédominance de la commission des finances. Nos collègues n'acceptent pas cela très facilement, reconnaissons-le.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Jacob

Il est faux de dire qu'il ne sera pas examiné.

Dans la proposition de la commission des lois, les PPL se déroulent normalement, le travail en commission s'accomplit avec les auditions prévues. Ensuite, le Gouvernement ou le président de l'assemblée peut invoquer l'article 41 s'il y a un impact sur les recettes et demander que le texte soit présenté dans le cadre de la loi de finances. La commission peut déposer des amendements. C'est complètement différent de la volonté de saucissonner systématiquement les textes et de donner la prééminence à une commission sur les autres.

La création de commissions spéciales a été un autre argument utilisé. Dans ce cas, on peut créer des commissions spéciales sur tous les textes et débattre de tout, directement dans l'hémicycle.

Je pense que la proposition de la commission des lois nous permet d'avoir un travail normal dans le cadre de nos commissions, comme c'est le cas aujourd'hui, et de ne pas doublonner toutes les auditions ; ni de nous retrouver avec deux, trois rapporteurs saisis au fond et de multiplier le travail parlementaire.

C'est pourquoi je voudrais inviter Gilles Carrez, compte tenu du travail remarquable qu'il a accompli et de l'objectif que nous partageons, à retirer son amendement n° 22 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. le président de la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Je vous remercie, monsieur le président, de me redonner la parole.

Je voudrais apporter deux précisions.

La première concerne ce qui serait le traitement égal et également loyal – oserai-je dire – de ce texte à l'égard du Gouvernement et du Parlement.

Monsieur Jacob, je ne peux pas vous laisser dire que l'encadrement des parlementaires est à la mesure de l'encadrement du Gouvernement. Comme député, vous n'avez jamais déposé de proposition de loi de finances et le Gouvernement – c'est d'ailleurs heureux – gardera l'initiative, et lui seul, des lois de finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Prétendre donc que ce texte encadre équitablement le Parlement et le Gouvernement ne me paraît pas correspondre à la réalité.

J'en viens à la deuxième précision que je voulais apporter. Nous en avons discuté en aparté avec d'autres collègues. Je pense que tous les arguments et les débats se doivent d'être honnêtes et loyaux. Nous avons bien compris que, dans l'hypothèse où vous n'auriez pas convaincu vos collègues, boire un coup à la santé de la commission des finances qui voudrait récupérer le monopole de je ne sais quoi peut toujours être efficace, et vous vous y êtes efforcé. Mais je voudrais simplement vous faire remarquer que le dispositif que vous soutenez ne donne aucun monopole particulier à une quelconque commission, et certainement pas à la commission des finances, puisque aucune n'est saisie, car le rejet d'une proposition de loi et d'un amendement est automatique, avant même l'examen par une commission, celui-ci étant inutile. Donc il n'y a aucun monopole d'aucune commission, puisque aucune commission ne serait saisie dans l'hypothèse que vous semblez privilégier et appeler de vos voeux. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je ne veux pas entrer dans le débat sur l'amendement n° 81 , que nous examinerons tout à l'heure, mais je ne peux laisser ces propos sans réponse.

J'ai déposé cet amendement pour interdire précisément une irrecevabilité au dépôt, que l'ambiguïté des textes aurait pu permettre. Je ne suis pas ici, et je ne dépose pas des amendements pour tuer les droits du Parlement.

Il ne faut donc pas déformer l'amendement n° 81 , dont nous débattrons tout à l'heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nous venons d'avoir un débat, afin d'essayer d'être le plus pédagogue possible et de bien expliquer à chacun l'enjeu de cette question.

Je reprends les propos tenus par M. Warsmann il y a un instant. Le président de la commission des lois s'est aussi battu pour la défense de l'initiative parlementaire, puisque l'amendement qu'il a retiré tout à l'heure supprimait le monopole que le Gouvernement souhaite conférer.

À ce stade, chacun a pu s'expliquer et se faire une idée. Il me semble nécessaire que l'on procède au vote. C'est un sujet extrêmement important. Nous sommes au coeur de nos compétences de parlementaires et chacun doit pouvoir s'exprimer en conscience.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

J'ai entendu des arguments nous incitant à repousser l'amendement n° 22 compte tenu de l'existence d'un amendement n° 81 . Mais nous n'avons pas examiné ce dernier. Faute de discussion commune avec l'amendement n° 22 , nous devons nous prononcer uniquement sur celui-ci. Nous nous prononcerons plus tard sur l'amendement n° 81 , qui sera, je l'espère, caduc.

