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Séance en hémicycle du 21 octobre 2009 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • carbone
  • prélèvement
  • taxe

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, je suis heureux de souhaiter, en votre nom, la bienvenue à une délégation du groupe d'amitié Pays-Bas - France de la Chambre des représentants du Royaume des Pays-Bas, conduite par sa présidente, Mme Khadija Arib. (Mmes et MM. les députés ainsi que les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le Premier ministre, les Français vont de plus en plus mal. Ils sont inquiets pour l'avenir de leurs enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Les fins de mois sont impossibles. Pour d'autres, au contraire, cela va très bien : pour les grands patrons, les banquiers, les copains de table de Nicolas Sarkozy au Fouquet's, pas de souci !

Regardez, monsieur le Premier ministre, ce très intéressant graphique que je tiens à la main. Vous voyez là le cours de l'action de la Société générale au mois de mars : un peu plus de vingt euros. Grâce au soutien des finances publiques, nous arrivons à plus de cinquante euros au mois de septembre. C'est la courbe des privilégiés.

Ici, vous avez la courbe noire du chômage, qui tous les mois s'aggrave. D'un côté, ceux qui s'enrichissent de la misère et, de l'autre, ceux qui travaillent ou voudraient le faire, et que vous réduisez à la pauvreté, quand ce n'est pas à la misère.

Les privilégiés pressent le citron : vingt-cinq suicides à France Télécom, des suicides chez Renault, chez PSA, et dans bien d'autres compagnies. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.) Pendant ce temps-là, les actionnaires se frottent les mains. Les Français doivent savoir que c'est en vies humaines, aujourd'hui, que l'on paye des dividendes ! (Mêmes mouvements.)

Monsieur le Premier ministre, allez-vous enfin réagir ? Allez-vous accepter l'amendement de la commission des finances qui prévoit pour 2010 de prélever 10 % des bénéfices des banquiers ? Ou bien allez-vous continuer de protéger les dividendes des privilégiés et des actionnaires sans âme ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur Brard, ne dressons pas les uns contre les autres. (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Ce que nous avons essayé de faire avec notre politique économique, c'est tout simplement de répondre dans l'urgence à des circonstances exceptionnelles. Sous l'autorité du Premier ministre, François Fillon, la France fait, avec l'Allemagne, mieux que l'ensemble des pays de la zone euro : actuellement, deux fois mieux que la moyenne de la zone.

Vous agitez les banques comme un chiffon rouge. Les banques, ce sont aujourd'hui un million de salariés français qui font de leur mieux pour que l'argent circule dans l'économie française. C'est indispensable. Il faut qu'elles financent les entreprises, les ménages, les collectivités locales.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Nous y sommes tous attachés. C'est ce que nous leur avons demandé de faire, et elles le font actuellement deux fois mieux que l'ensemble des banques de la zone euro. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Ce n'est pas tout.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Il faut bien entendu que la sécurité des transactions ainsi que celle des déposants et des épargnants soient assurées. Pour ce faire, en application des dispositions du communiqué du G20 ainsi que des décisions que vous serez amenés à prendre, mesdames et messieurs les députés, sur la révision des autorités de contrôle, nous allons mettre en place de nouvelles autorités.

À cette fin, nous aurons besoin de moyens complémentaires, et nous demanderons aux banques qu'elles financent les moyens nécessaires à la mise en place de cette supervision.

C'est pourquoi je proposerai une taxe particulière pour permettre le financement des autorités de supervision. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Ce sont ainsi les banques, je le répète, qui financeront la supervision nécessaire pour assurer la sécurité des déposants et des épargnants, afin d'éviter la résurgence d'une autre crise financière extrêmement dommageable à l'ensemble des économies. Sachez que nous sommes déterminés à cet effet. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

Monsieur le ministre, depuis quelques années, les territoires ruraux ont changé de visage ; les hommes et les femmes qui y demeurent ont désormais les mêmes besoins et les mêmes attentes que ceux qui vivent en milieu urbain. Pourtant, chacun ici, sur tous les bancs, connaît bien les difficultés croissantes auxquelles est confronté le monde rural en matière d'accès aux soins, aux services publics, aux nouvelles technologies de l'information et de la communication, aux moyens de transports collectifs.

De plus, ces territoires rencontrent des difficultés économiques grandissantes puisque l'on assiste à une reconcentration de l'emploi dans les zones les plus urbanisées : je pense à la situation gravissime dans laquelle se trouve l'agriculture, qui constitue la colonne vertébrale de la ruralité. (Approbations sur les bancs du groupe NC.)

Monsieur le ministre, vous souhaitez donner de nouvelles perspectives pour la ruralité. Vous venez de lancer à ce titre, le 7 octobre dernier, les Assises de la ruralité. Le groupe Nouveau centre soutient cette initiative ambitieuse, et indispensable si l'on veut bâtir un aménagement équilibré et durable de l'ensemble du territoire.

Quelle méthode comptez-vous adopter pour bâtir une nouvelle politique pour la ruralité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Vigier

Avec quels moyens financiers et selon quel calendrier ? Et, surtout, comment cette politique s'articulera-t-elle avec les régions et les départements, mais également avec les politiques déjà existantes, comme celles des pôles d'excellence rurale et des contrats de pays ?

L'ensemble de la ruralité attend une réponse forte. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Michel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Monsieur Vigier, vous avez raison : les territoires ruraux ont changé et continuent de le faire. Globalement, ils ont eu la croissance démographique la plus forte de tous nos territoires. Mais cette croissance globale cache de profondes disparités. Les territoires ruraux sont en effet très divers, avec des territoires d'espoir et d'autres de déclin. Vous l'avez justement souligné : ils connaissent de graves problèmes, mais il n'y aura pas de territoires ruraux sans agriculture forte.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

Chacun d'entre nous connaît leurs difficultés. Ensemble, nous essayons d'apporter des solutions.

Voici ce que je veux faire à travers ces assises des territoires ruraux : il ne s'agit pas d'une nouvelle commission…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, ministre de l'espace rural et de l'aménagement du territoire

…ni d'entrer dans un système de consultation indéfini, mais d'essayer de recueillir, dans les trois mois qui viennent, les avis de toutes celles et de tous ceux qui ont quelque chose à dire sur les territoires ruraux et sur les attentes des habitants de ces territoires, afin d'être capable, muni de leurs réponses, de mettre en place une politique nouvelle. Il s'agit de définir un socle de services attendus par les habitants, dans tous les domaines : l'accès aux soins, la permanence des soins, l'école, les transports. Je veux écouter et voir, ensuite mettre en place une politique d'actions pour la ruralité. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Laurent Fabius, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Fabius

Monsieur le Premier ministre, hier, M. le Président de la République a présenté les projets tournant autour de ce qu'il appelle « la réforme territoriale », et qu'il vaudrait beaucoup mieux appeler « les lois de recentralisation ». (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Alors que tout le monde reconnaît que les lois de décentralisation – initiées d'ailleurs par la gauche – ont eu des effets positifs pour le pays, même si elles doivent être complétées, vous proposez, je le répète, des lois de recentralisation. J'en donnerai plusieurs exemples.

Dans le domaine financier, ce que vous proposez pour remplacer la taxe professionnelle, de même que d'autres dispositions prévues dans le projet de loi de finances, va avoir pour conséquence de mettre dans des difficultés quasiment insolubles des centaines et des centaines de collectivités locales, et nombre de ménages que vous allez charger davantage. Alors que tout le monde sait que les collectivités locales sont beaucoup mieux gérées que l'État sous votre gouvernement,car elles ne font pas 140 milliards de déficit en une seule année ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Le deuxième exemple, c'est la recentralisation des compétences à travers ce que l'on appelle, d'une manière quelque peu technocratique, « la suppression de la clause de compétence générale ». En clair, cela signifie que, dans toutes nos communes, alors que jusqu'à maintenant les départements et les régions aident au fonctionnement des associations culturelles ou sportives, cela ne sera plus possible si votre loi est votée. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Enfin, il y a une recentralisation partisane à travers ce qu'un élu a appelé « un fric-frac électoral », doublée par la création du conseiller territorial, qui sera condamné au cumul des mandats.

Vos propositions sont inacceptables. Je vous demande de ne pas vous réfugier derrière une mise en cause démagogique des élus locaux, alors que ce sont des gens qui font très bien leur travail et qui sont, comme nous les députés, des élus du peuple ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Monsieur Laurent Fabius, il y a au moins une réalité sur laquelle nous serons d'accord : le système actuel est incompréhensible. Régions, départements, État, Bruxelles, communes, syndicats de communes, intercommunalités (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : interrogés, 83 % de nos compatriotes ont dit qu'ils ne comprenaient pas ce système ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC.) Y a-t-il un élu dans cette assemblée qui n'a jamais participé à une inauguration au cours de laquelle un maire ou un chef d'entreprise, dans son allocution de remerciement pour une subvention, confond le président de région avec celui du conseil général ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – « C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) S'il y en a un, qu'il se lève !

Nous avons présenté un projet qui permet trois avancées.

Tout d'abord, il allège le dispositif en organisant les collectivités territoriales autour de deux couples : communes et intercommunalités ; régions et départements.

De plus, il permet de simplifier, monsieur Fabius, parce que faire siéger à la fois au conseil général et au conseil régional un interlocuteur unique pour nos concitoyens, c'est la garantie de l'accessibilité et de la lisibilité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Enfin, ce projet constitue un gage d'efficacité en permettant l'émergence des métropoles. Je suis étonné que vous ne l'ayez pas évoqué puisque M. Destot, un de vos amis, préside l'association des maires des grandes villes de France. Je précise qu'il est venu me dire que ce projet était bon (« Non ! » sur de nombreux bancs du groupe SRC), qu'il était utile et qu'il fallait abaisser le seuil démographique des métropoles. (Mêmes mouvements.) Vous ne vous êtes pas concertés, c'est regrettable.

Cela étant, le débat sur notre projet aura lieu devant le Parlement car nous sommes respectueux des assemblées. Il aura lieu dans les mêmes conditions que l'examen des grandes lois décentralisatrices de 1982,…

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

…selon la même méthode : nous serons attentifs et à l'écoute. Et ce sera utile, pour une raison simple : cela permettra à l'opinion de voir où sont les réformateurs et où sont les conservateurs. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Étienne Pinte, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Monsieur le haut-commissaire aux solidarités, samedi dernier, nous nous sommes retrouvés sur le parvis du Trocadéro pour exprimer notre soutien et notre solidarité à l'association ATD Quart Monde, à l'occasion de la Journée mondiale de refus de la misère.

Debut de section - PermalienPhoto de Étienne Pinte

Plus de huit millions de nos concitoyens – dont plus de deux millions d'enfants – vivent actuellement sous le seuil de pauvreté dans un pays, le nôtre, qui est considéré comme l'un des plus riches du monde.

Nous constatons également que la crise économique entraîne une augmentation très importante du nombre de demandes d'hébergement d'urgence et de logement social. Les responsables d'ATD Quart Monde vous ont remis, à l'intention du Président de la République, un dossier pour exprimer leurs propositions, afin d'éradiquer la pauvreté dans notre pays.

Ils vous ont aussi interpellé sur un sujet plus délicat : le sort réservé aux plus pauvres des pauvres, ceux qui ne peuvent pas bénéficier du revenu de solidarité active.

Quelles réponses apportez-vous à leurs appels au secours ? (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse

Monsieur Étienne Pinte, oui, nous étions ensemble sur la dalle du Trocadéro, le 17 octobre dernier,…

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse

…journée extraordinairement importante, portée par ATD-Quart-Monde, par les associations, et je pense par tout le monde dans cet hémicycle, pour donner rendez-vous sur la réduction de la pauvreté.

Le message délivré le 17 octobre ne tombe pas dans l'oreille de sourds. Il y a deux ans, le 17 octobre, était pris, pour la première fois, un engagement de réduction de la pauvreté. L'année dernière, le 17 octobre, l'ensemble des associations portait un message simple et vif : mettre la priorité sur les jeunes. Expliquant pourquoi les jeunes étaient exclus de certains dispositifs, les associations nous ont demandé d'agir.

Cette année, à travers le projet d'ouverture du revenu de solidarité active qui vous sera bientôt soumis, à travers le renforcement du civis et des missions locales, à travers la création de nouveaux dispositifs et de mesures qui vont coûter 650 millions d'euros – dont 150 millions d'euros consacrés au versement d'un dixième mois de bourse –, nous prenons en compte les jeunes dont le taux de pauvreté est plus élevé.

Nous avons créé le revenu de solidarité active, mais il y a également les plus pauvres des pauvres, celles et ceux qui ne peuvent pas travailler actuellement. Que faisons-nous ? Nous revalorisons le minimum vieillesse et l'allocation aux adultes handicapés. Ces deux minima sociaux,…

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse

…qui dérivaient en dessous de l'inflation, vont être augmentés de plus de 25 % au cours des cinq prochaines années, dont plus de 6 % cette année, soit plus de 44 euros pour le minimum vieillesse.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse

Voilà ce que nous faisons pour celles et ceux qui ne bénéficiaient de rien d'habitude.

Pendant la crise, de nouvelles mesures ont été prises en faveur de celles et ceux qui ne peuvent pas reprendre un travail : majoration de la prime de Noël, prime de solidarité active, allocation de rentrée scolaire. Bref, ils ne sont pas oubliés. Les enfants ne seront pas oubliés.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Veuillez conclure, s'il vous plaît, monsieur le haut-commissaire.

Debut de section - PermalienMartin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse

Le Président recevra les associations avant le 20 novembre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Delphine Batho, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

Chers collègues, depuis quelques années, chaque fois qu'il a été nécessaire, pour des impératifs légitimes de sécurité, de créer un fichier de police, cela a été fait par la loi, à une exception notable : le fichier Edvige, créé par décret avant qu'une mobilisation citoyenne obtienne son retrait.

Monsieur le ministre de l'intérieur, voici la proposition de loi n° 1738 sur les fichiers de police, votée à l'unanimité par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 16 juin dernier. Elle faisait suite à un rapport parlementaire dont mon collègue Jacques Alain Bénisti, pour le groupe UMP, et moi-même, pour le groupe socialiste, étions co-rapporteurs.

Ici, à l'Assemblée nationale, nous étions tous d'accord pour que le Parlement légifère sur les fichiers de police. Nous étions tous d'accord pour dire que, bien sûr, nos policiers ont besoin de fichiers, mais que c'est à la loi de définir qui doit y figurer et quelles informations peuvent y être enregistrées (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Un accord avait même été trouvé avec le Gouvernement, après un certain nombre de réunions de travail.

Vous avez brisé ce consensus en publiant dimanche, en catimini, deux décrets créant de nouveaux fichiers de police. Vous avez ainsi réveillé toutes les craintes légitimes qui avaient été soulevées par le fichier Edvige.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Batho

En réponse à une question précédente de Laurent Fabius, vous prétendiez respecter le Parlement. Nous vous demandons de respecter le Parlement. Nous vous demandons de retirer ces décrets. Nous vous demandons d'inscrire à l'ordre du jour prioritaire de l'Assemblée nationale la proposition de loi votée par la commission des lois.

Nous vous le disons : nous sommes prêts à régler l'ensemble des problèmes posés en matière de fichiers, à la condition que le consensus qui s'était noué ici soit respecté. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Madame Delphine Batho, votre intervention pose en réalité deux questions, l'une de fond et l'autre de méthode.

La question de fond est simple : devons-nous donner à la police les moyens d'anticiper les atteintes à la sécurité publique ? (« Oui ! » sur de nombreux bancs.)

C'est parfait s'il y a unanimité ! Vous avez raison. D'ailleurs, plusieurs personnalités de l'opposition se sont exprimées sur ce sujet, notamment l'ancien Premier ministre Laurent Fabius, au moment où je me suis rendu à Poitiers, considérant que les fichiers n'étaient pas assez performants.

Ce qui importe, ce sont ces bases de données. Elles sont essentielles, notamment quand il s'agit de respecter l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme, qui prévoit le droit à la sûreté au même titre que le droit à la liberté.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Nous avons pris deux décrets. L'un vise à anticiper les troubles provenant des hooligans, des bandes, des groupuscules.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

L'autre vise à connaître un peu l'activité de ceux qui souhaitent intégrer les forces de sécurité, qu'ils soient bagagistes dans les aéroports ou techniciens dans le secteur nucléaire.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Ça relève de la loi !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

C'est essentiel.

S'agissant de la méthode, il est vrai que nous avons procédé par décrets. Mais, sous François Mitterrand, le ministre de l'intérieur a créé le fichier des renseignements généraux par décret. Il y a une chose que je ne comprends pas : pourquoi ce qui était bien quand vous étiez la majorité devient-il déplorable quand vous êtes l'opposition ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Il faut être cohérent !

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Cela étant, pour répondre et satisfaire ainsi M. Glavany qui se fait entendre à chaque question, je suis effectivement favorable, comme je l'ai dit à M. Warsmann, à la tenue d'un débat sur les conditions et l'encadrement des données recensées.

Debut de section - PermalienBrice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales

Chacun prendra ses responsabilités. Pour notre part, nous ne transigerons ni avec la sécurité des Français ni avec le respect des libertés publiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jacques Pélissard, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Pélissard

Monsieur le ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance, notre assemblée a voté le projet de loi de finances rectificative pour 2009, dont l'article 5 prévoit le remboursement anticipé du FCTVA, le Fonds de compensation pour la TVA, pour les collectivités ayant engagé des investissements supérieurs à ceux réalisés, en moyenne, au cours des années 2004 à 2007. C'est une bonne mesure, favorable à l'emploi et aux entreprises non délocalisables ancrées dans nos territoires, notamment celles du bâtiment.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Pélissard

Plus de 20 000 collectivités territoriales ont signé la convention, parmi lesquelles 17 140 communes ou intercommunalités ; nous pouvons tous nous en réjouir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Pélissard

Reste que, pour bénéficier du remboursement, les paiements doivent intervenir avant la fin de 2009. Cette condition nous inquiète car, à partir du 15 décembre prochain, nous ne pourrons plus imputer les dépenses sur l'actuel exercice budgétaire ; nous avons d'ailleurs soulevé ce problème dans le cadre du comité de pilotage du plan de relance. Comment, monsieur le ministre, permettre aux collectivités d'engager des dépenses rattachées à l'exercice 2009 jusqu'à la fin de cette année, quand bien même le paiement interviendrait en 2010 ? Il s'agit d'un enjeu important pour toutes les collectivités locales. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance.

Debut de section - PermalienPatrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance

Monsieur le président de l'Association des maires de France, je partage votre point de vue. D'une part le dispositif mis en place par le Gouvernement pour le remboursement de la TVA, en stimulant les collectivités locales, a été un grand succès : en 2009, plus de 20 000 collectivités ont accepté de développer leurs investissements, pour un montant total de 54 milliards d'euros, soit 55 % de plus que la moyenne des années précédentes. Non seulement les collectivités territoriales n'ont pas diminué leurs investissements mais, avec beaucoup de civisme, elles les ont toutes augmentés, rendant la politique de relance d'autant plus efficace.

Reste que, légalement, tous les paiements doivent en effet intervenir avant le 31 décembre 2009, ce qui, j'en conviens, n'est pas possible pour certains d'entre eux. Il faudra donc que certaines dispositions du projet de loi de finances pour 2010 autorisent le paiement en 2010, à la condition, ferme, que l'engagement de dépense – ordre de service ou toute autre forme juridique – ait été pris en 2009. En ce cas, il n'y a à mon sens nulle difficulté pour que le paiement intervienne en 2010. Le Gouvernement sera très attentif à cette disposition lors de l'examen du projet de loi de finances. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de François Rochebloine

Monsieur le Premier ministre, chacun s'accorde à reconnaître que nous sommes au coeur d'une crise économique d'une rare intensité, notamment depuis la rentrée, avec des conséquences d'une extrême gravité sur le plan social.

Permettez-moi de témoigner de la situation de mon département, la Loire, et plus particulièrement de la vallée du Gier, dont je suis l'élu. Depuis quelques semaines les mauvaises nouvelles s'accumulent. Après que le dernier équipementier sidérurgique français, Siemens VAI, eut annoncé la fermeture de son site à Saint-Chamond, fermeture ayant entraîné la suppression de près de 300 emplois, le groupe ThyssenKrupp a décidé de faire disparaître le principal site de production français de gros vilebrequins pour moteurs de poids lourds : Mavilor à L'Horme, où travaillent 373 salariés.

Ces fermetures condamnent à brève échéance plusieurs centaines d'emplois de sous-traitants et fournisseurs de la vallée du Gier. La situation est catastrophique, d'autant plus que, je le rappelle, l'État a fermé un site GIAT Industries il y a moins de cinq ans sans aucune compensation au plan industriel.

C'est une période noire, comme je n'en ai jamais connu : notre région risque d'être totalement sinistrée. Nous ne pouvons rester inactifs face aux délocalisations et à la désindustrialisation de notre pays, qui perd ainsi pour longtemps des savoir-faire que nous avions mis plus d'un siècle et demi à développer.

Des mesures ont été mises en place par le Gouvernement, telles que le contrat de transition professionnelle, pour lequel, monsieur le Premier ministre, je vous ai d'ailleurs sollicité. Or il semble qu'il ne puisse être applicable aux entreprises que j'ai citées. Je vous laisse imaginer l'ampleur du traumatisme, et l'impact de ces fermetures sur les salariés et les familles concernés. C'est pourquoi je souhaite vous interpeller sur ce qu'il faut bien appeler un véritable déménagement du territoire. Pouvez-vous nous indiquer les actions que vous comptez mettre en oeuvre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Comme vous l'avez rappelé, monsieur Rochebloine, certains territoires souffrent plus que d'autres de la crise ; c'est pourquoi le Président de la République et le Premier ministre nous ont demandé, à Christine Lagarde et à moi-même, de faire plus en leur faveur. C'est dans cet esprit que, en concertation avec les partenaires sociaux, nous avons conçu le CTP, le contrat de transition professionnelle. Il est destiné à aider des salariés ayant perdu leur emploi à se reconvertir au plus vite en cette période délicate. Dans le Nord-Pas-de-Calais, il a par exemple permis de reconvertir les salariés d'entreprises de vente à distance dans le secteur des centres d'appel.

La vallée du Gier, que je connais bien – nous sommes en effet voisins, monsieur le député – paie un lourd tribut, et depuis de nombreuses années. Vous nous aviez ainsi sollicité pour obtenir un CTP sur votre territoire ; suite à la décision que j'ai prise avec Christine Lagarde, c'est chose faite depuis le 1er octobre. Dans les entreprises de moins de 1 000 salariés, où les moyens sont souvent moindres, le CTP donnera aux salariés le temps et les moyens de préparer leur reconversion.

Les entreprises de plus de 1 000 salariés, telles que ThyssenKrupp ou Siemens, ont en revanche des moyens et des obligations de reclassement qu'elles doivent assumer sans se défausser sur l'État. Mais nous ne nous en contenterons pas ; je vous propose donc de surveiller la situation ensemble. J'ai d'ailleurs adressé un courrier au préfet pour l'appeler à la vigilance sur le respect de chacune des obligations de reclassement, afin d'empêcher les groupes concernés de pratiquer une politique de terre brûlée.

Il importe par ailleurs, comme vous l'avez dit, de créer de nouveaux emplois. Nous pouvons ainsi réfléchir à la façon d'appliquer avec vous la politique de réindustrialisation conduite par Christian Estrosi ; un centre d'appel, en particulier, doit ouvrir non loin de votre circonscription : voilà des raisons d'espérer pour ce territoire qui, situé entre Saint-Étienne et Lyon, dispose de nombreux atouts. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Jacqueline Maquet, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Maquet

Monsieur le ministre de l'immigration, peut-on condamner ceux qui fuient leur pays en guerre ? Peut-on condamner ceux qui quittent la misère en les renvoyant par charter dans leur pays où l'insécurité et le danger les guettent ? Comment un pays comme la France, qui fait la guerre en Afghanistan, peut-il renvoyer dans les mains des talibans ceux qui, parce qu'ils étaient victimes, étaient venus chercher une protection en Europe ? C'est inacceptable !

Voilà maintenant un mois que la « jungle » de Calais est détruite. Cette opération politico-médiatique que vous avez menée, n'a, au final, pas du tout réglé le problème et n'a apporté aucune solution digne de ce nom aux exilés qui, dans leur grande majorité, relèvent du droit d'asile.

Bien au contraire, ce tapage a eu deux conséquences : d'une part, les filières clandestines et autres passeurs, que vous prétendiez vouloir toucher, ont renforcé leur pouvoir et, d'autre part, les réfugiés, quant à eux, sont renvoyés à une clandestinité encore plus grande.

Un peu partout sur le territoire du Nord-Pas-de-Calais, jusqu'à Paris, de nouvelles « jungles » apparaissent. À Angres, à Norrent-Fontes, des Vietnamiens, des Érythréens, des Afghans essaient de se cacher en attendant de rejoindre l'Angleterre.

Chaque semaine, vous persistez, en détruisant des campements, sans résultats. Les associations humanitaires ont de plus en plus de difficultés à leur venir en aide. Leur situation sanitaire est dramatique. Je tiens donc à dénoncer publiquement ces méthodes contraires au respect des droits humains.

L'immigration est un problème qui doit être traité conjointement avec l'ensemble des pays européens. Des garanties doivent être prises sur les conditions d'hébergement, l'accès au droit d'asile des exilés et l'accompagnement des mineurs. Que l'État prenne ses responsabilités en finançant les 5 millions d'euros qu'il laisse à la charge du département pour l'accueil des mineurs.

Qui doit-on croire, le Médiateur de la République, qui recommande de petites structures d'accueil, ou vous, qui les refusez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Maquet

Monsieur le ministre, quand allez-vous mener une politique… (Applaudissements et protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Éric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Madame la députée, en matière de respect du droit d'asile, la France n'a pas de leçons à recevoir. (« Traître ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Vous devriez en être collectivement fiers. C'est le pays le plus demandé au monde, c'est un des pays les plus généreux, peut-être le plus généreux en matière d'octroi du statut de réfugié, et il s'enorgueillit de ne jamais reconduire à la frontière les mineurs étrangers isolés, règle que nous avons encore suivie à Calais.

Mais la France ne peut pas être le seul pays touché par les filières criminelles de l'immigration clandestine afghane à ne jamais reconduire les Afghans dans leur pays d'origine. Je peux vous citer tous les pays qui font ce qu'on appelle des « retours forcés » : le Royaume-Uni, la Suède, la Norvège, l'Allemagne, les Pays-Bas et l'Italie. (« Et alors ? » sur les bancs du groupe SRC.) « Et alors ? » me demandez-vous. C'est simple : si un pays est le plus généreux en matière d'octroi du droit d'asile…

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

…et que, en même temps, les filières de l'immigration clandestine savent qu'il ne reconduit jamais à la frontière, alors il devient la cible privilégiée des passeurs. C'est assez rationnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Notre message est donc extrêmement clair. La France est un État de droit, un État souverain. On peut demander le statut de réfugié, on peut choisir le retour volontaire, comme l'ont fait 180 Afghans. Mais si l'on est entré illégalement, si l'on n'est pas réfugié et si l'on ne veut pas du retour volontaire, alors oui, on peut être reconduit dans son pays d'origine.

Cette nuit, avec les Britanniques, avec – oserai-je dire – les travaillistes britanniques (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), nous avons effectivement reconduit trois Afghans qui ont bénéficié de toutes les procédures visant au respect de leurs libertés individuelles. Ils sont depuis ce matin à Kaboul. Ils ont été reçus par un fonctionnaire français : c'est la France qui paie leur hôtel (Mêmes mouvements), c'est la France qui va payer leur réinstallation et c'est la France qui va les accompagner individuellement.

Un député du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Vous les envoyez à la mort !

Debut de section - PermalienÉric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire

Puis-je vous rappeler, pour finir, que de 1997 à 2002, sous le régime des talibans, la France a continué de reconduire des Afghans à la frontière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Huées sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

De nombreux chefs de petites et moyennes entreprises ont des difficultés à trouver des capitaux pour financer la croissance et les produits de l'avenir, et des mesures doivent être prises pour y remédier. Le Premier ministre a récemment annoncé le lancement d'un fonds de consolidation et de développement des entreprises doté de 200 millions d'euros. Ce fonds interviendra en capitaux propres pour redonner de l'air aux entreprises performantes, là où les financements classiques ne sont plus abordables, et leur offrir de nouvelles perspectives d'avenir fortes. De plus, il devrait veiller à ce que les investissements contribuent à préserver un certain nombre d'activités d'entreprises sur le territoire français.

Le fonds stratégique d'investissement, mis en place depuis décembre 2008 et doté de 20 milliards d'euros pour prendre des participations dans des sociétés jugées stratégiques pour l'avenir industriel de la France, a apporté 95 millions d'euros au fonds de consolidation et de développement des entreprises. Le reste est financé par les principaux établissements financiers et assureurs de la place : BNP Paribas, Société générale, HSBC, Crédit agricole, BPCE et Axa, pour ne citer qu'eux. Vous aviez d'ailleurs encouragé ces derniers, madame la ministre, à participer au financement de ce projet lancé par René Ricol, ancien médiateur du crédit, qui travaillait depuis plusieurs mois à sa mise en place.

Nous avons bien conscience que l'objectif est de renforcer les fonds propres de sociétés qui n'arrivent pas à trouver des financements de capital-risque.

Madame la ministre, face aux difficultés que les entreprises, et en particulier les PME, connaissent, dans la période actuelle, pour trouver des financements, pouvez-vous rappeler l'ensemble des dispositifs qui ont été mis en place à l'initiative du Gouvernement ou du Parlement depuis le début de la crise pour renforcer les fonds propres de nos entreprises et la façon dont ils s'articulent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Louis Valéry Giscard d'Estaing… (Rires et exclamations prolongés sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Pardon, monsieur Louis Giscard d'Estaing, vous m'avez demandé une réponse pratique et je vais vous en donner une, au risque d'être technique.

Vous avez indiqué que le Gouvernement et le Parlement avaient pris des mesures rapides et efficaces pour permettre de renforcer les fonds propres des petites et moyennes entreprises. Nous avons choisi deux piliers. Le premier, que vous avez évoqué, est le fonds spécifique de modernisation et de développement des entreprises –initiative suggérée par René Ricol et engagée par le Premier ministre, avec Hervé Novelli. Il est alimenté, d'une part, par le fonds stratégique d'investissement et, d'autre part, par les banques et les assurances. Il fournit des financements rapides aux petites et moyennes entreprises.

Nous avons mis en place, par ailleurs, un système d'obligations convertibles doté de 300 millions d'euros. Là aussi, il est disponible pour les petites et moyennes entreprises, et dans des délais très rapides, puisque nous garantissons un service standardisé et une réponse dans les quatre semaines.

Nous avons aussi demandé à OSÉO de se mobiliser. Vous savez qu'OSÉO fournit des garanties pour 5 milliards d'euros : plus de 13 000 petites et moyennes entreprises en ont bénéficié à ce jour. Mais nous avons également demandé à OSÉO de mettre en place un système plus rapide de mobilisation des financements. Ce système, doté d'un milliard d'euros sera disponible à partir du 1er novembre et viendra renforcer les quasi fonds propres.

Je ne voudrais pas finir, Olivier Giscard d'Estaing (Nouveaux rires sur les bancs des groupes SRC et GDR), sans mentionner les services du médiateur du crédit.

Debut de section - PermalienChristine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi

Vous m'avez demandé une réponse pratique. La première adresse, le premier numéro de téléphone auquel doivent faire appel les petites et moyennes entreprises, ce sont ceux du médiateur du crédit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

J'essaierai, à la différence de Mme Lagarde, de ne pas faire de confusion entre les prénoms, encore que l'on pourrait, s'agissant du sujet dont je vais parler, s'y perdre : je vais en effet évoquer la nomination de M. Jean…

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

… Sarkozy à la présidence de l'ÉPAD. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Répondant ce week-end à une question que je lui posais, le porte-parole du Gouvernement a reconnu qu'il pouvait y avoir une confusion d'intérêts entre l'élection de M. Jean Sarkozy et le vote des représentants de l'État. Dont acte ! Nous avons ensuite appris que M. Hervé Marseille, qui a démissionné pour laisser sa place à M. Jean Sarkozy, avait été nommé au Conseil économique, social et environnemental (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), comme si le Président de la République avait pu utiliser les pouvoirs de nomination qu'il tient de la Constitution pour favoriser sa famille. Dont acte !

Personnellement, je ne veux pas placer ce débat sur un terrain personnel, et je comprends que vous ne le souhaitiez pas. Je ne l'ai pas fait, et je ne le ferai pas.

En revanche, je veux poser une question politique à M. le Premier ministre. La véritable question est en effet de savoir pourquoi le Président de la République dépense tant d'énergie pour exercer son contrôle – j'allais dire son contrôle familial – sur l'Établissement public d'aménagement de la Défense. Pourquoi cette énergie ? Sont-ce les observations de la Cour des comptes, qui mettaient en cause « des anomalies graves et répétées » dans la gestion de l'établissement, que l'on cherche à éviter ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Faut-il alors rapprocher cette déclaration du constat fait par M. Devedjian, pour sa part écarté de la présidence de l'ÉPAD, qui nous disait qu'il fallait « nettoyer les écuries d'Augias » ? Est-ce, au contraire, que le Gouvernement veut, en gardant le contrôle de l'ÉPAD, conserver celui d'un outil qui échappe en totalité aux élus locaux, alors que des millions de mètres carrés sont concernés ? Est-ce, enfin, pour effacer l'impact d'un déficit assumé par un Président qui s'appelle non pas Jean mais Nicolas Sarkozy ? Je pose donc la question : pourquoi le Président de la République veut-il, …

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

…à toute force, imposer la nomination de son fils, contre…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

J'ai le sentiment, monsieur Gorce, que vous faites une séance de rattrapage car vos propos de dimanche dernier vous ont peut-être été reprochés dans votre propre camp. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

En réalité, les choses sont assez simples.

En ce qui concerne le rapport de la Cour des comptes sur la période 1997-2005, vous le connaissez depuis 2007, puisqu'il a été communiqué à la commission des finances, dont il ne vous a pas échappé qu'elle est présidée, dans le cadre de l'ouverture voulue par le Président de la République et dans un souci de transparence, par un membre de votre groupe.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

C'est une première dans l'histoire de la République !

Ce rapport dit seulement deux choses ; et c'est pourquoi vous n'en avez pas parlé pendant deux ans et demi. Il indique simplement qu'une redéfinition des missions de l'ÉPAD est nécessaire – à l'époque, l'État et les collectivités ne savaient pas s'il fallait arrêter ou poursuivre le développement – et il demande que l'exploitation et la maintenance des espaces publics soit dissociées par convention du rôle d'aménageur de l'ÉPAD. C'est désormais le cas, grâce à la loi du 27 février 2007, adoptée par l'Assemblée nationale et le Sénat. La situation est donc parfaitement conforme aux souhaits de la Cour des comptes.

Debut de section - PermalienJean-Louis Borloo, ministre d'état, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat

Il n'y a pas d'anomalies graves ! J'ai le rapport de la Cour des comptes, transmis en son temps.

Pour le reste, monsieur Gorce, dans un système où, depuis deux ans, les nominations les plus importantes donnent lieu à un débat dans les commissions du Parlement et où la commission des finances est présidée par un membre de l'opposition, dans un système qui pratique l'ouverture et, en toutes circonstances, valorise le mérite républicain, je trouve, très franchement, que cette question est un peu déplacée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe NC. – Huées sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Paul Anciaux, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture.

C'est une crise sans précédent que connaît actuellement l'agriculture. Toutes les filières sont en difficulté, et je sais, monsieur le ministre,combien vous vous battez à Bruxelles pour défendre les productions françaises.

En Saône-et-Loire, l'activité agricole concerne 13 000 actifs et chaque exploitation génère sept à huit emplois induits. Notre département est au premier rang national en surface agricole et détient le plus important cheptel bovin français.

L'agriculture est une activité exigeante. Elle nécessite un fort engagement personnel et une prise de risques permanente en matière d'investissements.

Il y a un an, le Gouvernement a mis en place un vaste plan en faveur des PME, qui a mobilisé 22 milliards d'euros. Qu'en est-il aujourd'hui pour l'agriculture ? Les laitiers viennent de se voir attribuer 280 millions d'euros pour solde de tous comptes par la Commission européenne, comme l'indique Mme Fischer Boel. Et que peuvent espérer les autres filières ?

Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quelles mesures concrètes seront mises en place pour surmonter ces difficultés ? Un grand nombre d'exploitations disparaîtront si rien n'est fait.

Je souhaite également que vous entrepreniez une démarche auprès de Mme la ministre de l'économie, afin qu'elle engage une action pour mettre un terme au scandale des réponses apportées par le secteur bancaire à des agriculteurs en difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Dans ma circonscription, plusieurs m'ont alerté sur ce point.

J'ai ici un exemple précis, que je souhaite porter à la connaissance de la représentation nationale. La banque verte autorise un dépassement temporaire de 7 500 euros à un chef d'exploitation agricole au taux de 13,10 %. Oui, je le répète : 13,10 % !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Anciaux

Imaginez, monsieur le ministre, les conséquences tant morales que financières d'une réponse aussi blessante pour un chef d'entreprise agricole. Les éleveurs du bassin allaitant ne demandent pas l'assistanat, ils demandent simplement un peu de considération, un véritable accompagnement et une aide ponctuelle de tous les acteurs politiques et économiques pour traverser cette crise sans précédent. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Monsieur Anciaux, jamais les agriculteurs français n'ont eu autant besoin de notre soutien et de notre solidarité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Les agriculteurs sont tous touchés par la crise actuelle.

Debut de section - PermalienBruno le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche

Que ce soient l'élevage, la production laitière, les fruits et légumes ou la viticulture, toutes les filières sont touchées à la fois. Le revenu des agriculteurs devrait baisser de près de 10 % en 2009, après une baisse de plus de 20 % en 2008. Cela veut dire que tous les gains de revenus enregistrés en 2006 et en 2007 vont être annulés au cours de cette année 2009, calamiteuse pour l'agriculture française.

Il faut donc que chacun soit solidaire. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) L'Union européenne l'a été, après trois mois de démarches et de volontarisme du gouvernement français et de vingt et un autres États, puisqu'elle a débloqué 280 millions d'euros pour la filière du lait. Je rappelle que cette somme représente la moitié de ce qui est versé au titre des interventions pour ce secteur en 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Bataille

La situation est catastrophique pour l'agriculture française !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

L'État sera également solidaire. Nous travaillons, avec le Premier ministre, à un plan global d'urgence, pour répondre aux problèmes de trésorerie de tous les exploitants agricoles français.

Les banques aussi doivent être solidaires. Elles l'ont été en apportant 250 millions d'euros de prêts bonifiés au secteur laitier. Je souhaite qu'elles le soient désormais pour l'ensemble des filières, qu'elles participent davantage, par des prêts à des taux bonifiés non à un taux de 13 % mais à un taux acceptable et supportable, au soutien à l'agriculture française, de manière à la relancer véritablement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Bernard Cazeneuve, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Il y a quelques semaines, s'exprimant de Bruxelles, le Président de la République a qualifié de fable l'hypothèse d'un lien entre l'attentat de Karachi, qui a coûté la vie à onze salariés de DCNS, et le versement de commissions qui auraient bénéficié à des civils et militaires pakistanais et auraient pu faire l'objet de rétrocommissions bénéficiant à des acteurs politiques français.

Le Président de la République a eu l'occasion de dire qu'il regrettait la manière dont il s'est exprimé. Il est vrai que ce propos constitue une nouvelle intrusion de sa part dans la sphère judiciaire, dont il est censé assurer l'indépendance ; en même temps, cela sonnait comme l'impossibilité pour les familles d'accéder un jour à la vérité.

De nouveaux éléments sont diffusés par voie de presse depuis quelques jours sur le fondement de nouveaux témoignages émanant des salariés de DCNS. Ces témoignages établissent de façon assez précise ce système de commissions. Ces éléments m'amènent à poser trois questions précises.

Premièrement, y a-t-il, oui ou non, monsieur le Premier ministre, un système de commissions adossé à ce contrat ? Et si oui, à qui ces commissions ont-elles bénéficié ?

Deuxièmement, est-il vrai que 85% des commissions ont été versées dès 1994 pour un contrat qui s'est achevé en 2008 ? Si tel était le cas, le dispositif serait à ce point dérogatoire qu'il justifierait quelques questions complémentaires.

Troisièmement, est-il vrai qu'aux termes de la convention de l'OCDE interdisant certaines formes de commissions, des sociétés off shore aient été mises en place à partir du Luxembourg, permettant de poursuivre le versement de ces commissions dans un contexte d'opacité qui ne serait en aucun cas acceptable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur le député, je connais malheureusement bien le drame qui s'est produit le 8 mai 2002 à Karachi. Je venais de prendre mes fonctions de ministre de la défense. Je me suis rendue immédiatement sur place et, depuis, à de très nombreuses reprises, j'ai reçu les blessés et les familles des victimes. Croyez que nul ne souhaite plus que moi que l'information la plus grande puisse être transmise aux familles, que la transparence règne dans ce dossier et que toute la lumière soit faite.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Une enquête préliminaire a été ouverte le 27 mai 2002. Deux juges d'instruction ont été nommés et ils disposent depuis de tous les moyens, y compris ceux de la coopération internationale. Toutes les hypothèses sont étudiées. Aucune n'est écartée. Tous les éléments sont examinés par les juges ; ils ont d'ailleurs reçu les familles au mois de juin dernier pour les tenir informées des derniers développements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nos questions sont précises, madame la ministre !

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

L'instruction se poursuit, des témoignages sont reconnus et, hier, le ministre de la défense a déclassifié l'ensemble des documents qui lui avaient été demandés par les magistrats au mois de juin dernier.

Debut de section - PermalienMichèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Quant à votre question sur d'éventuelles rétrocommissions, il appartient aux juges d'instruction d'apprécier, en toute indépendance, comme cela a été le cas dans cette affaire depuis le début, les suites qu'ils entendront donner à l'ensemble des éléments qu'ils auront recueillis. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Patrick Beaudoin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Patrick Beaudouin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Monsieur le président, mes chers collègues, permettez-moi d'associer à ma question, qui s'adresse à Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants, mes collègues Jean-François Lamour, Jean-Claude Mathis et Georges Colombier.

La solidarité de la nation envers celles et ceux qui se sont battus pour défendre ses valeurs et nos libertés constitue un devoir imprescriptible de la République envers ses anciens combattants. C'est à ce titre, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez bien voulu, à la demande de la majorité présidentielle, inscrire une nouvelle revalorisation de deux points de la retraite du combattant dès le projet de loi de finances initial.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Mais cette solidarité s'étend aussi aux conjoints survivants, Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, une allocation différentielle a été créée en 2007 en faveur des veuves d'anciens combattants justifiant de faibles revenus. Cette mesure, issue d'un amendement parlementaire, a constitué un progrès indéniable. Elle permet désormais de garantir un revenu minimum de 750 euros à ses bénéficiaires.

Monsieur le secrétaire d'État, c'est bien, mais chacun a conscience que ce n'est pas suffisant. Je connais le difficile contexte économique et je sais les lourdes contraintes budgétaires actuelles. Mais cela ne nous dispense pas d'un effort en direction des plus faibles et, en particulier, des ressortissants de l'Office national des anciens combattants qui gèrent ce fonds et rencontrent des difficultés.

Le projet de loi de finances pour 2010 attribue à l'allocation différentielle des crédits à hauteur de 5 millions d'euros, ce qui ne permettra pas d'aller au-delà du plafond de 750 euros par mois. C'est pour cette raison que mes collègues de la majorité – en particulier du groupe UMP – et moi-même souhaiterions une revalorisation de cette aide dès l'année prochaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Pourriez-vous faire savoir à notre assemblée si vous y êtes favorable et nous indiquer, le cas échéant, de quel montant elle pourrait être, et si vous comptez la sanctuariser pour les années prochaines ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Vous l'avez souligné, monsieur le député, l'allocation différentielle est une véritable mesure sociale due aux conjoints survivants d'anciens combattants. Cette allocation complémentaire a permis jusqu'à présent d'attribuer une prestation de 750 euros à près de 4 000 personnes.

Nous avons inscrit à ce titre au prochain budget, que nous allons examiner dans quelques jours, 5 millions d'euros, lesquels vont nous permettre de faire passer la prestation différentielle de 750 à 800 euros au 1er janvier 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – « Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

C'est un effort de justice sociale. Soyons humbles : cet effort permettra à ces personnes ô combien nécessiteuses d'avoir le complément qu'elles méritent et à l'État, c'est-à-dire à la République, d'être solidaire de ses combattants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à Mme Monique Iborra, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Iborra

Ma question, à laquelle j'associe mon collègue William Dumas, député du Gard, s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Plus d'un agent sur trois a suivi, hier, l'appel à la grève de l'intersyndicale de Pôle emploi. En Midi-Pyrénées, le taux était de 40 %.

Les conditions de travail deviennent inacceptables et les services rendus aux demandeurs d'emploi sont particulièrement dégradés et inefficaces en dépit des efforts considérables consentis par les salariés du service public de l'emploi, depuis plusieurs mois. Certes, la crise et la hausse du nombre des demandeurs d'emploi ne sont pas étrangères à cette situation, mais il faut rappeler que la loi bâclée, d'inspiration technocratique, votée par votre majorité dans la précipitation sur injonction du Président de la République, contenait déjà tous les germes des dysfonctionnements que nous avions dénoncés à l'époque et qui, malheureusement, se vérifient aujourd'hui.

Encore plus grave, dans le contexte de crise, vous attribuez à Pôle emploi de nouvelles compétences : la formation de tous les demandeurs d'emploi, la gestion des contrats d'apprentissage, celle du RSA. Vous lui assignez des objectifs irréalisables, semant le désarroi et la confusion, y compris parmi les cadres, impuissants à les tenir malgré les renforts en personnels octroyés, ceux-ci étant peu adaptés à la situation parce qu'ils ne sont pas formés, et malgré la sous-traitance à des organismes privés, dont les performances sont loin d'être évidentes.

En vérité, les salariés prennent de plein fouet les erreurs et l'amateurisme de cette fusion difficile et déstabilisante pour eux dans un contexte de chômage inédit.

Ma question est simple et précise : au lieu de distribuer des questionnaires, ne serait-il pas plutôt raisonnable de surseoir momentanément à l'installation des agences uniques qui, lorsqu'elles se réalisent, se contentent de nommer un directeur sans qu'il y ait d'ailleurs de véritable fusion, ne pouvant aller plus loin dans la mise en place ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi.

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Madame Iborra, nous sommes d'accord sur un point : notre priorité, dans cette période très difficile, est de rendre le meilleur service possible à ceux qui cherchent un emploi. Pôle emploi est évidemment en première ligne. Rapprocher l'ANPE et l'ASSEDIC n'est pas une tâche facile. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que cette réforme avait été ajournée depuis de trop nombreuses années. La crise, vous l'avez reconnu vous-même, ne facilite évidemment pas la tâche.

C'est pour cette raison que nous nous employons, avec Christine Lagarde, à améliorer, étape après étape, le fonctionnement de Pôle emploi, grâce au renfort d'équipes sur le terrain, au travail de concertation intensifié avec les agences d'intérim ou encore à un meilleur traitement des dossiers pour éviter les retards.

Le travail accompli dans cette période très difficile par les agents de Pôle emploi a permis d'obtenir de premiers résultats. Néanmoins, et les agents l'ont exprimé hier, la crise fait peser sur leurs épaules une charge lourde. C'est pour cette raison que nous avons demandé à Christian Charpy de travailler, en même temps que nous améliorons le service rendu aux demandeurs d'emploi, sur les conditions de travail. Cela implique de signer une convention collective avec les agents, de revoir les méthodes de travail internes et aussi de réfléchir à l'organisation des agences.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Arrêtez ! Vous avez vu ce qui se passe à Amiens ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Le but est bien d'obtenir les deux, parce que ce sont les deux faces de la même médaille : le service rendu aux demandeurs d'emploi et l'amélioration interne du travail des agents.

Pour conclure, madame Iborra, j'aimerais vous poser à mon tour quelques questions. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Première interrogation : voulez-vous revenir au système ANPE et ASSEDIC ? Deuxième interrogation : voulez-vous revenir à un système dans lequel le demandeur d'emploi était contraint de se rendre dans deux lieux différents ?

Debut de section - PermalienLaurent Wauquiez, secrétaire d'état chargé de l'emploi

Troisième interrogation : voulez-vous revenir à un système dans lequel le demandeur d'emploi devait jongler entre plusieurs conseillers ? Vous peut-être ; ceux qui cherchent un emploi, sûrement pas ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Yves Cousin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Vous le savez, monsieur le secrétaire d'État à la justice, l'amiante est un drame. Chaque jour, ce sont des personnes qui souffrent ou qui meurent. Les parlementaires impliqués dans ce dossier ont des familles, des amis ou des proches concernés par ce drame. Le groupe d'études sur l'amiante, dont je suis membre, ainsi que la mission d'information continuent ce travail. Les victimes de l'exposition à l'amiante ont des attentes légitimes et fortes à l'égard de la justice.

Des pôles de santé publique ont été mis en place. Pour assurer sa mission, l'institution judiciaire doit faire face à des difficultés dont nous avons conscience : la diversité des situations concernées et la technicité de la matière impliquent des investigations lourdes. J'ajoute que les pôles de santé publique sont amenés à traiter un nombre élevé de dossiers très importants, mais aussi très variés et hors du champ d'application du sujet que j'évoque. Globalement se pose donc un problème de moyens.

Je sais, monsieur le secrétaire d'État, votre volonté et celle de Mme la ministre d'État de faire progresser ce dossier. Vous aviez souhaité inviter les parlementaires concernés à une réunion de travail à la Chancellerie. Guy Lefrand et moi-même vous avions demandé d'y associer les représentants de l'Association nationale des victimes de l'amiante. La réunion de ce matin avec les parlementaires du groupe d'étude, la mission d'information et avec, ce dont je vous remercie, les représentants de l'ANDEVA a montré votre volonté d'avancer sur ce sujet douloureux et nous y sommes sensibles.

Ma question sera donc double : j'aimerais connaître la méthode que vous souhaitez utiliser et les moyens, tant humains que matériels, que vous pourrez déployer pour faire avancer ce dossier douloureux. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice.

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état à la justice

Monsieur Jean-Yves Cousin, vous avez raison d'évoquer un drame national et humain qui mobilise de nombreux députés sur l'ensemble de vos bancs.

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état à la justice

Oui, le scandale de l'amiante, c'est aujourd'hui, en France, chaque année, deux mille personnes décédées, plus peut-être.

Debut de section - PermalienJean-Marie Bockel, secrétaire d'état à la justice

Dans les années à venir, les perspectives sont, il faut le dire, assez sombres. Des réponses ont été apportées depuis un certain nombre d'années tant sur le plan civil – avec le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante et les procédures civiles – que sur le plan pénal, car, vous l'avez dit, la justice doit passer.

La réunion de ce matin, c'est vrai, a été constructive et vous avez eu raison, avec vos collègues de la mission d'information, autour de son président, Patrick Roy, et de son rapporteur, Guy Lefrand, d'associer l'ANDEVA. Nous avons, je le crois, bien travaillé ensemble.

Oui, monsieur le député, nous allons renforcer les moyens humains d'enquête. Aujourd'hui, ces moyens sont déjà importants, mais la masse de dossiers qui, hélas, a beaucoup augmenté, nous contraint à aller plus loin. Nous y travaillons avec Michèle Alliot-Marie et le ministre de l'intérieur au niveau des enquêteurs. Les assistants de justice, dont le rôle au pôle de santé publique de Paris est essentiel, verront, dès la semaine prochaine, leur nombre renforcé, comme s'y est engagée Mme la garde des sceaux. Nous nous reverrons régulièrement, avant la fin de l'année, pour débattre de la méthode de travail.

Oui, c'est notre devoir et c'est l'honneur de la France d'apporter des réponses aux victimes et d'apporter une réponse aux victimes du scandale de l'amiante ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Traitement par la justice des dossiers concernant l'amiante

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010 (nos 1946, 1967).

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

Nous allons maintenant entendre les porte-parole des groupes.

La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, mes chers collègues, quels sont les messages que veut faire passer le groupe du Nouveau Centre dans le cadre de la discussion du budget de l'État et de celui de la sécurité sociale pour 2010 alors que nous vivons la crise économique et sociale la plus grave depuis soixante-quatre ans ?

C'est très simple, il y en a quatre.

Le premier message, c'est que le niveau du déficit des finances publiques est insoutenable, que la seule reprise économique n'est pas susceptible de le résorber et qu'il faut donc aller plus loin dans la réduction des dépenses et la pérennisation des recettes, voire leur augmentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le deuxième message, c'est qu'il faut mettre plus de justice dans le système des prélèvements obligatoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le troisième message, c'est que la plus importante réforme du financement des collectivités territoriales depuis la loi Defferre de 1982 doit s'inspirer de trois principes fondateurs de la démocratie locale : l'autonomie fiscale, c'est-à-dire le maintien d'un lien fort entre les élus locaux et leurs électeurs pour qu'ils puissent, à travers leurs votes, porter un jugement sur l'adéquation entre le niveau des services publics locaux et le niveau de la pression fiscale ; le lien entre les collectivités locales et les entreprises implantées sur leur territoire ; la péréquation entre les collectivités riches et les collectivités pauvres. M. Vigier a développé nos propositions en la matière hier soir, je n'y reviendrai pas.

Le quatrième message, c'est qu'il faut « verdir » notre fiscalité de façon à récompenser les citoyens ou entreprises qui modifient leur comportement dans un sens écologique mais aussi de façon à pénaliser ceux qui refusent de le faire.

Le Gouvernement a bien géré le plan de relance, mais il n'est pas allé encore assez loin dans la maîtrise des dépenses publiques dépendant de l'État et de la sécurité sociale.

Je voudrais tout d'abord rendre hommage au Gouvernement et en particulier à Éric Woerth pour la bonne gestion du plan de relance. Le Nouveau Centre a soutenu le Gouvernement,…

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

…estimant que ce plan était correctement calibré, qu'il était concentré sur l'investissement et le soutien aux catégories les plus modestes de nos concitoyens, avec un certain nombre de mesures sectorielles dans les secteurs en difficulté. Nous vous donnons un satisfecit, monsieur le ministre. Vous n'avez pas cédé à ceux qui voulaient augmenter encore massivement le déficit public et distribuer des prestations supplémentaires. Le jour où nous aurions été obligés de « débrancher », nous aurions eu une crise encore plus grave.

Mais, et c'est mon second point, en ce qui concerne l'État, la hausse des dépenses est excessive puisqu'elle n'est pas de 1,2 % mais de 2,7 %.

La hausse affichée par le Gouvernement est de 1,2 %, soit 4,4 milliards d'euros, la dépense passant de 348,2 milliards en 2009 à 352,6 milliards en 2010. Cette présentation va dans le sens souhaité par le groupe Nouveau Centre, puisqu'elle tient compte des prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l'Union européenne et neutralise les effets du plan de relance, soit 38,6 milliards en 2009 et 7,1 milliards en 2010. En revanche, elle ne tient pas compte de trois éléments considérables.

Il s'agit tout d'abord de l'impact de la réforme de la taxe professionnelle. Certes, ne pas en tenir compte en totalité en 2010, c'est-à-dire pour 11,6 milliards, est légitime, mais il faudrait tenir compte du coût annuel en période de croisière, c'est-à-dire 4,2 milliards, qu'il convient d'ajouter aux 4,4 milliards de la norme dite élargie.

Ensuite, il convient de tenir compte des remboursements et dégrèvements sur les impôts locaux – c'est un vieux débat que nous avons avec les ministres successifs –, car il s'agit bien d'une dépense de l'État. Ils passent de 17,3 milliards en 2009 à 19,1 milliards en 2010, soit une hausse de 1,8 milliard, plus de 10 %, ce qui est considérable. La chute de la richesse française, puisqu'il y a une contraction du PIB, entraîne en effet une chute de la valeur ajoutée, et donc une augmentation de plus de un milliard du coût du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée. Cette dérive considérable, que l'État prend en charge, constitue l'essentiel de la hausse de 1,8 milliard.

Enfin, les dépenses fiscales hors plan de relance s'accroissent de 1,5 milliard d'euros, passant de 70,7 milliards en 2009 à 72,2 milliards en 2010. C'est mieux que les années précédentes, il faut être honnête, puisque nous en étions depuis des années à 5 milliards supplémentaires chaque année. Cette hausse est due pour l'essentiel à la baisse de la TVA sur la restauration, pour 1,3 milliard. Sans cette mesure, nous aurions grosso modo stabilisé le montant des dépenses fiscales, ce qui était déjà un effort considérable. J'observe d'ailleurs que, comme l'a souligné M. le rapporteur général dans son rapport, nous n'avons pas tenu la promesse que nous avions faite : aucune dépense fiscale supplémentaire sans une économie à due concurrence.

Si l'on ajoute ces trois éléments à la norme élargie, qui augmente de 1,2 %, on constate une augmentation réelle de 11,9 milliards, puisqu'on passe de 436,2 milliards en 2009 à 448,1 milliards en 2010, ce qui représente une hausse de 2,7 %. Or la situation actuelle du pays ne nous permet de laisser croître la dépense publique dans une telle proportion. Si on ne revient pas à un chiffre proche de zéro, il sera impossible de redresser nos finances. Je rappelle que l'augmentation en volume se situe à 2,7 %, soit 1,5 % de plus que l'objectif affiché, alors qu'il faudrait atteindre celui de zéro en valeur.

Par ailleurs, le poids des dépenses publiques – État, sécurité sociale, collectivités territoriales – frôlera en 2010 le taux de 56 % de la richesse nationale. C'est un record historique. D'après le rapport économique et financier, la hausse des dépenses des organismes de sécurité sociale est extrêmement forte. Son augmentation a été de 4,7 % en 2009 et, d'après les prévisions du Gouvernement, elle devrait se situer à 4,2 % en 2010. Dans ces conditions, comment nos collègues de gauche peuvent-ils prétendre que nous réduisons les dépenses de protection sociale ?

Si l'on ajoute les dépenses des collectivités territoriales, dont l'augmentation, de 3,6 % en 2009, sera de 2,4 % en 2010, le poids de l'ensemble des dépenses publiques – État, sécurité sociale, collectivités locales – dans le produit intérieur brut a constamment augmenté. Il est passé de 52,7 % en 2008 à 55,6 % en 2009, et s'établira à 55,9 % en 2010. L'ensemble des dépenses publiques se montera alors à 1 100 milliards pour un PIB de 1 970 milliards. Leur hausse continue, rapportée à la richesse créée, mettra bientôt la France au premier rang de toutes les nations développées pour la part de la dépense publique dans la richesse nationale.

La chute du poids des prélèvements obligatoires a été aggravée par des mesures fiscales que l'on ne peut pas maintenir. Alors que les charges publiques ont augmenté, le taux des prélèvements obligatoires est passé de 43,9 % du PIB en 2006 à 43,2 % en 2007, puis à 42,8 % en 2008. Sa chute date donc d'avant la crise. Outre le fait que des mesures ont été prises pour réduire ces prélèvements, la crise a accéléré leur chute de manière spectaculaire : ils sont tombés à 40,7 % du PIB en 2009, enregistrant en un an une baisse de 2,1 % due, pour 1,3 %, à la crise et, pour 0,8 %, aux mesures de réduction d'impôt.

En 2010, le taux de prélèvements obligatoires sera stabilisé à 40,7 % du PIB, parce que la hausse spontanée de 0,8 point – soit 16 milliards – est compensée par un ensemble de baisses, dont la principale est la réforme de la taxe professionnelle, qui représente à elle seule 0,6 point de PIB.

Non seulement on ne peut plus continuer à baisser les prélèvements obligatoires jusqu'à la fin de la mandature, mais il faudra probablement les remonter lentement. N'oublions pas qu'en dix ans, les prélèvements obligatoires ont été réduits de 66 milliards par une suite de décisions dont nous payons aujourd'hui les conséquences.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Le niveau des déficits publics va entraîner l'explosion de la dette. En 2010, le déficit public augmentera encore légèrement, puisqu'il passera de 8,2 % du PIB à 8,5 %. La dette publique a donc évolué de 63,8 % en 2007 à 68,1 % en 2008, puis à 77,1 % en 2009. Elle sera de 84 % en 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

En trois ans, elle aura progressé de 20 points de PIB. La réduction des déficits publics de 1 % du PIB par an envisagée par le Gouvernement supposerait une croissance du PIB en volume de 2,5 % par an et le maintien d'une croissance en volume de 1 % de la dépense publique, ce qui n'est pas crédible pour deux raisons.

D'une part, le Gouvernement nous a expliqué, à juste titre, que le potentiel de croissance français à moyen et long terme ne dépasse pas actuellement 1,7 à 1,8 %.

D'autre part, même s'il n'est pas impossible, contrairement à ce que croient nos collègues de gauche, de contenir l'ensemble des dépenses publiques à 1 % en volume, cela supposerait de prendre des décisions d'un courage extrême. Certes, monsieur le ministre, vous êtes courageux.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Mais le meilleur ministre du budget est généralement le plus honni de ses collègues.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

M. Woerth est l'exception qui confirme la règle !

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Il se retrouve seul dans une situation difficile. La France ne se résoudra à tenir l'augmentation de 1 % en volume que le dos au mur. Or c'est dans cette situation que nous sommes aujourd'hui. À moyen terme, il ne servirait à rien de changer de majorité, car nous n'avons plus de marges de manoeuvre. Il faut l'expliquer aux Français.

Le véritable enjeu est de prendre en compte l'exemple japonais. Contrairement à ce qu'on prétend, on peut passer d'un endettement de 100 % à 200 %. Celui du Japon atteint même 220 %. Mais ce pays ne connaît plus de croissance, la totalité de l'épargne des ménages étant absorbée par le financement du déficit public. Pour 2010, le Gouvernement estime le nôtre à 170 milliards, ce qui représente pratiquement le montant de l'épargne brut des ménages français. Autant dire que, si nous vivions dans une économie fermée, il n'y aurait plus un sou pour financer les investissements du secteur privé, réduit de ce fait à l'autofinancement. La France importe de l'épargne étrangère pour financer sa dette publique, détenue à près de 60 % par des non-résidents.

Je vous le concède, la situation des États-Unis est encore pire. Le déficit public américain se situe non à 8,5 % mais à 12 ou 13 % du PIB...

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

…et l'épargne, qui commence tout juste à se reconstituer, ne dépasse pas 3 %. Les entreprises s'endettent à l'étranger pour financer leurs investissements, comme le fait, à tour de bras, l'État fédéral. À qui s'adressent-ils ? Aux États pétroliers, au Japon, à l'Inde, à la Chine et à l'Allemagne, pays qui détiennent à eux seuls l'essentiel de l'épargne mondiale disponible. Mais combien de temps cela durera-t-il ?

Je pense comme le rapporteur général que, du fait de la nécessité pour les grandes puissances de financer leurs déficits publics, le dollar est va connaître un affaissement. Le Président Obama se dérobe quand il s'agit de parité du dollar, mais ceux qui prêtent encore aux États-Unis vont vouloir gagner plus. Or leur rémunération réelle est constituée par le différentiel entre le taux d'intérêt américain et l'évolution à la baisse du dollar. Cette situation pèsera sur la zone euro et sur le monde entier. Je partage donc l'analyse des nombreux banquiers qui tablent sur la remontée des taux d'intérêts à moyen, voire à court terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Ne croyons pas que nous continuerons à financer une partie de notre déficit au taux d'intérêt de 0,3 %, auquel nous finançons le déficit de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

À cet égard, nous voulons vous aider, monsieur le ministre. Le Nouveau Centre est même la seule famille politique qui avance des propositions pour réduire la dépense publique. Nous proposons de la réduire d'environ cinq milliards. Le déficit structurel de l'État est en effet de 50 milliards, et notre objectif est de le réduire en dix ans, ce qui reste une ambition très modérée.

La première grande mesure que nous vous proposons vise à réduire de 5 % les niches fiscales, ce qui doit s'entendre globalement.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

La réduction escomptée représente 5 % de 72 milliards, soit 3,5 à 3,6 milliards. Cette idée, nous la partageons. Vous nous avez annoncé en commission que l'Inspection générale des finances a entrepris une étude complète des 470 niches existant actuellement, qui sera terminée au milieu de l'année prochaine. Vous nous ferez alors des propositions, que nous sommes prêts à accepter. Une réduction de 5 % n'aurait rien d'excessif.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

La seconde mesure que nous préconisons vise, comme le suggère la Cour des comptes, à réduire les exonérations des charges sociales patronales sur les grandes entreprises, à l'exception du secteur automobile – que notre jeune collègue David Douillet se rassure !

À moyen terme, le Nouveau Centre souhaite que le Gouvernement s'inspire de l'initiative de nos collègues allemands, qui ont constitutionnalisé le retour à l'équilibre, non sans prévoir quelques aménagements, pour fixer une direction. Une telle réforme serait solennelle. Nous avons du moins obtenu, lors de la dernière réforme constitutionnelle, que la loi de programmation des finances publiques fixe une stratégie à moyen terme.

J'en viens au second message que nous voulons faire passer au Gouvernement : il doit aller plus loin dans la justice fiscale et sociale, comme dans l'efficacité économique des mesures qu'il propose. À cet égard, il a raison d'assujettir à la CSG et à la CRDS les plus-values sur les valeurs mobilières au premier euro. Par souci de cohérence, il faudrait également les soumettre à l'impôt sur le revenu. Le commun des mortels ne peut en effet comprendre que certains revenus soient soumis à tel impôt et non à tel autre. Je vous sais, monsieur le ministre, ouvert à cette proposition.

Quant au bouclier fiscal, nous y sommes favorables tant que l'ISF est maintenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Une solution radicale consisterait à supprimer l'ISF, tout en créant une tranche supplémentaire d'imposition à 45 % pour les revenus dépassant 100 000 euros, ce qui aurait exactement le même effet.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Dans ce cas, on pourrait même maintenir le bouclier fiscal, qui ne servirait plus à rien. Le problème serait résolu durablement et nos collègues de gauche n'auraient plus à voter l'exonération de Liliane Bettencourt, comme dirait M. Brard ou, pour le dire autrement, de l'outil de travail.

Sachant qu'il faut augmenter les prélèvements pour financer la protection sociale française, on ne peut soutenir que les plus fortunés doivent échapper au nécessaire effort de solidarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Notre troisième message est que le Nouveau Centre souhaite un durcissement de la politique de plafonnement des niches, que nous avons obtenue après deux ans de batailles et à laquelle vous avez oeuvré.

En quatrième lieu, nous vous proposons de durcir la taxation du carried interest, dans la ligne de l'amendement Arthuis, qui est actuellement contourné. Nous vous proposons de le considérer comme un traitement ou salaire.

Nous vous proposons enfin d'aller plus loin dans le soutien aux jeunes en exonérant de cotisations patronales le premier CDI des moins de 25 ans. Cette disposition serait financée par une réduction de 1,6 à 1,5 du plafond d'exonération des charges sociales patronales. Il s'agit par conséquent d'une mesure de redéploiement.

Pour conclure, monsieur le ministre, le groupe Nouveau Centre voudrait rendre hommage à vos efforts. Vous avez beaucoup de mérite : vous poursuivez la réduction des effectifs de la fonction publique, vous prévoyez toute une série d'économies, et vous vous montrez particulièrement ouvert à toutes les mesures destinées à limiter la croissance des dépenses.

Vous le savez, vous pouvez compter sur notre groupe pour aller encore au-delà de vos propres propositions, tant en matière de réductions de charges que pour assurer une protection voire une hausse des recettes. En effet, mes chers collègues, nous ne pouvons pas vivre durablement au-dessus de nos moyens en faisant payer aux générations futures le coût de nos déficits publics à répétition depuis 1981. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC.)

Erreur ! Signet non défini.. Charles de Courson a raison !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Monsieur le président, monsieur le ministre du budget, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, un an après la faillite de Lehman Brothers, la « crise du siècle » semble déjà passée de mode, à tel point que, depuis plusieurs semaines, nos conversations et nos prises de positions sur le projet de loi de finances laissent penser que, désormais, le plus dur est derrière nous.

Pour ma part, je ne crois pas que nous ayons traversé la période le plus difficile de la crise et, si la tempête financière est manifestement passée, je pense que nous devrons désormais en gérer les conséquences durant plusieurs années. Cette crise a provoqué un ralentissement brutal qui a stoppé net la machine économique pendant plusieurs semaines et interrompu la création de valeur entraînant les effets que nous connaissons.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je voudrais d'abord saluer l'efficacité de la réponse publique française face à la crise. La France fut réactive, je crois que chacun en convient, et si j'observe, ici et là, que s'expriment parfois des reproches, par exemple en ce qui concerne la stratégie, ces derniers ne sont guère documentés et ils sont assénés à la volée, sans réelle démonstration.

Tant le plan de sauvetage des banques que le plan de relance de l'économie ont contribué à un rebond rapide de l'économie française. Alors qu'au début de l'année 2009 les experts s'accordaient à dire que le retour de la croissance n'aurait pas lieu avant la fin du premier semestre 2010, dès le premier trimestre 2009, le rebond du PIB de 0,3 %...

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…qui devrait se maintenir tout au long de l'année selon les analyses de l'INSEE, laisse croire à une fin de récession plus rapide que prévue – en tout cas inattendue sur certains bancs de cet hémicycle. À ce stade, chacun ne peut que s'en féliciter même si, je le répète, nous avons tous conscience que la gestion des conséquences de la crise est devant nous.

La première des conséquences de la crise est le chômage. Il a progressé de façon vertigineuse en 2009, et les prévisions ne laissent guère entrevoir d'améliorations significatives pour 2010. Dans ce cadre, tant la prolongation des mesures du plan de relance que les dispositifs spécifiques pour faciliter l'embauche et le retour à l'emploi – je pense naturellement à l'efficacité attendue de Pôle emploi – apparaissent plus que jamais nécessaires, et font de la lutte contre le chômage une priorité absolue du projet de loi de finances pour 2010. Ainsi, 11,4 milliards d'euros sont consacrés à l'emploi en plus du l, 8 milliard prévu dans le cadre de la mission de relance.

La stratégie visant à substituer le déficit budgétaire au recettes manquantes apparaît, elle aussi, comme une nécessité puisque c'est 65 milliards d'euros qui n'ont pas été perçus directement en raison de la crise. Aujourd'hui, prélever davantage d'impôts sur les Français ou sur les entreprises, pénaliserait le pouvoir d'achat des ménages, dans le premier cas, ou la capacité de création d'emplois des entreprises, dans le second ; or ni l'un ni l'autre ne sont souhaitables.

Dans ce contexte difficile, et chacun observera que je n'éluderai dans mon intervention aucun sujet qui fâche, était-il nécessaire de maintenir les trois réformes fiscales majeures de ce budget : l'instauration de la taxe carbone, la suppression de la taxe professionnelle, la réduction du taux de TVA sur les cafés et restaurants, dite TVA restauration ? Je pense utile d'en parler, et d'apporter ma contribution au débat.

Première grande réforme : l'instauration de la taxe carbone. La mise en place cette taxe résulte d'un double choix. Il s'agit d'abord de respecter l'article 2 de la loi dite Grenelle 1 votée à la quasi-unanimité par l'Assemblée nationale. Je rappelle que la loi a été adoptée avec cinq cent vingt-six voix pour, quatre voix contre, et vingt et une abstentions. Il s'agit ensuite du choix d'encourager les comportements vertueux, au sens du développement durable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…qui devrait se maintenir tout au long de l'année selon les analyses de l'INSEE, laisse croire à une fin de récession plus rapide que prévue – en tout cas inattendue sur certains bancs de cet hémicycle. À ce stade, chacun ne peut que s'en féliciter même si, je le répète, nous avons tous conscience que la gestion des conséquences de la crise est devant nous.

La première des conséquences de la crise est le chômage. Il a progressé de façon vertigineuse en 2009, et les prévisions ne laissent guère entrevoir d'améliorations significatives pour 2010. Dans ce cadre, tant la prolongation des mesures du plan de relance que les dispositifs spécifiques pour faciliter l'embauche et le retour à l'emploi – je pense naturellement à l'efficacité attendue de Pôle emploi – apparaissent plus que jamais nécessaires, et font de la lutte contre le chômage une priorité absolue du projet de loi de finances pour 2010. Ainsi, 11,4 milliards d'euros sont consacrés à l'emploi en plus du l, 8 milliard prévu dans le cadre de la mission de relance.

La stratégie visant à substituer le déficit budgétaire aux recettes manquantes apparaît, elle aussi, comme une nécessité puisque c'est 65 milliards d'euros qui n'ont pas été perçus directement en raison de la crise. Aujourd'hui, prélever davantage d'impôts sur les Français ou sur les entreprises, pénaliserait le pouvoir d'achat des ménages, dans le premier cas, ou la capacité de création d'emplois des entreprises, dans le second ; or ni l'un ni l'autre ne sont souhaitables.

Dans ce contexte difficile, et chacun observera que je n'éluderai dans mon intervention aucun sujet qui fâche, était-il nécessaire de maintenir les trois réformes fiscales majeures de ce budget : l'instauration de la taxe carbone, la suppression de la taxe professionnelle, la réduction du taux de TVA sur les cafés et restaurants, dite TVA restauration ? Je pense utile d'en parler, et d'apporter ma contribution au débat.

Première grande réforme : l'instauration de la taxe carbone. La mise en place cette taxe résulte d'un double choix. Il s'agit d'abord de respecter l'article 2 de la loi dite Grenelle 1 votée à la quasi-unanimité par l'Assemblée nationale. Je rappelle que la loi a été adoptée avec cinq cent vingt-six voix pour, quatre voix contre, et vingt et une abstentions. Il s'agit ensuite du choix d'encourager les comportements vertueux, au sens du développement durable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

En effet, mes chers collègues, il n'est pas possible de tenir ou de soutenir un discours appelant à une prise de conscience de la situation de l'environnement, de s'enflammer pour les films de Yann Arthus-Bertrand, de Nicolas Hulot et, bientôt, pour celui de Jacques Perrin, et, simultanément, ne rien faire.

Oui, il fallait instaurer cette taxe carbone et, pour tenir compte de la situation économique et financière, il convenait, de l'accompagner, d'une part, d'exonérations propres à préserver la compétitivité de l'économie et, d'autre part, de compensations supplémentaires afin de garantir le pouvoir d'achat des ménages dont chacun conviendra qu'il n'a pas besoin d'être réduit en ce moment.

Toutefois, j'appelle l'attention de chacun sur les volumes financiers de cette taxe, soit 2,6 milliards d'euros prélevés sur les ménages et 1,9 milliard d'euros sur les entreprises, soit 4,5 milliards d'euros au total, montant qui aujourd'hui est intégralement compensé, nous sommes tous d'accord sur ce point. Toutefois, dans le cas où la taxe carbone atteindrait son objectif, elle rapporterait de moins en moins, et il nous appartiendrait alors de veiller à la réduction des compensations à due concurrence. Là encore, comme pour la taxe professionnelle, il y aura des gagnants et des perdants, et nous devrons tous l'assumer – puisque nous étions tous en faveur de cette mesure. Ainsi, nous irions au terme du processus de la taxe carbone qui est d'abord, et en tout premier lieu, un choix politique en faveur l'environnement.

Deuxième grande réforme, la suppression de la taxe professionnelle est qualifiée par Gilles Carrez, dans son rapport, de réforme fiscale la plus importante de la décennie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il a raison, D'ailleurs, je crois me faire l'interprète de beaucoup d'entre vous en observant qu'en commission des finances – je m'exprime sous le contrôle du président de la commission, Didier Migaud – nombre de dispositions relatives à cette réforme ont été discutées dans un esprit particulièrement constructif, ce qui montre que chacun d'entre nous était attaché à la disparition de cet impôt autrefois qualifié d'imbécile.

Gilles Carrez a raison de rappeler dans son rapport que le mouvement de suppression de cette taxe a été enclenché en 1999 et confirmé en 2006 par le dégrèvement pour les investissements nouveaux. Aujourd'hui, il trouve son aboutissement grâce à la volonté du Gouvernement et de la majorité d'assumer pleinement cette mesure.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Montebourg

La taxe professionnelle n'était pas si imbécile que cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Substitution à la taxe professionnelle de la contribution économique territoriale avec son mécanisme de double assiette et compensations : nous reviendrons longuement sur tous les aspects de cette réforme dans nos débats. Toutefois, si je m'en tiens à l'aspect politique, deux questions se posent. Cette réforme est-elle un bien ou un mal ? Fallait-il la faire maintenant ?

À mes yeux, cette suppression a un double objectif, faute de quoi, elle n'aurait aucun sens.

Son premier objectif est l'allégement de l'imposition des entreprises, et, en particulier, celle des entreprises industrielles le plus fortement exposées à la concurrence mondiale et à la pression « délocalisatrice » exercée par leurs actionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Nous devons encourager ces entreprises : il s'agit de l'un des sens de cette réforme.

Son second objectif, d'une façon plus générale, consiste à faire disparaître un impôt dont la base fiscale est archaïque et de permettre ainsi l'émergence d'une base nettement plus dynamique et nettement moins décourageante pour l'investissement et l'emploi en France.

J'ai bien saisi le sens du travail accompli par Gilles Carrez et je voudrais lui rendre hommage, ainsi qu'à Marc Laffineur et Jean-Pierre Balligand. Cette réforme a des gagnants, j'insiste sur ce point, mais elle doit aussi veiller à réduire le plus possible le nombre des perdants. Je leur dis à tous les trois que nous ne devons pas perdre de vue l'objectif poursuivi qui ne peut se traduire par une augmentation de la fiscalité de dizaines de milliers de PME françaises.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Ce contre-signal serait totalement préjudiciable à l'économie et à l'emploi. Le problème ne résiderait pas tant dans les sommes acquittées que de la naissance chez les entrepreneurs du sentiment d'avoir été bernés par une réforme en faux-semblants.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous en concluez qu'il est préférable d'imposer les Français !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il ne faut surtout pas que la suppression de la taxe professionnelle puisse être associée à un tel sentiment, sinon tout cela n'aurait servi à rien !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Fallait-il faire cette réforme maintenant ? Mes chers collègues, l'expérience montre – est-ce un bien, est ce un mal, en tout cas, ce sont les faits – l'expérience montre que les réformes les plus ambitieuses ne sont jamais entreprises en période de vaches grasses, mais toujours en période de vaches maigres. Les temps particulièrement rudes que nous connaissons tombent donc à point nommé pour entreprendre une réforme régulièrement repoussée dont nous devrions voir, dès 2010, les effets en matière d'investissement et d'emploi. J'emploie le conditionnel car l'expérience de la réduction de la TVA à 5,5 % pour la restauration montre qu'entre les attentes et les réalisations, il y a parfois de la marge.

La réduction de la TVA pour la restauration est précisément le troisième sujet fiscal majeur du projet de loi de finances. Cette mesure est-elle un succès ? À ce jour, assurément non.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Chacun peste, et les consommateurs en premier, contre le faible effet qu'elle a produit sur la baisse des prix à la consommation dans les cafés et les restaurants. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Rapporteur spécial des crédits de la mission économie, je suis, à ce titre, chargé par la commission des finances de suivre les effets de la réduction du taux de TVA sur les cafés et restaurants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

En même temps, il va falloir acheter une loupe !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je formulerai deux remarques.

Comme il est dit dans un film culte : « Il faut laisser sa chance au produit ». (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

En attendant vous avez versé 3 milliards d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

C'est au terme d'une année que nous pourrons mesurer les effets de la réduction du taux de TVA dans la restauration. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Alors laissons-nous le temps !

Que devons-nous faire durant cette année d'observation ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Commencez par les trois étoiles ! (Rires sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Cette année doit être consacrée non pas à la relégation sous le tapis de la TVA restauration parmi les réformes mal vendues et mal assumées, mais bien au contraire à sa défense et à sa mise en application. Il s'agit en effet d'une réforme qui honore l'engagement politique puisqu'elle fut maintes fois promise et maintes fois repoussée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Cette réforme encourage le commerce de proximité que tous les Français plébiscitent et qu'ils veulent voir prospérer…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

C'est certain : tous les Français mangent ! (Sourires)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Des droits nouveaux existent désormais pour les restaurateurs, mais ils s'accompagnent de devoirs dans le cadre d'un contrat moral passé avec le Gouvernement. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Maintenant, on nous parle de morale ! La finance, ce n'est pas moral !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je constate, mes chers collègues, que ce sujet vous intéresse au plus haut point (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, je vous rappelle que seul M. Chartier a la parole !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Mais il exagère : nous parlons tout de même du gaspillage de 3 milliards d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

J'aurai l'occasion de revenir sur l'application de ce contrat. Aujourd'hui, j'observe que le contrat moral passé entre les restaurateurs et l'État n'est pas satisfaisant. Porte-parole de l'UMP sur le projet de loi de finances, je fais ce constat, même si je pense aussi que nous devons laisser ce dispositif s'appliquer quelques mois pour en juger – après tout, la mesure ne date que de juillet dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Sans cela, ce ne serait pas raisonnable.

Voilà mes chers collègues pour les réformes fiscales majeures de ce projet de loi de finances, qui n'oublie pas une gestion rigoureuse de la dépense publique dans la prolongation de la stratégie fixant le zéro volume de croissance budgétaire.

Je salue cet engagement renouvelé de l'État, essentiel pour les comptes publics comme pour les Français qui sont de plus en plus préoccupés par le niveau des déficits publics.

Éric Woerth traque sans relâche l'économie à réaliser, et je pense que nous devons l'aider dans sa mission, en particulier les commissaires aux finances en charge du contrôle budgétaire. À ce titre, monsieur le ministre, je vous le dis sans faux-semblants : en matière de réduction de la dépense publique les symboles ont autant d'effets, sinon davantage, que les volumes. Je soutiens donc la réduction du parc automobile de l'État et l'augmentation de la contribution pour les logements de fonction, mais il faut aller plus loin, y compris dans des économies de faible volume qui peuvent toutefois être immédiatement réalisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Prenons l'exemple de la banque Oséo, chère aux PME et au plan de relance et si utile pendant la crise économique et financière. Elle continue d'entretenir simultanément quatre structures juridiques. Son conseil d'administration compte 135 membres, qu'elle réunit régulièrement pour prendre des décisions. Au-delà du manque d'efficacité lié à une telle gouvernance, cette situation engendre un surcoût de quatre millions d'euros par an. Or, celui-ci pourrait être évité par une réforme législative simple et rapide, puisque deux articles suffiraient à y remédier. Hélas ! cette réforme ne semble pas figurer, pour l'instant, au rang des priorités, certes nombreuses, du Gouvernement. Eh bien, il est de notre responsabilité de veiller à ce que ces économies budgétaires, et bien d'autres, deviennent notre priorité.

Les Français sont plus que jamais préoccupés par le déficit de leurs comptes publics. À une certaine époque, chère aux gaullistes, l'intendance suivait. Aujourd'hui, elle ne suit plus et, lorsqu'elle suit, ce n'est plus nous qui la payons, mais ce sont les générations futures. Cette situation, nous l'avons tous acceptée et assumée, sous toutes les majorités. Il est temps, désormais, que nous manifestions davantage notre volonté de réduire la dépense publique et, partant, le déficit récurrent de nos comptes publics.

Le Gouvernement et, en particulier, Éric Woerth s'y attèlent. Mais, s'ils y mettent de la bonne volonté, l'exécution semble parfois ralentie. À nous de les aider, en veillant, dans le cadre des rapports spéciaux rédigés par les membres de la commission des finances, à contrôler sans relâche la dépense inutile et à souligner les économies simples et faciles à réaliser. Elles existent, comme en témoigne l'exemple d'Oséo.

Toutefois, on ne peut, dans une démarche globale de réduction de la dépense publique, ne pointer du doigt que le budget de l'État. Les Français, qui sont très vigilants en la matière, ne comprendraient pas que celui-ci se serre la ceinture et que d'autres acteurs de la dépense publique n'affichent pas la même détermination. Or, si l'État s'oblige à respecter le « zéro volume » en cette période de disette budgétaire, la croissance des dépenses de certaines collectivités – je le dis ouvertement et d'autant plus facilement que je suis moi-même dirigeant de collectivités – pose question.

On oublie souvent de rappeler qu'avec un volume de dépenses annuel de plus de 210 milliards d'euros,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Prenons l'exemple de la banque Oséo, chère aux PME et au plan de relance et si utile pendant la crise économique et financière. Elle continue d'entretenir simultanément quatre structures juridiques. Son conseil d'administration compte 135 membres, qu'elle réunit régulièrement pour prendre des décisions. Au-delà du manque d'efficacité lié à une telle gouvernance, cette situation engendre un surcoût de quatre millions d'euros par an. Or, celui-ci pourrait être évité par une réforme législative simple et rapide, puisque deux articles suffiraient à y remédier. Hélas ! Cette réforme ne semble pas figurer, pour l'instant, au rang des priorités, certes nombreuses, du Gouvernement. Eh bien, il est de notre responsabilité de veiller à ce que ces économies budgétaires, et bien d'autres, deviennent notre priorité.

Les Français sont plus que jamais préoccupés par le déficit de leurs comptes publics. À une certaine époque, chère aux gaullistes, l'intendance suivait. Aujourd'hui, elle ne suit plus et, lorsqu'elle suit, ce n'est plus nous qui la payons, mais ce sont les générations futures. Cette situation, nous l'avons tous acceptée et assumée, sous toutes les majorités. Il est temps, désormais, que nous manifestions davantage notre volonté de réduire la dépense publique et, partant, le déficit récurrent de nos comptes publics.

Le Gouvernement et, en particulier, Éric Woerth s'y attèlent. Mais, s'ils y mettent de la bonne volonté, l'exécution semble parfois ralentie. À nous de les aider, en veillant, dans le cadre des rapports spéciaux rédigés par les membres de la commission des finances, à contrôler sans relâche la dépense inutile et à souligner les économies simples et faciles à réaliser. Elles existent, comme en témoigne l'exemple d'Oséo.

Toutefois, on ne peut, dans une démarche globale de réduction de la dépense publique, ne pointer du doigt que le budget de l'État. Les Français, qui sont très vigilants en la matière, ne comprendraient pas que celui-ci se serre la ceinture et que d'autres acteurs de la dépense publique n'affichent pas la même détermination. Or, si l'État s'oblige à respecter le « zéro volume » en cette période de disette budgétaire, la croissance des dépenses de certaines collectivités – je le dis ouvertement et d'autant plus facilement que je suis moi-même dirigeant de collectivités – pose question.

On oublie souvent de rappeler qu'avec un volume de dépenses annuel de plus de 210 milliards d'euros,…

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Elles assurent 75 % des investissements publics !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…les collectivités locales sont devenues un acteur majeur de la dépense publique.

Leur déficit est consolidé dans le cadre des critères de convergence et leurs dépenses de fonctionnement sont équilibrées par l'impôt et les dotations de l'État.

Or, que font-elles tandis que l'État s'oblige au « zéro volume » ? Je prendrai un exemple particulièrement révélateur, celui des budgets des régions. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. S'agissant de l'évolution des volumes budgétaires inscrits aux budgets primitifs entre 2008 et 2009, c'est-à-dire de la croissance de la dépense publique des régions, les pourcentages les plus significatifs sont les suivants. Les frais de personnel ont augmenté de 14,4 % et les frais de fonctionnement de 8,3 %, alors que les dépenses d'investissement ont diminué de 0,2 %. Autrement dit : plus de frais de personnel et de frais de fonctionnement, et moins de dépenses d'investissement.

D'aucuns dénoncent parfois le coût des transferts. Rappelons, à ce propos, le contenu de l'appréciation portée sur le sujet par la direction générale des collectivités locales, confortée par l'analyse financière du forum pour la gestion des villes et des collectivités territoriales, cogéré par la droite et par la gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Selon ces institutions, les montants transférés représentaient, en 2009, 30 % de la hausse des dépenses totales des régions.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Les deux tiers de la croissance des dépenses restent donc à justifier, dont près de 10 % d'augmentation des frais de personnel. Est-ce bien raisonnable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Mes chers collègues, monsieur le ministre, personne ne peut se réjouir que le déficit s'élève à 116 milliards d'euros. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Toutefois, il est inévitable, compte tenu de la conjoncture économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Il nous faut donc continuer à respecter nos engagements, sans céder à la tentation facile de remettre à demain ce qui doit être fait aujourd'hui. Nous devons ainsi poursuivre notre effort de réduction de la dépense, du nombre des fonctionnaires et des implantations publiques, ainsi que du train de vie de l'État. Les Français souhaitent que nous tenions ces engagements, car ils n'acceptent plus un déficit budgétaire récurrent aussi important. Cela tombe bien : la majorité et le Gouvernement non plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je conclus, monsieur le président.

Nous devons soutenir sans réserve le travail responsable qui est mené, et ne pas dire « oui » dans les couloirs pour, ensuite, dire « non » dans l'hémicycle ou dans sa circonscription. (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

La responsabilité politique nous conduit, mesdames, messieurs de l'opposition, à assumer les choix d'avenir que traduit ce budget. Le groupe UMP les assumera ; je souhaiterais que l'opposition prenne ses responsabilités…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…en assumant également ces dépenses d'avenir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Mes chers collègues, il serait bon que les orateurs des groupes puissent s'exprimer dans le silence.

La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, les finances de notre pays ressemblent de plus en plus à un bateau ivre. En effet, le déficit public s'élève à 141 milliards d'euros en 2009. C'est la première fois qu'en temps de paix, le déficit de l'État atteint la moitié des dépenses du budget général. C'est la première fois depuis la Seconde guerre mondiale que le déficit de l'ensemble des administrations publiques dépassera pendant deux années consécutives 8 % du PIB.

Le Premier président de la Cour des comptes nous avait avertis, au mois de juin dernier, qu'à ce niveau de déficit, la dette publique deviendrait « incontrôlable ». Quant au rapporteur général, il n'a pas utilisé ce terme, mais il a choisi un titre éloquent pour le chapitre Ier de son rapport : « Comment éviter un endettement public de 100 % du PIB ».

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La lecture de son rapport est encore plus édifiante, car ce qu'il présente comme le scénario le plus probable, un scénario noir, mais le seul qui s'inscrive à peu près dans la continuité de la politique budgétaire menée depuis 2002, nous conduit à un endettement qui dépassera 100 % en 2013.

Le montant du déficit de 2009 – 141 milliards – correspond, à peu de choses près, à la somme des investissements de l'État – 14 milliards –, des intérêts de la dette – 42 milliards – et de la totalité de la masse salariale du budget général : 84 milliards.

Financer l'investissement par le déficit, c'est normal. Financer la totalité des intérêts de la dette par le déficit, c'est ce que l'on appelle de la cavalerie, dans le secteur privé. Seuls les États se le permettent. Financer l'investissement, les intérêts de la dette et la masse salariale par le déficit, cela n'a pas de nom. C'est pourquoi le budget que vous nous présentez est irresponsable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Quand, chaque jour, l'État emprunte sur les marchés financiers entre un demi-milliard et un milliard d'euros pour couvrir une grande partie de ses dépenses courantes et les intérêts de sa dette, en quelque sorte pour boucler ses fins de mois, il est véritablement indécent d'évoquer un « grand emprunt pour financer des dépenses d'avenir ». Quel est le sens de notre débat budgétaire, dès lors que nous savons déjà que nous examinerons, dans quelques mois, un collectif destiné à financer des dépenses d'investissement qui devraient naturellement figurer dans un budget digne de ce nom.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Comment en est-on arrivé là ? Certes, la récession a sa part dans cette situation. Mais le Gouvernement porte une lourde responsabilité, car la France est, avec la Grèce, la seule nation européenne à ne pas avoir réduit son déficit public pendant le cycle de croissance qui a précédé la récession.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Comparons notre situation à celle de l'Allemagne, dont on a beaucoup parlé hier. En 2005, le déficit était de 3 % en France et de 3,4 % en Allemagne. Trois ans plus tard, en 2008, l'Allemagne avait ramené son déficit à 0 %, alors que celui de notre pays s'élevait encore, à la veille de la récession, à 3,4 %. Qu'en est-il aujourd'hui ? Malgré une récession deux fois plus forte que chez nous, en raison de son ouverture internationale, l'Allemagne affiche, en 2009, un déficit de 3,7 % quand le nôtre dépasse 8 %.

Le déficit excessif de 2008 a eu une première conséquence : vous avez élaboré un plan de relance unijambiste. Celui-ci ne comportait en effet aucune mesure significative en faveur de l'emploi, aucune mesure pour enrayer l'explosion du chômage, aucune remise en cause de cette subvention absurde des heures supplémentaires, dont toutes les études démontraient qu'elle allait conduire à la destruction de près de 90 000 emplois supplémentaires. Ainsi, alors qu'en juillet 2008, le taux de chômage était identique en France et en Allemagne – 7,4 % –, il est aujourd'hui de 7,7 % en Allemagne, alors qu'il approche 10 % en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Dans un tel contexte, il est irresponsable de maintenir les cadeaux fiscaux. Ajouter au déficit structurel 11,7 milliards d'allégement de la taxe professionnelle et 2,5 milliards d'allégement de la TVA au profit de la restauration est tout aussi irresponsable que la politique de démantèlement de l'imposition sur les revenus menée depuis 2002.

En effet, entre 2002 et 2008, la majorité a fait 30 milliards de cadeaux fiscaux, pour l'essentiel en faveur des plus fortunés de nos concitoyens. Dans le même temps, le déficit des administrations publiques a augmenté du même montant. En d'autres termes, tous ces cadeaux fiscaux réalisés avant la récession ont été financés à crédit, c'est-à-dire par l'impôt des générations futures !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Vous êtes majoritaires depuis 2002. Qu'attendez-vous pour le faire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Seul M. Muet a la parole.

Poursuivez, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

La RGPP aurait pu être une politique intelligente de remise à plat des politiques publiques. Mais, en la subordonnant au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, vous l'avez dévoyée. Dans le cadre de mon rapport sur la gestion des finances publiques, j'ai consulté les huit organisations syndicales représentées au sein du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État. Outre qu'elles avaient été à peine consultées, toutes m'ont indiqué qu'il aurait fallu commencer par débattre des missions, avant de définir avec l'administration l'évolution des effectifs qui devait en résulter. Toutes ont dénoncé les suppressions massives d'emplois, qui ont conduit à adapter le fonctionnement des services « de façon bâclée », en mettant en place « une gestion à la petite semaine ».

Nous avons, en France, une fonction publique remarquablement formée et performante, que le monde entier nous envie. Avec l'objectif du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, vous avez réussi à désorganiser nos services publics et à en décourager les agents.

Vous avez supprimé 33 000 postes dans la fonction publique, tout cela pour un impact budgétaire de 500 millions d'euros par an : à ce rythme, il va falloir un certain temps pour ramener à zéro le déficit de 141 milliards d'euros !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Les 500 millions d'euros que vous économisez avec cette mesure représentent moins d'une journée de déficit de l'État !

Au sujet de la taxe carbone, je suis de ceux qui pensent depuis longtemps que notre modèle de développement ne pourra devenir durable qu'à la condition que le prix des biens produits et échangés sur les marchés prenne en compte le coût pour l'humanité de la dégradation de l'environnement. Or, chacun sait qu'il n'y a que deux façons d'y parvenir : soit des quotas d'émission, soit une taxation écologique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

S'il s'agissait d'une pollution déterminée, les quotas pourraient être efficaces, mais l'émission de gaz carbonique étant par nature diffuse, la taxation écologique est plus appropriée. Une telle taxe a vocation à changer un prix, non pas à rapporter de l'argent à l'État, ni à dégrader la compétitivité des entreprises ou le pouvoir d'achat des ménages ; il est donc logique qu'elle soit compensée, c'est même la question cruciale.

Or, telle que vous la mettez en oeuvre, la taxe carbone est une réponse injuste et inefficace à une vraie question. Injuste, parce que la justice fiscale ne consiste pas à reverser le même montant à tout le monde, mais à tenir compte des capacités contributives de chacun. La réforme importante que constitue l'instauration de la taxe carbone devrait se mettre en oeuvre sans que les plus faibles revenus soient perdants. Or, c'est malheureusement le cas. Le rapporteur général cite souvent des moyennes, mais il est bon, parfois, d'examiner les situations particulières. Ainsi, en milieu rural, loin des transports en commun, un couple avec deux enfants va régler un peu plus de 250 euros au titre de la taxe carbone, et percevra un remboursement forfaitaire de 142 euros. Il restera donc à sa charge plus de 100 euros. Pour des personnes disposant de revenus élevés, ce n'est pas un problème, mais un ménage ne percevant que le SMIC et pour lequel chaque dépense compte va se trouver obligé de faire, en compensation, des économies sur des dépenses essentielles.

Cette mesure est injuste, mais elle est aussi inefficace. Quand vous avez un revenu élevé, vous pouvez modifier votre comportement afin d'atténuer le montant de la taxe, que ce soit en changeant de chaudière ou en faisant isoler votre appartement. Mais quand vous êtes au SMIC, que toutes vos dépenses sont déjà déterminées et que vous ne pouvez vous permettre de vous écarter de votre budget, vous subissez la hausse sans pouvoir modifier vos consommations.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

C'est donc non seulement injuste, mais aussi inefficace d'un point de vue écologique.

Selon nous, une véritable contribution climat énergie aurait dû se faire – comme cela a été le cas dans de nombreux pays – dans le cadre d'une grande réforme fiscale permettant de compenser totalement les revenus les plus modestes et même, en revenant sur certaines des mesures que vous avez prises, de redonner du pouvoir d'achat aux plus modestes.

Notre pays se caractérise par une faible fiscalité écologique, notamment sur l'énergie – c'est particulièrement flagrant au regard de ce qui se fait dans les pays d'Europe du Nord. Par ailleurs, notre système fiscal est devenu profondément injuste, avec des impôts indirects plus élevés qu'ailleurs et une fiscalité des revenus où l'impôt progressif, qui s'est réduit comme peau de chagrin, est moins important que l'impôt proportionnel, c'est-à-dire la CSG. La fiscalité indirecte, que l'on pourrait penser simplement proportionnelle, est régressive. La TVA et l'ensemble de la fiscalité indirecte ne représentent que 3 à 3,5 % des revenus des ménages les plus riches, mais 12 % des revenus des ménages les plus modestes.

Nous avons beaucoup débattu des paradis fiscaux, mais nous savons tous que ceux-ci existent au sein même de notre système fiscal, sous la forme des 470 niches fiscales accumulées au cours du temps. Comme cela a été montré dans un rapport de notre assemblée, cela aboutit à un paradoxe scandaleux : lorsque vous montez dans l'échelle des très hauts revenus, le taux moyen d'imposition du revenu baisse ! Pour les très hauts revenus, le taux d'imposition réel, c'est-à-dire rapporté au revenu fiscal de référence, est très éloigné du taux marginal de 40 % vers lequel il devrait tendre. Pour les 1 000 contribuables les plus riches, l'imposition sur le revenu rapportée au revenu fiscal ne dépasse pas 25 % ; pour les dix contribuables les plus riches, ce taux descend sous les 20 % ! En effet, les plus riches savent optimiser leur imposition pour payer un impôt sur le revenu aussi réduit que possible. La combinaison du bouclier fiscal et des niches fiscales conduit à des injustices profondément choquantes. Ainsi, certains contribuables possédant 15 millions d'euros de patrimoine peuvent déclarer 1 000 euros de revenus, ce qui les exonère totalement d'impôt sur le revenu ; de plus, ils se font rembourser l'intégralité de leur ISF et même une partie de leur CSG – ce qu'ils sont les seuls à pouvoir faire. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Vous avez commencé à en prendre conscience et à mettre en oeuvre quelques réformes, mais cette injustice perdure.

Monsieur le ministre, je vous ai entendu affirmer hier, lors des questions d'actualité, que le bouclier fiscal servait à éviter que certains ne travaillent un jour sur deux pour l'État. Vous savez pourtant fort bien qu'il est impossible d'atteindre le bouclier fiscal en ne percevant que des revenus du travail !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Vous avez également dit que le bouclier fiscal tirait sa légitimité de l'élection présidentielle, dans la mesure où il figurait dans le programme de Nicolas Sarkozy. Mais ceux qui ont voté pour le futur Président de la République avaient-ils conscience de ce que représentait le bouclier fiscal ? Ceux qui ont défendu une telle mesure avaient-ils conscience de l'injustice d'un tel dispositif ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Jean Arthuis, président de la commission des finances du Sénat, disait hier : « je l'ai voté à l'époque, mais je ne me suis pas rendu compte de son caractère profondément injuste ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je suis sûr qu'il se trouve sur les bancs de la droite des députés qui ont voté pour le bouclier fiscal, avant de réaliser qu'il s'agissait d'une formidable injustice.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Oui, il est toujours temps de corriger l'erreur.

Si, demain, la CSG ou la CRDS devait être augmentée – quand on se penche sur l'état des finances publiques, on se dit que vous serez obligés de le faire –, les seuls à être exonérés de cette solidarité seraient les bénéficiaires du bouclier fiscal ! Trouvez-vous cela normal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Oui, nous avons besoin d'une réforme fondamentale de notre imposition du revenu qui remette tout à plat, qui fusionne la CSG et l'impôt sur le revenu pour en faire un impôt citoyen sur le revenu – comme c'est le cas dans tous les autres pays européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je vais écourter mon intervention et conclure, monsieur le président.

Il est nécessaire de procéder à une grande réforme en remettant à plat toutes les niches fiscales....

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

…et en supprimant le bouclier fiscal – mais j'aurai l'occasion d'y revenir lors du débat.

Je veux dire un mot de la taxe professionnelle. Je n'ai jamais pensé qu'il s'agissait d'un impôt imbécile. En revanche, je ne suis pas persuadé qu'une réforme consistant à construire un impôt local sur la valeur ajoutée – dont on a du mal à mesurer l'assiette localement – soit extrêmement intelligente.

Je veux saluer le travail accompli par Marc Laffineur et Jean-Pierre Balligand…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ah, cela vous vaudra cinq minutes supplémentaires ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

…pour parvenir à une situation cohérente pour nos finances locales.

Je voudrais saluer également le travail du rapporteur, qui a réussi à apporter un peu de cohérence à une réforme qui a tout d'une usine à gaz.

Quand on protège et exonère de tout effort de solidarité les plus fortunés avec le bouclier fiscal et que, dans le même temps, on fait peser sur les plus modestes et sur les générations futures tout le poids de la crise, on mine non seulement la solidarité, mais aussi les notions de mérite et de performance, souvent citées par le Président de la République.

Vous parlez de budget de crise, mais ce qui émerge de ce budget, c'est que, dans les faits, tout continue comme avant. Il y a les grands discours sur la solidarité et la régulation que l'on tient sur la scène internationale, mais la réalité de votre politique est à l'inverse : elle consiste à perpétuer les mêmes dérives et les mêmes injustices que celles qui ont conduit l'économie mondiale dans la crise. C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, personne ne pourra reprocher au Gouvernement son obstination. Cependant, il est dommage qu'elle soit au service d'un système injuste, et votre budget pour 2010 en est une belle illustration, monsieur le ministre.

Aucun bilan critique n'est tiré de votre politique, aucune leçon n'est tirée d'une crise dont vous tentez de faire croire qu'elle est due à une sorte de fatalité, où vos choix politiques, économiques, idéologiques ne seraient pour rien. Bref, vous n'êtes responsables de rien : la crise est un accident stratosphérique ! Votre aveuglement, alors que le contexte invite au minimum à la prudence, et que subsistent des risques flagrants de rechute compte tenu de la situation de l'emploi et de la folie spéculative qui gagne à nouveau les milieux bancaires, est proprement effrayant.

Les Échos titraient, le 7 octobre dernier, sur « L'insolente santé de la bourse en France » et, le 15 octobre, proclamaient : « Bonus : année record pour les banquiers de Wall Street ». Autrement dit, tout continue comme avant et votre budget, comme avant, fait des cadeaux aux mêmes – 6 milliards d'euros de taxe professionnelle – et pénalise le plus grand nombre, notamment avec la taxe carbone.

Le déficit de l'État, qui atteint cette année le niveau sans précédent de 140 milliards d'euros, ne refluera l'an prochain dans le meilleur des cas qu'à 115 milliards, auxquels il faudra ajouter le coût du grand emprunt et le déficit des organismes sociaux, estimés aux alentours de 48 milliards d'euros. Si bien que l'ensemble du déficit public l'année prochaine pourrait atteindre 170 milliards d'euros, chiffre qui soulève de graves interrogations : D'où provient en effet ce déficit ? Qui le comblera ? Et quel est le bilan économique des mesures que vous avez prises et qui, chaque année, l'entretiennent et l'aggravent ?

Car non seulement vous êtes responsables de la crise du système que vous avez soutenu et soutenez, mais vous êtes aussi responsables des déficits. À vous en croire, le déficit record de cette année n'est que la résultante de la crise qui a gravement amputé les recettes fiscales de 53 milliards d'euros et conduit à injecter quelques milliards d'euros au titre du timide plan de relance. Même s'il en était réellement ainsi, vous n'en seriez pas moins responsables.

Pour autant, cette présentation des choses, si elle n'est pas fausse, est pour le moins biaisée. Car, si les déficits se creusent aujourd'hui, sans pour autant permettre une relance de l'emploi – puisque vous prévoyez une nouvelle détérioration l'année prochaine avec la destruction de 200 000 emplois supplémentaires –, nous le devons pour une part essentielle aux dangereuses orientations de votre politique fiscale.

Depuis sept ans, vous faites aux plus riches des cadeaux dont le plus beau symbole reste le bouclier fiscal. En deux ans, vous avez fait passé les niches fiscales de 50 à 75 milliards d'euros, soit une augmentation de 50 %. Et vous voudriez nous faire croire que vous n'êtes pas responsables du déficit… C'est grotesque !

Devant le caractère injuste de cette politique vous avez, l'an dernier, fait voter quelques mesurettes prétendument destinées à plafonner certaines niches fiscales. C'était de l'illusionnisme le plus total, car sur 75 milliards d'euros, vous n'avez récupéré, grâce à ces mesures ridicules, que 22 millions d'euros, soit 0,03 %. Cela s'appelle se moquer du monde !

Quant aux cadeaux aux entreprises, baisses d'impôts et de cotisations sociales remboursées par l'État, ils représentent au total cette année une quarantaine de milliards d'euros, dont les trois quarts au bénéfice d'entreprises qui versent des dividendes énormes ou encore de la caste de rentiers qui se reconstitue sous nos yeux, alors même que la Cour des comptes émet des doutes sur l'efficacité de ces cadeaux pour l'emploi.

Oui, vous êtes pleinement responsables du déficit des finances publiques et de son aggravation, car vous avez fait sciemment baisser en dix ans les recettes de l'État de 4,2 % du PIB, soit 82 milliards d'euros.

Vous nous expliquez que vous entendez rester fidèles à l'engagement de ne pas augmenter le taux des prélèvements obligatoires, mais d'abord pour qui ? Vous omettez de rappeler que vos politiques n'ont en rien fait diminuer l'impôt de la grande majorité des Français et que le taux de prélèvements obligatoires est resté pratiquement stable depuis 2002. Vous oubliez de préciser que le plus souvent, vous avez remplacé pour la majorité des Français les impôts par des taxes. Ça n'a pas le même nom mais, pour nos concitoyens, c'est la même chose. Et vous allez persévérer avec le forfait hospitalier, la redevance télé, la taxe carbone – laquelle sera la vingt-troisième taxe instituée en deux ans –, la hausse des tarifs SNCF et ERDF, sans parler de l'abjecte taxation des indemnités journalières des accidentés du travail.

De plus, vous êtes totalement incapables de faire la démonstration que les aides publiques aux entreprises et les exonérations de cotisations sociales ont joué un rôle positif sur l'emploi et la croissance ; et pour cause : la crise du système capitaliste est là pour vous apporter la preuve du contraire. Il en sera de même demain avec la suppression de la taxe professionnelle. Pourquoi en est-il ainsi ? Tout simplement parce que, pour l'essentiel, l'argent ainsi dégagé ne va ni à l'emploi ni à l'investissement.

Où va-t-il, alors ? En 1970, 25 % seulement des bénéfices des entreprises non financières étaient distribués sous forme de dividendes ; en 2008, c'est 65 % ! Plus vous faites de cadeaux, plus ils alimentent le tonneau des Danaïdes des actionnaires et des marchés financiers. Et cela n'empêche même pas les PME d'être écrasées par les grands groupes financiers et multinationaux. Pendant ce temps-là, les enfants vivant en dessous du seuil de pauvreté sont plus de deux millions en France, et ce chiffre continue d'augmenter.

Injustice et inefficacité, la mise en place de la taxe carbone va nous offrir une nouvelle illustration de votre politique. Cette taxe va en effet toucher principalement les personnes ayant les revenus les plus faibles, celles obligées de prendre leur véhicule, qu'elles habitent des banlieues ou des campagnes, les locataires qui ne choisissent pas leur moyen de chauffage. Ils devront l'acquitter alors qu'il n'existe aujourd'hui le plus souvent pas de solution de remplacement économiquement abordable.

Non seulement cette mesure sera inefficace, car les dépenses en combustibles sont aujourd'hui le plus souvent contraintes et les comportements ne peuvent changer faute d'alternative, mais cette taxe bénéficiera davantage aux classes aisées urbaines qu'aux classes populaires et qu'aux habitants des secteurs ruraux. En effet, la prétendue compensation ne sera forcément que partielle et partiale ; son montant étant forfaitaire, elle ne reposera en effet par définition que sur une prise en compte très approximative des dépenses réelles des ménages.

De plus, vous prenez le problème à l'envers car, là aussi, vous taxez les consommateurs en bout de chaîne en oubliant les causes des émissions de gaz à effet de serre. Or agir dans ce domaine suppose de s'attaquer aux causes réelles, en prenant quatre décisions : investir dans de nouveaux moteurs automobiles ; investir dans les transports en commun ; investir dans de nouveaux bâtiments ; investir massivement pour le fret ferroviaire et les autoroutes ferroviaires. L'argent nécessaire à cela se trouve dans les profits des compagnies pétrolières, dans ceux des banques et des assurances, mais aussi dans les paradis fiscaux et autres lieux abritant les milliards de la spéculation.

Avec tant de cadeaux fiscaux, pas étonnant que vous cherchiez à vous attaquer au secteur public. Vous vous servez du déficit que vous creusez comme d'un alibi pour justifier les suppressions de postes dans la fonction publique : 33 754 postes équivalent temps plein cette année, dont 16 000 dans l'éducation nationale. Comme si la fonction publique était la cause d'une crise due uniquement au capitalisme financier que vous soutenez !

Ayant asséché les finances de l'État, vous vous attaquez désormais, après les services publics, aux collectivités locales, en proposant la suppression de la taxe professionnelle : 11,6 milliards de recettes en moins pour le budget de l'État en 2010, 7 milliards de moins ensuite et un cadeau de 5,6 milliards aux entreprises. Lorsque l'on sait que les collectivités réalisent 73 % de l'investissement public, on mesure les conséquences désastreuses qu'aura cette contre-réforme. Et cet argent, comme toutes les aides précédentes, sera détourné pour l'essentiel vers le versement de dividendes exorbitants et la spéculation !

Je ne reviendrai pas sur nos propositions, que j'ai eu l'occasion de préciser dans le détail lors du débat du 7 octobre sur les résultats du G20, sauf pour rappeler que, sans s'attaquer à la racine du mal, c'est-à-dire à un système qui soumet tous les peuples à la servitude de la rentabilité financière, sans s'attaquer aux fondements d'un capitalisme dans lequel le travail de l'homme est d'abord un coût avant d'être une valeur, dans lequel le principe unique de fonctionnement est une concurrence sans limite, il n'y a aucune chance de retrouver un monde de progrès social.

Le temps est venu de s'engager dans une sortie du capitalisme pour que soit pris pleinement en compte l'intérêt commun. C'est précisément parce que nous considérons que votre politique a pour effet de fragiliser toujours davantage la situation de nos concitoyens, déjà durement éprouvés par la crise, et qu'elle a pour conséquence d'obérer l'avenir dans l'assèchement des comptes publics et sociaux que nous voterons résolument contre ce projet de loi de finances. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et plusieurs bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, ce débat sur le projet de loi de finances est incontestablement marqué par la crise économique, mais aussi par la réforme de la taxe professionnelle.

La réforme de la taxe professionnelle et ses conséquences en matière d'allégement pour les entreprises constituent une vraie bonne nouvelle : environ 10 milliards d'euros d'allègement pour les entreprises dès 2010, ce qui est tout à fait exceptionnel !

J'ajouterai cependant un bémol quant l'impact de la réforme sur les services. En effet, si cette reforme est une excellente initiative pour les entreprises notamment industrielles, nous devons veiller à ne pas affaiblir le secteur des services, souvent plus créateur d'emplois sur nos territoires que l'industrie, laquelle a très largement disparu.

Je suis, comme beaucoup d'entre nous, très attachée au lien fiscal entre les entreprises et les territoires sur lesquels elles sont implantées.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les collectivités locales, villes ou intercommunalités, se mobilisent au quotidien, et de manière sonnante et trébuchante, pour accueillir les entreprises. Il est donc normal et ce n'est que justice qu'elles puissent bénéficier d'une partie dynamique de la recette, c'est-à-dire de la valeur ajoutée !

Je voudrais remercier le rapporteur général, les membres de la commission des finances et vous-même, monsieur le Président, pour votre implication forte sur ce sujet, même si nous savons tous que maintenir ce lien ne peut pas se faire en pénalisant les PME. Là est la quadrature du cercle : nous voulons tout pour tout le monde, dans les meilleures conditions, d'où la difficulté de l'exercice.

Je voudrais aussi insister sur le traitement spécifique de certains territoires. Il y a dans notre pays des territoires plus fragiles que d'autres, dans lesquels l'emploi est encore plus rare. Il faut songer ici aux zones franches urbaines qui permettent de créer de l'emploi dans les quartiers et qui sont, en matière d'activité économique, un corollaire indispensable à la rénovation urbaine.

J'attire également votre attention sur l'avenir des chambres de commerce de d'industrie. Pour mémoire, 27 % de leurs ressources provenaient de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle, ce qui représente 1,2 milliards d'euros. Or ces ressources se trouvent victimes collatérales de notre grande réforme de la taxe professionnelle. Au travers de leurs différentes activités, qu'il s'agisse des écoles, des ports et aéroports, des zones d'activité, les CCI représentent 30 720 emplois sur tout le territoire national, sans compter les apprentis. Ces réseaux consulaires sont également parties prenantes dans les créations d'entreprises, 56 248 au mois de septembre, chiffre historique qui nous laisse espérer qu'en fin d'année le cap des 500 000 entreprises créées en France sera atteint.

Le Gouvernement a proposé une réforme des réseaux consulaires qui fait suite aux travaux menés depuis plusieurs mois par les réseaux. Notre assemblée vient de commencer son travail d'audition, axé autour de trois questions fondamentales : quelles missions, quelle organisation, quel financement pour les chambres de commerce ?

Les CCI poursuivent leurs missions pendant cette période, et je regrette, comme notre rapporteur général dans son rapport, que les dispositions provisoires pour 2010 soient encore acrobatiques ! Je le dis avec une certaine solennité : nous ne pouvons pas demander aux réseaux consulaires le bénéfice d'une réforme qui n'est pas encore réalisée ! S'il est légitime d'envisager un effort des chambres de commerce et d'industrie pour une diminution du coût des services rendus, c'est la réforme du réseau qui permettra de dégager des marges de manoeuvre importantes. Une diminution dès cette année de 5 % du montant de leurs ressources fiscales me paraît donc prématurée. C'est d'ailleurs le sens des amendements que j'avais déposés.

Réformer les réseaux consulaires quand nous réformons la taxe professionnelle, quand nous réformons notre organisation territoriale, évidemment cela fait sens. Nous devons bien sûr travailler sur les questions de fond, missions, organisation et financement. Madame la ministre de l'économie, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le ferons d'autant mieux que nous permettrons aux établissements de continuer à fonctionner dans la sérénité en 2010, c'est en tout cas la première des urgences. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Néanmoins, je souhaite vous faire part, madame la ministre, monsieur le ministre, d'un certain nombre de remarques qui vont peut-être en choquer certains.

Il y a deux enjeux dans une loi de finances : les enjeux économiques et les enjeux fiscaux. Aujourd'hui, vous nous présentez un budget dont le déficit s'élève à 116 milliards d'euros. Et on entend, sur les bancs de la gauche, que l'on n'avait jamais vu ça…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

…et que cela va hypothéquer l'avenir, et coetera, et coetera.

Vous avez choisi, à juste titre, de donner la priorité aux investissements. C'est une politique sage, car ce pays a trop souffert ces dernières années de sous-investissement. J'ajouterai qu'il faudra bien évidemment, tôt ou tard, mettre en oeuvre une politique industrielle efficace pour lutter à armes égales avec des pays émergents, qui ont, eux, une politique industrielle et qui ne se gênent pas pour aider leurs entreprises.

La vraie question, c'est celle de la dette : 80 % du PIB français, 8,2 % dans le budget que vous nous présentez alors que le déficit annuel ne devrait pas dépasser 3 %. Mais je vais vous le dire tout de go : on ne remboursera jamais la dette !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Regardons la réalité en face : jamais la dette des États n'est remboursée ; vouloir rembourser à tout prix, c'est une politique à la Laval ! J'entends mes chers collègues dire qu'il faut couper 400 millions ici, là vendre quelques propriétés de l'État : ces propos ne sont à la hauteur du problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Très bien ! C'est comme les emprunts russes, il ne faut jamais rembourser !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Ce n'est pas là le problème, et toute politique de ce type est vouée à l'échec : la politique de Laval a mené à la récession, elle a mené à la guerre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Ce qui est en cause, c'est la macroéconomie : les critères maastrichtiens sont surannés, obsolètes face à la réalité d'aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Et c'est là qu'est le problème. Qu'on ne me parle pas de la rigueur : cela ne veut strictement rien dire ! Je l'avais dit un jour au gouverneur de la Banque de France : l'euro et le système maastrichtien, c'est un système parfait dans un monde parfait, mais qui n'existe pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Voilà la réalité !

On sait très bien que la dette ne disparaîtra que si l'on utilise toutes les variables d'ajustement, et notamment – je suis désolé de le dire – le taux d'inflation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Cessons d'être obnubilés par l'inflation : la refuser, c'est mener une politique pour les rentiers, pour les situations acquises ; cette politique n'est pas favorables aux entrepreneurs, ce n'est pas une politique de croissance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Je le dis comme je le pense : nous marchons sur la tête. Il faudra à l'évidence revoir cette politique !

Une autre question se pose à propos du système maastrichtien : c'est celle des avances que les banques centrales consentent aux États. Maastricht les a interdites. Un jour, un ancien Premier Ministre, mon ami Alain Juppé, m'a dit : « c'est la planche à billets ». Mais le problème n'est pas là ! L'État est-il, oui ou non, une entreprise ordinaire ? La réponse est non, absolument non !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

L'État doit pouvoir, dans certains moments de crise, bénéficier d'avances du système bancaire, comme cela se passe aux États-Unis et au Royaume-Uni !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Il faut arrêter de nous donner des règles qui se retournent contre l'intérêt national, comme on le voit aujourd'hui : le cours de notre monnaie étrangle nos entreprises ; la politique d'euro cher menée par la Banque centrale est suicidaire !

J'entendais tout à l'heure que la République fédérale d'Allemagne avait fait une cure d'amincissement. Mais va-t-on proposer à nos concitoyens une réduction de leurs salaires, comme cela s'est passé là-bas ? Il faudrait aussi un peu de cohérence et de logique sur les bancs de la gauche : je conçois mal que l'on puisse proposer une telle chose à nos concitoyens aujourd'hui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Il y a aussi les enjeux fiscaux : la France est aujourd'hui exportatrice nette de capitaux, et leader mondial en ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Nous recevons 450 milliards d'investissements directs de l'étranger ; nous exportons 750 milliards, grâce, si j'ose dire, à la fiscalité sur le patrimoine.

Monsieur Brard va ici écouter sagement ce que je vais dire maintenant : la seule solution, j'en suis intimement convaincu…

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

…c'est la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune, la suppression du bouclier fiscal, et la refonte de l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Bien sûr, il serait difficile de le faire aujourd'hui ; mais c'est indispensable pour l'avenir.

Oui, il faut réformer la taxe professionnelle ; mais que l'on ne vienne pas me dire que c'est elle qui fait la différence entre ce qui est fabriqué en République tchèque et ce qui est fabriqué dans la zone euro ! Ce sont les termes de l'échange qui posent problème : les choses coûtent cinq fois moins en République tchèque qu'en France, huit fois moins en Roumanie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Enfin, je suis opposé à la taxe carbone, qui est une usine à gaz.

Mes propos sont peut-être iconoclastes, mais ils ont le mérite de réveiller un peu l'hémicycle ! (Sourires. — Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous êtes solidaire du Gouvernement comme la corde du pendu…

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Carré

Possible – oui, c'est possible : ce qui était hier encore un débat tabou a été ouvert, discuté et enfin tranché aujourd'hui – ou en tout cas le sera dans quelques jours. Réformer en profondeur le financement des collectivités territoriales, ne plus faire peser leur développement sur les facteurs de production des entreprises mais sur leur réussite, c'est possible.

Ensemble, ici, avec l'État, avec les associations de collectivités territoriales, avec les entreprises, nous avons ouvert l'un des plus gros chantiers de cette mandature : la révision des financements publics dans leur ensemble.

Il y a, disons-le, quelque chose qui ne va pas : est-il normal que l'État voie ses recettes fondre en 2009 de près de 20 % au fur et à mesure de la progression de la crise ? Cela montre que nos recettes sont très sensibles à toute variation marginale de l'économie. C'est la marque du fameux « coin fiscal », si important en France par rapport aux autres pays européens. C'est aujourd'hui une faiblesse pour nos comptes publics.

Ces deux constats amènent deux remarques : nous devons améliorer considérablement la lisibilité de notre système de prélèvements – qui gagnera ainsi en équité devant l'impôt – et assurer une base solide et saine de financements pour l'État, les collectivités locales et la protection sociale.

En ce qui concerne la lisibilité, l'État va prélever l'an prochain – même si la mécanique paraît ordinaire à tout le monde – environ 347 milliards d'euros, dont 196 milliards, soit près des deux tiers de cette somme, repartiront en dégrèvements, retours de prélèvements et autres remboursements. C'est logique, c'est une conséquence de la LOLF, et c'est techniquement tout à fait valide.

Mais à la longue, ces flux brouillent les relations des Français, de tous les contribuables, avec l'impôt. Ils accentuent les risques de l'évaporation fiscale – pour utiliser cette élégante formule.

Nous devons donc simplifier notre système de prélèvement.

L'un des mérites de la réforme actuelle du financement des collectivités est de rendre plus perceptible la relation entre les contribuables et les collectivités. Cela a été dit hier : quel maire n'a pas entendu ses concitoyens râler contre les hausses d'impôts locaux, alors qu'elles sont imputables au Département ou à la Région ?

Il faut arrêter ce jeu de bonneteau qui renvoie à nos concitoyens l'image de collectivités impécunieuses, compliquées, voire inutiles – c'est bien l'impression qu'ils ont, alors qu'ils sont en même temps les premiers à leur demander un certain nombre de services.

Les collectivités vont avoir un an pour affiner la répartition de leurs recettes – c'est l'engagement du Gouvernement. Cela va se faire en même temps que la réforme territoriale. La question des répartitions de compétences – dans laquelle il faut inclure l'État déconcentré, et la RGPP doit nous y aider – va pouvoir se faire à livre ouvert.

Cette convergence est historique : pour la première fois, ressources et organisation vont de pair. Il faut que chacun ait bien conscience de cette fantastique occasion à saisir pour rendre nos pouvoirs locaux à la fois plus proches de nos concitoyens et plus efficaces pour le développement de l'ensemble de notre pays.

La lisibilité est aussi liée à l'efficacité économique des prélèvements. Il manque aujourd'hui une réforme profonde des prélèvements sociaux. Elle doit être simple afin d'éviter les excès de la réglementation actuelle. Elle doit reposer, non pas sur les facteurs de production, mais sur ce qui est produit, c'est-à-dire la valeur ajoutée et les revenus, quelle qu'en soit la provenance.

En ce qui concerne les revenus, c'est fait : c'est la contribution sociale généralisée, la CSG. En ce qui concerne la valeur ajoutée, le mode de perception de la cotisation complémentaire que le gouvernement nous propose à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle est une piste qu'il faut suivre, et prolonger.

Nous ne pourrons maintenir notre système de protection sociale dans le futur si nous ne trouvons pas une ressource de prélèvements qui progresse au rythme que la productivité de nos entreprises. L'évolution démographique nous y oblige.

La part des salaires dans la valeur ajoutée va continuer, en tendance, de diminuer. Cela nous contraindra à accentuer la pression fiscale sur le travail, et donc à en surenchérir le coût. C'est une mécanique de peau de chagrin, qui pèse fondamentalement à la fois sur les salaires nets – et donc sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens – et sur notre compétitivité. Ce mécanisme n'est pas durable.

Il faut enfin gagner en justice et agir davantage qu'aujourd'hui sur nos importations extra-européennes.

Tout ceci dessine une trame pour aller vers des prélèvements plus modernes et plus justes. Autant aborder cette réforme le plus vite possible : la situation de nos comptes publics exige que leur rétablissement accompagne l'amélioration de notre économie, et ne l'entrave pas.

Cette crise laissera certains pays hors jeu. La France ne peut pas être de ceux-là. Nous devons repenser tous les facteurs qui pourraient entraver durablement notre prospérité : notre système de prélèvements en fait partie.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

S'il est un budget qui ressort de ce projet de loi de finances pour 2010, c'est bien celui des collectivités locales. Ce dont je veux vous parler aujourd'hui, ce n'est pas seulement du département dont je suis un des représentants, mais de l'exemple qu'il constitue, de la conception de l'avenir de notre République qui – faut-il le rappeler – est constitutionnellement décentralisée. Une règle simple découle de ce principe : pour que les collectivités locales puissent fonctionner, il leur faut des ressources.

Or il se passe depuis 2007 quelque chose d'étrange dans notre pays : sous couvert de modernité, se prépare un retour en arrière inédit vers l'époque où la centralisation étatique était parole d'Évangile.

Après avoir peu à peu étranglé financièrement les collectivités locales, ce projet de loi de finances met fin à la liberté financière – et donc politique – des élus locaux : il est le prélude à une réforme territoriale qui ressemble fort à une recentralisation. Les collectivités locales sont la cible de ce budget – sans doute parce que, assurant 73 % des investissements publics de notre pays, elles sont les pilotes d'un service public local utile et efficace : c'est le dernier trait que vous voulez effacer pour établir cette République low cost dont vous dessinez chaque jour les contours.

J'ai entendu, à ce sujet, l'excellent commentaire de Jean-Pierre Raffarin, dont je vous laisse juges : selon lui, il n'est pas acceptable que l'État mette les collectivités sous tutelle en substituant des dotations à une responsabilité fiscale. Il y a trente ans, la décentralisation avait pourtant donné naissance à une démocratie locale. Au fil du temps, elle s'est imposée comme un échelon vital de notre République, un lien fort entre les citoyens et leurs élus.

Le contexte dans lequel s'inscrit ce projet de loi de finances est pourtant déjà très sombre pour les territoires. Les transferts de compétences vers les collectivités territoriales ne sont déjà pas compensés par l'État à hauteur des dépenses à leur charge.

Plus de trente milliards de transferts manquent au niveau national depuis 2004. Rien que pour le département de la Seine-Saint-Denis, 491 millions d'euros restent à cette heure en attente de paiement, dont la moitié pour financer le seul RMIRSA. Ce sont autant de moyens en moins pour répondre aux besoins des habitants, autant de coupes budgétaires dans les investissements, qui devront vraisemblablement passer, pour un département comme le mien, de 200 à 100 millions d'euros l'année prochaine. Ce sont autant de moyens en moins pour construire des collèges, des crèches ou encore des établissements d'accueil pour les personnes âgées.

Cette mauvaise compensation des transferts ne s'accompagne pas d'une réelle péréquation de la dotation globale de fonctionnement, qui permettrait de réduire les inégalités. Pour l'ensemble des départements, la dotation de péréquation urbaine, destinée aux trente-deux départements qualifiés d'« urbains » ne représente que 5 % de la DGF considérée dans son ensemble.

Depuis l'an dernier, il faut ajouter à cela le ralentissement du marché de l'immobilier – touchant aussi bien le neuf que l'ancien, et l'année prochaine l'immobilier de bureaux – qui entraîne une diminution des droits de mutation à titre onéreux. C'est ainsi une des recettes les plus dynamiques des départements – qui permettait d'amortir les transferts de charges – qui se trouve réduite comme peau de chagrin.

J'ai entendu hier notre collègue Marc Laffineur proposer de verser à un fonds de péréquation les recettes des droits de mutation dès lors qu'elles progresseraient beaucoup plus que l'inflation : mais encore faut-il tenir compte des transferts de charges non compensés qui viennent grever les budgets d'un certain nombre de départements ! En 2009, la Seine-Saint-Denis a vu ces recettes baisser de 38 millions d'euros par rapport à 2008, soit une baisse de 25 %.

Enfin, le pompon – mais je l'avais déjà évoqué l'année dernière à cette tribune, madame la ministre –, c'est le fameux ticket modérateur ! Les collectivités participent jusqu'à présent au financement de l'allégement de taxe professionnelle payée par les entreprises par le biais du mécanisme du ticket modérateur. En Seine-Saint-Denis, le montant du ticket est passé de 22 millions d'euros en 2007 à 23,5 millions d'euros en 2008 puis à 37 millions d'euros pour 2009, du fait du plafonnement unique à 3,5 % de la valeur ajoutée de l'entreprise. À titre de comparaison, les Hauts-de-Seine, qui dépensent trois fois moins au titre du RSA, ne sont pas taxés par le ticket modérateur !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bartolone

Faites les comptes : au total, ce sont 566 millions d'euros – 491 plus 38 plus 37 – qui manquent cette année en Seine-Saint-Denis !

La perspective de la suppression du ticket modérateur, enfin proposée, d'une manière courageuse, par notre rapporteur général, est certainement une piste, encore que nous devions attendre le sort qui lui sera réservé par le Gouvernement. Mais cette mesure, qui est réclamée depuis des années, ne serait que la moindre des choses !

Vous le comprendrez, même s'il y avait quelques arguments sérieux pour une refonte de la taxe professionnelle, décider en période de crise économique et d'incertitude institutionnelle de faire bouger des milliards d'euros sans compensation intégrale et surtout sans péréquation efficace entre collectivités riches et pauvres, est une erreur politique.

Telle qu'elle est proposée, cette réforme va entraîner un nouveau manque à gagner pour les collectivités. Les premières projections prévoient une baisse des recettes de l'ordre de 10 millions d'euros pour le département de la Seine-Saint-Denis, et un impact budgétaire de quelque 10,7 milliards d'euros pour l'État en 2010 ! Et l'après 2010 reste dans le flou le plus complet : si l'on annonce un rythme de croisière de dépenses supplémentaires de plus de 4,3 milliards d'euros pour l'État chaque année, on ne sait pas comment la compensation se fera précisément.

Il est cocasse que le meilleur résumé de la situation soit signé Alain Juppé : « Le Président Sarkozy avait promis une compensation euro par euro mais il avait oublié de dire pendant un an [...]. C'est tout de même se foutre du monde ! »

Tout cela pour répondre au projet pernicieux du Président de la République consistant à priver en partie les élus locaux, il est vrai pour la plupart de gauche, d'une recette dynamique qui asseyait leur autonomie financière et donc politique. Décidément, chaque année, pour ne pas dire chaque mois, nous avons droit à un nouveau boulet fiscal !

Pour terminer, madame la ministre, je me permettrai de vous poser une question. L'année dernière, à la même époque, la situation des collectivités qui avaient dans leurs dettes des emprunts toxiques avait été largement exposée. Vous aviez alors proposé qu'une charte de bonne conduite entre l'État, les collectivités locales et les banques puisse être signée. J'aimerais savoir où nous en sommes aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Madame la ministre, mes chers collègues, la France connaît la crise la plus grave qu'elle ait connue depuis la guerre. Le Gouvernement y a fait face avec responsabilité, réactivité et énergie.

Un an après le début de la crise, des frémissements de reprise existent. La France est le pays de l'Union européenne qui, avec l'Allemagne, a le mieux affronté cette crise.

Certes, c'est un frémissement, certes, tout est fragile, certes, il faut rester humble. Mais j'observe qu'un organe de presse a annoncé que la prévision de croissance de la France pourrait être supérieure à celle envisagée dans le projet de loi de finances.

Ce budget devrait permettre de conforter cette reprise et même de l'amplifier.

Les mesures du plan de relance n'ont qu'un but : permettre le développement économique et donc l'emploi. Comment ? Vous l'avez évoqué : d'une part, avec le volet investissement, d'autre part, avec le volet aide sociale, comme l'exonération de charges pour les nouvelles embauches des très petites entreprises.

Je voudrais évoquer un volet important de l'aide aux entreprises ou aux particuliers, qui produit des effets significatifs dans l'action de la reprise, je veux parler des mesures fiscales.

Le plan de relance a fortement mis à contribution les remboursements d'impôts, lesquels ont été un élément de levier significatif. Je voudrais en citer quelques-unes :

Le remboursement anticipé des créances carry back, qui avait été estimé, dans le budget, à 1,8 milliard d'euros, s'est élevé à 4,5 milliards d'euros. C'est autant de trésorerie pour les entreprises.

La mensualisation des remboursements de TVA, qui est une excellente initiative, a permis de reverser aux entreprises 6,5 milliards d'euros, au lieu des 3,8 milliards d'euros estimés.

Le remboursement anticipé des créances de crédit impôt recherche – certainement l'outil le plus puissant de l'Union européenne, qui monte en puissance de manière très significative – devrait s'élever à 4 milliards d'euros en 2010.

Demain, la réforme de la taxe professionnelle, avec un allégement d'environ 8 milliards d'euros, amplifiera le mouvement de levier de la reprise.

Pour les particuliers, j'évoquerai simplement l'effet des mesures concernant les dépenses d'équipement vertes, puisque nous sommes à 2,8 milliards d'euros, contre 1,5 milliard d'euros prévus initialement.

Toutes ces mesures ont constitué un effet de levier très significatif sur la relance. Cela montre que les propositions du Gouvernement étaient très pertinentes.

Je voudrais par ailleurs faire deux observations personnelles.

La première pour dire que je reste favorable à une taxation des banques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

La seconde pour souhaiter que le bouclier fiscal soit calculé en excluant la CSG et les impôts locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

À situation exceptionnelle ; décision exceptionnelle.

J'évoquerai enfin un point qui me tient à coeur et que j'avais évoqué l'année dernière à cette même tribune, la nécessité d'introduire de la morale dans le système financier international, en particulier avec les paradis fiscaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Cousin

Je voudrais saluer les avancées obtenues lors du dernier G20, sous l'impulsion de la France, en matière de nouvelles régulations internationales pour introduire plus de morale dans le système financier international. On peut toujours estimer qu'elles sont insuffisantes mais elles sont quand même bien réelles et je note qu'elles interviennent sous ce gouvernement.

En conclusion, j'apporte mon soutien au projet de loi de finances, car il comporte les éléments pour soutenir la reprise et donc l'emploi, avec la perspective, comme l'ont expliqué les ministres, à la fois d'un plan de résorption des déficits, pour les ramener à cinq points de PIB en 2012, et un effort pour conforter les éléments de la reprise et donc du développement économique. C'est un budget volontariste, d'accompagnement des entreprises et donc de l'emploi, un budget qui donne des perspectives. Bref, c'est un budget cohérent, que je soutiendrai. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, chers collègues, nous vivons depuis deux ans et demi le temps des réformes. Plus de quatre-vingts lois ont été adoptées par notre assemblée pendant cette période. Des lois qui concernent tous les domaines de la vie économique et sociale, de l'organisation des institutions et du fonctionnement de la justice.

Sur le registre budgétaire et fiscal, nous avons baissé les prélèvements, mis en place les heures supplémentaires défiscalisées et sans charges, supprimé les droits de succession pour 90 % des Français, permis que personne ne paie plus de la moitié de ses revenus en impôts, exonéré les intérêts d'emprunts immobiliers pour les primo-accédants.

Cette politique économique, financière et fiscale ambitieuse s'est trouvée confrontée à une situation nouvelle, inattendue, imprévisible et brutale par son ampleur du fait de la sortie de route du système bancaire américain. Nous avons, comme les autres pays du monde, subi le choc violent de la crise, avec tous ses dangers.

Là aussi, dans un contexte où le pire pouvait arriver, le Président de la République et le gouvernement français ont réagi avec rapidité, sang-froid, en prenant les décisions appropriées : sauvetage du système bancaire menacé d'effondrement, mise en place d'un plan de relance.

Les bonnes décisions ont été prises, les bons arbitrages, dans l'urgence du moment, ont été décidés et les effets mesurables sont là : la France a connu pendant la période récente une décroissance deux fois moins importante que ses voisins européens.

C'est dans ce contexte mondial que le projet de loi de finances pour 2010 s'inscrit, comme le précédent : tenir bon, ne pas changer de cap, prendre des mesures appropriées, éviter que le moteur ne s'étouffe et continuer les réformes.

Les déficits sont là, plus importants que jamais, c'est vrai, avec la dette qui s'alourdit, mais dans cette période où le pire semble être derrière nous, où les économies asiatiques repartent, il ne s'agit pas de donner un coup de frein brutal en écoutant les Cassandre, nous prendrions le risque de mourir guéris, avec une logique strictement comptable. Il ne faut pas asphyxier le moteur.

Le projet de loi de finances qui nous est présenté prend en compte toutes ces équations et met en oeuvre les réformes et les dépenses d'avenir ; mais je voudrais dire ici combien nous avons besoin de stabilité fiscale. Rien n'est pire que les changements fréquents dans ce domaine. L'incertitude crée l'attentisme et induit l'absence de mobilisation des acteurs économiques. La stabilité et la durée sont deux conditions pour rassurer et déclencher la confiance à partir de règles du jeu connues.

Je l'affirme, la stabilité fiscale est essentielle, à côté de toutes les nouvelles mesures que le Gouvernement doit prendre.

Certains vous pressent, madame la ministre, de revenir sur des dispositions déjà votées, les mêmes qui, si vous le faisiez, trouveraient là la preuve que vous reconnaissez avoir eu tort de les mettre en oeuvre. Nous connaissons cette manie française de vouloir défaire ou modifier ce qui vient d'être voté et qui, souvent, n'est même pas encore en application ou dont on ne peut pas encore mesurer tous les effets.

Je voudrais prendre un exemple, le dispositif Scellier, du nom de notre collègue. Selon tous les professionnels, ce dispositif induit 80 % de l'activité de construction de logements aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

Pourquoi, dans ces conditions, changer si vite, un an après ? En matière de logement, les décisions de construire s'appuient sur des anticipations. C'est un exemple parmi d'autres.

Stabilité fiscale, toujours ; et nous le verrons dans les jours qui viennent à travers tous les amendements qui visent, ici et là, à augmenter pour de bonnes et de mauvaises raisons la fiscalité : la France est un pays champion en matière de prélèvements. Elle doit pourtant rester compétitive, attractive, surtout dans un contexte international si incertain.

Ceux qui ont fait exploser la fiscalité des régions et des départements seraient aujourd'hui tentés par une hausse de la fiscalité : c'est un raisonnement court, sans imagination. Il est tellement facile de considérer que le « toujours plus d'impôts » est la seule solution !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Dell'Agnola

Vous vous sentez visés ?

Je partage l'opinion de ceux qui pensent qu'il faut traiter ce sujet non pas petit bout par petit bout, mesure par mesure, mais en prenant en compte l'ensemble de la fiscalité pour une remise à plat de ce qui, au fil du temps, s'est complexifié au point de devenir une sorte de mécano qui n'est plus satisfaisant, et dont on voit, souvent, les effets pervers. Je crois que le rapporteur général n'est pas loin de penser ainsi, lui aussi.

Donc n'ayons pas comme seule religion la seule augmentation des prélèvements. En réalité, l'amélioration des recettes se verra avec le début de la reprise, et des économies courageuses sur les dépenses permettront d'aller vers un meilleur équilibre.

Le projet de loi de finances contient une considérable réforme, la suppression de la taxe professionnelle. Tout doit être fait pour que notre tissu industriel soit soutenu, développé face à la concurrence mondiale. Pour autant, n'oublions pas les collectivités dans leurs besoins de ressources. Il n'y a pas, d'un côté, les communes, de l'autre, les entreprises. Le rapporteur général, qui a fait un travail remarqué, a raison de vouloir maintenir le lien territorial dans le projet.

Une réforme réussie ne peut l'être vraiment que si elle n'est pas réalisée au détriment des collectivités. Il est essentiel de disposer d'études d'impact de cette réforme sur les collectivités. Comment se prononcer sans avoir connaissance, commune par commune, des conséquences d'une réforme de cette ampleur ?

Au cours de l'année 2010, il conviendra, avec les simulations les plus fines, de savoir ajuster le dispositif pour entraîner derrière nous et derrière la majorité présidentielle tous les élus des territoires et, avec eux, leurs habitants pour la réussite de ce projet, dans le respect du principe d'autonomie des collectivités.

C'est à ce prix – stabilité fiscale, transparence, respect de toutes les parties prenantes – que cette réforme connaîtra, comme les autres réformes contenues dans ce projet de loi de finances, le succès qu'elle mérite. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Madame la ministre, je souhaite vous parler de dettes et de déficits.

Le Figaro de l'économie titrait aujourd'hui : « Europe : les déficits français stigmatisés ». Et le sous-titre était : « Les Vingt-sept – dont vous-même, j'imagine – sont tombés d'accord, hier, pour revenir à la discipline budgétaire à partir de 2011. »

« Cet exercice s'annonce périlleux, sinon impossible pour la France » peut-on lire dans cet article qui table sur un déficit record de 8,2 %, avant 8,5 % en 2010.

La mise en garde lancée dès lundi soir par M. Juncker, le patron de l'Eurogroupe, visait donc une cible bien identifiée : « Si un ou deux pays, surtout s'ils sont grands, s'éloignent d'une politique budgétaire vertueuse, des États plus petits auraient les plus grandes difficultés à expliquer à leur opinion pourquoi s'astreindre à la discipline commune. » Le risque, en clair, est une sortie de crise européenne en ordre dispersé.

L'Union européenne s'alarme de nos déficits, mais nombreux sont ceux qui font de même dans les rangs de votre majorité. Il s'est d'ailleurs produit un événement exceptionnel ce matin, puisque la commission des finances a refusé de donner son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale en raison de l'abstention de la rapporteure, dont je salue le courage politique.

Une telle attitude est en rapport avec le niveau inégalé des déficits sociaux – près de 25 milliards d'euros en 2009, autour de 30 milliards d'euros de 2010 à 2013 selon les prévisions exposées dans l'annexe B du PLFSS – malgré les prévisions optimistes d'une masse salariale privée qui augmenterait de 5 % à partir de 2011, prévisions particulièrement irréalistes puisque, entre 2000 et 2007, la masse salariale n'a cru que de 3,7 % par an alors que la croissance était forte entre 2000 et 2002. La croissance potentielle de la France est estimée à 1,3 % par la Commission européenne et à 1,7 % par le Gouvernement. Même avec ces hypothèses irréalistes, si ce n'est insincères, le déficit cumulé du régime général devrait se situer, fin 2012, à 125 milliards d'euros, soit presque autant que la dette reprise par la CADES depuis sa création, à savoir 135 milliards d'euros. En quatre ans, le Gouvernement aura accumulé autant de dettes sociales que les précédents en douze ans !

La sécurité sociale sera en banqueroute en 2011. L'autorisation de découvert proposée pour l'ACOSS – 65 milliards – atteint un niveau record et montre que ses besoins de trésorerie sont susceptibles de déraper. L'ACOSS couvrira ceux-ci par des avances de la Caisse des dépôts et consignations à hauteur de 30 milliards, et surtout en portant son programme d'émission de billets de trésorerie à un niveau record, qui en fera un des plus grands émetteurs sur le marché européen.

Le financement de la sécurité sociale par voie de billets de trésorerie aura alors atteint ses limites techniques : l'ACOSS ne pourra financer par cette voie le déficit de 2011. Elle pourrait même être en cessation de trésorerie dès 2010 si le marché des billets de trésorerie se tarissait ! Et elle sera exposée au risque de taux si ceux-ci devaient repartir à la hausse. Dès lors, sous peine d'exposer les organismes de sécurité sociale à une situation de cessation de paiement, le Gouvernement devrait nous dire quelles sont ses perspectives de solutions.

Madame la ministre, souhaitez-vous transférer les dettes de l'ACOSS à la CADES, avec de nouvelles ressources pour celle-ci comme l'exige la loi organique ? Il faudra alors, contrairement au dogme gouvernemental de stabilité des prélèvements obligatoires, créer de nouvelles ressources.

Ou bien voulez-vous remettre en cause l'intégralité de notre système de protection sociale de façon brutale, après l'avoir vanté comme remarquable amortisseur de crise au cours des derniers mois ?

Ou bien, enfin, allez-vous recourir à un expédient comme la reprise de dettes par l'État ou un transfert de dettes à une nouvelle caisse d'amortissement ? Cet artifice permettant de contourner la loi organique constituerait un aveu d'échec du dispositif de maîtrise des déficits sociaux mis en place à partir du « plan Juppé ».

Cette situation rend plus insupportables que jamais les dispositifs d'exonération injustes et inefficaces, notamment sur le plan fiscal ou sur celui des niches sociales, ainsi que les 20 milliards d'euros de cadeaux fiscaux consentis aux plus privilégiés depuis 2002, qui ont creusé encore les inégalités de revenus et de patrimoines. Ces inégalités, pourtant mortelles pour notre pacte social républicain, ne seront corrigées ni par le projet de loi de finances pour 2010 ni par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010. Aussi le groupe socialiste votera-t-il contre ces textes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Deniaud

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons certes connu des moments plus propices, mais l'environnement général de cette loi de finances recèle néanmoins quelques lueurs d'espoir.

Le Gouvernement a pris le parti de la relance de la machine économique, de souffler sur les quelques braises de croissance qui apparaissent, pour reprendre l'expression de Mme la ministre de l'économie.

Bien sûr, nous avons entendu des exclamations indignées sur le déficit prévu pour 2010. Ces indignations perdent toute crédibilité quand leurs auteurs réclament en même temps de lourdes dépenses supplémentaires, et notamment l'arrêt immédiat de la diminution du nombre des fonctionnaires, voire le retour à son augmentation, qu'ils ont tant pratiquée naguère. Comme il faut bien payer la dette, les salaires des fonctionnaires et le fonctionnement de leurs services, il ne reste donc plus qu'un petit tiers des dépenses de l'État sur lequel faire des économies. L'exercice que l'opposition préconise est, tout bêtement, invraisemblable.

La seule autre solution serait d'augmenter les impôts. Là, pour poursuivre la métaphore de Mme Lagarde, ce serait déverser un seau d'eau fatal sur les braises de la croissance.

La voie que suit le Gouvernement, à savoir la poursuite de l'effort de réforme de l'État et de maîtrise du déficit structurel, le recours à l'emprunt pour les dépenses d'avenir, est la clé de l'accélération d'une croissance forte et durable au vrai sens du terme. C'est celle de la sagesse.

N'oublions pas que la crise est loin d'être finie, que notre décroissance de 2009 ne sera suivie sans doute que de moins de 1 % de croissance en 2010, que toute l'économie – industrie, services, agriculture – souffre durement, qu'il y a un an seulement, au moment de la faillite de Lehman Brothers et du sauvetage in extremis du géant AIG dont la chute aurait été bien plus terrible encore, on craignait pour la survie même de nos établissements de crédit. C'est pourquoi je me permets de poser la question : est-ce le moment d'infliger une pénalité fiscale de 10 % de l'impôt sur les sociétés à ces établissements alors qu'ils sont convalescents et doivent impérativement renforcer leurs fonds propres pour financer l'activité comme nous le souhaitons tous ? On pourrait, plus intelligemment à mon sens, garder une telle solution en réserve pour le cas où, une fois leur santé bien retrouvée, on s'apercevrait qu'ils renouent avec de mauvaises habitudes et ne respectent pas leurs engagements de sérieux, de transparence et de mesure dans les rémunérations des dirigeants et des traders.

La suppression de la taxe professionnelle est un acte positif et courageux vis-à-vis de nos entreprises, et tout spécialement de l'industrie. Comme le dit le Premier ministre, la crise est un formidable accélérateur du déplacement des richesses vers les pays émergents. Comment imaginer, s'ils deviennent les seules usines du monde, qu'ils ne développent pas ensuite les services de recherche, d'ingénierie, d'assurances et de finances que les pays développés assurent pour eux aujourd'hui ? Ils ont d'ailleurs déjà commencé à le faire. Nous apprenons ainsi aujourd'hui que CapGemini emploie désormais plus d'ingénieurs en Inde qu'en France. L'impératif absolu, et dans l'urgence, c'est de relancer la compétitivité de notre industrie.

Cette réforme ne peut attendre, et le Président de la République a cent fois raison de vouloir sa mise en oeuvre immédiate alors que notre industrie souffre, et pendant qu'il est encore temps. Ǎ défaut, on ne se poserait pas longtemps les questions de partage des ressources entre l'État et les collectivités locales car il n'y aurait plus rien à partager.

A ce propos – j'ai eu l'occasion d'assumer la responsabilité des finances d'une ville et d'une région –, je voudrais simplement rappeler qu'entre l'État et les collectivités locales se trouvent les deux faces d'une même dépense publique financée par les mêmes contribuables. Donc, comme cela a été largement souligné, les unes ne sauraient continuer à dépenser et recruter sans retenue quand l'autre doit réduire la voilure.

Le Gouvernement est engagé dans la réforme de l'État. Si celle-ci n'est pas menée à bien dans toutes ses profondeurs nous ne redresserons pas nos finances, nous ne retrouverons pas en sortie de crise le chemin d'une vraie réduction du déficit.

L'immobilier de l'État, dont je suis le rapporteur, est un marqueur particulièrement révélateur de l'avancement de la réforme puisqu'il est la traduction concrète, physique, des décisions, ou de leur absence.

Un travail remarquable est déjà accompli et je tiens à saluer l'opiniâtreté d'Éric Woerth, qui a permis par exemple que, pour la première fois, le patrimoine des opérateurs de l'État soit intégralement répertorié alors qu'il est pratiquement équivalent à celui que l'État gère directement. Un vrai mouvement est engagé, mais il existe des résistances importantes, émanant d'ailleurs beaucoup plus des administrations centrales que des services déconcentrés – nous aurons l'occasion d'en discuter.

Il ne faut en aucun cas relâcher l'effort. Tous les ministères, et donc tous les ministres, doivent être mobilisés pour cette réforme, sans esprit de clocher, sans s'accrocher à des prérogatives ou des singularités hypertrophiées, comme on en rencontre trop souvent.

C'est à ce prix que nous réussirons, ensemble, au-delà de cette loi de finances pour 2010, si difficile, à restaurer la santé financière de la France et à la maintenir parmi les grandes puissances économiques de demain. Je vous fais confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, ce projet de loi de finances revêt un caractère exceptionnel. Notre majorité a été élue pour procéder à des réformes indispensables mais trop retardées. Nous pensions les faire dans le cadre d'une croissance modérée mais continue, dont la France n'a pas su tirer le parti qu'il fallait jusqu'à présent. L'un des axes de cette politique consistait à diminuer les dépenses publiques et les prélèvements obligatoires. La crise nous amène à une situation paradoxale puisque les réformes n'apparaissent aujourd'hui possibles qu'au prix d'un accroissement des déficits et d'un alourdissement de la dette. Je dis paradoxe et non contradiction dans la mesure où des économies et des réformes – je pense en particulier à la taxe professionnelle – permettent une baisse des prélèvements obligatoires, qui passent de 42,8 % du PIB en 2008 à 40,7 % en 2010 comme en 2009.

La philosophie qui préside à nos choix budgétaires est claire puisqu'elle consiste à réduire les dépenses improductives pour mieux mettre l'accent sur les investissements qui concourent à rétablir la croissance et à assurer l'emploi.

Le Président de la République ne cesse de répéter qu'il souhaite que la France demeure un grand pays industriel. Le Premier ministre rappelait encore hier que la France devait améliorer l'attractivité de son territoire et renforcer la compétitivité de son économie. En tant que député d'une circonscription fortement marquée par l'industrie, je suis particulièrement sensible à ces discours et j'en mesure d'autant plus la nécessité que, jour après jour, les entreprises de mon secteur subissent des difficultés que nous n'avions pas connues depuis 2003, avec le choc des importations asiatiques dans le textile.

Dans la poursuite de cet objectif, certaines mesures paraissaient excellentes, d'autres bonnes, et d'autres encore mauvaises.

En 2007, nous avions dans notre programme la meilleure des mesures qui pouvait avantager notre production industrielle. Il s'agissait de l'instauration de la TVA sociale, qui aurait permis de transférer en partie sur la consommation les charges des entreprises, notamment celles qui ne sont pas liées directement à celle-ci, comme la maladie ou la famille.

Tout en diminuant le coût des produits français, cette mesure aurait permis de faire peser le financement de notre protection sociale pour une part sur les importations et le tourisme. Sous le coup d'une campagne de désinformation, cette disposition a malheureusement été abandonnée, alors qu'elle est en oeuvre dans les pays scandinaves et, partiellement, en Allemagne. On a rappelé tout à l'heure les bons résultats de l'Allemagne, qu'elle doit aux trois points d'augmentation de la TVA décidée il y a quelques années.

La réforme de la taxe professionnelle, telle qu'elle a été présentée par le Gouvernement, est une bonne mesure. Elle présente trois avantages et un inconvénient. Le premier avantage réside, bien sûr, dans l'allégement de la fiscalité de nos entreprises. Comme la TVA sociale, elle est une réponse aux menaces de délocalisation. Enfin, elle se situe dans une démarche qui appelle les collectivités territoriales à une plus grande sagesse. Comme le rappelait Eric Woerth ce mardi : « Il n'est pas très efficace que les efforts d'économie réalisés par l'État soient annulés par un excès de dépense des collectivités territoriales. »

Evidemment, on peut regretter qu'une fois encore l'État devienne un peu plus le premier contribuable local, et que disparaisse une émulation entre les collectivités. J'ai déjà pu observer ce phénomène lorsque l'instauration de la TP communautaire à Lille a manifestement découragé certaines villes de choisir l'entreprise et ses éventuelles nuisances.

En revanche, la taxe carbone est un geste politique dont je ne perçois ni l'intérêt économique ni les conséquences écologiques. La taxation de l'énergie productrice de CO2 dans un pays qui représente 1 % des émissions mondiales et dont une grande partie de l'énergie repose sur l'électricité d'origine nucléaire est un symbole dérisoire par rapport à l'augmentation annuelle de la production de CO2 par la Chine, dont la croissance est repartie – elle est revenue à 8 % – et a sans cesse besoin de davantage de charbon, de gaz et de pétrole. La Chine émet 24 % du CO2 mondial et génère les deux tiers de la hausse annuelle. Claude Allègre comparait cette taxe à la suppression des allocations familiales en France pour freiner la croissance démographique mondiale.

La taxe carbone est doublement mauvaise : d'abord, parce que c'est une taxe et non une incitation ; ensuite, parce qu'elle va peser sur la production et la consommation des produits français alors que les produits importés y trouveront un avantage concurrentiel. Cette taxe est une sorte d'anti-TVA sociale, à moins d'imaginer une taxation à la frontière, dont on a du mal à cerner le mécanisme. Je suis bien placé pour vous dire qu'à la frontière belge, les files de voitures vont s'allonger, parce que les gens iront chercher un carburant moins cher. Nous n'aurons rien gagné en pollution, mais perdu en termes d'activités et d'emplois.

Au-delà du budget 2010, c'est le rapport de force économique mondial qui est aujourd'hui en train d'évoluer de manière considérable. Nous pouvons espérer retrouver une croissance relative dans un monde ou le dynamisme se sera fortement et durablement installé en Asie. Le seul ressort qui peut nous aider à rebondir dans ce contexte a été défini dans la stratégie de Lisbonne : il s'agit de l'économie de la connaissance. L'augmentation du budget de la recherche est de ce point de vue une excellente nouvelle. Un dispositif fiscal joue dans cette direction un rôle très positif : il s'agit du crédit impôt recherche. C'est la raison pour laquelle je souhaite son extension.

C'est la compétitivité par l'innovation, par la différenciation qui doit être privilégiée. Celle-ci ne doit pas se limiter à l'invention technique ou scientifique ; elle doit être étendue à l'innovation esthétique, à celle qui est présente dans les collections et les métiers d'art, à travers les maquettes ou les prototypes. Cela aurait un impact sur un grand nombre d'entreprises de main-d'oeuvre liées notamment à la production de luxe, à laquelle notre pays est très attaché.

Madame la ministre, vous disiez hier : « Notre objectif c'est l'emploi, encore l'emploi et toujours l'emploi. » C'est pourquoi il faut privilégier dans ce budget tout ce qui concourt à atteindre cet objectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Lors de la discussion du projet de loi de finances l'an dernier, le 21 octobre exactement, j'avais axé mon intervention sur la fiscalité environnementale, en posant d'entrée de jeu la question suivante : « Le PLF 2009 comporte-t-il des axes volontaristes visant à orienter à la hausse la fiscalité écologique, dès lors que l'on considère qu'elle peut constituer un levier pour l'amélioration de notre environnement et l'atteinte des objectifs environnementaux tels que le bon état de l'eau, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le recours accentué aux énergies renouvelables ? »

Ce n'était pas le cas et je l'avais regretté, déposant également, avec le soutien des membres socialistes de la commission des finances, un amendement instituant une taxe sur les consommations d'énergie assise sur le contenu énergétique, prévoyant sa progressivité ainsi que les conditions de son utilisation : 50 % de son produit affecté à un fonds d'accompagnement de la mutation énergétique, qui pouvait lui-même alimenter la réduction des charges dans le logement social, un fonds d'aide à la mobilité, un fonds de développement des transports collectifs.

Mais en 2009, c'était trop tôt : « Monsieur Launay, vous n'y pensez pas ! Vous allez faire peser des charges nouvelles sur les entreprises. Ce n'est pas le moment. »

Un an plus tard, nous y sommes. La parole présidentielle, il faut bien le dire, est passée par là. En février 2009, il fallait supprimer la taxe professionnelle, la remplacer. Une piste : la taxe carbone. Et nous voici dans cette discussion budgétaire avec deux réformes majeures : celle instituant la taxe carbone et celle supprimant la taxe professionnelle. Gilles Carrez les considère dans son rapport comme étant l'enjeu fiscal d'importance du projet de loi.

Certes, on n'a jamais vu, ou rarement, deux mesures d'une telle ampleur – avec leurs impacts fiscaux, financiers, sociétaux, et leurs répercussions sur l'équilibre, dans le recours à l'impôt, entre ménages et entreprises ainsi que sur les moyens financiers des collectivités territoriales – s'ajouter à une discussion budgétaire classique.

Mais ce serait oublier que l'acte budgétaire constitue en lui-même un enjeu fiscal, et que nous pouvons difficilement faire comme si les décisions politiques prises par votre gouvernement, sous l'impulsion du Président de la République, ne pesaient pas lourdement sur un contexte général de finances publiques dégradées – vous avez eu le mérite, monsieur Woerth, de rappeler hier les niveaux historiques atteints –, avec une dette à 84 % du PIB et un déficit à 8,5 % du PIB à la fin de 2010. Notre rapporteur général ne disait-il pas en commission des finances le 15 octobre 2009 : « On sait tous que les comptes 2010 seront encore plus difficiles qu'en 2009 » ?

Les décisions politiques que vous prenez s'accompagnent du discours convenu de la baisse des prélèvements obligatoires. Vous défendez le bouclier fiscal – « surtout pas de détricotage, il faut maintenir le verrou » –, l'idée qu'il ne faut pas d'impôts nouveaux – mais on sait le nombre de taxes créées –, la réduction des impôts, réduction de 16 milliards d'euros, dont 10 milliards pour les ménages – avec le texte TEPA, nous savons lesquels – et 6 milliards pour les entreprises.

Nous revendiquons pour notre part de parler de justice sociale, de répartition des moyens, de partage des efforts. Mes collègues ont déjà pu développer ce point et continueront de le faire.

Je reviens à la fiscalité écologique 2010. La fiscalité écologique, c'est percevoir différemment l'impôt. Dans ce cadre, la taxe carbone, c'est taxer les modes de production et de consommation polluants. La fiscalité verte, c'est favoriser la production et la consommation de produits propres, c'est accélérer le passage à une économie décarbonée.

À la demande du président de la commission des finances, j'ai travaillé, en lien avec mon collègue Michel Diefenbacher, sur ce sujet durant l'été. Nos préoccupations sont partagées, mise à part la question de l'inclusion ou non de l'électricité dans la base taxable. Et nous avons conclu à la nécessité d'instaurer la contribution « climat-énergie ». Nous sommes convaincus et nous souhaitons convaincre de nombreux collègues – en entendant M. Vanneste, je constate qu'il y a du boulot ! – qu'il est temps d'intégrer dans nos raisonnements politiques et dans nos actions les deux crises, énergétique et climatique.

Nous ne devons pas considérer que le changement climatique est un problème comme les autres. Ce n'est pas plus tard mais maintenant que nous devons nous en préoccuper, au risque, à défaut, de voir les conséquences devenir désagréables, insupportables. Car nous avons déjà injecté de grandes quantités de CO2 dans l'atmosphère et nous ne devons pas attendre que la situation climatique soit gravissime pour agir, pas plus que nous ne pouvons considérer que le tabac est inoffensif du fait que des fumeurs sont encore vivants.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Je sais que M. Mallié fume un peu ; d'où sa réaction.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Souhaiter que la consommation d'énergies fossiles diminue, c'est déjà prendre en considération l'avenir de la planète, et en conséquence considérer comme légitime l'instauration de la contribution « climat-énergie ». La division par deux des émissions mondiales de CO2 implique donc la baisse de la consommation de charbon, de gaz et de pétrole.

De plus, un jour, demain, l'humanité devra de toute façon consommer moins d'énergies fossiles car ces énergies ne sont pas renouvelables à l'échelle des temps historiques. Parlons du pétrole : même si la fin du pétrole n'est pas pour demain, même si la production pétrolière ne déclinera vraisemblablement que vers 2020, gardons à l'esprit que nos consommations s'accroissent de 2 % par an et que la population mondiale augmente. La décroissance de la production pétrolière induit la fin du recours au tout-pétrole et légitime le passage à une économie décarbonée.

Or la taxe carbone incluse dans le présent projet de loi de finances ne nous en fait pas prendre le chemin. Tout d'abord parce que la valorisation du carbone à 17 euros la tonne est inférieure au seuil reconnu par le rapport Quinet et recommandé par la commission d'experts présidée par Michel Rocard

Ensuite, elle n'en prend pas le chemin parce que l'électricité est exclue de la base taxable. Alors qu'actuellement 75 % des logements neufs utilisent l'électricité, cette exclusion va aboutir à un report du consommateur sur cette énergie et aggraver encore les pics de consommation, notamment en hiver. Il aurait été écologiquement nécessaire, économiquement pertinent et socialement équitable que le consommateur d'électricité reçoive aussi ce signal.

Par ailleurs, le dispositif pèche par l'absence d'engagement sur la progressivité du taux de la taxe, eu égard à l'objectif de 100 euros la tonne en 2030 et de 200 euros la tonne en 2050. Dès lors que l'on souhaite tenir les engagements du « facteur 4 », sans oublier la nécessité de neutraliser l'inflation, il faut annoncer le rythme prévu pour le relèvement du taux de la taxe carbone.

Ce dispositif pèche, en outre, en raison du choix de la compensation-redistribution uniforme pour les ménages. C'est injuste ; une modulation aurait du être prévue en fonction des revenus des ménages. Au lieu de cela, vous confirmez le verrou sur le bouclier fiscal, en y incluant la taxe carbone.

Enfin, les 2 milliards d'euros que supporteront les entreprises constitueront, au plan macro-économique, une reprise partielle de l'avantage tiré de la réforme de la taxe professionnelle.

Tombant ainsi dans le pot commun du budget, nous sommes loin de la décision, qu'il était possible de prendre, d'affecter le produit de la taxe carbone à un fonds autonome, doté d'une gouvernance particulière et chargé de décider de l'utilisation des recettes. Ce schéma, quelque peu analogue à celui mis en oeuvre pour le Fonds de réserves des retraites, aurait eu pour vertu principale de sanctuariser le produit de la contribution carbone, écartant cette ressource du besoin de financement de l'ensemble des dépenses de l'État.

L'instauration de la contribution « climat-énergie » pourrait constituer un véritable tournant dans la mise en oeuvre de la fiscalité écologique. Au lieu de cela, nous voyons la mise en oeuvre d'une taxe carbone timide par le choix d'attribuer une faible valeur au carbone, incomplète car n'incluant pas l'électricité, injuste dans le choix d'une redistribution uniforme aux ménages, et embryonnaire par l'absence de l'affirmation d'une nécessaire progression.

Le contexte financier et économique pèse – c'est clair – sur l'état de nos finances publiques, mais les choix politiques que vous imposez au pays, et dont ce budget est une nouvelle fois la marque, alourdissent l'injustice fiscale, affaiblissent nos marges de manoeuvre, altèrent notre capacité financière, creusent la fracture sociale, fusillent les collectivités territoriales.

L'optimisme ne fait pas une politique. Comme, l'an dernier, vous aviez tablé dans le projet de loi de finances pour 2009 sur une hypothèse de croissance de 1 % et que nous serons vraisemblablement à moins 2,25 %, vous comprendrez, madame, monsieur les ministres, notre scepticisme sur vos recettes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2010 s'inscrit dans un contexte exceptionnel. Il y a un an, un mois et cinq jours, la banque d'affaires Lehman Brothers déposait son bilan, avec toute les conséquences que nous connaissons aujourd'hui.

Face à cette situation, sous l'impulsion du Président de la République et du Gouvernement, nous avons adopté des mesures pour faire face à l'urgence de la crise, et cette action commence à porter ses fruits. Ce PLF est donc un projet de transition qui accompagne la sortie de crise tout en préparant la croissance de demain.

La crise découle d'une situation à l'origine toute simple : un marché immobilier américain à la hausse qui était accompagné de taux d'intérêt peu élevés. Les banques et les sociétés de prêts immobiliers se sont lancées dans la distribution de crédits immobiliers hypothécaires, à taux variables et à hauts risques, auprès d'une clientèle à bas revenus et en situation précaire. Avec la hausse immobilière, les organismes financiers espéraient revendre plus cher si le remboursement ne se faisait pas.

Cependant, dès 2004, la valeur de l'immobilier baissa alors que les taux d'intérêt s'élevaient ; avec des prêts à taux variables, les ménages ne pouvaient plus rembourser ; les banques qui avaient prêté ne purent plus recouvrer leurs créances, et il en fut de même des autres banques qui avaient racheté des créances titrisées.

Il nous faut saluer l'action du Président de la République au G20, fin septembre, qui a appelé à plusieurs reprises à réformer de manière énergique les règles du système financier mondial, en commençant, bien sûr, par le nôtre. En effet, comment expliquer que les établissements bancaires soient devenus des entreprises commerciales ayant pour unique objectif la réalisation de profits financiers ? Comment expliquer que les banques prêtent très difficilement aux ménages et aux entreprises ? Nos banques ont tout simplement développé exagérément des activités très risquées en oubliant la fonction première qui est la leur : par définition, le rôle d'une banque consiste à collecter et à recevoir des dépôts d'argent, puis à les utiliser sous forme de crédits accordés. Cette règle doit redevenir la pierre angulaire de notre système financier.

Par ailleurs, dans ce contexte particulier où la maîtrise des dépenses de l'État doit être l'alpha et l'oméga de nos actions, deux sujets ont retenu mon attention.

Actuellement, la Turquie bénéficie d'une aide financière de l'Union européenne sous deux formes : sous la forme de prêts et sous la forme de dons en application de l'instrument d'aide à la pré-adhésion. S'agissant de prêts, pourquoi pas ? Mais l'instrument d'aide à la pré-adhésion, lui, offre une assistance aux pays ayant une vocation européenne, et la Turquie bénéficiera dans ce cadre de 2,3 milliards d'euros d'aide pour la période 2007-2010. D'ici à 2012, ce sont presque 4 milliards d'euros de crédits de pré-adhésion qui auront été versés à la Turquie. Cette somme me paraît disproportionnée et, connaissant la position des Français, du Président de la République et de l'UMP sur cette adhésion, il n'apparaît pas légitime de la verser. Je rappelle que nos agriculteurs, laitiers, céréaliers et autres, auraient grandement besoin d'une telle aide.

Enfin, j'ai été interpellé par le train de vie de la HALDE et par une certaine opacité qui règne sur cette institution – ma position est peut-être simpliste, mais sincère.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Mallié

En effet, à l'heure où tous les Français connaissent le montant exact de la rémunération du Président de la République – Dieu sait que certains s'en sont gaussés –, il est impossible de connaître l'indemnité dont bénéficie le président ou les membres de cette autorité administrative indépendante. De même, tandis que le nombre d'emplois à temps plein augmente de 5 % entre 2008 et 2010, les dépenses de personnel augmentent de 15 % pour la même période. Bel exemple pour nos concitoyens qui ont vu arriver le chômage. En plus, les indicateurs de performance du programme concerné notent que le nombre de réclamations traitées a diminué entre 2007 et 2008, et ce malgré l'augmentation du nombre d'agents qui traitent ces dossiers. Enfin, il est légitime de s'interroger sur la pertinence des 1 740 mètres carrés de locaux pour une aussi petite structure, dans le 9e arrondissement de surcroît – vu la population à laquelle la HALDE s'adresse, on aurait pu l'installer ailleurs. En 2007, les derniers chiffres fiables dont nous disposons indiquent que 17 % de son budget était affecté aux loyers de ses locaux, soit près de 2 millions d'euros pour l'emploi de soixante-treize personnes. Dans le contexte exceptionnel que nous connaissons, il n'y a pas de petites économies et, comme le disait Jean-Baptiste Say : « L'économie est fille de la sagesse et d'une raison éclairée : elle sait se refuser le superflu pour se ménager le nécessaire. » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Mancel

Madame la ministre, monsieur le ministre, vous avez très bien géré la crise, il faut le dire et le répéter, vous en féliciter et vous en remercier. Vous nous présentez à présent un budget qui n'asphyxiera pas la reprise, ce qui est tout à fait essentiel. Nous aurons l'occasion, lors de la discussion des articles, d'en évoquer tous les détails, et je veux juste faire rapidement quelques remarques.

J'ai eu plaisir à entendre un certain nombre de mes collègues à cette tribune souligner que le bon sens conduira un jour à supprimer le bouclier fiscal, mais en supprimant en même temps l'ISF, et sans doute à procéder à une augmentation du taux d'une des dernières tranches de l'impôt sur le revenu pour compenser le manque à gagner. Je pense que c'est la sagesse. Un jour ou l'autre, nous aurons le courage de le faire.

S'agissant de la TP, on critique beaucoup le dispositif proposé, mais l'on oublie que c'est votre gouvernement qui a le courage de supprimer définitivement ce qui en subsistait et que tout le monde considérait comme insupportable pour les entreprises industrielles. Certes, nous en discuterons les modalités mais, là encore, vous avez eu le courage d'agir, et cela mérite d'être souligné.

C'est la même chose pour la taxe carbone : chacun la considérait comme une bonne idée mais, quand on l'applique, beaucoup la critiquent, elle aussi. Pour ma part, je me demande s'il n'aurait pas mieux valu ne pas la compenser et utiliser le montant de la taxe pour investir dans le développement durable. Mais un tel dispositif serait allé complètement à l'encontre de l'engagement de ne pas augmenter les impôts. Dont acte.

Je veux surtout, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous parler de l'avenir. Il va falloir, à moyen terme, reprendre les diminutions de dépenses publiques. C'est tout à fait indispensable. Il y a trois domaines dans lesquels il faut agir : celui de l'État, celui des collectivités territoriales et celui de la protection sociale.

Pour ce qui concerne les dépenses de l'État, la RGPP a été efficace, mais insuffisante. Il va falloir faire des réformes en profondeur, beaucoup plus lourdes. Certes, elles provoqueront sans doute parmi nos compatriotes des réactions difficiles, mais l'on n'échappera pas à la nécessité de procéder à une réforme en profondeur du statut de la fonction publique. Il est indispensable d'en avoir le courage. La plupart des pays européens comparables au nôtre l'ont mise en oeuvre. Il faut distinguer les emplois régaliens, qui resteraient des emplois à statut, et tous les autres, qui deviendraient des emplois contractuels. Cela nous permettrait d'avoir beaucoup plus d'efficacité et, surtout, d'éviter les difficultés que l'on éprouve aujourd'hui à faire des économies avec le remplacement d'un fonctionnaire sur deux prenant sa retraite. C'est une ambition énorme dans un pays comme le nôtre, j'en ai bien conscience, mais, un jour ou l'autre, il faudra avoir le courage de s'attaquer à cette réforme. Bien sûr, celle-ci ne pourrait concerner que les nouveaux recrutements, sans porter atteinte aux fonctionnaires en place.

Quant aux dépenses des collectivités territoriales, j'entends dire qu'il ne faut surtout pas y toucher. Je vais citer un exemple, que le ministre des comptes publics et moi-même connaissons bien : celui de notre département. En l'espace de quatre ans, le conseil général de l'Oise a créé 415 emplois nouveaux, soit plus de 20 % de son effectif total ; il a augmenté les impôts de 35 % pour distribuer des sièges-bébés aux jeunes parents et des ordinateurs à l'ensemble des enfants des collèges, quelle que soit la situation matérielle de leurs parents. Je ne suis pas persuadé que ce soit de la dépense publique exemplaire, efficace et juste. Il faudra donc réfléchir au moyen d'instaurer, pour les collectivités territoriales, un véritable objectif national de dépenses publiques, de telle sorte que leurs dépenses ne progressent pas à un rythme supérieur à celles de l'État. Certes, ce sera difficile et cela soulèvera peut-être quelques difficultés constitutionnelles, mais il s'agit d'une nécessité absolue, et je crois que les esprits commencent à être mûrs.

Enfin, en ce qui concerne notre protection sociale, chacun connaît l'enchevêtrement des prestations, la complexité des dispositifs existants et la lourdeur de leur mise en oeuvre. Il faudra donc avoir, là aussi, le courage de mettre sur la table ces sujets de réflexion et de passer aux actes.

Pour passer aux actes, mes collègues et moi-même sommes tout à fait prêts à vous aider. Nous le ferons en votant, sans aucun état d'âme et avec enthousiasme, votre budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Monsieur Le président, madame la ministre, monsieur le ministre, chers collègues, suite à la crise financière sans précédent dans laquelle nous sommes entrés depuis l'été 2008, induisant une baisse importante des recettes fiscales, notre pays a dû présenter deux lois de finances rectificatives, début 2009, pour faire face à l'urgence et définir un véritable plan de relance en faveur de l'investissement. Les mesures prises, même si elles ont creusé le déficit, étaient nécessaires pour garantir les capacités de production et limiter les plans sociaux, et ainsi préserver l'emploi et le pouvoir d'achat des ménages. Cette stratégie adoptée par la France lui permet de sortir la première, en Europe, de la récession. Mais, aujourd'hui, il faut accompagner la reprise, encore fragile, par de profondes réformes structurelles, visant également à réduire le déficit. Le projet de loi de finances pour 2010 que vous nous présentez s'inscrit donc dans une démarche dynamique de sortie de crise en structurant les dépenses d'avenir en faveur de l'investissement et du soutien de l'activité et de l'emploi, en renforçant l'efficacité de la dépense publique et en réformant en profondeur la fiscalité, pour que celle-ci soit plus favorable aux investissements mais aussi plus juste et plus équitable pour les ménages.

Cependant, je souhaite aborder plus précisément deux points.

Le premier concerne la taxe professionnelle. Tout le monde s'accordait à dire que c'était un impôt imbécile, injuste, qu'il pénalisait les investissements et les créations d'emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Béatrice Pavy

Un certain nombre de mesures ont été adoptées ces dernières années, mais sans donner satisfaction aux collectivités ou aux entreprises, car, quand on ampute un système déjà bancal, il est difficile d'obtenir un bon équilibre. Une réforme en profondeur s'imposait donc. Conformément à l'engagement du Président de la République, ce gouvernement a eu le courage de l'entreprendre. Elle a pour objectif d'alléger les taxes sur les entreprises pour rendre celles-ci plus compétitives et ainsi favoriser l'emploi, tout en recherchant des modes de compensation pour les collectivités. Je comprends que cette réforme puisse susciter des interrogations de la part des élus, qui investissent pour l'accueil des entreprises sur leur territoire. Ils attendaient des mesures de remplacement claires et précises après l'annonce de la suppression de la taxe professionnelle. C'était compter sans les difficultés pour la mise en oeuvre d'un système complexe qui tendra à évoluer au cours de l'année 2010, notamment dans le mode de répartition des différentes taxes entre les collectivités. En effet, ce débat sur la fiscalité locale ne peut pas être dissocié de la réforme des collectivités territoriales. Comment aujourd'hui procéder à des répartitions en tenant compte des spécificités de chaque collectivité, sans une véritable clarification des compétences ? De même, la question de la péréquation entre collectivités territoriales pour une répartition équitable doit être posée.

Au-delà de l'inquiétude des élus, c'est celle de la population qui doit être prise en compte. Nous savons tous que les taux des impôts locaux ont fortement progressé ces dernières années. La réforme de la TP suscite un véritable émoi, causé par la crainte de voir cet impôt transféré vers les ménages. Il faut dire que le matraquage de l'opposition est dévastateur dans l'opinion publique, et je souhaiterais, madame le ministre, que vous ayez un message clair à ce sujet.

De plus, quel sera l'impact de cette réforme sur les professions libérales sous statut BNC et employant moins de cinq salariés ? Leurs modalités de taxation restent inchangées. Ces professions subiraient donc le même niveau de taxation qu'actuellement, voire un niveau supérieur compte tenu de la réactualisation annoncée des valeurs locatives foncières. Ces professionnels s'inquiètent d'une inégalité devant l'impôt et d'une distorsion de concurrence entre des professionnels exerçant la même activité sous statut fiscal différent. J'aimerais avoir votre avis sur cette question.

Le deuxième point que je souhaite aborder concerne la possible surtaxe sur les profits des banques. Même si j'ai bien entendu que le prêt aux banques ne coûte pas un centime aux contribuables, on ne peut pas nier que des gens souffrent des impacts de la crise. Malgré l'intervention du Médiateur du crédit, les banques se sont révélées frileuses pour accorder des crédits, notamment aux PME ; des lignes de trésorerie ont été annulées sans aucun préavis, plongeant des petites entreprises, des artisans, dans des difficultés financières telles que le dépôt de bilan était impossible à éviter.

En période de crise, l'État a soutenu les banques. Aujourd'hui, alors qu'elles retrouvent leur autonomie, il est anormal que leurs bénéfices servent à verser des bonus. Au contraire, en contrepartie de l'aide apportée par l'État, elles doivent contribuer aux efforts pour consolider une reprise fragile. Cette mesure me paraît aller dans le sens d'une France compétitive, juste et moderne, tout comme le budget que vous nous présentez aujourd'hui, et que j'aurai le plaisir de voter, après sans doute des heures de débat que nous souhaitons tous riche et constructif. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, puisqu'en cinq minutes on ne peut traiter qu'un sujet, vous me permettrez de tenter d'appréhender celui de la dépense publique.

Nous sommes dans une nouvelle phase. Il y a un an, l'objectif unique était de contenir la crise. Le Gouvernement l'a fait et bien fait. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de dire combien je trouvais que les plans de relance successifs avaient été bien ajustés. Je le répète ici, en préalable.

Cette année, madame la ministre, nous sommes dans une autre logique, avec un double objectif : sortir de la crise et restaurer nos comptes publics. J'approuve le plan de sortie, comme j'ai approuvé les plans de soutien. Je trouve que tout cela est bien agencé, et je suis en particulier tout à fait sensible à cette série de mesures dégressives qui vont doucement s'éteindre mais qui demeurent inscrites dans le budget. Cela me paraît à la fois juste et opportun.

En revanche, j'ai les plus vives inquiétudes concernant le rétablissement de nos comptes publics et les conséquences de leur déficit. À ce sujet, je voudrais faire trois observations.

D'abord, le déficit public s'accroît en 2010, année de la sortie de crise escomptée, par rapport à 2009, année de pleine exposition à la crise. Je trouve tout à fait inquiétant de voir que notre déficit de 2010 sera supérieur à celui de 2009 : 8,5 % contre 8,2 %.

Certes, cela s'explique par un double mouvement que je n'ignore pas. D'une part, malgré la dissipation des effets budgétaires des mesures de relance et le zéro volume affiché, les dépenses publiques n'auront jamais été aussi élevées qu'en 2010 : 55,6 % du PIB, soit plus 2 % en volume, hors plan de relance.

C'est un niveau jamais atteint dans notre pays, nonobstant le grand emprunt. Nous sommes le premier pays au monde en matière de dépenses publiques. Simultanément à cette augmentation de la dépense, les prélèvements obligatoires n'auront jamais été aussi bas dans notre pays : 44,1 % du PIB en l'an 2000 et 40,7 % en 2010. Certes, la crise est responsable d'une baisse de 53 milliards d'euros de recettes fiscales en 2009. Cela étant, je ne pense pas une seule seconde que l'on puisse ne pas mettre en avant cet effet de ciseaux particulièrement inquiétant : des dépenses publiques qui n'ont jamais été aussi élevées ; des prélèvements obligatoires qui n'ont jamais été aussi bas.

Je crains, madame la ministre, monsieur le ministre, que peu de chose ne puisse contrarier ces tendances, à l'heure actuelle. Je crains que les dépenses publiques ne continuent mécaniquement à augmenter, au vu des dépenses de personnel et de pension. Certes, la faiblesse des taux d'intérêt a permis de contrôler les dépenses de pension, mais leur augmentation vraisemblable va aboutir à l'effet inverse.

Comme le rapporteur général l'a bien montré, cette hausse des taux risque aussi d'augmenter les charges de la dette. Cela m'inquiète et me conduit à penser que la tendance des dépenses publiques ne va pas s'inverser.

Quant aux recettes fiscales, même si elles devaient se rétablir cette année, elles ne m'inspirent aucun optimisme particulier.

Voilà pourquoi je suis dubitatif, pour ne pas dire inquiet, au sujet de notre déficit. Il est supérieur à celui de la moyenne des pays de l'Union européenne, en particulier à celui de l'Allemagne avec lequel on constate un différentiel de trois points de PIB, et la tendance ne s'améliore pas. En matière de dépenses publiques, l'écart avec nos partenaires se maintient, voire s'accroît ; en matière de prélèvements obligatoires, nous réduisons cet écart sans le compenser.

J'insiste sur ce phénomène visible, lisible, et je souhaiterais qu'il fasse l'objet d'une réflexion plus approfondie entre nous : nos dépenses publiques et nos prélèvements obligatoires n'ont jamais évolué de façon aussi différente.

À mon sens, il faut donc se tourner vers la dépense, et je vais y consacrer la dernière minute de mon intervention. D'abord, j'approuve sans aucune difficulté les mesures qui ont déjà été prises pour la fonction publique, notamment le non-renouvellement d'un fonctionnaire sur deux. Pour répondre à M. Muet, cette dernière mesure rapporte un milliard d'euros et nous avons pris la bonne décision d'en restituer 500 millions aux fonctionnaires. Il s'agit donc d'une mesure positive. J'approuve aussi la RGPP.

Cela étant, malgré tout ce que nous avons d'ores et déjà entrepris, des pans entiers de décisions n'aboutissent pas. Permettez-moi de donner trois exemples.

Premièrement, en matière de gestion des ressources humaines, je considère que nous ne faisons pas ce que nous devrions faire pour que les opérateurs soient soumis aux mêmes règles de bonne gestion que les administrations centrales : près de 340 000 à 350 000 emplois ETP chez les opérateurs. Dans le budget 2010, nous ne demandons pas les mêmes efforts aux opérateurs qu'aux administrations, même si, pour la deuxième année consécutive, il existe un plafond…

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

J'ai entendu votre exemple, monsieur Mallié. Je peux en donner beaucoup d'autres, car c'est une règle générale.

Deuxièmement : l'immobilier. J'ai eu l'occasion, hier, au titre du Conseil pour l'immobilier d'État, de faire le point sur la réforme de l'administration territoriale actuellement engagée. Monsieur le ministre, vous qui suivez ce dossier avec compétence et attention, je voudrais vous dire que nous prenons beaucoup de retard. Dans le domaine de l'immobilier, nous constatons beaucoup d'avancées, mais ce dossier-là n'avance guère.

Troisièmement : des mesures emblématiques ne sont pas prises alors qu'elles devraient l'être. Permettez au rapporteur du budget de la fonction publique que je suis de vous indiquer que nous aurions souhaité que l'École nationale d'administration – institution assez emblématique – accepte enfin de signer ce contrat d'objectifs et de performance que nous lui demandons pour la quatrième ou cinquième année consécutive. Elle ne l'a toujours pas fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Tron

Ce n'est qu'une anecdote pour dire qu'en matière d'économies nous pouvons trouver des exemples. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Goua

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, après avoir lu attentivement le rapport de Gilles Carrez sur la situation financière de notre pays, publié en juillet dernier, et quelques morceaux choisis du rapport de la Cour des comptes, je pensais naïvement que le Gouvernement allait enfin prendre la mesure de la gravité de la situation.

Je m'attendais donc à un budget 2010 en rupture avec la dérive constatée depuis quelques années, qui – j'en conviens – a été accentuée par la crise économique mondiale. Or le budget que vous nous proposez ne permet pas d'infléchir la tendance et d'enrayer la mécanique infernale des déficits publics et de l'endettement de l'État, bien au contraire.

Il faut dire que le Président de la République ne vous facilite pas la tâche ! Après les exonérations fiscales et sociales des heures supplémentaires, le bouclier fiscal, la baisse de TVA dans la restauration, il s'agit maintenant de supprimer la taxe professionnelle au 1er janvier 2010. Cette suppression a été annoncée sans concertation ni étude préalable. Cette bombe lancée au hasard d'un discours, avec un délai de mise en place quasiment immédiat, ne vous a pas permis d'entreprendre cette réforme nécessaire de façon sérieuse.

Nous sommes face à une réforme improvisée, dont les modalités ne cessent d'être modifiées. Elles ont été dernièrement réécrites par notre rapporteur général, dont je salue les efforts pour tenter d'éviter d'accoucher d'un monstre. Je viens d'ailleurs de recevoir un e-mail du MEDEF de mon département, indiquant que la réforme, même remaniée, est un drame pour l'économie locale.

Nous sommes encore face à une usine à gaz, et ce sont les collectivités locales qui risquent d'en faire les frais. Or nos collectivités, dont le volume d'investissements a été rappelé à plusieurs reprises – 73 % des investissements publics –, ont besoin d'être sécurisées quant au volume et à la pérennité de leurs ressources, afin de soutenir notre économie, a fortiori durant cette période. Le rôle contra-cyclique des investissements publics risque d'être mis à mal. C'est gravissime ! Tout retrait ou toute incertitude de leurs ressources futures aurait sans nul doute des répercussions sur la fiscalité locale, donc sur le pouvoir d'achat de nos concitoyens.

Je n'insisterai pas plus sur la situation dramatique des finances de notre pays, sur les risques qu'elle fait courir à notre protection sociale et sur le fardeau qu'auront à supporter les générations futures.

Je voudrais simplement stigmatiser la constance de votre politique qui tend à faire des cadeaux aux riches en accablant les classes moyennes et les plus démunies. Je me focaliserai sur le budget 2010 à travers un inventaire à la Prévert, mais non exhaustif, des différentes mesures que vous nous proposez en contrepartie, si je puis dire, de l'allégement de 11,5 milliards de la taxe professionnelle.

Jugez vous-même. Pas de coup de pouce au SMIC au 1er janvier 2010, afin de soutenir la croissance, paraît-il. L'impôt sur le revenu, le plus juste fiscalement, verra son montant baisser de 2,3 %, en raison du remboursement de la taxe carbone. Cette dernière n'offre aucune garantie d'efficacité environnementale, bien au contraire. Elle ne constituera qu'une taxe supplémentaire qui pèsera encore davantage sur les ménages : le coût des carburants augmentera de 4 %.

Le bonus-malus pour les achats d'automobiles, dispositif salué pour son efficacité, est réduit, alors qu'il constitue un instrument de soutien au pouvoir d'achat et au secteur automobile.

L'accession sociale à la propriété est mise à mal par une diminution du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt et par une baisse de la portée du prêt à taux zéro, dont le montant sera réduit le 1er juillet prochain puis le 1er janvier 2011.

L'indemnité de départ à la retraite volontaire sera fiscalisée au premier euro, tandis qu'elle ne l'était qu'à partir de 3 050 euros. Vous soutenez la proposition de fiscalisation des indemnités d'accident du travail, qui va procurer un gain de 150 millions d'euros, alors que les innombrables niches fiscales représentent 70 milliards d'euros. Malgré l'avis négatif du Conseil économique, social et environnemental, des syndicats, mais également du MEDEF, vous vous entêtez dans cette voie.

Le forfait hospitalier sera augmenté et 110 médicaments seront moins remboursés. La conséquence immédiate, annoncée par la Mutualité française, sera une hausse de 3,9 % des cotisations aux mutuelles. Une fois de plus, les ménages sont en première ligne, tandis que les entreprises continueront de bénéficier de quelque 30 milliards d'euros d'allégements de charges sociales.

La redevance audiovisuelle passera de 118 à 121 euros, alors même que la généralisation de la TNT menace toute une partie de notre population rurale d'écrans noirs.

Contrairement à ce que vous tentez de nous faire croire, ce n'est pas la crise qui vous fait, d'année en année, porter le fardeau sur les ménages – particulièrement les ménages modestes. Ce n'est pas la crise qui vous a obligés à créer le bouclier fiscal. Ce n'est pas la crise qui vous incite à étrangler les collectivités territoriales. Je crois plutôt à une stratégie de démantèlement, et à une volonté délibérée de modifier en profondeur ce qui fait l'originalité de notre pays : cette économie mixte et notre protection sociale, dont tout le monde célèbre maintenant les vertus d'amortisseur de la crise.

Nous sommes bien loin de ce budget équilibré que vous nous annoncez, bien loin d'un budget qui prépare l'après-crise, bien loin d'un budget d'avenir.

Seule une politique qui répartirait de façon équitable les nécessaires ajustements serait de nature à mobiliser l'ensemble de nos concitoyens. Vous avez fait le choix inverse, en accentuant les privilèges et en multipliant les cadeaux fiscaux aux plus fortunés. C'est non seulement une injustice, mais aussi une erreur économique fondamentale.

Il est juste temps de rectifier le tir, de modifier votre budget 2010 et de répondre à l'appel pressant des députés venant de tous les bancs de l'hémicycle, en commençant par abroger le bouclier fiscal. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Madame la ministre, monsieur le ministre, il est toujours facile, en quelques minutes, de donner des leçons et de ramasser en quelques formules lapidaires les critiques à rencontre d'un budget, car tout budget est critiquable tant il résulte toujours d'un choix entre des inconvénients.

C'est singulièrement vrai dans la grande crise que nous traversons depuis dix-huit mois, et il faut d'abord vous féliciter pour votre pragmatisme et votre réactivité dans cette rude épreuve. À la vérité, entre le 15 septembre 2008 et la fin du mois de mars 2009, l'économie mondiale était dans la situation d'un avion dans une zone de turbulences, sans qu'aucun des capteurs, c'est-à-dire les indicateurs avancés de conjoncture, ne fonctionne et ne puisse utilement renseigner les décideurs. Ce qui a été décidé, le plus souvent à l'initiative de la France, en matière de sauvetage des banques, de restauration de la liquidité, de soutien budgétaire à l'activité économique, doit être salué. Sans la capacité d'initiative et d'action de la présidence française et sans l'action personnelle du Président de la République, nous serions dans une situation bien pire aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Cela étant, la fin de l'histoire n'est pas écrite, loin s'en faut ! Et sans même compiler les opinions des conjoncturistes, des conjecturistes,…

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

…il suffit de parler avec les chefs d'entreprise pour savoir que les six longs mois à venir, d'ici à l'été 2010, seront décisifs pour le maintien de notre tissu économique et industriel. C'est pourquoi il ne faut pas relâcher notre vigilance. C'est pourquoi une politique indifférenciée et aveugle de rigueur budgétaire n'aurait pas donné un bon signal aux acteurs économiques.

Mais, comme l'a écrit un grand historien des institutions, Jean Meyer : « Il n'est d'histoire que financière. Le reste suit, du moins la plupart du temps. »

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Et c'est du reste qu'il faut se préoccuper, je veux bien sûr parler de la dette, et du grand emprunt.

Le rapport Pébereau avait commencé à faire une pédagogie utile. C'est comme si la crise l'avait balayé, car il y a aussi des effets de mode en économie. Pourtant, on sait bien que le rendez-vous avec la dette publique sera périlleux : elle ne pourra être effacée ni par l'inflation et la spoliation des épargnants, ni par la guerre – fort heureusement – comme ce fut le cas dans notre histoire financière.

Nous devrons régler la question de la dette en temps de paix, sans inflation et avec une croissance modérée dans le meilleur des cas, dans le contexte d'une augmentation des dépenses sociales liée à l'allongement de la durée de la vie. Il revient donc à notre génération politique de poser la question politique de la dette et d'avoir le courage, notamment par la sélection des dépenses publiques, de ne pas obérer les capacités d'initiative des générations futures.

C'est d'autant plus vrai que pointe une divergence de plus en plus visible avec nos amis allemands, malgré notre excellente entente politique. Quand le chancelier Schröder dévaluait les salaires faute de pouvoir dévaluer l'euro, la France passait aux trente-cinq heures ; et tout récemment, l'équilibre budgétaire a fait, outre-Rhin, l'objet d'une révision constitutionnelle. Qui achètera notre dette libellée en euros ? Qui nous gouvernera de l'extérieur par le biais de notre encours de dette, puisque nous n'avons pas su trouver en nous-mêmes l'énergie et le courage suffisants pour être les maîtres de nos propres affaires ? Ce n'est évidemment pas le seul Gouvernement que j'interpelle par ces questions, mais nous tous dans cet hémicycle et, au-delà, la nation tout entière.

Dans ce contexte, la question du grand emprunt doit requérir toute notre vigilance. Oui, le Président de la République a eu raison d'élever la ligne d'horizon en prenant l'initiative de bâtir les chantiers du futur. Mais il nous faut être particulièrement vigilants sur le choix des dépenses, qui ne doivent pas être improductives. Il faudra également retenir la formule d'émission la moins coûteuse pour les finances publiques. Depuis que Pierre Bérégovoy a modernisé l'émission et la gestion de la dette publique au milieu des années quatre-vingt, le mythe de l'emprunt mobilisateur quand l'ennemi est à la frontière n'a plus grand sens, d'autant que le symbole politique a un coût exorbitant. Espérons que la raison l'emportera, car les Français sentent bien que l'endettement excessif génère toujours des impôts futurs, et il ne faudrait pas que l'épargne de précaution liée aux anticipations casse la consommation, qui reste l'un des piliers de notre croissance.

Je voudrais, pour terminer, évoquer ma préoccupation concernant la réforme de la taxe professionnelle, en commençant par le contexte. Comme l'a dit le Premier ministre, il y a une seule République : il est vain de vouloir opposer éternellement l'État et les collectivités locales, et inversement. Surmontons l'éternel débat sur les transferts de charges ; reconnaissons que, quand les recettes de TVA baissent, la DGF ne baisse pas, alors que, quand elles augmentent, la même DGF augmente aussi. Cessons, à l'inverse, de fustiger les élus locaux au motif qu'ils seraient par nature dépensiers : ils essayent seulement de rendre le meilleur service à la population. Mais il est vrai aussi que la future réforme des collectivités territoriales va permettre de rationaliser les dépenses locales.

Je ne reviendrai pas sur la généalogie de la taxe professionnelle, ni sur ses mutations successives. Il faut simplement réaffirmer que cette réforme est indispensable pour cesser de pénaliser notre industrie.

Nous vous avons bien écoutée, madame la ministre, et nous avons compris que vous étiez ouverte aux propositions pour la suite de la discussion. Gilles Carrez, notre excellent rapporteur général nous a dit hier que le formidable travail fait en commission n'était qu'un prologue avant la discussion de la première partie. Nous veillerons à ce que les transferts de recettes fiscales soient équilibrés entre les niveaux de collectivités, et seront également très vigilants en ce qui concerne les fonds départementaux de péréquation.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Je combattrai en outre avec la dernière énergie l'idée d'affecter une fraction de la CSG aux départements, car cette recette doit à mon avis rester intégralement dans la sphère sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Gaymard

Ce n'est pas le débat d'aujourd'hui, mais s'il y avait une chose à transférer en la matière, ce serait la dépense et non la recette.

S'agissant enfin des finances des conseils généraux, je fais pleinement confiance à Michel Bouvard, dont on sait la connaissance précise qu'il a de ces dossiers.

Toujours est-il que je voterai le présent projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Nicolin

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention dans le cadre de cette discussion générale se limitera à un cri d'alerte et à deux demandes relatives, d'une part, à l'équité du financement envisagé des chambres consulaires et, de l'autre, à notre soutien aux banques.

Commençons par le cri d'alerte.

Depuis près de trente ans notre pays s'enfonce inexorablement dans les déficits. Cette année, pour faire face à la crise et freiner ses conséquences, nous allons devoir voter un budget en déficit de 116 milliards d'euros, soit plus de 7 % du PIB : un record ! Nos compatriotes ont le droit de savoir que, derrière ce dernier chiffre peu parlant se cache une réalité plus éloquente. En 2010, le déficit du budget de la France avoisinera les 45 % par rapport aux recettes. Les Français savent-ils que notre État, lorsqu'il dépense 100, ne perçoit que 45 en recettes, et qu'il finance le reste par de la dette ? Quelle famille française pourrait se permettre de tels écarts ?

Madame la ministre, monsieur le ministre, il est temps de dire la vérité aux Français. Au moment où le Gouvernement engage avec raison notre pays dans une vague de réformes qui doivent le placer au rang des nations les plus modernes, il faut, si l'on veut que nos compatriotes acceptent cette politique courageuse, leur parler vrai. Face à cet enjeu, il ne faudrait pas que d'autres, parce qu'ils sont accrochés à une vision du « toujours plus », s'exonèrent de changer eux aussi leur mode de fonctionnement.

Nous devons donc réformer notre organisation territoriale, comme le Président de la République s'y est à juste titre engagé. En effet, comme notre pays ne peut pas vivre longtemps au dessus de ses moyens, une fois la crise passée, nous devrons revenir fortement à une politique vertueuse. Mais si, dans le même temps, les collectivités territoriales – communes, intercommunalités, départements et régions –, qui dépendent toutes plus ou moins du soutien financier de l'État, ne participent pas à cet effort vertueux, nous passerons à coté du redressement global de nos finances publiques.

Aussi nos collectivités doivent-elles cesser de considérer qu'un bon budget est forcément un budget en augmentation. Comme l'État, les collectivités devront, demain, commencer à réduire leurs dépenses ; cela aussi, il faut avoir le courage de le dire clairement.

Au-delà de ce constat, je voudrais faire deux remarques. La première concerne le projet, que vous contestez, visant à prélever de façon exceptionnelle et temporaire les bénéfices des banques françaises en 2010. Cette proposition me paraît juste et logique. Qui comprendrait en effet qu'après avoir été aidées et soutenues par le contribuable, les banques ne participent pas à un effort exceptionnel et temporaire consenti au nom de la solidarité nationale ? Je voterai donc l'amendement sur ce sujet.

La seconde remarque concerne la réforme du financement et de l'organisation des chambres consulaires. Le but affiché est d'alléger le poids qu'elles font peser sur les entreprises. Mais, madame la ministre, savez vous que certaines de ces chambres, dont celle de Roanne, ont consenti des efforts particuliers au cours de ces dernières années ? Depuis cinq ans, la chambre de commerce et d'industrie de Roanne a baissé volontairement son prélèvement de plus de 30 %, en s'efforçant parallèlement de diminuer ses dépenses. Si vous ne tenez pas compte de cela, cette chambre consulaire, qui fut vertueuse avant les autres, sera autant pénalisée que celles qui n'ont pas fourni les mêmes efforts. Ce ne serait ni juste, ni compréhensible, et je vous demande d'en tenir compte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, j'évoquerai brièvement, pour commencer, la genèse de ce projet de loi de finances dont, mes chers collègues, nous n'avons certes pas donné le tempo. Premier acte : le Président de la République annonce la suppression de la taxe professionnelle ; deuxième acte : le Président de la République annonce l'instauration de la taxe carbone ; troisième acte : le Président de la République fixe le montant de celle-ci, en ignorant les rapports, les commissions et les différents conseils d'experts ; quatrième acte : le Président de la République, toujours lui, annonce un grand emprunt. Nous en sommes au cinquième acte : débrouillez-vous, semble-t-on nous dire. Le Parlement et le Gouvernement, moyennant moult bricolages, sont invités à mettre en musique les consignes du Président de la République de la façon que voici.

En premier lieu, la taxe professionnelle est-elle supprimée ? « Le présent projet de loi prévoit en effet le remplacement de la taxe professionnelle par un nouvel impôt économique local, dénommé contribution économique territoriale et doté d'une double assiette », nous dit le rapport de la commission. La taxe professionnelle, mes chers collègues, n'est donc pas supprimée mais remplacée par un nouvel impôt. Nous aurions aimé, madame la ministre, disposer d'indications sur les effets à prévoir dans les différents secteurs. Comment seront-ils touchés ? Les entreprises du BTP, de même que les secteurs de la finance et de l'assurance paieront-ils plus ? Ou peut-être moins ? Quelles seront les implications de cette mesure pour les petites entreprises ? Comment la nouvelle contribution économique territoriale s'articulera-t-elle avec la taxe carbone qu'acquitteront certaines petites entreprises ? Les grandes entreprises émettrices de carbone, comme les aciéries et les cimenteries, assujetties aux quotas européens, seront par exemple exonérées de la taxe carbone. Entre la nouvelle contribution, la suppression de la taxe professionnelle et la création de la taxe carbone, quelle sera leur situation ? Des simulations étaient nécessaires.

Sur la taxe carbone, je rejoins l'analyse de Pierre-Alain Muet, qui a parfaitement démontré l'inadéquation entre la proposition du Gouvernement et les ambitions affichées. On annonce une compensation pour les particuliers : pourquoi ? Pourquoi pas, d'ailleurs, mais pendant combien de temps ? J'ai entendu avec une certaine inquiétude Jérôme Chartier évoquer une éventuelle diminution des compensations au cas où la taxe produirait ses effets.

Un mot sur le grand emprunt. Quel en sera le montant ? Auprès de qui sera-t-il souscrit ? Nul ne le sait. Les banques seront-elles chargées de la collecte auprès des particuliers ? On connaît le coût de telles opérations. Quel usage entend-on par ailleurs faire de cet emprunt ? Je ne reviendrai pas à ce débat, qui a déjà eu lieu.

Quant à la prétendue coproduction législative, chers collègues de la majorité, je vous plains. Certains d'entre vous n'ont pas dû dormir beaucoup ces dernières nuits,…

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Eckert

…à commencer par le rapporteur général, contraint de réécrire entièrement plusieurs articles.

Quels sont par ailleurs les amendements qui ont le plus retenu l'attention ? Celui, par exemple, qui visait à exclure la CSG et la CRDS, et éventuellement les impôts locaux, du bouclier fiscal. Pas question, a répondu le Gouvernement, droit dans ses bottes !

Un autre amendement concerne l'imposition des indemnités journalières pour les maladies professionnelles et les accidents du travail. Beaucoup a été dit sur le sujet ; on parle d'une recette de 150 millions d'euros pour la sécurité sociale, somme sans commune mesure avec les montants en jeu dans le projet de budget.

Un mot, enfin, sur l'excellent amendement, auquel beaucoup ont apporté leur soutien, de notre collègue Didier Migaud, qui a bien montré l'obligation morale – dont on parle beaucoup au sujet de la TVA réduite pour les restaurateurs – d'une contribution des banques, compte tenu de l'aide qui leur a été accordée. Pour financer leur supervision, vous proposez, madame la ministre, une taxe dont les recettes, selon les chiffres fournis par votre entourage, avoisineraient les 100 millions d'euros : une goutte d'eau ! Cette somme est sans commune mesure avec celle prévue par l'amendement de Didier Migaud ; sans même parler du volume, j'aimerais au moins que vous nous précisiez qui pilotera la supervision des banques. Si celles-ci financent leur propre superviseur, devenant ainsi leur employeur, on ne peut attendre aucun résultat, comme on le voit avec les agences de notation. Pourriez-vous nous confirmer que la supervision sera pilotée par la commission bancaire ou un organisme du même type, ce qui dissiperait au moins le doute que je viens d'évoquer ?

Vous avez beau nous répéter que tout est ouvert, chacun a pu constater que rien ne l'était, que rien ne se discuterait. C'est donc résolument que nous nous prononcerons contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Rodet

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 2 du projet de loi portant réforme, et non suppression, de la taxe professionnelle ouvre une longue période d'incertitude pour les finances locales, période qui sera sans doute marquée par des désordres et par l'injustice fiscale.

Bien que la taxe professionnelle, qui a trente-quatre ans, soit un vieil impôt, elle a toujours été contestée, même après divers rapiéçages ou ravaudages. Si cet impôt pose problème, c'est vraisemblablement parce que la loi l'instituant n'avait pas fait l'objet de simulations précises et sérieuses. Or il semblerait que l'amère leçon de 1975 n'ait pas été retenue, puisque nous sommes sur le point de commettre les mêmes erreurs dues à la précipitation et à l'improvisation. En 1975, le porte-parole des députés socialistes, le regretté André Boulloche, élu du Doubs, compagnon de la Libération, avait demandé avec insistance et solennité à M. Jean-Pierre Fourcade, ministre des finances de M. Giscard d'Estaing et de M. Chirac, et au rapporteur du projet de loi, le député gaulliste du Bas-Rhin, M. Jean-Claude Burckel, de surseoir à l'application de la loi afin de procéder à un travail approfondi de simulation en vraie grandeur sur un exercice budgétaire. Le Gouvernement et sa majorité ayant refusé de répondre à ces demandes légitimes, nous avons eu le résultat que l'on sait.

Ainsi, périodiquement, la taxe professionnelle est revenue au centre du débat fiscal et a fait l'objet de corrections, de rectifications, d'abattements, qui ont conduit l'État à en prendre une partie à sa charge. Le dispositif qui nous est aujourd'hui proposé, même après passage en commission, laisse un goût amer, résultant d'ajustements hasardeux.

Dans le flot des déclarations lénifiantes qui nous sont délivrées, on entend souvent dire que la taxe professionnelle est une exception française. La vérité est tout autre : nombreux sont les grands pays développés, modernes, qui ont un impôt économique assis sur les entreprises. Toutefois, la plus extravagante de ces déclarations est celle qui veut nous faire admettre – ou croire – que les entreprises seront gagnantes et que les collectivités locales ne seront pas perdantes.

Ne nous perdons pas en explications embarrassées : c'est par un endettement supplémentaire de l'État que ce fragile équilibre sera très temporairement maintenu. En fait, l'exercice auquel on nous convie repose sur un triple saut généralisé de taxes, d'impôts, de contributions diverses entre les différents niveaux de prélèvements. En commission des finances, notre collègue Laffineur nous a dit que tout avait été « balayé ».

Erreur ! Signet non défini.. Si tel est le cas, nous risquons d'avoir de mauvaises surprises en soulevant le tapis, car les mauvaises surprises sont à venir. Les effets pervers vont très rapidement se révéler puisque ce nouvel impôt se présente comme un agrégat inconstitué de taxes diverses, dont l'hétérogénéité le dispute à la complexité. M. Gérard Larcher, président du Sénat et ancien membre du Gouvernement, exprime sans précautions ses doutes et ses inquiétudes, et je ne rappelle pas ce qu'a dit M. Juppé. Ce nouvel impôt, cette nouvelle taxe professionnelle qui répudie ses ascendants, a un côté baroque. Son architecture se courbe et se délie sans rigueur ni logique.

Quant à l'évocation de la force dissuasive de l'impôt pour enrayer les délocalisations, elle relève plus du voeu pieux que du réalisme. On nous répète en boucle que la taxe professionnelle a pour principal défaut de taxer l'investissement. Soyons précis : la taxe professionnelle actuelle taxe les amortissements, et non l'investissement global, ce qui n'est pas tout à fait la même chose.

De la même façon, quand on examine l'article 2 dans sa version initiale, on constate qu'il fait l'impasse totale sur les délicates questions posées par l'adaptation du plafonnement à la valeur ajoutée de la cotisation économique territoriale, par le biais de ses deux composantes. Le dispositif de plafonnement prévu dans le projet revient en réalité – et sans le dire – à plafonner la seule cotisation locale d'activité, perçue au profit des communes et de leurs groupements. Bref, la prise en compte cumulée des deux cotisations dans un même plafonnement peut être une source de grande injustice.

En ouvrant dans la confusion la boîte de Pandore de la taxe professionnelle, vous allez déclencher une avalanche de graves dysfonctionnements. Avec la réforme qu'introduit l'article 2 – même amendé –, nos concitoyens risquent de payer au prix fort, dans tous les aspects de leur vie quotidienne, les effets dévastateurs d'une véritable bombe fiscale à retardement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Claeys

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais dénoncer une injustice qui frappe une centaine de collectivités locales et qui concerne ce que l'on appelle « le prélèvement France Télécom ». Je tiens cependant, au préalable, à remercier le rapporteur général qui, dans un amendement que nous discuterons ce soir, a apporté des solutions à ce problème.

Madame la ministre, l'année dernière déjà, cette question avait été abordée tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat où, après que le Gouvernement eut refusé un amendement, vous aviez annoncé que vous comptiez mettre en place un groupe de travail sur le sujet.

L'article 29 de la loi de finances pour 2003 a mis fin à la période pendant laquelle France Télécom était soumise à des modalités spécifiques d'imposition en matière de fiscalité, dont le produit était entièrement reversé à l'État.

À compter du 1er janvier 2003, les collectivités territoriales ont pu bénéficier de l'intégration des bases France Télécom dans l'assiette des impositions locales. Toutefois, afin d'assurer la neutralité de la réforme sur les recettes de l'État, un mécanisme de prélèvement sur les ressources des collectivités locales a été instauré, dit « prélèvement France Télécom ».

À l'origine, ce prélèvement devait être neutre. Son montant est calculé sur les bases de taxe professionnelle de France Télécom de l'année 2003, puis indexé, chaque année, sur l'évolution du taux de la DGF. Il s'ensuit que les collectivités disposant de très importantes bases France Télécom en 2003, mais ayant connu par la suite, pour d'obscures raisons, de fortes pertes de bases, compte tenu des décisions de France Télécom, ont vu apparaître, puis croître, un solde de taxe professionnelle France Télécom en leur défaveur, le produit fiscal devenant de plus en plus inférieur au prélèvement opéré par l'État. Cette situation est parfois devenue insupportable pour les collectivités, notamment lorsque les établissements de France Télécom constituaient une part prépondérante des bases de taxe professionnelle, comme dans un grand nombre de communautés d'agglomération.

Permettez-moi de prendre un exemple concret, celui, que je connais le moins mal, de la communauté d'agglomération de Poitiers. Les bases de taxe professionnelle de France Télécom sur le territoire de cette agglomération ont diminué de moitié depuis 2003, passant de 33,86 millions d'euros à 17,13 millions en 2009. Du coup, le produit fiscal de taxe professionnelle France Télécom a diminué de moitié, passant de 6,075 millions d'euros en 2003 à 3,201 millions en 2009 au profit de la communauté d'agglomération.

À l'inverse, la communauté d'agglomération a subi l'augmentation du prélèvement de l'État de 1 % par an depuis 2003, celui-ci étant passé de 6,047 millions d'euros à 6,422 millions en 2009. Au total, et compte tenu du dispositif compensatoire résultant de l'article 133 de la loi de finances rectificative pour 2006, le différentiel cumulé non compensé supporté par la communauté d'agglomération entre 2003 et 2009 s'élève à 8,142 millions d'euros, et il augmente chaque année : 1,17 million d'euros en 2007 ; 2,4 en 2008 ; 2,8 en 2009.

La simulation pour 2010 montre que la perte de bases se poursuivrait pour atteindre 15,5 millions d'euros, de sorte que le produit fiscal ne serait plus que de 2,89 millions d'euros, alors que le prélèvement France Télécom atteindrait 6,807 millions.

Inutile d'épiloguer, me semble-t-il. Je voudrais simplement vous dire, madame la ministre, au nom de ces communautés d'agglomération, que, malgré tous les efforts pour maîtriser leurs dépenses, que ce soit par la mutualisation des services, par la maîtrise de l'évolution des dépenses budgétaires ou, malheureusement, par l'augmentation du taux de taxe professionnelle, elles se trouvent dans une situation impossible. La communauté d'agglomération de Poitiers subit une perte de recettes globales de 4,8 % en 2009 et accuse un déficit de 3,9 millions d'euros.

Je voulais rappeler ces faits dans la discussion générale, car je considère cela comme une véritable injustice,…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Claeys

…et le rapporteur général sait que je ne parle pas à la légère. Une centaine de collectivités locales ont été placées dans cette situation impossible. J'espère que la discussion budgétaire permettra enfin de trouver une solution de sagesse, comme celle que M. Carrez a proposée. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite traiter des conséquences du présent projet de loi de finances tant dans l'hexagone que dans les outre-mers.

Permettez-moi pour commencer de présenter les excuses de mon collègue Alain Rousset, président de l'Association des régions de France, qui, empêché, m'a demandé d'exposer à sa place les préoccupations et propositions des collectivités régionales sur la réforme de la taxe professionnelle.

Cette réforme ne concerne pas seulement la taxe professionnelle, mais toute la fiscalité locale et, naturellement, les impôts sur les ménages. Toutes les collectivités doivent disposer d'impôts sur les ménages et les entreprises, ce qui justifie que les régions conservent la taxe foncière sur les propriétés bâties. Par cette taxe, elles pourraient voter le taux d'un impôt qui concerne les ménages et les entreprises. À défaut, les régions n'auraient plus d'impôt direct sur les ménages, si ce n'est le tarif des cartes grises. Elles n'auraient plus d'impôt direct avec vote de taux, puisque la seule recette proposée – la cotisation complémentaire – est une formule à taux national dont le produit est réparti entre toutes les collectivités. Les régions n'auraient plus aucun impôt assis sur une base foncière, alors qu'elles ont la compétence fondamentale d'aménagement du territoire.

Les régions disposeraient donc d'une autonomie financière résiduelle, encore plus limitée, alors qu'elles disposent déjà de la plus petite autonomie financière. Le bloc des communes et des départements dispose d'une autonomie financière supérieure à 60 % de leurs ressources, ce qui est conforme à la définition constitutionnelle et à celle de la loi organique. Les régions disposent pour leur part d'à peine 40 % d'autonomie, sur la base d'un ratio calculé pour l'année 2003. La réforme doit donc conduire à augmenter ce degré d'autonomie. C'est cela, améliorer la décentralisation.

Par ailleurs, les régions métropolitaines souhaitent attirer votre attention sur les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux, les fameuses IFER. Qu'elles s'appliquent aux exploitants de réseaux de télécommunications ou aux exploitants ferroviaires, elles ne constituent pas un véritable levier fiscal permettant de disposer d'une réelle autonomie financière. Il paraît plus cohérent que l'IFER ferroviaire soit attribuée à un autre niveau de collectivité, et que les régions disposent d'une autre recette fiscale.

En définitive, les régions souhaitent donc bénéficier de 25 % de la cotisation complémentaire, comme le proposent le projet de loi de finances et l'amendement Carrez ; conserver la recette de la taxe foncière sur les propriétés bâties, seul impôt ménages dont elles disposent actuellement, à hauteur de 1,7 milliards d'euros, alors que le produit de cette taxe s'élève à 20 milliards d'euros ; n'avoir, pour éviter de détériorer leur déjà faible autonomie financière et fiscale, ni dotation budgétaire ni IFER télécommunications et ferroviaires.

S'agissant plus spécifiquement de l'impact de ce projet de loi de finances sur les outre-mer, il affectera considérablement le pouvoir d'achat des consommateurs de ces territoires.

Tout d'abord, si nous comprenons le principe de la taxe carbone, nous en contestons à la fois l'architecture, l'économie et les prévisibles conséquences. Elle est non seulement écologiquement inefficace mais surtout socialement injuste.

Le prix de l'essence, si vous voulez bien vous en souvenir, a été le catalyseur de la crise sociale survenue outre-mer au début de l'année. L'application en l'état de la taxe carbone y jouera donc également le rôle de détonateur d'un nouveau conflit social, dont nous pouvons largement nous passer.

Après le dégel – que nous avons jugé unilatéral, arbitraire et, du moins, très opaque – décidé par la secrétaire d'État chargée de l'outre-mer, les prix à la pompe augmenteront donc de nouveau, de 4 à 5 centimes, sans que le mécanisme tant décrié de fixation de prix des produits pétroliers ait été révisé en profondeur.

Pour traiter un sujet aussi explosif, Mme la secrétaire d'État a fait des annonces, rogné sur telles marges, fait disparaître telle ligne de coût, compensé tel surcoût. On nous annonce des baisses partout mais, vraie curiosité arithmétique, cela se traduit, pour les consommateurs, par une hausse de 6 centimes.

Sans rien changer à un système totalement inique qui contraint l'État à faire des chèques aux compagnies pétrolières lorsqu'il se décide à baisser les prix du carburant outre-mer, l'instauration d'une nouvelle taxe n'est pas, mes chers collègues, une mesure responsable, et je vous mets solennellement en garde contre le risque de réveiller des volcans.

En outre, l'application automatique de la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, aux carburants outre-mer le 1er janvier prochain, par application différée de la loi de finances pour 2006, se traduira également par une hausse directe du prix à la pompe, d'un montant d'environ 60 euros par hectolitre de sans-plomb et 43 euros par hectolitre de gazole, alors même que le rapport de la mission parlementaire présidée par M. Ollier préconisait de supprimer définitivement cette application programmée outre-mer. J'espère que, sur ce sujet, le Gouvernement et la majorité, feront preuve du même bon sens que les membres de la commission des finances en acceptant notre amendement pour exclure cette application de la TGAP.

Enfin, je ne peux terminer mon intervention à cette tribune sans dénoncer ce que nous avons appelé outre-mer le scandale de la non-application du RSA.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Veuillez conclure, cher collègue. Je vous ai laissé vous exprimer longuement.

Debut de section - PermalienPhoto de Victorin Lurel

Je ne vous demande qu'une petite seconde, monsieur le président.

Le RSA n'est pas appliqué là où il serait le plus efficace et où le nombre de ses bénéficiaires serait le plus élevé. Deux injustices ont déjà été commises ; une troisième le sera bientôt, en vertu de l'article 11 : l'imputation sur la prime pour l'emploi du RSTA, le revenu supplémentaire temporaire d'activité, qui n'est pas un substitut du RSA. Cela représente une économie de 300 millions d'euros.

Nous demandons à la majorité et à la représentation nationale de corriger ces injustices.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Armand Martin

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, le déclenchement, en septembre 2008, d'une crise financière sans précédent s'est traduit par une très importante récession mondiale. Du deuxième trimestre 2008 au deuxième trimestre 2009, la contraction de l'activité a été brutale en Allemagne, plus contenue en Espagne et aux Etats-Unis, et plus limitée en France. Nous en subissons cependant encore toutes les conséquences : les recettes de l'État ont fortement diminué, et les dépenses ont augmenté avec la mise en oeuvre du plan de relance.

Nous devons garder à l'esprit que le budget 2010, élaboré dans des conditions exceptionnelles, s'inscrit dans la perspective d'une sortie de crise programmée pour l'année prochaine. Ainsi, entre le plan de relance et les orientations du budget 2010, le Gouvernement a fait le choix d'une politique volontariste qui doit placer la France dans les meilleures conditions lorsque les indicateurs économiques annonceront la relance.

Si les conditions économiques demeurent exceptionnelles et justifient les importants efforts consentis pour financer le plan de relance, il nous faut garder comme impératif la maîtrise de la dépense publique. J'insiste donc sur l'impérieuse nécessité, d'une part, de poursuivre la révision générale des politiques publiques, qui a permis des économies et une rationalisation des moyens publics, et, d'autre part, de nous engager à réduire l'endettement de la France dès la sortie de la crise.

Parmi les objectifs assignés au projet de loi de finances pour 2010 figure la réforme en profondeur de la fiscalité.

S'agissant des dispositions relatives à la suppression de la taxe professionnelle, j'attire votre attention, madame la ministre, sur les inquiétudes que peuvent exprimer les élus locaux. Vous savez combien les recettes issues de la taxe professionnelle sont essentielles pour les collectivités locales.

Mon propos ne vise pas cependant pas, comprenez-le bien, à remettre en cause la légitimité de cette réforme. En effet, comment peut-on accepter de voir taxer des investissements réalisés par les entreprises ? Cette réforme est nécessaire et nous devons la mener à bien, car il s'agit là non d'une réforme conjoncturelle mais bien d'une réforme structurelle qui contribuera, n'en doutons pas, à soutenir l'investissement des entreprises et à renforcer leur compétitivité.

Le seul chiffre de 11,7 milliards d'euros suffira à illustrer mon propos. Il s'agit du montant de trésorerie que conserveront les entreprises en 2010. Ces 11,7 milliards d'euros contribueront à restaurer leur capacité d'investissement et à leur permettre de dégager des moyens supplémentaires pour embaucher ou pour conquérir de nouveaux marchés.

Toutefois, comme je l'indiquais, aussi opportune soit-elle, cette réforme suscite des inquiétudes et des interrogations.

Bien sûr, la compensation intégrale de la taxe professionnelle a été annoncée. Cependant, plus qu'une annonce, je souhaiterais qu'un engagement soit solennellement pris, et pas seulement pour l'année 2010. Je sais que nous sommes nombreux en cet hémicycle à attendre un tel engagement.

S'agissant de la mise en oeuvre de la taxe carbone, destinée à inciter les entreprises et les ménages à des comportements plus sobres en CO2, si l'instauration d'un tel dispositif est légitime, prenons garde à bien en définir les contours et à en mesurer toutes les conséquences. En effet, cette mesure, dont l'objet est de préserver l'environnement, ne doit pas cristalliser les critiques.

Je pense ainsi aux nombreux ménages français qui n'ont pas d'autre alternative, pour se rendre sur leur lieu de travail, que d'utiliser leur voiture. En effet, en milieu rural, il s'avère souvent impossible d'utiliser les transports en commun, non pas à cause d'une mauvaise volonté ou d'habitudes, mais tout simplement parce qu'ils n'existent pas. Gageons que cette taxe carbone ne constitue pas une charge financière supplémentaire pour ces ménages.

Je pense aussi aux agriculteurs, dont la situation actuelle est particulièrement difficile. Il ne faudrait pas que cette contribution mette plus à mal des exploitations agricoles déjà fragilisées économiquement. Gageons que cette taxe carbone ne pénalise pas la compétitivité de ces entreprises.

Au-delà de ces remarques, je considère que le projet de budget pour 2010 répond aux impératifs économiques du moment. J'espère, monsieur le ministre, que vous saurez tenir compte de mes observations et que vous nous apporterez des gages en ce qui concerne la compensation de la taxe professionnelle pour les collectivités territoriales. J'espère également que le milieu rural ne sera pas pénalisé par l'instauration de la contribution énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Mothron

Madame la ministre, monsieur le ministre, j'en suis à mon troisième mandat de député mais, jusqu'à présent, je n'étais jamais intervenu dans la discussion générale d'un projet de loi de finances, préférant m'exprimer à propos de postes budgétaires spécifiques.

Si je le fais aujourd'hui, c'est pour mettre en garde contre l'acceptation des dépenses telles qu'elles figurent dans votre projet de loi. La dette nationale était déjà abyssale ; elle le sera encore plus à la fin de l'année 2010. Son accroissement est sans fin depuis près de trente ans, et son poids sera insupportable pour nos enfants et petits-enfants.

J'ai conscience, en vous disant cela, de ne pas vous être d'une grande aide. En revanche, partageant votre volonté et celle du Président de la République de ne pas augmenter les impôts et les taxes, je vous encourage à rester fermes sur les dépenses : n'en acceptez pas une de plus que celles que vous nous proposez et, surtout, étudiez la plus grande part des propositions de mes collègues, notamment les spécialistes de la commission des finances.

Comme vous, madame la ministre, je suis issu du privé. J'ai eu la responsabilité de comptes d'exploitation, qu'il ne me serait pas venu à l'idée de présenter « dans le rouge » à mes patrons ou actionnaires.

Par ailleurs, pendant sept ans, de 2001 à 2008, j'ai géré une grosse ville de plus de 100 000 habitants, Argenteuil. Comme vous-même, j'ai hérité d'une lourde dette, d'autant que moins de 10 % des dépenses étaient des dépenses d'investissement.

Dès la première année de mon mandat et mon premier budget, j'ai exigé de mes adjoints et de mes services qu'ils me proposent un budget économisant 10 % des dépenses de fonctionnement, hors masse salariale. Élus et directeurs firent, tout d'abord, la grimace, mais l'objectif fut atteint puisque le compte administratif révéla une économie réelle de 8,5 %.

Ce résultat fut préservé pendant tout le mandat, brisant ainsi la spirale infernale qui, avec une augmentation de 50 % des impôts locaux, avait marqué la précédente mandature.

Cette rigueur nous a permis, sans augmenter, de toute la durée de notre mandat, les taux d'imposition, d'investir cinq fois plus que nos prédécesseurs. Certes, le montant de la dette que nous avons laissée était élevé, mais il ne dépassait pas celui de la dette dont nous avions hérité.

Bien entendu, le budget de l'État n'a rien à voir avec celui d'Argenteuil. J'aborde donc ce sujet avec humilité.

Le contexte mondial ne vous facilite pas la tâche mais c'est justement dans ces moments de tempête qu'il faut tenir la barre.

En résumé, madame la ministre, monsieur le ministre, soyez fermes pendant toute cette discussion et continuez la chasse aux dépenses. Vous aurez alors toute la majorité pour vous soutenir. Bon courage dans cette rude tâche !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laffineur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma