commission Élargie
(Application de l'article 120 du Règlement)
Lundi 7 novembre 2011
La réunion de la commission élargie commence à vingt-deux heures.
projet de loi de finances pour 2012
Sécurité civile
Monsieur le ministre, M. Pierre Morel-A-L'Huissier, suppléant le président de la Commission des lois et rapporteur pour avis, et moi-même sommes heureux de vous entendre sur les crédits de la mission « Sécurité civile » pour 2012. L'organisation sera celle que vous connaissez déjà, à ceci près que la Conférence des présidents a fixé un temps d'une heure et demie pour cette commission élargie.
Je souhaiterais tout d'abord rendre hommage aux hommes et femmes qui ont, au cours de ces derniers jours, combattu le feu dans l'île de la Réunion, et parmi lesquels on dénombrait 51 blessés vendredi dernier.
Je me félicite de la réorganisation récente du ministère et de la création d'une direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, mieux à même de porter un regard d'ensemble sur un champ d'action très vaste. La diversité et la complexité croissante des missions de sécurité civile justifient en effet pleinement cette mesure.
Le budget pour 2012 est un budget de stabilité et de rigueur. De celle-ci, imposée par la situation budgétaire du pays, témoigne l'amendement déposé par le Gouvernement, qui réduit de 11,7 millions d'euros le budget global de la mission, sans pour autant interdire la poursuite de projets importants qui devraient permettre à terme une rationalisation encore plus poussée de la sécurité civile française. Je citerai, à titre d'exemple, la poursuite du déploiement d'ANTARES, ou encore de la refondation du service de déminage, une activité dont l'importance est souvent sous-estimée.
En tant que rapporteur pour avis de la Commission des lois, mon propos n'est pas d'émettre un jugement d'ensemble d'ordre financier et technique, mais plutôt de me pencher sur certains aspects particuliers, notamment sur les questions de gouvernance et de répartition des rôles au sein de l'ensemble complexe d'actions publiques qui constituent la sécurité civile.
Ainsi, monsieur le ministre, je souhaiterais tout d'abord que vous nous précisiez la répartition des rôles, en matière de gouvernance des services départementaux d'incendie et de secours, entre les conseils d'administration de ces derniers, les CASDIS, les présidents de conseils généraux et les préfets. Sait-on toujours qui décide ? N'observe-t-on pas parfois des « conflits de juridiction » ?
Dans le même ordre d'idées, pourriez-vous nous dire où en sont les relations entre l'Assemblée des départements de France et la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises ?
Toujours en matière de gouvernance, la manifestation du jeudi 3 novembre semblait révéler des divergences entre les différents organismes représentant les personnels des SDIS. Pourriez-vous nous préciser l'état du dialogue social, et plus précisément l'articulation entre le ministère d'une part, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers et les syndicats d'autre part ?
Par ailleurs, j'ai entendu, au cours des auditions que j'ai menées pour préparer cet avis, des critiques concernant l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers, qui est principalement financée par les collectivités territoriales. Pouvez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur cette question ?
L'explosion des secours à la personne, notamment en zone rurale, phénomène apparemment aggravé par la désertification médicale, semble aujourd'hui peser lourdement sur les moyens financiers des SDIS. Quelle est votre position sur le financement de ces structures ?
La polyvalence des moyens aériens, hélicoptères comme avions, a été plusieurs fois évoquée au cours des auditions comme un moyen intéressant de rationalisation des moyens. Pourriez-vous nous renseigner sur l'état d'avancement de ce dossier ?
Sur un sujet voisin, pourriez-vous nous informer de l'état des réflexions conduites sur la modernisation des moyens aériens de lutte contre les feux de forêts ?
Enfin, l'adoption de la loi du 20 juillet 2011 relative à l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires a fait, comme vous le savez, l'objet d'un large consensus politique au sein des deux assemblées. Je salue à ce propos votre implication et celle de vos services, notamment de la direction de la sécurité civile, dans l'adoption de ce qui était à l'origine une proposition de loi, dont vous aviez alors salué la qualité juridique. Pourriez-vous nous communiquer le calendrier de publication des décrets d'application prévus par ce texte et, plus généralement, nous informer de l'état d'avancement de sa mise en oeuvre ?
Je tiens tout d'abord, monsieur le ministre, à saluer vos efforts pour promouvoir l'action de l'État en matière de sécurité civile. Je veux également remercier les services de la direction de la sécurité civile pour leur taux de réponse exceptionnel au questionnaire budgétaire, qui a atteint cette année les 100 % !
À ce sujet, je veux d'abord souligner que la mesure de la révision générale des politiques publiques relative à l'optimisation de l'organisation et du fonctionnement de la direction de la sécurité civile, la DSC, a pris effet le 7 septembre dernier, avec la création de la direction générale de la Sécurité civile et de la gestion des crises, la DGSCGC. Cette direction générale résulte de la réorganisation des services de la direction de la sécurité civile, de la suppression de la direction de la prospective et de la planification de sécurité nationale, la DPPSN, et de la création d'un service du haut fonctionnaire de défense.
Je considère que cette réorganisation va dans le sens d'une meilleure gouvernance de la sécurité civile et devrait permettre une meilleure synergie opérationnelle entre la préparation aux crises et la gestion des événements.
La sécurité civile bénéficie d'un budget global de plus de 5,7 milliards d'euros, dont la charge est répartie entre l'État, à hauteur d'un milliard d'euros, et les collectivités territoriales, qui gèrent et financent les services départementaux d'incendie et de secours, à hauteur de 4,7 milliards d'euros.
Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit de porter les crédits de la mission « Sécurité civile »à 420,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 448,4 millions d'euros en crédits de paiement.
Les crédits demandés en 2012 pour le programme « Intervention des services opérationnels »s'élèvent à 265,1 millions d'euros en autorisations d'engagement – en hausse de 2 % – et à 270,1 millions d'euros en crédits de paiement – en hausse également, de plus de 2 %. L'augmentation uniforme des crédits de ce programme masque cependant de grandes disparités entre les actions.
Ainsi, l'action « Participation de l'État à la lutte aérienne contre les feux de forêts »connaît une diminution très importante de ses crédits en 2012 – moins 41,06 % en autorisations d'engagement et moins 36,14 % en crédits de paiement. À l'inverse, l'action « Interventions spécialisées des moyens nationaux terrestres »voit ses crédits fortement augmenter, de plus de 60 %, en autorisations d'engagement et crédits de paiement.
Sur le programme « Coordination des moyens de secours », les crédits demandés en 2012 s'élèvent à 155,3 millions d'euros en autorisations d'engagement – en forte baisse, de 22,45 % – et à 178,4 millions d'euros en crédits de paiement – en augmentation de 4,85 %. Les fortes variations observées sur l'action « Préparation et gestion des crises »– moins 84,12 % en autorisations d'engagement et plus 89,93 % en crédits de paiement – sont essentiellement dues à l'inscription de près de 9 millions d'euros de dépenses d'investissement pour financer le déploiement du système d'alerte et d'information de la population.
Au total, les évolutions constatées font apparaître une baisse très significative, de 8,6 % – soit de plus de 39 millions d'euros –, des autorisations d'engagement des deux programmes de la mission et une hausse de 3,1 % – soit de 13,6 millions d'euros – des crédits de paiement. J'y vois le signe d'une maîtrise des coûts permettant à la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises de contribuer à la réduction du déficit budgétaire.
L'État devrait, en outre, dépenser plus de 652 millions d'euros pour la sécurité civile dans les crédits des autres ministères.
En ce qui concerne les dépenses des services départementaux d'incendie et de secours, il apparaît que ces dernières ont connu une augmentation limitée à l'inflation en 2010 : près de 4,7 milliards d'euros ont ainsi été dépensés par les SDIS, selon leurs comptes de gestion pour 2010, ce qui représente une augmentation de 1,5 % par rapport à 2009. Je me réjouis de voir enfin mes appels à la modération des dépenses en passe d'être entendus.
En 2010, les effectifs des SDIS s'élevaient à 40 302 sapeurs-pompiers professionnels, y compris les services de santé et de secours médical, contre 40 095 en 2009, soit une augmentation de 207 emplois par rapport à l'année précédente. S'agissant des unités militaires, les effectifs de la brigade de sapeurs-pompiers de Paris s'élèvent en outre à 8 375 et le bataillon de marins pompiers de Marseille bénéficie d'un plafond d'emplois de 2 480 équivalents temps plein.
Les comptes de gestion 2010 montrent qu'en moyenne nationale les dépenses des SDIS représentent un coût de 80 euros par habitant, en légère augmentation par rapport à 2009 – 79 euros.
À ce titre, la transposition du nouvel espace statutaire de la catégorie B à la filière des sapeurs-pompiers professionnels est potentiellement source de dépenses supplémentaires – 70 millions d'euros par an – pour les SDIS. Au regard de ce coût, le ministère de l'intérieur a décidé de soutenir les élus locaux, responsables des SDIS, dans leur effort de maîtrise des dépenses, en transmettant aux organisations syndicales des propositions alternatives garantissant une meilleure prise en compte du contexte budgétaire contraint des départements. Je salue l'effort d'accompagnement du Gouvernement à l'égard des collectivités pour favoriser une plus grande de maîtrise des dépenses des SDIS. Ma première question a trait à ce sujet d'actualité : pouvez-vous, monsieur le ministre de l'intérieur, rappeler la position du Gouvernement sur cette réforme statutaire et en préciser les modalités d'application, notamment en termes de conséquences sur les dépenses des SDIS ? Je rappelle en effet que, depuis 2001, date de l'achèvement de la départementalisation des SDIS, les comptes de ces derniers ont augmenté de 58,9 %. Je souhaite donc que la modération constatée en 2010 se poursuive dans les années à venir.
Ma deuxième question concerne l'organisation des modes de garde dans les casernes. Depuis plusieurs années, vous le savez, je suis persuadé que l'organisation du temps de travail sur la base de gardes de vingt-quatre heures engendre des coûts supérieurs aux autres modes de garde sans que cela participe pour autant à un meilleur service rendu aux populations. De mon point de vue, il serait urgent de généraliser le principe de la garde de huit heures. Il ne s'agit bien sûr nullement de dénigrer le rôle et l'implication des sapeurs-pompiers dans leur mission, dont l'importance est unanimement reconnue. Mais, dans le contexte général de déficit des finances publiques que connaît notre pays, il convient de faire en sorte que la gestion des SDIS soit, de ce point de vue, la plus efficiente possible.
Les éléments statistiques transmis par la DGSCGC montrent la grande variété des modes de garde selon les départements et confirment que les gardes de vingt-quatre heures sont plus coûteuses. En effet, dans les neuf départements où le mode de garde est toujours organisé sur des périodes de vingt-quatre heures, la dépense moyenne par habitant est de 84,66 euros. À l'inverse, dans les huit départements où le mode de garde de vingt-quatre heures n'est jamais mis en oeuvre, la dépense moyenne par habitant est nettement moindre, de l'ordre de 76,54 euros. Je rappelle que la moyenne nationale est de 80,12 euros par habitant.
Je rappelle aussi que sur la base de gardes de vingt-quatre heures, les sapeurs-pompiers professionnels effectuent en moyenne 95 jours de garde par an. Cela leur permet d'être hors de leur lieu de travail 270 jours par an. Est-il réellement concevable d'effectuer son travail de façon optimale quand on l'exerce un si petit nombre de jours ? De plus, rien n'indique dans le décret de 2001 relatif au temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels, pas plus que dans les autres textes réglementaires, que l'on doive faire des gardes de vingt-quatre heures ; au contraire, le décret de 2001 les considère comme l'exception.
Dans ces conditions, ne serait-il pas possible d'évoluer vers des régimes de garde plus souples de huit heures, correspondant mieux à la sollicitation opérationnelle tout au long de la journée et permettant une présence plus fréquente des sapeurs-pompiers professionnels sur leur lieu de travail ?
Enfin, ma troisième et dernière question concerne les efforts à entreprendre pour favoriser la mutualisation des achats entre les SDIS. Là encore, les sources d'économies sont nombreuses. J'estime qu'il faut aller plus loin dans la voie de l'harmonisation des équipements afin de permettre l'achat groupé. Que prévoit le Gouvernement pour favoriser les actions en ce domaine et, d'une manière générale, quelles sont les mesures envisagées pour une meilleure rationalisation des charges ?
Le rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle suggère d'assurer le remboursement au coût réel des activités de transport de malades effectuées par les SDIS en cas de carence des ambulanciers privés. En effet, le montant du remboursement des transports de malades effectués par les SDIS est, depuis 2006, fixé à 105 euros. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous indiquer si ce montant sera réévalué prochainement et, si oui, dans quelle proportion ?
D'autre part, un amendement du Gouvernement vise à réduire de quelque 12 millions d'euros les crédits de la mission « Sécurité civile ». Quels sont les critères qui ont présidé au choix des postes de dépenses soumis à cette réduction ?
Monsieur le président, le montant du remboursement des transports de malades effectués par les SDIS en cas d'indisponibilité des services privés sera revalorisé pour être porté à 112 euros.
Quant à l'effort de réduction des dépenses de 12 millions – 11,7 millions plus exactement – dont vous parlez, il se décompose de la façon suivante : sur le programme « Coordination des moyens de secours », le décalage du calendrier de déploiement du nouveau système d'alerte et d'information des populations génère 2,5 millions d'économies sur l'exercice ; sur le programme « Intervention des services opérationnels », des économies sont réalisées grâce à la suppression de l'acquisition d'un aéronef de coordination et de liaison – 4 millions –, à la suppression du solde des crédits d'acquisition d'un hélicoptère Dauphin remplacé par un hélicoptère EC 145 destiné aux Antilles, moins coûteux et plus adapté aux besoins, à une minoration de 1 million des achats de produits retardants pour lutter contre les feux de forêts et à une réduction de 0,2 million des crédits de fonctionnement de la direction générale.
Monsieur Morel-A-L'Huissier, la création de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, que vous avez saluée, a été motivée par une volonté de simplifier l'organisation du ministère de l'intérieur pour plus d'efficacité et moins de dépenses. De plus, il nous a semblé plus opérationnel de faire en sorte que la planification soit mise en oeuvre par la structure même qui en fixe les modalités.
En matière de gestion des crises, nous n'avons pas de relations organiques avec l'Assemblée des départements de France pour la simple raison que celle-ci représente un ensemble de collectivités locales alors que les crises sont, le plus souvent, localisées, même si elles peuvent toucher plusieurs départements, voire plusieurs régions. Cela dit, l'ADF est un interlocuteur privilégié pour tout ce qui concerne l'organisation générale des services de secours en France et les relations s'organisent au sein de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, qui s'est notamment consacrée au programme « Ambition volontariat ».
S'agissant de la refonte de la filière des sapeurs-pompiers, des rencontres sont prévues avec l'ADF – je rencontrerai moi-même son président – afin de choisir les meilleures formules pour la profession. Nous sommes engagés dans cette réforme, monsieur Ginesta, avec les représentants de la dynamique des acteurs de la sécurité civile – c'est ainsi que se sont désignés les participants à cette concertation. Il y a quelques semaines, a été signé un protocole permettant de réorganiser la filière professionnelle, qui donne satisfaction à la plupart des organisations représentatives. Ce protocole, qui a d'ailleurs été élaboré sous l'égide de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers professionnels, n'aura qu'un effet limité sur le budget des SDIS : 25 millions d'euros sur cinq ans, soit un montant inférieur à celui que l'ADF semblait pouvoir accepter.
S'agissant de la gouvernance des SDIS, M. Morel-A-L'Huissier a posé la question des rapports entre le président du conseil général, le préfet et le président du CASDIS. J'imagine qu'il avait à l'esprit des réalités pratiques qui rendent compliquée l'application des textes, mais la gouvernance des SDIS est clairement définie par le code général des collectivités territoriales. Les SDIS sont des établissements publics qui, pour emploi, sont placés sous l'autorité du maire ou du préfet dans le cadre de leurs pouvoirs respectifs de police. Le maire et le préfet disposent des moyens des SDIS pour assurer les missions de prévention. Ces services sont administrés par un conseil d'administration dans lequel le département a la majorité des trois cinquièmes. Le président du conseil général préside le conseil d'administration ou fait désigner l'un des membres du conseil général pour le présider, l'État ne disposant que d'une voix consultative. Globalement, j'ai le sentiment d'un équilibre qui assure une gouvernance satisfaisante, en particulier parce qu'elle garantit à la population un service de secours de très grande qualité.
L'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers est encore jeune puisqu'elle a été créée il y a sept ans seulement, mais nous avons trouvé là un équilibre satisfaisant entre les collectivités départementales et l'État. Contrairement à ce que craignaient les collectivités, non seulement l'Etat ne se retire pas, mais il a maintenu son engagement budgétaire au niveau de 4,5 millions d'euros en section de fonctionnement et a porté son engagement à 5,2 millions d'euros pour le remboursement des emprunts en section d'investissement. L'École s'attache à ce que ses enseignements soient toujours adaptés aux besoins des secours. Trois audits sont ainsi en cours pour permettre, si besoin est, de réorienter le contenu pédagogique et la gouvernance de l'École.
La question des moyens aériens est effectivement très préoccupante. J'ai récemment constitué un groupe de travail pour y réfléchir et faire des propositions afin que des décisions soient prises avant la fin de l'année. Les appareils sont vieillissants – la moyenne d'âge est de vingt-cinq ans pour les Trackair et de quatorze ans pour les Canadair – et, même s'ils font l'objet d'une maintenance extrêmement attentive et sont toujours en état de fonctionnement, nous devons nous préoccuper de les remplacer, éventuellement par des avions différents d'ailleurs. Nous ne pourrons ainsi pas forcément obtenir de nouveaux Canadair, même si nous estimons que ce sont les plus adaptés. Je rendrai compte à vos commissions de l'état de nos réflexions sur ce sujet. J'ajoute que nous devons aussi réfléchir à l'emploi de moyens nouveaux qui n'étaient jusqu'à présent pas utilisés par la sécurité civile. Je pense aux drones pour un guet aérien efficace ou à des appareils à réaction, mais ce sont toujours des choix techniques complexes qui justifient les études actuellement en cours.
M. Ginesta a évoqué les fortes variations du budget. Elles sont notamment dues à la mise en place d'un nouveau service d'alerte et d'information de la population. L'année 2011 a été marquée par un premier effort qui s'est traduit par des dépenses plus importantes. Sept appels d'offres ont déjà été réalisés pour que ce service puisse disposer non seulement de nouvelles sirènes, mais aussi de moyens plus modernes de communication – affichages sur des panneaux lumineux de circulation et diffusion de messages par téléphone portable pour alerter très rapidement la population des zones menacées.
S'agissant de la mutualisation des achats, l'État ne peut que servir de catalyseur pour rendre les services qu'on lui demande puisque la compétence incombe aux services départementaux d'incendie et de secours. Cela étant, la mutualisation avance : en 2010, 450 ambulances ont ainsi été achetées par l'intermédiaire de l'UGAP, les SDIS ayant regroupé leurs commandes.
Quant au régime de garde des sapeurs-pompiers, selon l'avis technique qui prévaut au ministère de l'intérieur, le bon système est celui, qualifié de mixte, qui permet d'assurer un bon équilibre entre le jour et la nuit.
Enfin, s'agissant de la loi du 20 juillet 2011, à laquelle M. Morel-A-L'Huissier est d'autant plus attaché qu'elle porte son nom, tous les décrets d'application seront publiés avant la fin du mois de janvier.
Un rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle sur le financement des SDIS paru en 2009 faisait état d'une croissance des dépenses peu soutenable dans le contexte actuel de crise des finances publiques : plus 48 % en sept ans. Les raisons de cette augmentation sont bien connues : explosion des secours à personne ; évolutions généreuses du statut des sapeurs-pompiers pas toujours concertées en amont avec les financeurs, notamment l'ADF, quoi que vous en disiez, monsieur le ministre ; exigences posées, en termes de délai d'intervention, par les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques – SDACR – et par les règlements opérationnels. Monsieur le ministre, qu'envisagez-vous de faire pour contenir cette évolution et faciliter le financement des SDIS ? Ne serait-il pas possible notamment de modifier la part respective que prennent les départements et les communes dans ce financement ? En moyenne, les départements financent en effet 56 % du budget des SDIS, contre 44 % donc pour les communes, sachant que dans mon département cette répartition est encore plus défavorable au département – 77 % du budget du SDIS de l'Ain est financé par le conseil général et 23 % par les communes. En outre, la part des communes en valeur relative ne fait que diminuer puisqu'elle est indexée uniquement sur l'inflation alors que les dépenses totales augmentent plus rapidement que celle-ci. Quelle est la position du Gouvernement sur ce point ?
Par ailleurs, que prévoyez-vous, monsieur le ministre, pour le Fonds d'aide à l'investissement (FAI) des SDIS dans le projet de budget pour 2012 et quelles priorités assignez-vous à ce fonds pour l'année prochaine ?
Enfin, pouvez-vous nous donner des informations sur le déploiement, en voie d'achèvement, du système ANTARES ?
Les crédits affectés à la mission dont nous débattons sont de 400 millions d'euros alors que les collectivités participent à hauteur de 5 milliards d'euros au fonctionnement des services de sécurité civile, qui relève d'une mission régalienne. Il y a là une anomalie à laquelle il faudra bien un jour mettre un terme.
Le programme triennal pour la période 2011-2013, adopté par le Parlement en 2010, faisait apparaître, pour l'année 2012, 375 millions d'euros en autorisations d'engagement et 403 millions d'euros en crédits de paiement. Or, ce projet de budget fait état de sommes différentes : 430,3 millions en autorisations d'engagement et 448,4 millions en crédits de paiement. Pourquoi cette différence ?
Pourquoi les crédits inscrits au titre 2 relatif aux dépenses de personnel diminuent-ils de 35 % entre 2010 et 2012 – 244,5 millions en 2010 contre 159,5 en 2012 ?
Comme en 2011, aucun crédit n'est prévu dans le programme 128, « Coordination des moyens de secours », pour financer les dépenses de personnel en cas de crise. Je suppose que vous allez me répondre, comme vos prédécesseurs, que vous attendez la crise pour procéder à des virements de crédits. Cela ne nous semble pas de bonne méthode ni gage de sincérité budgétaire !
Les récentes manifestations de sapeurs-pompiers professionnels dont a parlé Pierre Morel-A-L'Huissier sont dues au fait que la filière sapeurs-pompiers ne reçoit pas les réponses statutaires qu'elle est en droit d'attendre. Il y a deux ans, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale avait produit un rapport qui avait suscité l'intérêt de votre prédécesseur et du précédent directeur de la Sécurité civile. Quant la filière sapeurs-pompiers fera-t-elle l'objet de dispositions précises de la part de votre ministère ?
Après Georges Ginesta, j'évoquerai à mon tour le rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle dont nous sommes co-auteurs avec Thierry Mariani, et qui va être complété par un rapport de la Cour des comptes sur les dépenses des services départementaux d'incendie et de secours. Lorsque nous avons produit ce rapport, le Gouvernement l'a jugé fort intéressant. J'aimerais savoir si cet intérêt était de pure forme, car malgré l'optimisme dont vous faites preuve, monsieur le ministre, la gouvernance n'est pas satisfaisante et nous le soulignions dans ce rapport. Est-ce parce que la Fédération nationale des sapeurs-pompiers – qui ne regroupe d'ailleurs pas que des professionnels – est hostile aux conclusions de ce rapport que nos propositions n'ont toujours pas été suivies d'effet à ce jour ?
Je terminerai par une question que je suis malheureusement amené à reposer chaque année faute de voir le problème réglé. Les services départementaux d'incendie et de secours n'échappent pas à la règle selon laquelle les administrations sont tenues de compter dans leur personnel au moins 6 % de personnes handicapées. Comme on ne peut imaginer un sapeur-pompier professionnel handicapé, les personnes concernées ne peuvent occuper que des postes administratifs, dont le nombre est insuffisant. Cela pose un vrai problème, qui trouverait une solution si l'on exonérait de taxation les services départementaux n'atteignant pas le pourcentage voulu, comme c'est le cas des entreprises du secteur privé exerçant des métiers risqués.
Sous l'impulsion de notre rapporteur pour avis, Pierre Morel-A-L'Huissier, le Parlement a adopté une loi confortant le statut des sapeurs-pompiers volontaires. Comment les objectifs que nous avons unanimement définis vont-ils se traduire dans les crédits pour 2012 ?
À l'heure où de graves inondations touchent une de nos régions, j'appelle votre attention sur la nécessité d'inclure une cartographie des risques naturels dans tous les documents d'urbanisme opposables, même si, en théorie, une telle obligation existe déjà. Bien des drames pourraient être évités si, comme à la Faute-sur-Mer, des maisons n'étaient pas construites en zone inondable. Il faut se montrer intransigeant à l'égard de tels comportements.
Enfin, qu'en est-il de la réforme souvent évoquée du régime des catastrophes naturelles ? Allons-nous maintenir le dispositif actuel, qui a fait ses preuves ? Si on doit le remplacer, combien cela va-t-il coûter ? Un nouveau système serait-il plus efficace ?
La semaine dernière, les sapeurs-pompiers ont manifesté leur mécontentement.
Le 17 mars 2001, à Aix-en-Provence, lors de l'inauguration de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers, l'ENSOSP, Nicolas Sarkozy s'était engagé à moderniser le statut des sapeurs-pompiers, comme le demandaient toutes les organisations syndicales. Six mois plus tard, le 13 septembre, l'engagement s'est traduit lors du 118e congrès national de la profession par la signature d'un protocole d'accord relatif à la réforme de la filière des sapeurs-pompiers professionnels. Mais ce protocole a été signé avec quatre organisations syndicales minoritaires et une association loi de 1901. Les premières représentent à peu près 39 % des voix au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale ; quant à la seconde, la Fédération nationale, elle n'a pas vocation à participer aux négociations syndicales avec le Gouvernement. D'ailleurs, à quel titre est-elle associée et consultée ?
C'est dans ce contexte que les syndicats représentatifs ont quitté, le 20 septembre, une séance de travail du Conseil supérieur, dénonçant le déni de démocratie et le recul social que constitue ce protocole. Vous ne respectez pas la légitimité, issue des élections, des organisations syndicales représentatives. Vous préférez le lobbying. Et vous tentez d'imposer une réforme sans tenir compte de l'avis de la majorité syndicale.
L'enjeu porte sur les carrières et sur l'avenir de la filière : ainsi est-il créé un recrutement sans concours au grade de sapeur-pompier de deuxième classe, en plus du recrutement, par concours, au grade de sapeur-pompier de première classe. Le souhait de promouvoir les sapeurs-pompiers volontaires est louable mais ils disposent déjà d'un accès privilégié au concours, depuis 2001. Avec ce protocole, vous allez introduire des discriminations au sein du corps des sapeurs-pompiers professionnels, tant en matière de recrutement que de rémunérations, qui peuvent varier pour un même emploi, en particulier dans les catégories B et C.
Les sapeurs-pompiers professionnels ne sont pas les seuls à manifester leur mécontentement. Les présidents de conseil général les rejoignent, comme en témoigne la vive réaction de Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, qui déplore que les exécutifs départementaux aient été eux aussi tenus à l'écart alors qu'ils sont les employeurs des personnels des SDIS et qu'ils financent les dépenses de ces services.
Monsieur le ministre, vous évoquez dans la présentation de votre budget les nécessaires synergies entre acteurs nationaux et locaux de la sécurité civile. Ce que vous proposez est louable et sympathique, mais il ne faudrait pas que cela se limite à un effet d'annonce. Je vous prendrai donc au mot : cela implique de remettre à plat la réforme, d'engager de vraies négociations avec les organisations syndicales représentatives, en association avec les conseils généraux, de façon à rétablir la démocratie sociale et syndicale. Les syndicats sont disponibles, et je sais que vous vous apprêtez à les recevoir.
M. de la Verpillière a souligné l'augmentation sensible des dépenses des SDIS. Mais depuis trois ans, ces dépenses se sont stabilisées : elles n'évoluent pratiquement plus qu'au rythme de l'inflation. Ainsi, alors que leur progression avait été de 10 % en 2004 et de 9 % en 2005, elle a été de 0,7 % en 2006, de 2 % en 2007, de 6 % en 2008, de 4 % en 2009 et de 1,5 % en 2010.
Le déploiement du réseau ANTARES est désormais très largement avancé puisqu'on devrait, conformément aux prévisions, atteindre un taux de 65 % à la fin de l'année 2011. En ce qui concerne le Fonds d'aide à l'investissement, les crédits sont stables : les dépenses étaient de 21,4 millions d'euros en 2011, et la même somme est prévue en 2012. De même, les crédits consacrés à ANTARES seront à peu près identiques l'année prochaine, soit 23 millions d'euros.
Notre souci est d'éviter que le FAI ne soit consacré à des subventions d'investissements « tout venant » pour les services départementaux d'incendie et de secours : nous voulons que ces crédits aillent à des équipements structurants, dans le cadre d'une mise en oeuvre nationale de plans de secours, afin de financer des matériels rares ou susceptibles de favoriser des synergies entre les services départementaux.
Quant à la répartition des dépenses entre les communes et les départements, c'est-à-dire la fixation des contingents communaux, elle relève des conseils d'administration des SDIS. L'État peut donc difficilement modifier les modalités d'exercice de cette compétence.
M. Derosier regrette que le financement des services d'incendie et de secours soit à la charge des collectivités locales, mais après tout, c'est la loi !
S'agissant des filières des sapeurs-pompiers professionnels, j'ai été interrogé sur le délai de mise en oeuvre de la réforme. L'intervention de M. Gerin a montré combien la question était complexe, mais – et j'insiste sur ce point – il y a eu une vraie négociation. Et contrairement à ce qui a été dit, l'Assemblée des départements de France y a été associée, puisqu'elle comptait un représentant permanent lorsque la concertation a été effectuée. Il est également inexact d'affirmer que les syndicats représentatifs n'ont pas été parties prenantes : le principal d'entre eux a signé le protocole.
La question est désormais de savoir ce que veulent les départements, qui financent les SDIS : dépenser 80 millions d'euros, ou seulement 25 millions ? L'État, dans cette affaire, n'est qu'un intercesseur auprès de la Conférence nationale des services d'incendie et de secours – laquelle, monsieur de La Verpillière, est largement composée de représentants des départements, puisque quatorze conseillers généraux y siègent –, et il appartient aux collectivités de décider ce qu'elles veulent faire. De son côté, l'État juge les réformes esquissées par le protocole bienvenues pour la profession, non seulement du point de vue des intérêts légitimes des sapeurs-pompiers professionnels, mais aussi de celui de la qualité du service rendu à la population.
M. Derosier a également cru déceler une incohérence dans les chiffres. La LOPPSI 2009-2013 est strictement respectée, mais le plan de relance avait permis le financement anticipé de nouveaux hélicoptères pour l'outre-mer, après le rapatriement d'appareils vers des bases métropolitaines effectué conformément au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale. Ce fait peut expliquer certains décalages.
Il est vrai qu'une question de principe se posait quant à l'emploi des handicapés parmi les sapeurs-pompiers. Toutefois, un certain nombre d'entre eux, bien qu'inaptes, sont affectés à des postes opérationnels, si bien qu'en octobre 2009, le ministre du budget et de la fonction publique a accepté un assouplissement de la règle en vigueur, consistant à considérer ces pompiers comme employés dans des fonctions réservées à des travailleurs handicapés.
M. Hunault a raison d'insister sur l'importance des plans de protection contre les risques naturels, notamment en zone maritime. On observe une augmentation régulière des dépenses liées à ces plans : en 2011, elles auront atteint 19,7 millions d'euros, dont les trois quarts couvertes par des crédits du ministère de l'environnement et du développement durable. En 2012 et 2013, l'élaboration des plans de protection sera une priorité absolue – lors de son déplacement sur les lieux de la tempête Xynthia, le Président de la République avait fixé pour accomplir ce travail un délai maximal de trois ans. Seront couvertes, en particulier, 303 communes identifiées comme prioritaires. Bien entendu, il faut absolument que ces plans puissent être incorporés dans les plans d'urbanisme. Les services de l'État y veilleront avec le plus grand soin.
La Direction générale de la sécurité civile – qui regroupe désormais non seulement la sécurité civile proprement dite, mais aussi son pilotage et notamment la coordination des acteurs – est désormais l'interlocuteur privilégié des SDIS. Elle définit donc la doctrine d'emploi de 250 000 sapeurs-pompiers civils et militaires, ainsi que leurs conditions de travail et de rémunération, et anime la politique nationale en faveur du volontariat des soldats du feu – une action qui se développe depuis plusieurs années.
Les sapeurs-pompiers volontaires sont 204 000, soit 80 % des effectifs. Ils ont librement choisi de consacrer, parallèlement à leur vie privée et professionnelle, une partie de leur temps à se former et à intervenir afin de porter secours et assistance à leurs compatriotes. Parmi eux, 55 % ont moins de 35 ans et 11 % sont des femmes ; 41 % travaillent dans le secteur privé, 33 % dans le secteur public. Le problème est de leur permettre de concilier activité professionnelle et volontariat, c'est-à-dire de les rendre disponibles pour des interventions grâce à des autorisations d'absence délivrées par leur employeur.
Des actions sont déjà menées auprès des entreprises pour les convaincre d'accepter d'engager des sapeurs-pompiers, qui peuvent contribuer à la sécurité de leurs établissements – ce sont en effet les premiers maillons de la chaîne de secours lors des interventions, ayant reçu la formation adéquate en matière de sécurité. Les entreprises peuvent ainsi bénéficier de quelques avantages – une réduction des primes d'assurance, par exemple.
Des conventions de disponibilité sont proposées aux employeurs publics et privés. Elles sont librement négociées pour s'assurer de la compatibilité de la disponibilité avec les nécessités du fonctionnement de l'entreprise comme de celui du service public. Pouvez-vous faire le point sur le nombre de signatures obtenues sur l'ensemble du territoire et sur les meilleures méthodes pour augmenter leur nombre ?
Les SDIS, dont nous parlons beaucoup ce soir, sont confrontés à deux sortes de difficultés.
La première est d'ordre budgétaire. Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, qu'il n'est pour l'instant pas question de revoir le mode de financement de ces services, afin de pérenniser leurs missions de sécurité civile, qui impliquent naturellement la gratuité des secours ?
La deuxième difficulté tient à la fragilité du volontariat : comme peuvent l'observer les élus locaux, les salariés ont du mal à se rendre disponibles, notamment en semaine, lorsque les interventions sont les plus nombreuses. Une solution pourrait être d'intervenir auprès des employeurs publics – l'État, les collectivités locales –, qui ne contribuent plus pour la plus grande part au volontariat alors que, jadis, beaucoup d'employés communaux étaient également sapeurs-pompiers volontaires.
Cette fragilité pourrait conduire, demain, à une diminution de la couverture opérationnelle ou à une augmentation du recrutement de sapeurs-pompiers professionnels, ce qui aggraverait encore les difficultés financières des SDIS.
Ne pourrait-on pas envisager d'accorder davantage de facilités aux employeurs publics qui rendent plus disponibles les sapeurs-pompiers volontaires ?
Je souhaite appeler votre attention sur les conséquences que pourrait avoir sur le statut des sapeurs-pompiers volontaires la directive 200388CE, relative au temps de travail. Alors que le Parlement a eu à coeur de renforcer ce statut, la réglementation européenne risque, à l'inverse, de lui porter un coup fatal en assimilant l'activité des pompiers à un travail salarié, avec encadrement du temps d'activité – prévoyant notamment onze heures consécutives de repos journalier – et versement d'un salaire. Cette directive semble méconnaître la façon dont est organisée en France, mais également dans d'autres pays européens, la chaîne de secours, qui s'appuie depuis toujours chez nous sur l'engagement volontaire.
L'assimilation à un travail salarié de l'activité des sapeurs-pompiers volontaires, si elle se confirmait par une révision de la législation en vigueur, engendrerait un coût certainement insupportable pour les collectivités territoriales. Elle conduirait inévitablement à une désorganisation de nos services de secours. Face à cette situation, quelle est la position du Gouvernement ? Comment peut-on faire valoir les spécificités du dispositif de secours français ? Comment conforter et encourager le volontariat ?
L'actualité ne cesse de nous rappeler l'importance et le rôle éminent joué par ces femmes et ces hommes qui, au péril de leur vie, se mettent au service de la collectivité et font face aux risques, comme cela a été le cas ce week-end dans le sud-est de la France. Nous avons d'ailleurs une pensée pour toutes les populations des communes qui viennent une nouvelle fois d'être frappées.
Le rapport de Pierre Morel-A-L'Huissier précise que la stratégie de renouvellement de la flotte de bombardiers d'eau sera assortie d'un projet de modèle économique. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce que pourrait être ce modèle, ou est-il encore trop tôt ?
Depuis des années, on envisage le déplacement de la base aérienne de Marignane vers un autre lieu. Deux sites sont envisagés : celui de Nîmes ou, plus probablement, la base aérienne de Salon-de-Provence. Il y a quelques mois, vous m'avez indiqué qu'une mission travaillait sur ce projet. Où en est-on ?
Comme le note dans son rapport notre collègue Ginesta, on assiste depuis 2005 à une réduction du nombre de sapeurs-pompiers volontaires. Cela suscite notre inquiétude, non seulement parce qu'ils assurent la sécurité dans la plus grande partie du monde rural, mais aussi parce qu'il y a là un modèle économique beaucoup plus avantageux, me semble-t-il, que celui des sapeurs-pompiers professionnels.
Une formule tend à se développer dans ma circonscription. Elle consiste, pour le centre de secours situé généralement dans le chef-lieu de canton, à accueillir des volontaires issus de communes éloignées, à leur verser une astreinte afin de s'assurer de leur présence sur place, et à rémunérer l'intervention quand celle-ci a lieu. Est-il possible de généraliser un tel système, susceptible d'attirer des volontaires ne résidant pas à proximité immédiate du centre de secours ?
D'autre part, comme vous l'avez indiqué, nous assistons depuis trois ou quatre ans à une stabilisation bienvenue des budgets des SDIS. La politique volontariste menée actuellement en matière de sécurité routière, outre qu'elle a entraîné un vrai progrès de civilisation, ne représente-t-elle pas également un facteur structurel de stabilisation de ces budgets, dans la mesure où les sapeurs-pompiers sont moins souvent amenés à intervenir sur la route ? Est-il possible de mesurer cet autre effet positif de la politique de sécurité routière ?
Georges Ginesta a appelé de ses voeux une meilleure organisation des sapeurs-pompiers professionnels et une optimisation de leurs heures de travail. La révision de la directive « temps de travail » ne pourrait-elle pas constituer une réponse ? Où en sont les travaux en ce domaine ?
Cela étant, je fais mienne la préoccupation exprimée par François Rochebloine au sujet du volontariat.
Dans les territoires ruraux, les sapeurs-pompiers volontaires assument l'essentiel de la mission de sécurité, à un coût relativement moins élevé que celui des professionnels. Or la préservation de ce réseau dépend à mon avis de deux facteurs essentiels.
Le premier est la disponibilité. Dans le Jura, nous avons travaillé à la mise en place du NGIA, le nouveau gestionnaire informatique de l'alerte, grâce au déploiement d'ANTARES, mais aussi à un logiciel permettant de trouver à tout moment des volontaires susceptibles d'armer un véhicule de secours. De même, la prestation de fidélisation et de reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires – PFR – représente une avancée incontestable.
Mais le deuxième facteur pose un réel problème : c'est l'état du casernement, parfois indigne. Il serait sans doute préférable d'y remédier plutôt que d'accorder une revalorisation des rémunérations que ne réclament pas les intéressés.
J'ai bien compris que le Fonds d'aide à l'investissement avait plutôt vocation à financer l'achat d'équipements spécifiques, mais il intervient sans cesse au bénéfice des mêmes gros centres de secours. Ne pourrait-on pas envisager de lancer une opération de soutien au bénéfice des départements ayant la volonté de mettre des locaux dignes à la disposition de leurs sapeurs-pompiers volontaires ?
Fort légitimement, beaucoup d'intervenants ont dit leur intérêt pour les sapeurs-pompiers volontaires et souligné la place que ceux-ci tiennent dans notre dispositif de secours. Il est vrai que le volontariat est au coeur de notre système national de sécurité civile et que 80 % des 250 000 sapeurs-pompiers de France sont volontaires. Ensemble, ils réalisent 70 % des interventions effectuées sur l'ensemble du territoire. Dans ces conditions, tout le monde ne peut qu'avoir la volonté de maintenir un niveau de volontariat à la hauteur des besoins de notre pays.
Monsieur Le Fur, on ne constate plus de baisse du nombre de sapeurs-pompiers volontaires depuis deux ans : après une légère érosion observée dans le passé, les effectifs se sont stabilisés à 196 000 personnes.
Pour maintenir ce volontariat, au-delà des accords négociés avec les employeurs qu'a évoqués M. Proriol, le législateur a mis en place plusieurs outils. Le ministère a ainsi l'intention de mener en 2012 une campagne d'information et d'accompagnement des SDIS et des employeurs pour que le dispositif efficace et simple de la loi relative au mécénat, beaucoup plus favorable que les dispositifs d'exonération de charges, soit davantage utilisé.
Nous allons aussi poursuivre la promotion du label « employeur partenaire des sapeurs-pompiers », qui sera simplifié. Chacun se rend bien compte que, pour les entreprises, il constitue plus qu'un symbole : un élément de qualité, permettant à l'entreprise de se présenter comme citoyenne et d'améliorer son image auprès de ses clients.
D'autres initiatives sont prises. Vous avez évoqué, monsieur Le Fur, une action particulière au département des Côtes-d'Armor. Je précise d'emblée que, dans la mesure où elle n'est pas contraire à la loi, elle est autorisée.
Des efforts importants sont également menés auprès des jeunes. Je salue notamment ceux de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers, qui a beaucoup développé au sein des SDIS, avec un engagement très fort de ceux-ci, la formule des jeunes sapeurs-pompiers, consistant à faire en sorte que des jeunes s'engagent de façon précoce – et ceux qui le font sont généralement très enthousiastes.
Nous essayons aussi de mettre en valeur l'engagement des jeunes par des habilitations, ou en valorisant cet engagement dans leur cursus au sein de l'éducation nationale.
A par ailleurs été développée, dans le cadre de la filière du baccalauréat « sécurité », la branche sapeurs-pompiers ou sécurité civile, ce qui va également dans le bon sens.
Quant à la directive communautaire concernant le temps de travail, elle soulève en effet un problème qu'il convient de régler. L'un des points forts de la loi que vous avez votée sur la proposition de M. Morel-A-L'Huissier est précisément de faire reconnaître la spécificité des sapeurs-pompiers volontaires et de convaincre que leur existence est la condition de la préservation et de la qualité de notre service de secours.
Si cette directive s'appliquait telle quelle, il faudrait recruter 65 000 sapeurs-pompiers professionnels, ce qui entraînerait environ 2,5 milliards d'euros de dépenses supplémentaires pour les collectivités locales. Cela n'est guère envisageable. Mais il faut aussi prendre en compte le coût moral pour la nation : nous perdrions cette richesse extraordinaire que constitue l'engagement citoyen dans le secours de nos compatriotes.
La loi que vous avez votée a apporté beaucoup dans la définition du régime de travail des sapeurs-pompiers volontaires. Le Gouvernement est décidé à tout faire auprès de l'Union européenne pour que ceux-ci soient exclus de la directive sur le temps de travail. Nous ne sommes d'ailleurs pas le seul pays concerné et la Commission européenne considère plutôt favorablement notre position. Nous devons néanmoins rester prudents, même si nous pouvons être raisonnablement optimistes.
Dans le courant de l'année prochaine, je pense. Nous y travaillons très sérieusement.
Monsieur Reitzer, le Gouvernement n'a pas de projet de réforme concernant le financement des SDIS. Il est toujours compliqué de faire des évaluations globales, mais la satisfaction des usagers est le critère déterminant pour apprécier la façon dont un service fonctionne. Or les Français sont satisfaits des prestations des sapeurs-pompiers, même si peuvent parfois surgir des difficultés de fonctionnement.
Monsieur Kert, nous n'avons pas de projet de « modèle économique » différent pour l'exploitation des appareils aériens de sécurité civile, concernant en particulier la lutte contre les incendies de forêt – notamment pas de projet consistant, comme le pratiquent plusieurs pays, à louer des appareils pour la saison des feux au lieu de les acquérir en pleine propriété.
S'agissant de la relocalisation de la base de Marignane, une étude est en cours : je vous la communiquerai dès qu'elle sera remise. Cette base est notre base principale : elle est commode, dans la mesure où elle est bien située. Elle permet l'écopage presque immédiat des Canadair sur un plan d'eau calme. Mais un trafic civil se développe très vite sur place, ce qui commence à poser des problèmes de cohabitation avec les appareils de la sécurité civile.
Madame Dalloz, il est vrai que certains casernements ne sont pas la hauteur de ce que nous souhaiterions et de ce dont ont besoin les sapeurs-pompiers. Mais ce point est de la seule compétence des départements. J'imagine mal le FAI intervenir dans le domaine de l'immobilier – il ne l'a d'ailleurs jamais fait –, dans la mesure où l'on ne voit pas sur quels critères il pourrait le faire. Cela étant, ce fonds a aussi pour vocation d'apporter une réponse aux questions touchant à la nécessaire conciliation entre le caractère très local des interventions des SDIS et l'organisation nationale que nous avons à mettre en oeuvre pour faire face aux risques qui se développent au-delà du territoire départemental.
La réunion de la commission élargie s'achève à vingt-trois heures quinze.
Le Directeur du service des comptes rendus des commissions,
Michel Kerautret© Assemblée nationale