(L'amendement n° 22 n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 55 .

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le groupe du Nouveau Centre a toujours demandé que l'on distingue les dépenses, les recettes et les dépenses fiscales et que l'on essaie d'encadrer les dépenses, mais aussi les dépenses fiscales.

Cet amendement vise à préciser que sont incluses dans le champ du monopole des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale les dépenses fiscales. Si le Gouvernement confirmait cela, nous pourrions retirer l'amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Luc Warsmann

Je voudrais rassurer M. Charles de Courson. Je partage totalement sa démarche. Son amendement est entièrement satisfait par le texte qui nous est proposé.

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Je confirme.

(L'amendement n° 55 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 49 et 69 rectifié .

La parole est à M. Daniel Garrigue, pour soutenir l'amendement n° 49 .

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

L'amendement tend à supprimer l'alinéa 7 de l'article 1er, qui prévoit l'encadrement par les lois d'équilibre des finances publiques de l'ensemble des lois de finances et de financement de la sécurité sociale.

Je ne reviens pas sur le débat que nous avons eu lors de la discussion générale sur le caractère dogmatique, idéologique, de cette disposition, qui consiste à fixer comme objectif l'équilibre des finances publiques. Ce qui importe, c'est la maîtrise des finances publiques. L'équilibre n'est pas en soi forcément la valeur qu'il convient d'atteindre.

Je voudrais insister sur un aspect important, évoqué également par le rapporteur général et qui n'est toujours pas résolu. Il s'agit de la contradiction entre les lois d'équilibre des finances publiques et la procédure du semestre européen et des programmes de stabilité. En effet, nous nous trouvons en présence d'une contradiction insurmontable. Je rappelle que les lois d'équilibre des finances publiques se situent dans une perspective pluriannuelle. La procédure du semestre européen et des programmes de stabilité est mise en oeuvre annuellement. Je veux bien croire que, la première année de la loi d'équilibre des finances publiques, nous pourrons arriver à la faire coïncider avec la procédure du semestre européen. Mais que se passera-t-il par la suite ? Si j'ai bien compris, on ne refait pas des lois d'équilibre des finances publiques chaque année, ce sont normalement des lois pluriannuelles. Il y aura donc très vite un décalage entre ces deux procédures, même si l'on a réussi à les faire coïncider au départ.

D'une part, la procédure d'équilibre des finances publiques vise par nature l'équilibre et tend à neutraliser finalement l'instrument budgétaire sur le moyen terme, alors que la logique du semestre européen et des programmes de stabilité est de se situer dans le cadre des critères du pacte de stabilité et de croissance – 3 % du PIB – et non de l'équilibre budgétaire je le rappelle.

D'autre part, on retrouve l'idée d'impulser, à l'échelle de l'Union européenne, ce qui a manqué jusqu'ici : une certaine volonté d'action sur le terrain budgétaire. Ce qui veut dire que l'objectif est en opposition complète avec celui des lois d'équilibre des finances publiques. Personne, jusqu'à présent, n'a été capable de nous dire comment sortir de ces contradictions.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 69 rectifié .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, il est arrivé souvent dans notre histoire, depuis plus de deux siècles, que nos assemblées parlementaires successives, plus ou moins démocratiques, aient émis des votes dont ceux qui y ont participé n'ont pas bien mesuré l'impact.

L'amendement n° 22 n'était pas qu'un simple amendement. Il s'agissait de bien plus. Lorsque des parlementaires consentent en fin de compte à l'anéantissement de leurs prérogatives, il faut garder en mémoire qu'ils ne sont que des représentants de la souveraineté populaire. Et vous êtes en train de l'aliéner. Notre histoire nous l'a appris, vous le savez, ce qui ne se règle pas par le débat démocratique et la libre confrontation dans les enceintes parlementaires se règle nécessairement autrement.

Il s'agit de supprimer l'alinéa 7 de l'article 1er, qui substitue aux lois de programmation pluriannuelle les lois-cadres d'équilibre des finances publiques. Comme l'indique l'exposé sommaire, la règle d'or est d'ores et déjà appliquée par le Gouvernement, conformément à la circulaire du Premier ministre datée du 4 juin 2010. Or le rapport Camdessus observe que cet alinéa introduit une rigidité pour la discussion par le Parlement de réformes d'ampleur. Les réserves du groupe de travail ne font donc que confirmer notre sentiment selon lequel on ne peut inscrire dans la Constitution une mesure qui viendrait entraver la représentation nationale.

L'un des arguments avancés par nos collègues de droite est qu'il s'agit de se protéger contre les marchés spéculatifs. Il est donc tout à fait étonnant que ces recommandations soient à la fois celles du FMI et de la Commission européenne, dont les mesures ont justement conduit jusqu'à aujourd'hui à faciliter ces dynamiques spéculatives.

Il se pose également un problème démocratique de fond, que fera peser la censure du Conseil constitutionnel sur les décisions de politique économique qui pourraient être prises par les députés et les sénateurs en matière fiscale et économique, et ce d'autant plus si l'on y intègre des critères de gestion des administrations publiques. Tout cela sans parler de la capacité d'expertise économique du Conseil constitutionnel. En revanche, c'est bien dans la ligne qui vise à sortir complètement les politiques budgétaires des cadres démocratiques et nationaux. Cela cantonnera le rôle des députés à des discussions techniciennes, comme nous l'avons vu hier, lors du débat sur le programme de stabilité. La discussion politique ne repose pas sur l'appréciation par les groupes parlementaires du futur niveau du PIB ni sur le point de savoir si le moral des patrons a gagné 0,1 ou 0,2 %

Debut de section - PermalienFrançois Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état, porte-parole du Gouvernement

Même avis.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Je ne peux que m'émouvoir du vote précédent par lequel l'Assemblée a accepté une diminution de ses prérogatives.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Personne ne l'a nié, pas même le président de la commission des lois, qui proposera ultérieurement un amendement pour trouver une solution. Je note du reste que les parlementaires qui ont repoussé cet amendement ne sont plus présents dans l'hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Le rapporteur général du budget, le président de la commission des finances, le président de la commission des affaires culturelles, ancien président de la commission des affaires sociales et ancien président de la commission des finances, étaient tous d'accord sur le fait qu'il s'agit bien d'un abaissement du rôle du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

Évidemment, c'est contraignant, mais l'article 40 est contraignant.

Debut de section - PermalienPhoto de René Dosière

Monsieur le ministre, vous avez dit que ce texte, à l'instar de la réforme constitutionnelle de 2008, prétendait revaloriser le rôle du Parlement. Expliquez-moi comment cela est possible alors que les plus importants responsables de cette assemblée estiment au contraire qu'il va diminuer l'initiative des parlementaires ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Garrigue

Je ne reviens pas sur le débat de fond concernant l'alinéa 7.

Je souhaite seulement que le Gouvernement nous donne une réponse sur la question de la conciliation entre les lois d'équilibre des finances publiques et la procédure du semestre européen. Des contradictions ont été soulevées à plusieurs reprises, notamment par le rapporteur général du budget. Il est profondément regrettable que le Gouvernement soit systématiquement muet chaque fois qu'il s'agit des enjeux européens.

(Les amendements identiques nos 49 et 69 rectifié ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 79 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet amendement a pour but de réduire l'impact des lois-cadres en ne leur donnant que le pouvoir de fixer de simples trajectoires financières. On leur enlève leur caractère contraignant, formulation assez vague, car il est inacceptable que les parlementaires se retrouvent corsetés. Une fois de plus, la souveraineté ne peut être déléguée, à moins de revenir devant le peuple. De ce fait, il n'est pas acceptable de donner un rôle si important au Conseil constitutionnel, que celui-ci ne réclame d'ailleurs pas. Au demeurant, son président actuel a à plusieurs reprises mis la représentation nationale en garde sur le risque, à force de s'en remettre au Conseil constitutionnel, que celui-ci soit amené à se prononcer en opportunité plutôt qu'à regarder la conformité des textes que nous votons par rapport à la Constitution.

(L'amendement n° 79 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques ;

Projet de loi fixant le nombre des conseillers territoriaux.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma