La Commission poursuit, sur le rapport de M. Gilles Carrez, rapporteur général, l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2010 (n° 1946).
Article 5 : Instauration d'une taxe carbone et d'une taxe sur le transport routier de marchandises :
Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette les amendements I-CF 16, I-CF 17 et I-CF 18 de M. François de Rugy.
Elle est ensuite saisie de l'amendement I-CF 247 de M. Christophe Caresche.
Les carburants d'aéronef ne font l'objet d'aucune taxation au titre de la TIPP. Afin de mettre un terme à cette situation aberrante, le présent amendement tend à intégrer les carburants d'aéronef dans l'assiette de la taxe carbone.
Je rappelle que la convention de Chicago interdit toute taxation sur le kérosène. Une telle disposition ne pourrait s'appliquer qu'aux lignes intérieures françaises ou aux lignes intracommunautaires, dans le cadre d'accords bi- ou multilatéraux.
C'est exact : les vols internationaux sont soumis à la convention de Chicago et les vols intracommunautaires à une directive européenne qui les exonère de taxe. Une telle disposition ne pourrait donc s'appliquer qu'aux vols intérieurs.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF 7 de M. Marc Le Fur.
Cet amendement vise lui aussi à appliquer la taxe carbone aux aéronefs, qui émettent davantage de CO2 que les voitures ou les camions. En outre, les usagers de l'avion ne font pas partie des contribuables les plus modestes !
Je soutiens cet amendement. Pour que la taxe carbone ait un sens, il convient que tous les pays l'adoptent. En matière de lutte contre l'effet de serre, où il s'agit de limiter le stock d'émissions, une taxe paraît plus efficace que des quotas.
La négociation internationale entamée à Copenhague va durer plusieurs années. Nous devons envoyer un signal fort en direction du plus gros émetteur de gaz à effet de serre dans le domaine des transports.
Ajoutons que le transport aérien subit de plein fouet les effets de la crise. Air France est en difficulté. Il est inutile d'en rajouter !
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de deux amendements identiques I-CF 28 de M. Marc Le Fur et I-CF 79 de M. Charles de Courson.
Le dispositif gouvernemental soumet les services de transport routier, non à la taxe carbone, mais à la taxe générale sur les activités polluantes, laquelle sera payée par le donneur d'ordre et, de fait, portera sur le produit transporté – tout comme l'écotaxe créée par la loi Grenelle 1. On estime que la TGAP s'élèvera à 1 % du chiffre d'affaires. Résultat : il existera deux taxes sur le même objet, payées par les mêmes personnes.
Par ailleurs, les réponses de Mme Lagarde sur l'application de la TGAP aux affréteurs étrangers sont peu satisfaisantes. Si ceux-ci font appel à des sociétés étrangères pour transporter, en France, des marchandises d'origine étrangère, nos entreprises subiront une concurrence déloyale.
Dans ce cadre, l'amendement I-CF 29, qui sera appelé ultérieurement, tend à supprimer la TGAP sur les transports. En contrepartie, je propose que les services de transport routier soient soumis, non à la TGAP, mais à la taxe carbone, suivant un mécanisme proche de celui destiné aux professions agricoles, avec une exonération partielle et la mutualisation d'une partie de la recette.
Je souligne qu'un camion parcourt en moyenne cent kilomètres, notamment pour transporter des produits frais, et qu'il n'existe pas d'alternative ferroviaire.
La taxe carbone vise à réduire les émissions de CO2. Compte tenu de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui a refusé l'extension de la TGAP à l'électricité, je ne vois pas comment pourrait être accepté un système dans lequel on créerait une taxe carbone dont seraient exonérés les principaux émetteurs de CO2!
Dans le dispositif gouvernemental, les transporteurs sont soumis à la taxe carbone, mais elle leur est remboursée, au même titre qu'une fraction de la TIPP. Comme il faut que le transport routier soit concerné par la taxation des émissions de CO2, on crée un mécanisme en miroir, qui consiste à faire payer à l'affréteur une TGAP d'un montant égal à celui de la taxe carbone.
Le système est assez compliqué, je le reconnais, mais il a été conçu de manière à pénaliser le moins possible les transporteurs routiers français par rapport à la concurrence internationale, dans la mesure où la TGAP est exigible pour tout transport de marchandises sur le territoire national, même ceux effectués par des opérateurs étrangers.
Certes, on peut mettre au point des stratagèmes afin d'échapper à la taxation, mais il s'agit de cas isolés. N'allons pas pour autant supprimer la TGAP sur les transports !
Le dispositif gouvernemental atteint là ses limites.
Le but d'une taxe est de modifier les comportements. Or, comme l'a souligné Marc Le Fur, il n'existe pas d'alternative au transport routier. Cette taxe est une pénalisation, non une incitation, puisque rien n'est prévu pour financer une solution de remplacement.
Du coup, le Gouvernement en est réduit à imaginer un dispositif extraordinairement complexe pour donner le change. Comment s'y prendra-t-on pour faire payer les affréteurs, dès lors que le point de départ ou d'arrivée du transport se trouvera à l'étranger ? Tout cela procède d'une volonté d'affichage, plutôt que d'une véritable démarche écologique.
La taxe ne pourra pas s'appliquer aux transports réalisés en France par un transporteur étranger à l'initiative d'un donneur d'ordre étranger.
Dès lors que la marchandise est livrée en France, le transport est facturé et la taxe due.
Mais comment aura-t-on connaissance de la facture éditée par un transporteur polonais à un affréteur allemand pour la livraison d'un produit fabriqué en Bavière ?
En outre, on ne peut pas prélever deux impôts, la TGAP et l'écotaxe, sur un même objet !
Il reviendra à l'administration des douanes de contrôler que le client français, redevable de la TGAP, a bien payé celle-ci.
Les amendements I-CF 28 et I-CF 79 visent à empêcher la diminution de tout ou partie de la demande de remboursement, à hauteur du tarif de la taxe carbone prévue à l'article 266 quinquies C pour le gazole d'indice 22, par le biais d'un certificat qui serait cessible.
Je suis prêt à sacrifier ces certificats – dispositif d'exonération très compliqué qui n'a aucune chance de fonctionner –, pourvu que l'essentiel, c'est-à-dire la TGAP transport, soit sauvé.
La Commission adopte ces amendements identiques.
Elle est ensuite saisie d'un amendement I-CF 19 de M. Marc Le Fur.
Mon amendement visant à supprimer la TGAP ayant peu de chances d'être adopté, je propose d'appliquer au transport routier la taxe carbone selon les modalités auxquelles est soumise l'agriculture : 75 % étant remboursés, les 25 % restants sont mutualisés pour oeuvrer à réduction des émissions de CO2.
Le Conseil constitutionnel sanctionnerait cette disposition, dans la mesure où les transporteurs sont les émetteurs principaux. Avis défavorable.
Dans ce cas, l'ensemble du dispositif sera annulé puisqu'il exonère de l'acquittement de la taxe carbone les 1 000 plus gros pollueurs de France.
Cet amendement est satisfait puisque le projet de loi de finances prévoit un remboursement à 100 %.
L'amendement suivant pose en revanche un problème de fond. La suppression de la TGAP pourrait fragiliser l'ensemble du secteur.
La Commission rejette cet amendement.
Puis la Commission est saisie de deux amendements identiques I-CF 29 de M. Marc Le Fur et I-CF 78 de M. Charles de Courson.
Alors que nous venons d'adopter un impôt ayant le même objet dans le cadre du Grenelle 1, il me semble disproportionné de voter un impôt spécifique sur les produits transportés, qui représente 1 % du chiffre d'affaires du secteur.
J'ai soumis à Mme Lagarde le problème suivant : comment calculer la TGAP sur quatre machines outils produites à Berlin, transportées par un camion tchèque et livrées successivement à Bruxelles, Lille, Luxembourg puis Berne ? La ministre a répondu que le calcul se ferait d'après la lettre de voiture et serait basé sur la distance entre la frontière et le lieu de livraison en France, le rendement au kilomètre étant estimé à partir de celui des camions de 40 tonnes.
Comment va-t-on calculer le prorata, étant entendu que la TGAP ne peut s'appliquer sur le transit en France des deux machines restant à livrer ? Comment va-t-on parvenir à exploiter les lettres de voiture, qui ne sont généralement pas transmises ? Combien de fonctionnaires seront-ils employés à cette tâche ? Cette taxe est une usine à gaz.
Par ailleurs, elle est discriminatoire à l'encontre des transporteurs français. Les transporteurs étrangers y échapperont, ne serait-ce que parce que les réservoirs des camions peuvent contenir jusqu'à 1 000 litres d'essence.
On confond aussi la répercutabilité juridique et la répercutabilité économique. Certes, on pourra répercuter via le chargeur, mais celui-ci exigera en retour une baisse du prix, sans quoi il ira à la concurrence étrangère.
Les bénéfices de la branche transports sont tombés à 1 % du chiffre d'affaires. Le montant de la TGAP représentant la même proportion, il est fort à craindre que le secteur, déjà mal en point, sera bientôt sinistré. Les transporteurs étrangers, qui respectent moins le code de la route et les normes sociales, et dont les camions sont plus polluants, auront alors supplanté leurs homologues français.
Enfin, je me demande si cette disposition ne sera pas annulée par le conseil constitutionnel au motif qu'elle est inintelligible.
Permettez-moi de vous soumettre un autre problème, celui du fret retour des camions province-Paris. Dans la mesure où la TGAP est assise sur le volume de carburant consommé pour l'exécution du transport, même si le volume de marchandises transportées au retour est faible, la TGAP sera néanmoins applicable. C'est une logique absurde.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette ces amendements.
Puis elle examine l'amendement I-CF 80 de M. Charles de Courson.
Cet amendement prévoit un plafonnement de la taxe carbone afin de protéger les ménages et les entreprises en cas d'envolée du prix du baril de pétrole. Au passage, il montre qu'avec un baril à 120 dollars, la taxe carbone devient inutile.
Le ministre de l'environnement a pourtant rappelé qu'il fallait une lisibilité à moyen et long terme pour optimiser les investissements en économie d'énergie.
L'amendement est retiré.
La Commission est saisie de l'amendement I-CF 219 de M. Jérôme Cahuzac.
M. Jérôme Cahuzac. La loi de finances pour 2006 avait repoussé au 1er janvier 2010 l'instauration de la TGAP dans les DOM, en raison de l'absence d'unité de production de biocarburants. La situation demeurant inchangée, la mission d'information commune aux commissions des finances et des affaires économiques sur le prix des carburants dans les DOM propose de supprimer définitivement l'application de la TGAP dans les départements d'outre-mer.
Telles sont les limites d'une taxation dont la finalité est de modifier les comportements, alors que rien n'est fait pour aider à la modification des comportements.
Le problème provient de ce que les normes appliquées dans les DOM les empêchent d'importer leur essence depuis les pays voisins, États-Unis et Venezuela, avec des coûts de transport évidemment moindres. Pourquoi ne pas négocier directement avec l'Europe des critères spécifiques, un traitement identique à celui des TOM ?
Cela serait difficile, dans la mesure où ces normes ont été adoptées sous la présidence française.
Cela n'a rien à voir avec l'Europe. Il s'agit plutôt de protéger des situations acquises !
À ma connaissance, les normes européennes appliquées dans les DOM seront appliquées au Venezuela et dans les États de la Caraïbe dans un délai de deux ans. Il sera alors possible aux DOM de s'approvisionner en carburant dans des conditions beaucoup plus faciles.
Pour répondre à la question du rapporteur général, la totalité de la production de sucre est destinée à l'alimentation.
Le délai sera vraisemblablement de cinq ans. C'est pourtant un horizon proche, qui rend inutile une demande de dérogation auprès de l'Union.
Après avis favorable du rapporteur général, la Commission adopte l'amendement.
Puis la Commission adopte l'article 5 ainsi modifié.
Après l'article 5 :
La Commission est saisie de l'amendement I-CF 76 de M. Charles de Courson.
La loi de finances pour 2009 comportait une clause de revoyure annuelle concernant le niveau de défiscalisation des biocarburants, pour tenir compte de l'évolution des conditions économiques. Le prix du baril de pétrole a considérablement chuté, la parité eurodollar a sensiblement évolué et les prix des matières premières agricoles ont énormément changé, à tel point que la compétitivité des biocarburants s'est fortement dégradée. Il convient par conséquent de stabiliser le niveau de défiscalisation pour 2010 et 2011.
Avis défavorable. L'an dernier, après une discussion très longue, nous avions trouvé un point d'équilibre concernant l'évolution sur trois ans. Du reste, rapport après rapport, l'avantage environnemental des biocarburants est contesté.
L'objectif communautaire est une réduction des émissions d'au moins 35 %. Or, le rapport publié il y a quelques jours par l'ADEME, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, montre que le résultat obtenu va de 45 à 70 % selon les filières. La réalité a été travestie. Il convient en réalité de distinguer les biocarburants selon leur pays d'origine : le bilan du bioéthanol du Brésil, par exemple, est très mauvais, car il est produit sur des terrains issus de la déforestation ; en revanche, dans les pays de l'Union européenne, le bilan est bon.
Le rapport de l'ADEME exprime tout de même des doutes à propos des gains en émissions avec l'ETBE.
Vous avez pourtant voté l'amendement de Courson dit « E 10 », qui permet l'incorporation directe.
La Commission rejette l'amendement I-CF 76.
Article 6 : Création d'un crédit d'impôt sur le revenu forfaitaire destiné à rendre aux ménages le montant de la taxe carbone :
La Commission est saisie de l'amendement I-CF 209 rectifié de M. Jérôme Cahuzac.
Il s'agit de rendre plus juste la redistribution aux ménages en la calant sur les tranches du barème de l'IR. Nous proposons en outre de multiplier le crédit d'impôt par 1,3 pour les contribuables domiciliés dans une commune non intégrée à un périmètre de transports urbains. Contrairement aux affirmations de Mme Lagarde, dans de très nombreuses villes possédant un plan de déplacements urbains, tout le territoire communal n'est pas couvert. Il est donc nécessaire de nuancer la règle proposée par le Gouvernement.
Avis défavorable. Pour les ménages des cinq premiers déciles de revenu, qu'ils soient urbains ou ruraux, le remboursement excédera le coût moyen subi au titre de la taxe carbone. L'effet redistributif, certes léger, est donc réel, ce qui répond partiellement à la préoccupation de notre collègue Cahuzac.
J'attire également l'attention sur le fait que les transports collectifs ne couvrent pas la totalité du territoire des collectivités qui en sont pourvues, loin s'en faut, et, objectivement, les ménages non desservis sont pénalisés par rapport aux autres. C'est notamment le cas dans de nombreuses communes dites « rurbaines », très étendues, dans lesquelles les transports collectifs ne couvrent que le centre-ville.
Lorsque le Gouvernement a présenté la taxe carbone, il a indiqué que la localisation de l'habitation serait prise en compte. Or certaines zones périurbaines ou semi-rurales sont très mal desservies en transports collectifs. En vertu de l'article 40 et de l'orthodoxie budgétaire chère à la Commission et à son président, vous avez osé refuser un de mes amendements, qui visait à affecter une partie du produit de la taxe carbone au développement des transports collectifs.
Je partage l'avis de M. Cahuzac : nous ne pouvons nous contenter d'un signal-prix. Vous ne tenez pas compte de la spécificité des populations semi-rurales, qui demeurent assez loin de leur lieu de travail. Dans la vie courante, cette taxe sera une charge supplémentaire.
Tous les pays qui ont instauré une vraie taxe carbone, d'un montant suffisant, prévisible et croissant dans le temps, ont mis en oeuvre, dans le même temps, une vraie réforme fiscale. Le but d'une taxe écologique n'est pas de pénaliser les consommateurs mais de modifier un prix. Peut-être le coût s'équilibre-t-il en moyenne, mais certainement pas pour les ménages vivant en milieu rural avec des revenus modestes. La contribution climat-énergie aurait dû faire partie d'une réforme d'ensemble, avec une redistribution pour les revenus les plus bas.
La Commission rejette cet amendement.
La Commission examine en discussion commune les amendements I-CF 245 de M. Christophe Caresche et I-CF 210 de M. Jérôme Cahuzac.
Vous ne serez pas surpris que, dans un souci de justice fiscale, nous revenions sur le bouclier fiscal. Il nous semble que ses bénéficiaires ne devraient pas être concernés par le crédit d'impôt forfaitaire créé pour compenser l'impact de la taxe carbone sur le pouvoir d'achat.
Avis défavorable. Le dispositif de compensation prend en compte deux critères simples : la taille de la famille et la possibilité d'utiliser les transports en commun. Jamais il n'a été envisagé de faire de cette compensation un outil de redistribution fiscale, contrairement à la prime pour l'emploi.
Pour éviter les formalités administratives, peut-être pourrions-nous suggérer qu'un chèque unique soit adressé aux bénéficiaires du bouclier fiscal ?
Les ménages bénéficiaires du bouclier fiscal recevront-ils aussi un chèque de crédit d'impôt pour compenser la taxe carbone ?
La TIPP et la taxe carbone ne sont pas intégrées dans le calcul du bouclier fiscal. En outre, je vous rappelle que 80 % des contribuables bénéficiant du bouclier fiscal ne paient pas l'ISF, et que les 20 % des contribuables qui paient l'ISF et bénéficient du bouclier fiscal perçoivent 90 % des restitutions.
Votre raisonnement est un peu spécieux, monsieur le rapporteur général : pour éviter de remettre le bouclier fiscal en cause, on ne touche plus les prélèvements à caractère général et on les contourne avec des taxations indirectes. Cela participe d'une logique qui vise à démolir progressivement l'impôt. Sans doute aurons-nous besoin un jour de recettes fiscales, et le problème ne sera pas résolu en développant constamment les taxations indirectes. Vous êtes enfermé dans une position dogmatique indéfendable, surtout en période de crise, et vous refusez d'affronter le problème de face.
Les bénéficiaires du bouclier fiscal qui recevront un chèque de 46 euros se feront une mauvaise idée de notre administration. Ou alors, s'ils croient que cette somme correspond à leur restitution, ils risquent de subir un choc ! Tout cela est bien maladroit !
Depuis l'adoption du paquet TEPA – en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat –, le Gouvernement et les membres de la majorité ont toujours affirmé que le bouclier fiscal était une mesure de justice fiscale, empêchant que quiconque travaille plus d'un jour sur deux pour l'État. Mais alors, pourquoi le bouclier fiscal ne protège-t-il pas contre la taxation carbone alors qu'il protège, par exemple, contre le financement du RSA, le revenu de solidarité active ? En quoi la taxation carbone serait-elle plus légitime ou plus noble que le financement collectif du RSA ? Vous ne tiendrez pas sur cette ligne. Le président de la Commission des lois, membre de la majorité, a lui-même demandé que la CRDS soit extraite de cette protection. Vous avez l'occasion d'adresser un signal aux pouvoirs publics, en particulier à la Présidence de la République, pour expliquer que tout cela n'a que trop duré.
Il est de plus en plus compliqué de s'en tenir au dogme, monsieur le rapporteur général. Même si le chèque ne sera que de 46 euros, il ne s'agit pas seulement d'un symbole mais d'un problème de fond. Tout à l'heure, à propos de la taxation supplémentaire des banques, nous avons obéi au principe de réalité. Vous devriez avancer aussi sur ce sujet.
D'après certains inspecteurs des impôts, il arrive que des contribuables non imposables perçoivent des revenus élevés, notamment au titre de l'assurance vie – plusieurs centaines de milliers d'euros parfois –, et reçoivent pourtant un chèque de remboursement de la moitié de leurs impôts locaux. C'est de la folie !
La Commission rejette ces amendements.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF 211 de M. Jérôme Cahuzac.
Nous ne concevons pas la taxe carbone de la même façon que vous. Au-delà du signal-prix et des modifications de comportement, nous souhaitons qu'elle contribue à la justice fiscale. C'est pourquoi nous demandons que la restitution ne bénéficie qu'à une partie des ménages redevables de l'impôt sur le revenu.
Cet amendement procède de la même idée que le précédent : employer la taxe carbone comme instrument de redistribution entre ménages en fonction des ressources. Or le critère des ressources n'a pas été retenu ; c'est un remboursement forfaitaire qui a été choisi, en fonction de la composition de la famille et du lieu de résidence.
La Commission rejette cet amendement.
Elle en vient à l'amendement I-CF 246 de M. Christophe Caresche.
Même si ce n'est pas son objectif, une taxe carbone, de fait, constitue un prélèvement sur le revenu, en particulier pour les ménages les plus modestes, qui ne peuvent modifier immédiatement leur comportement. Une politique d'accompagnement redistributive aurait du sens car l'impact de la taxe carbone sur un ménage dépendra du niveau de ses revenus. Il s'agit donc de ne pas redistribuer de façon uniforme, de redistribuer davantage aux ménages modestes et de ne pas redistribuer aux plus riches.
Eu égard à son caractère forfaitaire, la compensation est automatiquement redistributive. Pour les cinq premiers déciles de revenu, en moyenne, elle est supérieure au surcoût entraîné par la taxe carbone. En revanche, pour les cinq déciles supérieurs, en moyenne, elle est inférieure à ce surcoût, à hauteur de 45 euros en milieu rural et de 21 euros en milieu urbain. Pour le dernier décile, c'est-à-dire les 10 % de ménages percevant les ressources les plus élevées, en moyenne, elle est inférieure de 27 euros à ce surcoût. Le souci de redistribution a été intégré dans le barème même.
Quand vous entreprenez une réforme fiscale, vous faites en sorte – c'est le cas pour la taxe professionnelle – que les perdants soient les moins nombreux possible. Or la taxe carbone frappe les ménages les plus modestes, vivant dans des banlieues ou des campagnes dépourvues de transports en commun. Ce n'est pourtant pas son objectif ! Ce qui compte, ce n'est pas la moyenne mais le fait que la redistribution au bas de l'échelle des revenus soit suffisamment forte pour que pratiquement personne ne soit touché. L'enjeu est de rendre acceptable la taxe écologique. Si la mesure rencontre des difficultés, c'est en grande partie parce que nombre de ménages ont le sentiment de subir un prélèvement sur leur pouvoir d'achat.
La proposition de Pierre-Alain Muet consiste non pas à augmenter la restitution pour les plus défavorisés, mais à la supprimer pour les plus favorisés. Or, exclure du bénéfice de la compensation de la taxe carbone les tranches les plus élevées de l'impôt le revenu aboutirait, en cas d'augmentation de la taxe ou d'extension de la fiscalité écologique à d'autres produits, à perturber profondément le sens à donner à la fiscalité écologique, qui est de créer un signal-prix. Les pays étrangers qui ont instauré une fiscalité écologique ne sont pas tombés dans cette erreur.
L'augmentation progressive de la taxe carbone est une machine de destruction de l'impôt sur le revenu. Le mécanisme de redistribution généralisée qu'elle prévoit aboutira peu à peu à détruire le caractère progressif de cet impôt, ainsi que sa vocation à procurer des recettes !
Si nous, socialistes, avions instauré une taxe carbone, nous l'aurions fait dans le cadre d'une réforme de l'imposition du revenu dont nous avons besoin. Alors que la CSG est proportionnelle, l'impôt sur le revenu est devenu une peau de chagrin. Notre fiscalité est à la fois très peu redistributive et très peu écologique. Pour y remédier, une belle réforme est à faire.
Pourquoi faut-il redistribuer aux plus modestes ? Parce qu'ils n'ont pas le choix. Les dépenses des personnes à revenu faible sont contraintes. La mission d'information commune sur la mesure des grandes données économiques et sociales à laquelle nous avons participé tous les deux, monsieur Mariton, l'a montré. Au contraire des personnes aux revenus élevés, celles aux revenus modestes n'ont quasiment aucune possibilité de faire des choix de substitution. Construire une fiscalité écologique comportant des mécanismes de redistribution relève donc d'une vraie logique.
La Commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF 217.
Je suis à la fois favorable à l'instauration d'une contribution climat énergie, qui peut être une taxe carbone, et hostile au dispositif que vous proposez, qui m'apparaît comme une sorte d' « usine à gaz ».
Quel est l'objet de mon amendement ? Je suis favorable à une mise en place progressive du dispositif. Vouloir aller immédiatement au meilleur du rendement de la taxe carbone me semble une erreur. Je suis également favorable à ce que cet impôt soit rendu plus juste au regard des revenus, ainsi qu'envers les habitants des zones non pourvues en transports collectifs. Il faut aller plus loin dans l'équité au bénéfice de ceux qui habitent le plus loin, sont obligés pour se déplacer d'utiliser des véhicules individuels, et qui, vivant dans des contrées aux caractéristiques climatiques plus difficiles, dépensent plus pour leur chauffage. Qu'ils vivent par goût ou nécessité dans ces régions, ils n'ont pas à subir la décision subite d'instaurer une taxe carbone.
Les consommations d'énergie peuvent évidemment varier en fonction de l'altitude, de la longitude et de la latitude. Si Mouthe, la ville la plus froide de France, est bien en zone de montagne, les habitants des zones méditerranéennes doivent plus longtemps que les autres recourir à la climatisation dans leur voiture.
Je ne donnerai d'avis favorable à aucun amendement instaurant des montants différents de la taxe carbone en fonction de la géographie.
Nous sommes face à une question de continuité législative et d'équité. La loi « montagne », adoptée à l'unanimité par le Parlement en 1985, reconnaît la spécificité des territoires de montagne et la nécessité d'adapter les textes législatifs et réglementaires à leurs réalités. Ce qui est ici demandé est tout simplement l'application de cette loi.
C'est aussi une affaire d'équité. En zone de montagne, un véhicule consomme beaucoup plus de carburant qu'en plaine. Les cartes retranscrivant les normes d'isolation des bâtiments font apparaître de façon évidente que les zones de montagne sont les plus froides et que les consommations de carburant, à la fois du fait de l'altitude et des problèmes d'isolation des bâtiments, y sont plus élevées. Il n'y a pas de raison qu'une partie de la population s'en trouve pénalisée.
Un texte ne peut traiter de la même manière des territoires différents ; l'Europe le reconnaît désormais. Si, par exemple, l'État a accepté qu'en montagne, les chauffeurs de taxi pratiquent des majorations de tarifs, c'est bien parce qu'il a reconnu que les frais y étaient plus élevés qu'ailleurs. En France, comme dans les autres pays européens, c'est en application de la loi que des communes sont classées en zone de montagne.
La taxe carbone est une contribution énergie-climat, assortie d'un mécanisme de remboursement pour préserver le pouvoir d'achat. Ne pourrait-on pas fonder celui-ci sur la longueur des trajets entre le domicile et le lieu de travail ? Le dispositif pourrait être fondé sur une base déclarative. Même en plaine, il faut parfois effectuer de longs trajets en voiture pour pouvoir aller jusqu'à une gare. Nous concitoyens redoutent une amputation de leur pouvoir d'achat due à l'éloignement entre leur domicile et leur lieu de travail.
Malgré le bon sens qui marque les arguments de notre collègue Michel Bouvard, je crains qu'ils ne soient acceptés ni par le rapporteur général, ni par le Gouvernement. Les critères édictés pour la redistribution sont ceux du lieu d'habitation et de l'importance de la famille. Cette taxe est une taxe de plus. Le Gouvernement demande au Parlement de la voter pour permettre au Président de la République de se targuer d'avoir instauré une taxe écologique.
La taxe carbone est destinée à lutter contre l'émission de CO2. Mais ces émissions sont-elles plus élevées dans les villes, les campagnes, ou les montagnes ? Je continue à me référer à l'article 1er de la loi du 9 janvier 1985. Cette loi reconnaît la spécificité de la montagne : sinon pourquoi des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) auraient-elles été instaurées en matière agricole ? Pourquoi ceux qui vivent de la manière la plus naturelle devraient-ils payer pour les autres ?
La Commission rejette l'amendement.
Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette ensuite successivement les amendements I-CF 193 et I-CF 123 de M. Michel Bouvard.
Puis elle examine les amendements identiques I-CF 122 et I-CF 121 de M. Michel Bouvard, l'amendement I-CF 121 faisant l'objet d'un sous-amendement I-CF 281 de M. Marc Le Fur.
Le dispositif présenté par le Gouvernement prévoit deux sortes de compensation, l'une modeste, et l'autre plus élevée, destinée au monde rural. Pour distinguer mondes rural et urbain, le critère adopté a été celui du périmètre de transport urbain (PTU). Or, la densité et la qualité du service de transport varient considérablement d'un périmètre à l'autre.
Mon collègue Jean-Yves Cousin et moi-même avons considéré que, lorsque la population du chef-lieu de ce périmètre est inférieure à 15 000 habitants, la capacité du système de transport n'est pas celle que peuvent procurer des PTU dont le chef-lieu est plus peuplé. En réalité, ces secteurs sont des secteurs ruraux, qui s'efforcent de développer un dispositif de transport. Il faut donc accorder à leurs habitants le bénéfice de la compensation majorée. Autrement, le message à l'attention du monde rural va se trouver gravement brouillé.
Pour la mise en place d'une très modeste ligne de transport en commun, le département dont je suis l'élu a exigé la création d'un PTU ; mais en réalité, le secteur où celui-ci a été créé est rural.
Le sous-amendement I-CF 281, qui concerne les PTU où la ville centre comporte moins de 15 000 habitants, a été rattaché à un amendement relatif aux zones de montagne avec lequel il n'a aucun lien. Je souhaite que, lors que la réunion que nous tiendrons en application de l'article 88, il soit déposé de nouveau, mais en tant qu'amendement. Dans les conditions actuelles, par cohérence avec nos votes précédents, je ne peux qu'y donner un avis défavorable.
Associé à l'amendement I-CF 121, le sous-amendement I-CF 281 permet de résoudre des difficultés peut-être diverses, mais réelles. La question est bien celle de la détermination respective des secteurs urbains et ruraux.
L'équité voudrait que les villes centres de moins de 25 000 habitants soient également concernées. Les populations de ces villes souffrent des mêmes contraintes que celles des communes de moins de 15 000 habitants.
L'amendement I-CF 122 est retiré par son auteur.
La Commission adopte le sous-amendement I-CF 281, puis l'amendement I-CF 121 ainsi modifié.
La Commission adopte ensuite l'article 6 ainsi modifié.
Article 7 : Remboursement partiel de la taxe carbone en faveur des exploitants agricoles :
La Commission adopte l'article 7 sans modification.
Après l'article 7 :
La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 7.
Elle examine d'abord l'amendement I-CF 113 de M. Didier Migaud.
Mon amendement I-CF 113 propose, dans l'esprit de la taxe carbone, d'augmenter quelque peu les tarifs de la contribution de solidarité sur les billets d'avion, créée à l'initiative du président Jacques Chirac. Que le transport aérien ne soit pas concerné par la taxe carbone peut paraître aberrant. La contribution sur les billets d'avion avait aussi pour objet d'adresser un signal-prix. La majoration proposée créerait une recette de 75 millions d'euros et serait affectée, comme aujourd'hui, à un fonds de solidarité pour le développement.
Avis défavorable. Lors de la création de cette taxe, il nous avait été assuré que tous les autres pays nous suivraient. Or, aujourd'hui, seuls l'ont fait la République démocratique du Congo, le Niger, la Corée du sud, Madagascar, la Côte d'Ivoire et le Chili. J'ajoute qu'Air France annonce un plan de suppression d'emplois concernant 2500 à 3000 salariés. Je suis défavorable au développement de taxes spécifiques à la France, qui nuisent à nos entreprises.
Cette contribution existe déjà. D'une certaine façon, elle compense l'exclusion du transport aérien de l'assiette de la taxe carbone.
Cet amendement procurerait un double dividende : une taxation indirecte du kérosène et un geste de solidarité sensibilisant au réchauffement climatique.
Mieux vaudrait taxer les bêtises de Cambrai, qui ne sont guère soumises à concurrence… Mais je ne comprends pas que l'on propose sans étude d'impact de majorer les taux sur les transports aériens, qui sont pour leur part soumis à une rude concurrence mondiale.
C'est votre majorité qui a créé cette taxe, je propose simplement d'augmenter un peu son taux.
Le produit de la taxe s'est effondré dans le sillage de la première classe, qui est taxée dix fois plus que les autres catégories. Si l'on veut soutenir durablement la lutte contre les pandémies, il faut donc passer par des dépenses budgétaires.
Par ailleurs, le transport aérien va très mal, en particulier Air France qui doit résister à la concurrence. Cet amendement vient donc à un très mauvais moment.
Il me semble malvenu de faire référence aux bêtises de Cambrai à propos d'une taxe qui a permis, à l'initiative du Président Chirac, de doubler le nombre d'enfants traités par trithérapie dans les pays africains francophones. Alors que le rendement de la taxe va baisser, le Gouvernement projette de récupérer 20 millions des 150 millions collectés pour les affecter à l'aide bilatérale.
Pour toutes ces raisons, je soutiens cet amendement.
Cette année, le Gouvernement a inclus le produit de cette taxe dans le périmètre de l'aide publique au développement, laquelle diminue.
J'étais contre une mesure franco-française, qui risquait de créer une distorsion de concurrence. Les autres pays, en particulier européens, ne nous ayant pas suivis, je le regrette, je pense que nous devrions en rester là.
Le transport aérien souffre sans doute, mais l'aide au développement encore plus : elle diminue alors même que les pays les plus pauvres sont parmi les plus touchés par la crise. Ce serait un signe d'accompagner, par le vote de cet amendement, la nouvelle initiative qu'a prise Jacques Chirac pour lutter contre les faux médicaments. Certes, les autres pays ne nous ont pas suivis, mais il fut un temps où l'on était fiers de l'exception française qui faisait que nous étions un peu en avance dans certains domaines. C'était, il est vrai, avant que nous réintégrions l'OTAN et que nous alignions notre politique étrangère sur celle des États-unis…
Le kérosène a été détaxé – en 1944 – pour éviter que des différentiels de taxe ne conduisent à des circuits de ravitaillement qui mettent en péril la sécurité des passagers. Et la convention de Chicago n'a jamais été remise en cause.
N'oublions pas par ailleurs que l'argent d'Unitaid finance principalement la fondation Clinton. Est-ce vraiment l'objectif de cet amendement ?
Le produit de la taxe s'est tassé mais il ne s'est pas effondré. Par ailleurs je ne pense pas que relever une taxe qui ne représente qu'un euro sur les billets de classe économique et dix euros sur ceux de première dissuaderait de prendre l'avion. Enfin, comment expliquerez-vous à ceux qui paieront la taxe carbone que les billets d'avion seront exonérés ?
En contrôlant l'application de cet impôt, nous avons découvert que certaines compagnies, pour éviter d'avoir à payer quarante euros sur les lignes long courrier, faisaient des escales en Europe. Créer cette taxe a été une erreur, une dotation budgétaire aurait limité les fluctuations.
Doubler cette taxe au moment où notre compagnie nationale s'apprête à licencier plusieurs milliers de personnes dépasserait l'entendement.
Si vous estimez que cette taxe est responsable d'un sinistre économique à venir, que ne nous proposez-vous sa suppression ?
Elle examine ensuite l'amendement I-CF 114 rectifié de M. Didier Migaud.
Cet amendement élargit la taxe Chirac aux transports maritimes de passagers. Les croisières, elles, sont en excellente santé !
Indépendamment du fait que ces amendements nous éloignent de la taxe carbone, l'essentiel du trafic maritime de passagers est assuré non pas par les croisières mais par les ferries qui desservent la Corse, le Maghreb et la Grande-Bretagne, dont certains appartiennent encore à des compagnies françaises, en particulier Britanny Ferries, qui ont bien du mal à résister à la concurrence étrangère à cause du poids des charges sociales. Il faudrait donc exclure les lignes régulières du champ de votre amendement.
Soutenir cet amendement est un devoir moral, et votre objection est surtout idéologique, dans la mesure où les passagers des ferries ne risquent guère de renoncer à les utiliser pour traverser à la nage... On voit bien que faire preuve de solidarité envers d'autres que les banquiers vous donne des frissons.
Vous êtes injuste : nos collègues viennent de voter un prélèvement exceptionnel sur les établissements bancaires…
La Commission rejette l'amendement I-CF 114 rectifié.
Elle rejette ensuite, après avis défavorable du rapporteur général, deux amendements identiques I-CF 20 de M. Marc Le Fur et I-CF 178 de M. Jérôme Cahuzac visant à supprimer l'exonération de TIPP au bénéfice des vols intérieurs.
Je retire l'amendement I-CF 81.
La Commission rejette l'amendement I-CF 21 de M. Marc Le Fur visant à attribuer à l'AFITF le produit de la taxe acquittée par les aéronefs.
Article additionnel après l'article 7 : Instauration d'une taxe sur les sacs plastiques
La Commission est ensuite saisie de l'amendement I-CF 88 de M. Charles de Courson.
Je persiste à proposer de soumettre à la TGAP les sacs en plastique distribués aux caisses. Depuis la loi d'orientation agricole de 2006, on n'a toujours pas avancé, nous avons ainsi perdu sur tous les tableaux – emploi et balance commerciale – et les Chinois nous inondent de leurs produits.
Le Gouvernement préférerait un accord conventionnel. Mais cela fait des mois que les industriels et les distributeurs négocient sans arriver à rien. Mon amendement est destiné à faire pression sur eux en vue de la généralisation des sacs biodégradables.
Certes, les gouvernements hésitent depuis quelques années, mais le nombre de sacs utilisés par la grande distribution est passé de plus de 10 milliards en 2002 à moins de 2 milliards. Beaucoup d'enseignes fournissent maintenant des sacs biodégradables. La négociation avec la Fédération nationale du commerce de détail avance. Cet amendement ne se justifie donc plus.
Certes, le nombre de sacs biodégradables va en diminuant. Je n'ai jamais prétendu le contraire. Mais ils sont de plus en plus souvent importés. Cet amendement est surtout destiné à pousser à la conclusion d'un accord conventionnel.
Dans de nombreuses situations, plus aucun sac n'est proposé : le secteur de la distribution en a profité pour faire des économies. Je ne suis pas sûr que la qualité de vie de nos concitoyens ait beaucoup progressé à cette occasion.
Un dispositif similaire a failli être adopté l'année dernière. Outre qu'il ne compromet pas les finances publiques, il s'inscrit dans la tendance au « verdissement » de la fiscalité. La prolifération des sacs plastiques constitue une véritable infection, notamment dans certaines zones touristiques. Il convient d'y mettre un terme.
Je regrette que nous n'ayons pas lancé ce signal au moment le plus opportun, car même si des progrès sont observés, les sacs en plastique rendent repoussantes les entrées de nos villes.
Si rien n'a été fait il y a quelques années, c'est en raison de la résistance de certaines entreprises. Aujourd'hui, ces entreprises se sont mises à fabriquer des sacs de nouvelle génération ! Cette disposition aurait déjà dû être adoptée il y a trois ans, mais il n'est peut-être pas trop tard.
Cette taxe est extrêmement efficace : les pays qui l'ont instaurée ont fait quasiment disparaître l'usage des sacs plastiques en un ou deux ans.
La Commission adopte l'amendement.
Article 8 : Suppression du taux de TVA réduit sur les équipements de climatisation :
La Commission adopte l'article 8 sans modification.
Après l'article 8 :
La Commission est saisie de plusieurs amendements portant articles additionnels après l'article 8.
Elle examine d'abord l'amendement I-CF 181 de M. Jérôme Cahuzac.
Alors que ce projet de loi de finances pose les bases d'une véritable fiscalité écologique, nous proposons de créer une « TVA verte » en appliquant aux logements répondant aux normes « bâtiment basse consommation » le taux réduit de TVA déjà prévu pour les ventes et apports de logements sociaux ; à charge pour le Gouvernement de faire valoir une interprétation idoine de la directive relative au système commun de TVA.
La baisse récente du taux de TVA appliqué dans le secteur de la restauration est très coûteuse – 3 milliards d'euros par an –, et elle se révèle inefficace au regard des objectifs initiaux en termes de prix et d'emploi. Il serait plus judicieux de négocier une TVA réduite sur des produits respectueux de l'environnement.
En aucun cas le Gouvernement ne pourra faire valoir l'interprétation que vous suggérez. Je rappelle que le logement social a été placé dès l'origine dans la catégorie des biens et services pouvant être soumis au taux réduit. La France a pu user de cette faculté lorsqu'elle a décidé de financer le logement locatif social par des mesures fiscales plutôt que par des dotations budgétaires. Ainsi, le financement de ce secteur repose désormais sur l'application du taux réduit. Mais la directive ne permet pas d'appliquer ce taux aux logements BBC. L'amendement n'est donc pas compatible avec le droit européen.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF 182 de M. Jérôme Cahuzac.
Après avis défavorable du rapporteur général, la Commission rejette l'amendement.
Puis, elle est saisie de l'amendement I-CF 150 de M. Jérôme Cahuzac.
Le Parlement doit avoir le courage de revenir sur l'abaissement du taux de TVA consenti dans le secteur de la restauration, car cette mesure est un échec : elle n'a pas permis de faire baisser les prix, de créer des emplois, d'augmenter les salaires ni de favoriser la formation professionnelle. Autrement dit, même si, ici ou là, quelques restaurateurs ont consenti des efforts, le secteur n'a respecté aucun des termes du « contrat d'avenir » signé avec le Gouvernement.
Il est d'autant plus agaçant de voir toute une profession violer un accord qu'elle vient à peine de signer que la mesure coûtera chaque année 3 milliards d'euros au budget de l'État. Cela explique pourquoi la dépense fiscale progressera en 2010 au-delà de la norme prévue, dont nous souhaitons pourtant tous l'application. L'État n'a plus les moyens d'honorer une telle dépense, surtout lorsque la contrepartie est à ce point absente.
Avis défavorable. La baisse de la TVA sur la restauration correspond à un engagement pris il y a longtemps et plusieurs fois réaffirmé depuis. Il a d'ailleurs figuré dans de nombreux programmes de campagne électorale au cours des dix dernières années, et je ne me souviens pas qu'il ait fait l'objet d'une opposition farouche entre 1997 et 2002.
La raison principale invoquée pour rejeter cette disposition était son incompatibilité avec le droit communautaire. Après de longues négociations, cet obstacle a été levé, la France ayant obtenu que les services de restauration puissent être soumis au taux réduit. Dès lors, il était naturel de tenir cet engagement.
Soyons honnêtes : nous sommes tous déçus par les résultats de cette mesure. Pour autant, les prix de la restauration ont baissé – même si c'est de très peu – en juillet et en août, avant de rester stables en septembre. Cette baisse des prix concerne 30 % des 130 000 points de vente du secteur. Un tiers des restaurateurs a donc appliqué le premier volet du « contrat d'avenir », qui entraînait l'engagement de réduire le prix de dix produits.
Tous les Français demandent une diminution immédiate des prix. Mais la mesure s'applique depuis seulement trois mois, et il serait contre-productif, à ce stade, de revenir en arrière. Quel signal donnerions-nous à ceux qui ont joué le jeu, notamment ceux – pas assez nombreux, il est vrai – qui ont augmenté les salaires de leurs employés ? Quant à la question de l'investissement, je rappelle qu'un contrat a été passé entre l'État et OSEO en faveur de la création d'un prêt spécifique destiné au secteur de l'hôtellerie et de la restauration. Il serait donc dommage de supprimer, après seulement trois mois, une mesure qui était réclamée depuis des années. Il sera temps d'en faire le bilan au bout d'un an, quand nous aurons plus de recul. D'ici là, Hervé Novelli se sera mobilisé – ce matin encore, il convoquait les neuf syndicats de la restauration pour faire le point sur la situation.
J'ai toujours affirmé, monsieur le rapporteur général, que je ne croyais pas aux effets d'une telle mesure en matière d'emplois et de prix. Le résultat, c'est que seulement un restaurateur sur dix a fait un effort.
Vous dites que vous avez tenu un engagement. Mais la profession, elle n'a pas tenu les siens. Pourquoi l'État devrait-il remplir ses obligations sans que les signataires du « contrat d'avenir » y soient eux-mêmes contraints ? Pensez-vous que ceux qui n'ont pas encore baissé leur prix le feront plus tard ? Ce n'est pas sérieux ! Dans le département touristique dont je suis l'élu, nous avons effectué des relevés de prix sans constater de baisse. Au contraire, nous avons vu des augmentations spectaculaires – j'ai même dû intervenir publiquement sur le sujet. Telle est la réalité !
Que pensent les autres catégories professionnelles de cette opération qui a coûté 3 milliards pour ne créer que 6 000 emplois – soit 500 000 euros par emploi ? Si vous avez vraiment cru aux effets de cette mesure, vous devez agir pour que les engagements de la profession soient tenus. En adoptant cet amendement, nous donnerions des sueurs froides à certains.
Il faut rester prudent sur ce dossier. Pour ma part, malgré les engagements pris, j'étais très réservé à l'égard de la réduction de la TVA sur la restauration, qui ne me paraissait pas nécessairement opportune au regard de l'état de nos finances publiques. À cet égard, il aurait peut-être été plus raisonnable – et rien ne nous en empêchait – de choisir un taux intermédiaire entre 5,5 et 19,6 %.
Cela étant, je suis moins pessimiste que certains de mes collègues en ce qui concerne les effets de cette mesure. Dans mon département, qui a également un caractère touristique, je constate que de nombreux restaurateurs ont baissé leurs prix.
La crise touche particulièrement le secteur de la restauration. Nous n'avons peut-être pas créé le nombre d'emplois attendu, mais si nous revenons en arrière, nous risquons d'en faire disparaître un grand nombre.
Même si les chiffres un peu optimistes qui avaient été annoncés ne sont pas confirmés, la mesure a tout de même contribué à créer 6 000 emplois en trois mois. Il est bien trop tôt pour porter un diagnostic, d'autant que le secteur subit la crise de plein fouet.
Le contrat d'avenir prévoyait 40 000 emplois ou contrats d'apprentissage, contre 6 000 en réalité. La baisse de prix devait être de 11,8 %, mais elle atteint plutôt le dixième. Dès lors, est-il nécessaire de maintenir cette disposition ?
Pas plus que vous, nous ne souhaitons donner l'impression de renier des engagements antérieurs. Mais ils datent d'un temps où les finances étaient dans un autre état. Lorsque la mesure, dont le coût est de 3 milliards d'euros, a été votée, le déficit budgétaire n'atteignait pas encore 141 milliards. Les professionnels n'ont pas respecté leur part du contrat et ils ne le feront pas davantage demain : soit une telle disposition produit des effets immédiatement, soit elle n'en produit jamais. Je vous donne donc rendez-vous l'année prochaine pour un nouveau bilan.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements I-CF 2, I-CF 3 et I-CF 4 de M. Patrice Martin-Lalande.
Actuellement, la presse traditionnelle et la presse en ligne ne sont pas soumises au même taux de TVA. Pourtant, les états généraux de la presse ont bien montré que l'Internet n'était plus un support marginal pour la presse écrite ; il pourrait même, au contraire, représenter pour elle un moyen de résoudre ses difficultés. Le Parlement a d'ailleurs tenu à faire évoluer le cadre juridique en adoptant un statut de la presse en ligne. Je propose donc d'harmoniser le régime de TVA applicable aux publications de presse. L'amendement I-CF 2 a pour objet de les exonérer totalement de TVA, comme cela se pratique en Grande-Bretagne ; l'amendement I-CF 3 propose d'appliquer un taux super-réduit de 2,1 %, et l'amendement I-CF 4 un taux réduit de 5,5 %, quel que soit le support.
Ces amendements sont contraires au droit communautaire, qui assimile la presse électronique aux services rendus par voie électronique, assujettis au taux normal. C'est la raison pour laquelle la voie budgétaire a été privilégiée pour sauver la presse. Dans la loi de finances initiale pour 2009, les aides destinées à la soutenir ont été fixées à 163,3 millions d'euros, puis portées en loi de finances rectificative à plus de 317 millions d'euros. Cet effort sera poursuivi en 2010, puisque les crédits du programme « Presse » s'élèveront à 419,3 millions d'euros.
Les aides budgétaires en faveur de la presse écrite ne concernent pour l'essentiel que le support papier : seulement 20 millions d'euros sont prévus pour accompagner le passage à l'électronique. Par ailleurs, comment expliquer que la Grande-Bretagne exonère totalement de TVA les publications de presse écrite, quel que soit le support ?
La raison en est historique. Lorsque les directives ont été négociées, les pays appliquaient différents taux de TVA et on leur a laissé le choix de les conserver pour deux ou trois catégories de produits. Ainsi que le Portugal applique depuis longtemps le taux réduit en matière de restauration. Pour sa part, la Grande-Bretagne a choisi de maintenir une exonération totale pour la presse écrite.
La Commission rejette les amendements.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 14 octobre 2009 à 21 h 30
Présents. - M. Dominique Baert, M. Gérard Bapt, M. Claude Bartolone, M. Xavier Bertrand, M. Michel Bouvard, Mme Chantal Brunel, M. Jérôme Cahuzac, M. Bernard Carayon, M. Thierry Carcenac, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Jérôme Chartier, M. René Couanau, M. Charles de Courson, M. Jean-Yves Cousin, M. Richard Dell'Agnola, M. Yves Deniaud, M. Michel Diefenbacher, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert, M. Henri Emmanuelli, M. Jean-Claude Flory, M. Nicolas Forissier, M. Jean-Michel Fourgous, M. Marc Francina, M. Daniel Garrigue, M. Louis Giscard d'Estaing, M. Laurent Hénart, M. Jean-Louis Idiart, M. Marc Le Fur, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Patrice Martin-Lalande, M. Didier Migaud, M. Pierre-Alain Muet, M. Henri Nayrou, M. Jacques Pélissard, M. Camille de Rocca Serra, M. François Scellier, M. Philippe Vigier, M. Gaël Yanno
Excusés. - M. Pierre Bourguignon, M. Alain Claeys, M. Victorin Lurel
Assistait également à la réunion. - Mme Aurélie Filippetti