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Mission d'information relative à l'analyse des causes des accidents de la circulation et à la prévention routière

Réunion du 5 juillet 2011 à 14h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • accident
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  • deux-roues
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La séance

Source

La séance est ouverte à 14 heures 20.

Présidence de M. Armand Jung, président.

La mission d'information procède à l'audition, ouverte à la presse, de M. Marc Bertrand, chargé de mission sécurité routière, MM. Frédéric Roy et Nathanaël Gagnaire, membres du bureau national à la Fédération française des motards en colère (FFMC).

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Je suis particulièrement heureux de recevoir une délégation de la Fédération française des motards en colère. Les conducteurs d'engins à deux roues, motorisés ou non, paient un lourd tribut à la route.

Messieurs, je compte sur votre témoignage pour nous éclairer sur ce qui se passe sur le terrain et pour dissiper certaines idées reçues.

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Frédéric Roy

Merci de votre invitation. Nathanaël Gagnaire et moi-même sommes membres du bureau national de la Fédération française des motards en colère ; Marc Bertrand est, quant à lui, salarié, membre du secrétariat national, en charge de la sécurité routière.

Notre bureau national est composé de huit personnes, élues par les quatre-vingt antennes départementales, pour un mandat de trois ans. La Fédération emploie cinq salariés : un délégué général, un chargé de mission sécurité routière, une coordonnatrice juridique et deux secrétaires.

La FFMC est surtout connue du grand public pour ses positions contestataires et ses manifestations. Mais son action va bien au-delà. Depuis trente ans, son objectif est de défendre les usagers des deux ou trois roues motorisés, du cyclomoteur au gros cube.

Les motards ont créé les structures dont ils avaient besoin pour les représenter : outre la FFMC, une maison d'édition qui publie Moto Magazine, numéro 1 de la presse moto en France, pour faire connaître les actions de la FFMC et transmettre des messages, notamment de sécurité routière ; l'Assurance Mutuelle des Motards, créée dans les années quatre-vingt, aujourd'hui numéro 2 de l'assurance moto en France et le premier assureur spécialisé en ce domaine ; l'Association pour la formation des motards, qui regroupe des moto-écoles et organise, entre autres, des stages de perfectionnement à la conduite.

En matière de sécurité routière, notre Fédération prône la formation et le continuum éducatif. Nous organisons des interventions auprès des plus jeunes, mais aussi auprès des motards ayant déjà le permis, pour les sensibiliser à la sécurité routière et les amener à corriger certaines mauvaises pratiques.

La FFMC Loisirs est une structure destinée aux jeunes, regroupant des centres de vacances ou des associations autour de la pratique du cyclomoteur. Elle organise des opérations de sensibilisation à la sécurité en deux roues, à l'entretien du cyclomoteur, au port des vêtements de sécurité, etc.

La FFMC accueille deux commissions assez importantes : la commission juridique, qui apporte un soutien juridique à nos adhérents en cas d'accidents ou de verbalisations abusives ; la commission à l'éducation routière de la jeunesse, de création plus récente, qui a mis en place, à destination de nos militants, des formations d'intervenants dans les établissements scolaires. En effet, c'est en pratiquant au quotidien que l'on peut se rendre compte des problèmes qui surgissent sur la route ; en partageant notre expérience, nous espérons contribuer à faire baisser la sinistralité en cyclomoteur. Il y a deux ans, ce type de formations, organisé tout au long de l'année, a reçu l'agrément de l'Éducation nationale. Aujourd'hui, 160 intervenants sillonnent la France.

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Monsieur Roy, les bruits les plus divers circulent à propos des motards : ils rouleraient trop vite et ne respecteraient rien. En tant que parlementaires, nous aimerions découvrir où est le problème, car les drames sont nombreux. Nous avons besoin de connaître votre expérience. N'hésitez pas à nous parler franchement. De nos discussions pourraient naître des propositions, susceptibles d'être reprises par le Gouvernement ou par le Parlement.

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Frédéric Roy

Je vais passer la parole à Marc Bertrand, qui a participé pendant deux ans à la concertation sur les engins deux-roues motorisés, engagée par Michèle Merli quand elle était encore Déléguée interministérielle à la sécurité routière.

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Le communiqué que vous avez publié au moment de son départ était très élogieux, alors même que vos relations n'avaient pas toujours été au beau fixe. Je vous en félicite.

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Xavier Bertrand

Cette concertation nationale sur les deux-roues motorisés a été animée en effet, à partir de juin 2009, par la Délégation interministérielle à la sécurité routière. Initiée par Mme Michèle Merli, elle faisait suite au rapport du préfet Guyot, à l'époque préfet des Deux-Sèvres…

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Xavier Bertrand

Le rapport Guyot, qui comptait 280 pages, fut le premier rapport gouvernemental français sur la sécurité des deux-roues motorisés. On peut d'ailleurs s'étonner qu'il ait fallu attendre 2008 pour un tel rapport, alors que ce mode de transport est pratiqué en France depuis des dizaines d'années.

Je reconnais néanmoins que l'usage des motos s'est profondément modifié ces dix dernières années. Le parc s'est accru de 60 %. 50 % des personnes circulant en deux-roues motorisés entendent ainsi faciliter leurs déplacements quotidiens dans les grandes agglomérations. Mais les nouveaux pratiquants ne sont pas tous formés comme il le faudrait et des conflits surgissent avec les autres usagers, essentiellement les automobilistes. C'est ce que les chercheurs en sécurité routière appellent des « incidences entre les différents usages ».

Les automobilistes, de leur côté, ne sont pas formés à la coexistence avec les conducteurs de deux-roues qui, à Paris, représentent déjà 15 % du trafic. Chacun d'entre nous se souvient d'avoir été doublé par un motard qui roulait très vite, que l'on n'avait pas vu arriver, qui remontait les files, etc. Bien des fantasmes persistent, notamment chez ceux qui n'ont aucune expérience des deux-roues et ne savent pas comment ils se déplacent.

Au sein de la concertation à laquelle nous avons participé pendant deux ans, nous avons travaillé avec des assureurs, avec les chercheurs de l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS), aujourd'hui rebaptisé Institut français des sciences et des technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR) – né de la fusion entre l'INRETS et le Laboratoire central des ponts et chaussées (LCPC) – ainsi qu'avec les fonctionnaires du Centre d'études sur les réseaux et techniques de l'urbanisme (CERTU). Avec ces derniers, nous avons étudié, notamment, comment rendre les infrastructures routières moins dangereuses pour les usagers de deux-roues. Nous avons également travaillé avec des représentants d'associations, en particulier les associations dites de sécurité routière : Prévention routière, Ligue contre la violence routière, « Victimes et Citoyens », etc.

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Je vais devoir vous interrompre et vous demander d'aller droit au but. Devant le nombre des accidents, la mission d'information souhaiterait que vous nous disiez quels problèmes vous rencontrez, et que vous nous fassiez des propositions.

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Xavier Bertrand

Les deux-roues motorisés sont insuffisamment pris en compte dans la circulation, tant au niveau des infrastructures que de la formation des automobilistes. En outre, les représentants des pouvoirs publics voient davantage les deux-roues motorisés comme un inconvénient que comme un avantage, alors qu'ils facilitent la mobilité dans les grandes villes ; moi-même, je mets trois fois moins de temps pour me rendre à mon travail, de banlieue à banlieue, que si j'empruntais les transports en commun.

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De fait, le rapport du préfet Guyot a établi que l'infrastructure routière n'était pas conçue pour les deux-roues, motorisés ou non. Mais nous n'en savons pas davantage. Pourriez-vous être plus précis ?

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Il est fréquent d'entendre dire que les deux-roues motorisés sont un moyen de locomotion dangereux. De notre côté, nous disons que c'est un moyen de locomotion qui rend les conducteurs vulnérables. Concrètement, si deux voitures s'accrochent à un feu rouge, l'accident se limite le plus souvent à de la tôle froissée. Si vous remplacez une des voitures par un deux-roues motorisé, l'accident devient beaucoup plus grave et le motard risque de se retrouver à l'hôpital. Or cette vulnérabilité n'est pas prise en considération par les pouvoirs publics. Par exemple, voici très longtemps que nous demandons, en vain, une défiscalisation pour les équipements adaptés à la conduite des deux- roues motorisés.

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Les cyclistes demandent également un taux de TVA adapté pour les équipements de sécurité. Mais dites-nous donc de quoi les motards doivent s'équiper.

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D'abord du casque, qui est indispensable et obligatoire. Seulement, les casques coûtent très cher et, pour l'instant, ils sont toujours taxés à 19,6 %. Ensuite, du blouson, du pantalon, des bottes et des gants. Mais les pouvoirs publics n'ont pas de politique incitant au port de ces équipements et ne prévoient pas de mesure d'incitation fiscale pour leur achat.

Quant au gilet ou à tout autre équipement permettant au motard d'être mieux repéré, ils n'apporteront absolument rien en matière de sécurité, dans la mesure où un deux-roues motorisé est déjà éclairé par l'allumage obligatoire de ses feux, et repéré grâce à certains dispositifs réfléchissants comme les autocollants apposés sur son casque.

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Xavier Bertrand

Ce gilet permet de réduire les blessures en cas de chute, mais n'empêche pas l'accident. Il ne se déclenche, d'ailleurs, qu'en cas de chute, après l'accident. En outre, à la suite d'un choc frontal ou latéral contre une voiture, le corps touche le véhicule en 90 millisecondes, alors que le gilet le plus rapide ne se gonfle qu'au bout de 120 millisecondes.

Il coûte en moyenne 500 euros. Ceux qui l'adoptent sont déjà majoritairement équipés et possèdent une culture de sécurité routière. Ainsi, le gilet airbag ne concernera que les motards les moins exposés aux accidents, et pas ceux qui ne possèdent pas cette culture : les jeunes, les nouveaux utilisateurs, les urbains qui passent de l'auto ou du scooter à la moto de 125 cm3.

Il faut absolument convaincre tous les automobilistes que les motards ne sont pas des sauvages qui roulent trop vite et sont responsables de leurs propres accidents, mais des conducteurs vulnérables à l'égard desquels il convient de redoubler d'attention. La formation ne suffira pas : les pouvoirs publics, les assureurs et les associations devront mener des campagnes en ce sens. Le problème est que, dans cette chaîne, les pouvoirs publics constituent le maillon faible. J'en veux pour preuve les annonces du Conseil interministériel de la sécurité routière du 11 mai dernier, qui ont fait beaucoup de bruit, mais n'apportent que de mauvaises réponses à de bonnes questions.

Un exemple avait été mis en avant par le rapport Guyot : pour les pouvoirs publics, le port d'un gilet haute visibilité ou l'apposition de dispositifs réfléchissants résoudrait le problème de visibilité des motards. Or les chercheurs de l'INRETS ont démontré que les motards n'étaient pas invisibles, mais que les automobilistes ne les voyaient pas, parce qu'ils ne les cherchaient pas dans la circulation. Concrètement, un gilet fluorescent ne protégera pas un motard si un automobiliste décide de faire demi tour pour prendre une place sur le trottoir d'en face.

Un automobiliste peut circuler avec un kit mains libres. On sait pourtant qu'une oreillette mobilise les mêmes zones du cerveau…

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Seriez-vous opposés au kit mains libres pour les motards ?

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Xavier Bertrand

Notre position est la suivante : on ne téléphone pas quand on conduit. Maintenant, la FFMC, par tradition, n'est pas pour les clivages « pour ou contre ». Si elle devait se prononcer, ce serait en faveur de la formation et de la sensibilisation.

Il est possible de réduire la mortalité en moto. Je rappelle que la baisse de mortalité a été plus importante, ces quarante dernières années, pour les usagers des deux-roues motorisés que pour tous les autres usagers. Sur les six premiers mois de 2010 analysés par l'Observatoire interministériel de la sécurité routière, elle a été de 29 % pour les motards, 16 % pour les cyclomotoristes et de seulement 6 % pour les automobilistes. Il faut que chacun s'approprie la culture de la sécurité routière. Bien sûr, cela suppose un travail de très longue haleine, sans doute peu compatible avec les impératifs électoraux.

Mais revenons à la visibilité. On veut nous faire porter un gilet fluorescent en nous disant que cela va nous protéger, alors qu'il n'y a plus de lumière sur certaines voies extrêmement dangereuses ! C'est le cas, depuis un an, sur les voies rapides urbaines d'Ile-de-France. Le motard ne voit rien sur une bretelle de sortie non éclairée, avec un seul phare. Et on ne peut pas le voir s'il doit s'arrêter au bord de la chaussée, par exemple à la suite d'une crevaison : en effet, le gilet de haute visibilité avec des bandes rétro-réfléchissantes n'a d'utilité que dans l'éclairage direct des phares, mais pas sur le côté.

Connaissez-vous la récente campagne lancée par les sociétés d'autoroutes où leurs agents posent sur des affiches avec un cône sur la tête, un gilet fluorescent et un tutu ? Le slogan est le suivant : « Que faudra-t-il faire pour qu'on nous voie ? » Ils ne sont pas invisibles, pourtant. Mais il faut apprendre aux conducteurs à partager la route.

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Frédéric Roy

Pour que les motards se sentent impliqués et prêtent une oreille attentive quand on leur parle de sécurité routière, il faut arrêter de les pointer du doigt à toute occasion. Comme l'a dit Marc Bertrand, sur les six premiers mois de l'année dernière, la baisse de la mortalité en moto a été de 29 %. Cette année-ci, nous avons eu du mal à faire mieux. Les chiffres de 2011 étant mauvais, on a incriminé les motards.

La sécurité routière doit se faire avec l'usager de la route et non pas contre lui. En outre, dès qu'il s'agit des deux-roues, en cas d'accident, on a tendance à confondre victimes et coupables. C'est comme si, lorsque des enfants meurent noyés dans une piscine, on disait que ces enfants font n'importe quoi. Le problème n'est pas du côté des victimes, mais du côté des responsables des accidents.

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Monsieur Roy, ni M. Houillon, le rapporteur, ni moi-même n'entendons stigmatiser les motards. Nous voulons aller au fond des choses, comprendre où le bât blesse, pour tenter d'améliorer la situation.

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Monsieur Bertrand, j'ai deux questions à vous poser. Premièrement, pourquoi avez-vous quitté la concertation ouverte entre 2009 et 2011 ? Deuxièmement, êtes-vous favorables à la réactivation du Conseil national de la sécurité routière (CNSR) qui n'a pas été réuni depuis 2008 ?

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Xavier Bertrand

Nous n'avons pas quitté la concertation. Nous avons claqué la porte d'une réunion, alors que se préparaient les annonces du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) et que M. Claude Guéant, après avoir reçu les associations de prévention routière, avait fait des déclarations allant à l'encontre de ce qui s'était dit dans le cadre de la concertation. Par exemple, le 11 février, au cours d'une conférence de presse, il avait prétendu n'être pas compétent sur la question de la légalisation de la circulation interfiles dans les embouteillages, alors que l'on y travaillait depuis deux ans. Notre départ était une façon de dire à Mme Merli que nous étions d'accord pour discuter mais que, dans ces conditions, il fallait nous écouter.

Cela dit, la FFMC a toujours été favorable à la concertation avec les pouvoirs publics. Depuis trente ans, notre fédération occupe les champs que les pouvoirs publics ont laissés vacants en matière de connaissance des deux-roues motorisés. Lorsque nous discutons avec les fonctionnaires, ils reconnaissent notre expertise et nous croisons souvent nos analyses pour arriver aux mêmes conclusions. Mais nous voudrions être entendus des politiques et nous souhaiterions que les annonces qui sont faites en matière de sécurité routière soient au moins représentatives des échanges qui ont eu lieu préalablement.

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Frédéric Roy

Il y a quelques années, la FFMC a fait partie du CNSR. Malheureusement, ce conseil a été détourné de son objectif premier, qui était de faire des propositions en matière de sécurité routière. Au fur et à mesure, nous avons eu l'impression qu'il ne servait plus qu'à valider les décisions politiques prises en ce domaine.

C'est un peu ce qui se passe en matière de concertation, où l'on ne tient pas compte de notre avis, ni des explications avancées par les chercheurs sur les causes des accidents. A quoi peut servir cette concertation quand les décisions politiques n'ont aucun rapport avec ce qui s'est dit ? Car c'est bien ce qui s'est passé lors des deux derniers CISR, qui se sont prononcés pour le contrôle technique des cyclomoteurs, puis pour le port de gilets fluorescents, pour des plaques d'immatriculation plus grandes et, enfin, pour une formation en cas d'interruption de la conduite d'un deux-roues.

Maintenant, pourquoi ne pas réactiver le CNSR ? Reste à savoir dans quel objectif.

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Il ne s'agit pas de stigmatiser les pilotes de motos, mais de trouver des solutions aux problèmes qui se posent. Nous attendons que vous nous apportiez des explications, pour que nous puissions, de notre côté, proposer des solutions.

D'abord, je remarque que le parc des deux-roues représente près de 2 % des véhicules, et un peu moins de 30 % des accidents. Statistiquement, les dépassements de vitesse sont plus souvent le fait des motards que des automobilistes. Depuis des années, la réduction du nombre de tués est beaucoup plus importante dans toutes les autres catégories d'usagers de la route : sur la période 2002-2009, 43,3 % pour les piétons ; 28,2 % pour les cyclistes ; 56,1 % pour les véhicules légers et 13,7 % pour les motards. Nous avons entendu dire que des mesures concernant les motos permettraient de sauver 300 vies et d'éviter 500 handicaps par an, ce qui n'est pas rien.

Tous les députés, qui font beaucoup de voiture, ont constaté que de nombreux motards effectuaient des dépassements à des vitesses excessives. Or il semble difficile de contrôler la vitesse des motos, notamment avec les radars : d'où l'impression d'une certaine impunité. Le CISR a donc proposé que l'on augmente la surface des plaques pour mieux identifier les motos et contrôler leur vitesse. Tout semble prouver que la circulation en deux-roues motorisés pose des problèmes spécifiques – ce qui ne signifie pas qu'il faille incriminer les motards.

Ensuite, j'ai été frappé par une campagne publicitaire qui a été lancée sur le thème : « partager la route ». Les affiches placardées à cette occasion représentent un motard entre deux files de véhicules, comme je le vois tous les jours sur l'A15. Le problème est que ces affiches légalisent, d'une certaine manière, un type de déplacement qui ne me semble pas autorisé actuellement par le code de la route. Ce type de déplacement ayant tendance à s'amplifier, notamment dans les régions urbaines, que préconisez-vous ?

Enfin, j'ai appris qu'il y aurait aujourd'hui 1 960 radars fixes dans notre pays. Pour tenir compte des lieux les plus accidentogènes, il en faudrait, paraît-il, entre 4 500 et 5 000. Qu'en pensez-vous ?

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Je veux bien admettre, monsieur le rapporteur, qu'il n'y ait pas, de votre part, d'intention de stigmatiser les motards. Pourtant, j'ai remarqué que vous aviez parlé des « pilotes » de motos. Or les usagers de deux roues motorisés sont des conducteurs comme les autres, au même titre que les automobilistes.

J'ai observé également que votre intervention était principalement basée sur le contrôle de la vitesse, ou sur le fait que les accidents étaient principalement dus à la vitesse, alors qu'un accident est un phénomène multifactoriel. La politique du Gouvernement, en matière de lutte contre l'accidentalité, se focalise, de la même façon, sur les excès de vitesse, alors que nous préférerions que l'on mette l'accent sur la formation, s'agissant notamment des remontées de files.

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Par exemple, quand des voitures sont ralenties sur un périphérique, nous préconisons que les deux-roues motorisés puissent remonter la file, avec un différentiel n'excédant pas 20 kmh.

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Xavier Bertrand

Je précise que si nous souhaitons la légalisation de la circulation interfiles, c'est afin de pouvoir l'enseigner. Vous vous êtes demandé si ce mode de déplacement était ou non légal. En fait, nous sommes face à un vide juridique : le code de la route ne le prévoit pas – pas plus qu'il ne prévoit les embouteillages récurrents, deux fois par jour, sur certains axes.

Il s'agit d'une circulation en décalé entre les voitures et les nombreux fourgons, qui masquent la visibilité. En effet, sur une moto, encore plus qu'en voiture, il est particulièrement important de voir très loin. N'oubliez pas qu'on conduit une moto en équilibre. Cet équilibre est autostabilisé dès les plus basses vitesses, mais les anticipations aux freinages, aux accélérations et aux changements de chaussée dépendent essentiellement de la visibilité.

Quoi qu'il en soit, nous avons déterminé, avec les services de la Direction de la sécurité et de la circulation routières (DSCR), quatre cas de figure : la circulation complètement arrêtée ; la circulation fortement ralentie ; la circulation dense mais roulante ; la situation normale. La remontée de files n'est envisageable que dans le cas du trafic totalement arrêté ou très fortement ralenti, avec des phénomènes d'accordéon.

Reconnaître cette possibilité de circulation interfiles permettrait de l'enseigner. Nous nous sommes aperçus que bien des motards la pratiquaient de façon dangereuse. Je suis moi-même très souvent obligé de me pousser, parce qu'un deux-roues roule trop près derrière moi et risque de me percuter, si je dois éviter un automobiliste qui change lui-même de file. Une formation permettrait d'apaiser cette pratique de la circulation interfiles, et amènerait les motards à prendre conscience des risques.

Plus généralement, rouler en deux-roues motorisé entraîne des risques qu'on ne fera jamais disparaître. Mais on peut enseigner ces risques, comme on le fait pour la plongée sous-marine ou la course en montagne.

Cela suppose d'abandonner le discours qui consiste à dire : vous faites de la moto, c'est dangereux et si vous avez des accidents, vous en êtes responsables. De fait, on s'est aperçu que la faute du motard était inférieure à la faute, même non intentionnelle, de l'automobiliste. Il s'agit le plus souvent d'une faute d'inattention. En outre, le rapport MAIDS montre que la majorité des accidents en moto intervient à moins de 50 kmh, ce qui confirme que les risques en moto ne sont pas ceux qui sont mis en avant dans les communications publiques.

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Je reste un peu sur ma faim, car je n'ai pas obtenu de réponses précises à des questions précises. Par définition, l'accident qui survient à une vitesse plus ou moins importante aura, pour un motard, des conséquences immédiatement graves.

Ne considérez-vous pas comme normal que l'ensemble des usagers, les motards et les autres usagers, soit soumis aux mêmes contrôles, et que les contrôles soient adaptés en fonction des modalités de déplacement ? Ne doit-on pas faire en sorte de résoudre les problèmes techniques qui s'opposent au contrôle de vitesse des motos ? Les motards n'ont-ils pas le sentiment que leur vitesse est moins décelable et qu'ils seront donc moins contrôlés ? Aujourd'hui, nous voyons très rarement des voitures rouler à des vitesses très importantes. Or c'est encore le cas des motos – sans que cela soit général. Pourquoi ?

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Quelles solutions préconisez-vous pour compenser le manque de visibilité des motards sur la route ? Des flash ou des points fluorescents sur les motos ?

Considérez-vous le deux-roues comme un véhicule comme les autres ou pas ? Dans le premier cas, les motards doivent rouler au milieu de la voie de droite, comme n'importe quel engin à quatre roues. Dans l'autre, on admet les remontées de files de voitures arrêtées, ce qui est assez risqué.

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Pour permettre les contrôles radars, les plaques minéralogiques des motos doivent être visibles. Je suppose que vous n'y êtes pas opposés ?

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Xavier Bertrand

Les plaques homologuées permettent déjà le contrôlesanction automatisé. Le problème vient de quelques motards, minoritaires, qui utilisent des plaques très petites, ou horizontales. Il vient aussi du système de verbalisation robotisé qui a été mis en place ; un contrôle avec des policiers et des gendarmes au bord des routes suffirait sans doute à cadrer les comportements les plus transgressifs.

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Améliorer la visibilité des vêtements ou des accessoires, comme les casques, ne peut être que positif, même si, je le reconnais, le port du gilet jaune ne constitue pas la bonne solution.

Il faut bien admettre, par ailleurs, que les deux-roues doublent fréquemment en ville, ce qui est interdit, changent de file ou remontent les files. Il serait temps de régler le problème.

Je remarque, en dernier lieu, qu'un même argument, lié au prix, a été avancé au moment de l'installation des premiers airbags sur les Audi ou les Mercedes. Mais, aujourd'hui, la moindre Twingo en est équipée : leur prix a diminué fortement, du fait de leur généralisation. Seriez-vous opposés à une mesure imposant des airbags sur toutes les nouvelles motos qui sortent, ou à partir d'une certaine cylindrée ?

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Je suis motard depuis 1984. Tous les accidents que j'ai eus étaient dus à des véhicules qui n'avaient pas respecté la réglementation : un camion qui avait déversé son gas-oil sur la chaussée ou une voiture qui m'avait coupé la route… Malgré tout, je me rends compte que celui qui vient d'obtenir son permis moto n'a pas la même approche de la route qu'un motard exercé. Je me demande aussi si l'on ne confie pas trop tôt des machines trop puissantes aux détenteurs du permis. Ne conviendrait-il pas de réduire les puissances autorisées ou d'exiger une certaine expérience avant de pouvoir conduire un véhicule d'une cylindrée supérieure ?

Connaissez-vous le nombre des accidents par rapport au nombre de kilomètres parcourus, s'agissant des conducteurs de deux-roues ?

Je remarque enfin que la France manque cruellement de circuits, qui permettent aux motards de perfectionner leur conduite et d'utiliser le potentiel de leurs deux-roues. Quand les motards sortent de ces circuits, ils roulent plus tranquillement. Considérez-vous comme une priorité d'aménager des circuits dans les grandes agglomérations ?

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Vous vous êtes déclarés favorables à une formation continue. Êtes-vous donc partisans de stages organisés régulièrement ? Si oui, qui devra les financer ?

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Comment analysez-vous la mauvaise entente qui règne entre les motards et les autorités publiques ? Il faut bien constater que le nombre des décès dus à des accidents de motos est très élevé. En tant qu'automobilistes, nous sommes souvent témoins d'imprudences caractérisées de la part des motards.

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Xavier Bertrand

Plusieurs personnes nous ont interrogés sur la visibilité des motards. Le manque de visibilité est en effet un élément majeur des accidents de moto, relevé par le rapport Guyot : dans 84 % des cas, l'automobiliste n'a pas perçu le motard dans son environnement. D'où la nécessité d'une formation et du port d'équipements adaptés. Pour autant, on ne voit pas ce que l'on ne s'attend pas à voir.

Les chercheurs de l'INRETS nous ont parlé du phénomène de « l'homéostasie du risque » : une sorte de recherche d'équilibre inconscient de la part du conducteur qui fait que, plus il se sent protégé, plus il relâche sa vigilance. Aujourd'hui, les voitures sont très sures ; on conduit vitres fermées grâce à la climatisation ; on écoute la radio ; on peut éventuellement avoir une conversation téléphonique ; on se laisse piloter par son GPS… et on ne voit pas le motard.

L'automobiliste perd toute sensation de vulnérabilité et de danger – à la différence du motard – et devient inattentif. D'ailleurs, le premier facteur d'accident sur les autoroutes, aujourd'hui, est l'hypovigilance. Le problème lié au manque de visibilité mériterait donc d'être travaillé en relation avec l'accroissement de la sécurité dans les véhicules.

Maintenant, je tiens à préciser que les airbags dont nous parlons ne sont pas installés sur les deux-roues, mais portés par leurs conducteurs.

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Confirmez-vous que ces blousons airbag coûtent 500 euros ?

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Xavier Bertrand

Ils coûtent entre 400 et 600 euros, selon les systèmes.

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Le blouson airbag est-il un équipement d'avenir ?

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Xavier Bertrand

Oui, dans la mesure où il est adopté librement par le conducteur de deux-roues. Mais pourquoi en faire une obligation, alors même que l'équipement de base n'est pas porté par tout le monde ?

Cet équipement de base est le suivant : des chaussures montantes ou des bottes ; des vêtements solides, même quand il faut très chaud ; un blouson renforcé avec une dorsale intégrée ; des gants et un casque – intégral ou jet, du moment qu'il est bien attaché et que les yeux sont protégés.

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Pratiquement personne ne porte tout cela. Pourriez-vous nous faire la liste de ce que vous considérez comme constituant l'équipement de sécurité de base ? Nous demanderons d'ailleurs la même chose aux cyclistes ou à d'autres usagers. Si le Gouvernement ou le Parlement devait prendre des décisions en la matière, il faudrait que nous sachions sur quoi nous appuyer.

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Plusieurs d'entre vous ont mis en cause le comportement des usagers de deux-roues motorisés. De notre côté, nous dénonçons, depuis très longtemps, le manque de formation, notamment dans les grandes villes – auto-écoles surchargées, cours très difficilement assurés, un moniteur pour 5, 6, 7 motos, voire davantage. Ces problèmes de formation, qui ne sont pas pris en compte par les pouvoirs publics, se traduisent logiquement, sur le terrain, par les problèmes de comportement auxquels vous faites référence.

Rendre obligatoire le port des blousons airbag entraînerait une certaine déresponsabilisation des usagers qui, une fois équipés, se diraient qu'ils ne risquent rien à tomber. Il faut au contraire les responsabiliser. A l'obligation, nous préférons l'incitation.

Nous sommes évidemment favorables aux circuits, qui constituent des lieux où un motard peut développer la pleine puissance de sa machine en toute sécurité – éventuellement avec des formateurs. Je précise que la Fédération française de motocyclisme (FFM) organise des journées portes ouvertes de circuits, qui remportent un très grand succès.

Monsieur Myard, la mauvaise entente entre les motards et les autorités s'explique par une réelle incompréhension. Par exemple, depuis le début de cette audition, on a surtout parlé des deux-roues motorisés dans les grandes villes, notamment en Ile-de-France. Mais les motards ne se contentent pas de rouler sur le périphérique. Le week-end, ils vont à la campagne, où ils sont confrontés à différents problèmes : gravillons sur les routes, infrastructures inadaptées.

Revenons à la question des plaques d'immatriculation. Pourquoi devraient-elles être plus grandes ? Pour que les motards puissent se faire flasher par les radars ! Encore une fois, cela sous-entend un problème de vitesse. Or, comme l'a précisé le rapport MAIDS, la majorité des accidents en deux-roues motorisés se produit entre zéro et 50 kmh. On se focalise donc sur un non problème.

De la même façon, le Gouvernement a voulu instaurer un contrôle technique. Mais il ressort clairement du même rapport que l'état du véhicule n'intervient que pour 0,7 % des cas dans les accidents. Le contrôle technique n'aurait donc aucun effet en matière de sécurité routière. S'intéresser à l'état du véhicule paraît logique mais, encore une fois, c'est un faux problème, auquel on propose une mauvaise solution.

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Estimez-vous normal que toutes les catégories de conducteurs subissent les mêmes contrôles, y compris de vitesse ?

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Xavier Bertrand

Oui. Mais il se trouve que les motards sont soumis à davantage de contrôles que les automobilistes et font l'objet de contrôles ciblés. Par exemple, depuis le printemps, de véritables souricières ont été mises au point : des CRS dirigent les motards sur une aire de contrôle ou de stationnement des bus et saisissent toutes les occasions possibles de les verbaliser : un échappement bruyant ou non conforme ; conforme mais pas homologué pour la moto, etc. Les forces de l'ordre verbalisent parfois « au doigt mouillé », quand elles considèrent qu'une vitesse est inadaptée en raison des circonstances ou qu'un pot est trop bruyant, sans utiliser de radar ou de sonomètre. Ces pratiques donnent lieu à des procès-verbaux abusifs, que nous contestons ensuite devant les tribunaux.

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Je suis un fidèle lecteur de Moto Magazine. Vous nous reprochez parfois de stigmatiser les motards. Mais vous êtes vous-mêmes franchement « paranos », si j'en crois l'article sur le dernier sondage motard, publié dans le numéro de juillet-août. Cela dit, nous ne demandons pas mieux que de nous exprimer dans votre revue, ce qui permettrait d'équilibrer les points de vue.

Messieurs, je vous remercie pour votre contribution.

Puis, la mission d'information procède à l'audition, ouverte à la presse, de MM. Loïc Ratier, président, Fabien Pierlot, vice-président, Jean-Georges Schwartz, trésorier, David Roizen,et Yves-Paul Robert, chargés de mission et M. Laurent Bernard, porte-parole de l'Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d'aides à la conduite (AFFTAC).

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Nous accueillons à présent les représentants de l'Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d'aide à la conduite (AFFTAC), sur lesquelles nous avons beaucoup d'interrogations, en particulier sur l'efficience des matériels existants.

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Loïc Ratier, président de l'Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d'aide à la conduite

L'AFFTAC a été créée à la suite du Comité interministériel de la sécurité routière (CISR) du 11 mai 2011, par Fabien Pierlot, Georges Schwartz et moi-même qui représentons les sociétés Coyote System, Inforad et Wikango. Ces dernières, tout comme leurs utilisateurs, ont en effet été très étonnées d'être montrées du doigt au travers des décisions du CISR, et leur première réaction a été de penser que, finalement, leur technologie était méconnue.

Nos appareils ne sont en effet pas que des avertisseurs de radars – leur dénomination première, il est vrai. Comme nous essayons de le faire comprendre depuis un mois et demi, les technologies ont évolué.

Nos produits ont émergé sur le marché à l'époque où les radars fixes ont été installés dans des zones dangereuses signalées par les systèmes GPS. Finalement, ils ont signalé ces zones de la même façon que le faisaient les panneaux installés avant les radars.

Ensuite, nos produits ont évolué. Outre ces zones de radars, ils ont pu intégrer, via Internet, des zones accidentogènes, recensées par les utilisateurs. Puis ils ont signalé les limitations de vitesse : dans un premier temps, sur les zones de radar ; dans un deuxième temps, sur les zones de danger ; puis, comme c'est le cas aujourd'hui, sur l'ensemble du réseau routier.

En reposant, d'abord, sur la technologie GPS (global positioning system), puis à présent également sur le GSM (global system for mobile communications), nos produits permettent à nos utilisateurs de former une communauté et d'échanger – en temps réel – des informations. Chaque utilisateur peut informer les gens qui roulent en même temps que lui et connectés sur le même serveur des perturbations (un embouteillage, par exemple), des incidents ou des dangers (comme la présence d'un patrouilleur) qui peuvent survenir sur la route. En signalant des informations beaucoup plus rapidement que tout autre service, ce type de technologie contribuera, demain, à la sécurité routière.

Aujourd'hui, la voiture communicante émerge au travers de modèles très haut de gamme et très chers, en l'occurrence allemands. Nos technologies proposent les mêmes services, puisqu'elles peuvent être embarquées sur des véhicules, mais à des prix abordables, et pourront être embarquées sur l'ensemble des véhicules à l'avenir.

M. Guéant nous a parlé de la sécurité. Nous avons mis en avant certaines fonctionnalités intéressantes de nos produits. Par exemple, nos utilisateurs, qui sont munis d'un boîtier connecté et suivis par nos serveurs, peuvent être identifiés s'ils roulent sans interruption depuis deux heures.

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Le même boîtier offre-t-il plusieurs fonctionnalités ? Et quelles sont celles en faveur de la sécurité routière ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Notre système est une plateforme de contenus permettant de relayer des informations en temps réel à l'ensemble des utilisateurs.

Aujourd'hui, nous affichons en permanence les limitations de vitesse.

Nous avons passé un accord avec les sociétés d'autoroute pour que les accidents, les bouchons et la présence des patrouilleurs soient relayés en temps réel entre eux et nous. Ainsi, lorsqu'un utilisateur constate un accident qui vient de se produire, il appuie sur le bouton du boîtier ; puis la société d'autoroute récupère instantanément cette information, la relaie auprès de ses services qui la dirigent vers les panneaux d'affichage.

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C'est un geste volontaire, alors que la détection des radars est automatique avec vos boîtiers.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Tout à fait, mais les sociétés d'autoroute nous informent également de l'existence d'un bouchon qui vient de se produire.

En outre, nos produits diffusent des messages sonores de sécurité routière du type « mettez votre ceinture de sécurité », « attention à l'alcoolémie », « vous roulez depuis plus de deux heures, la pause s'impose, ralentissez ».

Ils indiquent également l'aire de repos d'une autoroute la plus proche.

Ils préviennent les utilisateurs de leur entrée dans une zone école, avec un message indiquant « vous entrez dans une zone école limitée à 30 kmh, ralentissez ».

J'ajoute que nos produits pourront très prochainement diffuser des messages liés à l'hypovigilance – une des premières causes de mortalité en France. Cette fonctionnalité est actuellement en cours de développement. Dans la mesure où nos systèmes communiquent en temps réel avec nos utilisateurs, ils sont en mesure de détecter, en fonction de la vitesse moyenne du véhicule, de sa situation, du temps de conduite et de l'heure, les conducteurs à risque. Si l'un d'eux roule à 130 kmh sur autoroute à deux heures du matin depuis trois heures, par exemple, nous pourrons lui envoyer des messages d'information du type « attention, vous êtes un sujet à risque », et l'obliger à appuyer sur le bouton à intervalles réguliers, par exemple tous les quarts d'heure, pour qu'il conserve sa vigilance au volant.

Ces messages sont à la fois vocaux et affichés sur écran.

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Dans votre équipement, le seul message automatique est donc le détecteur de radar.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Non, depuis trois ans, nous affichons en permanence par GPS les limitations de vitesse, les bouchons, les accidents, les travaux et la présence des patrouilleurs.

Dans six mois ou un an, tous nos produits seront équipés d'accéléromètres. Ceux-ci nous permettront de détecter, à la seconde près, un freinage ou une accélération brutale, ou encore un changement de voie, puis de remonter cette information à nos serveurs qui la relaieront aux sociétés d'autoroute et aux utilisateurs eux-mêmes. Nous ne ferons ni plus ni moins que ce que font aujourd'hui les constructeurs automobiles qui commencent à intégrer ces technologies : la communication en temps réel entre automobilistes et les accéléromètres qui permettent de détecter tous les mouvements du véhicule.

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Jean-Georges Schwartz, trésorier de l'AFFTAC

Nos appareils n'ont pas fait autre chose que ce qu'avait décidé le gouvernement : nous avons prévenu nos utilisateurs de la présence d'un radar. Il ne faut pas se voiler la face : l'argument marketing « avertisseur de radar » était non négligeable.

Nos appareils ont beaucoup évolué technologiquement et leur confort d'utilisation est aujourd'hui sans commune mesure avec celui des appareils qui ont été posés, il y a peu encore, dans les automobiles. En effet, ils rappellent en permanence aux utilisateurs, par exemple, s'ils roulent au-dessus de 130 kmh, permettant ainsi d'éviter le risque d'endormissement.

La moyenne d'âge de nos utilisateurs se situe au-dessus de quarante ans. En clair, ce sont des gens qui n'ont pas envie de perdre des points à cause d'une minute d'inattention. C'est cela qui a permis à nos appareils de se vendre aussi bien.

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David Roizen, chargé de mission à l'AFFTAC

Aujourd'hui, nos appareils permettent de détecter : des sections de voie accidentogènes identifiées par les services de l'État ; des sections de voie à fort trafic, en lien avec le calendrier de Bison Futé ; les obstacles au trafic (passages à niveau, chaussées rétrécies, traversées de voies de tramways) ; les passages dangereux (ponts, tunnels, fortes pentes, virages signalés dangereux) ; les lieux où se concentrent les publics fragiles (écoles, colonies de vacances, hôpitaux, maisons de retraite) ; les sources de danger temporaires : zones de travaux routiers, obstacles imprévisibles liés à une perte de chargement ou à la présence d'un animal, chaussées glissantes ou rétrécies, interventions d'exploitation en cours, dévoiements temporaires de chaussée, accidents ou embouteillages ponctuels.

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Qui vous donnent ces renseignements ?

En outre, les constructeurs s'intéressent-ils à vos appareils ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Ces renseignements nous proviennent des deux cartographes qui localisent la voirie mondiale : Tele Atlas et Navteq. Ils nous vendent leurs informations sur les limitations de vitesse, les voies dangereuses, les descentes, les pentes, les virages dangereux.

Nous récupérons aussi ce type d'informations auprès des ministères chargés de la sécurité routière.

En fait, nous sommes passés d'un produit communicant – un avertisseur de radar – à une plateforme de contenus, dans laquelle peuvent être insérées un grand nombre d'informations en temps réel et automatiquement.

Quant aux constructeurs automobiles, nationaux ou européens, ils réfléchissent depuis dix ou quinze ans à ce type de service. Nous avons été un peu plus réactifs qu'eux ces six ou sept dernières années et travaillons aujourd'hui avec les marques Renault et PSA afin de leur apporter notre contenu. Ainsi, la technologie des constructeurs automobiles est identique à la nôtre et tend vers des contenus de type sécurité routière, mais aussi d'éco-conduite – nos outils permettant en effet de détecter des conducteurs qui freinent ou accélèrent trop.

J'y insiste : les deux points forts de nos produits dans les prochaines années seront l'éco-conduite et la sécurité routière.

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Pouvez-vous nous parler de vos discussions actuelles avec M. Guéant ? Vers quoi votre accord se dirige-t-il ?

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

L'industrie des avertisseurs de radars est en train de se transformer en industrie des outils d'aide à la conduite. Ses représentants ont compris qu'elle devait désormais consacrer ses produits à la sécurité routière.

M. Guéant nous a informés, de manière assez transparente, de la décision du CISR de supprimer les panneaux indiquant la présence des radars fixes et mobiles, de la mise en place de radars pédagogiques, de l'évolution de la carte des radars puisque ceux-ci seront mis en place dans les zones dangereuses. Notre industrie est prête à se mettre en cohérence avec les décisions du Gouvernement, car les choses évoluent dans le bon sens. C'est une vraie mutation pour notre industrie : nous n'allons plus signaler les radars, mais les zones dangereuses.

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Les zones comportant des radars seront-elles incluses dans les zones dangereuses ?

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

D'après ce que nous avons compris, la cartographie des zones à risque ou des zones dangereuses en France est actuellement élaborée par les préfectures qui nous transmettront un certain nombre d'informations. Notre mission sera de signaler ces zones.

Il se trouve que la politique de cohérence du Gouvernement consiste à placer les radars dans les zones dangereuses. Y aura-t-il un radar dans chacune d'elle ? Ce n'est pas à nous de le déterminer.

Le succès de nos produits réside dans l'aspect communautaire, qui permet aux conducteurs d'être plus intelligents derrière leur volant grâce aux informations qui leur indiquent ce qui se passe 300 mètres devant eux. Ce principe d'intelligence collective ne doit pas être remis en cause.

Ainsi, nos produits continueront d'indiquer les zones dangereuses dans lesquelles pourront – ou pas – se trouver des radars.

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D'après mes informations, l'accord que vous êtes en train de conclure avec le ministère de l'intérieur prévoit que vous allez passer d'une signalisation radars à une signalisation de « zones à risque », lesquelles comprendront éventuellement des radars. Vos produits n'indiqueront donc plus directement l'emplacement des radars, mais l'entrée dans une zone à risque – le risque pouvant être le contrôle de la vitesse.

Vos utilisateurs pourront-ils alors signaler à la communauté, d'une part, l'emplacement, ou pas, d'un radar fixe ; d'autre part, la présence, ou pas, de radars mobiles ?

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Jean-Georges Schwartz, trésorier de l'AFFTAC

En prenant l'engagement de signaler les zones à risque, nous nous sommes engagés à ne pas donner à la communauté le point précis d'un contrôle qui serait signalé par un utilisateur. Les zones ayant des longueurs définies – 4 kilomètres sur autoroute, 2 km hors agglomération et 300 mètres en ville –, les conducteurs auront largement le temps de réduire leur vitesse pour appréhender le danger dans la zone, par exemple un accident.

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

Nous ne signalerons plus des points précis, mais des zones à risque. Dans une zone de 4 kilomètres, 2 km ou 300 mètres – distances sur lesquelles nous sommes tombés d'accord avec le Gouvernement –, le danger peut se trouver n'importe où.

En outre, et cela est très important, nous ne qualifierons pas la nature du danger dans la zone.

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Si je comprends bien, une zone non répertoriée « à risque » le deviendra dès qu'un utilisateur vous signalera un radar mobile.

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

D'après les informations que nous fournit le ministère de l'intérieur, les contrôles mobiles ne s'effectueront plus uniquement dans les zones considérées comme dangereuses.

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Qu'en sera-t-il des systèmes intégrés dans les véhicules, c'est-à-dire fournis par les constructeurs ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Le principe est le même.

Renault, avec laquelle nous travaillons depuis un an, a intégré une technologie identique à la nôtre. Nous sommes en relation commerciale avec cette entreprise et lui communiquons les informations que nous récoltons de notre communauté qui, de ce fait, s'agrandit.

Finalement, les constructeurs automobiles, les constructeurs d'assistants de navigation personnels (PND, personal navigation device) et les constructeurs de boîtiers comme les nôtres ont vocation à disposer d'un contenu de plus en plus fiable et pertinent pour communiquer ces informations à l'ensemble des usagers. C'est un challenge.

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Actuellement, les constructeurs vendent des voitures qui signalent les radars fixes. Qu'adviendra-t-il de ces équipements ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Comme les nôtres, tous les systèmes existants des constructeurs seront mis en conformité afin de signaler les zones à risque en fonction des distances que j'ai citées.

Vous le voyez : la grande force de nos systèmes est de pouvoir évoluer en temps réel.

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

En fait, les constructeurs pourront mettre à jour leurs produits sans demander l'avis des utilisateurs. Ces derniers n'auront donc pas le choix : les produits communicants seront mis en conformité à distance et n'indiqueront plus les radars. C'est nous qui avons la main sur la mise à jour des produits, et cet argument important de la négociation a permis d'aboutir à un accord.

Pour les appareils non communicants, comme certains GPS, qui représentent une minorité du parc, deux options sont possibles. Soit ils seront mis à jour via Internet par les utilisateurs, à qui nous suggérerons de le faire pour que leur produit soit conforme. Soit ils disparaîtront mécaniquement du marché dans une période d'un an à deux ans, sachant que des avertisseurs de radar non mis à jour ne pourront plus être pertinents à la suite de l'évolution de la carte des radars et que nous prenons l'engagement de fabriquer des produits conformes à la réglementation dans un délai raisonnable de trois à quatre mois.

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Combien de véhicules sont équipés de ce genre de système ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

L'AFFTAC comptabilise 6,5 millions d'utilisateurs. Renault, pionnière dans cette activité, recense 1 million de véhicules.

Dans un avenir proche, tous les constructeurs intégreront cette technologie communicante. Elle va donc se démocratiser très vite.

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Où en est votre accord avec le Gouvernement ? Est-il sur le point d'être conclu ?

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

Nous ne voulons pas un accord a minima, mais un accord qui acte la reconnaissance de notre industrie – pour laquelle la France est leader mondial – comme un véritable partenaire de la sécurité routière. En luttant contre l'hypovigilance, qui est un des premiers facteurs d'accidents, nos produits peuvent en effet avoir un impact réel sur le nombre de morts sur la route. La voiture du futur est construite aujourd'hui avec nos produits. Dans dix ans, la voiture communicante devra être construite avec des industriels comme nous.

Au final, nous souhaitons que cet accord pérennise une position industrielle innovante. Nous espérons le signer avec le Gouvernement dans les prochaines semaines.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Notre technologie est en effet brevetée en France. Dans deux à trois ans, elle sera un standard au niveau européen en matière de sécurité routière et d'éco-conduite. Nous avons réellement les moyens de développer de vrais services.

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En dehors des zones à risque, vos outils ne libèrent-ils pas la vitesse ?

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Laurent Bernard, porte-parole de l'AFFTAC

La particularité d'un utilisateur de boîtier communicant et communautaire est sa vigilance constante.

En ayant la possibilité d'informer les autres utilisateurs des aléas qu'il croise sur sa route, il sort d'un exercice très individualiste de la conduite. Il fait confiance aux autres, lesquels lui font confiance. Étant attentif, il vérifiera également si une information qu'il a reçue est toujours valable, pour la confirmer ou l'infirmer.

Vous le comprenez : dans les zones à risque, des accidents peuvent survenir, mais sur l'ensemble du trajet, beaucoup d'autres événements amènent l'utilisateur à conserver sa vigilance.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Nos utilisateurs ne sont pas des aventuriers de la route. Ce sont généralement de gros rouleurs qui ont besoin de leur permis de conduire pour travailler et qui trouvent dans nos boîtiers, nous disent-ils, la possibilité d'avoir une conduite beaucoup plus sereine et attentive à leur environnement, en arrêtant de regarder leur compteur de vitesse ou les sorties d'autoroute en permanence.

Certes, ils peuvent penser qu'il n'y a pas de radar si leur outil ne sonne pas. Néanmoins, comme le montrent nos études, la grande majorité d'entre eux ne veut tout simplement pas « se faire avoir » bêtement à 132 kmh au lieu de 130.

D'ailleurs, comme le montrent les études de l'Observatoire national de la sécurité routière, la vitesse moyenne des véhicules en France a considérablement baissé, passant de 92 à 81 kmh de 2002 à 2010. Les excès de vitesse et les amendes ont également considérablement diminué ces cinq dernières années – les grands excès de vitesse représentant aujourd'hui 0,01 % du total.

Ainsi, ce n'est plus la vitesse qui détermine le choix de nos boîtiers, mais leur capacité à offrir aux utilisateurs des services leur permettant d'être vigilants tout au long de leur trajet et pas seulement dans les zones à risque. Le débat a donc changé.

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

Selon une étude CSA pour l'AFFTAC, que nous tenons à votre disposition, les utilisateurs de nos produits sont plutôt de gros rouleurs et ont moins d'accidents.

Entre 10 % et 15 % du parc automobile français est équipé de nos boîtiers. Nous pensons que ces véhicules ont une influence positive sur les autres : si 15 % d'entre eux freinent, les 85 % restants freinent également.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Les sociétés d'autoroute nous ont demandé si nous étions capables d'informer nos utilisateurs de la présence des patrouilleurs – sachant que deux d'entre eux décèdent chaque année dans l'exercice de leur fonction. Effectivement, lorsqu'un patrouilleur est en intervention, nous communiquons sa présence deux kilomètres avant le point kilométrique où il se trouve en diffusant un message écran et verbal indiquant « attention patrouilleur, mettez vos warnings, roulez à 110 kmh ». Selon les sociétés d'autoroute elles-mêmes, ce type de message permet à une quinzaine de véhicules qui se trouvent derrière le véhicule ayant actionné ses feux de détresse de ralentir et, ainsi, de faire ralentir une succession de véhicules.

Vous le voyez : l'atout de nos produits est de constituer un vrai moyen d'anticiper tous les risques qui surgissent sur la route. Les constructeurs automobiles ne s'y sont pas trompés. Nous avons donc vocation à développer de formidables outils qui pourront être exploités pour des études statistiques, mais aussi pour l'information sur le trafic. Nous sommes en effet capables de connaître le trafic en temps réel – une vitesse de 10 kmh des véhicules de nos utilisateurs sur le périphérique parisien, par exemple, signifiant la présence d'un bouchon –, ce qui sous-entend que nous avons la possibilité de faire évoluer le trafic.

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Jean-Georges Schwartz, trésorier de l'AFFTAC

En Allemagne, des expériences ont prouvé que la vitesse adaptée au trafic est beaucoup plus bénéfique que la « stupide » limitation à une vitesse constante.

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Je ne comprends pas votre choix stratégique et commercial consistant à rester en marge de la recherche et de l'action des constructeurs automobiles qui, je le pense, vous dépasseront d'ici à trois ans dans votre domaine.

Quant à la vitesse, ne nous racontez pas de blague ! Vous nous dites qu'elle n'est plus un problème, alors que tout votre matériel vise à en éviter les pièges ! Notre mission, qui réfléchit aux principales causes des accidents, est au moins d'accord sur le fait que plus la vitesse est élevée, plus l'accident est grave !

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Je me réjouis que vous ayez trouvé un accord avec le Gouvernement. Sachez que nous sommes un certain nombre de parlementaires à avoir « appuyé sur le champignon » pour que vous deveniez des partenaires et non des proscrits !

Hormis le GPS, qui peut se tromper, la technologie moderne peut-elle permettre à chaque automobiliste d'être averti en temps réel de la vitesse à respecter, grâce à des avertisseurs posés sur nos routes ?

En outre, est-il possible d'imaginer à bord des véhicules une sorte de boîte noire qui informe pratiquement en temps réel des causes de l'accident ? Comme vous, je pense que la vitesse adaptée est la clé du problème. Une voiture qui roule à 30 kmh dans une zone à 50 peut très bien faire une embardée et tuer quelqu'un. Aujourd'hui, l'ennemi numéro un n'est pas la vitesse, mais la somnolence, l'alcool, le cannabis – voire le mélange des trois. Le débat sur la vitesse et les radars est donc un faux débat.

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Jacques Myard et moi sommes d'accord : mettre l'accent sur la vitesse a sans doute été une erreur. Elle n'explique pas les accidents du samedi soir liés à l'alcool et au cannabis, qui sont dus à l'incapacité de conduire.

Vous intervenez sur la vitesse des quatre roues, mais mettez-vous des appareils à disposition des motos pour lesquelles, d'ailleurs, il existe une extraordinaire disproportion entre le nombre d'usagers et le nombre d'accidents ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

D'ores et déjà, nos outils affichent en permanence les limitations de vitesse. Lorsque vous roulez à 130 kmh sur autoroute et que vous prenez un axe limité à 110 kmh, notre système affiche automatiquement cette dernière limitation, et cela grâce à la technologie GPS et à la cartographie de Navteq. Nous estimons à 85 % la fiabilité de l'information.

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Est-elle mise à jour de manière instantanée ?

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Non, la cartographie est mise à jour tous les six mois.

En revanche, nous avons travaillé sur la limitation de la vitesse dynamique. En prenant en compte la moyenne des vitesses de nos véhicules pendant plusieurs mois, nous arrivons à déterminer la vitesse réglementaire. Par exemple, si nous constatons pendant deux mois que nos utilisateurs roulent à 90 kmh pour cause de travaux sur un tronçon de l'A4 limité à 130 kmh par le cartographe, nous informons ce dernier de cette limitation ponctuelle. Ce faisant, nous améliorons en permanence la qualité de l'information sur l'ensemble des tronçons en France, en collaboration étroite avec les cartographes.

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Loïc Ratier, président de l'Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d'aide à la conduite

Le système dynamique permet d'étudier la vitesse moyenne des véhicules.

Par ailleurs, notre communauté de 6 millions de personnes remonte les informations. Jusqu'à présent, elle l'a fait via Internet pour mettre à jour ses appareils en ce qui concerne les zones à risque. Ce faisant, elle a pu également remonter des informations sur la vitesse. Contrairement aux cartographes, nos utilisateurs sont en permanence sur la route ; ils peuvent relever les changements de vitesse et nous en informer très vite, ce que ne font pas les services de la DDE ou ceux des autoroutes. Notre communauté peut donc aller très loin.

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Des émetteurs placés sur les autoroutes, qui produiraient un signal instantanément, auraient-ils un coût rédhibitoire ?

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Jean-Georges Schwartz, trésorier de l'AFFTAC

Techniquement, cela est possible et n'aurait pas un coût rédhibitoire. Il faudrait pour cela que nous disposions en temps réel des informations émanant des services de l'État. Dans ce cas-là, nous serions en mesure d'apporter des informations dynamiques à nos utilisateurs leur permettant d'adapter leur vitesse à l'état de la route, au trafic, etc.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Techniquement, il faudrait concevoir un lecteur de panneau de limitation de vitesse.

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Loïc Ratier, président de l'Association française des fournisseurs et utilisateurs de technologies d'aide à la conduite

Ce système existe sur certains véhicules. Il n'est pas très efficace, mais la technologie évoluera.

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Je pensais à une puce sur les panneaux, qui émettrait un signal.

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Fabien Pierlot, vice-président de l'AFFTAC

Je reviens sur l'idée intéressante de la « boîte noire ».

Nos produits n'ont pas vocation à être des « boîtes noires » car nous n'avons pas cette technologie, les constructeurs automobiles étant beaucoup plus compétents que nous en ce domaine. Néanmoins, nos boîtiers peuvent apporter certaines informations après un accident dans la mesure où ils permettent de savoir depuis combien de temps le conducteur roulait, sa vitesse moyenne, et sa façon de conduire grâce aux accéléromètres.

Pour répondre à M. Vanneste, nos systèmes sont compatibles avec les deux roues. Nous travaillons avec des associations sur la sécurité de ces véhicules et développons différents services. Par exemple, en cas d'embouteillage sur le périphérique, si nos utilisateurs de Coyote en voiture circulent à 10 kmh et qu'une moto roule à 20 kmh, autrement dit remonte la file, nous pouvons envoyer à cette dernière un message de prudence. Ce n'est pas notre métier principal, mais il est clair que nos applications moto permettent d'établir une corrélation entre la vitesse d'une voiture et celle d'une moto.

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Excepté le cas de force majeure, un problème contractuel avec vos clients respectifs ne risque-t-il pas de se poser en cas de changement de service rendu, par exemple à la suite d'une décision du gouvernement ?

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Yves Paul Robert, chargé de mission à l'AFFTAC

En cas de changement de service, la question est : avons-nous vraiment le choix ? Si ce n'est pas le cas, nous pourrons invoquer le cas de force majeure.

En outre, d'après les échanges que nous avons avec nos clients, ils n'y seront pas perdants puisque nous pensons faire plus à l'avenir. Nous n'avons donc pas de raison de nous inquiéter.

Enfin, la mission d'information procède à l'audition, ouverte à la presse, de M.Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton".

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Nous accueillons maintenant M. Yves Gascoin, président de la branche lyonnaise de l'association nationale « Les droits du piéton ».

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Notre association milite pour le développement de la marche à pied – premier mode de déplacement en ville – et des transports collectifs, son complément naturel. Elle recherche l'évolution de la cité dans un sens pratique et humain. Nous voulons préserver la liberté d'aller et venir à pied, partout dans la ville, dans des conditions sûres, confortables et, si possible, agréables, avec une attention particulière pour les personnes les moins valides.

Notre présence dans une douzaine de grandes villes françaises, nos contacts soutenus avec diverses associations amies, notamment cyclistes, et notre participation active au « code de la rue » nous permettent d'avoir une bonne connaissance du piéton et de son interférence avec l'ensemble des autres usagers de la rue.

Je présenterai rapidement les paramètres de l'accidentologie routière.

Un accident de la route résulte généralement de la concomitance de plusieurs événements, introduisant un enchaînement non maîtrisable. Par exemple, si, dans une intersection de rues, deux véhicules se présentent simultanément – première circonstance – et que le conducteur non prioritaire n'a pas respecté la consigne – deuxième circonstance –, il en résultera une collision. Il y a eu là conjonction de deux éléments.

On distingue habituellement trois constituants de la sécurité routière.

D'abord, l'infrastructure. Elle est d'une façon globale plutôt correcte, même si elle peut présenter des défauts voire des pièges, mais ils sont généralement signalés. Il n'y a donc pas là un grand réservoir de mesures.

Le deuxième constituant – les défaillances des véhicules – représente un réservoir encore plus faible. Si le contrôle technique a été introduit en France, ce n'était pas en effet pour trouver de nouveaux gains en matière de sécurité, mais pour que notre pays ne devienne pas le dépotoir des voitures n'ayant pas réussi ce contrôle dans les pays voisins l'ayant adopté.

Le comportement des usagers, enfin, est identifié depuis longtemps comme le facteur prépondérant. Je parlerai à cet égard de bilan de guerre. En effet, pour prendre l'exemple de la guerre d'Algérie, que j'ai faite, on comptait alors en moyenne 5 000 morts par an, côté français. En 1970, les accidents de la route ont tué jusqu'à 17 000 personnes par an, soit 3,4 fois plus. Le terme « bilan de guerre » n'est donc pas excessif.

Les choses, très progressivement, ont heureusement changé puisque l'on est passé à 4 000 morts. Mais les résultats stagnent depuis quelques années. Or, des gains substantiels sont encore possibles si l'on se réfère aux meilleurs États européens, tels que la Grande-Bretagne.

J'en viens à la cause d'aggravation de tous les accidents : la vitesse.

Les détracteurs des contrôles de vitesse indiquent souvent que ce ne sont pas quelques kmh de plus qui vont provoquer des accidents. Certes, la vitesse excessive n'est pas à l'origine de tous les accidents. Mais la vitesse est directement corrélée à la gravité de l'accident et donc toute variation de vitesse a des effets extrêmement sensibles. Entre 2002 et 2009, les mesures du Plan Chirac ont fait baisser de 10 kmh la vitesse moyenne sur le réseau avec pour effet de diviser par 2 – de 8 000 à 4 000 – le nombre des tués. 10 kmh en moins égale 50 % d'accidents en moins : une variation de 2 ou 3 kmh de la vitesse moyenne a donc un impact important – et non pas négligeable comme on voudrait nous le faire croire parfois – en termes de sécurité

Pourquoi les résultats n'ont-ils pas été aussi bons en agglomération ? Parce que, selon nous, la vitesse réglementaire de 50 kmh reste trop élevée. Les résultats ne pourront être améliorés de façon décisive qu'en l'abaissant, à l'exemple de Chambéry, sur lequel je reviendrai. Nous sommes donc fermement partisans du maintien du cap sur le contrôle des vitesses. Il convient d'expliquer aux conducteurs que, s'agissant de la tolérance de 5 kmh des radars, être pénalisé pour 52 kmh, signifie que l'on roulait en fait à 57 kmh, soit un excès de vitesse bien lisible sur le compteur. On n'est donc pas condamné pour 2 kmh, mais pour 2 kmh plus 5 kmh, soit 7 kmh.

En ville plus particulièrement, nous proposons – en reprenant également là l'exemple de Chambéry – d'étendre les 30 kmh aux grandes zones centrales, seules les radiales ou rocades restant à 50 kmh, et d'accélérer la création de zones de rencontre à 20 kmh introduites au code de la route en 2008.

Autre idée reçue, les radars automatiques seraient des « pompes à fric ». Les détracteurs du contrôle de la vitesse ont en effet réussi à introduire dans l'opinion publique l'idée que les radars sont destinés à renflouer les caisses de l'État en étant installés de façon à piéger les conducteurs. En réalité, avec la division par deux du nombre des morts, les primes d'assurance, en francs constants, ont baissé de plus de 15 % depuis 2002. C'est ainsi que non seulement le montant des amendes infligées par les radars automatiques est faible si on le compare à celui des primes d'assurance obligatoires – 500 millions contre 15 milliards –, mais l'ensemble des conducteurs – y compris ceux qui ont payé les amendes – a bénéficié, en contrepartie, de réductions de primes.

Il convient donc d'expliquer au public, d'une part, qu'il est possible d'échapper à ces prétendus pièges – il suffit d'observer les limitations de vitesse, comme le font les 80 % de conducteurs qui ont la totalité de leurs points –, d'autre part que les radars automatiques ont contribué à la baisse spectaculaire de l'abominable cortège de souffrances de la mortalité, enfin, et surtout, que ce système, dénoncé par certains conducteurs qui le trouvent trop contraignant, est au contraire parfaitement moral puisqu'il a permis des réductions de primes d'assurance, bien supérieures au montant des amendes.

J'en viens à l'exemple de Chambéry, qui, depuis trente ans, s'est attaquée au problème de la sécurité en ville au bénéfice des modes doux, c'est-à-dire les déplacements des piétons et des cyclistes, lesquels représentaient une bonne partie des tués. C'est ainsi que les élus ont supprimé l'hégémonie de la voiture en baissant la vitesse – tout le centre est en zone 30 –, en inversant les priorités et en réduisant le stationnement sur voirie. Les intersections ont par ailleurs reçu un statut d'espace mixte dans lequel les règles de priorités sont inversées : le piéton est prioritaire sur le vélo et le vélo prioritaire sur l'auto. Ce concept a préfiguré, avec quinze ans d'avance, celui de zone de rencontre introduit depuis en Suisse.

Le résultat est là : en 2006, le taux de piétons tués ou blessés pour 1 000 habitants dans l'agglomération de Chambéry était 3,5 fois moindre que la moyenne nationale. Nous proposons que l'on s'inspire de cet exemple pour améliorer la sécurité de tous les usagers de la rue.

Le premier problème de la voiture en ville est le stationnement, bien avant la circulation. En effet, une voiture ne circule que 8 % du temps. Le reste, elle doit stationner. C'est ainsi que nos villes sont devenues obèses du stationnement depuis au moins vingt ans et que le stationnement gênant devient dangereux pour les piétons. Le stationnement illicite sur trottoirs, passages piétons et en double file à proximité des passages piétons ne peut en effet, en contraignant parfois les piétons à descendre du trottoir et à circuler sur la chaussée et en les masquant lors des traversées, qu'entraîner des accidents.

Pourtant depuis vingt ans, le stationnement interdit est présenté comme une infraction bénigne, appuyé en cela par les amnisties lors des élections présidentielles, sachant en outre que le montant des PV est resté bloqué à un niveau ridicule depuis tout ce temps – il suffit de le comparer à celui qu'il faut payer à Amsterdam, Francfort ou Milan.

Aussi proposons-nous de porter le PV pour stationnement gênant de 35 à 100 euros par référence aux pays voisins, et de développer les méthodes de contrôle et de recouvrement modernes, automatisées, permettant, sur la base de photos, de multiplier par un facteur 3 au moins le nombre de PV, cela à effectifs de police constants ; d'interdire le stationnement à moins de cinq mètres d'un passage piétons ; de classer comme dangereux et non pas simplement gênant tout stationnement masquant les traversées de piétons.

La question de l'alcoolisme et autre drogues est très difficile. L'addiction à l'alcool peut être extrêmement tenace et grave et conduire jusqu'à la folie et à la mort. Dès lors, ce n'est pas avec des peines d'amende voire de prison que l'on ira vers le sevrage et la guérison. Nous proposons de stabiliser les seuils admissibles aux valeurs actuelles.

Nous ne sommes pas d'accord pour les abaisser encore plus pour les nouveaux conducteurs, car ceux-ci sont déjà sévèrement encadrés par des limites de vitesse plus basses et un plus petit capital de points. Une nouvelle baisse des seuils ne ferait qu'accroître la distorsion entre le nombre des personnes en infraction et celui des personnes sanctionnées, ce qui décrédibiliserait les contrôles.

Pour les infractions les plus graves – récidives à un taux d'alcoolémie significatif – nous proposons d'aller, comme pour les grands excès de vitesse, jusqu'à la saisie et la vente du véhicule – considéré alors comme une arme –, quel que soit son propriétaire : cela fera réfléchir à deux fois ceux qui prêtent leur véhicule à quelqu'un qu'ils savent alcoolique – car cela se sait, notamment dans les entreprises.

La conduite d'une moto peut elle-même relever d'une addiction très dangereuse, sachant que l'accidentologie particulière à ce mode est déjà extrêmement grave : il est 15 fois plus dangereux de faire 1 kilomètre en moto qu'en voiture. Alors que le Plan Chirac a très bien réussi pour les voitures, ce n'est pas le cas pour les motos. Or, une proportion des motards ne se déplace pas pour des besoins fonctionnels, mais pour éprouver des sensations, comme sur une piste de compétition. Dès lors, ils sont insensibles à tous les conseils. Il ne reste que la sanction comme moyen de modifier ces comportements.

Nous proposons l'obligation de plaques d'immatriculation plus grandes – ce que les Allemands font depuis longtemps – ainsi que la limitation de la cylindrée en plus de la puissance. Le Japon, qui a une part prépondérante dans la fabrication des motos, y compris des plus grosses, a ainsi limité la cylindrée, mais sur le territoire national : les grosses motos, il les exporte, en particulier en Europe !

Nous militons en outre pour des plaques d'immatriculation lisibles Chacun peut faire l'expérience : au moins une voiture sur dix, si ce n'est une sur sept, a une plaque endommagée. Si ce n'est pas toujours intentionnel, ce sont donc, sur les 30 millions à peu près de véhicules circulant en France, 3 millions de véhicules qui circulent ainsi.

Il n'y aurait pourtant rien de plus simple que d'engager une vaste campagne de contrôle des plaques, par exemple sur les véhicules en stationnement, et, en se raccordant au fichier des cartes grises, de contacter les propriétaires en leur donnant un délai pour se présenter au commissariat le plus proche avec des plaques conformes. Il suffit en effet d'une petite tache pour que la lecture automatique des plaques par les radars soit bloquée.

S'agissant enfin du code de la rue, cette démarche, initiée par M. Perben alors ministre des transports, a eu pour objet de moderniser le code de la route fait pour la voiture dans les années trente. Nous avons participé aux réunions tant du comité de pilotage à Paris que du comité technique à Lyon – au Centre d'études réseaux, transports et urbanisme (CERTU) – mis en oeuvre en la matière. Nous avons obtenu des avancées qui ont un impact sur la sécurité : doubles sens cyclables, réelle priorité donnée aux piétons dans les traversées de chaussée, zones de rencontre limitées à 20 kmh dans les centres villes... Ainsi le code de la route s'est-il adapté à la ville et modernisé, ce qui aura des retombées en termes de sécurité. Cependant, nous attendons encore une définition du trottoir, notamment « repérable et détectable », définition qui est bloquée au ministère de l'intérieur pour diverses raisons. Nous entendons en tout cas obtenir notamment l'interdiction de stationner aux abords des passages piétons et le relèvement du montant des amendes pour infractions au stationnement.

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La zone 30 pose un problème d'acceptabilité. À Strasbourg, où je l'ai défendue avec le maire, 55 % des votants au référendum organisé sur ce point s'y sont déclarés opposés. La pédagogie, dont ce résultat souligne la nécessité, est un sujet que traite d'ailleurs notre mission.

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Le président vient de soulever le problème d'acceptabilité de la zone 30. Or vous proposez de la réduire à 20 kmh dans certaines situations, alors que les automobilistes disent déjà avoir du mal à respecter cette limitation à 30 kmh.

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Nous demandons en effet que soient créées, à l'intérieur des centres villes, que nous proposons de limiter entièrement à 30 kmh, des zones dites de rencontre limitées à 20 kmh. Il s'agit en effet de dépasser la notion de limitation par rue en portant cette limitation à tout un quartier, périmètre qui pourra ensuite être agrandi, comme cela s'est fait à l'étranger.

Les conducteurs ne sont pas mûrs, mais il faut avancer. Nous ne demandons pas, s'agissant des zones 30, qu'elles soient élargies rapidement, mais que l'on en crée petit à petit afin de gagner tranquillement du terrain. À Lyon, la zone 30, qui est très étendue, a demandé cinq ans pour être totalement mise en place. Les résultats des référendums et sondages successifs se sont effrités, le dernier quarteron étant composé des commerçants – qui sont, comme chacun sait, très attachés à la voiture. À Strasbourg, par exemple, les opposants sont majoritaires, mais de 5 % seulement : dans cinq ans, le résultat sera inversé.

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Plus de 40 % des piétons tués ont plus de 75 ans. Existe-t-il une fragilité particulière à partir d'une certaine classe d'âge ? Dans l'affirmative, que préconisez-vous pour protéger ces publics ?

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

L'accidentologie concerne les jeunes enfants puis croît avec l'âge.

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Elle n'augmente en tout cas pas pour les jeunes enfants, grâce à la sécurisation du périmètre des écoles et autres lieux fréquentés par eux.

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Avec la baisse des facultés – l'attention, la vue, l'ouïe,...–, qui vient avec l'âge, tous les dangers se concentrent dans les traversées. Pour les personnes âgées en effet, le trottoir est le seul endroit de relative tranquillité dans la rue, et c'est d'ailleurs pourquoi nous le défendons contre les intrusions de toutes sortes, y compris la circulation de vélos.

Il n'y a d'ailleurs pas de catégorie plus vertueuse qu'une autre. Mais quand deux piétons ont une distraction à un angle de rue, cela se termine par une bosse, alors que si c'est un conducteur roulant à 50 kmh qui a une distraction, cela finit par un mort. Tout est dans la vitesse. Si l'on veut baisser la mortalité en ville, on ne peut jouer que sur la vitesse, sauf à imaginer des traversées à la japonaise en trois temps, ce que personne n'imagine en France : une diminution de 30 % de la capacité de circulation avec des embouteillages généralisés, aucun maire n'y songe ! Ce serait pourtant très efficace.

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Dans des agglomérations importantes, comme Paris, des couloirs de circulation ont été isolés pour certains usagers – bus, taxis, vélos – qui font rouler ceux-ci à contresens. Est-ce un facteur accidentogène supplémentaire ?

Que pensez-vous par ailleurs de la tolérance dont il est fait preuve envers les vélos, voire les cyclomoteurs, roulant sur les trottoirs ?

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Il y a eu à Lyon comme à Paris quelques accidents lors de la mise en circulation des couloirs à contresens, les habitants des quartiers concernés étant habitués, avant de traverser, à ne regarder que d'un côté. Il y a été pallié avec des panneaux prévenant de la circulation de bus à contresens. Là encore, les résultats sont directement liés à la vitesse : un bus, selon qu'il roule à 50 ou à 30 kmh, s'arrêtera sur trente ou quinze mètres, ce qui change tout.

Pour ce qui est des vélos, la possibilité, pour eux seulement, de rouler à contresens dans certaines rues fait l'objet d'une signalisation à l'entrée de la zone, au sol et aux intersections. Elle a pu paraître dangereuse. En fait, non seulement le cycliste voit très bien le véhicule arrivant en face, mais l'automobiliste voit également très bien le vélo, et les deux ralentissent en conséquence et se croisent à faible vitesse. C'est un progrès du même ordre que celui qui avait été obtenu à la campagne en faisant marcher les piétons à gauche face à la circulation. À la limite même, plus la rue est étroite, plus le trafic automobile est freiné et plus les accidents baissent. À Lyon, où l'introduction des vélos en libre-service a pourtant multiplié par deux, en cinq ans, la quantité de deux roues en circulation, le nombre des accidents est resté stable. L'impact des vélos sur la réduction, dans une certaine mesure, de la vitesse automobile a amélioré la sécurité de tout le monde : les automobilistes, qui ont ainsi baissé leur vitesse, se présentent moins vite au carrefour suivant, ce qui permet de ne déplorer, en cas d'accident, qu'un blessé léger au lieu d'un blessé plus grave.

Quant aux vélos sur les trottoirs, il est le résultat du vent de liberté qui souffle dans notre société : chacun interprète le code à sa façon, le tout dans une atmosphère de laisser-faire. Pour autant, cette circulation n'est pas franchement dangereuse pour les piétons. Il suffit de se référer aux circonstances dans lesquelles des piétons ont été blessés ou tués. Néanmoins, un Vélo'v de 30 kg qui renverse une personne âgée peut entraîner une fracture du col du fémur chez cette dernière, avec pour conséquence de la terroriser ensuite à la simple idée de sortir de chez elle.

Le trottoir, dans nos villes archi-motorisées, bruyantes et dangereuses, est le dernier havre de tranquillité et de sécurité, certes relatives. Laisser les véhicules, fussent-ils non motorisés, se l'approprier, c'est faire perdre cette tranquillité aux piétons qui en ont d'ailleurs assez d'être frôlés, talonnés, croisés par un cycliste lancé à toute allure à qui l'on permet tout.

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Pour bien connaître Chambéry, permettez-moi d'être quelque peu en désaccord avec vous : s'il y a une limitation à 30 kmh, elle concerne le coeur historique où l'on serait de toute façon obligé de rouler doucement. De là à vouloir généraliser cet exemple, il y a un pas.

Par ailleurs, des accidents mortels ont eu lieu avec des automobilistes roulant à 30 kmh, tout simplement parce qu'ils étaient sous l'effet de l'alcool ou de la drogue. Je suis donc un peu étonné par vos affirmations quelque peu abruptes sur les questions de vitesse. Nous le constatons depuis que nous étudions le sujet : ce n'est pas la vitesse la première cause des accidents mortels, mais l'alcool, la somnolence, la drogue.

Je vous accorde en revanche que les zones partagées sont un concept intéressant. Je les développe d'ailleurs, en supprimant du stationnement pour faire de la place aux piétons, non sans mal d'ailleurs – je n'ai pas été épargné à cet égard par les critiques des commerçants.

Vous parlez des droits du piéton, mais quid de leurs devoirs ? En matière de sécurité routière, tout est une question de comportement voire de respect : par exemple, on ne traverse pas avec des écouteurs sur la tête sans regarder à droite ou à gauche. Votre démonstration gagnerait donc à mettre également l'accent sur le respect des règles.

Les accidents entre cyclistes et piétons font, croyez-moi, des dégâts. En Allemagne il y a ainsi énormément d'accidents de ce type. De même, rouler ivre à 30 kmh peut tuer. N'évacuez-vous pas un peu trop facilement ces problèmes, au risque d'être moins crédible ?

Comment expliquez-vous par ailleurs que 10 % sans doute des automobilistes conduisent sans permis ?

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Je n'ai pas prétendu que la vitesse était la seule cause des accidents, mais que la gravité de ceux-ci était en relation avec la vitesse. Selon que l'accident se produit à grande, moyenne ou petite vitesse, sa gravité sera également grande, moyenne ou petite.

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Quant à l'alcool, je suis d'accord pour reconnaître qu'il s'agit d'un phénomène très grave. Je l'ai dit dans mon propos introductif, l'addiction à l'alcool ne se guérit pas par 1 ou 3 mois de prison. C'est même pour lutter contre l'alcoolisme que j'ai proposé la mesure la plus sévère : la confiscation et la vente du véhicule.

Quant aux infractions commises par les piétons, je l'ai dit également : il n'y a pas de catégorie vertueuse. Les piétons n'attendent pas toujours que la figurine passe au vert, et ils traversent parfois à moins de 50 mètres d'un passage piétons. Savez-vous d'ailleurs ce qu'il en est pour un piéton qui traverse à plus de 50 mètres d'un tel passage ?

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Combien de conducteurs le savent ?

En tout cas, s'agissant de responsabilité, nous avons dit à nos adhérents, dans l'attente du décret facilitant la traversée des piétons en leur donnant une véritable priorité, de ne pas abuser de ce droit de traversée inscrit dans le code de la route, mais, en ville, de rejoindre le passage piétons le plus proche ou, sinon, de faire signe à l'automobiliste qui arrive et de ne traverser qu'après l'arrêt du véhicule. De même, nous avons proposé d'accompagner la ville de Lyon dans sa campagne contre les vélos sur les trottoirs, en rappelant aux piétons qu'ils ne doivent pas traverser lorsqu'ils sont à moins de 50 mètres d'un passage, lorsque la figurine est rouge, etc. Notre charte comporte d'ailleurs une colonne Droits et une colonne Devoirs.

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Parler de droits et de devoirs pour tous, c'est très bien. Mais entre le fort et le faible, c'est-à-dire entre l'automobiliste, d'une part, et le cycliste et le piéton, d'autre part, le rapport de force n'est pas le même.

Concernant les cyclistes sur les trottoirs, il y a beaucoup plus d'accidents qu'on ne le pense. Certes, il n'y a pas de morts, mais les témoignages sur des cyclistes renversant des personnes au sortir de chez elles sont nombreux – Dieu sait pourtant que je suis favorable aux cyclistes : je suis même à l'origine d'un rapport en ce sens.

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

À Lyon, c'est la police municipale – qui est l'une des plus importantes de France – qui est chargée de la lutte contre ces infractions, après un partage des tâches avec la police nationale : les statistiques font apparaître que, sur les milliers d'infractions commises chaque jour, les PV distribués à des cyclistes pour circulation sur les trottoirs sont en moyenne de 0,7 par jour contre 50 pour stationnement de véhicule sur bande cyclable. Ce n'est pas du tout à l'échelle. Cela prouve qu'il y a une volonté de laisser faire, l'idée étant probablement que la priorité doit être donnée pour le moment au développement du vélo et que l'on verra bien après comment on les fera descendre des trottoirs – ce qui demandera certainement du temps, maintenant que l'habitude est prise.

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Je préfère pour ma part voir un enfant rouler doucement sur un trottoir que sur une route départementale où il est en danger.

Au-delà du fait qu'en l'absence de plaque minéralogique, le cycliste roulant vite sur un trottoir sait qu'il sera difficilement rattrapé et verbalisé, n'y a-t-il pas plus généralement un problème de culture auquel il faudrait s'attaquer dès l'école maternelle ? Il y a, c'est évident, des progrès à faire en la matière.

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Yves Gascoin, président de l'association lyonnaise "Les droits du piéton"

Pour reprendre l'exemple des vélos en libre-service à Lyon, ceux-ci n'étaient pas numérotés au départ. Lorsqu'il a été question d'apposer des chiffres, de 4 centimètres de haut, sur la jupe, le tollé a été général, car c'était là, entre autres arguments, porter atteinte à la liberté individuelle. Depuis que les vélos ont été numérotés, le nombre d'accidents a baissé de 30 % !

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Merci pour la clarté de vos propos.

La séance est levée à 17 heures 10.