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Séance en hémicycle du 11 juillet 2007 à 15h00

Résumé de la séance

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  • forfait

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La parole est à M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

, vice-président de la commission des finances, de l'économie générale et du plan. Monsieur le président, en ce début de session extraordinaire, l'ordre du jour de l'Assemblée appelle successivement trois textes ou débats dont est saisie la commission des finances : le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, que nous examinons depuis hier et sur lequel elle rapporte au fond, puis, à compter du lundi 16 juillet, le projet de loi portant règlement définitif du budget de 2006 et le débat d'orientation budgétaire.

Dans le cadre de la préparation de ces deux derniers débats, la commission des finances auditionne actuellement le Premier président de la Cour des comptes. Je sollicite donc, avec le président de la commission et le rapporteur général, une suspension de séance d'une demi-heure afin de nous permettre d'achever cette audition.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

Mes chers collègues, cette demande étant parfaitement légitime, je vais suspendre la séance pour une demi-heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Rudy Salles

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinq, est reprise à quinze heures quarante, sous la présidence de M. Jean-Marie Le Guen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est reprise.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi de plusieurs demandes de rappel au règlement.

La parole est d'abord à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur le premier alinéa de l'article 58.

Ce matin, à la suite de la discussion générale sur le projet relatif au travail, à l'emploi et au pouvoir d'achat, Mme la ministre de l'économie et des finances a répondu aux orateurs, ou plutôt nous espérions qu'elle le ferait : elle a certes répondu à ceux de l'UMP qui, pour l'essentiel, s'étaient bornés à illustrer et à répéter les propos que leur mentor avait tenus pendant la campagne électorale, mais le seul député de l'opposition qui ait eu droit à une réponse est le président de la commission des finances. Encore ai-je trouvé cette réponse assez insolente, la ministre lui ayant expliqué qu'il avait déjà bien de la chance d'occuper ce poste par la grâce incommensurable du Président de la République et des députés de l'UMP qui, paraît-il, l'avaient voulu − ce qui, au demeurant, est une parfaite affabulation.

Depuis quand, dans cet hémicycle, ne répond-on pas aux orateurs qui soutiennent les motions de procédure ? Depuis quand, même, ne répond-on pas aux orateurs de l'opposition qui se sont exprimés dans la discussion générale ? Monsieur le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur et monsieur le secrétaire d'État chargé de la consommation et du tourisme, puisque Mme Lagarde n'est pas là, vous pourrez lui traduire mes propos à votre manière : cela écorchera peut-être moins ses oreilles encore inexpérimentées. Continuer de la sorte serait prendre le risque de voir le débat se dérouler dans des conditions inappropriées. À moins que cette façon de ne pas respecter le Parlement ne soit l'une des conséquences de la fameuse rupture et de la présidentialisation, et n'anticipe sur les modifications constitutionnelles que l'on nous promet.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Louis Idiart.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Monsieur le président, mon rappel au règlement, également fondé sur l'article 58, premier alinéa, va dans le sens de celui de M. Brard du point de vue de la méthode. Mme la ministre a reconnu ce matin que, comme l'avait souligné le président de la commission des finances, la défiscalisation des heures supplémentaires au titre de l'impôt sur le revenu n'empêcherait pas que le surcroît de rémunération qu'elles représentent soit inclus dans le revenu fiscal de référence pris en compte pour l'appréciation du droit à dégrèvement ou exonération de certains impôts et taxes, comme la taxe d'habitation, ainsi que pour le calcul de différents tarifs sociaux. Ce supplément de revenu sera également pris en compte pour apprécier l'éligibilité à la PPE. Ce principe paraît injuste, car les ménages aisés ne subiront aucun effet de seuil et profiteront à plein de l'exonération fiscale. Il est surtout inacceptable que cet effet ne soit pas évalué.

Préalablement à notre débat, nous exigeons de connaître les impôts et tarifs concernés, par exemple ceux des crèches ou des cantines, le nombre de contribuables touchés, l'ampleur des effets en termes financiers. Nous n'avons pas eu, ce matin, de réponse à ces questions : nous souhaitons les obtenir avant de poursuivre le débat, faute de quoi nous demanderions une suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Karoutchi pourrait répondre : c'est un vieux pratiquant ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, au moment où, pour la première fois de la législature, je prends la parole dans cet hémicycle…

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

…je voulais vous dire combien je suis heureux de retrouver les débats parlementaires. Car, vous le savez, monsieur Brard, je suis un homme de débat.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Même à Montreuil, où je me suis rendu à votre invitation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et où vous fûtes particulièrement bien accueilli, reconnaissez-le !

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Je conserve en effet de notre confrontation un souvenir qui n'est pas cuisant, mais agréable.

Vous avez donc bien conscience, les uns et les autres, que nous ne sommes pas là pour ne pas répondre. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.) En présentant ce texte, nous avons la volonté d'agir, et c'est pourquoi nous répondrons aux questions que vous voudrez bien nous poser.

Cela étant, il y a des temps de réponse adaptés, et j'aurai l'occasion au cours de la discussion des amendements que vous avez déposés d'apporter toutes les précisions que vous souhaitez. Soyez assurés qu'avec la ministre de l'économie et avec mon collègue Luc Chatel, nous débattrons, car, vous l'avez remarqué, ce texte traduit les engagements du candidat Nicolas Sarkozy, élu Président de la République. C'est donc un texte sur lequel nous allons vous opposer un certain nombre d'arguments qui ont été validés par le résultat de l'élection présidentielle et des élections législatives.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Les préoccupations qu'il traduit constituaient un élément central de ces deux campagnes. Nous en débattrons mais, vous l'aurez compris, nous sommes sereins et déterminés. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Mon collègue Jean-Louis Idiart a été très clair. Je prends acte de la réponse de M. Novelli mais je considère que si courtoise soit-elle, et je l'apprécie dans sa forme, cette réponse n'en est pas une. Nous sommes pourtant là au coeur d'un débat de fond, puisqu'il s'agit du pouvoir d'achat des salariés.

Travailler plus pour gagner plus, c'était un slogan de campagne électorale. Maintenant, il faut clarifier les choses, monsieur Novelli, pour que les Français ne soient pas trompés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous, nous avons notre opinion, nous pensons que ce texte n'est pas la bonne réponse, mais, comme vous êtes entré dans un processus et que nous en voyons les failles, il est normal que, à chaque étape, nous soulevions les problèmes. Et si nous voulons avancer, il faut que Mme Lagarde nous réponde, si vous ne pouvez le faire vous-même.

La question que nous posons d'emblée est très importante. Il ne faudrait pas que les Français qui, demain, effectueraient des heures supplémentaires – si on leur demande d'en faire, parce qu'ils ne décideront pas seuls, et cela sera sans doute assez marginal – se retrouvent piégés par le relèvement du revenu fiscal de référence, s'ils doivent payer leur taxe d'habitation plus chère ou s'ils subissent des modifications de leurs tarifs sociaux par exemple dans les crèches ou les cantines scolaires. Vous aurez fait croire à ceux qui auront la possibilité de travailler plus qu'ils gagneraient plus, mais, dans la réalité, ils seront piégés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Vous ne pouvez pas continuer le débat sur de telles bases et nous renvoyer tout le temps au fait que les Français ont décidé par leur vote. Ils n'ont pas décidé ce que vous proposez parce qu'on ne leur a pas dit la vérité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Nous demandons que des réponses soient apportées aux questions de l'opposition pour que le débat se déroule dans des conditions démocratiques. Si Mme Lagarde n'est pas là, nous pouvons suspendre la séance le temps qu'elle revienne. C'est la demande qui a été faite, au nom de mon groupe, par Jean-Louis Idiart et que je réitère. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jérôme Chartier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Tout d'abord, je salue à mon tour Hervé Novelli, malheureusement notre ancien collègue, puisqu'il a pris des responsabilités au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Nous l'assurons de toute notre amitié et de notre soutien.

M. Ayrault n'était pas là ce matin ; je voudrais donc lui apporter quelques informations.

Ainsi que l'a précisé le président de la commission des finances, 412 amendements seront examinés, dont un certain nombre déposés par l'opposition. Nous aurons donc l'occasion, article par article, amendement par amendement, de demander des informations précises afin de voter en connaissance de cause. Pour l'heure, nous avons terminé la discussion générale. La motion de renvoi en commission vient d'être repoussée et nous avons commencé d'entendre les orateurs inscrits sur l'article 1er, c'est-à-dire que nous n'avons même pas encore examiné le premier amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Je souhaite que nous entamions enfin l'examen des articles pour entrer dans le débat sur les amendements, afin que chacun puisse exprimer sa position, demander des éclaircissements, et que les réponses sollicitées soient apportées. Ce n'est ni au cours de la discussion générale ni même lors de la discussion précédant les articles qu'elles peuvent l'être, chacun le sait.

Enfin, je regrette de devoir faire observer, monsieur Brard, que ce que vous avez dit n'est pas exact. Ce matin, Mme Lagarde n'a pas répondu qu'à un seul intervenant, en l'occurrence le président de la commission des finances. Elle a aussi répondu à M. Idiart.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Mais elle n'a pas pu vous répondre parce que vous n'étiez pas là pour l'écouter, je le regrette pour vous. La prochaine fois, venez en séance, je suis certain qu'elle vous répondra. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Mes chers collègues, nous sommes un peu loin de ce que devraient être des rappels au règlement.

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Je ne voudrais pas que nous nous engagions sur la voie des suspensions de séance à répétition alors que ces questions seront largement débattues au cours de la discussion des amendements. Je voudrais simplement attirer votre attention sur l'exposé des motifs du texte. Celui-ci est très clair – vous êtes un fin lecteur, monsieur Ayrault, et vous l'avez compris, j'en suis sûr.

Je lis, page 5 : « Pour préserver l'économie d'autres avantages fiscaux ou sociaux soumis à condition de ressources dont bénéficieraient les salariés concernés, il est proposé de réintégrer dans le revenu fiscal de référence la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires. Cette rémunération sera également prise en compte dans le calcul des limites conditionnant le bénéfice de la prime pour l'emploi (PPE). »

Vous avez ainsi la réponse à votre interrogation : ces rémunérations seront effectivement prises en compte dans le revenu fiscal de référence. Cela veut dire que, si nous adoptons ce texte, un salarié payé 1,2 SMIC qui effectuerait chaque semaine quatre heures supplémentaires exonérées fiscalement et socialement, toucherait 2 500 euros, comme l'a indiqué Mme la ministre, diminués, comme c'est logique, des 490 euros de la prime pour l'emploi. Le gain net pour ce salarié serait donc d'environ 2 000 euros. Voilà la réponse que je voulais vous donner. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Chartier n'avait sans doute pas fini sa nuit puisqu'il n'a pas remarqué que j'étais dans l'hémicycle ce matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il est vrai que vous m'avez extirpé de l'hémicycle pour me faire des confidences.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne dirai qu'au Canard enchaîné ce qu'elles furent. (Sourires.)

La majorité de l'Assemblée s'est prononcée pour le rejet de la motion de renvoi en commission. Soit. Mais un élément nouveau est intervenu, vous le savez, monsieur Chartier, puisque vous étiez là, ainsi que beaucoup de nos collègues : nous venons d'auditionner le Premier président de la Cour des comptes. Or que nous a-t-il dit ? Que vos comptes de l'année dernière n'étaient pas sincères.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Que vous aviez fait de la cavalerie et qu'entre 16 et 50 milliards, on ne savait pas de combien le déficit s'était creusé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais il n'y a pas que ça ! L'article 1er propose d'exonérer les heures supplémentaires de cotisations sociales. Ce n'est pas la première fois qu'on propose à notre assemblée de voter des transferts, mais Philippe Séguin, dont vous connaissez, monsieur Novelli, la sagesse et la profondeur,...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…M. Séguin propose, à la différence de Mme Lagarde, que nous pensions par nous-mêmes. Or il a indiqué, et c'est une donnée nouvelle très importante dans le débat, que des centaines de milliards d'euros faisaient l'objet de transferts sans qu'on puisse évaluer leur efficacité. À propos des exonérations de charges, il a par ailleurs reconnu qu'en l'état actuel la Cour ne pouvait pas dire si c'était une bonne mesure ou non. C'est donc à l'aveugle, monsieur Novelli, que vous voulez nous faire délibérer. Connaissant votre habilité, cela ne m'étonne pas de vous.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Oh !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais pour la transparence du débat, ce n'est pas une bonne manière.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Monsieur Ayrault, maintenez-vous votre demande de suspension de séance ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La suspension est de droit.

J'en fixe la durée à cinq minutes.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est reprise.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (nos 4, 62).

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Ce matin l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits sur l'article 1er. Nous allons poursuivre leur audition.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Louis Idiart, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Dans son rapport, M. le rapporteur général prend en compte certains éléments, mais il ne nous communique aucune donnée chiffrée, aucune étude d'impact.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Lorsque nous avons défendu les différentes motions de procédure, nous n'avons cessé d'en parler. Mme la ministre s'est d'ailleurs dispensée de répondre à ces motions et s'est contentée d'une espèce de déclaration générale dans laquelle elle n'a rien dit, rien expliqué.

Reconnaissez, chers collègues, que vous n'êtes pas prêts sur ce texte ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous soutenez un projet dont vous ne connaissez pas les conséquences. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.) Vous n'en connaissez les conséquences ni pour les finances publiques ni pour les personnes à qui il va s'appliquer. C'est la raison pour laquelle nous demandons que la représentation nationale soit informée. Ce n'est pas parce qu'un nouveau Président de la République a été élu un soir de mai que nous sommes aujourd'hui dans une sorte d'empire où il faudrait tout accepter et se taire ! Nous sommes des élus de la République. Nous formons le Parlement et nous demandons des explications !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Et croyez bien, chers collègues de la majorité, que cela vous servira autant à vous qu'à nous ! Cela servira à l'ensemble du pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

Monsieur le président, nous souhaitons avoir une réponse claire du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Idiart

L'article 1er est long et de nombreux orateurs se sont inscrits. En outre, des explications interviendront encore au moment de l'examen des amendements. Nous demandons donc au Gouvernement de nous donner l'assurance qu'il nous donnera les informations que nous souhaitons, c'est la moindre des choses ! Si tel n'est pas le cas, je serai obligé de demander à nouveau une suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme Laurence Dumont, inscrite sur l'article 1er.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Dumont

Dans l'attente de précisions, j'en resterai aux principes pour laisser au Gouvernement le temps d'apporter des réponses aux questions posées. Je vais donc me borner à résumer les trois arguments essentiels expliquant que je voterai contre l'article 1er, lequel vise à exonérer d'impôt sur le revenu et de cotisations sociales les heures supplémentaires. Cet article est une supercherie, un leurre et une tromperie.

Une supercherie, car si tous les salariés sont potentiellement concernés, le choix de faire des heures supplémentaires ne leur appartient pas. Ce sont les employeurs qui décident en fonction de leurs seuls besoins. Je ne connais aucun salarié qui annonce à son employeur en arrivant le matin qu'il va travailler huit, neuf ou dix heures. Les travailleurs n'ont pas le choix, et ils n'ont même pas celui de refuser des heures supplémentaires. En effet, depuis la loi de cohésion sociale de janvier 2005, un licenciement individuel peut intervenir si le salarié s'oppose à une modification essentielle de son contrat de travail. Refuser des heures supplémentaires entrera dans cette définition et pèsera comme une menace sur tous les salariés.

Lors de la campagne présidentielle, on a voulu faire rêver les Français et leur faire croire qu'ils pourraient librement décider et de leur temps de travail, et de leur rémunération. Cette poudre aux yeux n'aura servi que d'appât électoral et le réveil sera dur pour ceux qui se rendront compte qu'il ne leur appartient pas de pouvoir travailler plus. La mesure prévue par l'article 1er ne peut se substituer à une véritable politique salariale. Demain, au salarié qui sollicitera une augmentation de salaire, on répondra à coup sûr : « Faites des heures sup ! » (« Très juste ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Cet article est aussi un leurre, car si on veut vraiment favoriser la création d'emplois, pourquoi ne pas proposer aux entreprises des moyens efficaces d'embaucher davantage plutôt que de les inciter à faire travailler plus les employés qu'elles ont déjà ? Soyez sûrs que l'exonération de cotisations des heures supplémentaires n'aura pas d'autre conséquence que de laisser les chômeurs à la porte des entreprises et de favoriser les contrats à temps partiel, sans espoir d'évolution. Tout ce qui contribue à rendre moins coûteuse pour les entreprises une heure supplémentaire par rapport à une heure dite normale les incitera à imposer des heures supplémentaires à leurs salariés plutôt qu'à proposer des contrats à plein temps ou à embaucher davantage.

La réduction des cotisations sur les heures supplémentaires revient à amplifier les effets négatifs de la politique de baisse du coût du travail orchestrée par le précédent gouvernement. Dès 2003, les charges sociales des bas salaires ont été aveuglement réduites pour toutes les heures travaillées, et notamment les heures supplémentaires. Cette politique d'exonération massive coûte cher : 20 milliards d'euros par an en moyenne. Elle conduit au développement d'emplois précaires peu qualifiés et peu rémunérés : les désormais fameuses « trappes à bas salaires ». Désormais, plus des trois quarts des embauches se font sur des emplois à temps partiel et de faible durée.

Enfin, cet article est une vraie tromperie. Si une partie supplémentaire de la rémunération des salariés est exonérée de cotisations sociales, elle génèrera moins de droits sociaux, notamment pour le calcul des pensions de retraite qui est effectué sur la base d'un salaire de référence hors heures supplémentaires. C'est donc leur avenir que les salariés mettront dans la balance s'ils travaillent plus maintenant en oubliant leur retraite de demain.

Pour résumer, cet article est une supercherie, car ce n'est pas le salarié qui choisit son temps de travail. C'est un leurre, car ce dispositif pénalisera un peu plus encore la lutte contre le chômage. C'est une tromperie, car il aggravera un peu plus, demain, le problème du pouvoir d'achat des retraites des actifs d'aujourd'hui et des comptes de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Le premier article de ce projet de loi est à la fois injuste et très coûteux pour les finances publiques. C'est le Conseil d'analyse économique qui le dit.

Il est dans la droite ligne des cadeaux aux entreprises sans réelle portée sur l'emploi. Je rappelle que 65 milliards d'euros sont inscrits à ce titre dans le budget chaque année. C'est le premier budget de l'État, avant celui de l'éducation nationale. Nous aurons l'occasion d'y revenir lors de la discussion de nos amendements.

En juin 2006, la Cour des comptes fustigeait l'inefficacité des exonérations de cotisations sociales en faisant remarquer que, sur 20 milliards d'euros d'exonérations compensées par l'État, 17 milliards ne servaient pas l'emploi. Mais vous persistez dans cette voie.

Vous persistez en vous faisant les chantres de la bonne gestion, mais en creusant la dette allégrement alors même qu'ici, pendant cinq ans, nous avons entendu en boucle les discours sur la gravité de la dette, l'urgence de la réduire et de tout subordonner à cet objectif numéro un, car nous étions les mauvais élèves de l'Europe.

Tout le monde s'accorde à dire que le paquet fiscal que vous nous proposez n'est pas financé. Vous misez sur une éventuelle hausse des recettes et sur une baisse des dépenses sans nous préciser lesquelles. Ce paquet fiscal représente 15 milliards d'euros de moins-values fiscales, 15 milliards qui profiteront d'abord et essentiellement aux plus aisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Vous ne touchez qu'aux impôts progressifs, c'est-à-dire à l'impôt sur le revenu, à l'ISF et aux droits de succession, pour mieux préparer l'augmentation des impôts les plus injustes comme la TVA. Ces impôts progressifs sont aujourd'hui réduits à la portion congrue, pour le plus grand bonheur des plus riches.

Vous habillez toute votre politique d'une rhétorique sur le retour de la croissance en insistant sur la bienveillance de l'Eurogroupe. Mais cela est loin de nous rassurer, car si nos partenaires européens semblent moins inquiets, je ne peux m'empêcher de croire qu'il y a une raison valable, c'est l'affirmation de nouvelles recettes.

Les moins-values fiscales sur les plus riches devront être compensées. Elles le seront sans doute par de nouvelles contributions indirectes – la fameuse TVA sociale – ou par la pression sur les collectivités territoriales, avec les conséquences négatives à en attendre en matière d'investissements, c'est-à-dire en termes d'emploi.

Le choc fiscal que vous annoncez n'est rien d'autre que la restauration des privilèges, le retour d'une société de rentiers – les voilà les vrais oisifs qui font de l'argent en ne faisant rien ! –,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

… la mise à mort de notre principe constitutionnel de respect de la capacité contributive de chacun.

Vous êtes engagés dans un processus qui a déjà eu lieu dans les pays anglo-saxons, les États-Unis de M. Reagan et la Grande-Bretagne de Mme Thatcher. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

Les effets sont connus. C'est l'explosion des inégalités, l'amoindrissement des services publics, la mise en cause de toute sécurité collective, l'enrichissement des plus riches à coups de cadeaux fiscaux, de création de paradis fiscaux avec, à côté, la tiers-mondisation d'une grande partie de la société. Ce n'est pas de cela que notre pays a besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cet article 1er est significatif et vous voulez que toute cette loi soit significative. Mais vous avez bien compris le risque de dire la vérité. On se souvient à cet égard de ce qui s'est passé entre les deux tours de l'élection présidentielle avec la TVA anti-sociale. Dès lors que vous levez le voile sur la politique que vous souhaitez véritablement mettre en oeuvre, les Français comprennent très bien ce que vous voulez faire.

Vous avez parlé de « choc de confiance ». Moi, je vois le choc, mais je ne vois pas la confiance. Depuis des années, vous utilisez les mots en essayant de les dévitaliser, comme si vous étiez un dentiste, pour que cela ne fasse plus mal. Hélas, la maladie est toujours là !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous invoquez le travail. M. Novelli est l'un des idéologues du régime. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) C'est un libéral conséquent qui a toujours assumé ses points de vue. L'un des vôtres vous compare à Mickaël Souslov, monsieur Novelli. Je ne sais pas comment il vous faut le prendre. Il faut toujours se méfier de ses amis ! Le libéral conséquent que vous êtes sait que, pour atteindre son objectif, il faut dissimuler le chemin que l'on veut emprunter. Mme la ministre n'est pas aussi expérimentée que vous. C'est ce qui nous a valu, hier à la tribune, ce discours du XIXe siècle digne de la Monarchie de juillet : enrichissez-vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mais, monsieur Novelli, comment les riches s'enrichissent-ils ? Ils s'enrichissent par le travail des autres,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… le travail des pauvres gens qu'ils exploitent et qui n'arrivent pas à faire les fins de semaine.

Debut de section - PermalienPhoto de François Goulard

Mettez-le dans une réserve ! Il faut le conserver en l'état ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est ça la réalité, mais vous ne voulez pas la voir et le discours que vous avez ici, vous n'oseriez pas le tenir devant les chômeurs de vos circonscriptions, vous le savez bien !

Venons-en à l'essentiel. Du point de vue idéologique, nous l'avons entendu hier, vous opposez l'individu à la collectivité. Vous voulez développer l'illusion de la réussite individuelle qui serait assurée dès lors qu'elle triomphe au détriment du collectif, au détriment des autres. Vous opposez les Français les uns aux autres, au mépris, vous le savez, de nos traditions de solidarité. Dans les entreprises, il y aura ceux qui veulent ou qui peuvent faire des heures supplémentaires et ceux qui n'en font pas.

Avec votre système, quand un chef d'entreprise – sans qu'il soit pervers pour autant – aura à choisir entre une embauche nouvelle et des heures supplémentaires exemptées de cotisations sociales et défiscalisées au titre de l'impôt sur le revenu, il optera nécessairement pour la seconde solution. De ce fait, quand un ouvrier partira en retraite, dans une entreprise qui en emploie trente ou quarante, il ne sera pas remplacé pourvu qu'on trouve sur place les personnels compétents permettant de compenser son départ par des heures supplémentaires.

Ce qui est pervers, dans votre système, ce n'est pas seulement qu'il rompt avec nos traditions de solidarité que, depuis toujours, vous cherchez consciemment à briser, c'est que vous videz en même temps les caisses de l'État et des régimes sociaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

D'un côté, le salarié ne paiera plus d'impôt sur le revenu ; de l'autre, dans les régimes sociaux, les rentrées ne seront plus assurées. Il manque un ministre dans cet hémicycle : Xavier Bertrand, qui, comme vous, sait fort bien ce qu'il fait. En démontrant que le déficit de la sécurité sociale – que vous creusez vous-mêmes – ne peut pas être comblé, vous créez les conditions pour que le porte-monnaie des patients soit de plus en plus sollicité et vous poussez les Français à recourir aux assurances privées, que ce soit pour leur santé ou pour leur retraite.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Bertrand vous le confirmera. Les assurances privées, il les connaît. C'est pour elles que vous roulez !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Et vos hurlements de protestation, monsieur Jacquat, ne font que confirmer mes accusations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Dominique Dord.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, puisque presque tous les orateurs inscrits sur l'article 1er ont déjà parlé, je répondrai dans mon intervention à ceux de l'opposition, qui se sont longuement exprimés.

Je ne sais pas si ce texte sera la panacée. Mais il a un immense mérite que vous n'avez pas, monsieur Brard. Il essaie d'apporter des solutions à deux maux qui minent notre société depuis longtemps : l'insuffisance du pouvoir d'achat des salariés les plus modestes – que vous prétendez pourtant vouloir défendre – et celle de la croissance française. Le mérite de ce projet de loi n'est donc pas mince. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Depuis ce matin, j'ai entendu beaucoup de critiques formulées à l'encontre de ce texte, notamment de l'article 1er, mais pas une seule proposition visant à résoudre ces deux difficultés majeures que rencontre notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire et du groupe Nouveau Centre.)

Oui, le problème des Français, particulièrement des plus modestes, c'est leur pouvoir d'achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Ils nous l'ont dit et répété sur tous les tons depuis plus de deux mois au cours de la campagne électorale. À l'origine de ces difficultés,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Lagardère et Arnault ont des problèmes de fin de mois ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

…il y a certes l'euro, mais aussi les 35 heures. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Souvenez-vous, mes chers collègues – ce n'est pas si vieux –, qu'en 2002, quand elles se sont généralisées en France, les salariés qui n'ont plus travaillé 39 mais 35 heures par semaine ont vu leur pouvoir d'achat maintenu, alors que les entreprises, contraintes de leur verser un salaire constant, ont vu le coût du travail surenchérir de 11,4 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

La contrepartie accordée par les entreprises a bien entendu été une modération, sinon un blocage du pouvoir d'achat des salariés. Ne l'oublions pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

La contrepartie, c'était la flexibilité ! Demandez donc aux patrons s'ils veulent revenir en arrière !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Cinq ans plus tard, en 2007, force est de constater que le pouvoir d'achat de nos compatriotes est en berne et que les 35 heures ont favorisé des délocalisations massives vers les pays où le coût du travail est moins élevé. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Ce texte tente donc – ce n'est pas le moindre de ses mérites – d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés sans augmenter le coût du travail pour les entreprises.

Quelles ont été vos propositions au cours des deux campagnes électorales qui viennent de s'achever, chers collègues de l'opposition ? Les Verts nous ont assurés qu'il fallait travailler 32 heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Mais pour quel salaire ? S'il faut les payer 32 heures, soit ! Mais qu'on les paie 35 et le phénomène que je viens de décrire ne fera que s'aggraver.

Mme Royal, quant à elle, prétendait qu'il fallait fixer le SMIC à 1500 euros pour augmenter le pouvoir d'achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Mais, quelques jours après la fin de la campagne présidentielle, elle a reconnu que cette proposition ne tenait pas la route.

Nous, nous ne sommes pas des magiciens. Nous pensons seulement que, pour que les Français qui en ont le plus besoin puissent gagner plus, il faut les laisser travailler plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nous n'avons pas de botte secrète ! Nous proposons de travailler plus, en essayant de ne pas imposer davantage le revenu de ce surcroît de travail, et nous souhaitons charger moins l'entreprise, pour que le coût du travail ne la mette pas hors des conditions de la compétition mondiale. Voilà qui nous paraît relever du bon sens. Pas d'idéologie ni de dogmatisme, mais un peu de pragmatisme, s'il vous plaît !

J'en viens au second mal auquel ce texte tente de répondre. En France, nous avons – chacun le reconnaît – une croissance insuffisante.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Il faut donc essayer de la relancer, ce qui ne peut évidemment pas se faire dans les entreprises dans lesquelles il n'y a pas assez de travail, comme l'a fait remarquer ce matin un collègue qui ne craignait pas les lapalissades. Mais vous savez comme moi que 600 000 offres d'emploi ne sont pas pourvues en France, ce qui signifie que 20 milliards de salaire brut ne sont pas touchés ni, par conséquent, dépensés ou redistribués. Nous voulons aller chercher ces 20 milliards d'euros de croissance, qui nous tendent les mains, mais auxquels nous tournons le dos depuis des années.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Nous avons beaucoup de travail devant nous. Laisser ces 20 milliards d'euros en jachère, c'est peut-être votre stratégie, mais ce n'est pas la nôtre. Notre objectif est d'aller les chercher et de donner à tous les professionnels des métiers en tension la possibilité de travailler davantage afin de retrouver ces 20 milliards d'euros qui manquent tant à la croissance nationale.

Oui, nous pensons qu'il faut changer de philosophie et passer de la doctrine Aubry, qui nous pénalise depuis des années, au pragmatisme de Sauvy, qui nous permettra de rechercher ce supplément de croissance. Du mythe du partage du temps de travail, selon lequel on travaillerait moins pour travailler tous – nous le constatons depuis cinq ans : cela ne marche pas en France –, passons à l'évidence que « mon travail crée ton travail ». Quand l'un travaille plus, il gagne plus et, comme il dépense plus, il achète plus de services à l'autre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Et les licenciements d'aujourd'hui sont les emplois de demain... Nous connaissons la formule !

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Dord

Tel est simplement le contenu de l'article 1er. Merci, messieurs les secrétaires d'État. Grâce à vous, nous tournons enfin le dos à un dogmatisme d'un autre âge, que la France est d'ailleurs le seul pays à avoir adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Aucun de ceux avec lesquels nous commerçons – quand bien même il serait géré par des socialistes – n'a évidemment adopté une mesure comparable aux 35 heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Marc Dolez.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Avec l'examen de l'article 1er du projet de loi, qui instaure l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, nous abordons une disposition majeure, que le Gouvernement présente comme l'instrument principal de sa politique en faveur de l'emploi et du pouvoir d'achat. On voudrait la faire passer pour une traduction du principe scandé pendant toute la campagne présidentielle : « travailler plus pour gagner plus ». Hélas ! Nous pensons que cet article ne permettra pas d'atteindre les objectifs fixés et qu'il relève au contraire, pour plusieurs raisons, de ce qu'il faut bien appeler une supercherie.

Faut-il le rappeler ? Ce ne sont pas les salariés qui choisissent d'effectuer des heures supplémentaires, mais les employeurs qui les imposent de façon unilatérale pour répondre à un surcroît d'activité. J'ajoute que, depuis cinq ans, le recours aux heures supplémentaires a été largement favorisé, notamment du fait de l'augmentation de leur contingent annuel de 130 à 180 heures en 2002, puis à 220 heures en décembre 2004.

Faute d'une activité économique suffisante, ces mesures n'ont pas permis d'accroître sensiblement le nombre d'heures de travail, et le nombre d'heures supplémentaires par salarié est resté très inférieur au plafond. La mesure envisagée ne peut donc en aucun cas se substituer à une véritable politique salariale. En réalité, la réduction des cotisations sociales sur les heures supplémentaires ne fera qu'amplifier les effets négatifs de la politique de baisse généralisée du coût du travail menée sans aucune contrepartie depuis cinq ans.

Cette politique d'exonération massive, qui coûte en moyenne 20 milliards d'euros par an, a conduit au développement d'emplois précaires peu qualifiés et peu rémunérés, ce qu'a d'ailleurs dénoncé à juste titre la Cour des comptes. Avec cette nouvelle exonération, qui vise à rendre une heure supplémentaire moins coûteuse qu'une heure normale, les salariés qui subissent le temps partiel ne passeront pas à temps plein, tandis que les demandeurs d'emploi resteront à la porte des entreprises.

De plus, comme l'ont démontré plusieurs économistes, la détaxation risque d'inciter à la déclaration d'heures supplémentaires fictives, qui remplaceront certains éléments de salaire comme les primes. C'est si vrai que le projet de loi prévoit un délai de carence d'un an. D'ailleurs, comment contrôlerez-vous la réalité des heures supplémentaires déclarées aux services fiscaux et aux URSSAF ?

Enfin, la défiscalisation des heures supplémentaires n'aura aucun effet pour plus de la moitié des ménages, qui ne paient pas d'impôt. En revanche, le dispositif de détaxation met en péril le financement de la protection sociale. En effet, le projet de loi ne dit rien de la manière dont l'État compensera – s'il les compense jamais – le manque à gagner des régimes de sécurité sociale ou les pertes de recettes subies par les retraites complémentaires et par l'assurance chômage.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Dolez

Ainsi, la détaxation des heures supplémentaires est, à mon sens, une arnaque particulièrement coûteuse pour le contribuable, puisqu'elle ne représente pas moins de 6 milliards d'euros. Loin d'être une véritable politique d'augmentation des salaires et des embauches, elle servira seulement de couverture aux dispositions qui figurent dans la suite du projet de loi et qui profiteront, elles, aux ménages les plus riches. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Serge Letchimy.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Letchimy

Monsieur le président, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, j'interviendrai, au nom de M. Victorin Lurel, sur trois points.

Le premier concerne l'asphyxie des collectivités locales. Comment financer, en effet, les différentes mesures contenues dans ce texte ? Je ne m'interrogerai pas sur leur pertinence ; d'autres l'ont fait avant moi. Mais il apparaît clairement que le coût de la plupart des réformes annoncées par le Gouvernement sera financé par d'autres acteurs, notamment les collectivités locales, le consommateur et la sécurité sociale. Qui paiera, au final, sinon l'assuré social, le contribuable local et le consommateur ?

Le Premier ministre a lui-même annoncé dans son discours de politique générale qu'en 2008, les dotations de l'État aux collectivités locales ne pourraient pas augmenter plus que l'inflation. Le Gouvernement fait peser là une réelle menace d'asphyxie sur les finances des collectivités locales, notamment d'outre-mer, structurellement plus fragiles encore que celles de l'hexagone. Cette décision, annoncée sans la moindre concertation avec les grandes associations d'élus locaux, concrétise l'abandon unilatéral par l'État du pacte de croissance et de stabilité qui le liait depuis de nombreuses années aux collectivités locales.

Les collectivités locales d'outre-mer souffrent d'avoir des ressources financières à la fois plus incertaines que dans l'hexagone et inférieures à celles des collectivités de métropole. Les bases fiscales y sont beaucoup plus faibles et une telle décision met donc en péril la nécessaire remise à niveau des économies ultramarines.

Privées des ressources qu'elles attendaient, les collectivités locales devront de plus, in fine, prendre en charge le financement de nombreuses mesures annoncées.

Celui lié au renforcement du bouclier fiscal prévu à l'article 5 du projet de loi qui n'évoque pas la répartition du coût entre l'État, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale.

Celui lié à la substitution progressive du revenu de solidarité active au RMI puisqu'il semble que l'État ne compensera aux départements que 50 % du surcoût occasionné.

Quant aux nouvelles exonérations de charges prévues à l'article 1er, on ne sait pas si elles seront intégralement compensées à la sécurité sociale. Enfin, le projet de loi sur les universités que nous examinerons à la fin du mois amènera de facto les collectivités régionales à investir dans le patrimoine immobilier universitaire.

Concernant l'outre-mer, une discrimination importante touche les chômeurs. Connaissez-vous le taux de chômage en Martinique, en Guadeloupe et en Guyane ? Il se situe entre 25 % et 30 %.

Nous proposerons tout d'abord de mettre fin au scandale de la non-intégration de ces chômeurs dans les statistiques nationales. À quel titre les 220 000 chômeurs décomptés outre-mer ne figurent-ils pas dans les statistiques nationales ? Nous vous demanderons de faire cesser cette discrimination en adoptant une mesure de justice et d'égalité.

Nous vous proposerons, d'autre part, par des amendements après l'article 1er, de bonifier – idéalement de 20 % – les dispositifs d'exonération de charges pour nos jeunes diplômés sans emploi afin de lutter contre ce fléau qu'est, outre-mer, le chômage des jeunes et plus singulièrement celui des jeunes diplômés.

Enfin, nous vous proposerons de traiter un autre problème crucial outre-mer, et en particulier aux Antilles, celui de la pollution des terres au chlordécone et aux pesticides. Les agriculteurs dont la production est devenue impropre à la consommation sont privés de revenus et se voient confrontés à des contentieux sociaux et fiscaux inextricables du fait de cette catastrophe environnementale. L'État, et singulièrement le ministère de l'agriculture, en est entièrement responsable pour avoir laissé entrer dans ces territoires des poisons interdits partout ailleurs. Le groupe socialiste, radical et citoyen vous propose donc, en guise de compensation, d'exonérer ces agriculteurs de cotisations.

Sur l'ensemble de ces sujets, auxquels je reviendrai naturellement au moment de la discussion des amendements, nous souhaitons que nos propositions soient entendues.

Enfin, je souhaite intervenir sur la question du logement social et le dispositif du projet de loi relatif à la déductibilité des intérêts d'emprunt. Quels que soient la pertinence et l'intérêt de cette mesure, je tiens à souligner qu'elle n'apportera rien outre-mer. En effet, ce dispositif est exclusif de la défiscalisation de l'achat immobilier outre-mer. Ainsi, en réalité, aucun effort supplémentaire n'est consenti dans ce texte pour le logement outre-mer. Permettez-moi donc, monsieur le secrétaire d'État, de vous poser une question très simple : comment l'État va-t-il payer sa dette relative au logement social et consacrer des moyens à la construction de logements outre-mer alors que les besoins sont estimés à 120 000 logements supplémentaires ?

Pour conclure, je rappellerai le point de vue du sénateur UMP de l'Ardèche Henri Torre qui, dans son rapport d'information de novembre 2006 consacré au logement outre-mer, dénonçait « la politique suicidaire » et « la gestion hasardeuse » du Gouvernement dans ce domaine, qui a conduit à une situation sans précédent. La dette en matière de logement social se situerait selon lui « dans une fourchette comprise entre 500 millions et un milliard d'euros ». Cette situation me semble extrêmement grave et il faut absolument trouver des moyens de compensation pour y remédier. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Alain Vidalies, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Ce rappel au règlement concerne directement l'organisation de nos travaux et les conditions dans lesquelles ce projet de loi est examiné par notre assemblée. Le plus surprenant, c'est que cette majorité ne respectent pas ses propres engagements les plus récents en matière de consultation préalable. La loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social a élargi les missions, prévues à l'article L. 322-2 du code du travail, qui incombent au Comité supérieur de l'emploi, où sont représentées les organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs ainsi que les administrations intéressées. Aux termes de cette loi votée par votre majorité à l'initiative du Gouvernement d'hier, cousin germain de celui d'aujourd'hui, ce comité est désormais « chargé d'émettre un avis sur les projets de loi, ordonnances et décrets relatifs à l'emploi ». Or, à l'évidence, vous avez parfaitement ignoré cet engagement et cette procédure en ce qui concerne le projet de loi que nous examinons puisque ce comité n'a pas été saisi. J'interroge donc le Gouvernement : va-t-il régulariser la situation ? S'il ne nous écoute pas, qu'il applique au moins les lois qu'il a fait voter il y a quelques mois.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Le ministre est intervenu tout à l'heure, mais vous n'étiez pas là !

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Je vous l'ai dit, je n'ai pas l'intention de me dérober, pas plus d'ailleurs que les autres membres du Gouvernement.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Mme Lagarde va nous rejoindre dans quelques instants, monsieur Brard. Comme cela, vous serez content,...

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

…mais je ne crois pas que ce soit uniquement pour cette raison qu'elle vienne.

Nous tenterons donc, mesdames et messieurs les députés, de répondre à toutes vos questions, comme j'ai commencé à le faire tout à l'heure pour celles du président Ayrault lorsqu'il m'a interrogé.

Monsieur Vidalies, nous discutons d'un texte qui a des conséquences fiscales : vous appelez d'ailleurs ce projet de loi le « paquet fiscal ».

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Mais n'est-il pas intitulé « travail, emploi et pouvoir d'achat » ?

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

Il n'y a donc aucune raison que nous saisissions le comité que vous évoquez à propos d'un texte qui vise à exonérer de charges sociales et fiscales les heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé des entreprises et du commerce extérieur

En l'occurrence, la loi de modernisation du dialogue social ne s'applique pas du tout.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous abordons maintenant les amendements à l'article 1er.

Je suis saisi de quatre amendements de suppression, nos 122, 234, 399 et 432.

La parole est à M. Roland Muzeau, pour soutenir l'amendement no 122 .

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous ne vous étonnerez pas après avoir entendu les arguments que nous avons développés avec mes collègues et amis, Jean-Pierre Brard et Jean-Claude Sandrier, que nous proposions la suppression pure et simple de l'article 1er. Je reviendrai brièvement sur les motifs qui nous y poussent.

D'abord, vous trompez délibérément les salariés sur la nature et la portée exacte de votre texte, vous les trompez sur la marchandise. Loin de permettre à « ceux qui veulent travailler plus de gagner plus », votre réforme est un leurre. Elle ne va pas desserrer l'étau des heures supplémentaires contraintes, dont l'employeur, je vous le rappelle, décide seul, sans que le salarié ne puisse ni les exiger ni les refuser.

Les 650 salariés en CDI et les 150 salariés précaires de l'usine Kronenbourg, à Obernai, au coeur de l'Alsace, en ont apporté la preuve il y a quelques semaines en faisant grève pendant quatre jours contre les heures supplémentaires. Après s'être débarrassée d'une brasserie en Lorraine, leur direction, pour faire face aux besoins de sa production, avait décidé d'imposer 100 heures supplémentaires de travail à chaque salarié. Conséquence : l'usine passait à la semaine de 48 heures, samedi compris, et les cadences explosaient. Les grévistes ont demandé que les heures supplémentaires soient mises en place sur la seule base du volontariat et il a fallu quatre jours de grève pour qu'ils obtiennent gain de cause.

Cette grève a clairement révélé l'hypocrisie des objectifs de la politique que vous défendez. Et des exemples il y en a eu d'autres, beaucoup d'autres, dans les mois qui viennent de s'écouler. Je ne citerai que le cas de l'usine Bosch de Vénissieux où, sous la menace de la suppression de l'entreprise et de sa délocalisation, il a été imposé aux salariés de revenir aux 39 heures... sans gagner plus. Faudra-t-il demain que les salariés multiplient des bras de fer comme chez Kronenbourg pour faire respecter le principe du volontariat ?

Autre hypocrisie, avec votre dispositif, le gain en termes de pouvoir d'achat pour les salariés sera illusoire, et vous le savez bien, puisqu'il n'est question pour vous que d'une politique d'affichage. Les quelques euros de plus que toucheront les salariés seront demain très vite annulés par le blocage du salaire de base auquel vous encouragez implicitement les employeurs et par les augmentations de dépenses que vous avez programmées, aussi bien en ce qui concerne les dépenses de santé – franchises et déremboursements – qu'avec l'augmentation probable et seulement ajournée de la TVA prétendument sociale.

Enfin, votre mesure va aggraver les inégalités. Les allégements de cotisations et de contributions fiscales seront à proportion des salaires, donc d'autant plus faibles que les salaires sont plus bas. Les salariés précaires et sous contrat temporaire, comme les salariés travaillant dans les branches et entreprises où des accords prévoient des majorations pour heures supplémentaires inférieures à 25 %, seront écartés de l'essentiel de la mesure.

C'est ainsi que la plupart des salariés dont le temps de travail est le plus long et les salaires les plus bas – cette France qui se lève tôt, chère à notre Président – ne tireront aucun bénéfice de vos mesures : je pense en particulier aux salariés du secteur des hôtels, cafés et restaurants.

Je voudrais revenir, pour en terminer, sur les propos de M. Carrez, qui nous expliquait doctement, hier, que le partage du temps de travail était une impasse. Mais que dire de vos mesures sinon, qu'à l'évidence, l'allongement du temps de travail de ceux qui ont un emploi aura une incidence, non seulement sur les salaires, qui seront tirés vers le bas, mais encore sur l'embauche !

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Pour une entreprise de cinquante salariés, demander trois heures supplémentaires par semaine à chaque salarié – puisque vous aimez bien les petits calculs simplistes, je vais en faire un – revient à supprimer quatre possibilités d'embauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Vous ne pouvez donc affirmer que votre mesure sera favorable à l'emploi, c'est une hérésie tant sur le plan arithmétique que sur le plan économique. En effet, rien ne permet de dire aujourd'hui que vos mesures auront un quelconque effet sur la croissance, condition sine qua non de résorption du chômage. C'est l'avis de la plupart des économistes, y compris parmi les plus libéraux, qui sont très proches de vous. C'est aussi évidemment le nôtre, nous qui ne croyons pas que les politiques d'exonération fiscale que vous multipliez depuis des années, sans vous soucier un seul instant de leur efficacité ni de leur impact social, puissent avoir d'autre effet que de priver l'État des marges de manoeuvre utiles à la relance effective de notre économie, ce que la Cour des comptes a rappelé à plusieurs reprises dans des rapports assez savoureux.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Était-ce vraiment la défense d'un amendement ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour défendre l'amendement no 234 .

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Cet amendement tend à la suppression de l'article 1er. Il y plusieurs raisons à cela mais, pour ne pas abuser de l'attention de la majorité, je n'en retiendrai que quelques-unes qui me paraissent suffisantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

La première, c'est que nous avons le plus grand doute quant à l'impact concret de ce dispositif sur le pouvoir d'achat des Français. J'observe d'ailleurs que la ministre et le Gouvernement n'ont pas répondu à cette question. Étant donné leur coût élevé, la moindre des choses serait de nous dire – il y a toujours à Bercy des outils suffisamment acérés pour nous apporter des réponses – quel est l'effet attendu sur le pouvoir d'achat des exonérations fiscales et sociales prévues à l'article 1er.

La seconde raison, c'est que nous n'avons toujours pas de réponse sur la manière dont ces exonérations, notamment sociales, vont pouvoir être compensées et remboursées à la protection sociale. J'espère que Mme Lagarde pourra nous donner toutes les informations nécessaires. Comment voter en faveur d'un dispositif aussi coûteux – sinon par un acte de foi que nous vous laissons partager, chers collègues de la majorité, mais auquel nous ne sommes pas forcés d'adhérer – sans savoir, compte tenu de l'état de nos finances sociales, comment ces exonérations seront compensées ?

Enfin, nous n'avons pas non plus obtenu de réponse sur les conséquences que ce texte aura éventuellement pour les salariés qui bénéficient de la PPE ou qui, en raison de l'intégration de ces rémunérations supplémentaires dans leur revenu fiscal de référence, risquent de perdre d'autres avantages, tels que des exonérations ou des réductions de taxe d'habitation. On nous a donné des indications sur la situation du salarié gagnant 1,2 SMIC, mais qu'en est-il de celui que le dispositif privera du bénéfice de la PPE ? Bien qu'il travaille plus, il subira une diminution de sa rémunération et une réduction des droits qui y sont attachés. C'est un des paradoxes de votre texte.

Nous aimerions obtenir des réponses sur l'ensemble de ces points, car ils conditionnent manifestement l'efficacité de ces dispositions. Nous ne sommes pas d'accord sur les fondements de votre politique, mais nous aimerions au moins avoir des explications. Sinon, je serai forcé d'en conclure que, pour le Gouvernement, plus il y a de flou, plus on rit ! (Sourires.) Pour notre part, nous n'avons pas forcément envie de rire des dispositions que vous proposez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Madame Billard, l'amendement n° 432 est-il défendu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je vais le défendre, monsieur le président, car nous sommes là au coeur de la première partie du texte.

Cette loi, nous dit-on, serait absolument nécessaire, car les Français seraient des fainéants qui ne voudraient pas travailler. Pourtant, selon les chiffres du Bureau des statistiques du travail, en 2005, un Français a produit en moyenne 71 900 dollars de richesse, un Américain 81 000 – donc un petit peu plus –, un Anglais 64 100, un Allemand 59 100 et un Japonais 56 300. Le moins que l'on puisse dire est que les Français sont parmi les mieux classés. Par ailleurs, selon Eurostat, au troisième trimestre 2006, un salarié français travaillait en moyenne 36,4 heures par semaine contre 36,1 heures en moyenne dans l'Union à quinze. Les chiffres ne vont donc pas tous dans le sens que vous souhaitez.

Je salue Mme la ministre de l'économie, qui vient de nous rejoindre. Devant la commission, vous nous avez dit, madame la ministre, que ce texte ne nécessitait pas d'étude d'impact, l'expression du suffrage universel en tenant lieu. Une telle étude serait pourtant utile. En effet, si l'on envisage aujourd'hui d'expérimenter le RSA – auquel sont consacrés les articles 8 à 11 du projet –, c'est bien parce que les lois précédentes ont créé des usines à gaz telles que les gens au RMI rencontrent beaucoup de difficultés lorsqu'ils veulent reprendre le travail. Il serait tout de même absurde de commettre, à propos des heures supplémentaires, les mêmes erreurs que celles que les gouvernements UMP ont commises au cours des cinq dernières années.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Non, de 2002 à 2007, c'est vous qui déteniez la majorité.

J'insisterai sur deux points. Tout d'abord, rien ne prouve que l'augmentation des heures supplémentaires travaillées par salarié accroîtra la productivité d'une entreprise. Au-delà d'un certain seuil, on obtient même généralement l'effet contraire : la productivité par heure travaillée baisse, quel que soit le type d'activité.

S'agissant ensuite des créations d'emplois, il est bien évident qu'une entreprise qui aura la possibilité d'augmenter les heures supplémentaires à moindre coût, et donc de faire travailler des salariés en poste et déjà formés, n'embauchera pas des intérimaires ou des salariés en CDD.

Enfin, en ce qui concerne l'aspect sanitaire de ces mesures, je rappelle que l'on a constaté, ces derniers mois, une augmentation du nombre des suicides en entreprise. Beaucoup de salariés, pris entre le marteau et l'enclume, c'est-à-dire entre l'entreprise et les clients, ne parviennent plus à répondre à la pression de la première ni aux demandes des seconds et en arrivent à se suicider. Si, comme cela est écrit dans le rapport, vous comptez augmenter le nombre des heures de travail autorisées jusqu'à 48 heures hebdomadaires, il est à craindre que le nombre des suicides au travail augmente.

Quant au nombre des arrêts-maladie, dont les rapports nous apprennent qu'ils sont repartis à la hausse, il est à craindre qu'il ne continue d'augmenter car, à vouloir tirer toujours plus sur la corde, on en arrive à ce que les salariés ne tiennent plus le coup physiquement, tombent malades et creusent ainsi un peu plus le déficit de la sécurité sociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

C'est la réalité du monde du travail qui, en effet, n'est pas forcément celle du monde de la finance ! Le projet de loi s'intitule « Travail, emploi »,…

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

… c'est donc bien du travail qu'il s'agit. Les conséquences de l'article 1er ne se limiteront pas à la fiscalité, elles influeront sur la vie au travail de millions de salariés de ce pays. C'est pourquoi nous demandons la suppression de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est àM. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement n° 399 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame la ministre, nous sommes heureux de vous revoir et nous vous adressons nos salutations vespérales.

Le conformisme de la pensée de nos collègues de l'UMP est frappant. Si nous ne faisons pas comme les autres, si nous ne suivons pas les pires exemples étrangers, nous ne sommes pas au niveau. M. Dord a indiqué tout à l'heure qu'aucun autre pays n'avait mis en place les 35 heures comme nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucien Degauchy

Eh oui, monsieur Brard, il faut faire votre révolution culturelle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Est-ce à dire que c'est nous qui avons eu tort ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Avions-nous tort le 14 juillet 1789 ? Avions-nous tort, à Valmy, le 20 septembre 1792 ? (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Nul doute que vous auriez été du côté des coalisés, avec les Coblençards !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Marsaudon

À l'époque, il n'y avait pas de communistes !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le général de Gaulle avait-il tort le 18 juin 1940 ? Pourtant, il était seul. Le mimétisme n'est pas une politique. Plus près de nous, avons-nous eu tort de refuser d'aller en Irak ? Nous avions raison, bien sûr, et pourtant nous étions seuls.

Vous avez la mentalité soumise des esclaves du libéralisme intégral. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Vous vous soumettez à la loi d'airain de l'exploitation (Exclamations sur les mêmes bancs), laquelle a aujourd'hui pour nom les actionnaires – encore que vous n'accordiez pas la même confiance à tous, madame la ministre, préférant le cénacle restreint des conseils d'administration à l'assemblée générale, qui a déjà un parfum de démocratie et empêche d'arranger ses petits comptes.

Comprenez donc, mes chers collègues, que la France peut toujours rayonner et que nous ne la laisserons pas mettre sous l'éteignoir, comme vous voulez le faire en pratiquant, comme les autres, l'ultralibéralisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Nous sommes contre l'article 1er, qui opposera les salariés les uns aux autres, qui privera les régimes sociaux, non pas de charges mais de cotisations sociales : c'est un salaire indirect. Vous allez aussi, madame la ministre, priver votre ministère des ressources tirées de l'impôt sur le revenu.

Vous prônez de nouveau l'allégement des charges, madame Lagarde, alors que Philippe Séguin a dit tout à l'heure devant la commission des finances – MM. Carrez et Migaud étaient présents – que la Cour des comptes ne pouvait pas savoir si de telles exonérations étaient utiles ou non, la preuve n'en étant pas établie. Vous agissez donc uniquement par idéologie,…

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. C'est un expert qui parle !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… celle de votre classe ou plutôt de ceux pour qui vous roulez, car si vous n'êtes pas tous nés avec une cuillère d'or dans la bouche, vous défendez tous les intérêts de Forgeard, Lagardère, Bouygues et consorts. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, je terminerai par un scoop. Tout à l'heure, madame Lagarde, quand vous n'étiez pas là, je me suis plaint qu'ignorant les règles de notre assemblée, vous n'ayez pas répondu aux orateurs de l'opposition, sauf à Didier Migaud, à qui vous avez rappelé que, s'il était président de la commission des finances, c'était par la grâce du Président de la République et de la majorité…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… et qu'il ne devait donc pas exagérer en demandant des réponses complémentaires. Eh bien, mes chers collègues, je vais vous faire une révélation : c'est par discrétion que Mme Lagarde ne nous a pas répondu. En effet, son service de presse a diffusé les réponses qu'elle ne nous a pas faites. Je vais donc lire votre texte, madame la ministre, intitulé « Réponse à M. Brard s'il intervient. » Il me semblait pourtant être intervenu suffisamment pour mériter une réponse ! (Rires.)

Je vous cite, madame Lagarde : « Je me permets, monsieur Brard, de réitérer mes propos » – vous aggravez votre cas (Sourires). « Vous pensez trop. L'étendue de votre culture, l'impertinence de vos références nous l'ont d'ailleurs confirmé. Vous pensez trop et cela nuit à votre sens pratique (Rires et applaudissements sur divers bancs),…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… car celui-ci vous aurait immanquablement conduit à la conclusion que plus d'argent pour les travailleurs, c'est mieux que moins d'argent. Et puis, à force de penser, vous perdez le sens de la géographie. Vous me traitez d'Américaine, puis d'Autrichienne.» Je n'ai pas dit que vous étiez autrichienne, mais que vous m'évoquiez davantage Marie-Antoinette que la reine Christine. (Rires sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen.) « Je me permets, poursuivez-vous, de vous rappeler, monsieur Brard, que je suis avant tout française. »

Madame la ministre, mon sens pratique, je l'ai acquis – et ce sont mes deux fiertés – non seulement parce que je suis fils d'ouvrier et instituteur de la République (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire)…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

… mais aussi parce que je suis élu du suffrage universel, au service de mes concitoyens de Montreuil, dont je suis le maire. J'ai certainement plus de sens pratique que vous qui étiez à la tête d'un cabinet d'affaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission des finances a rejeté ces amendements de suppression. Je saisis cette occasion pour vous rappeler très rapidement la position de la majorité sur l'article 1er, que de nombreux orateurs de l'opposition ont critiqué au plan économique et au plan politique.

Au plan économique, je développerai quelques arguments, en évitant les effets de manche et les polémiques stériles.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Si une chose est sûre aujourd'hui – et je vous renvoie, monsieur Brard, au rapport de la Cour des comptes de l'an dernier –, c'est bien que la réduction du coût du travail que nous avons engagée depuis 1993 a été la plus efficace des politiques visant à améliorer l'emploi et à réduire le chômage. C'est un fait avéré. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La meilleure preuve, monsieur Emmanuelli, c'est que cette politique a été poursuivie entre 1997 et 2002.

En revanche, la politique de réduction autoritaire du temps de travail a été décevante.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Les études – Pierre-Alain Muet les a citées ce matin – convergent pour évaluer le nombre des créations d'emplois permises par la réduction autoritaire du temps de travail entre 200 000 et 300 000. Je vous invite à comparer ces chiffres aux millions d'emplois – et je me réfère à nouveau au rapport de la Cour des comptes – qui ont été créés grâce à la réduction du coût du travail.

Cette réduction autoritaire du temps de travail a un effet dramatique sur nos finances publiques, puisqu'elle se traduit aujourd'hui par un coût de compensation de 11 milliards d'euros. Nous serions engagés depuis longtemps dans un processus de diminution de la dette si nous n'avions pas hérité de ce fardeau ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

N'ayez pas honte de l'admettre ! Cela prouve au moins que vous avez des idées !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…et je sais reconnaître, lorsqu'il existe, le côté positif de toute chose. Ainsi, il est exact que l'aménagement des cycles de travail, les accords de modulation et l'annualisation du temps de travail auxquels ont abouti les lois Aubry, ont eu pour effet de procurer une certaine flexibilité, en particulier aux grandes entreprises,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…permettant à celles-ci de mieux s'adapter aux cycles de production.

Cela étant, ouvrons un peu les yeux pour regarder autour de nous…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…c'est-à-dire dans les autres pays. Pour répondre à ce que disait ce matin Pierre-Alain Muet, je rappelle que la France est aujourd'hui le pays développé où le temps de travail pour les actifs occupés est l'un des plus faibles : moins de 1 550 heures, par rapport à une moyenne européenne qui se situe à plus de 1 600 – sans parler des pays extérieurs à l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Or, toutes les études économiques s'accordent sur ce point : plus le temps de travail par actif occupé est important, plus le taux de chômage est faible. À cet égard, la France souffre d'un très grave handicap.

Debut de section - PermalienPhoto de Lucien Degauchy

Il n'y a que les socialistes pour prétendre le contraire !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet économiste reconnu qu'est Pierre-Alain Muet s'est ainsi trouvé dans l'obligation, pour appuyer sa thèse, d'aller chercher le contre-exemple de la Norvège, dont chacun sait qu'en réalité, elle ne doit sa situation qu'à la rente pétrolière dont elle bénéficie. Si vous voulez un exemple, il faudra le chercher ailleurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

La première étape de notre démarche a consisté à examiner les effets sur le plan économique de l'exonération des heures supplémentaires. Cette mesure présente essentiellement deux avantages. D'une part, elle doit avoir pour effet d'améliorer la croissance : il s'agit de la mesure la plus solide dont nous disposions pour nous permettre de gagner dans les prochains mois un demi-point ou un point de croissance supplémentaire. D'autre part, elle va substantiellement améliorer le pouvoir d'achat des Français. Je le disais hier : l'heure supplémentaire, du seul fait de l'exonération de charges sociales acquittées par le salarié – CSG comprise – sera majorée de près d'un quart. Si l'on y ajoute la majoration légale s'appliquant à chaque heure supplémentaire effectuée, on peut atteindre une augmentation de 60 % du pouvoir d'achat.

La deuxième étape, qui se situait sur le plan politique, a consisté à annoncer notre intention de mettre en oeuvre cette mesure. Celle-ci a fait partie du programme de notre candidat à l'élection présidentielle, où elle a même pris valeur de symbole en illustrant la nécessité absolue de revaloriser le travail. Aujourd'hui, vous nous reprochez de tenir nos engagements. « Il est vrai », nous disait ce matin Jérôme Cahuzac, « que vous avez annoncé cette mesure, mais elle est tellement mauvaise que vous devez renoncer à votre engagement de la mettre en oeuvre. » (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Que dire alors de votre candidate à l'élection présidentielle qui, après avoir soutenu qu'il fallait porter le SMIC à 1 500 euros,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…a condamné cette mesure une fois la campagne terminée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.– Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

Telle n'est pas notre conception de la politique, mes chers collègues de l'opposition ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et de la Gauche démocrate et républicaine.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nous avons clairement indiqué aux Français quelles étaient les mesures que nous estimions devoir être prises dans l'intérêt de notre pays, et ils ont approuvé ces mesures. Nous mettrons donc un point d'honneur à respecter nos engagements. Ce n'est qu'à cette condition que nous garderons notre crédibilité (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je me réjouis d'être de retour parmi vous, après m'être entretenu un peu plus longtemps que prévu avec M. le ministre des comptes de la nation, qui insistait sur la nécessaire rigueur budgétaire que nous devons nous imposer pour l'exercice de 2008.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Notre projet de loi est, comme vient de le dire M. le rapporteur général, un projet fondateur et emblématique, qui vise à réhabiliter le travail en le replaçant au coeur de notre économie et de la vie des Français. Or les différents amendements proposés par l'opposition visent à supprimer l'article 1er, qui contient justement toutes les dispositions fondamentales permettant de recourir plus facilement et de manière plus incitative, pour le salarié comme pour l'employeur, aux heures supplémentaires. Vous ne serez évidemment pas surpris que je demande le retrait de ces amendements ou, à défaut, leur rejet.

Par ailleurs, je veux vous apporter quelques éléments de réponse sur des points particuliers que vous avez évoqués. J'attire en particulier votre attention sur l'exposé des motifs qui précède le projet de loi.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Certes, mais sa lecture n'en est pas moins instructive. Pour ce qui est du financement, il est indiqué à la page 5 qu'en application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale – également connu sous le nom de loi Veil de 1994 – « l'État compensera les exonérations de cotisations de sécurité sociale aux régimes concernés ».

En second lieu, vous avez demandé si des études d'impact avaient été effectuées. Il est évident qu'en l'occurrence, il est très difficile de procéder à une étude d'impact, tout simplement parce que nous ignorons dans quelle mesure les employeurs auront ou non recours aux heures supplémentaires. Il appartiendra en effet aux employeurs, qui fournissent le travail, de déterminer la quantité d'heures supplémentaires nécessaires, l'État n'ayant pas vocation à fixer un plancher ou un plafond en la matière. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Ce ne sont donc pas les salariés qui choisiront ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Nous avons néanmoins procédé à un chiffrage, basé sur le nombre d'heures supplémentaires actuellement effectuées. Le stock en année courante s'élève aujourd'hui à environ 900 millions d'heures supplémentaires ; à ce stock – dont on peut imaginer qu'il va subsister –, il convient d'appliquer, comme l'a indiqué M. le rapporteur général, le plafond de 23 % correspondant à la moyenne des charges sociales des salariés, puisque l'on opère une déduction des cotisations sociales. Il faut également y ajouter les 11 % d'imposition moyenne sur le revenu des personnes physiques s'appliquant aux sommes ayant la nature de salaires. Il y a enfin, pour les sociétés de vingt salariés au plus, un complément correspondant à la majoration de 15 % des heures supplémentaires, puisque nous anticipons sur le texte qui prévoit une majoration de 25 % pour toutes les sociétés à partir du 1er janvier 2009.

En l'état actuel de l'activité économique, il est impossible de dire si les employeurs vont recourir à 10, 15, ou 20 % d'heures supplémentaires. En tout état de cause, nous espérons que cette disposition nous permettra d'obtenir le point de croissance dont nous avons besoin afin d'être en mesure de soutenir la concurrence avec les autres pays, dans un monde ouvert où circulent les marchandises, les individus et les capitaux.

Permettez-moi de souligner au passage que, lors de la réunion de Bruxelles, que vous avez évoquée à plusieurs reprises, nous avons eu le plaisir de voir les représentants des gouvernements socialistes – notamment les gouvernements espagnol, britannique et italien – applaudir avec enthousiasme les mesures que nous nous proposons de mettre en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire – Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Le dernier élément sur lequel je veux attirer votre attention, et qui figure également dans l'exposé des motifs, est l'engagement pris par le Gouvernement de fournir au Parlement un rapport d'évaluation des effets de l'application de cette mesure à l'issue d'un délai de dix-huit mois – délai qui nous paraît être le minimum pour en apprécier l'efficacité.

Il s'agit, je le répète, d'une mesure emblématique placée au coeur de notre projet et destinée non seulement à provoquer un choc afin de réveiller la confiance, mais également à modifier l'attitude de chacun vis-à-vis du travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Henri Emmanuelli.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

J'observe que le ton est monté cet après-midi et que vous ne cessez, chers collègues de la majorité, de vous auto-congratuler. Je vous encourage à continuer tant que la saison y est propice. Toutefois, je ne peux vous laisser dire n'importe quoi, monsieur le rapporteur général. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) À vous entendre, les 35 heures seraient à l'origine du chômage et de la dégradation des finances publiques. (« Oui ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Dans ce cas, qu'attendez-vous, alors que vous êtes au pouvoir, non pas depuis deux mois, ni depuis un an, mais depuis cinq ans, pour supprimer les 35 heures ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.) Vous seriez bien en peine de répondre à cette question car en réalité, non seulement vous ne supprimez pas les 35 heures, mais vous êtes en train de les généraliser : le dispositif que vous proposez aura pour effet que toutes les entreprises qui n'appliquaient pas jusqu'à présent les 35 heures vont désormais avoir intérêt à le faire.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Lesquelles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Les PME, les entreprises de moins de vingt salariés, évidemment, qui vont avoir un intérêt financier à passer aux 35 heures pour pouvoir bénéficier du dispositif prévu par l'article 1er.

Quant aux chiffres du chômage, je vous rappelle, monsieur le rapporteur général, qu'alors que la législature 1997-2002 avait vu la création de 1,5 million d'emplois dans ce pays…

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

…la législature suivante n'en a pas vu le tiers ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Comment les 35 heures pourraient-elles hypothéquer la productivité de ce pays alors que, l'an passé, les entreprises du CAC 40 ont battu tous les records de bénéfices ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Myard

Cela n'a rien à voir ! Les 35 heures sont à l'origine des délocalisations !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Comment les 35 heures pourraient-elles être nuisibles au pouvoir d'achat, alors qu'elles favorisent la réalisation de bénéfices ? C'est impossible, et vous le savez parfaitement. Vous ne vous livrez pas à une démonstration économique, ni arithmétique, mais bien plutôt à une sorte de catéchisme libéral que vous rabâchez inlassablement dans l'espoir de nous le faire entrer dans le crâne, alors qu'il ne correspond en rien à la réalité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.) Vous qui êtes rapporteur général pour la sixième année, monsieur Carrez, pouvez-vous nous dire à combien s'élevait la dette publique en mai ? À 65 % du PIB ! J'ai bien du mal à croire, madame Lagarde, que l'exposé de la position de la France sur ce point vous ait valu des applaudissements de la part des ministres des finances de l'Eurogroupe. Ne s'agissait-il pas plutôt de quelques remarques acerbes, comme je l'ai entendu dire ?

Si je comprends bien, monsieur le rapporteur général, ce sont les 35 heures qui ont entraîné une dégradation de nos finances publiques et un accroissement de la dette à hauteur de 65 % du PIB. Qu'à cela ne tienne, vous allez encore y ajouter 13 milliards d'euros de charges sans aucun financement, si ce n'est le vague espoir d'un regain de croissance. Pourtant, nous le savons tous, la croissance ne se décrète pas. On ne peut même pas l'espérer, mais tout au plus créer les conditions de nature à la favoriser, tout en sachant qu'elle dépend avant tout d'un contexte que l'on ne maîtrise pas totalement. Cessez donc de prendre les députés pour des Béotiens : vous ne pouvez sérieusement prétendre disposer de garanties d'amélioration de la croissance. Ce serait même plutôt le contraire si l'on considère que certains signaux, notamment celui de la consommation intérieure, qui représente 70 % de la croissance, ne sont pas très favorables : vous conviendrez que la diminution de 0,8 % constatée en mai dernier n'est guère encourageante !

Debut de section - PermalienPhoto de Lucien Degauchy

C'est la faute de Ségolène, elle a fait peur aux Français !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Après avoir usé et abusé pendant cinq ans de l'argument des 35 heures, vous n'espérez tout de même pas vous en resservir durant les cinq années qui viennent, monsieur le rapporteur général !

Enfin, si comme vous vous en vantez, vous vouliez vraiment revaloriser le pouvoir d'achat, vous auriez donné un coup de pouce au SMIC le 1er juillet. Mais vous vous êtes bien gardés de saisir cette occasion extraordinaire d'agir en ce sens. Avez-vous décidé d'augmenter la prime pour l'emploi ? Pas davantage ! Et vous ne ferez rien en ce domaine car, en vérité, votre politique vise, non pas à améliorer le pouvoir d'achat des salariés, mais à faire passer le bénéfice global de 96 milliards d'euros à un peu plus de 100. Vous êtes au service des actionnaires et pas des salariés. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) La comédie a des limites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

M. Carrez a essayé de montrer dans son rapport que plus un pays travaillait, plus la durée de travail de ses salariés était importante, plus le chômage était bas. J'ai cité ce matin le cas de la Norvège et des Pays-Bas, m'inspirant du graphique qui figure à la page 51 de son rapport et qui reprend le nombre moyen d'heures travaillées dans l'année par chaque actif occupé dans les pays de l'OCDE. Il apparaît en effet que c'est en Norvège et aux Pays-Bas que la durée de travail est la plus faible. Or ces deux pays, en réduisant considérablement le temps de travail par la négociation sur une quinzaine d'années, sont arrivés au plein emploi. Le taux de chômage y est inférieur à 5 % depuis dix ans environ.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Le graphique désigne aussi les trois pays où la durée du travail est la plus longue : la Grèce, la République tchèque et la Pologne. Monsieur Carrez, chers collègues, consultez donc les statistiques, vous constaterez que la Grèce a connu et connaît encore le plus fort taux de chômage de l'Europe de l'Ouest, la Pologne subit un sort identique en Europe de l'Est – près de 20 % pendant cinq ans –, et la République tchèque est dans la même situation.

Monsieur le rapporteur général, les comparaisons internationales montrent que les pays qui connaissent le plein emploi sont précisément ceux qui ont réduit la durée du travail. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Les chiffres sont là, mes chers collègues.

S'agissant de la France, de 1997 à 2002, période pendant laquelle notre pays a réduit la durée individuelle du travail, deux millions d'emplois ont été créés.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Je rappelle qu'en un siècle, il n'en avait créé que cinq millions et qu'au cours des cinq dernières années, nous n'avons assisté qu'à la création de 250 000 emplois. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Vous ne cessez de répéter qu'il faut individuellement travailler plus pour gagner plus. Mais si vous reprenez le raisonnement à l'échelle du nombre total d'heures travaillées en France sur un siècle, vous serez surpris par le résultat. Il apparaît, ce nombre ayant certes été divisé par deux sur cent ans, que c'est uniquement au cours de la période Jospin que le nombre d'heures travaillées a augmenté et ce, de près de 10 %. L'explication est simple : la durée du travail individuelle a baissé mais, compte tenu de la création des deux millions d'emplois ainsi favorisée, l'ensemble des heures travaillées en France a augmenté. C'est la seule période où notre pays a travaillé plus pour gagner plus, et ces gains sont allés à ceux qui en avaient le plus besoin, les chômeurs et les jeunes entrant sur le marché du travail. C'est au cours de ces seules années que le chômage des jeunes a également baissé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Alain Muet

Enfin, je rappellerai que, sur trente ans, c'est encore pendant cette période que le déficit public a été considérablement réduit, passant de 3,5 % à 1,5 %, et que la dette publique a baissé en pourcentage de la richesse nationale. Cette période, c'est celle des cinq années Jospin ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Je vous invite à méditer sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous allons passer au vote.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Montebourg

Une fois n'est pas coutume, la ministre et le rapporteur sont entrés un peu plus avant dans le débat. Mais lorsque les députés de l'opposition et certains membres de la majorité demandent des précisions sur l'étude d'impact d'une mesure qui va coûter quelque 6 à 7 milliards d'euros si le nombre d'heures supplémentaires exonérées n'augmente pas, le Gouvernement nous répond qu'il ne peut rien dire.

Lorsque nous demandons à Mme la ministre d'intervenir dans le débat, et nous avons été nombreux à le faire et à de nombreuses reprises, elle se borne à lire l'exposé des motifs du projet de loi et à évoquer les applaudissements de supposés gouvernements socialistes européens à Bruxelles à l'énoncé de la mesure. Nous savons tous pourtant qu'aucun gouvernement européen n'a eu la folie d'affecter 6 milliards au subventionnement du chômage, puisque c'est bien de cela qu'il s'agit ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Enfin, en mal d'arguments, le Gouvernement et la commission invoquent le résultat des urnes. Certes, les Français ont élu une équipe. Mais cela ne signifie pas qu'ils ont approuvé toutes les dispositions que cette équipe met en oeuvre. Sinon, nous pourrions fermer derechef le Parlement. Madame la ministre, s'il n'est plus question de discuter des mesures proposées par le candidat avant son élection, vous pouvez nous renvoyer dans nos chaumières.

Debut de section - PermalienPhoto de Denis Jacquat

Monsieur le président, ce n'est pas un rappel au règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Montebourg

Vous avez cité Pierre-Alain Muet. L'Assemblée nationale s'honore en effet d'avoir dans ses rangs un élu du Rhône qui est aussi un économiste renommé. Son autorité intellectuelle va bien au-delà de cet hémicycle. Il a repris ce matin un certain nombre de déclarations et notamment celles de deux membres du Conseil d'analyse économique, qui est un des outils de l'expertise du Gouvernement. Il s'agit de M. Cahuc et de M. Artus. Madame Lagarde, que répondez-vous à M. Artus qui a considéré que votre mesure était incertaine sur l'emploi et le revenu global et aurait un coût exorbitant pour les finances publiques ?

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Montebourg

Que répondez-vous lorsque nous citons M. Tavernier, ancien directeur adjoint du Trésor et actuel directeur de cabinet de M. Woerth, ministre des comptes de la nation, qui a déclaré alors qu'il était consulté par le Président de la République, que cette mesure était inopportune ?

Madame la ministre, des personnalités appartenant au cercle de l'expertise de la décision gouvernementale sont contre votre mesure, tout comme des députés de l'opposition, qui avancent des arguments précis, ou des députés de la majorité, qui doutent ouvertement et publiquement du bien-fondé de cette disposition. Nous souhaitons donc savoir ce que vous avez à répondre à MM. Cahuc, Artus, Muet, Tavernier, Méhaignerie, Courson. Nous attendons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous allons donc passer au vote sur les amendements de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande également la parole pour un rappel au règlement ! (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Après le vote, monsieur Brard !

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 122 , 234 , 399 et 432 .

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le président, il est d'usage qu'un orateur réponde à la commission, et un autre au Gouvernement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Il en a été ainsi. J'ai même autorisé un rappel au règlement qui s'apparentait indiscutablement à une réponse au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'était une décision unilatérale qui ne prenait pas en compte le pluralisme existant.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

J'avais compensé par avance en vous laissant vous exprimer plus de cinq minutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je fermerai ici la parenthèse.

Si j'avais l'âme badine, madame la ministre, je dirais que la période 1997-2002 n'a pas dû être si mauvaise que cela puisque le Président de la République envoie M. Strauss-Kahn au FMI. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Pour en revenir au sujet, je rappellerai que quelque 1,5 million d'emplois ont été créés de 1997 à 2002 grâce précisément aux 35 heures et aux emplois-jeunes, et que le pouvoir d'achat avait augmenté. Vous, en revanche, vous avez créé 300 000 RMIstes.

Madame la ministre, vous n'êtes pas Bernadette Soubirous. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il ne suffit pas d'invoquer la croissance pour la faire apparaître !

Monsieur Carrez, vous connaissant de plus près dans d'autres lieux, j'ai été surpris par vos propos. D'habitude, vous n'affirmez que des choses que vous êtes en mesure de démontrer. Il est vrai que vous n'avez pas toute votre liberté dans vos fonctions actuelles… (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) « Nous savons que la mesure que nous proposons est bonne », avez-vous déclaré. Le Premier président de la Cour des comptes vient pourtant de nous dire qu'il n'en savait rien. Vous êtes donc plus fort que la Cour des comptes !

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Ce n'est pas un rappel au règlement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Le problème est dans le financement, madame Lagarde : il y aura moins de ressources fiscales et moins de ressources sociales. Vous nous dites que l'État compensera, mais ce n'est inscrit nulle part !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Vous aurez l'occasion d'y revenir dans la discussion des amendements suivants, monsieur Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame la ministre, messieurs les secrétaires d'État, il faut vous expliquer sur les vases communicants puisque ce que vous donnez aux uns, vous le prenez aux autres. Et puisque je vois que vous avez besoin d'être convaincus et de retrouver votre sérénité, je demande une suspension de séance d'une demi-heure.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Nous avons engagé la discussion des amendements, monsieur Brard !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Certes. Mais la suspension de séance est de droit, monsieur le président.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

En effet. Elle interviendra après l'examen des deux amendements en discussion commune. (Protestations sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi de deux amendements, nos 168 et 236 , pouvant faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 168 est-il défendu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Oui, monsieur le président. Mais avant d'en venir à l'amendement, je veux rappeler que discuter d'un projet de loi ne revient pas à reprendre l'exposé des motifs du texte. Celui-ci, en effet, et ce quel que soit le Gouvernement, est toujours chatoyant et sympathique. Si le bon sens populaire régnait dans nos rangs – et c'est probablement le cas pour quelques-uns –, nous voterions systématiquement et à la quasi-unanimité l'exposé des motifs. Il s'agit ici de reprendre le contenu des articles, d'apprécier leur efficacité et de prévenir les effets collatéraux. Bref, d'examiner tout ce qui découle de l'adoption d'une loi. Jean-Pierre Brard est largement intervenu sur les aspects fiscaux, et il aura l'occasion d'y revenir afin que chacun soit bien éclairé. Je me permettrai, quant à moi, de revenir de manière incessante et pressante sur les aspects sociaux de ce texte, qu'il ne faut pas perdre de vue au détour d'affirmations reprises dans l'exposé des motifs. Il faut penser aux effets de ces dispositions dans le code du travail et dans la vie de l'entreprise.

L'amendement n° 168 traduit une philosophie bien différente de celle que vous affichez. Alors que la richesse financière explose et que les produits et dividendes sont plus élevés que jamais, il est inadmissible de ne s'attacher qu'aux coûts salariaux. D'ailleurs, dans tous les discours de l'exécutif, qu'il s'agisse du chef de l'État ou du chef du Gouvernement, jamais il n'est fait mention de la captation des richesses par la sphère financière. Or cette captation entraîne des choix de rentabilité financière destructeurs pour l'emploi, les services publics, l'investissement. Il n'y a qu'à voir les ravages que font, dans le CAC 40 et ailleurs, les fonds de pensions pour mesurer les dégâts que cela cause dans l'économie nationale.

Pour notre part, nous estimons qu'il convient, par une nouvelle architecture des cotisations sociales, de favoriser l'emploi et la création de richesses. C'est l'objet de cet amendement. Nous savons bien que l'on ne peut pas traiter de la même manière les PME, qui peinent, pour un certain nombre d'entre elles, à s'en sortir, et les grandes entreprises cotées au CAC 40 ou qui flirtent avec lui.

Malheureusement, toutes les dispositions que vous proposez ne font que renforcer les privilèges des dirigeants et des entreprises les plus profitables. Je ne vous ferai pas l'injure de vous rappeler l'explosion des profits des entreprises du CAC 40, passés de trente-cinq milliards en 2003 à plus de cent milliards en 2006, avec les 35 heures. Pour leurs salariés, en revanche, l'augmentation n'aura été que de 6 % ; cela a été rappelé plusieurs fois depuis hier, mais je crains fort que nous devions le répéter jusqu'à la fin de nos débats. C'est sans doute ce que vous appelez la justice.

C'est pourquoi, afin de briser cette allégeance au marchés financiers et pour permette une modulation des cotisations sociales favorables à l'emploi et aux salaires nous vous proposons d'adopter cet amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Paul Giacobbi, pour soutenir l'amendement n° 236 .

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Giacobbi

Après l'exposé de Mme Lagarde, ou plutôt son réquisitoire contre l'article 1er, qu'elle présente pourtant, je me demande s'il est bien nécessaire de plaider pour la suppression dudit article.

En effet, Mme Lagarde nous dit trois choses. Premièrement, que la mesure est expérimentale, qu'il est impossible de savoir « si elle sera efficace ou non » et que nous devrons donc attendre dix-huit mois.

Elle nous dit également que les chiffrages – on s'en était rendu compte – sont fondés sur le stock d'heures supplémentaires actuellement effectuées. Cela signifie qu'il en coûtera la bagatelle de cinq milliards d'euros rien qu'en exonérations de charges sociales, sans que les Français aient été incités à travailler une minute de plus. C'est remarquable !

Enfin, elle nous indique – et là, nous sommes sinon dans le domaine de la théologie du moins dans celui de l'espérance – que la mesure permettra de gagner un point de croissance.

Cela me rappelle M. Mer, qui nous disait, il y a cinq ans, que la baisse de l'impôt sur le revenu allait nous permettre de gagner un point de croissance. Les ministres qui lui ont succédé nous ont fait espérer ce point de croissance ; ils l'ont tous cherché, sauf M. Gaymard qui, lui, cherchait un appartement… (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour mouvement populaire.)

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Minable ! Ignoble !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Giacobbi

Voulez-vous me dire, madame la ministre, par quel mécanisme économique, par quel raisonnement et en vous fondant sur quel modèle économétrique vous arrivez à relier la mesure proposée à l'article premier et un point de croissance ? J'avoue que je ne comprends pas.

Plusieurs députés du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. Nous, nous avons compris !

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Giacobbi

Vous auriez pu citer un autre argument pour compléter votre réquisitoire : c'est tout simplement qu'il est inconstitutionnel, puisqu'il se heurte au principe d'égalité devant les charges publiques.

On m'a dit que c'était une tautologie, mais je le répète : ce n'est pas le salarié qui choisit de travailler plus, mais le chef d'entreprise qui décide pour lui. C'est important, car certains d'entre vous ne connaissent pas le fonctionnement des entreprises. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Par conséquent, le salarié qui va bénéficier volens nolens de l'heure supplémentaire et de sa détaxe ne sera pas à égalité avec celui qui voudrait bénéficier de la détaxe et travailler plus mais auquel son entreprise refuse, pour des motifs tout à fait légitimes, les heures supplémentaires.

C'est la raison pour laquelle, au titre de cet amendement, nous proposons des mesures de substitution simples, qui consistent à instaurer un abattement général de 5 % sur l'ensemble des revenus salariaux et à relever, en contrepartie, de 60 à 75 % la base imposable des dividendes.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a refusé ces deux amendements dans la mesure où ils sont beaucoup moins efficaces que l'article 1er tel qu'il est proposé, que ce soit pour l'emploi ou pour le pouvoir d'achat des Français.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical et citoyen. Prouvez-le !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Ce sont ces amendements qui vont apporter le point de croissance en plus !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

L'amendement n° 168 propose de moduler le taux de la cotisation due par les entreprises en fonction de la variation de la masse salariale rapportée à la valeur ajoutée globale de l'entreprise.

Cela me conduit à formuler deux observations. D'abord, le ratio capitaltravail va évidemment varier considérablement en fonction du secteur d'activité. Ensuite, un rapport a été réalisé l'an dernier sur la réforme de cotisations patronales de sécurité sociale et discuté au sein du Conseil d'orientation pour l'emploi – auquel participent les organisations syndicales – puis du Conseil d'analyse économique – auquel participent des économistes, même s'il ne s'agit pas nécessairement de ceux cités par M. Montebourg –, avant de faire l'objet d'une synthèse par le Conseil d'analyse stratégique. Ce rapport nous apprend que, chaque année, plus d'un quart des entreprises voient leur ratio varier de plus de dix points et que cette forte volatilité n'est que très faiblement liée à la politique d'emploi poursuivie par l'entreprise.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Vous avez raison, monsieur Emmanuelli. On peut donc en conclure que l'utilisation généralisée de ce ratio bouleverserait tout simplement la répartition du prélèvement social.

Je demande donc le rejet de ce premier amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Cela fait vingt ans que Bercy nous répond cela !

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Cela fait peut-être vingt ans, mais trois conseils d'experts différents se sont prononcés sur la question : le Conseil d'orientation sur l'emploi, le Conseil d'analyse économique et le Conseil d'analyse stratégique.

Quant à l'amendement n° 236 , que propose-t-il ? De supprimer l'article 1er, ce qui n'est aucunement mon intention, car cet article, qui a précisément pour objet de redonner au travail sa valeur cardinale, est au coeur de notre projet.

Vous proposez de lui substituer purement et simplement un abattement général de 5 % sur l'ensemble des revenus salariaux, gagé, si j'ose dire, par un relèvement de la base imposable des dividendes de 60 à 75 %. Je ne peux être favorable à cette substitution, dans la mesure où notre objectif est de réhabiliter le travail, de le remettre au coeur du projet économique, en encourageant l'emploi.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Depuis hier, vous nous rebattez les oreilles avec votre formule « réhabiliter la valeur travail ». Je vous prends au mot !

Qu'est ce que la valeur du travail ? Que vaut une heure de travail ? Pas seulement ce qui est inscrit sur la fiche de paie, mais aussi l'ensemble des produits et des services qui contribuent à l'entretien du travailleur. Jusque-là vous êtes d'accord avec moi.

Sauf qu'en réalité vous prétendez abaisser la valeur du travail à coup d'exonérations fiscales et sociales. Vous décidez en effet que tout ce qui contribue à faire en sorte qu'un travailleur soit en état de travailler – en particulier la santé et l'école – ne soit plus à la charge de celui qui utilise le travailleur mais à la charge de l'État et de la société. Vous réduisez la valeur de chaque heure travaillée en supprimant le salaire indirect, constitué par l'ensemble des services fournis par la société au travailleur en plus de sa feuille de paie.

Ces services, vous avez décidé qu'ils ne seraient plus à la charge du chef d'entreprise mais à celle des autres contribuables, via notamment la TVA. Mais qui paie proportionnellement le plus de TVA ? Les plus modestes. Vous plumez les plus pauvres pour enrichir les plus riches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.– Exclamations sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 168 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 236 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Vous maintenez votre demande ? Il me semblait que la discussion vous avait permis d'exprimer toutes vos appréhensions. Si vous souhaitez cependant faire un rappel au règlement, libre à vous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je vous remercie, monsieur le président, de me donner cette possibilité à laquelle je n'avais pas songé. (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire. – Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen.)

M. le rapporteur parlait tout à l'heure de faire de la politique autrement, notamment en affichant ses convictions et en tenant ses engagements. Précisément, Nicolas Sarkozy a promis de supprimer les parachutes dorés. Comment justifiez-vous dans ce cas qu'il en soit autrement aujourd'hui ?

Cela n'est pas en lien direct avec l'article en discussion mais avec le déroulement global de la séance, car il s'agit d'un élément d'éthique essentiel, et les turpitudes des uns ou des unes ne peuvent excuser les turpitudes des autres.

Je maintiens naturellement ma demande de suspension de séance. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Elle est de droit.

Reprise de la discussion

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est suspendue pour deux minutes.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est reprise.

Je suis saisi de l'amendement n° 272 .

La parole est à M. Michel Liebgott, pour le défendre.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

La majorité fait de l'obstruction. C'est intolérable ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Mais mon collègue Taugourdeau et moi-même sommes présents.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Allez-y, monsieur Liebgott, M. le rapporteur général a le droit de s'absenter un moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Je veux bien, monsieur le président, mais si je dois me répéter dans cinq minutes, c'est inutile. Dans un autre sens, cela fait plus d'une heure et demie que j'attends de défendre cet amendement, et les suspensions de séance ne sont même pas programmées pour nous permettre de voir l'arrivée de l'étape du Tour de France ! (Sourires.) Je vous fais cette suggestion, monsieur le président,...

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je m'efforcerai d'y penser !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Ma petite digression n'a pas suffi et M. le rapporteur général n'est toujours pas de retour. À défaut, je m'adresserai au président de la commission des finances. Excellente idée que de nommer un socialiste ! Il est ponctuel, lui. (Protestations sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) Il s'agit d'un constat, et non pas d'un jugement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Notre amendement est incontestable car le bénéfice de vos dispositions ira par définition aux salariés qui sont imposés, et non pas à ceux qui ne le sont pas. Conclusion : vous créez bel et bien une société à deux vitesses. Mais comment s'en étonner puisque vous avez fait tout à l'heure la démonstration que les doctrinaires, c'était vous ! Vous voulez que les riches s'enrichissent encore un peu plus et que les pauvres s'appauvrissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Le débat qui a opposé tout à l'heure membres de la majorité et de l'opposition a clairement montré qu'il y avait d'un côté les pragmatiques, c'est-à-dire nous, et, de l'autre, les idéologues. Nous nous bornons à constater qu'il n'est pas constitutionnel de donner à certains la possibilité de gagner plus parce qu'ils sont déjà imposés et qu'ils sont les plus riches, tandis que ceux qui ne paient pas d'impôt, par définition les plus modestes, n'ont pas cette chance. Quand bien même ils gagneraient un tout petit plus et deviendraient imposables sur le revenu, ils se verraient bientôt ponctionnés par de nouveaux impôts, en particulier par la TVA sociale.

Je profite de l'occasion pour exprimer ma stupéfaction d'avoir entendu certains prétendre que les mesures qui ont été prises entre 1997 et 2002 n'auraient pas créé d'emplois.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvia Bassot

Nous parlons de vrais emplois, pas d'emplois assistés !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Les chiffres font l'objet d'un consensus : à peu près 400 000 emplois créés par les 35 heures, sans parler des emplois jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

La différence entre ces dispositifs, c'est que les dépenses engagées alors ont généré des emplois effectifs, alors que, M. le rapporteur général et Mme la ministre l'ont dit, vous ne savez absolument pas combien vous allez dépenser – en tout cas, ce sera beaucoup – et que vous ne pouvez pas nous donner aujourd'hui ne serait-ce qu'une fourchette des heures supplémentaires qui seront effectuées. Quant aux créations d'emploi, je n'en parle même pas puisque c'est l'inverse qui va se produire. C'est dire si nous nageons dans la plus grande incertitude !

Vous pouvez redouter le pire ! Ce matin, Mme Parisot déclarait que le dispositif concernant les heures supplémentaires n'est pas favorable, ou trop peu favorable, aux entreprises de moins de vingt salariés. Je vous épargne la lecture de ses déclarations très négatives, mais elle demande au Gouvernement de faire beaucoup plus encore. Non seulement vous ne savez pas combien vont coûter les mesures engagées, mais vous ignorez aussi leur impact sur le pouvoir d'achat des plus défavorisés. D'ailleurs, certains de vos soutiens sont sceptiques – quant à nous, nous ne le sommes guère – sur le résultat de vos décisions inégalitaires et inconstitutionnelles, qui font d'ailleurs contre elles l'unanimité des syndicats.

Vous pouvez bien continuer vos débats doctrinaux, je constate quant à moi que le passage aux 35 heures a en outre amélioré la productivité et la flexibilité. Aujourd'hui, vos propositions creusent les inégalités entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas. On aurait pu imaginer de relancer la demande, laquelle aurait stimulé la création d'emplois, l'augmentation de la consommation entraînant également celle des cotisations sociales versées. Nous n'allons pas dans cette direction, je le regrette. Plus inquiétant, la constitutionnalité du dispositif n'est pas établie.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 272 ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je voudrais obtenir quelques précisions, faute d'avoir reçu une réponse satisfaisante à notre question, sur les conséquences fiscales pour le salarié qui fera des heures supplémentaires, de l'intégration dans son revenu de telles rémunérations. Ne risque-t-il pas de perdre le bénéfice soit de la prime pour l'emploi s'il touche environ 1,4 SMIC, soit de la réduction, voire de l'exonération, de taxes locales ? Le Gouvernement n'a envisagé tout à l'heure que le cas d'un salarié qui gagne 1,2 SMIC, c'est-à-dire moins que le plafond d'éligibilité à la PPE. Il serait plus judicieux de faire le calcul pour un revenu qui se situe entre 1,2 et 1,4 fois le SMIC, pour mesurer précisément l'impact.

L'amendement que nous avions déposé en commission est tombé sous le coup de l'article 40, ce qui signifie ipso facto qu'il aurait créé une charge supplémentaire pour l'État. Autrement dit, le salarié, s'il ne peut pas bénéficier d'une non-imputation, sera pénalisé. Le Gouvernement peut-il apporter des précisions sur les effets pervers de son dispositif ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur Gorce, il n'y aura aucun changement par rapport à la situation actuelle. Aujourd'hui, les heures supplémentaires sont prises en compte dans le calcul pour entrer dans le dispositif de la prime pour l'emploi ou, à l'inverse, pour en sortir. Que les heures supplémentaires soient exonérées de charges sociales ou d'impôt sur le revenu ne joue absolument pas.

Prenons le cas d'un salarié à temps partiel qui fait des heures complémentaires. Pour percevoir la PPE, il faut gagner au moins un tiers de SMIC. Pour un salarié percevant 25 % du SMIC, effectuer des heures complémentaires peut le rendre éligible à la prime pour l'emploi. Que ces heures soient exonérées ne change rien au dispositif. Sous la précédente législature, et même avant, nous avons essayé, en consacrant plus de crédits à la prime pour l'emploi, de mieux la concentrer sur les travailleurs à temps partiel. Le système proposé est vraiment intéressant puisque les heures supplémentaires effectuées par un salarié lui permettront de voir sa prime pour l'emploi augmenter.

En revanche, pour un salarié célibataire au-dessus du SMIC, supposons qu'il touche 1,2 ou 1,3 SMIC, les heures supplémentaires qu'il effectue au-delà de 1,4 SMIC le feront sortir du dispositif de la prime pour l'emploi. Que lesdites heures soient exonérées, comme elles le seront demain, ou qu'elles ne le soient pas, le système est exactement le même.

Dernier exemple à propos de la taxe d'habitation. Les dégrèvements interviennent pour les revenus modestes sous un plafond, à partir de 4,3 % du revenu, lequel incorpore aujourd'hui les heures supplémentaires. Ce sera également le cas demain.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

À titre exceptionnel, je redonne la parole est à M. Gaëtan Gorce.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je suis d'accord avec le raisonnement du rapporteur général, mais il est en contradiction avec l'esprit de la loi. Celle-ci est précisément fondée sur l'idée qu'il faut détaxer en totalité le produit des heures supplémentaires, au point même que vous avez prévu un mécanisme, dont on discutera, pour les exonérer du paiement de la CSG et de la CRDS. Or, en s'en tenant à sa position, le Gouvernement va aboutir à une situation où les salariés les plus modestes bénéficieront bien d'une détaxation, mais où ils subiront de plein fouet la perte du bénéfice de la prime pour l'emploi ; ce qui est, je le répète, en contradiction avec le principe de la loi. D'ailleurs, le Gouvernement s'en est bien rendu compte et il a adopté une attitude différente dans deux autres cas. Ainsi, le bénéfice de l'exonération sera total pour les salariés dont le revenu est supérieur au plafond qui fait perdre le bénéfice de la PPE. De la même manière, le projet de loi neutralise complètement l'effet, pour les entreprises, de la majoration des heures supplémentaires sur le montant des allégements. Bref, pour les salariés qui touchent un revenu supérieur à 1,4 fois le SMIC, on a neutralisé l'effet du dispositif, mais pas pour les autres, c'est-à-dire les plus modestes. Par conséquent, ils seront pénalisés, résultat que je conteste, d'autant qu'il est en contradiction avec le principe même de la loi, dont je me fais le défenseur, apparemment mieux que la ministre et le rapporteur général. C'est un comble !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 272 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 404 .

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

L'article 1er du présent projet de loi consacre la fameuse maxime du candidat Sarkozy : « Travailler plus pour gagner plus » – bien que l'on ignore si elle s'applique aux Lagardère et autres Bouygues lorsqu'ils sont sur leurs yachts. (Sourires sur plusieurs bancs – Exclamations sur quelques bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.) En pratique, il s'agit de défiscaliser les heures supplémentaires, afin de baisser encore les charges patronales, et cela au détriment de l'emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Mais non, c'est tout bénéfice pour les salariés !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur Soisson, je ne parle pas spécialement des vignerons de Saint-Bris !

Le risque est en effet bien réel de voir, à terme, par exemple un contrat de 20 heures requalifié en contrat de 18 heures assorti de deux heures supplémentaires. Pour le salarié, le bénéfice de l'opération est nul, alors qu'elle coûtera à l'État. De même, des augmentations de salaire ou des rémunérations sous forme de primes pourraient être traduites en heures supplémentaires fictives mais exonérées.

Un autre effet pervers prévisible est que le recours aux heures supplémentaires se substitue à l'embauche, en particulier dans les secteurs où il n'y a pas pénurie de main-d'oeuvre.

Ces dangers sont dénoncés par Pierre Cahuc, Patrick Artus – tous deux membres du Conseil d'analyse économique – et André Zylberberg dans un projet de rapport portant sur « la réglementation du temps de travail et son impact sur les revenus et l'emploi » discuté au CAE le 29 mai dernier. Selon ces économistes, dont vous ne contesterez pas l'autorité, « une fiscalité spécifique sur les heures supplémentaires, quelle que soit sa forme, aurait au mieux un effet incertain sur l'emploi – ils s'expriment comme Philippe Séguin ! – et le revenu global, avec un risque de coût exorbitant pour les finances publiques qui se double d'une complexité accrue du système fiscal ». Les rapporteurs jugent donc que « ce type de fiscalité doit être évité », ajoutant : « II ne constitue pas un moyen efficace de valoriser le travail ». Que pensez-vous pouvoir répondre à ces experts cités par le quotidien Les Échos ?

Enfin, ne soyez pas naïfs : la mesure pourra aussi constituer une aubaine pour les entreprises qui préféreront recourir aux heures supplémentaires plutôt que créer des emplois. MM. Cahuc, Artus et Zylberberg soulignent d'ailleurs le risque qu'employeurs et salariés s'entendent sur un intérêt commun à « abaisser le taux de salaire des heures normales et à déclarer fictivement un grand nombre d'heures supplémentaires afin de bénéficier des avantages fiscaux ».

Afin de limiter les risques, cet amendement propose d'empêcher que des licenciements soient compensés par des heures supplémentaires. Comme vous prétendez combattre les effets d'aubaine, je ne doute pas que vous serez sensibles à un amendement dont la valeur éthique aussi bien qu'économique est incontestable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a rejeté cet amendement parce qu'il est tout simplement injuste, monsieur Brard. Prenons un exemple. Une entreprise de Montreuil perd un gros client ; de ce fait, elle est obligée de procéder à un licenciement économique. Deux ans après, elle a la chance de bénéficier de nouvelles commandes importantes. Si l'on suivait votre amendement, les salariés de cette entreprise ne pourraient pas bénéficier de la mesure d'exonération des heures supplémentaires. Ce serait injuste et, connaissant votre sens de la justice fiscale, je suis sûr que vous seriez en désaccord sur une telle disposition.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Le gouvernement émet un avis défavorable pour les mêmes raisons que celles évoquées par M. le rapporteur général. Il note au passage que les mesures de licenciement économique, en particulier lorsqu'elles sont collectives, impliquent toujours les institutions représentatives du personnel, souvent l'inspection du travail et éventuellement le juge. Dans le cadre d'une loi qui souhaite, je le rappelle, revaloriser le travail et permettre le recours aux heures supplémentaires par voie de déduction des cotisations sociales et de défiscalisation pour le salarié, et de diminution forfaitaire des cotisations patronales, il n'est évidemment pas question de traiter des dispositions relatives aux licenciements pour motifs économiques.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

M. Carrez apporte de l'eau à mon moulin en citant l'exemple fictif, mais vraisemblable, d'une entreprise qui licencie du personnel parce qu'elle perd des marchés…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Qu'elle soit de Montreuil ou du Perreux, peu importe ! Nous ne sommes pas chauvins, cher collègue ! Retrouvant donc des clients, cette entreprise embauche : voici la preuve qu'une entreprise le fait non parce qu'elle reçoit des aides, mais parce qu'elle obtient des commandes. Vous donnez donc des aides pour d'autres raisons.

Si l'on s'informe, on voit bien que l'on commence à parler d'une augmentation possible de la fameuse participation forfaitaire de 1 euro, de celle du forfait hospitalier, d'une franchise de cent euros sur les remboursements. Vous réduisez dé-li-bé-ré-ment les ressources des régimes sociaux pour justifier la destruction progressive de notre système de protection – que vous abhorrez au même titre que les 35 heures.

Il était néanmoins utile que Gilles Carrez rappelât que, si une entreprise embauche, c'est parce qu'elle a des commandes, et non pour bénéficier de primes ou de réductions de cotisations.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 404 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 34 , qui fait l'objet du sous-amendement n° 473 .

La parole est à M. Gilles Carrez, pour soutenir l'amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à monsieur le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour soutenir le sous-amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

La commission des affaires culturelles a été très attentive à ce que le dispositif proposé par l'article 1er touche bien tous les salariés et toutes les situations de travail supplémentaire. Ce sous-amendement, que je présente à titre personnel, précise que les heures supplémentaires des salariés ayant bénéficié pour raisons familiales d'une réduction de la durée de travail sous la forme d'une ou plusieurs périodes d'au moins une semaine sont elles aussi concernées.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Elle remercie M. Tian pour cet excellent sous-amendement qui complète efficacement l'amendement de la commission des finances.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement et le sous-amendement ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. François Brottes.

Debut de section - PermalienPhoto de François Brottes

J'aurais souhaité répondre à M. le rapporteur général sur l'amendement précédent et je profite de la discussion de ces dispositions rédactionnelles et techniques pour intervenir. Tout à l'heure, un exemple de licenciement économique parfaitement motivé a été donné. Or, comme je l'ai indiqué au début de nos débats, il existe aujourd'hui un contrat de travail permettant de procéder à des licenciements sans motif : le contrat nouvelles embauches, qui concerne 900 000 salariés en France.

Ceux-ci voudront certainement bénéficier des dispositions du texte de loi, mais sont actuellement dans une insécurité juridique absolue. Il serait judicieux que madame la ministre, qui n'a pas souhaité le faire en début de débat – ce qui, au demeurant, était son droit –, nous éclaire sur leur avenir et nous dise quel sort le Gouvernement réserve à ces contrats nouvelles embauches que la cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 6 juillet dernier, a estimé devoir être requalifiés en contrats à durée indéterminée.

Bien que monsieur le président de l'Assemblée nationale ait considéré que mon rappel au règlement, qui portait précisément sur la nécessité d'une clarification des contrats nouvelles embauches, n'entrait pas dans la thématique de ce débat, il me semble, monsieur le président, que nous sommes au coeur du problème : 900 000 salariés sont dans l'attente de la réponse du Gouvernement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Souhaitez-vous répondre, madame la ministre ? Et, puisque le sous-amendement n° 473 est gagé, votre approbation vaut-elle levée de gage ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

En effet, le Gouvernement lève le gage du sous-amendement n° 473 . En ce qui concerne le point évoqué par M. Brottes, il ne me paraît pas relever de la discussion sur l'article 1er et il ne m'appartient pas dans ce cadre de prendre position sur la qualification du contrat nouvelles embauches. Si deux cours d'appel, celles de Paris et de Bordeaux, ont pu se prononcer en la matière, le débat judiciaire n'est pas clos. Je ne souhaite donc pas m'exprimer sur ce sujet.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix le sous-amendement n° 473 modifié par la suppression du gage.

(Le sous-amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 34 , modifié par le sous-amendement adopté.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

En conséquence, l'amendement n° 6 tombe.

Je suis saisi d'un amendement n° 206 .

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Dans sa rédaction première, le texte de loi – dont je salue l'objectif d'augmenter le temps de travail de ceux qui le désirent – excluait du dispositif certaines catégories de salariés, notamment ceux dont le temps de travail horaire est calculé annuellement, ceux dont le temps de travail est calculé journellement à l'année, ceux à temps partiel annuel ou ceux à temps plein collectif inférieur à la durée légale. Je voudrais savoir si l'amendement qui vient d'être voté intègre ces situations particulières ou si le Gouvernement maintient ces restrictions, notamment en ce qui concerne les salariés travaillant 35 heures par semaine. L'amendement présenté souhaite garantir que, lorsque la durée de travail est fixée à la semaine, le calcul du travail sur l'année en vertu des articles 212 et 208 est bien pris en compte.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission des finances a rejeté l'amendement de M. Baguet, dont l'objet est totalement distinct de celui que nous venons d'étudier, comme elle a rejeté tous les amendements tendant à modifier la définition des heures complémentaires ou des heures supplémentaires telle qu'elle est donnée, de manière très précise, par le code du travail.

Il est apparu vraiment indispensable de ne pas toucher à ces définitions. Or, Jean-Christophe Baguet nous propose de qualifier d'heures supplémentaires des heures qui seraient effectuées dans le cadre de la modulation du temps de travail, laquelle permet, par exemple, à un salarié de travailler certaines semaines quarante-deux ou quarante-trois heures et d'autres seulement vingt-cinq ou trente, la durée annuelle de son temps de travail restant inférieure ou égale à 1 607 heures. Il ne s'agit pas là d'heures supplémentaires. Il doit être clair que les heures supplémentaires visées à l'article 1er sont les heures effectuées au-delà des 1 607 heures ou, lorsqu'il s'agit d'un cadre, des 218 jours annuels. L'article 1er, ne l'oublions pas, mes chers collègues, vise à inciter à travailler davantage : si du fait de l'adoption de cet amendement des salariés annualisés se retrouvaient en équivalent hebdomadaire à un volume horaire inférieur à 35 heures, qui reste la durée hebdomadaire légale, nous serions passés complètement à côté de l'objectif du projet de loi ! C'est pourquoi, ne souhaitant aucune modification du code du travail, nous ne comptons les heures supplémentaires que dès lors qu'elles dépassent, dans le cadre de l'annualisation, les 1 607 heures, ou les 218 jours pour les cadres. Telles sont les raisons pour lesquelles la commission a rejeté cet amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Défavorable.

Le Gouvernement, en effet, a exactement le même point de vue que la commission en ce qui concerne la définition des heures supplémentaires, qu'elles entrent dans un cadre hebdomadaire ou dans un cadre annuel, régi par des accords de modulation. Nous ne souhaitons pas, du reste, modifier la définition des heures supplémentaires à l'occasion de l'examen d'un article relatif à l'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le député, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Monsieur Baguet, retirez-vous votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Madame la ministre, je comprends vos arguments, mais sous la précédente législature, chaque fois que nous avons proposé des mesures visant à améliorer le développement des entreprises, le Gouvernement n'a pas cessé de nous renvoyer au dialogue social. Or les nombreuses entreprises de ce pays qui ont contribué au dialogue social et sont parvenues, dans ce cadre, à des solutions satisfaisantes, pour elles-mêmes comme pour les salariés, se retrouvent aujourd'hui pénalisées, ce qui est profondément injuste. Chacun sait que les rythmes de travail varient d'une entreprise à une autre et que certaines ont dû passer à l'annualisation du temps de travail afin de pouvoir étaler sur l'année la charge de production. Des accords de branche ont été signés qui vont jusqu'à permettre de travailler quarante-huit heures par semaine. Le fait est qu'il existe désormais deux catégories de salariés : ceux qui sont victimes du dialogue social et des accords de branche et les autres, qui relèvent du régime général.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

C'est vous qui avez déréglementé et mis partout ce que vous appelez de la liberté !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Il fallait bien mettre de la liberté, comme vous dites, afin de remédier aux conséquences catastrophiques des 35 heures ! Vous ne pouvez pas avoir le beurre et l'argent du beurre !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je vous demanderais, mes chers collègues, d'éviter les dialogues.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Vous avez d'autant plus raison, monsieur le président, que l'intervention de notre collègue est assez déplacée !

Madame la ministre, j'accepte de retirer mon amendement sous réserve que, d'ici le passage du texte au Sénat, vous repreniez la réflexion sur le sujet avec les partenaires sociaux en vue de trouver une solution adaptée à la situation des entreprises qui ont fait l'effort d'aller jusqu'au bout du dialogue social. Elles ne sauraient, du jour au lendemain, en être pénalisées ! Ce serait absolument contraire à l'esprit du texte qui vise à offrir le maximum de travail à tous les salariés du pays.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Monsieur le député, il est vrai que des branches, dans certains secteurs d'activité, ont négocié des accords. Chacun a pu l'observer, nous avons assisté ces deux dernières années à un regain de la négociation sociale et je voudrais rendre hommage à l'action de Gérard Larcher, qui a beaucoup oeuvré en ce sens.

Ces accords incluent généralement une disposition permettant de réviser, notamment, les dispositions relatives à la durée du travail ou de moduler leur mise en oeuvre au sein de l'entreprise, en fonction de l'activité. C'est dans un tel cadre, celui des révisions des accords de branche ou celui de leur modulation au sein des entreprises, en vertu des dispositions figurant dans l'accord, que nous devons, me semble-t-il, tenter de parvenir à une plus grande égalité. Le faire en revanche au travers d'une mesure législative ferait courir au projet de loi de grands risques. C'est la raison pour laquelle je vous encourage à aller dans ce sens.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Je vous fais confiance, madame la ministre, et compte sur la poursuite du dialogue social dans le sens de l'équité. Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

À titre exceptionnel, la parole est à M. Alain Vidalies.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Nous ne pouvons pas en rester à la position du Gouvernement du fait que, chacun le sait, ce débat est d'autant plus important qu'il aura des conséquences pratiques sur les entreprises qui ont signé des accords de modulation – je pense notamment au secteur agroalimentaire, où la durée hebdomadaire du travail varie énormément d'une semaine sur l'autre, le total annuel étant inférieur ou égal à 1 607 heures. Pour le Gouvernement, il ne s'agit pas là d'heures supplémentaires au sens du code de travail et ces salariés ne sont donc pas concernés par le texte. Le problème, c'est que, sans qu'il soit besoin de toucher au volume horaire annuel, les partenaires sociaux pourront demain se contenter de modifier l'accord en rebaptisant heures supplémentaires les heures comprises aujourd'hui dans le cadre de la modulation pour permettre à l'entreprise de bénéficier des exonérations et aux salariés des abattements fiscaux. Ainsi faute d'avoir répondu à la question posée, vous créez un effet d'aubaine que chacun peut facilement percevoir et vous fragilisez considérablement votre dispositif sans encourager la création d'emplois.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'amendement n° 206 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 465 .

La parole est à M. Gaëtan Gorce, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Cet amendement vise lui aussi à souligner une des difficultés du texte, relative, en l'occurrence, aux forfaits annuels en jours destinés aux cadres qui se verront traités de façon discriminatoire, notamment au regard des accords collectifs qui ont pu être signés.

Le forfait jours, faut-il le rappeler, a été imaginé par le législateur lors de la mise en place de la réduction du temps de travail afin de permettre aux cadres, dont le temps de travail ne peut être déterminé sur une base journalière ou hebdomadaire, de bénéficier néanmoins d'une réduction effective du temps de travail. Je tiens à rappeler qu'il s'agissait là d'une demande très forte, et toujours d'actualité, des cadres, qui ne souhaitaient pas être tenus à l'écart du bénéfice de cette réduction. Contrairement en effet à ce que j'entends souvent affirmer sur les bancs de la majorité, la réduction du temps de travail a été souhaitée par une très grande majorité des salariés et voulue par leurs organisations syndicales. La loi, d'une manière assez fine, a alors distingué trois catégories de salariés : ceux relevant du régime général fondé sur l'horaire hebdomadaire, les cadres dirigeants, qui ont été exclus du dispositif, et les autres qui peuvent relever d'un forfait hebdomadaire ou d'un forfait jours annuel dont le plafond a été fixé à 218 jours, afin de leur permettre de bénéficier de dix jours effectifs de réduction de temps de travail, le nombre légal maximum de jours ouvrables s'élevant à 228. La négociation collective a pu encore réduire ce nombre en le fixant, par exemple, à 210, 211 ou 212.

Or certains de ces salariés ne pourront pas bénéficier de l'augmentation de pouvoir d'achat dont vous entendez faire bénéficier l'ensemble des salariés puisque leur temps de travail ne permettra pas de dégager des heures supplémentaires. Ceux qui auront bénéficié d'accords collectifs abaissant le plafond des 218 jours ne pourront pas bénéficier, pour les heures qu'ils feraient au-delà du plafond fixé par l'accord collectif, de la rémunération des heures supplémentaires. Cette situation crée une discrimination à leur encontre tout en interdisant le respect des accords collectifs, puisque les mesures favorables aux salariés signées dans le cadre de ces accords ne pourront plus être respectées. L'amendement n° 465 vise donc à corriger cette discrimination. Quant à l'amendement n° 238 , qui va dans le même sens – c'est pourquoi, monsieur le président, je me permets de le défendre en même temps que l'amendement n° 465 , ce qui permettra de gagner du temps –,…

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Faites donc, monsieur Gorce.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

… il vise à faire en sorte que les accords collectifs soient respectés, ce qui est bien le moins quand on se rappelle combien, par le passé, vous nous avez reproché de ne pas l'avoir fait – nous pourrions du reste avoir un débat assez long sur le sujet. Puissiez-vous donc faire preuve sur ce point de la vertu que vous exigiez des autres !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Défavorable.

Monsieur Gorce, sous prétexte de supprimer des discriminations, l'amendement n° 465 , en permettant à l'ensemble des cadres concernés par le forfait jours de bénéficier d'un abattement de 3 % du revenu imposable, introduit une discrimination majeure par rapport aux salariés qui sont soumis au régime horaire. En effet, seuls ceux qui feraient des heures supplémentaires bénéficieraient d'une exonération, pas les autres.

Dès lors que les cadres travailleront plus de 218 jours – l'équivalent annuel des 1 607 heures légales –, et que pourra être négociée une monétisation des journées de RTT effectuées au-delà de ces 218 jours, les jours supplémentaires bénéficieront de l'exonération, la valorisation horaire moyenne ayant pour coefficient une journée de RTT égale à sept heures de travail. Le système est donc parfaitement équilibré par rapport au régime général horaire. Votre amendement, au contraire, créerait, je le répète, une injustice entre les salariés relevant du régime horaire et les cadres.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Défavorable pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Monsieur le président, je souhaite défendre l'amendement n° 204 , qui est dans le même esprit que les amendements n°s 465 et 238 défendus par Gaëtan Gorce.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Il est vrai que M. Gorce vient de défendre, en sus de l'amendement n° 465 , l'amendement n° 238 , lequel est en discussion commune avec l'amendement n° 204 . De ce fait, j'accède volontiers à votre demande.

La parole est à M. Jean-Christophe Baguet, pour soutenir l'amendement n° 204 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Je vous remercie, monsieur le président.

Je défends en effet l'amendement n° 204 dans le même esprit que les amendements que Gaëtan Gorce vient de soutenir. Le problème, du reste, ne concerne pas les seuls cadres, mais l'ensemble des salariés, puisqu'il existe des conventions collectives à 212, 210, voire 204 jours ouvrés. Cela signifie que les salariés qui relèvent de ces conventions collectives devront travailler 218 jours au moins avant de pouvoir bénéficier de la défiscalisation de leurs heures supplémentaires. Ce n'est pas en instaurant de telles disparités qu'on encouragera les salariés à travailler davantage. Par ailleurs, les salariés qui sont en compte épargne temps se trouveront eux aussi exclus du bénéfice de la défiscalisation. Nous en arrivons, je le répète, à de réelles disparités entre les salariés selon que des accords de branche ont été conclus ou non. Mme la ministre s'est engagée à réfléchir à cette situation : c'est important car celle-ci concerne un très grand nombre de salariés, notamment dans le secteur industriel. Or notre industrie a grand besoin aujourd'hui d'être soutenue et encouragée.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Ce débat permet de voir jusqu'où on peut aller dans l'absurdité. Je rappelle que la loi, sur le point qui nous intéresse, a été modifiée au cours de ces cinq dernières années. Ainsi les cadres ne sont pas les seuls concernés par le forfait, qu'il s'agisse du forfait jours, du forfait heures ou du forfait annuel.

De plus, contrairement à ce qui a été dit, la durée du forfait jour n'est pas nécessairement, dans la réalité, de sept heures. Si certains salariés, et notamment les cadres, sont en forfait jours, c'est justement parce qu'en général ils travaillent beaucoup plus que sept heures et dépassent largement huit heures de travail journalières. L'intérêt pour l'entreprise de passer les cadres en forfait jours – et pas seulement les cadres d'ailleurs – est justement d'étendre la journée de travail à une durée bien supérieure à huit heures sans que le salarié puisse compter ses heures et donc exiger une rémunération en fonction du travail effectué. Ces contrats sont courants dans l'informatique, secteur où le moins que l'on puisse dire est que les salariés en forfait jours ne se contentent pas de journées de sept heures.

On nous explique ensuite que, lorsqu'ils auront dépassé 218 jours de travail, ils pourront, en monétisant les journées supplémentaires – notamment, je suppose, par l'intermédiaire du compte épargne temps, le CET –, bénéficier d'une défiscalisation. J'estime que cela introduit d'invraisemblables inégalités entre salariés.

De plus, dans une même entreprise, les salariés au forfait horaire auront droit à une défiscalisation de leurs heures supplémentaires tandis que les salariés au forfait jours n'en bénéficieront pas, leur seule contrainte étant de disposer de onze heures de repos entre deux moments de travail. Ainsi, les dispositions contenues dans l'article 1er présentent un risque d'aggravation des inégalités entre salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Je souhaite ajouter un dernier point sur cette question : ces forfaits ne respectent pas la réglementation européenne qui prévoit une durée hebdomadaire maximale de travail de 48 heures. Or il n'existe pas d'opt-out en France, comme au Royaume-Uni. Les forfaits jours impliquent le dépassement de ces 48 heures par semaine puisqu'ils obligent les salariés à travailler bien davantage. Nous contrevenons ainsi au droit communautaire. On accumule donc les invraisemblances en matière de droit du travail tant sur le plan national que du point de vue européen, si l'on considère les modifications que vous avez apportées pendant ces cinq dernières années, cette partie de l'article 1er n'en étant qu'une nouvelle.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Gaëtan Gorce.

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

Je réponds à M. le rapporteur général sur la question des discriminations. Il faut bien voir ce qu'est le forfait jours. Il s'agit d'un dispositif qui permet de déroger à la durée maximale journalière du travail sur une semaine. En effet, la seule règle relative au forfait jours vient d'être rappelée par notre collègue : c'est l'obligation légale d'un repos minimum de 11 heures par jour, ce qui signifie qu'un salarié au forfait jours peut, pendant 218 jours par an, travailler 13 heures par jour pendant 6 jours par semaine. Comptez donc rapidement le nombre d'heures que cela représente et si vous soutenez qu'il n'y a aucune discrimination à ne pas rémunérer les heures supplémentaires intégrées dans le forfait de ces salariés, j'inclinerais à penser le contraire.

Je comprends que vous soyez embarrassés par le forfait jours dans la mesure où, accentuant encore la contradiction, la majorité de la précédente législature avait adopté une disposition étendant son bénéfice à d'autres catégories de salariés que les cadres, catégorie que nous avions définie, pour notre part, de manière restrictive.

La logique consiste donc soit à revenir sur la définition extensible du forfait jours, soit à la maintenir et, dans ce cas, à faire bénéficier les salariés concernés d'une rémunération forfaitaire de leurs heures supplémentaires. À défaut, comme le faisait remarquer Alain Vidalies, vous risquez de les inciter à basculer sur un forfait horaire de façon qu'un certain nombre de leurs heures travaillées, requalifiées en heures supplémentaires, puissent bénéficier des exonérations prévues. Vous allez donc encourager des pratiques qui ne consistent pas à « travailler plus pour gagner plus » mais à s'organiser mieux pour tirer le meilleur profit des exonérations fiscales et sociales. C'est l'un des défauts du texte et vous l'aggravez.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

Bien sûr ! ça va coûter beaucoup plus cher que prévu !

Debut de section - PermalienPhoto de Arnaud Montebourg

La Commission européenne va encore se fâcher, monsieur Carrez !

Debut de section - PermalienPhoto de Gaëtan Gorce

J'ajoute que vous ne m'avez pas répondu, monsieur le rapporteur général, sur la question des accords collectifs, qui soulève un problème de constitutionnalité dans la mesure où certains fixent un plafond de jours travaillés inférieur au plafond légal de 215 ou 216 jours. Les jours de travail effectués au-delà de ce plafond sont rémunérés en heures supplémentaires.

Or, si vous empêchez ces jours rémunérés en heures supplémentaires de bénéficier des exonérations prévues, vous créez une discrimination qui ne peut être justifiée par l'intérêt général et je doute que le Conseil constitutionnel, s'il était saisi de la question, n'y trouverait rien à redire. Je voulais attirer votre attention sur ce qui pose un problème du point de vue du respect de la négociation collective et aussi en termes de droit. Je souhaite obtenir des réponses sur ces deux points.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Alain Vidalies.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

On voit bien là toute la fragilité du dispositif. Vous ne voulez pas prendre en considération la législation sur le forfait jours. Vous vous êtes d'ailleurs très largement trompé, monsieur le rapporteur général, votre raisonnement vous conduisant à prononcer cette phrase assez incroyable selon laquelle la situation serait la même avec le forfait jours qu'avec le plafond légal des 1 607 heures annuelles.

Or il n'en est rien : pour le forfait jours, l'éventualité de travailler 13 heures par jour amène à un total potentiel de 2 400 heures travaillées par an – c'est une réalité. Aussi ne voulez-vous pas parler du forfait jours ; mais ce qui va se passer est extrêmement simple, écoutez-nous : il suffira de comparer le code du travail avec le présent texte pour que tout le monde ait intérêt à passer du forfait jours au forfait horaire.

En effet, une disposition du code du travail prévoit la possibilité d'obtenir un forfait annualisé en heures. Aussi, sans rien changer aux conditions d'organisation de l'entreprise, tout le monde aura intérêt à passer du forfait jours au forfait horaire pour bénéficier des mesures de défiscalisation ainsi que des abattements de cotisations.

Vous n'aurez donc rien créé du tout et, d'une certaine façon, suscité un effet d'aubaine. Si vous voulez éviter cette situation assez incroyable, il vous faut, comme le suggèrent nos amendements, prendre en considération la situation de l'ensemble des salariés.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Je souhaite rappeler quelques éléments évoqués par M. le rapporteur général sur la notion de forfait. Forfait jours, forfait annuel, accord de modulation… : l'ensemble de ces dispositions résulte en général soit de contrats de travail, soit de conventions collectives, soit d'accords d'entreprise lorsqu'ils sont facilités par des accords de branche.

Il appartient tout d'abord aux partenaires sociaux de les renégocier éventuellement et, ensuite, si d'aventure certains de ces accords ou de ces contrats n'étaient pas conformes aux dispositions légales sur la durée du travail – en particulier sur la durée maximale du temps de travail, soit à la journée, soit à l'année –, de les remettre en cause devant les juridictions compétentes.

Le présent texte souhaite maintenir un principe d'égalité. De multiples conventions collectives et accords de branches ont été signés. Or, si l'on commence à vouloir entrer dans le détail de la multiplicité des conventions et accords, on va introduire un principe d'inégalité en contradiction avec l'objet du texte. C'est pour l'éviter que le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 465 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 204 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 238 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Cet amendement de la commission des affaires culturelles vise, comme le sous-amendement n° 473 , adopté précédemment, à garantir au plus grand nombre de salariés le bénéfice des exonérations fiscales et sociales. En effet, le projet de loi a pris en compte la situation dans laquelle les cadres renoncent à des jours de repos en contrepartie d'une majoration salariale.

Cependant, la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise a aussi prévu un régime de renonciation à des journées ou demi-journées de repos pour tous les salariés des petites entreprises de 20 salariés au plus. Ce régime leur permet, en l'absence d'un accord collectif, de décider de renoncer à une partie des journées ou demi-journées de repos accordées au titre de la réduction du temps de travail ou dans le cadre d'un forfait en jours sur une base annuelle pour les cadres, dans la limite de dix jours par an.

Grâce à cet amendement, l'ensemble des sommes versées bénéficiera du nouveau régime d'exonération.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable. Le Gouvernement lève le gage.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 7 , compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 8 .

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

Cet amendement s'inscrit dans la même démarche que précédemment. Il s'agit, cette fois-ci, de garantir aux salariés bénéficiaires d'une convention de forfait établie sur une base mensuelle, le bénéfice de nouvelles exonérations lorsqu'ils effectuent des heures de travail au-delà de la durée de travail prévue au forfait. Il est en effet essentiel de préciser que les dispositions prévues à l'article 1er s'appliquent aussi à ces salariés.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission n'a pas examiné cet amendement. Pour ma part, je n'y suis pas favorable parce que ces salariés bénéficient bien, en fait, selon la rédaction actuelle, de l'exonération prévue au titre des heures supplémentaires effectuées. Les heures supplémentaires de ces salariés sont décomptées selon la règle de droit commun, à partir de la 35e heure et, bien que le forfait soit mensuel, la prise en compte de ces heures supplémentaires ne pose aucun problème. Je me tourne vers la ministre pour savoir si elle partage mon point de vue.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Je partage le point de vue de M. le rapporteur général. Je considère en effet que le texte tel qu'il est rédigé satisfait votre souhait, monsieur le rapporteur pour avis, de voir rémunérer les salariés au forfait mensuel de manière spécifique. L'amendement est donc sans objet ; c'est la raison pour laquelle je vous propose de le retirer.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Monsieur le rapporteur pour avis, retirez-vous votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Tian

La commission des affaires culturelles souhaitait l'adoption de cet amendement mais, madame le ministre, compte tenu de vos éclaircissements et de l'aspect rassurant de vos propos, je le retire bien volontiers.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'amendement n° 8 est retiré.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi de deux amendements, nos 205 et 340 , pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Pierre-Christophe Baguet, pour soutenir l'amendement n° 205 .

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Cet amendement concerne les salaires versés aux salariés à temps plein au titre des heures complémentaires comprises entre l'horaire collectif de référence applicable et l'horaire légal, comme le prévoient notamment tous les accords collectifs conclus antérieurement à la loi de janvier 2000. Nous nous retrouvons ici aussi face à une disparité – peut-être un oubli qu'il conviendrait de corriger. Il faudrait trouver des solutions adaptées au cas des salariés qui travaillent sur une base hebdomadaire de 34 heures par semaine ou de 1 582 heures par an et se retrouvent exclus du dispositif, de ce fait, puisqu'ils sont en dessous des 1 607 heures annuelles de référence. Il faudra revenir sur ce point pour trouver une solution sans avoir à remettre en cause tous les accords collectifs et tous les accords de branche, ce qui représenterait le travail qu'on imagine, les disparités se maintenant malheureusement avant son achèvement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire pour soutenir l'amendement n° 340 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

, de l'environnement et du territoire. L'amendement reprend le premier point de l'amendement n° 205 ; je n'ai donc pas d'explications à ajouter. Je souhaite simplement m'assurer que les heures complémentaires gérées par convention annuelle seront traitées de la même manière que les heures complémentaires gérées de façon hebdomadaire ou mensuelle.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La première partie de l'amendement n° 205 , qui correspond en fait à l'amendement n° 340 , est tout à fait acceptable puisqu'elle s'inscrit dans le cadre de la définition par le code du travail des heures complémentaires, soit dans la limite de 10 % du contrat de travail à temps partiel, soit, s'il y a un accord, dans la limite d'un tiers.

En revanche, la deuxième partie assimilerait à des heures complémentaires les heures travaillées avant que ne soit atteinte la durée légale. Par exemple celles comprises entre la 32e et la 35e heure. Quel en serait l'effet ? On considérerait comme des heures supplémentaires et donc on exonérerait des heures effectuées en dessous de la durée légale. Or une telle pratique ne correspondrait absolument pas à la philosophie de l'article 1er qui considère comme heures supplémentaires celles qui sont travaillées au-delà de la 35e.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Monsieur le député Baguet, le Gouvernement a exactement la même approche que le rapporteur général. Sous le bénéfice de ses explications, je vous suggère donc de retirer votre amendement et de vous rallier à l'amendement n° 340 de M. Taugourdeau.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Retirez-vous votre amendement, monsieur Baguet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Christophe Baguet

Oui, monsieur le président, et je me rallie à la proposition de M. Taugourdeau.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Alain Vidalies.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Je répondrai au Gouvernement et à la commission que si des salariés ont été intéressés par le slogan « Travailler plus pour gagner plus », il s'est agi en priorité de travailleurs à temps partiel, en particulier dans le cas où le temps partiel est subi. Ceux-là ont compris qu'on les encouragerait à faire plus d'heures, ce qui correspondait d'ailleurs à leurs besoins. Leur vécu, surtout quand il s'agit de personnes qui vivent seules, n'est-il pas fait de factures qui, elles, ne sont pas à temps partiel ? Tout le monde le sait, nous sommes là avec ces personnes, face à l'émergence de travailleurs pauvres dans notre pays.

Or, ainsi que nous le soulignons depuis le début, ces salariés, et le débat le montre, ne sont pas concernés par le texte. Il faut le dire clairement aux Français, ceux qui probablement sont le plus intéressés à travailler plus pour gagner plus ne sont en effet pas visés par les abattements et par les exonérations proposés. Vous êtes ainsi obligés, parce que votre système est très imparfait, d'exclure les salariés à temps partiel de votre dispositif, y compris ceux qui subissent probablement le plus la flexibilité, qui constitue l'une des limites de notre code du travail, à savoir les travailleurs à temps partiel annualisés, c'est-à-dire essentiellement ceux qui sont employés dans des activités saisonnières.

Ceux-là, c'est-à-dire ceux qui ont les conditions de travail les plus difficiles, ne sont pas concernés par le slogan « Travailler plus pour gagner plus ». Il faut le dire très clairement, car je suis presque certain qu'ils n'avaient pas compris cela.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Je ne suis pas un brillant économiste, mais simplement un modeste chef d'entreprise, et c'est d'ailleurs à ce titre que j'aurais voulu répondre à la question que M. Emmanuelli – c'est dommage qu'il soit parti – a posée à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sapin

M. Emmanuelli est banquier, il connaît l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Vous avez demandé, monsieur Emmanuelli, pourquoi nous n'avions pas abrogé les 35 heures. Je répondrai d'abord que de toute mauvaise situation, il faut savoir tirer profit. En l'occurrence, qu'est-ce qui a, avec les 35 heures, profité aux entreprises...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

...et paupérisé les salariés sinon la modulation ? Celle-ci a en effet permis aux entreprises de supprimer des heures supplémentaires, ce qui a paupérisé de nombreux salariés qui ne travaillaient d'ailleurs pas qu'à temps partiel, monsieur Vidalies, mais également à temps plein.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Je pense notamment, s'agissant des premiers, aux travailleurs saisonniers qui travaillent 169 heures par mois, ou plutôt 157 depuis l'instauration des 35 heures.

Si nous ne sommes pas revenus sur ce dispositif qui a paupérisé, je le répète, les salariés, c'est parce qu'il avait nécessité, pour être mis en place, des dizaines de milliers d'heures de négociation et que nous n'allions pas, d'un trait de plume, casser tout le système. C'est ce qui explique d'ailleurs que l'article 1er soit aussi compliqué. Sans les 35 heures en effet, nous aurions juste aujourd'hui le souci d'alléger le coût des heures supplémentaires. Et n'oublions pas que pour abroger les 35 heures, il aurait également fallu revenir sur les aides versées aux entreprises. En somme, le système que vous avez fabriqué était quasiment irréversible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

Ce que l'on cherche à faire aujourd'hui, c'est alléger ce système et faire en sorte que les 35 heures, comme l'a dit le Président de la République, soient non pas un maximum, mais un minimum. Ce ne sont pas en effet les employeurs qui décident.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Charles Taugourdeau

En réalité, vous considérez mal les salariés. Ces derniers aiment l'entreprise où ils travaillent : ils sont désireux, lorsque la demande l'exige, de faire des heures supplémentaires. Or si aujourd'hui les employeurs ne courent pas après les heures supplémentaires, c'est parce que celles-ci coûtent trop cher. C'est pourquoi nous cherchons à en diminuer le coût, sachant qu'à partir de là tout relève de la seule vie de l'entreprise : dans les périodes où il y a un peu de demandes, des heures supplémentaires sont temporairement organisées, ce qui permet ensuite à l'entreprise de se développer et de créer des emplois, puis de connaître alors un nouveau cycle dans lequel, face à de nouvelles demandes, de nouvelles heures supplémentaires sont effectuées.

On ne fait pas des heures supplémentaires toute l'année par plaisir. Elles répondent à une logique de développement de l'entreprise – une période d'heures supplémentaires précède la création d'emplois, et ce cycle recommence après que de nouveaux marchés ont été trouvés –, mais, au bout du compte, ce sont les clients qui commandent.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Henri Emmanuelli.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Monsieur le rapporteur, ma question était simple : puisque vous estimez que les 35 heures sont à l'origine, ainsi que nous l'a en tout cas expliqué le rapporteur général, de tous les maux actuels sur le plan économique avec, entre autres, un déficit public et une perte de productivité, pourquoi ne les supprimez-vous pas puisque vous avez la majorité ? Voilà six ans que vous êtes au pouvoir !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Vous oubliez les conventions que vous avez signées avec les entreprises !

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

En réalité, les 35 heures sont pour vous commodes parce que cette réforme vous permet de dissimuler votre échec en matière de politique macro-économique.

J'ai déjà cité les statistiques de l'OCDE – je n'invente rien – qui montrent que dans notre pays, la conjoncture a permis de créer de 1997 à 2002, ou plutôt jusqu'à la fin 2001 pour être tout à fait honnête, près de 2 millions d'emplois – et non 1,5 million comme je le disais tout à l'heure – contre moins de 300 000 au cours de la législature suivante.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Non, il s'agissait de 1,8 million d'emplois privés et de 200 000 emplois publics – les emplois-jeunes.

Vous prétendez représenter l'entreprise pour être chef d'entreprise. Pour ma part, j'ai travaillé quinze ans au sein d'une banque privée, où j'ai d'ailleurs pu rencontrer nombre de chefs d'entreprise. Vous n'êtes donc pas le seul, monsieur Taugourdeau, à connaître l'entreprise.

Je conviens cependant avec vous que, s'agissant des heures supplémentaires, ce n'est pas le chef d'entreprise qui décide, mais les clients. Si le besoin s'en fait sentir, il en prescrit, et s'il n'a pas de demande, il n'en prescrit pas. Il est une chose pourtant que vous faites semblant d'ignorer. Je prendrai pour m'en expliquer l'exemple d'un entrepreneur de ma circonscription qui emploie, dans le secteur menacé et fragile du meuble, 900 personnes. Un simple calcul lui montrerait en effet qu'il aurait tout intérêt aujourd'hui – c'est même malheureusement dans les tuyaux, si j'ose dire – à remplacer un certain nombre de salariés en CDI par des heures supplémentaires. C'est une activité qui s'y prête car il s'agit d'un travail à la chaîne et d'une production en grande série.

Vous dites que les 35 heures ont entraîné la stagnation du pouvoir d'achat. Si c'était vrai, cela se traduirait dans les bénéfices. Or ceux-ci ont, en 2006, battu des records absolus. On ne peut donc dire que les 35 heures ont permis de faire des bénéfices tout en entraînant la stagnation du pouvoir d'achat. C'est insoutenable.

Quant au contingent d'heures supplémentaires, il n'a même pas été utilisé à moitié.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Non ! Tout dépend du produit et du secteur. Vous le savez aussi bien que moi, la main-d'oeuvre, dans certains secteurs, ne représente même plus 15 %, voire 10 % du prix.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Il faudra en effet attendre, puisque Mme la ministre nous dit elle-même qu'elle ne peut pas en mesurer l'impact !

Je saisis d'ailleurs l'occasion, madame la ministre, pour vous rappeler que des études d'impact en la matière ont été réalisées en 2004 lorsque M. Sarkozy, alors ministre de l'économie et des finances, voulait déjà proposer cette mesure, et qu'elles ont conclu que celle-ci était inopérante et, en tout cas, qu'elle n'était pas pertinente. Vous me direz que 2004, ce n'est pas 2007, mais je ne pense pas que les raisons profondes de cette conclusion aient entre-temps changé.

Le résultat sera fonction de la conjoncture ainsi que des moyens que nous nous donnerons pour booster la croissance. Or les dispositions que vous nous faites prendre aujourd'hui ne la boosteront pas. En revanche, vous boosterez le taux d'épargne dans un pays qui bat déjà des records en ce domaine par rapport au PIB.

Là aussi, madame la ministre, on ne peut pas prétendre, comme vous l'avez fait à la tribune, que l'on a fait fuir l'argent et les riches, alors que notre taux d'épargne est le plus élevé d'Europe. Il y a là quelque chose qui ne va pas dans le raisonnement, et il faudra bien qu'un jour on explique aux béotiens que nous sommes comment cela est possible. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'amendement n° 205 de M. Baguet a été retiré.

Madame la ministre, levez-vous le gage de l'amendement n° 340 ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Oui, monsieur le président.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets donc aux voix l'amendement n° 340 , compte tenu de la suppression du gage.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

Reprise de la discussion

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La séance est reprise.

Je suis saisi d'un amendement n° 239 .

La parole est à M. Michel Liebgott, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Cet amendement concerne un secteur d'activité particulièrement important, qui nous concernera toutes et tous un jour, je veux parler du secteur des services à la personne et des emplois à domicile, où la majorité des salariés, régis par la convention nationale collective des employés de maison, sont employés à temps partiel : sur 850 000 salariés, 60 000 seulement travaillent à temps plein. L'article 1er indique très clairement que les salaires versés aux salariés par les particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires font l'objet d'une majoration. L'amendement tend à préciser que cet avantage est octroyé pour les heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La notion d'heure complémentaire ne s'applique pas aux emplois à domicile à temps partiel en raison de l'amplitude horaire beaucoup trop importante qui les caractérise. Il n'est pas possible de caler dessus la majoration de l'horaire de travail de 10 % par rapport à une durée partielle établie, qui n'existe pas. Votre amendement, monsieur Liebgott, est donc sans objet. En revanche, au-delà de l'horaire légal de travail à temps plein, la notion d'heure supplémentaire intervient.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Pour préciser l'excellente réponse du rapporteur général, j'ajoute que cette règle résulte d'un arrêt de la Cour de cassation rendu en 2000, selon lequel les dispositions relatives à la durée du travail à temps partiel ne s'appliquent pas aux travailleurs à domicile. C'est pour cette raison que les dispositions relatives au temps compensé au titre des heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel ne s'appliquent pas aux travailleurs à domicile.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Ce que vous venez de dire, madame la ministre, est effectivement valable pour les salariés à domicile embauchés directement par les particuliers employeurs, mais pas pour ceux qui sont embauchés par un intermédiaire – associations d'insertion ou, de plus en plus, entreprises commerciales. Une fois de plus, on crée des différences entre salariés selon le type de leur contrat de travail. Ceux qui sont employés par une entreprise intermédiaire auront droit à la défiscalisation des heures supplémentaires, au « travailler plus pour gagner plus », mais pas les autres.

Par ailleurs, j'ai une question s'agissant de la modification des logiciels de paye, qui aura un coût. Les entreprises qui mettent à jour ces logiciels ne les fourniront pas gratuitement. Ce sujet n'est jamais abordé dans votre texte et n'a pas plus été évoqué en commission. Pour les grosses entreprises, ce coût représentera une goutte d'eau par rapport à leur chiffre d'affaires, alors qu'il sera très important pour les très petites entreprises, lesquelles traînent souvent les pieds pour acheter les mises à jour – j'en parle en connaissance de cause ayant travaillé dans le secteur de l'informatique. Il est donc à craindre qu'elles ne seront pas prêtes pour le 1er octobre et qu'il en résultera de nouvelles situations d'inégalité entre salariés et plus encore pour les salariés des particuliers employeurs.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Michel Liebgott.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Liebgott

Pour aller dans le sens de Mme Billard, je rappelle que les particuliers représentent les deux tiers des employeurs dans un secteur où la durée conventionnelle du travail est de 40 heures. Voilà encore une catégorie de salariés exclue du dispositif. Comme je le disais tout à l'heure, la plupart des salariés qui pourront en bénéficier seront ceux qui occupent des postes pérennes dans des secteurs en expansion, pas ceux qui travaillent dans des secteurs en difficulté ou à temps partiel. C'est toute l'insuffisance du dispositif que vous proposez.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 239 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 35 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 35 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 224 et 264 .

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l'amendement n° 224 .

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis un fervent partisan de l'article 1er, qui était attendu, en particulier par le monde ouvrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous devons donc tout faire pour qu'un maximum de gens puissent en bénéficier et, pour cela, régler certaines situations singulières. Celle des tâcherons, qui oeuvrent dans différentes activités agricoles ou forestières, dans des abattoirs – très importants dans l'ouest de la France –, mais aussi dans le bâtiment, en fait partie. Les tâcherons sont des salariés payés non pas à l'heure mais à l'unité produite.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

En quelque sorte. Mon propos est de veiller à ce qu'ils ne soient pas oubliés dans les dispositions de l'article 1er. D'autant que ce sont des adeptes du « travailler plus pour gagner plus » : contrairement à ce que j'entends sur les bancs d'en face, ils aspirent à ce statut qui leur permet de gagner plus en travaillant plus.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Avec leurs salaires de misère, ils sont bien obligés !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Encore faut-il qu'ils puissent bénéficier complètement des heures supplémentaires. Quelques incertitudes subsistent.

J'ai déposé un amendement d'appel, afin, madame la ministre, que vous leviez explicitement toutes ces incertitudes. Si ce n'était pas le cas, je souhaite que des dispositions réglementaires nous permettent, dans les jours suivant l'adoption du projet de loi, de résoudre totalement ce problème.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Monsieur de Courson, s'agit-il aussi d'un amendement d'appel ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Mon amendement est identique. Nous avons longuement discuté en commission des finances. Cette dernière a jugé sage d'attendre la réponse du ministre. Nous nous trouvons devant des situations extrêmement variées. Je prendrai l'exemple des désosseurs qui, dans les abattoirs, doivent traiter un certain nombre de porcs en sept heures. Les unités traitées en plus de la norme comptent pour un certain nombre d'heures supplémentaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Il en va de même pour les poulets.

Dans le domaine agricole, les ouvriers forestiers sont payés au stère. Comment procède-t-on pour transformer ces stères en heures supplémentaires ? Toutes ces questions se posent. Ce sont souvent des ouvrières et ouvriers rémunérés entre le SMIC et de 10 à 20 % au-dessus du SMIC. Le texte s'applique-t-il à eux ? Dans l'affirmative, comment transformer en heures supplémentaires ces productions ?

Dans les vignes se pose le même problème. Ceux qui palissent une vigne sont, pour certains, payés à l'heure, mais d'autres à la tâche. Comment transforme-t-on en équivalents heures les superficies de palissage ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a repoussé ces amendements, car le cas est explicitement prévu dans le neuvième alinéa de l'article 1er. Les salariés dont la rémunération n'obéit pas au régime de droit commun feront l'objet, s'agissant du décompte des heures supplémentaires ou complémentaires, de modalités fixées par décret.

Nous avons pensé madame la ministre, que vous nous indiqueriez le contenu du décret, notamment pour faire plaisir à M. de Courson et lui expliquer comment on transforme des stères en heures supplémentaires. (Sourires.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Monsieur Le Fur, je voudrais préalablement rendre hommage à tous les salariés auxquels vous avez fait référence, car les salariés qui travaillent à la tâche sont bien souvent ceux qui ont envie de travailler, de maximiser leur rémunération (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et qui, quelle que soit leur rémunération sont valeureux. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Les travailleurs rémunérés à la tâche ou à la pièce se situent d'ores et déjà dans le champ d'application de la présente loi, soit parce qu'ils entrent dans le champ de la loi de mensualisation du 19 janvier 1978, ce qui leur permet d'avoir une rémunération constante, quel que soit le nombre de jours travaillés dans le mois. Dans ce cas, les heures supplémentaires doivent être payées dans leur intégralité, selon les modalités prévues par l'article L. 212-5 du code du travail ; soit parce que en qualité de travailleur à domicile effectuant le cas échéant une activité de télétravail, ils bénéficient des dispositions du projet de loi, en application du 6 du I de l'article 1er – les heures supplémentaires s'appréciant alors pour toute activité prolongée au-delà de huit jours. Dans ces conditions, votre amendement me paraît satisfait et je vous suggère de le retirer.

Monsieur de Courson, la faculté de mesurer le palissage ou les stères de bois, pour les salariés forestiers et de les convertir en équivalents heures en appliquant ainsi la disposition sur les heures supplémentaires prévue par l'article 1er, est incluse dans le champ couvert par la loi : c'est le 1 de l'article L. 713-1, qui vise expressément les exploitations, entreprises et établissements énumérés aux 1 à 4 de l'article L. 722-1 à l'exception des entreprises de travaux agricoles qui effectuent un travail aérien. Dans ces conditions, les travailleurs forestiers sont couverts par le texte.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Pour parvenir à convertir le nombre de stères ou le nombre de palissages en équivalents heures, il appartiendra au groupement d'employeurs et aux organisations représentatives de ces salariés de parvenir à un accord, ou, à défaut, …

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Pardonnez-moi, les ouvriers forestiers sont des salariés, même s'ils sont rémunérés autrement que par un salaire mensuel. Des travailleurs payés à la tâche sont aussi des salariés.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

La définition du salarié résulte du lien de subordination. Cela ne résulte pas nécessairement et exclusivement du mode de rémunération. Ce sont des salariés.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

On voit bien que vous n'étiez pas une spécialiste du droit du travail.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

À défaut d'accord conclu de manière collective, il appartiendra au décret de définir l'équivalent horaire des stères ou des palissages.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est àMme Marylise Lebranchu.

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Je suis très étonnée. En effet, depuis plusieurs années, la CAPEB, l'UPA et d'autres organisations patronales luttent avec acharnement pour que l'on ne confonde plus un salarié et un tâcheron, tant pour des raisons de concurrence que par respect pour un certain nombre de personnes qui se retrouvent – je vais parler aussi simplement que possible et sans agacement – de façon non volontaire réduites à faire du tâcheronnage, car les prendre comme salariés poserait des problèmes en termes de charges, de gestion, etc.

C'est un dossier extrêmement lourd pour les petits entrepreneurs. Ils ont demandé en 1998 – j'en ai été témoin – que l'on arrête une fois pour toutes de confondre en droit du travail le salarié et le tâcheron.

Je pense que l'on ne peut pas dire devant notre assemblée des choses inexactes en matière de droit du travail. Le tâcheron met à disposition sa force de travail et souvent du matériel. Il est donc considéré comme un homme « libre », sans lien de subordination, à la disposition d'une entreprise dans un cadre bien déterminé. Notre propos n'est pas de refaire tout le code du travail.

Il est donc absolument impossible de confondre tâcheron et salarié. Ce sont des ouvriers, si vous voulez, mais surtout pas des salariés. Je ne vois pas comment on pourrait parler d'heures supplémentaires pour le tâcheronnage.

En Bretagne – M. Le Fur doit le savoir – les entrepreneurs agricoles, du bâtiment et un certain nombre d'associations professionnelles se sont réunis plusieurs fois pour tenter de mettre fin à un certain nombre de pratiques de ce type. Rappelez-vous du ramassage des poulets la nuit !

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Pour 65 heures de présence effective, des fiches de paie étaient établies pour 30 heures.

Madame la ministre, vous parliez des salariés qui travaillent dans les abattoirs ou sur les chaînes d'abattage du poulet. Je vous invite à venir avec moi discuter avec les 350 employées d'une entreprise à qui on demande de travailler un quart d'heure de plus. Elles refusent, car, physiquement, elles ne peuvent plus.

Elles ont commencé leur carrière au SMIC et seront licenciées au 31 décembre 2012, avant la fin des restitutions – au SMIC plus 10 % après vingt-sept ans de travail.

Je pense qu'il ne faut pas dire certaines choses ici. Il faut regarder la réalité en face.

Je voudrais, pour terminer, souligner que, dans les petites entreprises – je rejoins les propos tenus par M. Henri Emmanuelli – qui sont encore à 39 heures et qui co-traitent ou sous-traitent le ramassage des poulets, le transport des bestiaux entre les fermes et l'abattoir, le personnel va passer à 35 heures mais en fera 39. Là, il n'y a pas de problème.

Mais, par respect du droit, ne disons pas ici qu'un employeur a le droit de recourir à des tâcherons dans un abattoir et que ceux-ci sont en fait des salariés. Sinon, l'employeur sera condamné, parce que c'est strictement interdit en droit.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Le salarié se définit par trois critères : le lien de subordination, la dépendance économique, l'intégration dans un service organisé. On peut parfaitement être salarié en remplissant les trois critères et en étant payé à la pièce.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Si !

Selon la définition de la chambre sociale de la Cour de cassation, la nature de salarié répond à ces trois critères. Ce n'est pas le mode de rémunération qui définit le salarié.

L'appellation de tâcheron n'est pas une définition juridique. Je crois que nous sommes d'accord sur la définition du salariat.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est àM. Marc Le Fur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Il existe effectivement des prestataires qui sont indépendants, même s'ils sont dans une dépendance de fait qui créé une incertitude.

Mais, pour ma part, je parle du salarié payé à la tâche. Ce n'est pas anecdotique. Je suis dans une circonscription où il y a d'énormes abattoirs, qui emploient des centaines de personnes payées à la tâche. Ils sont, par exemple, payés à l'unité de porc découpé et définissent, dans l'atelier, leur rythme de découpage. Ils ne sont pas sur une chaîne, ce n'est donc pas le même problème que pour la volaille.

Mme la ministre a indiqué très clairement que ces salariés payés à la tâche bénéficieront des heures supplémentaires dans l'essentiel des cas. J'en prends acte et je retire donc l'amendement que j'avais déposé.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'amendement n° 224 est retiré.

Monsieur de Courson, maintenez-vous votre amendement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Madame Lebranchu, le but de ces amendements n'est pas de critiquer des formes d'organisation. Elles existent dans le code rural et elles sont légales. Il s'agit de maintenir l'égalité entre tous les salariés dans l'application du présent texte.

Mme la ministre a indiqué qu'elle interviendrait, avec ses collègues des différents secteurs concernés, par voie de décret, pour fixer des équivalences. J'en prends acte mais cela va être extrêmement compliqué, compte tenu de la multiplicité des situations et des modes de rémunération.

En tout cas, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L' amendement n° 264 est retiré.

Je suis saisi d'un amendement n° 257 .

La parole est à M. Charles de Courson, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Nous en arrivons à une série d'amendements concernant les parasubordonnés, c'est-à-dire ceux qui sont considérés comme des indépendants au sens du droit du travail et des salariés en droit social.

Le premier amendement, n° 257 , a trait aux vendeurs à domicile indépendants, qui représentent 200 000 personnes. Le problème de leur traitement fiscal a déjà été réglé il y a quelques mois, puisqu'il y avait des divergences selon les zones.

Nous voudrions savoir s'ils vont être concernés par ce texte et, si oui, comment.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a repoussé l'ensemble des amendements n°s 257 à 263 de notre collègue de Courson, étant entendu qu'il s'agit d'amendements d'appel destinés à permettre au Gouvernement de préciser les règles qui vont s'appliquer à différents types de situation. Certaines de ces professions concernent clairement des salariés, qui sont donc couverts par le champ de l'article 1er avec, parfois, quelques difficultés pour décompter les heures, de l'ordre de celles que l'on vient de rencontrer avec l'amendement de M. Le Fur ; d'autres concernent des non-salariés, qui ne sont manifestement pas visés par le texte : en particulier, les avocats exerçant des fonctions de dirigeant dans leur cabinet ou des mandataires sociaux. D'autres enfin, – les VRP notamment – peuvent avoir un lien de subordination qui les lie à leur employeur et avoir un statut de salarié.

Nous souhaitons avoir quelques précisions sur cette série d'amendements, madame la ministre.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Les vendeurs à domicile indépendants n'étant pas des salariés, ils ne sont donc pas soumis aux dispositions du code du travail ou du code rural, ni à la durée légale du travail applicable en vertu de ces codes. Ils n'effectuent ni heures complémentaires, ni d'heures supplémentaires. Ils sont maîtres de l'organisation de leur temps et de leurs prestations de travail. Compte tenu de ce degré d'indépendance, ils ne sont pas soumis aux dispositions de l'article Ier.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Compte tenu des éclaircissements apportés par Mme la ministre, je retire mon amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

L'amendement n° 257 est retiré.

La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

En tant qu'ancien ministre du travail, je voudrais faire observer à l'Assemblée que, depuis quelques instants, nous ne faisons plus du bon travail. Vous avez, les uns et les autres, appelé l'attention du Gouvernement sur un certain nombre de problèmes qui devront être réglés par la voie réglementaire.

Dans les questions comme dans certaines de vos réponses, madame la ministre, on trouve quelques approximations qui sont de nature à gêner les rédacteurs des futurs décrets.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Muzeau

Voilà pourquoi il fallait renvoyer ce texte en commission !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

Contentons-nous de soulever les problèmes. Mais la complexité est telle que nous sommes, je le dis sans hésiter, dans des situations qui paraissent bien incertaines.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

C'est une sorte de rappel au règlement que vous venez de faire là, monsieur Soisson !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à Mme Martine Billard.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Billard

Cette discussion met en évidence la fragilité et les limites de l'article 1er.

On voit bien que certaines catégories de salariés n'ont pas été prises en compte. En ajoutant des catégories aux contours très flous, on risque de construire une usine à gaz. Je ne sais pas comment les chefs d'entreprise pourraient s'y retrouver entre les cas où la défiscalisation du travail supplémentaire – puisque l'on n'est même plus dans le cadre des heures supplémentaires – et ceux où elle ne le sera pas. Cela devient de plus en plus compliqué.

Vous n'avez pas prévu non plus, madame la ministre, le cas des personnes qui deviennent salariés du fait de la requalification de leur contrat de travail. Dans l'hôtellerie notamment, il est fréquent qu'un certain nombre de relations de travail soient requalifiées pour les gérants indépendants qui travaillent en fait pour la société qui a mis l'hôtel en gérance. Comment, dès lors, s'appliquera la défiscalisation ? Jusqu'ici quand il y a requalification du contrat de travail, les heures travaillées sont prises en compte. Mais en l'occurrence, il faudra prendre en compte les heures travaillées lors de la requalification et en même temps appliquer la défiscalisation des heures supplémentaires, faute quoi celui qui devient salarié par requalification de son contrat de travail pourrait se plaindre de discrimination car il aurait pu bénéficier du dispositif dès le départ.

La rédaction de l'article 1er débouche sur des situations kafkaïennes, sources de contentieux dont nous ne sommes pas prêts de sortir.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Censi

Il faut admettre qu'il y a des statuts différents !

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je vous suggère, monsieur de Courson, après avoir retiré votre amendement n° 257 , de faire une présentation commune de l'ensemble des sept amendements suivants, nos 258 à 263.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'en suis d'accord, monsieur le président.

L'amendement n° 258 concerne les travailleurs à domicile. L'amendement n° 259 concerne la catégorie importante des VRP. L'amendement n° 260 vise la catégorie des gérants minoritaires. L'amendement n° 261 a trait aux artistes du spectacle et aux mannequins, catégorie unique au regard du droit du travail. L'amendement n° 262 concerne les journalistes professionnels et assimilés. Enfin, l'amendement n° 263 évoque le problème des avocats salariés.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Les travailleurs à domicile visés par l'amendement n° 258 sont des salariés. Ils sont d'ores et déjà concernés par le 6 du I de l'article 1er. Votre amendement est donc satisfait, monsieur de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Dans ces conditions, je le retire, madame la ministre.

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Les voyageurs et représentants de commerce visés par l'amendement n° 259 sont des salariés et à ce titre, ils sont d'ores et déjà concernés par le 6 du I de l'article 1er. Ils bénéficieront donc des exonérations.

S'agissant de l'amendement n° 260 , les gérants de sociétés à responsabilité limitée et de sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée ne sont pas des salariés. J'exclus évidemment l'hypothèse où il y aurait cumul d'un contrat de travail et du statut de gérant. Votre amendement concerne exclusivement les gérants. Ils ne sont pas salariés et, à ce titre, ils ne sont pas réputés faire des heures complémentaires ou supplémentaires et ne sont pas visés par les dispositions de l'article 1er.

Avec l'amendement n° 261 , nous passons aux artistes du spectacle et des mannequins. Étant salariés, ils sont visés par le 6 du I de l'article 1er.

L'amendement n° 262 vise les journalistes professionnels et assimilés. Ce sont des salariés et bénéficieront des dispositions du 6 du I du présent article.

Enfin, l'amendement n° 263 vise les avocats salariés, qui ne sont pas des collaborateurs indépendants. Ayant le statut de salariés, ils bénéficieront des exonérations prévues par le texte.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Les amendements n°s 258 , 259 , 260 , 261 , 262 et 263 sont retirés.

Je suis saisi d'un amendement n° 448 .

La parole est à M. Pierre Morange, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Morange

Cet amendement s'inscrit dans la philosophie de ce projet de loi en visant l'utilisation monétisée des droits portés sur le compte épargne-temps, notamment afin de faire bénéficier de ce nouveau régime d'exonération fiscale et sociale les éléments de rémunération versés aux salariés au titre de l'ensemble du temps supplémentaire dans le compte épargne-temps.

Je rappelle que le compte épargne-temps a été crée par une loi de 1994, revisitée par notre Premier ministre, alors ministre des affaires sociales. Elle a permis sa monétisation, immédiate ou différée, par le biais d'investissements au sein de plans d'épargne retraite – PERP ou PERCO.

J'ai eu l'honneur de déposer une proposition loi permettant la simplification de ce dispositif, laquelle fut portée de façon collégiale par Hervé Novelli, devenu secrétaire d'État, Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques ainsi que par Jean-Michel Dubernard, l'ancien président de la commission des affaires sociales.

Au titre du parallélisme de formes, il me semblerait judicieux que les dépositaires de comptes épargne-temps puissent bénéficier du régime d'exonération prévu par le présent texte.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a repoussé cet amendement pour deux raisons. La première, c'est qu'il ne prévoit aucun encadrement par rapport aux durées légales. Imaginons un forfait d'une durée annuelle de 1 200 heures. Selon les propositions de Pierre Morange, la différence entre 1 200 et 1 607 heures serait considérée comme des heures supplémentaires, et, à ce titre exonérées. À l'évidence, tel n'est pas le but de la mesure.

La seconde, c'est qu'il y a d'ores et déjà des heures en stock dans le compte épargne-temps. Or la mesure ne vaut que pour l'exonération des heures supplémentaires à venir. Pour ces raisons, nous n'avons pas retenu cet amendement.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Pour les mêmes raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement. En outre, les sommes qui viennent alimenter le CET sont d'origine multiple et ne consistent pas exclusivement en la rémunération d'heures supplémentaires, en particulier celles à venir. Les comptes peuvent être alimentés par d'autres rémunérations. Dans ces conditions, la proposition qui est faite ne répondrait pas à l'objet du texte, qui est d'encourager le recours au travail supplémentaire, sa défiscalisation et la déduction d'un certain nombre de charges sociales.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 448 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 254 .

La parole est à M. Charles de Courson, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

Voilà un point extrêmement important dont nous avons longuement débattu en commission des finances. Dans le texte du Gouvernement, la défiscalisation est plafonnée non pas au taux réel mais au taux de la convention collective de branche ou, à défaut de convention collective, au taux légal, soit à 25 %. Cela pose un très gros problème dans les entreprises où les accords d'entreprise ont retenu des taux de majoration supérieurs au taux conventionnel ou au taux légal. Sur la feuille de paie, cela impliquerait en effet de distinguer dans le montant du salaire correspondant aux heures supplémentaires la partie exonérée, dans la limite du taux fixé par la convention de branche ou du taux légal, et un petit différentiel qui, lui, ne sera pas imposable.

Voyez l'extrême complexité de ce dispositif que nous sommes nombreux, à la commission des finances, à avoir soulignée. Plusieurs de nos collègues, dont Louis Giscard d'Estaing, ont d'ailleurs tenté de savoir quels documents supplémentaires seraient dans ces conditions nécessaires pour établir la déclaration annuelle des salaires et permettre le contrôle des inspecteurs des impôts.

Quand nous avons demandé pourquoi le Gouvernement avait prévu un dispositif si compliqué, il nous a été répondu qu'il s'agissait d'éviter les fraudes consistant pour les employeurs à s'entendre avec leurs salariés pour sur-rémunérer les heures supplémentaires – exonérées de cotisations sociales et d'impôt sur le revenu – en contrepartie d'un gel ou d'une modération des salaires. Mais, franchement, cela justifie-t-il de compliquer la vie des petites et moyennes entreprises et de rendre très difficile le contrôle de la base exonérée par les inspecteurs des impôts ?

Pour notre part, nous proposons de retenir le taux effectif, et non le taux conventionnel, dès lors qu'il est supérieur au taux légal. Cela simplifiera l'établissement de la déclaration annuelle des salaires et le contrôle fiscal. Tel est l'objet de l'amendement n° 254 .

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

La commission a longuement discuté de cet amendement pour finalement le rejeter. M. de Courson a très bien expliqué les choses, je n'y reviens pas.

Le problème n'est cependant lié à la fraude car les entreprises pourraient profiter du dispositif tout à fait légalement. Prenons le cas d'une entreprise, non soumise à un accord de branche, qui aurait décidé de majorer les heures supplémentaires de 100 %. Votre amendement lui permettrait de prendre une base majorée de 100 %, en l'absence d'un taux sur lequel s'aligner, comme cela est prévu par le texte : le salarié toucherait alors 200 %. Ce type de montage conduirait inévitablement à une substitution d'heures supplémentaires artificiellement majorées aux rémunérations normales. Nous ne pouvons accepter de tels comportements d'optimisation : le texte comprend un ensemble de dispositions visant précisément à éviter que le recours aux heures supplémentaires ne vienne se substituer à la négociation salariale. D'où la nécessité de cette disposition un peu complexe consistant à plafonner l'exonération au montant légal, qui sera différent de celui de l'entreprise.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je partage l'avis que vient d'émettre le rapporteur général.

J'ajoute que mon collègue Hervé Novelli a consulté les experts comptables qui, dans les PME ou les TPE, qui ont au maximum 20 salariés, mettent généralement en oeuvre les logiciels de paie. Ils nous ont indiqué qu'ils étaient en mesure d'introduire les modifications liées aux dispositions spécifiques prévues par le Gouvernement, malgré cet élément de complexité lié au souci d'éviter des mécanismes d'optimisation s'apparentant à un détournement de l'esprit du texte.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Charles de Courson.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de Courson

J'attire à nouveau l'attention du Gouvernement sur l'extrême complexité que cela introduirait dans les fiches de paie. L'adoption de cet amendement reviendrait à leur ajouter une ligne supplémentaire, voire deux : non seulement, il faudrait décomposer l'heure supplémentaire entre partie imposable et partie exonérée mais aussi en faire le récapitulatif. Or, je vous le rappelle, chers collègues, nous sommes passés, en cinquante ans, de fiches de paie à cinq lignes à des fiches comportant entre vingt-sept et trente-deux lignes selon les branches.

Par ailleurs, la tâche des inspecteurs des impôts sera rendue extrêmement complexe : ils devront revenir au contrat de travail, examiner les conventions collectives, retracer l'évolution des taux pour ne retenir que le taux prévu conventionnellement. Comme on le verra avec l'amendement de Louis Giscard d'Estaing, se pose de surcroît le problème d'un tableau supplémentaire nécessaire à la vérification, sans lequel le travail des inspecteurs serait presque impossible.

En outre, je ne crois pas qu'une entreprise puisse retenir un taux de majoration de 100 %. Si des abus existent, trouvons un dispositif pour sanctionner ceux qui s'en rendent coupables. Mais pourquoi empoisonner la vie de dizaines de milliers d'entreprises parce que, de temps en temps, l'une d'entre elles choisira d'optimiser le système ? Cela ne me paraît pas raisonnable. Je maintiens donc mon amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Nouveau Centre.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Jean-Pierre Soisson.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Soisson

À bien des égards, M. de Courson a raison. D'après ce que nous savons, le ministre du budget entend simplifier les fiches de paie. Or avec le dispositif proposé ici, nous allons vers une véritable complexification. À vouloir tout régler dans un seul texte, nous risquons d'assister à une multiplication des différends devant la justice. Évitons les précisions sans fin.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 254 .

(L'amendement n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 36 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 36 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 37 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il s'agit de réparer un oubli dans la rédaction initiale. Le plafonnement de la majoration prise en compte au titre de l'exonération doit couvrir non seulement les heures complémentaires réalisées dans le cadre d'accords de branche – avec un taux pouvant aller jusqu'à 33 % –, mais aussi les heures complémentaires réalisées dans la limite du dixième de la durée du contrat à temps partiel.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 37 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi d'un amendement n° 38 .

La parole est à M. le rapporteur général, pour le soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il s'agit là encore de réparer un oubli en introduisant un plafonnement de la majoration salariale prise en compte pour les heures assimilées aux heures supplémentaires réalisées par les salariés dans le cadre d'un forfait en heures sur une base annuelle

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. Alain Vidalies.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vidalies

Nous avons un peu de mal à comprendre ! La règle que le rapporteur et le Gouvernement soutiennent depuis le début de l'examen du projet est celle d'une application des dispositions à l'ensemble des salariés. Nous sommes intervenus plusieurs fois pour vous indiquer qu'il fallait prendre en compte de la situation particulière des salariés travaillant dans le cadre de forfaits horaires annualisés. Or cet amendement vise à limiter le montant de la majoration dont ils pourraient bénéficier, y compris sur le plan fiscal. Voilà une bien curieuse initiative.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

La parole est à M. le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Excusez-moi, monsieur Vidalies, si je n'ai pas été suffisamment clair. Il ne s'agit pas de plafonner le montant de la rémunération supplémentaire mais de plafonner le montant soumis à exonération, ce qui n'est pas pareil. Une entreprise pourra payer un salarié à un taux de 140 % quand l'exonération portera sur 125 %.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 38 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je suis saisi de trois amendements, nos 39 , 40 et 41 , pouvant faire l'objet d'une présentation commune.

La parole est à M. le rapporteur général, pour les soutenir.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces trois amendements ?

Debut de section - Permalienministre de l'économie

Avis favorable.

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 39 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 40 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Je mets aux voix l'amendement n° 41 .

(L'amendement est adopté.)

Debut de section - PermalienM. JEAN-MARIE LE GUEN, président

Ce soir, à vingt et une heures trente, troisième séance publique :

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, n° 4, en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat :

Rapport, n° 62, de M. Gilles Carrez, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan,

Avis, n° 61, de M. Dominique Tian, au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

Avis, n° 59, de M. Jean-Charles Taugourdeau, au nom de la commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire,

Avis, n° 58, de M. Sébastien Huyghe, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

Jean-Pierre Carton