Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 21 décembre 2011 à 9h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • bretagne
  • référendum

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des projets de loi organique et ordinaire portant application de l'article 11 de la Constitution (nos 3072, 3946, 3073, 3947).

Hier soir, notre assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale commune.

Suite de la discussion d'un projet de loi organique et d'un projet de loi ordinaire

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Dans l'attente du Gouvernement, la séance est suspendue.

(La séance est suspendue.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La séance est reprise.

(La séance est reprise à neuf heures trente-cinq.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme Frédérique Massat.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Massat

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le 3 octobre 2009, plus de deux millions de Français se sont mobilisés pour défendre leur attachement au service public en manifestant leur opposition à la réforme postale.

En dépit du mépris affiché par la majorité à l'égard de cette votation citoyenne, et malgré les menaces proférées à l'encontre des maires, le succès était au rendez-vous.

Si l'article 11 de la Constitution relatif à l'organisation d'un référendum d'initiative populaire, introduit par la réforme de 2008, avait été appliqué, cet élan citoyen aurait pu donner lieu à l'organisation d'un référendum dont les résultats n'auraient pas permis la fameuse réforme postale.

Le 15 octobre 2009, parce que votre gouvernement et cette majorité n'avaient toujours pas pris la moindre initiative pour rendre applicable le droit nouveau introduit par cet article 11 de la Constitution, le groupe SRC a déposé lui-même une proposition de résolution.

En guise de débat démocratique et traduisant l'intérêt de cette majorité pour un tel sujet, c'est dans un hémicycle vide sur sa droite, comme c'est un peu le cas aujourd'hui,…

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Massat

…que nous avons présenté ce texte que vous avez repoussé. Ainsi, plus de trois ans après la réforme constitutionnelle, et alors que vous vous êtes montrés nettement plus empressés à faire voter des textes nés de cette réforme, tel que celui sur la nomination du président de France Télévisions, nous examinons enfin aujourd'hui celui relatif à l'article 11.

Si l'attente de nos concitoyens était grande de voir se concrétiser un tel droit, quelle déception, mes chers collègues, puisque, dans les faits, nous le savons, et cela a été répété longuement hier soir, la loi a peu de chance d'être adoptée avant la fin de la session, et, si elle l'était, la multiplication des obstacles aurait pour conséquence l'impossibilité de mettre en oeuvre ce référendum !

Le mécanisme introduit par ces projets de loi est certes complexe, mais il illustre avant tout une loi d'affichage, en contradiction totale avec l'attente de nos concitoyens. Loin d'être un référendum d'initiative populaire, il s'agit tout au plus d'un référendum d'initiative partagée, comme vous nous l'avez d'ailleurs répété hier soir, monsieur le rapporteur.

Les citoyens pourront organiser une pétition seulement s'ils sont préalablement soutenus par un cinquième des membres du Parlement. Pendant trois mois, cette pétition circulera et devra rassembler au minimum le dixième des citoyens inscrits sur les listes électorales, soit 4,5 millions de Français. Si cet objectif est atteint, le Parlement disposera d'un an pour examiner cette proposition de loi. Et seulement si, une fois ce délai dépassé, la proposition de loi n'a pas été examinée, le Président de la République la soumettra au référendum.

Quel parcours du combattant, mes chers collègues ! Nous avions certes salué cette innovation constitutionnelle, mais, derrière l'affichage d'une telle mesure, nous ne voyons aucun intérêt démocratique.

De plus, censé garantir l'égal accès à tous les citoyens, le caractère uniquement électronique retenu par ce texte va pénaliser un grand nombre de personnes. En tant que députée issue d'un territoire rural et de montagne, je tiens à rappeler la non-couverture totale du territoire en accès internet et les difficultés que peuvent rencontrer nos concitoyens pour se rendre dans les mairies des chefs-lieux de cantons, je pense notamment aux personnes âgées et à celles à mobilité réduite.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

D'ici là, la déviation d'Ax-les-Thermes aura été réalisée… (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Massat

De plus, la maîtrise de l'outil informatique n'est pas acquise pour tout le monde, monsieur le ministre, et cela peut en décourager plus d'un. Dans ce sens, nous considérons que les personnes devraient pouvoir exprimer leur soutien par tous moyens, et non pas uniquement par voie électronique.

Mes chers collègues, je le répète, l'attente de nos concitoyens à l'égard de la mise en oeuvre de ce droit est fort grande. Nous sommes nombreux sur tous ces bancs à déplorer la montée de l'abstention lors des élections nationales et locales.

Une procédure référendaire simple aurait pu réconcilier nos concitoyens avec notre démocratie, restaurer un lien fort mis à mal ces dernières années. Malheureusement, comme c'est trop souvent le cas, derrière les beaux discours, la réalité est tout autre. L'usine à gaz que vous avez imaginée pour faire croire à l'avènement du référendum d'initiative citoyenne ne trompe personne.

En cette fin d'année, le cadeau de Noël qu'aurait pu faire Gouvernement au peuple français n'est pas à ce rendez-vous du 21 décembre 2011, et nous ne pouvons que le déplorer. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, mes chers collègues, les deux textes que nous examinons aujourd'hui parachèvent la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, en instaurant une nouvelle procédure de référendum d'initiative populaire, ou, plus précisément, d'initiative partagée,…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

…puisque l'initiative revient au Parlement avant de s'appuyer sur le soutien de nos concitoyens.

L'initiative prendra tout d'abord la forme d'une proposition de loi soutenue par au moins un cinquième des membres du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Monsieur Mallot, me laisserez-vous parler ?

Cette proposition de loi devra donc être soutenue par au moins 185 membres du Parlement, qu'ils soient députés ou sénateurs. Puis une seconde phase de trois mois sera consacrée au recueil des soutiens populaires, sur un site dédié créé par le ministère de l'intérieur.

Pour que la proposition de loi puisse être déclarée recevable par le Conseil constitutionnel et inscrite à l'ordre du jour politique, elle devra être soutenue par un dixième du corps électoral, soit environ 4,5 millions de citoyens.

Cette réforme représente, à n'en pas douter, une avancée car notre pays a beaucoup de retard dans ce domaine, mais ce n'est, avouons-le, qu'une réponse partielle…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

…à une véritable attente, à une revendication de longue date de nos concitoyens.

Le référendum d'initiative populaire jouit en effet dans notre pays d'une incontestable popularité, comme l'a démontré un sondage réalisé par l'IFOP en mars 2011 : 72 % des personnes interrogées souhaitaient que les conditions exigées pour l'organiser soient assouplies.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Les sondages montrent également – et nous ne pouvons que le regretter, mes chers collègues – que l'opinion fait de moins en moins confiance à la classe politique et qu'un fossé dangereux se creuse entre cette dernière et les citoyens.

Le référendum d'initiative populaire devrait être cet outil permettant aux Français et de participer pleinement à la vie politique du pays. Las, on ne peut que constater, monsieur le ministre, la grande frilosité de la réforme quant à l'intervention directe des citoyens dans la législation.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Merci, cher Christian Vanneste !

Avec les textes que nous examinons aujourd'hui, on est très loin de ce qui se passe dans d'autres pays où la démocratie directe a bien plus de réalité.

En Suisse, un véritable référendum d'initiative populaire permet de s'opposer à une loi votée par le Parlement – c'est ce qu'on appelle le « référendum veto » –, de présenter une proposition de loi ou de réformer la Constitution.

Des choix importants pour l'avenir du pays, et qui pourraient se diluer dans des débats interminables, sont rapidement et démocratiquement tranchés.

C'est ainsi, par exemple, que les Suisses se sont prononcés, en novembre 2009, par 57,5 % des suffrages, pour l'interdiction de la construction de minarets. C'est ainsi qu'ils ont adopté en novembre 2008, par 52 % des voix, l'imprescriptibilité des actes de pornographie enfantine, et qu'ils s'étaient prononcés, en mars 2002, à 54,6 % pour l'adhésion de la Suisse à l'ONU.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Ils ont aussi voté le maintien du secret bancaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

En Suisse, le nombre de soutiens populaires requis – quelque 100 000 signatures – est bien inférieur à celui exigé par les dispositions qui nous sont soumises, même si l'on rapporte ce chiffre à la population totale.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

À n'en pas douter, ce dispositif favorise un dialogue permanent entre la population et les élus.

La Suisse n'est pas le seul pays à pratiquer cette démocratie directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

L'UMP est beaucoup plus démocratique que d'autres partis que je ne citerai pas, monsieur Mallot…

Le référendum d'initiative populaire existe également dans près de la moitié des États américains ainsi que, sous d'autres formes, certes, en Allemagne et en Italie.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

En Allemagne, c'est très limité !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Les Italiens ont ainsi organisé en juin dernier trois référendums simultanés concernant des sujets très différents : l'immunité pénale du Premier ministre, un éventuel retour au nucléaire, la privatisation de l'eau.

Ces exemples démontrent, s'il en était besoin, que la démocratie directe, parce qu'elle donne la parole au peuple, est un complément indispensable à la démocratie parlementaire.

Cette réforme, mes chers collègues, part à n'en pas douter, d'une bonne intention,…

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

…mais son encadrement est tel que le texte risque de ne jamais s'appliquer. En effet, le nombre de parlementaires et de soutiens requis, ainsi que le contrôle de constitutionnalité, risquent de constituer de véritables verrous.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Votre réforme, monsieur le ministre, peut donc apparaître comme une réforme a minima. Elle est néanmoins un premier pas, qu'il faut saluer, vers plus de démocratie directe et une première réponse positive à une forte revendication de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bodin

Il conviendra néanmoins d'aller plus loin dans cette démarche qui sera certainement perfectible à l'usage et dans le temps. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voici donc enfin venu, à quelques mois de la fin de la législature, le temps d'aborder le dernier volet de la réforme constitutionnelle de 2008.

Totalement absente du projet de réforme constitutionnelle d'origine, l'idée du référendum est arrivée bien plus tard, par voie d'amendements dont beaucoup reprenaient la proposition n° 67 du comité Balladur, qui visait à instituer un référendum d'initiative populaire.

Alors que le volet citoyen de cette réforme est tout juste abordé, les lois organiques visant à permettre au Président de la République de nommer des PDG d'entreprises publiques et aux ministres de retrouver leur siège de député, ou encore à réformer le travail parlementaire en muselant l'opposition ont, elles, été présentées avec beaucoup de rapidité.

Tout concourt donc à penser que cette ultime réforme est réalisée à contrecoeur, sans réelle volonté de remettre le citoyen au coeur de nos institutions. Si cet état de fait ne suffisait pas à démontrer cette aversion, l'ultime article du projet de loi organique montrerait bien vos intentions : il dispose que la réforme n'entrera en vigueur que le premier jour du treizième mois suivant celui de sa promulgation.

Le plus grave est qu'en lieu et place d'un référendum d'initiative populaire c'est un référendum d'initiative partagé qui nous est aujourd'hui proposé. Avec ces projets de loi organique et de loi ordinaire, vous entendez en effet partager le processus de présentation entre Parlement et citoyens, comme prend le soin de le souligner notre rapporteur et contrairement à ce que laisse penser un exposé des motifs qui recourt systématiquement au terme « populaire ».

La frilosité est donc de rigueur face à des outils de démocratie participative dont vous craignez qu'ils ne vous échappent. Or une société qui se méfie de ses concitoyens est une société moribonde, pour reprendre le mot d'Aimé Césaire.

L'exercice est donc compliqué : vous voulez donner l'impression de répondre aux attentes populaires tout en évitant de rendre effectif un droit pourtant élémentaire de la démocratie parlementaire. Tel est le mot d'ordre quasi intenable d'une majorité de plus en plus méfiante à l'égard du peuple, d'une majorité qui craint d'être dépassée par les citoyens. Pourtant, nombre de démocraties occidentales, à commencer par nos voisins européens, ont fait de cette initiative référendaire un outil de démocratie effective, reconnue et respectée.

Il suffit de revenir aux conditions de mise en oeuvre de l'initiative référendaire, tellement drastiques qu'elles lui retirent le peu de caractère populaire qui lui était imparti. Le débat ne pourra en effet être ouvert que si l'initiative est présentée par un cinquième des membres du Parlement et qu'elle est soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Cent quatre-vingt-cinq parlementaires et plus de quatre millions et demi d'inscrits sur les listes électorales – excusez du peu ! Ces seuils sont absolument disproportionnés et inatteignables. Ils augurent donc la non-application d'une telle procédure.

L'exemple suisse d'un très – voire trop – régulier recours au référendum est souvent repris, mais ne perdons pas de vue qu'aucun de nos voisins européens n'a fixé un taux de pétitionnaires aussi élevé : 10 % du corps électoral ! En Belgique, le nombre de pétitionnaire doit être de 3 % des électeurs ; en Suisse, il est fixé à 50 000 électeurs ; en Italie, l'initiative ne doit recueillir le soutien que de 500 000 électeurs, soit moins de 1 % d'une population totale de 60 millions d'habitants. L'exemple italien est d'ailleurs certainement, dans ses fondements et dans ses répercussions institutionnelles et politiques, celui dont nous devrions nous inspirer.

D'autres seuils sont donc envisageables pour rendre l'initiative crédible et accessible aux citoyens organisés. Ayons à l'esprit, par exemple, que le référendum sur la Poste organisé à l'automne 2009 fut, avec la participation de deux millions de personnes, un réel succès.

N'oublions pas non plus les contraintes temporelles excessivement lourdes de l'organisation d'une telle initiative : le délai incompressible est de quinze mois, quand le délai maximal est de vingt-trois mois, presque deux ans ! Une fois le contrôle de constitutionnalité de l'objet de la proposition effectué, la proposition validée par un cinquième des parlementaires et soutenue par un dixième de la population, le président ne pourra soumettre la proposition au référendum que si elle n'est pas examinée par le Parlement dans l'année qui suit. Autant dire que l'initiative référendaire ne débouchera jamais sur un référendum…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

…et, surtout, que les citoyens apparaissent tels des figurants ! C'est à se demander si l'on souhaite réellement qu'ils se mobilisent.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

L'ensemble de ces éléments et les limites constitutionnelles de l'exercice imposé montrent à quel point cette initiative référendaire a été vidée de son sens, de peur que des mécanismes de démocratie directe conduisent à des solutions contraires aux décisions du pouvoir législatif. Ces réticences sont symptomatiques d'un corps politique qui craint de se voir confisquer une partie de son pouvoir.

Il existe des exemples réussis en la matière. Je pense, bien évidemment, au succès du référendum de mai 2005 qui a soumis au débat le traité constitutionnel européen. Ce fut effectivement un succès, non seulement en raison de son résultat, mais surtout du fait des débats de fond qu'il a suscité. C'est justement leur réappropriation hors des canaux classiques et institutionnels qui en a fait la richesse.

Le référendum de 2005 représente la parfaite reprise en main citoyenne du débat politique dans ce qu'elle a de plus noble. Au-delà du résultat, c'est en effet l'incroyable mobilisation des Français, militants ou non, syndicalistes, responsables associatifs, élus, jeunes et moins jeunes, qui doit être retenue. Ils ont manifesté leur volonté de se donner les moyens d'étudier, d'analyser un projet qui ne leur convenait pas, tout en envisageant et esquissant les grandes lignes d'un autre programme que vos prédécesseurs ont balayé, avec mépris, d'un revers de main. On en paie clairement, aujourd'hui, les pots cassés tant au niveau de la forme, avec la dépossession des citoyens du débat politique, qu'au niveau du fond, avec une crise financière qui est très clairement liée à cette construction européenne. Dérouté, le corps politique dans sa quasi-intégralité a choisi de passer outre, en passant par une validation parlementaire, majoritairement acquise à la cause.

À quelques mois d'échéances politiques majeures, dans un contexte économique et financier très troublé, de taux d'abstention croissants, de défiance des citoyens vis-à-vis des responsables politiques et, plus généralement, de la chose politique, le corps politique, une fois encore, se révèle incapable de transformer le succès d'une mobilisation citoyenne institutionnelle en action politique majeure et souveraine. Pourtant, il suffit de voir aujourd'hui le succès des livres et réunions publiques traitant de la question économique – dette publique, crise financière et autres termes techniques n'ont plus de secret pour nombre de Français – pour comprendre que les citoyens veulent être de la partie.

À nous, législateur, de nous saisir de ces mobilisations en leur offrant un cadre institutionnel constructif et proactif ! Si l'élection reste l'un des fondements de la démocratie, la participation citoyenne ne doit pas se réduire à l'unique acte de vote, bien au contraire. Participer à la vie de la cité, s'engager au quotidien, manifester, faire grève, pétitionner, agir directement et dans le respect d'autrui, cela relève aussi, en-dehors et au cours des temps électoraux, de la participation politique qu'il conviendrait de respecter en tant que telle, tout à la fois intervention publique et miroir de la vivacité de notre société.

Nombre de débats de société pourraient ainsi prendre forme et sortir des cadres d'experts et des logiques de lobbying : les retraites, la privatisation de la Poste, la sortie du nucléaire sont autant de questions essentielles qui, si elles étaient traitées et investies par le plus grand nombre, permettraient une réconciliation évidente des Français avec leurs institutions et enrichiraient nos discussions parlementaires.

Tout préalable à une réforme de la Constitution aurait dû passer par l'introduction d'une citoyenneté active et responsable, décidément inconciliable avec la Ve République dans sa forme actuelle. Lors du débat institutionnel de 2008, j'étais revenu sur l'importance de garantir, par des moyens d'actions efficaces et réels, que « vivre ensemble » résonne pour tous de la même façon. Depuis 2008, notre groupe n'a eu de cesse de défendre les principes d'une autre république, où le pouvoir du Parlement, comme le pouvoir des citoyens, serait réel, où la démocratie serait insufflée à tous les échelons de l'État et du débat politique et où le pluralisme assurerait la vitalité de notre vie politique. Or ces principes n'ont eu aucune traduction, ni avec ce principe de ce référendum d'initiative partagée, ni avec les lois précédentes.

Ce texte aurait pu concevoir le référendum tel un contre-pouvoir salutaire, stimulant, actif et productif, où le citoyen aurait toute sa place. Bien évidemment, il n'en a pas été ainsi.

Cette proposition a, de plus, l'inconvénient d'inscrire dans le marbre constitutionnel un droit inapplicable sauf à le modifier dans notre débat – je doute qu'il en aille ainsi – en le transformant en un référendum d'initiative populaire qui, seul, a sa place dans une démocratie digne de ce nom.

Dans l'état actuel, nous voterons contre ce texte-alibi qui se fonde sur une vision archaïque de notre démocratie et de ses institutions politiques et, surtout, qui prend les citoyens pour ce qu'ils ne sont pas : des imbéciles. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Propos excessifs !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le choix de la date et de l'heure de cet examen d'un projet de loi organique et d'un projet de loi relatifs au référendum me paraissent révélateurs de la façon dont le chef de l'État et le Gouvernement conçoivent nos institutions. En dépit des appels des députés depuis le vote par le Congrès de la révision de l'article 11 de la Constitution, en dépit des promesses répétées du Gouvernement en 2008, 2009 et 2010, les textes nécessaires à l'application de ce nouvel article 11 ne sont présentés à l'Assemblée nationale qu'à la fin de la législature, in extremis, pour être discutés un 21 décembre en séance de nuit, et ce matin 22 décembre.

Ce choix n'est pas anodin.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

…puisqu'il s'agit de traiter de l'expression de la souveraineté du peuple par le référendum ou par les représentants de la nation.

Quand la chancelière d'Allemagne doit s'adresser à son peuple pour lui présenter d'importants projets concernant l'Europe, elle va devant le Parlement. Dans le même temps, le Président de la République française, au lieu de s'adresser lui-même au peuple devant le congrès du Parlement, préfère parler à Toulon devant un meeting de son parti.

Cette comparaison éclaire une nouvelle fois la conception qu'a le chef de l'État de la représentation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Il en va de même du référendum, traité de cette manière : l'expression directe du peuple souverain est discutée comme en catimini ce 21 décembre, alors que la démocratie connaît en France, comme dans toute l'Europe, une crise gravissime.

Les Français ne sauront rien de nos débats et tout a été fait pour cela. Et pourtant, s'ils savaient ce qui est en jeu ici, ce matin, eux qui sont si nombreux, notamment chez les jeunes, à ne plus croire dans la politique ?

S'ils savaient que l'on traite ainsi non pas seulement de l'article 11 de la Constitution mais aussi de l'article 3, qui remet dans leurs mains, dans les mains du peuple, la souveraineté nationale, ils seraient scandalisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

Mais y a-t-il encore place chez les Français pour être scandalisés par un balbutiement sur l'initiative, dite partagée, de prétendus référendums ?

On ne partage pas une initiative,…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

…et c'est bien l'illustration qu'en donne cette loi où tout est entre les mains de la majorité parlementaire, du Gouvernement mais aussi du Conseil constitutionnel, bref, de tous les pouvoirs, sauf précisément de celui du peuple.

Cette façon de traiter si légèrement la souveraineté du peuple est grave, d'autant plus grave que notre peuple a bien compris que le pouvoir est aujourd'hui entre d'autres mains que les siennes.

Les Français le savent, la crise est le fait de grandes structures financières mondiales, de banques et d'agences de notation.

Les peuples subissent les conséquences économiques et sociales mais aussi humaines et morales de la crise sur le logement, l'emploi, la sécurité, l'éducation nationale, la santé publique, sur ce que l'on appelait autrefois les acquis sociaux parce que l'on croyait naïvement à cette époque qu'ils étaient acquis.

Les Français aimeraient pouvoir s'exprimer, du moins être entendus, ce qui est la première forme du respect qu'ils réclament, et qui leur est refusé par manque de démocratie de proximité et de continuité.

En politique étrangère, on a voulu leur faire croire que la France était leader lors des derniers sommets, mais ils ont découvert deux jours plus tard que nous en étions plus les hôtes que les leaders.

Cette fois, ce n'est pas l'initiative partagée du référendum qui est en cause – initiative qui ne peut pourtant pas être partagée, comme je l'ai dit – mais la souveraineté partagée, dont le Président de la République nous parle pour notre avenir.

Or la souveraineté est ou n'est pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

On ne partage pas la souveraineté, ni avec l'Allemagne dans l'Union européenne ni avec les États-Unis dans l'OTAN.

Voilà la question qui est au coeur de ce débat majeur qui nous rassemble ici, ce matin, peu nombreux, il est vrai – un ministre et quelques députés –, en une fin d'année et de législature un peu triste.

Quand les jeunes Espagnols disent à leurs députés : « Nous ne nous sentons plus représentés par vous », ils posent la question de la démocratie au XXIe siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vauzelle

La France est dans une communauté d'États, mais elle doit pouvoir discuter et partager en conservant sa liberté et sa culture, c'est-à-dire sa souveraineté.

La représentation nationale doit faire comprendre au peuple qu'elle est consciente de la fragilité de la République face au pouvoir de l'argent. Avec de vrais référendums, une vraie régionalisation et une vraie démocratie participative, nous pouvons repousser ensemble, entre républicains, la tentation du populisme.

Notre débat de ce 21 décembre 2011 sera d'autant plus vite oublié qu'il n'est pas considéré comme intéressant par les médias, c'est le moins que l'on puisse dire. Tout a été fait pour qu'il en soit ainsi, à la sauvette, rapidement, comme honteusement.

La souveraineté de la nation doit-elle ou peut-elle encore exister aujourd'hui ? Si ce n'est à la nation, à qui doit-elle appartenir ?

L'article 3 de la Constitution est-il encore en vigueur ? Telle est la question posée aujourd'hui, au coeur de ce débat sur le référendum.

Telle est la question à laquelle il faudra que nous répondions ensemble, mes chers collègues, avec tous les républicains, pour établir, demain, une démocratie qui prenne en compte les données de la mondialisation, les nouvelles techniques de l'information et de la communication, la construction européenne indispensable mais fidèle au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, car, après tout, cela fait partie de l'éthique de la République et de la nation en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, chers collègues, certes peu nombreux ce matin – et tout a été fait pour qu'il en soit ainsi –, à ce stade du débat je constate un paradoxe.

J'entends nos collègues, sur tous les bancs, s'exprimer en faveur d'un référendum d'initiative populaire. Il existe manifestement un consensus. Je viens d'entendre la brillante intervention de Michel Vauzelle, socialiste, celle de Patrick Braouezec, communiste, celle de Claude Bodin de l'UMP, et tous défendent l'initiative populaire.

J'ai même entendu un député de l'UMP saluer le référendum sur le nucléaire qui a eu lieu dans un pays. Il a d'ailleurs oublié d'en préciser les résultats : l'adoption de la sortie du nucléaire à une très large majorité.

Or, nous l'avons déjà démontré hier avec d'autres collègues dans les motions de procédure, l'article 11 modifié de la Constitution ne permet pas réellement cette procédure du référendum d'initiative populaire.

Ce paradoxe n'est pas le fruit des circonstances. Il montre qu'il y a bel et bien un problème. Je regrette que la majorité n'ait pas voulu saisir les occasions qui se sont présentées. Les Français doivent le savoir : alors que vous aviez l'occasion de rendre la procédure assez ouverte lors de la réforme de 2008, et que c'est encore possible aujourd'hui, vous choisissez la fermeture et le refus.

J'ai indiqué hier que les écologistes ont toujours été favorables au référendum d'initiative populaire et citoyenne, par principe. Mais, au-delà de cette question de principes, pour rendre les choses concrètes pour nos concitoyens, nous pouvons citer des exemples.

Au début de cette législature, lors du débat sur les OGM, qui a donné lieu à beaucoup de crispations et de manipulations de la procédure parlementaire, il aurait été possible que les propositions des partis politiques, mais aussi des groupes de citoyens et des associations, débouchent sur un référendum.

Un de nos collègues de l'UMP a cité en exemple le référendum sur le nucléaire qui a eu lieu il y a quelques mois en Italie, à la demande des citoyens. Les Italiens, à une très large majorité, ont décidé de sortir du nucléaire. C'est un choix démocratique.

Comme beaucoup d'écologistes, je souhaiterais que ce type de procédure existe en France, quel qu'en soit le résultat. Nous serions prêts à jouer ce jeu sur la question du nucléaire, par exemple.

Mme Massat s'est appuyée tout à l'heure sur l'exemple des primaires organisées par le parti socialiste. C'est un bon exemple. Il montre que les citoyens, lorsqu'on leur donne la parole, s'en saisissent. Mais il est regrettable qu'il n'existe pas de cadre législatif pour cela.

Pour le référendum, ce cadre est nécessaire. Cependant, si l'on ne dispose pas d'un cadre législatif ouvert, un jour, des partis politiques et des groupements de citoyens pourraient demander à organiser par eux-mêmes des référendums.

Les primaires socialistes ont créé un précédent. Un parti politique peut organiser par lui-même une consultation populaire ouverte à tous, sur la base des listes électorales, dans des salles municipales. Et je m'en félicite.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nous avons par ailleurs déposé un amendement, avec notre collègue Le Fur et d'autres, sur les questions régionales et locales.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il s'agit de la modification des limites des régions, car cela nous concerne en Bretagne, et cela concerne aussi d'autres régions, notamment les deux Normandie. Mais il existe d'autres débats de ce type sur lesquels les citoyens n'ont jamais la parole. Nous aurions tout à gagner à aller dans ce sens au niveau local également.

Je donne rendez-vous aux Français et à notre Parlement lors de la prochaine législature pour mettre en oeuvre ce processus au niveau national comme au niveau local, car malheureusement, cette fois-ci, le rendez-vous est manqué avec le référendum d'initiative populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Christian Vanneste. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Attendez avant d'applaudir ! Vous pourriez avoir des surprises… (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

« En progrès, mais peut nettement mieux faire. » Tel est le jugement pédagogique que suscitent les projets de loi que nous étudions.

Ce jugement un peu sévère vise un élève persévérant, mais lent, la démocratie française. Née entre 1789 et 1791, elle s'identifie au changement de souverain qui a lieu à cette époque. Le souverain, c'est désormais la nation, l'ensemble des citoyens, des Français en âge et en capacité de voter et d'exprimer la volonté générale.

L'idéal en avait été conçu par Rousseau : « Le souverain ne peut être représenté que par lui-même », écrit-il dans Du contrat social.

Le réalisme a limité cette ambition et imposé le régime que nous connaissons, l'aristocratie élective, le meilleur des régimes représentatifs selon Rousseau, dont les limites ont sans cesse, bien que lentement, été reculées. Le cercle des électeurs s'est élargi. Celui des élus aussi, à l'intérieur des limites logiques de la citoyenneté et de la nationalité.

Les textes d'aujourd'hui nous invitent à nous rapprocher de l'idéal démocratique qui est la démocratie directe. Celle-ci se pratique dans certains pays davantage que chez nous. J'ai évoqué la Révolution et donc la fin du XVIIIe siècle. J'observe que les deux régions du monde les plus avancées en termes de démocratie à l'époque, les États-Unis et ce qui est aujourd'hui la Confédération helvétique utilisent largement la démocratie directe.

Notre frilosité – j'emploie le même mot que Claude Bodin tout à l'heure – nous conduit à renoncer à aller très loin dans cette direction : l'initiative populaire n'est plus qu'une initiative partagée entre le Parlement et le peuple.

Les arguments sont bien faibles : on ne peut, dit-on, à la fois élargir les pouvoirs du législatif au détriment de l'exécutif et les restreindre au profit du peuple. Les deux mouvements vont pourtant dans le même sens, celui d'une plus grande participation – et ce mot résonne toujours avec beaucoup de force dans certaines oreilles qui ont été marquées par le gaullisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

L'expérience de l'élargissement du pouvoir parlementaire est d'ailleurs très limitée. J'en ai fait la malheureuse expérience avec mon collègue Dosière, puisque rien n'est sorti du rapport que nous avons rendu au nom du Comité d'évaluation et de contrôle.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

On invoque aussi la dimension de notre pays. C'était déjà l'argument de Rousseau et de Montesquieu à l'époque du cheval et des chaises de poste ! Le choix de la procédure de soutien à l'initiative par voie électronique montre à l'évidence que les possibilités techniques facilitent la démocratie directe. La Californie et ses 38 millions d'habitants la pratiquent régulièrement.

C'est dans cette régularité que réside la clef de la réussite. En raison de son origine et de sa rareté, le référendum à l'initiative du Président a souvent tourné au plébiscite. La population met à profit une question à laquelle elle ne répond pas nécessairement pour exprimer son degré d'approbation du pouvoir exécutif. Des scrutins réguliers permettraient de disjoindre l'avis sur une question du jugement sur un exécutif, qui devra ensuite s'exécuter sans drame.

En revanche, comme en Suisse, la lenteur du processus est un moyen de dépassionner des débats, qui, sur le nucléaire par exemple, doivent être longs, sereins, larges : on ne peut pas décider sous le coup de l'émotion, au lendemain de tel ou tel événement.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Transmettez ce message au Président de la République !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

Notre conception oligarchique du pouvoir, monsieur le garde des sceaux,…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Oh, moi, je reste modeste ! Il y a si longtemps que vous l'exercez, monsieur Vanneste ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

…fondée sur la méfiance, dont on va même jusqu'à reconnaître qu'elle est davantage justifiée en France qu'en Suisse, nous a amenés à nous entourer de « garanties indispensables pour pallier les inconvénients qui pourraient résulter du choix de certains sujets de société ».

On a donc un domaine limité d'intervention et une série d'obstacles, dont le nombre des parlementaires et celui des pétitionnaires, fixé à un niveau déraisonnable : 4,5 millions. Le Parlement peut en outre s'emparer du texte et avoir ainsi à la fois le premier et le dernier mot avant l'organisation du référendum proprement dit. Toutes les conditions sont remplies pour que le référendum d'initiative partagé soit rare.

La Suisse utilise quant à elle trois procédures. J'avais d'ailleurs déposé en avril dernier, avec cinquante-huit collègues de l'UMP, une proposition de loi constitutionnelle qui reprenait le dispositif en proportionnant simplement le nombre des pétitionnaires à notre population. Les trois procédures sont les suivantes : le référendum veto qui permettrait à 500 000 citoyens inscrits sur les listes électorales de demander la ratification d'un texte voté par le Parlement, ou de s'y opposer ; le référendum d'initiative populaire qui permettrait à 800 000 électeurs de proposer un texte ; enfin, il faudrait un million de signatures pour engager une réforme constitutionnelle.

À travers cet exemple, je voulais simplement souligner combien le chemin est encore long qui nous sépare de la véritable démocratie directe. Nous accomplissons aujourd'hui une petite partie de ce chemin. C'est la raison pour laquelle je voterai ce texte (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC), mais sans oublier à quel point il est éloigné de notre objectif et de notre idéal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

On dirait un centriste : il est contre mais il vote pour !

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Boisserie

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il aura fallu attendre la fin de la législature pour que nous soient présentés les textes portant application de l'article 11 de la Constitution dans sa version issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Nous avions salué les avancées apportées par la nouvelle rédaction de l'article 11, et Michel Vauzelle avait défendu dès octobre 2009 une proposition de résolution estimant urgente sa mise en oeuvre.

Ce nouveau mécanisme d'initiative parlementaire citoyenne, difficile à mettre en oeuvre dans la pratique, vise à renforcer la démocratie participative. Il était d'ailleurs préconisé dans le chapitre « Droits nouveaux du citoyen » du rapport du comité Balladur. Mais peut-être est-ce justement ce qui a incité le Gouvernement à ne pas se presser pour inscrire à l'ordre du jour ces textes d'application : ce délai lui a permis de mener à leur terme certaines réformes que ce dispositif aurait pu bloquer – je pense notamment au changement de statut de La Poste.

Aujourd'hui, j'ai le sentiment que la majorité et le Gouvernement, sentant le vent de l'alternance, ont voulu se doter de ce qui pourrait se révéler une protection lorsqu'ils seront dans l'opposition.

Mais ce sont en réalité les dispositions principales de ces projets de loi qui nous laissent dubitatifs sur la volonté du Gouvernement d'instaurer un véritable droit d'initiative populaire, pour reprendre l'expression utilisée dans le rapport du comité Balladur. Si tel était le but recherché, les textes qui nous sont proposés sont particulièrement décevants. En effet, il s'agit davantage d'une nouvelle forme d'initiative parlementaire, que Robert Badinter a intitulée « proposition de loi renforcée par une campagne de pétition ». Le référendum qui pourrait advenir à l'issue d'un processus semé d'embûches apparaît plus comme un miroir aux alouettes que comme une hypothèse crédible.

Loin de faire émerger des réflexions citoyennes, les projets de loi confient l'initiative aux parlementaires. Un cinquième d'entre eux peut engager cette démarche en rédigeant une proposition de loi. Cela revient à renforcer le bipartisme, déjà fort à l'Assemblée nationale puisque seuls l'UMP et le PS comptabilisent des effectifs suffisants.

À l'issue de cette première étape, il s'agira de recueillir, par voie électronique et dans un délai de trois mois, les soutiens de un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. Ces deux modalités ne sont pas acceptables.

Après une nouvelle validation du Conseil constitutionnel portant sur le nombre de signatures obtenues, chacune des deux assemblées devra examiner la proposition de loi dans les douze mois suivants. Et quand je dis « examiner », il faut malheureusement seulement entendre qu'il suffira d'une simple lecture pour éviter le référendum, alors que le comité consultatif pour la révision de la Constitution – le comité Vedel de 1993 – prévoyait que seule l'adoption du texte permettrait l'abandon du processus référendaire. Si la proposition de loi est tout de même adoptée, nous savons à quel point quelques amendements peuvent transformer un texte. Or cette procédure échappe une nouvelle fois complètement aux citoyens, alors que, si un référendum était organisé et se révélait positif, le Président de la République serait dans l'obligation de promulguer la loi inchangée dans les quinze jours qui suivent la proclamation des résultats de la consultation.

En outre, l'opinion publique ne pourrait manifester son hostilité à un projet de loi qu'au terme d'un délai d'une année après sa promulgation. Les millions de personnes qui ont manifesté contre la réforme des retraites et qui auraient pu espérer dans cette disposition un ultime recours auraient dû faire preuve d'une grande patience.

Sans entrer dans le détail des dispositions des deux projets de loi, chacun peut juger combien il sera déjà difficile d'atteindre l'étape ultime : l'organisation d'un référendum. Les citoyens, enthousiasmés par cette nouvelle possibilité de participer au débat public, ne ressentiront que de la frustration devant tant d'obstacles. L'action parlementaire sera une nouvelle fois décrédibilisée : cela ne peut que renforcer un antiparlementarisme toujours latent dans notre pays, qui ne fait pas de distinction entre les partis politiques et favorise les extrêmes.

C'est pourquoi, bien que favorables à l'évolution envisagée, nous ne pouvons pas nous voter des textes trop restrictifs et qui sont bien en deçà des objectifs vertueux qui auraient pu être poursuivis. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La discussion générale commune est close.

La parole est à M. Guy Geoffroy, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Bien des choses ont été dites, mais, comme j'ai déjà eu l'occasion d'aborder divers sujets lors de ma première intervention et en réponse aux motions de procédure, je m'efforcerai d'être bref et me contenterai d'apporter quelques éléments de réflexion complémentaires.

M. Vauzelle s'interrogeait à l'instant sur l'article 3 de la Constitution, et se demandait même s'il existe encore. En matière constitutionnelle et institutionnelle, lorsqu'on parle de droits nouveaux, de la place du peuple et de ses représentants, loin des effets de manche et du manque de sérieux, il faut s'efforcer d'être mesuré dans ses appréciations. Le premier alinéa de l'article 3 dispose que : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » L'ouverture du champ référendaire est bien un élément fondateur de la Ve République. Contrairement à ce qui se passait auparavant, lorsque la souveraineté nationale s'exprimait par le peuple, mais à travers ses représentants, la Ve République affirme la volonté de partager la voix du peuple entre son expression directe et son expression par la voix de ses représentants. L'article 3 n'est donc pas en péril.

Soyons donc très prudents, évitons d'opposer ou de laisser opposer le peuple, qui, seul, aurait toujours et nécessairement raison, et ses représentants, suspectés de ne pas avoir obligatoirement raison et de ne pas toujours le représenter fidèlement, car ici est en jeu ce que, depuis l'origine des temps démocratiques, notre pays a toujours refusé : le mandat impératif. Réfléchissons bien avant de nous livrer à des réflexions et à des commentaires à l'emporte-pièce.

D'autre part, peu de chose nous sépare, au fond, de ce que dit Christian Vanneste. Il reconnaît que ces textes représentent un pas en avant, qu'il faut les accompagner en les votant, quitte à se réserver la possibilité d'aller plus loin un jour prochain : en effet, tout est affaire de rythme. Il évoque également la nécessité de dépassionner, et cela me paraît fort intéressant. Les délais qui, s'ajoutant les uns aux autres, garantissent que la procédure est correctement mise en oeuvre et qu'elle peut donc être…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

…suivie de tous les effets qui s'y attachent, permettent en effet de dépassionner les débats. Un exemple montrera comment le temps peut parfois faire son oeuvre : il y a quelque temps, la gauche de cette assemblée invoquait volontiers ce que le peuple aurait eu à dire de la réforme des retraites. Les études d'opinion laissaient d'ailleurs entendre que nos concitoyens, dans leur large majorité, étaient favorables à un retour à la situation antérieure. Or Le Bulletin quotidien d'aujourd'hui révèle que, d'après une récente étude d'opinion, à la question « Faut-il ramener l'âge de la retraite à soixante ans ? », 51 % des personnes interrogées répondent « Non », et 48 % « Oui ». On voit donc que, avec le temps, les passions s'apaisent, les choses se mettent en place. Si nos collègues de gauche avaient eu la possibilité de lancer un référendum d'initiative partagée sur le sujet, ils auraient couru le risque de voir, au fil du temps et des évolutions de l'opinion, l'arme fatale se retourner contre eux.

Ce texte est utile et il serait dommage de ne pas le voter, car ce serait renforcer ce contre quoi nous voulons tous lutter : ce sentiment qui, en raison de certaines réalités et de certains comportements, monte dans l'opinion publique, cette défaveur, ce désamour à l'égard de ses représentants. Les nombreux gaullistes présents dans l'hémicycle ne peuvent qu'adhérer à la volonté qui fut celle du général de Gaulle de donner la parole au peuple aussi souvent qu'il était nécessaire et possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il ne reste donc que quatre gaullistes en France !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Mais confondre la démocratie directe avec la démocratie participative, qui en est au contraire très éloignée, et mettre éventuellement en cause la démocratie représentative, tout cela m'apparaît très dangereux.

Au-delà des postures,…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

…l'échange que nous avons eu me paraît intéressant : il fera date et permettra, le jour où il sera envisagé d'aller plus loin – jour qui, je crois, ne manquera pas d'arriver –, de disposer d'un fonds de réflexions, d'observations et de propositions fort utile. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je voudrais d'abord remercier tous les orateurs, qui ont bien su poser le problème.

M. Diefenbacher a rappelé l'ambiance générale et l'hostilité fondamentale des socialistes à l'idée référendaire, évoquant la position de François Mitterrand dans Le Coup d'État permanent – position qui peut se justifier, en fonction des options constitutionnelles que l'on adopte.

Je comprends parfaitement ce qu'ont voulu dire M. Vanneste et M. Bodin. Il est vrai que plusieurs États connaissent une démocratie directe.

Vous avez même oublié – surtout votre collègue – de citer les cantons d'Uri et de Schwyz où, après l'office religieux, le peuple délibère et vote sur la place centrale. Encore faut-il aller à l'office religieux, car c'est une condition fondamentale pour pouvoir voter…

La France a fait un choix au moment de la Révolution. Était-ce le bon ? Je pense que oui. La souveraineté appartient au peuple qui l'exerce par l'intermédiaire de ses représentants. C'est parce que la loi, expression de la volonté générale – selon les termes de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 – est l'oeuvre des représentants du peuple, que le peuple peut aujourd'hui, monsieur Vanneste, grâce à la QPC – la question prioritaire de constitutionnalité –, remettre en cause la loi votée par les parlementaires.

Si le peuple, de lui-même, était un acteur de la loi, où se situerait la Constitution ? Quelle serait la hiérarchie des normes juridiques ? Il ne faut pas regarder la question sous un seul angle, mais dans son ensemble. Le projet de loi organique qui vous est soumis aujourd'hui va associer le peuple à l'initiative parlementaire et obliger la représentation nationale à délibérer sur un sujet précis. C'est nouveau et important.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le fait que le peuple entre dans la procédure représentative, pas seulement au moment de l'élection – ou de la non-réélection – des députés et des sénateurs, mais au cours de la vie du Parlement, par le biais de cette initiative partagée,…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

va changer profondément la relation entre celui qui a reçu le mandat et celui qui l'a donné. C'est tout l'intérêt du texte dont nous débattons.

Je voudrais revenir sur un point précis de l'intervention de M. Vauzelle, laquelle était, je le reconnais bien volontiers, d'une haute tenue.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je connais M. Vauzelle depuis longtemps et je connais ses options philosophiques, que j'ai retrouvées dans son intervention.

Toutefois, monsieur Vauzelle, il y a un point sur lequel nous devrions discuter plus longuement. Vous dites que la souveraineté ne se partage pas. C'est ce que disait le général de Gaulle dans sa conférence de presse du 31 janvier 1964, et c'est bien que ce soit vous qui nous le rappeliez ! Cela montre le chemin parcouru par tout le monde sur ce point…

Monsieur Vauzelle, ne pensez-vous pas que cette conception de la souveraineté tirée du droit romain, selon laquelle ce qui est souverain – superanus – s'exprime et s'applique à tous, n'est plus celle d'aujourd'hui ? Est-ce que, dans une France décentralisée, la souveraineté ne se partage pas ? Vous êtes président d'une grande région et, de ce fait, vous exercez une partie de la souveraineté nationale.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Monsieur Mallot, nous vous écoutons toujours avec une certaine patience ; rendez-nous la pareille !

Monsieur Vauzelle, ne pensez-vous pas que la construction du droit pénal international nécessite des partages de souveraineté ? C'est ce que dit expressément le Préambule de la Constitution de 1946. Il faut que la France accepte des limitations de sa souveraineté pour construire un ordre international nouveau.

Enfin, la construction européenne nécessite forcément des partages de souveraineté.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

La souveraineté se partage entre différents acteurs. Sur ce point, monsieur Vauzelle, vous faites erreur ou vous ne faites que rappeler une théorie du XIXe siècle, alors que nous sommes au XXIe siècle.

Je remercie les orateurs d'avoir abordé les vrais sujets. La discussion générale a montré l'intérêt qu'il y avait à voter ce texte et j'invite maintenant l'Assemblée nationale à le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

J'appelle en premier lieu les articles du projet de loi organique portant application de l'article 11 de la Constitution, dans le texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les articles 1er et 3 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles 1er et 2 sont successivement adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Jacques Valax pour soutenir l'amendement n° 1 à l'article 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Monsieur le rapporteur, vous connaissez parfaitement le sujet dont traite cet amendement.

Depuis le début, nous soutenons que la période de collecte des pétitions est insuffisante. Nous souhaitons que cette période, fixée dans le texte à trois mois, soit portée à six mois.

Notre demande est liée à l'importance du nombre de pétitionnaires. C'est l'un des reproches que nous faisons au texte : il faut 4,5 millions et demi d'électeurs susceptibles de participer à cette initiative. L'importance du nombre d'électeurs justifie la nécessité de rallonger la période pendant laquelle le peuple pourra s'emparer de cette question ; cela favorisera en outre une plus grande mobilisation.

Le temps est nécessaire à l'appropriation par le peuple, par l'opinion publique, de la question posée. Donc, la place des uns et des autres est ici fondamentale. Nous souhaitons simplement qu'il y ait un rééquilibrage.

J'ai écouté attentivement les interventions des uns et des autres concernant cet équilibre entre la représentation directe et le droit au référendum, à l'initiative populaire, qui est le fondement de ce texte, et que vous avez un peu raboté, en refusant d'aller jusqu'au point où la parole serait effectivement donnée au peuple, aux citoyens. Vous devez aller dans ce sens, et nous pourrons alors montrer que nous avons tous le souci de créer un espace de respiration, d'échange, de parole, un temps pour la discussion et la concertation.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, je souhaite que vous fassiez droit à notre demande qui me paraît tout à fait justifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

La commission est défavorable à cet amendement.

Nous avons commencé à évoquer ce sujet dans la discussion générale. Ce n'est pas un sujet mineur, mais je vais rappeler les éléments qui ont fondé la décision de la commission.

D'abord, monsieur Valax, je vous ferai remarquer votre contradiction : vous demandez un délai plus long, tout en déclarant que cette demande référendaire correspond à un véritable engouement. Vous citez l'exemple – repris par plusieurs de nos collègues ce matin – de la votation sur La Poste, laquelle, pour reprendre les propos entendus hier, a réuni plus de 2 millions de personnes en quelques jours.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

En trois mois, alors qu'il y aurait un fort engouement, il ne serait en revanche pas possible, selon vous, de parvenir aux 4,5 millions d'électeurs, ce qui correspond aujourd'hui à 10 % de l'électorat…

Il faut, selon moi, que la puissance de la demande référendaire soit avérée. Tel est le sens de l'article 11 de la Constitution. Cette puissance, on doit la trouver au sein du Parlement et du corps électoral. En trois mois, on doit pouvoir y arriver. On note d'ailleurs, dans toutes ces périodes, que beaucoup de choses se décident dans le premier mois, qu'ensuite elles disparaissent un peu, pour réapparaître dans le mois précédant la fin du délai. Par conséquent, avoir un temps de latence trop important ne changera pas les choses. Au contraire, cela allongera la procédure au point que le désintérêt pourra gagner.

N'hésitons pas à regarder en face la réalité quotidienne : un sujet chasse l'autre. Croyez-vous sincèrement pourvoir maintenir une forte mobilisation sur un temps trop long ? Je suis vraiment persuadé que trois mois sont nécessaires et suffisants. Si nous devions nous apercevoir que c'était une erreur, mieux vaut alors rallonger le délai. Ce sera plus simple que de le diminuer si nous avions fait l'inverse.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Je soutiens l'amendement de notre collègue Valax.

Pour être précis, j'ai fait le calcul : 4,5 millions de signatures en quatre-vingt-dix jours, cela fait 50 000 signatures par jour, soit 2 000 signatures par heure et trente-cinq signatures à la minute. Je veux bien croire que nous avons une très forte capacité de mobilisation, mais dans aucun pays au monde, cela ne se passe ainsi !

Je vous donne trois éléments de droit comparé, monsieur le rapporteur. Vous dites dans votre rapport qu'en Italie, le délai est de trois mois. Mais il suffit d'avoir 500 000 signatures pour 60 millions d'habitants.

En Suisse, la population a dix-huit mois pour rassembler 100 000 signatures, alors que le corps électoral est de 5 millions.

Enfin, l'Union européenne, que François de Rugy évoquait hier dans sa motion de procédure, accorde douze mois pour recueillir un million de signatures.

En France, il ne faut, aux termes du texte de l'Union européenne, que 54 000 signatures. Je rappelle que le corps électoral est, en l'occurrence, de 375 millions. Si vous pensez sérieusement que l'on peut réussir à rassembler trente-cinq signatures par minute, je loue votre optimisme, monsieur le rapporteur, mais nous ne le partageons pas !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Il ne s'agit pas d'opposition, mais de bon sens !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

…je voudrais faire une remarque à M. le rapporteur, car il se contredit lui-même. Il a souligné tout à l'heure que le fait de dépassionner le débat était intéressant. Or vous venez, monsieur le rapporteur – je vous le dis très amicalement – de dire l'inverse, en déclarant que l'on risquait une perte d'intérêt. Quel est donc cet intérêt limité dans le temps, si ce n'est un intérêt passionnel ?

Le fait de donner tout son temps à la réflexion permet à la population de s'habituer au référendum et d'aborder toute question avec une relative sérénité. Il peut se produire des incidents, des événements de toute sorte pendant la période où l'on mobilise les gens, ce qui peut modifier complètement leur attitude. C'est pourquoi j'estime que plus on donne du temps, plus on permet au référendum de devenir une habitude démocratique et totalement dépassionnée.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Je ferai deux remarques concernant les propos de Jean-Jacques Urvoas et de Christian Vanneste.

Première remarque, on réussit bien dans notre pays, à chaque fois qu'il y a une élection, à faire s'exprimer 30 à 40 millions de nos concitoyens en dix ou douze heures d'horloge.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Cela fait 50 000 personnes à la minute.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Est-ce qu'en trois mois, nous ne pourrions pas réussir à les mobiliser ? Je vous laisse juges.

Ma deuxième remarque concerne plus précisément l'intervention de Christian Vanneste. J'ai omis de le dire, mais il y a un délai de deux mois qui précède l'ouverture formelle de cette période de trois mois. C'est potentiellement un temps de mobilisation pour nos concitoyens afin que, dès le premier jour, dès l'ouverture du délai, il y ait une vraie mobilisation et une vraie prise en compte de ces soutiens, sans attendre une période beaucoup plus longue.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je voudrais répondre à M. Urvoas qui a essayé de donner une couleur scientifique à son intervention.

Puisqu'il nous a invités à faire des additions et des divisions…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je vous remercie, monsieur Mallot ! Dans l'Allier, le compte est plus vite fait, je le reconnais ! (Sourires.)

Monsieur Urvoas, aux élections, il y a environ 36 millions de Français qui votent en douze heures, ce qui fait 50 000 à la minute, et cela se passe très bien.

(L'amendement n° 1 n'est pas adopté.)

(L'article 3 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas pour soutenir l'amendement n° 2 à l'article 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Cet amendement vise à élargir le mode de collecte du nombre de signatures.

Le rapporteur nous propose de ne retenir que le vote électronique. C'est une bonne initiative, mais pourquoi restreindre au seul vote électronique ? Vous avez inscrit dans l'étude d'impact, monsieur le garde des sceaux, que la seule alternative consistait en une centralisation du recueil des signatures des électeurs dans les mairies ou dans les préfectures et sous-préfectures, ce qui apparaissait lourd et coûteux.

Nous vous demandons d'admettre tous les possibilités, c'est-à-dire de vous inspirer simplement de l'article 5 du règlement de l'Union européenne, qui organise l'initiative citoyenne puisqu'il est précisé que le million de signatures peut se collecter sur papier ou en ligne.

Donc pourquoi soustraire ? Nous vous proposons, pour notre part, d'ajouter. Si vous le refusiez, ce qui serait difficile à comprendre, vous me feriez penser – parce que je sais que, comme M. le rapporteur, vous aimez l'histoire, monsieur le garde des sceaux ! – aux thermidoriens de 1794. En effet, la Constitution de 1793 prévoyait le référendum, d'ailleurs accepté par le peuple dans une votation du 9 août. Le corps électoral était de sept millions et un dixième des représentants issu de la moitié des départements pouvait décider d'un référendum contre le corps législatif. Les thermidoriens sont revenus, en 1794, sur cette disposition. Je vous invite donc, monsieur le garde des sceaux, à ne pas être le Tallien de 2011 !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

La commission est défavorable à cet amendement. Je ferai remarquer à Jean-Jacques Urvoas, parce que cela lui a probablement échappé, qu'il n'était pas, à ma connaissance, possible en 1793 de recourir à un vote électronique ! La comparaison est, en l'occurrence, peut-être quelque peu aléatoire !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Nous avons choisi la simplicité, souhaitant éviter tous les risques. Il est clair que l'accès à internet est, aujourd'hui, de plus en plus fréquent,...

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

…et la disposition selon laquelle cette mesure ne s'appliquerait qu'aux seuls chefs-lieux de canton me semble correspondre à toutes les caractéristiques.

La question des fraudes se pose. Le projet de loi ordinaire traite de tout le champ pénal ouvert par ce genre de problématique. Nous ne devons donc pas écarter le fait que tout ce qui sortirait du soutien apporté par la voie électronique risque d'être soumis à des aléas qu'il convient, je le crois très sincèrement, d'éviter.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Le Gouvernement partage les propos du rapporteur. Avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Le vote électronique n'existait évidemment pas en 1794, je vous en donne acte, monsieur le rapporteur ! (Sourires.)

Vous nous avez parlé, hier, de la déclaration fiscale sur internet. Quand nous avons interrogé le Gouvernement l'année dernière, il nous a fait remarquer que 12 000 contribuables n'avaient pu accéder au site internet pour remplir leur déclaration d'impôt. Des erreurs peuvent donc aussi survenir lorsque l'on fait appel à internet ou au vote électronique. Il faut donc favoriser la multiplicité des modes de collecte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Mallot

Très bien !

(L'amendement n° 2 n'est pas adopté.)

(L'article 4 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. François de Rugy, inscrit sur l'article.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

L'article 7 est, lui aussi, totalement contradictoire. En effet, dans un même mouvement, son alinéa 2, tel qu'il est rédigé, prévoit que la liste des signataires d'une pétition peut être consultée par le public, mais précise également que les données collectées dans le cadre de la procédure de recueil des soutiens seront détruites.

Je trouve très bien que l'on s'entoure de précautions, notamment en cas de vote électronique, et que soit prévue la destruction des fichiers après clôture de la procédure. Mais alors, pourquoi vouloir que cette expression de nos concitoyens puisse être consultée par le public ? Il est tout à fait normal – et vous l'avez prévu – qu'une commission procède à des contrôles. Il est également très bien que les initiateurs de la proposition puissent éventuellement avoir eux aussi accès à cette liste pour confronter leur contrôle à celui de la commission. Mais alors, pourquoi le public peut-il consulter cette liste ?

Nous vous avons posé cette question hier et nous n'avons obtenu d'autre réponse qu'une sorte de pétition de principe selon laquelle il ne serait pas honteux d'afficher ses opinions quand on soutient une pétition. Ce n'est naturellement pas honteux. J'ai toutefois expliqué dans mon intervention qu'il y avait une différence entre les responsables politiques que nous sommes, les militants politiques qui ont l'habitude d'afficher clairement leurs opinions et l'ensemble des citoyens. En effet, ces 4,5 millions de personnes – et c'est beaucoup – n'ont pas forcément envie d'afficher leur opinion. Nous ne sommes dans un pays où l'on met une pancarte dans son jardin ou à sa fenêtre pour exprimer ses opinions politiques. C'est ainsi !

Par ailleurs, un problème concret se pose. Permettre au public de consulter ces données, c'est ouvrir la porte à leur exploitation par un autre parti politique, par des maires ou par des élus, qui ont des responsabilités exécutives dans des collectivités locales, qui voudraient connaître le nom des signataires. On imagine alors parfaitement les pressions qui pourraient être exercées. Je vous rappelle, d'ailleurs, mes chers collègues, le cinéma que vous avez fait s'agissant des feuilles d'émargement lors de la primaire organisée par les socialistes, lesquels se sont entourés de nombreuses garanties pour qu'elles soient très rapidement détruites.

J'insiste sur ce point. Mes collègues socialistes ont déposé un amendement de suppression de l'article, je le voterai. Si vous preniez leur proposition en compte, ce serait un très bon signe.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Jacques Valax, pour soutenir l'amendement n° 4 .

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

La commission a repoussé cet amendement, pour les raisons très précises que je vais exposer.

Je tiens d'abord à rappeler à nos collègues que, si cette disposition concernant l'avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés figure dans le texte, c'est parce que, sur ma proposition, la commission des lois en a décidé ainsi.

Nous avons prévu la seule possibilité qui nous est offerte : celle de l'avis simple. Cet amendement propose de le remplacer par l'avis conforme. C'est impossible et j'espère que nos collègues en conviendront. La jurisprudence du Conseil constitutionnel, en la matière, est très claire et très précise. Sans être trop long, je souhaite donner lecture de quelques lignes très explicites à ce propos. Ainsi, dans sa décision du 14 décembre 2006 sur la loi de financement de la sécurité sociale, le Conseil constitutionnel a précisé qu'il était impossible de « subordonner à l'avis conforme d'une telle autorité l'exercice, par le Premier ministre, de son pouvoir réglementaire ». Le Conseil constitutionnel se prononcera à nouveau de cette façon, en 2012, sur cette loi organique.

Par prudence, par sagesse et par évidence, je propose donc de repousser cet amendement.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Je confirme ce que vient d'expliquer le rapporteur. Cet amendement est très directement contraire à la décision du Conseil constitutionnel du 14 décembre 2006, qui vise d'ailleurs expressément la CNIL.

Pour être en conformité avec la proposition du Conseil, je propose, en conséquence, aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le retirer.

(L'amendement n° 4 est retiré.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Jacques Valax pour soutenir l'amendement n° 3 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Je ne répéterai pas les propos de notre collègue de Rugy.

Je souhaiterais que vous nous expliquiez pourquoi vouloir absolument publier les pétitions. La question reste posée. J'attends une réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

La commission a émis un avis défavorable que je vais expliciter.

Je pense que nous sommes tous d'accord sur le fait que l'expression du soutien s'apparente à une pétition et non à un vote. Je reprendrai les précédents propos de M. de Rugy. Nombreux sont nos concitoyens qui n'hésitent pas, dans un quartier ou dans une rue, à signer des pétitions portant sur un problème particulier. Ils inscrivent donc leur nom, leur prénom, leur adresse et signent. Beaucoup de maires reçoivent des pétitions, les traitent et font, ensuite, l'effort naturel de répondre aux pétitionnaires et de leur dire quelle suite il est envisagé de donner. En ma qualité de maire, je n'ai jamais reçu d'un concitoyen, ayant souhaité s'adresser à moi par voie de pétition, de lettre dans laquelle il m'interrogeait sur les raisons pour lesquelles je connaissais ses nom, prénom et adresse. Il ne s'agit pas de mettre une pancarte dans le dos de quiconque. Si la volonté populaire doit s'exprimer, elle doit le faire tout à fait librement.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

La CNIL a beaucoup insisté et a expressément précisé, lors d'une de ses séances, l'importance de la publicité pour toutes les pétitions, afin d'éviter les fraudes. Je ne vois pas ce qu'il y a à craindre.

J'ajoute, monsieur de Rugy, que, parmi les pétitionnaires, certains peuvent ne pas penser la même chose du texte de loi soumis à référendum. Des concitoyens peuvent vouloir pétitionner pour se prononcer en faveur d'une proposition et d'autres, grâce au débat sur cette initiative, peuvent vouloir également pétitionner, mais pour voter contre. Donc, le fait de pétitionner pour demander l'organisation d'un référendum, en vertu de l'article 11 de la Constitution, n'implique pas obligatoirement d'être dans un camp ou dans un autre, ce qui est très différent des pétitions ordinaires qui, elles, sont très ciblées et qui vont même parfois jusqu'à mettre en cause des politiques et, pourquoi pas, des acteurs de la vie publique.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Apporter son soutien à l'initiative référendaire ne signifie pas, bien entendu, donner son opinion sur le fond. Il peut y avoir, parmi ceux qui soutiennent l'initiative référendaire, autant de gens pour que de gens contre.

Le rapporteur a justement rappelé la position de la CNIL. Je n'y reviendrai pas, car le temps s'écoule rapidement. Puisque l'on a beaucoup cité ce qui se fait à l'extérieur, je veux simplement parler de ce qui se passe chez nous, au sens large du terme, et rappeler que le traité de Lisbonne prévoit, s'agissant de l'initiative citoyenne européenne, que la publication des listes des pétitionnaires se fera conformément au règlement du 16 février 2011.

Il serait donc bien que M. Valax retire son amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Vous ne nous suivez pas, pourquoi le ferions-nous ?

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Le rapporteur cite le cas de pétitions adressées à un élu, par exemple à un maire. J'ai souvent eu, en tant que maire-adjoint, à traiter des pétitions. Ces pétitions s'adressant à une institution, il est normal que l'institution en question ait connaissance de liste des pétitionnaires pour leur répondre. Mais, ici, nous ne sommes absolument pas dans le même cadre, puisqu'il s'agit de gens qui soutiendront une initiative politique. M. le garde des sceaux nous explique que cela ne veut pas dire qu'ils ont une position politique. Des citoyens qui soutiendraient une initiative politique sans avoir de position seraient tout de même quelque peu étranges ! Je n'en connais pas, pour ce qui me concerne ! Cet argument ne tient donc pas. Vous avez, en réalité, décidé de rendre cette liste publique parce que vous voulez dissuader les gens de signer.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Et c'est en toute connaissance de cause que vous allez permettre à des gens d'accéder à ces données – pour des utilisations commerciales, éventuellement, mais aussi pour exercer des pressions politiques. On pourrait imaginer une mobilisation citoyenne sur des sujets portant sur la démocratie sociale. Mais, dans une entreprise, il peut y avoir des pressions sur des salariés signataires d'une pétition. Vous le savez très bien aussi.

Je rappelais tout à l'heure le précédent de la primaire socialiste. Vous ne vouliez même pas que le parti socialiste puisse disposer du fichier des gens qui avaient voté. Vous considériez, en effet, qu'il était anormal qu'un parti, organisateur d'une primaire pour choisir son candidat, connaisse les participants. Et vous voudriez maintenant que les 4,5 millions de signatures soient publiquement affichées ! Ce n'est pas sérieux ! Vous voulez tout simplement dissuader les gens de signer !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est ce qui est grave. Or vous ne nous avez, en réalité, pas répondu. Il est déplorable, alors que nous aurions pu obtenir quelques avancées, que vous refusiez tous les amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Hunault

Je ne comprends pas l'agressivité de M. de Rugy. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Hunault

Le rapporteur et le garde des sceaux vous ont répondu. Vous déformez toujours nos propos ! Souffrez que nous ayons une position différente de la vôtre !

Depuis le début de la discussion sur le référendum d'initiative populaire, bonne idée que vous aviez défendue, vous avez présenté tous les arguments possibles pour démontrer que le texte n'est pas bon.

Le rapporteur nous a expliqué pourquoi…

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Hunault

M. de Rugy ne voit le référendum d'initiative populaire l'aspect politique. Or, dans les États ayant généralisé ce type de référendums, certains portent sur la vie concrète, sur des enjeux de société qui concernent les citoyens. Permettre une telle procédure, c'est donc améliorer les mécanismes de notre démocratie ; encore faut-il en arrêter les modalités. Je ne vois pas en quoi rendre publique la liste serait une atteinte à cette initiative.

(L'amendement n° 3 n'est pas adopté.)

(L'article 7 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Sur l'article 9, je suis saisie d'un amendement n° 5 .

La parole est à M. Jacques Valax.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Dans la mesure où l'on nous explique que c'est un référendum d'initiative partagée, nous souhaiterions que les délais soient rééquilibrés. Alors que vous avez refusé de porter de trois à six mois la durée de la période de la collecte, paradoxalement, vous entendez maintenir à douze mois le délai pendant lequel l'Assemblée nationale ou le Sénat auront à examiner le texte. Nous proposons de le ramener à six mois.

Vous nous avez expliqué, monsieur le rapporteur, que la question devait être tranchée rapidement pour que le référendum présente un intérêt. Je vous retourne donc l'argument. Vous avez reconnu qu'il fallait un fort intérêt pour que les citoyens participent avec engouement et de façon massive. Raison de plus pour que les délais soient rééquilibrés au profit de l'expression citoyenne.

Enfin, puisqu'il s'agit d'un texte d'initiative parlementaire, les parlementaires auront par définition déjà eu tout loisir de se réserver le temps nécessaire pour élaborer la proposition de loi qui sera ensuite soutenue par les citoyens. Même ramené de douze à six mois, le délai sera donc manifestement suffisant. Nous sommes prêts à discuter ; mais, à chaque fois que nous tentons une avancée, vous refusez cette main tendue. Je vous demande donc, sur ce sujet particulier, d'accepter notre demande.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Défavorable, vous vous en doutez, nous avons eu l'occasion d'expliquer pourquoi. Il ne faut pas exclure le fait qu'un texte issu d'une initiative partagée entre un cinquième du Parlement et 10 % de nos concitoyens puisse être étudié suivant la procédure ordinaire par chacune des assemblées, éventuellement amendé, et finisse comme un grand nombre de projets ou propositions par devenir loi de la République. C'est une ambition désormais autorisée par l'élargissement de l'article 11.

Rappelons d'abord que c'est le comité Balladur qui avait proposé ce délai de douze mois : il ne vient pas de nulle part.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

C'est bien le seul point sur lequel vous l'aurez suivi !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Second argument, qui n'est probablement venu à l'esprit de personne, mais que je livre à votre réflexion : imaginons, ce qui n'est pas du tout impensable, que la fin de la période de collecte soit hors session parlementaire, au début du mois de juillet, par exemple. Dans la mesure où la session ordinaire suivante commence au début du mois d'octobre, cela fera déjà trois mois de perdus et le délai de six mois que vous recommandez sera réduit d'autant. Je crains fort, surtout avec les nouveaux délais inscrits depuis 2008 dans notre constitution, en particulier à l'article 42, qu'il n'arrive l'inverse de ce que vous craignez, c'est-à-dire que le Parlement soit dans l'impossibilité de faire son travail et de faire éventuellement voter une loi.

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne sais pas si l'on doit avoir de l'admiration ou presque, même si je n'aime pas beaucoup ce sentiment, de la pitié pour notre rapporteur. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il est en effet obligé de se livrer à une gymnastique oratoire assez difficile. Je ne sais pas s'il a reçu des instructions de la part du Gouvernement, sans doute, pour refuser systématiquement tous les amendements, mais nous expliquer que douze mois étaient nécessaires à cause des trois mois d'intersession entre le début du mois de juillet et la fin du mois de septembre, il fallait y penser !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

J'ai cru comprendre tout à l'heure qu'il fallait prendre le temps de réfléchir. Pendant ces trois mois justement, on réfléchira, et on passera à l'action dès l'ouverture de la session.

Mais surtout, monsieur le rapporteur, vous appartenez à une majorité qui, depuis 2007, a voté sans discontinuer je ne sais combien de projets de loi sur lesquels l'urgence a été déclarée. Rappelez-vous par systématiquement exemple de la situation aberrante que l'on a connue pour le projet de loi sur les retraites. Il a fallu examiner les amendements en commission au mois de juillet, alors que la session était close, pour que le projet soit examiné en séance plénière au mois de septembre. Nous sortir un tel argument, c'est donc faire preuve d'une particulière mauvaise foi ! Très franchement, cela m'étonne de votre part !

Le délai de six mois qu'a défendu M. Valax est d'ailleurs déjà un compromis. Pour ma part, j'avais proposé trois mois dans la proposition de loi que j'avais présentée. Penser, lorsqu'il y a eu une mobilisation citoyenne, que l'on pourra faire durer les choses et enterrer le problème en repoussant de douze mois l'examen d'une proposition ayant recueilli 4,5 millions de signatures, c'est vraiment se moquer du monde.

(L'amendement n° 5 n'est pas adopté.)

(L'article 9 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les articles 10, 11, 12, 13, 13 bis et 13 ter ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles 10, 11, 12, 13, 13 bis et 13 ter, mis aux voix successivement, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Sur l'article 14, je suis saisie d'un amendement n° 8 .

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

L'article 14 prévoit que la commission de contrôle peut désigner des experts. Comme ce terme ne renvoie à aucune référence, nous vous proposons, pour être plus précis, de renvoyer à la loi relative aux experts judiciaires.

Cela dit, le rapporteur finit par nous faire croire qu'un tel référendum va exister. Comme nous n'en avons pas encore trop parlé aujourd'hui, je rappelle que ce n'est pas un référendum d'initiative partagée mais que c'est un référendum d'initiative parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Pour commencer, il faut 185 parlementaires ; ce qui revient à dire, pour parler clairement, qu'une telle initiative devrait être réservée à l'UMP et au PS, les seuls aujourd'hui à pouvoir réunir autant de parlementaires. Les citoyens ne viennent qu'en soutien à cette initiative. Et quand bien même il y aurait 185 parlementaires et 4,5 millions de citoyens, cela ne signifie pas que le référendum sera automatiquement organisé, puisqu'il suffit que le Gouvernement, qui aura tout de même le soutien d'une majorité à l'Assemblée nationale ou au Sénat, organise une lecture pour planter l'hypothèse d'un référendum.

Arrêtons donc de croire que nous construisons quelque chose qui vivra. Ce n'est pas vrai, et, comme, en plus, vous empilez les contraintes, vous tuez ce projet dans l'oeuf. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Je prends le pari qu'il n'y en aura aucun dans les dix ans, et même dans les vingt ans qui viennent !

(L'amendement n° 8 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 14 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les articles 15 et 16 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(L'article 15 et l'article 16, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Sur l'article 17, je suis saisie d'un amendement n° 7 .

La parole est à M. Jacques Valax.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

L'amendement est défendu.

(L'amendement n° 7 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Valax

Il est défendu.

(L'amendement n° 6 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

(L'article 17 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les articles 18, 19 et 20 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles 18, 19 et 20, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Nous avons achevé l'examen des articles du projet de loi organique portant application de l'article 11 de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

J'appelle maintenant les articles du projet de loi portant application de l'article 11 de la Constitution dans le texte de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Les articles 1er, 2 et 3 ne faisant l'objet d'aucun amendement, je vais les mettre aux voix successivement.

(Les articles 1er, 2 et 3, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. François de Rugy, inscrit sur l'article 3 bis.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Nous avons déposé avec plusieurs collègues, dont Marc Le Fur, un amendement après l'article 3 bis, dont je voulais dès à présent dire quelques mots.

Le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire portent sur une procédure de mobilisation citoyenne : le droit de pétition à l'échelle nationale, mais ce type de formule aurait également son intérêt à l'échelon local. Cela a d'ailleurs été prévu à différents moments ; il avait été notamment envisagé dans la réforme territoriale que les populations d'une région pourraient être consultées sur les redécoupages.

Nous sommes un certain nombre, notamment en Bretagne, mais cela concerne aussi d'autres régions comme la Normandie, à vouloir que les citoyens soient consultés sur le redécoupage régional.

Le problème, c'est que la loi ne prévoit qu'un redécoupage région par région et on n'envisage même pas la question à l'intérieur d'une région. Or certains veulent réunifier la Bretagne et donc séparer la Loire-Atlantique de la région Pays de la Loire.

Nous avons donc souhaité déposer un amendement dans ce sens. Nous sommes bien conscients que nous sommes un peu éloignés de la procédure nationale,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…mais il y avait l'idée d'avoir un parallélisme des formes en quelque sorte et d'ouvrir le débat.

Nous en avions en tout cas l'occasion et nous l'avons fait, Marc Le Fur et moi, mais je sais qu'un grand nombre de députés socialistes pensent la même chose. Nous avons même lancé un appel commun au-delà des partis. C'est une question qui transcende d'ailleurs les partis politiques, qui les divise aussi parfois ; or un référendum, une mobilisation citoyenne peut permettre de régler des questions qui ne peuvent pas être tranchées par les partis politiques ou par des groupes politiques dans les assemblées, tout simplement parce qu'ils n'ont pas de réponses homogènes. Donner la parole aux citoyens sur ces questions serait une excellente chose, et c'est le sens de l'amendement que nous présenterons.

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Marc Le Fur a voulu joindre un certain nombre de parlementaires socialistes pendant le week-end. Il n'en a trouvé aucun et je le regrette, car nous aurions cosigné cet amendement avec plaisir.

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Je salue aussi le fait que, pour une fois, et avec un grand sourire, il signe un amendement avec le représentant des Verts. Concernant la Bretagne, c'est une grande nouvelle. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marylise Lebranchu

Nous comprenons par avance les arguments que M. le rapporteur ou peut-être M. le garde des sceaux pourraient nous opposer, mais nous sommes un certain nombre sur ces bancs à demander qu'un référendum soit organisé sur le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Les institutions peuvent à un moment donné rencontrer leur histoire, et ce serait pour nous une très bonne nouvelle. Puisque le Président de la République n'a pas voulu en prendre l'initiative, mieux vaut la laisser au département. La formule proposée nous convient et nous voterons avec plaisir cet amendement, même si nous ne l'avons découvert qu'après coup, ce dont Marc Le Fur est sûrement fort marri.

Plusieurs députés. Et l'amendement n° 1 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Il a été déposé après l'article 3 bis.

(L'article 3 bis est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Nous en venons précisément à l'amendement n° 1 , qui tend à insérer un article additionnel après l'article 3 bis.

La parole est à M. Marc Le Fur.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Nous progressons en matière de démocratie directe.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Ce progrès se constate au niveau national. Peut-être est-il insuffisant ; en tout cas, nous allons dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Ça, pour être insuffisant, il est insuffisant !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Dès lors que nous faisons ce pas, il est indispensable d'évoquer les sujets où la démocratie directe peut nous permettre de progresser. L'un de ces sujets, et il est majeur, c'est celui de notre organisation administrative, de nos cartes régionales. Les choses évoluent ; le pays vit, le pays bouge. J'en veux pour preuve ce qui se passe aujourd'hui en Alsace, et je salue à cet égard les initiatives de ses élus, en particulier, monsieur le garde des sceaux, celle de votre collègue Philippe Richert.

D'autres régions veulent également évoluer, à commencer par la Bretagne historique, aujourd'hui divisée entre une région administrative à quatre départements, et la Loire-Atlantique qui appartient à une autre région. C'est ce que viennent d'expliquer François de Rugy et Marylise Lebranchu, et que partagent d'autres députés, cosignataires de mon amendement.

Certes, me direz-vous, il existe déjà des facultés d'évolution, y compris référendaires. Mais lorsque quelqu'un veut évoluer, il n'a pas à demander, par définition, l'avis de ceux dont il veut se séparer : quand un locataire quitte un immeuble, il n'a pas à obtenir l'autorisation de l'ensemble des copropriétaires…

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

C'est de bon sens : il est libre de partir. Il faut évidemment l'avis de la région qui l'accueille ; cela va de soi. C'est pourquoi je propose une procédure référendaire en deux temps : dans un premier temps, pour connaître l'avis du département concerné – dans le cas présent, les élus sont déjà mobilisés puisque le conseil général de Loire-Atlantique a déjà souscrit à plusieurs reprises à cette idée ; dans un second temps, la région d'accueil se prononcera, ce qui ne devrait pas non plus poser de problème, la région Bretagne ayant déjà, dans ses diverses sensibilités, au temps de Josselin de Rohan, aujourd'hui sous le président Jean-Yves Le Drian, voté pour cette évolution. D'autres départements de la région Bretagne ont également voté en ce sens ; je salue la récente délibération du Morbihan, présidé par notre collègue François Goulard.

Cette évolution est donc à portée de main. Que les choses soient bien claires : ce n'est pas nous qui allons décider aujourd'hui que la Loire-Atlantique rejoindra la Bretagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Ce n'est pas l'objet de l'amendement n° 1 : il se borne à une faculté référendaire. Celle-ci aboutira-t-elle ? Il reviendra aux habitants de Loire-Atlantique de se déterminer, selon une procédure bien encadrée, comme le prévoit l'ensemble du projet de loi. Nous ouvrons seulement une faculté.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Pardonnez-moi, madame la présidente, et merci pour votre indulgence. Vous comprenez mon enthousiasme et ma passion. Merci à tous ceux qui accepteront cet amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Je suis confus d'avoir à être beaucoup plus terre à terre et de ne pas faire montre du même enthousiasme que notre collègue Marc Le Fur,…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

Notre débat porte sur deux textes tendant à mettre en oeuvre les dispositions nouvelles de l'article 11 de notre Constitution sur un aspect particulier : l'organisation de référendums à l'échelle nationale. Or ce qui est proposé, c'est un référendum à l'échelle locale,…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Geoffroy

…qui n'a en soi rien de méprisable mais qui n'entre pas dans ce cadre. Nous sommes donc en présence d'un superbe cavalier législatif, ce que chacun sait, à commencer par ceux qui s'apprêtent à voter l'amendement. Mais, très sincèrement, la commission des lois ne saurait appeler notre assemblée à voter un cavalier législatif.

Si une question prioritaire de constitutionnalité devait un jour être posée sur la loi du 16 décembre 2010 ainsi modifiée par l'amendement, j'appelle votre attention sur les conséquences que cela aurait quant à l'ouverture d'un prétendu droit nouveau que vous auriez accordé. (Exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Tout d'abord, comme l'a indiqué le rapporteur, il est évident – tout le monde le sait sur ces bancs – que l'amendement, quel qu'en soit l'intérêt, constitue un cavalier budgétaire. (Exclamations sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Un cavalier législatif, pardon. Tout le monde peut se tromper.

Je n'imagine pas que l'Assemblée nationale veuille voter un cavalier, car c'est contraire au droit parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

On en voit tous les jours, mais cela n'arrive jamais !

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Les rares fois où c'est arrivé, le Conseil constitutionnel a prononcé une censure ! Je n'imagine pas que Mme Lebranchu, ancienne garde des sceaux, M. de Rugy, grand juriste, M. Vauzelle et tous les autres députés présents, aux qualités plus grandes encore, si tant est que la chose soit possible, votent un cavalier ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Sur le fond, je conçois parfaitement que les actuelles limites administratives, qui résultent de compromis à une date donnée, ne soient pas intangibles. Les choses peuvent évoluer. C'est la raison pour laquelle la loi de 2010 relative à la réforme des collectivités territoriales a prévu une procédure. Celle-ci repose sur une initiative conjointe. Nous pouvons tous comprendre qu'un département souhaite quitter une région pour en rejoindre une autre, mais ce département a un passé, un vécu avec sa région d'origine, surtout quand il s'agit du département où se situe la capitale régionale. Même si une telle évolution correspond au sentiment profond des gens, cela nécessite une préparation. Il ne s'agit pas seulement d'une question référendaire que l'on peut poser comme cela !

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

des dettes communes, des projets communs ? La décision doit être conjointe. Je ne suis pas Breton…

Debut de section - PermalienMichel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

mais il m'arrive de lire le journal et je sais qu'il existe un courant d'opinion favorable au rattachement de la Loire-Atlantique à la région Bretagne. Néanmoins, cela suppose un accord entre les deux régions, une initiative conjointe. Je suis sûr que M. Le Fur et les autres signataires de l'amendement partagent ce sentiment, et qu'ils accepteront de le retirer.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Mes chers collègues, six orateurs ont demandé à s'exprimer sur l'amendement et je donnerai la parole à chacun. Je leur demande toutefois de rester dans un temps raisonnable.

La parole est à M. Éric Straumann.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Straumann

En Alsace, il ne s'agit pas d'un problème de rattachement à une région, mais nous nous trouvons aussi devant une difficulté qui me semble pouvoir être résolue par voie référendaire. Les deux départements et la région souhaitent fusionner. La région Alsace a délibéré, ainsi que le conseil général du Bas-Rhin ; malheureusement, le conseil général du Haut-Rhin n'en a rien fait, ce qui pose problème. Alors que la population du Haut-Rhin y est favorable, chacun a ses raisons pour ne pas délibérer en ce sens.

L'amendement n° 1 est peut-être un cavalier, mais lorsque l'on donne la voix au peuple, je pense que l'aspect légal passe au second plan. (Mouvements divers.)

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Straumann

L'adoption de cet amendement serait un élément important pour que la population puisse s'exprimer localement sur un choix d'organisation du territoire. La réforme constitutionnelle de 1962 n'était pas non plus, dit-on, si constitutionnelle que cela… Quand on donne la parole au peuple, c'est au peuple de trancher, que ce soit au niveau local, régional ou national.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Monsieur Straumann, la présidence n'a pas à intervenir dans les débats, mais je ne pense pas que l'on puisse dire dans cet hémicycle que l'aspect légal soit secondaire…

La parole est à M. Michel Hunault.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Hunault

Monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, je vais vous contredire et appuyer l'amendement de M. Le Fur. Si nous voulons donner corps au référendum d'initiative populaire, celui-ci doit pouvoir être l'occasion de s'exprimer sur des questions d'organisation du territoire. Je rappelle que la dernière loi sur l'organisation territoriale ouvre une possibilité de fusion des limites territoriales ; l'amendement est donc d'autant plus intéressant qu'il s'appuie sur un texte récent.

Nous n'allons bien entendu pas trancher ce matin, dans notre hémicycle, la question de l'appartenance de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Toutefois, vous savez que c'est une question importante. Offrir la faculté d'organiser une telle consultation, ce sera l'illustration même de l'objectif et de la finalité même de ce texte. Voilà raison pour laquelle je soutiendrai cet amendement.

Nous avons l'occasion, au-delà des clivages politiques – nous avons vu que cette initiative a reçu le soutien de députés de tous les bancs –, de donner corps à la récente loi sur l'organisation territoriale. Il existe en Bretagne un débat historique sur la question. Dès lors qu'il y a débat, nous saurons trouver, après une consultation, la meilleure solution : création d'une région à cinq départements, fusion de deux régions, ou autre… Là n'est pas l'essentiel. Il ne faut pas entraver l'initiative de notre collègue Marc Le Fur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

Je suis convaincu, monsieur le garde des sceaux, que cet amendement que j'ai cosigné est tout, sauf un cavalier.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Benoit

De quoi s'agit-il, sinon de transposer localement le débat que nous venons d'avoir sur le référendum d'initiative populaire ? Il s'agit également de les obstacles à la volonté locale. L'amendement de notre collègue Le Fur ne règle pas tous les problèmes mais il permet à l'initiative locale de s'en emparer, surtout lorsqu'il s'agit, comme c'est le cas en Bretagne, de faits de nature historique.

Ajoutons que cet amendement est en effet dans le droit fil des déclarations du Président de la République en Bretagne, il y a quelques années, indiquant que c'était aux Bretons des cinq départements de la Bretagne historique de prendre, avec l'ensemble des institutions locales, leur destin en main.

Cet amendement s'appuie donc sur des faits historiques, mais également sur des réalités culturelles. En tant que Bretons, nous souhaitons, parce que nous avons une culture commune, nous retrouver, en dépit de la décision administrative malheureuse qui, il y a quelques dizaines d'années, nous a séparés. Un espace administratif – car le département, institution bicentenaire, reste un espace administratif – a été écarté ; or cet espace est constitué de bassins de vie et de populations qui, dans le cadre de la mondialisation des échanges, ne peuvent qu'aspirer à se retrouver.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Il est des combats qui sont longs à gagner, et l'opiniâtreté est parfois saluée. Il fut un temps où l'on ne pouvait parler des langues régionales dans cet hémicycle ; nous avons fini par trouver une majorité pour qu'elles soient reconnues et figurent dans la Constitution. Il leur manque encore un statut ; le Gouvernement, par la voix de Mme Albanel, nous avait promis un texte de loi, que Frédéric Mitterrand a enterré. Nous persévérons.

L'amendement de Marc Le Fur et François de Rugy offre une opportunité. Je ne crois pas avoir éteint mon téléphone portable ce week-end ; j'aurais été ravi de le cosigner, si Marc Le Fur avait voulu jouer collectif.

Mais je vais voterai avec plaisir, parce qu'il correspond à une demande de la région dans laquelle nous habitons.

Je ne vais évidemment pas ergoter sur la question du cavalier : comme Thierry Benoit, je doute que cela en soit un. Un cavalier, c'est une disposition qui n'a aucun rapport avec le texte ; or, dans le cas présent, il y a un rapport indirect. Ce n'est donc pas un cavalier. Mais le Conseil constitutionnel n'aura de toute façon pas l'occasion de se prononcer en l'espèce.

L'amendement proposant un cadre sans présumer du résultat, il est inutile de s'y opposer. Il faut au contraire permettre l'expression populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il ne s'agit pas de refaire le débat sur la réunification de la Bretagne pour savoir qui est pour et qui est contre,…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

…même si tout le monde a bien compris que c'est la question soulevée derrière cet amendement. Pour ma part, un tel débat ne me gênerait pas, puisque je suis pour ; mais en l'espèce, il s'agit seulement d'offrir une possibilité, d'ouvrir une voie. M. Hunault l'a dit : la réforme territoriale ne permet que la fusion de deux régions, en l'occurrence Bretagne et Pays de la Loire, sans possibilité de transfert d'un département d'une région à une autre.

Je veux répondre au rapporteur sur deux points.

Tout d'abord, je salue son imagination, définitivement sans bornes : il en vient à imaginer une question prioritaire de constitutionnalité sur cette loi si cet amendement était adopté !

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Je ne sais pas qui la poserait ni devant quelle juridiction, mais passons – les juristes écriront peut-être un jour des livres là-dessus s'il notre amendement est adopté.

La question du cavalier législatif a été posée.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Il faut que nos concitoyens le sachent : on appelle « cavalier » l'introduction, par voie d'amendement, d'une disposition qui n'a rien à voir avec le texte. Mais nos concitoyens doivent également savoir que c'est généralement une pratique dont le Gouvernement use à forte dose, au point de se faire parfois rappeler à l'ordre par le Conseil constitutionnel lorsque la loi lui est déférée.

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Mais, dans le cas présent, il s'agit de permettre à des élus de prendre l'initiative dans le cadre d'une assemblée délibérante, le conseil général, il d'agit de mobilisation citoyenne par voie de pétition, et il s'agit éventuellement de référendum : autrement dit, nous sommes exactement dans le sujet qui nous occupe depuis cette nuit. Il s'agit exactement du même schéma qu'au niveau national. C'est pourquoi j'ai parlé de parallélisme des formes : nous proposons de transférer au niveau local ce qui a été imaginé au niveau national dans ces deux projets de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Je veux d'abord rendre hommage à la démarche de notre collègue Le Fur, à sa fougue mais aussi à la clarté juridique de son argumentation : il soulève une vraie question et y apporte des éléments de réponse qui méritent en effet d'être examinés. Mais je ne crois pas qu'un tel débat trouve sa place dans la discussion que nous avons aujourd'hui…

Debut de section - PermalienPhoto de François de Rugy

Un peu d'ouverture d'esprit, monsieur Diefenbacher !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

…car à l'évidence cet amendement ne concerne pas l'application de l'article 11 de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

J'invite mes collègues à relire le troisième alinéa de l'article 11 : « Un référendum portant sur un objet mentionné au premier alinéa peut être organisé à l'initiative d'un cinquième des membres du Parlement, soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales. » Il ne s'agit pas des listes électorales d'un département ou d'une région, mais de celles de la France entière.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Par conséquent, il est évident que si l'on veut modifier cette règle, c'est la Constitution qu'il faut modifier et non la loi. Mais ce n'est pas l'objet de notre discussion d'aujourd'hui. Je ne vois donc pas comment notre assemblée pourrait se prononcer favorablement sur cet amendement.

J'ajoute que nous arrivons au terme d'un long débat parlementaire, et si Marc Le Fur a soulevé une vraie question, je ne conçois pas qu'elle puisse être résolue ce matin, en queue de discussion (Exclamations sur divers bancs), tant le problème est important et nécessite à l'évidence d'abord une réflexion au sein de la commission des lois, ce qui n'a pas été le cas, avant d'être examiné dans cet hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Diefenbacher

Pour toutes ces raisons, je suis malheureusement très défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

Marc Le Fur a défendu cet amendement avec son talent habituel, il lui a permis d'exprimer sa passion bretonne, mais je ferai deux remarques.

La première, c'est que l'on n'est pas obligés de se préoccuper du sort de ces collectivités territoriales obsolètes appelées départements (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), mais celles-ci justifient peut-être un cavalier puisque, vous le savez, mes chers collègues, la délimitation du département, c'est une journée de cheval depuis sa préfecture. (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

En effet, monsieur le rapporteur !

En second lieu et plus sérieusement, je veux rappeler que cet amendement pose le problème de la souveraineté nationale. C'est le peuple qui est souverain, c'est-à-dire la nation, la France. Je tiens à dire à mon ami Le Fur, qui partage avec moi des racines gaullistes, qu'il n'est pas bon de mettre au même niveau un département ou une région, c'est-à-dire une collectivité territoriale, avec la nation, le véritable niveau politique où se situe la démocratie.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Vanneste

La nation, c'est le peuple, et la démocratie, c'est l'expression populaire, que nous avons fait avancer avec ces textes, quoique trop peu, c'est-à-dire l'expression de la volonté générale, et y mêler un problème local n'est pas une bonne démarche, je tenais à le dire. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

La parole est à M. Michel Grall, puis nous passons aux votes. Je crois que chacun a pu largement s'exprimer sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

De toute façon, il n'y a plus d'autres Bretons ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Grall

Monsieur le ministre, vous avez évoqué le vécu et l'histoire de la Loire-Atlantique, et vous savez qu'ils sont en Bretagne. Je ne reviendrai pas sur les heures sombres durant lesquelles ce département a été détaché de la Bretagne. S'il y a un texte qui doit leur permettre une faculté de rapprochement, c'est bien celui dont nous débattons aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Grall

J'invite du fond du coeur mes collègues à voter l'amendement de mon ami Marc Le Fur que j'ai cosigné. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

(L'amendement n° 1 est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Grall

Très bien ! (Vifs applaudissements sur divers bancs.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Mes chers collègues, je vous rappelle que la conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote, par scrutin public, sur le projet de loi portant application de l'article 11 de la Constitution auront lieu le mardi 10 janvier 2012, après les questions au Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Vautrin

Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Lecture définitive du projet de loi de finances pour 2012 ;

Lecture définitive du projet de loi autorisant l'accord France-Panama sur les doubles impositions ;

Deux accords internationaux en procédure simplifiée ;

Lecture définitive du projet de loi de finances rectificative pour 2011.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures quarante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron