Consultez notre étude 2010 — 2011 sur les sanctions relatives à la présence des députés !

Séance en hémicycle du 2 février 2010 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • emprunt
  • nomination
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Sommaire

La séance

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Mes chers collègues, je vous informe que les premières minutes de notre séance vont faire l'objet de quelques prises de vue pour un film qui sera destiné aux visiteurs de notre Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Je suis heureux de souhaiter en votre nom la bienvenue à une délégation du Parlement européen conduite par son Président Jerzy Buzek. (Mmes et MM. les députés et les membres du Gouvernement se lèvent et applaudissent.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Armand Jung, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Armand Jung

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Dans notre mémoire collective commune, le nom d'Auschwitz-Birkenau résonne comme la marque indélébile du mal absolu. Cependant, parce que ce mal n'est pas mort, des forces occultes, des nostalgiques des idéologies de la haine et de l'exclusion ont choisi la date du soixante-cinquième anniversaire de la libération des camps pour cibler et profaner de nombreuses tombes du cimetière israélite de Cronenbourg, à Strasbourg. L'une d'entre elles a été entachée d'une inscription que l'on croyait à jamais révolue.

Avec colère et émotion, nous voulons exprimer notre soutien et notre solidarité à l'égard de l'ensemble de la communauté israélite de notre pays et, au-delà, nous tenons à réaffirmer le respect inaliénable de la dignité envers tout être humain, vivant ou mort.

Tous les démocrates, tous les républicains, tous les humanistes se sont mobilisés pour exprimer leur indignation. La présence à Strasbourg de M. le ministre de l'intérieur a été appréciée.

Cependant, nous tenons à mettre en garde contre l'enchaînement et le télescopage de débats et de discours qui, ici comme ailleurs, peuvent être générateurs de cassures et de tensions entre les citoyens de notre pays (Murmures sur les bancs du groupe UMP) alors que le rôle de la République est d'apaiser et de rassembler plutôt que de désigner des boucs émissaires et des indésirables. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Armand Jung

De même, nous condamnons tous les propos à relents xénophobes, d'où qu'ils viennent, y compris de Georges Frêche (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP), totalement étrangers aux valeurs de la gauche et aux idéaux de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous informer du montant de l'aide financière de notre pays pour la conservation du camp d'Auschwitz-Birkenau ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Permettez-moi tout d'abord d'excuser l'absence de M. Brice Hortefeux qui accompagne le Président de la République dans son déplacement en Corse.

Vous avez, monsieur le député, évoqué l'odieuse profanation du cimetière israélite de Cronenbourg à Strasbourg mercredi dernier, jour de la date anniversaire de la libération du camp d'Auschwitz-Birkenau alors que se déroulaient des célébrations où le Gouvernement était représenté par M. Hubert Falco.

En cette journée internationale en mémoire des victimes de l'holocauste, cette profanation en était d'autant plus odieuse : dix-huit stèles ont été taguées de croix gammées, treize autres ont été renversées. Comme vous l'avez indiqué, monsieur le député, certaines d'entre elles étaient entachées de mentions que l'on croyait à jamais révolues. Dès le lendemain, jeudi 28 janvier, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, s'est rendu sur place pour exprimer, au nom du Président de la République et du Gouvernement, sa peine, sa solidarité, et surtout son indignation.

Face à ces actes barbares, qui sont une insulte à la civilisation, le Gouvernement est totalement mobilisé pour combattre avec une détermination absolue et une fermeté sans faille tous les individus qui entachent la mémoire, attisent la haine et font réapparaître le visage hideux de l'antisémitisme. Ces comportements extrémistes n'appellent qu'une seule réponse : la condamnation morale et la sanction pénale. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Le ou les auteurs de ces profanations doivent savoir qu'ils ne resteront pas impunis. Ils doivent être rapidement interpellés, déférés devant la justice et sanctionnés avec la plus grande sévérité.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le député, la France se reconnaît dans les principes républicains de laïcité, mais aussi de liberté, d'égalité et de fraternité qui sont inscrits aux frontons de nos écoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Yves Bur, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Monsieur le ministre du budget et des comptes publics, à la suite de la crise, la France, comme tous les pays développés, doit maîtriser et réduire ses déficits publics,... (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

…qui touchent l'État, la sécurité sociale et les collectivités locales. En effet, le déficit de l'État concerne également la sécurité sociale, à laquelle il consacre chaque année 50 milliards d'euros, ainsi que les collectivités locales, auxquelles il verse des dotations atteignant près de 100 milliards d'euros par an.

Le déficit public est donc bien l'affaire de tous les acteurs de la sphère publique, sociale et locale. C'est pourquoi le Président de la République a proposé, lors de la conférence des déficits publics, la constitution de groupes de travail chargés de porter un diagnostic partagé. Cet état des lieux servira à définir les choix politiques qui permettront à notre pays de mettre enfin un terme à trente-cinq années de déficit structurel. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

À ce propos, je note que les représentants des régions et des départements dirigés par la gauche ont refusé de participer à cette conférence. (Huées sur quelques bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pourtant, qui peut croire que c'est en pratiquant la politique de la chaise vide et en fuyant ses responsabilités que l'on aidera la France à réduire ses déficits et sa dette ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bur

Je vous serais reconnaissant, monsieur le ministre, d'exposer devant la représentation nationale les principes, la méthode et le calendrier que compte suivre le Gouvernement afin d'engager la France dans une démarche de maîtrise budgétaire pluriannuelle. En effet, chacun doit en prendre conscience, il est immoral de continuer de faire peser autant de dettes sur nos enfants et sur les générations futures. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Monsieur le député, le Président de la République a effectivement convié la semaine dernière tous les acteurs de la dépense publique à discuter de la question du déficit. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il s'agit tout d'abord du déficit structurel, qui représente 3 à 4 % du PIB. Nous devons y réagir par des réformes elles aussi structurelles : c'est ce que fait très activement le gouvernement de François Fillon. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

S'y ajoute d'autre part un déficit conjoncturel, dû à la crise, qui touche l'État et, avec une violence extraordinaire, notre système de sécurité sociale, puisque les cotisations sociales ne sont plus perçues à cause du chômage.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Ce déficit touche également les collectivités locales.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Le Président de la République a souhaité réunir tous les acteurs de la dépense publique afin de dégager les moyens de résoudre durablement cette question.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il s'agit d'une priorité nationale. Mais, au-delà de la France, cette priorité concerne tous les pays d'Europe et du monde.

Plusieurs groupes de travail ont été constitués ; l'un d'entre eux se consacre en particulier aux collectivités locales. À ce propos, je regrette à titre personnel, mais aussi au nom du Gouvernement, la politique de la chaise vide pratiquée par les présidents de régions et de départements. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Glavany

La chaise vide plutôt que les caisses vides !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il aurait été plus responsable d'affronter ce problème en en discutant avec le Président, avec le Gouvernement et avec les autres acteurs de la dépense publique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Les dépenses des collectivités progressent de plus de 6 % alors que celles de l'État ne progressent pas ! La réalité, la voilà ! (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Nous devons donc discuter ensemble, pour résoudre ensemble les questions pendantes entre l'État et les collectivités territoriales. Il ne s'agit pas de polémiquer, mais de s'expliquer afin de trouver des solutions. Nous continuerons de le faire par l'intermédiaire des groupes de travail qui s'apprêtent à se réunir, et la conférence des déficits publics proposera des solutions d'ici au mois d'avril. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Maxime Gremetz, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Monsieur le ministre chargé de l'industrie, avez-vous remarqué que ce sont les groupes les plus riches, ceux qui font des milliards de bénéfices, qui licencient le plus massivement ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

Pire : ce sont des groupes subventionnés par votre fonds souverain qui partent avec la caisse, privant d'emploi des milliers de salariés et cassant notre potentiel industriel.

En voici trois exemples. Depuis trois ans, les salariés de l'usine Goodyear d'Amiens se battent pour empêcher ce groupe américain, qui a réalisé près d'un milliard d'euros de bénéfice en 2009, de licencier 800 salariés. La semaine dernière, la cour d'appel de Versailles a fermement interdit au groupe de fermer le site d'Amiens-Nord. Vous, vous ne faites rien ! Quelle victoire pour des salariés qui n'ont jamais renoncé à défendre leur emploi !

Et les Continental, dans l'Oise ? Ces 1221 travailleurs ont été jetés par l'un des groupes les plus riches du monde, qui réalise un chiffre d'affaires de 20 milliards d'euros. Leur lutte exemplaire a, elle aussi, commencé de faire plier les actionnaires allemands qui sacrifient un bassin d'emploi entier pour accroître leurs bénéfices. Monsieur le ministre, allez-vous cesser de les juger comme des criminels ?

Enfin, les Nexans, dans l'Aisne, ont vu l'État et son fonds souverain apporter 58 millions d'euros à leur employeur (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), alors que celui-ci fermait l'entreprise, les licenciait tous et partait à l'étranger. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) À ce jour, votre gouvernement a décidé de ne rien entreprendre pour récupérer ces fonds. (« On ne comprend rien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Je vous accuse… (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Maxime Gremetz

…d'encourager les groupes à partir avec l'argent de l'État après avoir licencié leur personnel.

Monsieur le ministre, alors que les salariés et même les juges parviennent à mettre en échec ces projets inacceptables, par quelles mesures concrètes votre gouvernement compte-t-il empêcher ces faux licenciements et cette casse de notre outil industriel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Monsieur Gremetz, je ne peux vous laisser dire autant de contrevérités ni pratiquer autant d'amalgames. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

S'agissant de Continental, nous nous sentons proches de nombreux salariés inquiets. Ceux-ci ont obtenu, par une négociation personnelle avec cette entreprise étrangère, une prime ultralégale de 55 000 euros.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Quant à la minorité de salariés que la justice a décidé de condamner pour avoir saccagé une sous-préfecture, nous devons respecter les décisions de justice. (Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Goodyear, à Amiens, n'a touché aucune subvention de l'État, non plus que Continental.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Deux activités sont concernées : la fabrication de pneumatiques automobiles et celle de pneumatiques agricoles. Dans ce domaine, la justice n'a absolument pas annulé le plan de sauvegarde de l'emploi, qui est encore en discussion. Elle a en revanche considéré que, pour pouvoir poursuivre la procédure, Goodyear devait saisir le forum européen et donner plus d'informations sur l'activité de fabrication de pneumatiques agricoles. (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Nous veillerons à ce que Goodyear respecte ces préconisations, et nous apporterons notre aide au repreneur potentiel de cette activité.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Quant à Nexans, le Fonds stratégique d'investissement est en effet intervenu.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Il a pris 5 % du capital de l'entreprise, lui permettant de sauvegarder son activité de fabrication de câbles, stratégiquement importante pour l'avenir de l'industrie française, mais aussi de la moderniser afin qu'elle conquière des marchés et demeure un leader mondial dans son domaine.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

En somme, monsieur Gremetz, nous soutenons la lutte contre les délocalisations. Je n'en dirais pas autant de votre attitude ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Protestations sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean Dionis du Séjour, pour le groupe Nouveau Centre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Dionis du Séjour

Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État chargée des technologies vertes. J'y associe le président de notre groupe, François Sauvadet, qui est particulièrement sensible à ces questions. (Sourires.)

En août 2009, au terme d'un débat démocratique d'une qualité exemplaire, le Parlement a adopté à l'unanimité la loi portant engagement national pour l'environnement, connue sous le nom de loi Grenelle 1. Déjà, les commissions de notre assemblée travaillent sur le projet de loi de mise en oeuvre du Grenelle.

Les centristes ont apporté dès le début, et tout au long de ce processus politique, un soutien enthousiaste à cette initiative majeure de notre gouvernement. Ils l'ont fait bien sûr pour des raisons environnementales, avec pour objectif premier la lutte contre le réchauffement climatique, mais ils l'ont fait également pour des raisons sociales. Nous sommes en effet convaincus qu'il est possible aujourd'hui de redéfinir une croissance économique dont les emplois verts seront l'un des moteurs. Toutes les études confirment en effet le potentiel de cette croissance verte, estimé dans notre pays à plus de 600 000 emplois.

Madame la secrétaire d'État, vous avez installé onze comités de filière afin d'identifier les freins à l'émergence de ces emplois verts et les besoins de chacune des filières en ce domaine. Or, nous le savons, ce potentiel ne se concrétisera pas seul, d'autant que l'inadéquation entre nouvelles offres d'emploi et qualifications actuelles de nos demandeurs d'emploi ralentit le démarrage de ce mouvement d'ensemble.

Jeudi dernier, s'est tenue sous votre autorité la conférence nationale des métiers de la croissance verte. Elle avait notamment pour objectif de préciser les liens à établir entre action de l'État et action des territoires, parmi lesquels les régions, qui assument la double compétence du développement économique et de la formation professionnelle.

Pouvez-vous nous dire quelles mesures concrètes le Gouvernement compte mettre en oeuvre pour faciliter la montée en puissance de la croissance verte à la française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée des technologies vertes et des négociations sur le climat.

Debut de section - PermalienValérie Létard, secrétaire d'état chargée des technologies vertes et des négociations sur le climat

Monsieur le député, comme vous l'avez fort justement rappelé, la mutation de notre économie vers la croissance verte, à laquelle le Grenelle de l'environnement a donné une impulsion, est une formidable occasion de créer de nouvelles sources de richesses et d'emplois. Ainsi, nous attendons la création de 225 000 emplois dans les industries électriques et 200 000 dans les énergies renouvelables à l'horizon de 2020. Dans le bâtiment, on estime à 314 000 le nombre d'emplois transformés ou créés.

Nos entreprises, nos administrations, nos collectivités ont déjà commencé à s'adapter à ce changement. Il est important de les aider en leur permettant de disposer de personnes qualifiées et formées pour les nouveaux emplois qu'elles vont proposer. C'est l'objectif du plan de mobilisation que j'ai présenté avec Jean-Louis Borloo à l'occasion de la conférence nationale qui s'est tenue jeudi dernier.

Ce plan va nous permettre, en lien avec Luc Chatel et Laurent Wauquiez, de renforcer l'adéquation entre l'offre et la demande en matière de métiers verts. Onze comités de filières ont identifié et recensé les besoins dans les principaux métiers concernés par la croissance verte. Avec tous les acteurs concernés, il s'agit de se donner les moyens d'intégrer cette évolution dans tous les dispositifs de formation, y compris en formant nos formateurs.

Ce travail doit nous permettre de favoriser la compétitivité de notre économie et de lui donner les moyens de développer les filières de demain : le véhicule électrique, l'éolien ou encore la maison basse consommation.

Ce travail, nous le ferons au plus près des réalités de chaque bassin d'emplois. C'est pourquoi nous voulons contractualiser avec tous les acteurs dans chaque territoire en apportant une boîte à outils qui rendra possibles les expérimentations nécessaires. Pour ce faire, nous mobiliserons les moyens existants mais nous actionnerons également le levier du grand emprunt pour accompagner les emplois d'aujourd'hui et ceux de demain.

Monsieur le député, au travers de ce plan, le Gouvernement est décidé à préparer activement le monde de l'après-crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe NC et sur divers bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Daniel Goldberg, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Monsieur le président, je tiens d'abord à rappeler à M. Woerth que, comme il le sait, les collectivités territoriales ne votent pas de budgets en déficit et que 80 % de la dette provient de l'État. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

J'en viens à ma question.

La sécurité est un droit que nous devons aux habitants de notre pays, dans les quartiers populaires autant que dans les milieux favorisés. Il ne doit pas seulement se déclamer dans les médias ; il doit se vérifier dans les faits. Or, sans que cela soit un motif de réjouissance pour quiconque sur nos bancs, il est à noter que les faits donnent tort à la politique que votre majorité met en oeuvre depuis 2002, soit depuis près de huit ans déjà.

Échec pour ce qui est du maintien de l'ordre au quotidien avec 7 % d'augmentation des vols avec violences.

Échec pour ce qui est de la mobilisation des fonctionnaires avec un malaise partout palpable. Plus de 80 % de policiers se sont prononcés récemment et tous refusent 1'impératif du chiffre qui est votre seule doctrine.

Échec avec une baisse du nombre de policiers en 2010 qui verra disparaître 75 % des effectifs crées par la LOPSI 1.

Échec avec une rotation toujours trop importante des personnels dans les commissariats et un manque criant d'officiers dans certains d'entre eux.

Échec dans l'établissement d'un lien de confiance avec la population du fait d'une frénésie législative : seize lois votées depuis 2002, dont deux discutées cette semaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Goldberg

Méfiance de la population, défiance de nombre de policiers et de gendarmes : voilà votre bilan. Après cela, n'attendez pas de moi de régler les problèmes internes au Gouvernement, apparus ces derniers jours. C'est en termes d'efficacité que se pose la question.

Mme Alliot-Marie avait installé, il y a deux ans, des unités territoriales de quartier. La création de cent d'entre elles avait été annoncée à grand renfort de publicité. Alors, de deux choses l'une : soit vous écoutez ce que tous les acteurs de terrain vous disent et vous acceptez de réorganiser les forces de l'ordre dans notre pays ; soit vous décidez de maintenir une police en opposition avec les habitants et le seul résultat auquel vous aboutirez sera de dissuader les citoyens de soutenir vos listes le 14 mars prochain. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Mesdames, messieurs les députés, je vous prie une nouvelle fois de bien vouloir excuser M. le ministre de l'intérieur, M. Brice Hortefeux.

Monsieur Goldberg, en matière de sécurité, ce qui compte, ce sont les résultats. (Rires et vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Quand vous voulez, nous pourrons comparer, bilan contre bilan. (« Oui ! Oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Ce que j'observe, pour ma part, c'est que, depuis 2002, la délinquance générale a baissé de 14 %.

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Ce que j'observe, c'est qu'en 2009, cette délinquance générale a baissé pour la septième année consécutive. (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)

Ce que j'observe, c'est que, grâce à cette majorité, grâce au gouvernement de François Fillon, le taux d'élucidation des crimes et délits a augmenté de douze points depuis 2002.

C'est cela l'efficacité de la politique de sécurité de ce gouvernement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

La sécurité est un combat quotidien, qui réclame de s'adapter aux nouvelles formes que prend la délinquance. Face aux bandes, nous mettons en place des dispositifs de groupes spéciaux d'investigation dans trente-quatre départements. Face aux difficultés dans les établissements scolaires, nous créons un plan de sanctuarisation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienLuc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement

Face aux affaires de stupéfiants, nous mettons en place un plan antidrogue efficace.

Monsieur le député, je me souviens qu'un certain Premier ministre a dit : « en matière de sécurité, nous avons été naïfs ». Je souligne donc que ni la naïveté ni l'immobilisme ne peuvent fonder une politique en matière de lutte contre l'insécurité. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-François Copé, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Monsieur le Premier ministre, je veux dire ici, au nom de l'ensemble du groupe UMP, notre indignation devant les propos injurieux à caractère antisémite qui ont été tenus par Georges Frêche à l'endroit de notre collègue Laurent Fabius. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Je le dis avec gravité, il est des sujets sur lesquels, vous le savez les uns et les autres, nous n'avons jamais voulu transiger.

On nous dit que M. Frêche est populaire dans sa région. Peut-être. Mais rien n'excuse un responsable public réputé appartenir à une formation républicaine de se comporter ainsi.

Nous avons notre famille politique en tête.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

En 1997, nous avons refusé toute alliance avec l'extrême droite, qui avait tenu des propos choquants…, (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

..au risque de perdre les élections, comme ce fut d'ailleurs le cas avec soixante-dix triangulaires.

Le parti socialiste a désavoué Georges Frêche au niveau national, ce qui est une bonne chose, même s'il aurait pu le faire un peu plus tôt, eu égard aux déclarations antérieures de M. Frêche.

Toutefois, deux ambiguïtés restent à lever, sur lesquelles je serais heureux d'avoir la réaction des uns et des autres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Premièrement, le parti socialiste va-t-il désavouer les responsables socialistes locaux qui continuent de figurer sur la liste de M. Frêche ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Copé

Deuxièmement, que fera le parti socialiste au lendemain du premier tour, en cas de finale entre Georges Frêche et Raymond Couderc ? (Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Qu'en pensez-vous, monsieur le Premier ministre ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC – Huées sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. François Fillon, Premier ministre. (Huées persistantes sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Rogemont

C'est à Jean-Marc Ayrault de répondre à cette question !

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Paul

Que le Premier ministre nous parle plutôt de sécurité et de chômage !

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Monsieur le député, rassurez-vous, je ne répondrai pas à la place du parti socialiste et je ne donnerai de leçon à personne ! (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Mais il y a des mots que l'on ne veut plus entendre dans notre République.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Il y a des mots qui blessent, il y a des mots qui trahissent la vulgarité de la pensée, il y a des mots qui ne font pas partie du vocabulaire des républicains et des démocrates. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Certains continuent pourtant de les employer.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ce n'est pas une surprise puisque celui que vous visez, monsieur Copé, n'en est pas à son coup d'essai, et il ne peut guère évoquer un mauvais procès. Il aurait dû être sanctionné depuis longtemps.

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Mesdames, messieurs les députés, le racisme est une menace permanente pour notre pacte républicain. Les dérapages des responsables politiques quels qu'ils soient...

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

..que ces dérapages soient conscients ou qu'il s'agisse de maladresses, doivent être combattus et ne peuvent pas être tolérés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Ces dérapages font céder les digues que les républicains, génération après génération, ont construites pour lutter contre le racisme et l'antisémitisme. (Les députés des groupes UMP et NC se lèvent et applaudissent, tandis que les députés du groupe SRC scandent : « Hortefeux ! Hortefeux ! ».)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Chacun doit balayer devant sa porte, chacun doit prendre ses responsabilités. (Les députés du groupe SRC continuent de scander : « Hortefeux, Hortefeux ! »)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Dans cette affaire, ce qui est en cause ce n'est pas un parti politique. Il s'agit, en fait, de dire à nos concitoyens que dans notre République, il y a des choses que l'on ne peut pas se permettre. Lorsque l'on s'écarte du droit chemin, on doit en supporter les conséquences. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – « Hortefeux, Hortefeux ! sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Alfred Marie-Jeanne

Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Jean-Louis Borloo, ministre d'État.

En matière sismique, la Martinique et la Guadeloupe sont situées en zone d'aléa fort, similaire à celui d'Haïti. Le drame survenu dans ce pays le 12 janvier 2010 nous renvoie à l'une de nos obligations, celle de la protection contre les risques majeurs.

C'est ma sixième interpellation à l'Assemblée sur la non-application des normes et leur inadaptation des normes à notre réalité géographique.

Devant l'urgence, le conseil régional de Martinique, allant au-delà de ses compétences, a mis en place un budget et une logistique appropriés aux impératifs de prévention.

C'est ainsi que, depuis dix ans, une classe de troisième cycle de formation en construction parasismique des architectes et ingénieurs a été ouverte. Plus de deux cents professionnels l'ont suivie.

Par ailleurs, le conseil régional a déjà construit quatre lycées neufs sur isolation parasismique à la base. Il en fait de même pour les hôpitaux, les cliniques, les casernes de pompiers et les écoles.

Pour la construction de maisons neuves, il existe aussi une aide régionale aux particuliers pour les études de sol, d'architecture, d'ingénierie, et le contrôle des travaux. Le nombre de bénéficiaires avoisine les sept cents.

J'ai toujours considéré le parasismique comme un secteur prioritaire du développement durable.

Le Gouvernement vient de mettre en place un dispositif de crédit d'impôt pour le développement durable. Un dispositif d'accompagnement du même type ne serait-il pas opportun ?

Les études et travaux qui en découleraient, sans oublier le bâti ancien, stimuleraient fortement l'économie. Ils seraient productifs de ressources et d'emplois à tous les niveaux, publics et privés, et pour longtemps encore. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie.

Debut de section - PermalienChantal Jouanno, secrétaire d'état chargée de l'écologie

Monsieur le député, vous avez raison de rappeler à la représentation nationale qu'un drame de la violence de celui qu'a connu Haïti pourrait se produire sur notre territoire, notamment aux Antilles puisqu'elles se situent dans la même zone sismique.

Pour faire face à ces séismes, un plan « Séisme » visant à définir les actions conjointes de l'État, des collectivités et des autres partenaires a été adopté en 2007. Ce plan prévoyait des actions d'information et de formation des professionnels du bâtiment, de sensibilisation et des actions centrées sur tous les secteurs de gestion de crise, notamment les hôpitaux et les écoles.

L'ensemble de ce plan représente environ une dépense de 5 milliards d'euros, dont la moitié pour la Martinique. Au sein de cette enveloppe, 1,8 milliard d'euro est consacré à des secteurs dits prioritaires, comme les écoles et les hôpitaux. Puisqu'il s'agit de secteurs prioritaires, 80 % de ces dépenses sont à la charge de l'État, qui y participe par le biais du fonds Barnier.

Dans ce domaine, nous avons l'obligation d'avoir une action conjointe. D'ailleurs, nous avons mené une belle action sur les écoles primaires puisque des diagnostics sismiques ont été réalisés sur toutes les écoles. Plus de cent cinquante écoles seront reconstruites ou réhabilitées pour faire face au risque sismique.

Afin de répondre à votre exigence dans le domaine de la construction et du logement, une première étape a été franchie dans le cadre de la loi pour le développement économique de l'outre-mer qui élargit l'aide fiscale existante aux travaux de confortement de logements contre le risque sismique.

Enfin, il est important d'évaluer aujourd'hui le plan de 2007 et de l'enrichir de nouvelles réponses. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Christine Marin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

Monsieur Estrosi, il y a dix jours, vous étiez aux côtés du Président de la République pour obtenir du président de Renault, M. Carlos Ghosn, des engagements clairs sur la production en France de la Clio IV. Il a fallu toute votre énergie (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.) pour faire comprendre à ce constructeur français, dont l'État est pourtant actionnaire, qu'il ne peut se désintéresser de l'emploi dans ce pays.

Depuis, une rumeur insistante a jeté le trouble dans ma région du Nord-Pas-de-Calais, déjà si lourdement touchée par des décennies de désindustrialisation : le groupe Total s'apprêterait à fermer sa raffinerie de Mardyck, près de Dunkerque. Ce sont encore 360 salariés directs du groupe pétrolier et près de 400 salariés des différents sous-traitants qui sont menacés.

Alors que, dans quelques jours, le groupe Total va annoncer des bénéfices de plusieurs milliards d'euros (Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.), cette éventualité apparaît comme une provocation pour un territoire déjà si fragilisé.

Depuis, devant votre réaction très ferme, il semble que Total ait reconsidéré sa position.

Debut de section - PermalienPhoto de Christine Marin

Vous nous avez déjà plusieurs fois apporté la preuve, monsieur le ministre, de la volonté du Gouvernement de ne rien lâcher, de tout faire pour préserver le tissu industriel et le développer. Pouvez-vous nous dire ce qu'il en est de l'avenir industriel de la raffinerie des Flandres, à Dunkerque ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Madame la députée, vous avez raison de rappeler que, conformément à la volonté du Président de la République et du Premier ministre…

Plusieurs députés SRC. Répétez-le !

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

…nous avons rappelé au président de Renault que nous avons beau soutenir les stratégies des grands groupes français à l'international, la production industrielle française doit se faire en France si l'on veut qu'elle profite aux Français. Je vous confirme donc que la production de la Clio IV, pour le volume destiné à la France et à une grande partie de l'Europe, se fera bien sûr à Flins.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

De la même manière, nous avons fait savoir au groupe Total qu'il n'était pas question, bien que nous soyons conscients, au terme du Grenelle de l'environnement et des politiques que nous menons en faveur de l'environnement, que l'activité pétrolière est en baisse, de fermer la raffinerie des Flandres à Dunkerque s'il ne se mettait pas en place une activité de substitution pour garantir la pérennité de l'emploi sur le site de Dunkerque.

Une discussion a ainsi été engagée et des études ont été menées pour garantir à chaque salarié l'avenir de son emploi dans le respect de ses compétences, ainsi que pour mettre en place un centre d'assistance technique et une école de formation liée aux métiers de la raffinerie, et afin de conduire une étude avec EDF pour créer un terminal méthanier.

Que ce soit clair : on ne touchera pas au centre de raffinerie de Total à Dunkerque s'il n'y a pas d'activité de substitution. La pérennité de l'emploi est donc garantie. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

J'ai connu l'époque où l'État restait les bras ballants et se plaignait de ne pouvoir tout faire. Le Gouvernement de François Fillon et le Président de la République démontrent que l'État stratège pour défendre l'emploi en France et la production française est désormais devenu une réalité. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Marc Ayrault, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de faire une remarque d'ordre constitutionnel : nous avons actuellement une séance de questions au Gouvernement. Or force est de constater, à la suite de l'intervention de M. Bertrand, secrétaire général de l'UMP, la semaine dernière et de celle de M. Copé aujourd'hui, qu'il s'agit non plus de séances de questions au Gouvernement mais de séances de questions au parti socialiste ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Si vous voulez changer le règlement, monsieur le président, faites-le mais assumez-le ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Puisque vous interpellez la présidence, je vais vous répondre très précisément.

Ici, dans le cadre des questions au Gouvernement, la parole est libre et elle le restera. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Ayrault

Monsieur Copé, puisque la parole est libre, permettez-moi de vous rappeler que M. Frêche a déjà été exclu du parti socialiste en janvier 2007. Ses déclarations sont inacceptables et la direction du parti socialiste a pris ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Cela étant, monsieur Copé, vous n'avez pas à faire la leçon à tout le monde car, je vous le rappelle, vous avez investi un certain M. Couderc dans la région Languedoc-Roussillon alors qu'il était vice-président d'une alliance avec le Front National en 1998 (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Il semble donc que cela ne vous gêne pas !

Monsieur Copé, je ne vous pas ai non plus entendu dénoncer les propos inacceptables et xénophobes de M. Delattre à Franconville, de M. Hortefeux ou de Mme Morano à l'occasion du débat sur l'identité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Nous n'avons pas peur du débat, mais vous sentez bien que vous êtes en difficulté. Vous voulez donc détourner l'attention de la réalité politique, mais ce petit calcul n'est pas très efficace. Nous sommes en tout cas convaincus qu'il ne donnera pas beaucoup de résultats aux élections régionales car les Français veulent des réponses concrètes aux problèmes du chômage, du pouvoir d'achat, de l'endettement, de l'exclusion et non les diatribes qui sont les vôtres. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Enfin, monsieur le Premier ministre, vous avez donné une leçon de République, vous qui vous prétendez un héritier de Philippe Séguin, mais ne pensez-vous pas que la République est en train de dériver avec le procès Clearstream instrumentalisé par le Président de la République lui-même qui confond la haine et le combat politique ? (Les députés du groupe SRC se lèvent et applaudissent. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Je ne vois pas comment vous pouvez tenir de tels propos. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

J'ai répondu à la question de M. Copé qui concernait la société française comme j'aurais répondu à chaque interpellation sur le même sujet (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) lorsqu'un responsable public tient des propos volontairement ou involontairement à connotation raciste (Protestations continues sur les bancs du groupe SRC) et qui doivent être dénoncés par l'ensemble des républicains de ce pays. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.) Je ne comprends pas que cela puisse vous choquer ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC dont les membres se mettent à scander : « Hortefeux ! Hortefeux ! ».)

Debut de section - PermalienFrançois Fillon, Premier ministre

Quant aux allégations mensongères que vous venez de porter à l'encontre du Président de la République, je vous en laisse l'entière responsabilité. Elles sont totalement contraires à ce que la justice a prononcé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur divers bancs du groupe NC. – Vives protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Pierre Gorges, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Gorges

Je précise que ma question s'adresse au Gouvernement, car les députés socialistes seraient bien incapables d'y répondre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Monsieur le secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, en décembre dernier, le Premier ministre avait annoncé la création de l'entreprise individuelle à responsabilité limitée, répondant ainsi à une préoccupation majeure des entreprises en nom propre : la protection des biens personnels en cas de faillite. Le Président de la République y est également revenu la semaine dernière.

Cette annonce répond à une très ancienne revendication portant sur la clarification du patrimoine pouvant être investi dans l'activité professionnelle, qu'elle soit artisanale ou commerciale. En cas de revers de fortune, l'entrepreneur individuel ne doit pas être condamné à tout perdre. Or, il répond actuellement de ses engagements professionnels sur la totalité de son patrimoine personnel : en cas de faillite, tous ses biens peuvent être saisis, avec des conséquences souvent dramatiques pour lui, pour son entreprise, mais aussi pour sa famille.

Dès que cette disposition entrera en vigueur, un artisan qui aura commencé son activité sous la forme individuelle ne pourra plus être ruiné. Il sera responsable à hauteur du capital qu'il aura affecté à son activité, mais le reste de son patrimoine ne pourra être saisi. En cette période de crise, il faut absolument favoriser la prise de risque en limitant les conséquences personnelles d'un échec professionnel.

Monsieur le secrétaire d'État, comment l'entreprise individuelle à responsabilité limitée va-t-elle fonctionner ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Gorges

Permettra-t-elle de protéger enfin le patrimoine personnel de l'entrepreneur individuel ? Quel sera le calendrier d'application de cette réforme attendue depuis plus de trente ans par tous les artisans ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Plisson

Comment va-t-il pouvoir répondre ? C'était incompréhensible !

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Monsieur le député, quelque 580 000 entreprises ont été créées l'année dernière en France – un record historique : jamais ce chiffre n'avait été atteint ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

Sur ces 580 000 entrepreneurs, près des deux tiers ont créé leur activité en nom propre, c'est-à-dire individuellement. Vous devez savoir qu'il y a en France 1,5 million d'entrepreneurs individuels. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Or aucun, jusqu'à présent, n'était protégé de la ruine en cas de faillite, puisque pouvant être poursuivi sur l'ensemble de ses biens. Voilà la réalité économique de notre pays !

La semaine dernière, j'ai eu l'honneur de présenter un texte sur cette question en conseil des ministres, sous l'égide du Premier ministre, que je remercie, et du Président de la République. Le 17 février, vous aurez, mesdames et messieurs les députés, à prendre vos responsabilités et à voter ce texte qui représente une extraordinaire innovation dans notre arsenal juridique.

Debut de section - PermalienHervé Novelli, secrétaire d'état chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation

Nous allons donc créer l'entreprise à patrimoine affecté, c'est-à-dire l'entreprise individuelle à responsabilité limitée. Laissez-moi vous dire ma fierté d'avoir proposé ce texte au Gouvernement puis au vote du Parlement. Nous rendrons ainsi justice aux 1,5 million d'entrepreneurs individuels qui, dorénavant, ne seront plus jamais menacés de ruine en cas de faillite. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Didier Mathus, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Monsieur Copé,… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…l'indignation républicaine est respectable quand elle n'est pas à géométrie variable. Nous avons tous ici le souvenir précis des images où l'on vous voit vous esclaffer aux blagues racistes de M. le ministre de l'intérieur. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Ceci relativise cela.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Mariani

Il parlait des Auvergnats ! Vos propos sont insupportables !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

Monsieur le ministre de la culture, pendant la crise, les affaires continuent pour les amis du pouvoir.

On apprend ainsi que M. Stéphane Courbit, qui a fait fortune dans la télé-réalité, et qui est proche d'Alain Minc et du Président de la République, s'apprête à mettre la main sur la régie publicitaire de France Télévisions pour une bouchée de pain, ceci au terme d'un maquignonnage particulièrement obscur entre l'Élysée et la présidence de France Télévisions. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Mathus

…d'une pépite de l'audiovisuel public est pour le moins choquante.

Cette régie très performante a pu en effet, malgré la suppression de la publicité après vingt heures sur les chaînes publiques, conserver à France Télévisions un très bon niveau de financement, en récoltant près de 420 millions d'euros de recettes en 2009 avec la seule publicité des après-midi.

De deux choses l'une : soit, comme le prévoyait initialement la loi, la publicité sera totalement supprimée en 2011, et l'on comprend mal l'utilité de privatiser maintenant une future coquille vide – et encore moins pourquoi six sociétés privées se battent pour en prendre le contrôle ; soit il y a un ressort caché et cette suppression totale de la publicité est remise en cause, auquel cas cette privatisation constituerait une lourde faute. Elle priverait en effet la télévision publique d'une part substantielle de ses moyens et, surtout, contribuerait à enrichir de façon parfaitement illégitime une société privée avec l'argent des contribuables puisque ce sont eux qui financent les programmes.

Au moment où la loi sur l'audiovisuel prend eau de toutes parts, ma question est simple : pourquoi privatiser une entreprise publique aussi performante et aussi utile et au bénéfice de quels intérêts ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication.

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche. Bonsoir !

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Monsieur Mathus, il n'y a pas de privatisation cachée, contrairement à ce que vous avez l'air d'alléguer. Le processus en cours s'effectue dans une parfaite clarté et l'appel d'offres se déroule dans un climat tout à fait normal. (Brouhaha continu sur les bancs du groupe SRC, couvrant presque la voix du ministre durant toute son intervention.)

Vous affirmez que la loi votée par le Parlement, validée par le Conseil constitutionnel, promulguée le 5 mars 2009,…

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

… « prendrait eau de toutes parts » : c'est tout à fait faux ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Un certain nombre d'incidents sont survenus récemment. Ainsi de la plainte de la Commission européenne sur les taxes sur les télécoms qui seraient, selon elle, affectées à la télévision – or ce n'est pas le cas. Ainsi de la recommandation du rapporteur public du Conseil d'État qui aurait préconisé l'annulation de la décision du conseil d'administration de France Télévisions – or la décision du Conseil d'État n'a pas été prise.

Debut de section - PermalienFrédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication

Je vous rappelle que le Parlement a voté la réforme de l'audiovisuel, qu'elle a été validée par le Conseil constitutionnel, qu'elle a été promulguée, que 70 % des téléspectateurs en sont satisfaits et que la suppression de la publicité sur France Télévisions s'applique pleinement. Tout le reste est accessoire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Élie Aboud, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Élie Aboud

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants. J'y associe tous mes collègues parlementaires membres du groupe d'études sur les rapatriés.

Monsieur le secrétaire d'État, la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation en faveur des rapatriés prévoyait, dans son article 3, la création d'une fondation pour la mémoire de la guerre d'Algérie, des combats du Maroc et de la Tunisie. Cette initiative a été conçue sur le modèle des grandes fondations de mémoire qui existent pour la Seconde Guerre mondiale.

La guerre d'Algérie demeure aujourd'hui au coeur du devoir de mémoire de notre pays, qui doit être pris en compte dans sa globalité, dans sa richesse, dans sa diversité, mais aussi dans sa complexité. Cette fondation ne doit être ni politicienne ni partisane et, surtout, elle ne doit être l'otage de personne. Son objet est donc de collecter, d'authentifier et de conserver tous les matériaux relatifs à la mémoire de ce conflit : témoignages, ouvrages, écrits, enregistrements, et documents.

Néanmoins des interrogations demeurent. Quels vont être les statuts de cette fondation ? Quel sera le rôle des associations du monde des anciens combattants ? Qui désignera le conseil d'administration ? Y aura t-il un conseil scientifique ? Enfin, quelle sera la dotation financière versée par 1'État, indispensable à ce projet ?

Croyez-moi, le monde des rapatriés et les harkis l'attendent. Et puisque je parle des harkis, contrairement à ce qu'a dit un grossier personnage, ils ne sont certainement pas des sous-hommes. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Hubert Falco, secrétaire d'État à la défense et aux anciens combattants.

Debut de section - PermalienHubert Falco, secrétaire d'état à la défense et aux anciens combattants

Monsieur le député, comme vous l'avez dit, la réconciliation de mémoire ne peut passer que par un devoir de vérité et ce devoir de vérité doit être partagé sur tous les bancs de cet hémicycle.

La loi du 23 février 2005 a prévu la création d'une fondation. En 2007, le Président de la République s'était engagé à appliquer cette loi. Le Gouvernement de François Fillon la met en oeuvre.

C'est une fondation de mémoire, monsieur le député. Elle n'est pas chargée d'écrire l'histoire de la guerre d'Algérie. Si cette dernière est au coeur du devoir de mémoire, en France, avec la fondation, chacun pourra venir déposer sa part de mémoire. Aujourd'hui, reconnaissons que cette mémoire génère encore une grande part d'ombre.

Cette fondation ne sera pas un instrument politique. Elle ne sera pas partisane. Elle sera présidée par une personnalité indépendante, Claude Bébéar. Elle sera fondée par les trois principales associations d'anciens combattants de France. La part de financement de l'État sera de 7 millions d'euros.

Je pense qu'il est temps de parler librement, dans un devoir de vérité, pour transmettre à nos jeunes l'histoire de cette période. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marie-Odile Bouillé, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Odile Bouillé

Monsieur le Premier ministre, le dernier grand chantier naval français, les Chantiers de l'Atlantique de Saint-Nazaire, est dans une situation préoccupante. Son carnet de commande est vide et le dernier paquebot en construction sera livré en mai. C'est donc un véritable cri d'alarme que je vous lance.

Les ateliers ferment les uns après les autres. Le chômage partiel s'envole, avec 500 000 heures sur trois mois ; la moitié de l'effectif sera inoccupé à partir de mai ; un plan de départ volontaire est engagé. Jamais, jamais, la situation n'a été aussi critique. Ainsi 7 000 emplois directs et indirects sont menacés, auxquels s'ajoutent les milliers d'emplois induits dans toute une région qui refuse de voir disparaître ce fleuron industriel.

En septembre 2008, M. Nicolas Sarkozy avait promis de ne pas laisser tomber la navale. Il avait promis de revenir à Saint-Nazaire. Force est de constater qu'il n'a pas tenu sa promesse. Je vous rappelle que l'État est actionnaire à hauteur de 34 %, avec une minorité de blocage, ce qui vous donne de très grandes responsabilités. En juin prochain vous pouvez renforcer ce poids de l'État en rachetant les 16,5 % de capital détenus par Alstom.

Monsieur le Premier ministre, je m'adresse à vous pour vous demander solennellement de tenir vos engagements et d'apporter les réponses que nous attendons pour l'avenir.

Ma question est très précise : l'armateur MSC est prêt a commander deux paquebots aux Chantiers de Saint-Nazaire. Il manque la garantie financière de l'État. Où en êtes-vous ? Il y a urgence, monsieur le Premier ministre. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Christian Estrosi, ministre chargé de l'industrie.

Debut de section - PermalienChristian Estrosi, ministre chargé de l'industrie

Madame la députée, vous parlez du leader mondial de la construction navale, le chantier naval STX, à Saint-Nazaire. Contrairement à ce que vous venez d'affirmer, le Président de la République et le Premier ministre ont parfaitement respecté leurs engagements.

Qu'il me soit permis de rappeler que si, en 2007, il y avait 50 000 commandes de navires dans le monde, en 2009, avec la crise, on est passé à une commande de 300 navires.

Malgré cela, avec un effort de réduction de leurs dépenses, les chantiers navals STX ont répondu aux demandes qu'a formulées l'État, et nous ont permis de nous engager en entrant dans le capital à hauteur de 33 % par le biais du fonds stratégique d'investissement, afin de mettre en place, avec un investissement avisé, un plan de modernisation des chantiers navals STX.

Ce plan permet une diversification de l'activité, en particulier dans le domaine off shore, où la France est un leader. Il anticipe également des défis environnementaux, en proposant des navires propres. Il prévoit, enfin, la modernisation des outils de conception.

Voyez-vous, madame la députée, il y a un peu plus d'un an, vous proposiez un plan de relance par la consommation, c'est-à-dire notamment par la baisse de la TVA. Où en serions-nous aujourd'hui si nous vous avions écoutés ? Nous avons fait le choix d'un plan de relance par l'investissement, notamment dans nos entreprises qui sont de véritables leaders mondiaux. C'est comme cela que nous sommes en train de sauver l'activité navale dans notre pays. C'est la fierté de notre gouvernement que d'avoir fait ces choix stratégiques pour l'avenir de l'industrie navale en France. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP. – Rires et exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à Mme Marguerite Lamour, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marguerite Lamour

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. J'y associe mon collègue costarmoricain Marc Le Fur.

Le 12 janvier dernier, une catastrophe sans précédent s'est abattue sur Haïti. Notre pays a été l'un des premiers à réagir, déployant des moyens très importants pour venir en aide aux populations sinistrées. Les équipes françaises n'ont pas ménagé leur peine et ont fait preuve d'un soutien sans faille au peuple haïtien. La représentation nationale se doit de saluer le travail exemplaire de nos sauveteurs et l'engagement déterminé des autorités de notre pays. Les Français ne comprendraient pas qu'il n'y ait pas unanimité pour reconnaître ces actes et ces initiatives.

Concernant l'adoption, la France, dont la position a été saluée par l'UNICEF, a choisi de collaborer efficacement avec les autorités haïtiennes. C'est en conformité avec la convention de La Haye que notre pays veut accueillir les enfants, dans le respect dû à leur personne.

Me faisant l'interprète d'associations, je souhaite évoquer la situation douloureuse de parents se trouvant en procédure d'adoption en Haïti, et dont l'enfant est malheureusement décédé lors de cette catastrophe. Je souhaite savoir si ces familles, lorsqu'elles ont déjà obtenu un agrément délivré par le conseil général de leur département, conserveront cet agrément pour l'adoption d'un autre enfant.

Certes, les textes en vigueur stipulent que l'agrément délivré est valable cinq ans et ne peut être utilisé qu'une fois. Cependant, compte tenu de la situation inédite que nous connaissons, est-il envisagé que cet agrément puisse être conservé pour l'adoption d'un autre petit Haïtien ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie.

Debut de section - PermalienAlain Joyandet, secrétaire d'état chargé de la coopération et de la francophonie

Madame la députée, le Gouvernement est très sensible à la situation des familles en attente d'adoption. D'ailleurs, les députés nous transmettent actuellement beaucoup de demandes d'intervention de la part de ces familles.

Aujourd'hui, 914 familles bénéficient d'un jugement grâce auquel 228 enfants haïtiens ont déjà rejoint leur famille française d'adoption. Il y en aura quarante-cinq de plus aujourd'hui et cinquante jeudi.

Le sujet que vous abordez, madame la députée, est particulièrement sensible. Il nous faut répondre à l'attente des familles en même temps qu'il nous faut garantir l'intérêt des enfants, conformément à la convention de La Haye, comme vous l'avez justement rappelé. L'actualité, hélas ! nous montre que nous devons être particulièrement vigilants et faire preuve d'une très grande rigueur.

Pour accélérer les démarches, sous l'autorité de François Fillon, nous travaillons à la mise en place d'une commission mixte franco-haïtienne spécialement consacrée à la question de l'adoption pour prendre en compte les autres procédures. En même temps, nous veillons sur la santé et la sécurité des enfants. Dans ce cadre, Nadine Morano s'est rendue récemment en Guadeloupe toute proche.

S'agissant toutefois de la question spécifique que vous posez, il est hélas impossible de réutiliser pour un autre enfant une demande d'adoption qui était valable pour un enfant décédé entre-temps dans ce terrible séisme. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Michel Clément

Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, et j'y associe mon collègue Jacques Valax.

À votre arrivée au ministère, madame la garde des sceaux, une annonce concernant la justice prud'homale devait semer le trouble dans le monde syndical, mais aussi dans les rangs de la magistrature : celle de l'adoption de la procédure écrite devant les conseils de prud'hommes, celle-ci étant, je cite, « jugée trop lourde et trop rigide ».

L'émotion suscitée par ces propos, qui mettent en cause les principes fondamentaux de la juridiction prud'homale, a conduit le ministère à publier en août dernier un démenti sans équivoque. Je cite encore : « Aucune réforme de la procédure syndicale applicable devant le conseil des prud'hommes n'est en préparation ! ». Toutefois, votre déclaration lors de l'inauguration des locaux du conseil des prud'hommes de Saint-Étienne devait relancer le débat : vous avez évoqué la « procédure participative » comme une alternative à la conciliation prud'homale, indiquant qu'un décret était en cours d'examen au Conseil d'État, afin de donner une plus grande place à l'écrit.

De la même manière, un rapport du Conseil d'analyse économique, remis au Gouvernement au début du mois dernier, propose de déroger au monopole des prud'hommes par convention de branche et d'introduire l'arbitrage en droit social. Doit-on rapprocher ces suggestions de la réforme de la carte judiciaire, qui a déjà supprimé un quart des conseils de prud'hommes ?

Imposer un formalisme écrit, même à dose réduite comme vous l'avez laissé entendre, conduirait nécessairement à dénaturer l'instance prud'homale et la représentation obligatoire. Ce serait, à coup sûr, la disparition des défenseurs syndicaux du débat prud'homal, vidant de sa substance notre dispositif d'accompagnement des salariés isolés.

Madame la garde des sceaux, est-ce la volonté de votre ministère que de remettre en cause l'indépendance de cette juridiction, de réduire le contentieux social, et ainsi d'affaiblir le rôle des conseils de prud'hommes dans l'établissement d'une jurisprudence que le patronat juge trop favorable aux salariés ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La parole est à M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

Monsieur le député, je peux vous rassurer puisque les choses ont été dites très clairement : il n'y a pas, pour l'instant,…

Debut de section - PermalienXavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville

…pour les litiges qui viennent devant le conseil des prud'hommes, de changement à la règle sans exception de la comparution personnelle.

Si une réflexion est, par ailleurs, en cours sur l'ensemble des juridictions, ce n'est pas le cas pour la justice prud'homale. Votre inquiétude est donc sans objet.

D'ailleurs, s'agissant des conseillers prud'homaux, nous avons aujourd'hui d'autres préoccupations, en particulier le taux de participation à leur élection. Lors des dernières élections, au mois de décembre, 25 % seulement des salariés ont voté alors même que des dispositions avaient été mises en place : expérimentation du vote par correspondance, vote au sein même des entreprises, vote électronique dans la région parisienne. Tout cela n'a pourtant pas bien fonctionné.

C'est pourquoi j'ai confié, au mois d'octobre dernier, une mission à M. Jacky Richard, qui doit me rendre ses propositions à la fin du mois de février. Bien entendu, il associe les partenaires sociaux à sa réflexion, qui couvre aussi bien l'organisation des modes de scrutin, que la désignation des juges prud'homaux et l'ensemble des procédures.

Je le répète, monsieur le député, vous ne devez pas craindre la moindre atteinte à ce modèle de justice unique, qui repose sur des juges issus du monde du travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

Réforme de la justice prud'homale

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Accoyer

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Marc Le Fur.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La conférence des Présidents, réunie ce matin, a arrêté, pour les séances du mardi 23 au jeudi 25 février, les propositions d'ordre du jour suivantes

Mardi 23 février, l'après-midi, après les questions au Gouvernement :

Discussion du texte de trois CMP sur le projet de loi de finances rectificative, le projet sur la récidive et la proposition sur les détecteurs de fumée.

Le soir :

Discussion de deux projets de loi organique sur le Conseil supérieur de la magistrature.

Cette discussion se poursuivant le mercredi 24 février au soir.

Mercredi 24 février, l'après-midi, après les questions au Gouvernement :

Proposition de commission d'enquête sur la grippe A ;

Débat sur les transports ferroviaires ;

Débat sur le contrôle des passagers de transports aériens.

Jeudi 25 février, l'après-midi :

Proposition sur les violences faites aux femmes.

Il n'y a pas d'opposition ?

Il en est ainsi décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi organique relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (nos 2195, 2238) et du projet de loi relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution (nos 2196, 2241).

La Conférence des Présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

La parole est à M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le président, monsieur le rapporteur,mesdames, messieurs les députés,les deux textes qui vous sont aujourd'hui soumis en deuxième lecture doivent permettre la mise en oeuvre d'une des innovations les plus marquantes de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Désormais, le Parlement va pouvoir contrôler les nominations envisagées par le Président de la République aux fonctions les plus éminentes pour la garantie des libertés ou la vie économique et sociale de notre pays.

La procédure prévue à l'article 13 de la Constitution, qui s'appuie sur une audition des personnes proposées par les commissions compétentes, permettra d'établir la transparence et la pertinence des nominations à venir.

Je ne reviendrai pas longuement sur le contenu de ces textes qui vous est désormais bien connu. La discussion en première lecture, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, a indiscutablement permis de les enrichir.

Je tiens à souligner, à cette occasion, que les commissions des lois des deux assemblées ont effectué un important travail sur ces deux projets. Je veux saluer l'investissement personnel de leurs rapporteurs respectifs et plus particulièrement, ici, celui de M. Charles de la Verpillière.

Le projet de loi organique présenté par le Gouvernement a retenu une liste conséquente de quarante et un emplois ou fonctions concernés. Votre assemblée a ajouté quatre fonctions de responsabilité, le Sénat trois autres. La liste a ainsi été complétée en cohérence avec la démarche qui avait prévalu pour sa constitution.

La répartition des emplois et fonctions entre les commissions permanentes, prévue par la loi ordinaire, paraît également arrêtée.

Enfin, les deux assemblées se sont mises d'accord pour compléter le projet de loi ordinaire et prévoir que le scrutin doit être dépouillé simultanément dans les deux commissions compétentes.

En revanche, le Sénat a souhaité revenir sur l'interdiction des délégations de vote.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Votre commission des lois vous propose à nouveau d'interdire explicitement la délégation de vote lors du scrutin destiné à recueillir l'avis de la commission compétente.

Le Gouvernement prend acte de cette divergence d'appréciation. Mais il souhaite que les deux assemblées puissent trouver un accord sur les modalités de vote applicables à cette procédure originale. Nous avons parfaitement entendu le raisonnement qui a été développé par votre Assemblée.

Cela permettrait au Parlement d'aller au bout d'une réforme, dont l'objectif est bien d'accroître les prérogatives du Parlement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Charles de La Verpillière, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes saisis en deuxième lecture d'un projet de loi organique et d'un projet de loi ordinaire pris pour l'application de l'article 13 cinquième alinéa de la Constitution.

Cet alinéa, issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, est ainsi rédigé :

« Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés ».

En première lecture, notre Assemblée, suivant la suggestion de sa commission des lois, a d'abord complété la liste des nominations soumises à la procédure d'avis. Aux quarante et un emplois initialement inscrits dans le projet de loi organique, nous en avons ajouté quatre : celui de Président de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, celui de Président de l'autorité des normes comptables, celui de Président de la commission nationale de la déontologie de la sécurité et celui de Directeur général de l'Office national des forêts.

Par souci d'exhaustivité, nous avons également ajouté quatre présidences, déjà soumises à la procédure d'avis par les lois organiques antérieures.

S'agissant de la désignation des commissions compétentes pour émettre les avis, nous avons peu modifié les propositions du Gouvernement figurant dans le projet de loi ordinaire.

L'avis sur la nomination du Président de l'autorité de sûreté nucléaire a été confié à la commission chargée de l'énergie au lieu de celle chargée de l'environnement. L'avis sur la nomination du Président du conseil d'administration du Centre national d'études spatiales a été confié à la commission compétente en matière de recherche appliquée et non à celle compétente en matière de recherche et il a été fait de même pour la nomination du Président de l'INRA.

Mais surtout, l'examen en première lecture a conduit l'Assemblée nationale à rajouter aux deux textes des dispositions destinées à unifier la procédure d'avis dans les deux assemblées. Sur chaque nomination, en effet, il n'y a pas deux avis rendus séparément par la commission compétente du Sénat et celle de l'Assemblée nationale, mais un seul avis qui résulte de l'addition des votes émis au Sénat et à l'Assemblée nationale par les commissions compétentes.

Pour respecter la volonté très claire du pouvoir constituant, nous avons donc adopté deux amendements. Dans le projet de loi organique, un article 3 nouveau prévoit qu'il ne pourra y avoir de délégation de vote lors de ces scrutins. Dans le projet de loi ordinaire, un article 3 nouveau précise que le scrutin devra être dépouillé au même moment dans les deux assemblées.

Ainsi modifiés les deux projets ont été adoptés par l'Assemblée nationale à une large majorité le 29 septembre 2009.

L'examen en première lecture par le Sénat, qui s'est conclu le 21 décembre 2009, n'a pas abouti à un vote conforme. Certaines modifications apportées par le Sénat pourront cependant être adoptées sans difficulté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, si vous suivez votre commission des lois.

Nous sommes d'accord, notamment, sur l'ajout, par le Sénat, de trois emplois ou fonctions à la liste de ceux dont la nomination par le Président de la République relèvera de la procédure d'avis : ceux de président du conseil d'administration de Voies navigables de France, de président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et de président de la Commission de la sécurité des consommateurs.

Un point fort de désaccord subsiste cependant, qui concerne la procédure de vote. En effet, s'il a accepté le principe de la simultanéité des dépouillements, que nous avions introduit dans la loi ordinaire, le Sénat a, en revanche, supprimé l'article 3 nouveau de la loi organique, dont je rappelle qu'il prévoit qu'il ne peut y avoir de délégation de vote lors d'un scrutin destiné à recueillir l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée sur une proposition de nomination.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Si elle était maintenue, cette suppression permettrait aux commissions du Sénat d'utiliser les délégations de vote, conformément au règlement du Sénat, alors que les commissions correspondantes de l'Assemblée nationale ne le pourraient pas. Cela n'est pas acceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution est clair : comme je l'ai déjà dit, il n'y a pas deux avis rendus séparément par la commission compétente du Sénat et celle de l'Assemblée Nationale, il n'y a qu'un seul avis, qui résulte de l'addition des votes émis par les deux commissions. Le sens de l'avis pourrait être faussé si les délégations de vote étaient utilisées dans une assemblée et non dans l'autre.

Que dirait-on, par exemple, chers collègues députés, si, lors d'une élection législative, le vote par procuration était permis dans certaines communes, alors qu'il ne le serait pas dans d'autres communes de la même circonscription ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

La Constitution ne sera donc respectée que si, comme nous le proposions en première lecture, le droit de vote s'exerce de la même façon dans les deux assemblées.

Il faut cependant écarter deux objections.

En premier lieu, pouvons-nous interdire les délégations de vote, alors que le cinquième alinéa de l'article 13 n'a conféré ni au législateur organique ni au législateur ordinaire le pouvoir de fixer des règles de procédure pour l'application de l'article 13 ? La réponse se trouve dans un autre article de la Constitution, l'article 27, qui prévoit que la loi organique peut autoriser, exceptionnellement, la délégation de vote. Sur ce fondement a été prise l'ordonnance organique n° 58-1066 du 7 novembre 1958, que rien ne nous interdit de compléter puisque l'un de nos deux textes est justement une loi organique.

La seconde objection concerne le sens dans lequel doit être faite l'harmonisation des procédures de vote dans les deux assemblées. Pourquoi, nous demande-t-on, ne pas autoriser les délégations de vote dans les commissions de l'Assemblée nationale plutôt que de les interdire au Sénat ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Autrement dit, pourquoi ne pas faire l'inverse de ce que nous voulions faire ? Cela aboutirait également à une harmonisation. À cette objection, il est facile de répondre que, selon l'article 27 de la Constitution, le vote personnel est le principe, et la délégation l'exception. Puisqu'il doit y avoir une harmonisation, elle ne peut se faire que dans un sens restrictif, donc dans le sens de l'interdiction des délégations. Ajoutons une remarque de bon sens : n'est-il pas préférable que seuls participent au vote les parlementaires qui auront assisté à l'audition de la personne pressentie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Tout autant que le vote, l'audition est en effet un moment capital de cette procédure ; j'y reviendrai dans un instant.

Pour toutes ces raisons, la commission des lois, unanime, a décidé le rétablissement de l'article 3 du projet de loi organique.

Pour terminer, je voudrais, comme M. le ministre, insister sur l'importance de la procédure d'avis instituée par le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. C'est bel et bien une avancée considérable pour nos institutions républicaines. Il est de bon ton, sur certains bancs de l'hémicycle, de nier cette avancée : les jeux seront faits d'avance, les votes seront convenus, la majorité des trois cinquièmes exprimant un avis négatif ne sera jamais atteinte, etc.

Ces critiques, mes chers collègues, ne sont pas fondées. En réalité, les exemples étrangers, notamment celui du Sénat américain, montrent que le seul fait de l'existence de la procédure induit un changement total des comportements. L'autorité investie du pouvoir de nomination fait prévaloir le critère de la compétence sur celui de la connivence. Si la personnalité pressentie n'est pas de taille ou si son passé recèle une faiblesse, elle ne réussit pas à franchir le cap des auditions, et il n'est pas besoin d'aller jusqu'au vote.

Il faut maintenant concrétiser cette réforme essentielle, en adoptant les deux textes qui vous sont soumis par la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'ai reçu de M. Jean-Claude Sandrier et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine une motion de rejet préalable déposée en application de l'article 91, alinéa 5, du règlement, portant sur le projet de loi organique.

La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, comme en première lecture, le groupe GDR a déposé une motion de rejet préalable sur ce projet de loi organique relatif à l'article 13 de la nouvelle Constitution. Vous le voyez, nous avons la force de nos convictions !

Il ne s'agit pas de jusqu'au-boutisme, simplement d'une grande cohérence. Au stade de la deuxième lecture – étape qui ne m'est pas familière, étant donné l'usage intensif qui est fait de la procédure législative accélérée depuis 2007 – je me dois d'être parfaitement explicite sur nos motivations.

Il existe un gouffre entre notre conception de la démocratie et celle de l'UMP. Comme vous le savez, le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution prévoit que le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce désormais, pour certains emplois ou fonctions dans les grandes institutions ou grandes entreprises nationales, après un avis des commissions permanentes compétentes des deux chambres du Parlement. Il prévoit aussi le Président de la République ne peut pas procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs des commissions représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.

Je n'insisterai pas sur le caractère absolument ridicule du seuil retenu, qui place encore un peu plus l'opposition en position d'observatrice des choix de la majorité. Ce déni de démocratie a été largement commenté.

Pour défendre cette motion de rejet préalable, j'insisterai surtout sur la logique profonde de notre Constitution.

Le schéma démocratique est le suivant : tous les cinq ans, les Français sont appelés à plébisciter un chef suprême, le Président de la République. Tous les cinq ans, dans la foulée, on demande aux Français de flanquer ce chef suprême d'une majorité présidentielle, afin qu'il puisse agir. Les députés de cette majorité, hormis quelques exceptions notables, ne conçoivent leur fonction de représentation des Français que dans le soutien inconditionnel au chef de l'État.

La conséquence directe de ce système et de la pratique politique actuelle est incontestablement l'affaiblissement du Parlement, réduit au rang de grosse machine à voter. Cette grosse machine serait d'ailleurs devenue trop lente aux yeux du Gouvernement, d'où le recours quasi-systématique à la procédure accélérée pour l'examen de la loi, d'où la limitation du temps de parole des députés, d'où, aussi, le renforcement du travail en commissions permanentes, afin de gagner du temps en séance publique. Nous dénonçons cela depuis longtemps maintenant.

Avec la nouvelle Constitution, nous allions voir ce que nous allions voir !

Les faits nous donnent entièrement raison. Les journées d'initiative parlementaire, présentées comme une révolution, sont de véritables journées de dupes pour l'opposition. C'est tout le Parlement, et pas seulement l'opposition, qui se trouve ridiculisé quand le Gouvernement oppose le vote bloqué à toutes nos propositions de loi. C'est le travail parlementaire lui-même qui est vidé de sa substance. Ce sont le droit d'amendement, le droit de vote et le droit d'élaborer la loi qui sont confisqués à la représentation nationale.

Pour l'exécutif, le Parlement ne compte pas pour grand-chose. Nous étions déjà à la niche, voilà qu'on nous met la muselière ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Le grand inconvénient du mépris du Parlement, c'est qu'il en résulte une gouvernance autoritaire et aveugle. L'esprit de cour prend le pas sur l'esprit critique. Les conséquences sont connues : éloignement des décideurs des préoccupations populaires ; lois d'amateurs et de connivence ; censures diverses du Conseil constitutionnel, comme celles de la loi HADOPI et de la taxe carbone.

Vous direz que je m'égare et qu'il s'agit de savoir en l'occurrence si nous voulons, oui ou non, instaurer un contrôle sur le pouvoir de nomination du Président de la République. Je vous répondrai très simplement : non, nous ne voulons pas d'un tel contrôle –d'un demi-contrôle inopérant : nous prononçant contre le principe même de ce système de nomination par le Président de la République, nous ne pouvons pas nous prononcer pour son encadrement. Cette position peut paraître radicale, mais elle est de bonne logique.

Je ne suis pas un grand défenseur de la Constitution de la Cinquième République, mais tout de même… Dans celle-ci, on peut lire qu'il revient au Gouvernement de déterminer et de conduire la politique de la Nation, n'est-ce pas, monsieur le ministre ? (M. le ministre opine.) Or qui peut croire que des institutions aussi importantes que la Banque de France, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, EDF, OSÉO, la SNCF ou encore l'Agence nationale de renouvellement urbain, ne jouent pas un rôle éminent dans la conduite de la politique de la France ? Qui peut croire que l'activité des quelques cinquante hautes autorités, entreprises publiques et institutions dont la liste est contenue dans ce projet de loi organique, ne participe pas des pouvoirs publics ? Ces organismes sont autant de démembrements de l'État, et, pour ceux-ci, on parle bien de la nomination aux fonctions les plus éminentes « pour la garantie des libertés ou la vie économique et sociale de notre pays ». Ce n'est tout de même pas rien !

Il faut donc s'interroger.

En vertu de quel principe supérieur, les nominations des dirigeants de toutes ces entités devraient-elles relever du Président de la République et non du Gouvernement, lequel, je le rappelle, est chargé de déterminer et de conduire la politique de la Nation ? Sans doute n'ai-je pas saisi toute la subtilité de notre Constitution !

Ce dont je suis certain, c'est que la révision constitutionnelle n'est pas allée totalement au bout de la logique présidentialiste de ses instigateurs. Elle n'a effectivement pas clarifié les responsabilités en matière de pouvoir exécutif entre le Président et le Gouvernement, et nous en sommes restés à l'hypocrisie de 1958.

Malgré cela, le pouvoir constituant a tout de même voulu acter la prédominance présidentielle. On a, par exemple, permis au Président de venir s'exprimer devant le Parlement réuni en Congrès. On a voulu acter, d'une manière ou d'une autre, un changement de pratique que tout le monde reconnaît et qui va malheureusement dans le sens du pouvoir d'un seul.

D'où ce texte.

Ce projet de loi organique sur l'encadrement du pouvoir de nomination du Président n'est qu'un leurre ; cela a été dit. C'est surtout une pièce maîtresse pour légitimer la prédominance absolue du Président, qui doit avoir tous les pouvoirs.

Je pose alors une question : que se passerait-il en cas de cohabitation ? On ne peut pas écarter l'hypothèse.

Toutes les nominations importantes pour la vie de notre pays seraient tout simplement hors de portée du Gouvernement, censé mener la politique de la Nation. Le Parlement pourrait tout juste mettre son veto à certaines nominations, mais seulement s'il se prononce à plus des trois cinquièmes. Drôle idée de la démocratie !

D'autre part, les motifs invoqués par le Gouvernement pour justifier ce texte ne manquent pas de piquant. Lorsque vous nous expliquez, monsieur le ministre, que ce texte participe du renforcement des moyens de contrôle du Parlement sur le Président de la République, je me demande s'il ne s'agit pas d'une provocation, car c'est justement au motif qu'il ne pouvait y avoir de contrôle du Parlement sur le chef de l'État que toute la droite a accouru pour bloquer l'initiative de nos collègues du groupe SRC, qui demandaient à enquêter sur les dépenses en sondages de l'Élysée !

La droite parle de séparation des pouvoirs et, quand cela l'arrange, d'impossibilité de contrôle des actes du Président par le Parlement.

Or que nous propose-t-on ici, monsieur le ministre, si ce n'est de contrôler les actes du Président ? Nous sommes donc bien dans un système à géométrie variable.

En réalité, on nous lâche quelques miettes car cela ne mange pas de pain ! De plus, les propos tenus par le Gouvernement en commission des lois dépassent l'entendement. Il nous a rappelé que la loi organique ne concerne que les nominations effectuées par le Président de la République et que celles qui incombent au Premier ministre sont exclues de son champ. C'est, en somme, le monde à l'envers ! On nous propose de mieux contrôler le chef de l'État, mais on écarte du contrôle de la représentation nationale le chef du Gouvernement.

On le sait, notre constitution est particulièrement bancale et hypocrite en matière de pouvoir exécutif. Avec ce texte, on nous propose d'entériner cette situation, au profit de la seule présidence de la République.

Dans le contexte de déni des droits du Parlement, l'exécutif entend se donner bonne conscience, avec ce texte encadrant le pouvoir de nomination du Président.

Nous ne pouvons cautionner cette mascarade. Nous ne pouvons cautionner la dérive présidentielle de nos institutions. Nous ne pouvons admettre que le Président de la République puisse être responsable pour certains de ses actes devant l'Assemblée, mais pas pour tous. J'ai évoqué le budget « sondages » de la présidence, mais je pourrais parler de bien d'autres sujets ! C'est totalement inadmissible.

Les députés communistes, républicains et du Parti de Gauche considèrent que toutes les nominations devraient relever du Premier ministre et être avalisées à la majorité simple par le Parlement. La majorité simple, ce n'est déjà pas trop demander, puisque nous sommes minoritaires ! Cela permettrait peut-être d'éviter des scandales, comme la nomination du PDG d'EDF. Celui-ci, non content de cumuler emploi public et emploi privé, a, en plus, bénéficié d'une augmentation de salaire de 45 % par rapport à son prédécesseur. Je sais que cela choque même dans les rangs de l'UMP, c'est dire…

C'est toute la République des grands et des petits privilèges qui est à déconstruire. Nous voulons donner la prééminence au Gouvernement, qui tient sa légitimité du soutien des élus du peuple. Pourquoi ne pas réfléchir à un encadrement des nominations des membres du Gouvernement par le Parlement ? Cela aurait un grand sens institutionnel et limiterait le fait du prince.

Nous pourrions imaginer que ministres et secrétaires d'État ne puissent prendre leurs fonctions qu'après un grand oral et un vote conforme des députés. Cela marquerait un progrès notable du contrôle parlementaire.

Nous mettons aussi en débat bien d'autres idées pour garantir la place du Parlement. Nous pourrions abandonner le vote bloqué…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

…mettre un terme au 49-3 et à l'irrecevabilité financière des propositions de loi et des amendements des députés, ou encore encadrer très strictement le droit de dissolution.

De plus, une séparation des domaines de la loi et du règlement peut se concevoir pour des raisons d'efficacité, mais nous pouvons aussi réfléchir à l'introduction d'une ferme procédure de contrôle du Parlement sur les matières réglementaires.

On peut prévoir une procédure de reprise en main de l'écriture des décrets d'application par le législateur en cas de manquement.

Concernant la loi d'indemnisation des victimes des essais nucléaires, promulguée il y a peu, après tant d'années perdues, les associations des victimes ont le sentiment d'être flouées par la rédaction en cours du décret d'application.

Les spécialistes le savent, le ministre de la défense avait apporté des garanties au cours des débats parlementaires. Il nous avait présenté un avant-projet de décret contenant une liste de dix-huit maladies retenues comme « maladies radio-induites résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français ». Aujourd'hui, les victimes redoutent un manquement à la parole donnée à la représentation nationale au sujet de la liste de ces maladies radio-induites, car le décret ne contiendrait finalement que treize maladies ! Cela pourrait entraîner l'absence de toute indemnisation pour près d'un tiers des vétérans. Un véritable scandale, en somme !

Dans ce genre de cas, je pense qu'il devrait revenir à la représentation nationale, qui élabore la loi, norme supérieure, de reprendre la main sur le contenu du décret d'application. Voilà ce que serait un véritable rééquilibrage de nos institutions républicaines !

Enfin, j'évoquerai rapidement le monde de l'entreprise.

Mettre en avant la « République des compétences », comme le fait le Gouvernement, est une chose, mais faire entrer la République dans l'entreprise aurait une tout autre portée ! S'agissant des nominations des chefs d'entreprise, y compris dans les entreprises publiques comme La Poste, pourquoi favoriser systématiquement les énarques et les conseillers ministériels ? Pourquoi ne pas donner la parole aux salariés ? Gageons que la caste des grands patrons y perdrait beaucoup !

D'ailleurs, un tel système de nomination par les travailleurs existe déjà, dans les sociétés coopératives de production. Et la délibération des créateurs des richesses fonctionne souvent très bien ! Dans ces sociétés coopératives, les écarts de revenus sont beaucoup moins importants. Les salariés se sentent écoutés et s'impliquent dans leur travail. Essayez d'expliquer à un agent d'EDF qu'il se trouve dans le même bateau qu'Henri Proglio…

La démocratie dans l'entreprise, voilà une perspective communiste ! Et, autant le dire tout de suite, on ne nous fera pas le coup de la compétition internationale entre patrons pour tenter de justifier les privilèges. La concurrence, les salariés la connaissent, car ils la subissent : elle conduit à l'écrasement des salaires et non à des bonus par millions !

Les salariés savent très bien comment faire fonctionner les entreprises. Pour aller dans le sens de l'intérêt général et des besoins sociaux, je fais confiance au collectif des travailleurs plutôt qu'à un patron providentiel, quand bien même celui-ci vaudrait des millions d'euros ! Pour développer les activités, nous n'avons pas besoin d'états généraux de l'industrie, mais de sortir de ce capitalisme broyeur d'humanité.

Chers collègues, ce projet de loi n'est même pas une timide avancée. En attendant de pouvoir nous prononcer en faveur d'un grand changement démocratique, nous vous proposons de voter en faveur de cette motion de rejet préalable, pour tous les motifs constitutionnels et d'opportunité que j'ai évoqués.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Personne ne demande la parole pour une explication de vote ?

(La motion de rejet préalable, mise aux voix, n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. Jean-Christophe Lagarde.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui l'examen en seconde lecture de deux textes, un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire, d'importance puisqu'ils permettent de systématiser le contrôle parlementaire sur le pouvoir de nomination du Président de la République, innovation qui a sans doute constitué l'une des dispositions les plus symboliques de la révision constitutionnelle adoptée en juillet 2008.

Par le passé, en effet, les nominations à la tête des grandes entreprises publiques ou des autorités administratives indépendantes étaient systématiquement suspectées, et parfois à juste titre, d'être des nominations de complaisance, voire de connivence, les résultats d'obscurs marchés passés dans les coulisses du pouvoir. Désormais, et en vertu de la nouvelle rédaction de l'article 13 de la Constitution, les personnes pressenties pour exercer une fonction déterminante, soit pour la garantie des libertés publiques, soit pour la vie économique et sociale de la nation, sont tenues de se présenter et de présenter leur projet devant les commissions permanentes compétentes de l'Assemblée et du Sénat.

Nous-mêmes, parlementaires, n'aurons pas seulement à nous prononcer sur la compétence du candidat pressenti ainsi que sur la pertinence de son projet ; nous disposerons également de la possibilité d'opposer, à la majorité des trois cinquièmes, notre veto à une nomination proposée par le Président de la République,

Si l'ambition de voir le Parlement plus étroitement associé aux nominations décidées par le Président de la République nous a tous rassemblés ici lors des débats préalables à la révision de la Constitution, tel n'a pas été le cas du seuil de voix au-delà duquel les commissions permanentes sont en mesure d'opposer leur veto à une nomination. Certains ont ainsi mis en avant l'impossibilité d'atteindre les trois cinquièmes des voix, compte tenu notamment de la discipline de vote qu'on a coutume d'observer dans nos assemblées.

Je ne vois pas en quoi, cette coutume de vote s'appliquerait aux désignations proposées par le Président de la République. Cela pervertirait en effet le principe même de ce que nous avons voulu inscrire dans la Constitution. En outre, nous estimons que l'opportunité d'auditionner le candidat, mais aussi de voter, nous permettra d'émettre un avis qui, à lui seul, quand bien même le seuil des trois cinquièmes ne serait pas atteint, serait en mesure de bloquer la nomination, par le Président de la République, de quelqu'un que nos assemblées n'auraient pas estimé suffisamment compétent ou dont le projet ne correspondrait pas aux ambitions pour les institutions à la tête desquelles il serait nommé.

Un tel cas s'est déjà produit : l'exécutif n'était pas lié par le vote qui a eu lieu récemment dans nos assemblées pour la nomination du président du Haut conseil des biotechnologies. Bien qu'il ne se soit pas vu opposer une majorité des trois cinquièmes, l'exécutif a renoncé à nommer son candidat initial et a tenu compte de l'avis du Parlement. Nous avions donc raison lorsque nous défendions ce principe lors du débat sur la révision constitutionnelle, ainsi qu'en première lecture. La preuve en est faite.

L'avancée que constitue pour notre démocratie le contrôle par le Parlement des nominations décidées par le Président de la République est donc bel et bien réelle et je renouvellerai à ce titre, monsieur le ministre, au nom des députés du Nouveau Centre, notre totale adhésion à l'esprit des projets que vous présentez aujourd'hui devant nous.

Alors que notre assemblée avait, en première lecture, choisi de compléter la liste des nominations désormais appelées à n'intervenir que selon la procédure prévue à l'article 13 de la Constitution, le Sénat a, pour sa part, poursuivi cette démarche en étendant cette procédure à trois nouvelles fonctions.

Cet allongement progressif des emplois ou fonctions concernés par la nouvelle procédure, s'il ne peut en lui-même que susciter que notre approbation, nous semble toutefois révélateur d'une difficulté que nous avons sans doute tous éprouvée, mes chers collègues, au moment de préparer l'examen de ce texte.

En effet, là où le comité Balladur ambitionnait de procéder à une clarification des compétences respectives du Président et du Premier ministre en termes de nominations, force est de constater que cet objectif n'a pu être atteint, puisque la juxtaposition des articles 13 et 21 de notre Constitution reste à ce jour ambiguë. Elle avait d'ailleurs fait l'objet de débats lors de la révision constitutionnelle. Qu'on en juge : l'article 21 donne ainsi pouvoir au Premier ministre pour nommer aux emplois civils et militaires, sous réserve de l'article 13 qui donne lui-même au Président compétence pour nommer aux emplois civils et militaires de l'État.

Mais, au-delà de cette seule ambiguïté constitutionnelle, le pouvoir de nomination du Président de la République reste difficile à cerner avec exactitude, dans la mesure où il convient, pour tenter d'en définir l'étendue, d'ajouter à une première liste d'emplois ou fonctions visée à l'article 13 de la Constitution, celle contenue dans l'ordonnance organique du 28 novembre 1958, puis celle du décret en Conseil des ministres du 29 avril 1959. Vient alors une véritable nébuleuse d'emplois pourvus sur décret du Président de la République en vertu d'une disposition législative, voire réglementaire, spécifique. Sur ce sujet donc, une entreprise de clarification n'aurait sans doute pas été dénuée de tout intérêt. Notre commission des lois pourrait peut-être se pencher sur la question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Tel n'est cependant pas le strict objet du débat qui nous anime aujourd'hui. Aussi, si nous soutenons les compléments progressivement apportées à la liste des emplois ou fonctions concernés par la procédure fixée au cinquième alinéa de l'article 13, nous n'en maintenons pas moins nos regrets, monsieur le ministre, en ce qui concerne l'absence, au sein de cette liste, du président de la Commission consultative du secret de la défense nationale – car il s'agit d'un sujet sensible, qui concerne l'ensemble des Français – ainsi que des membres du collège de la CNIL, nommés par le Président de la République. Je l'ai dit lors de la première lecture, il nous paraissait essentiel, s'agissant des libertés publiques, que les commissions des deux assemblées puissent se prononcer.

J'en viens enfin à ce qui était initialement le corollaire de ce texte, mais qui en est, au stade de cette seconde lecture, devenu le point principal, j'entends par là l'unification des procédures de vote retenues dans chacune de nos assemblées. Le vote du Sénat impliquant que chaque assemblée puisse poser ses conditions ou imposer ses usages en matière de vote nous paraît inadapté. Notre rapporteur l'a fort bien démontré tout à l'heure, puisqu'il ne s'agit pas d'un vote dans chaque assemblée, mais d'un même vote pour une même décision. C'est donc une procédure unifiée qui doit être adoptée. Par ailleurs, il va de soi que, lors de cette procédure, c'est une décision individuelle qui doit être prise par les parlementaires. Ceux qui assistent à l'audition peuvent ainsi se faire une opinion personnelle sur la qualité d'un projet, la qualité d'une personne et sa capacité à occuper les fonctions auxquelles il se propose d'être nommé. Nous ne pouvons pas, monsieur le ministre, accepter de délégation de vote, que ce soit à l'Assemblée ou au Sénat. Nous pouvons encore moins, notamment dans notre assemblée, accepter que le Sénat, élu au suffrage universel indirect, soit ainsi surreprésenté du fait d'un vote par procuration, alors que ne voteraient dans notre assemblée que les députés présents.

Dans un monde parfait, il n'y aurait, au Sénat comme à l'Assemblée, que les membres présents en commission ce jour-là ! Las, comme un tel cas de figure n'est pas possible, il est préférable que seuls les présents votent. Ainsi, les assemblées seraient à égalité. Le vote ne serait pas altéré dans sa sincérité. Monsieur le ministre, vous souhaitez que les assemblées s'entendent ; pour notre part, nous aimerions que le Sénat, que vous connaissez bien, entende, dans sa grande sagesse, nos arguments et ne cherche pas à instaurer une inégalité entre les deux assemblées.

J'imagine que la navette va se poursuivre, avant d'aboutir à un vote final. Monsieur le ministre, ce sera, pour le groupe Nouveau Centre, une condition sine qua non de son vote favorable. Nous ne pouvons pas participer à ce qui serait en réalité un affaiblissement de l'Assemblée nationale par rapport au Sénat. D'autant que nous avons, sur tous les bancs de cette assemblée, appris à nous méfier des votes par délégation du Sénat !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Mes chers collègues, ce projet de loi organique, ainsi que le projet de loi ordinaire qui s'y rattache, consacrent incontestablement une avancée significative pour le fonctionnement de nos institutions, et c'est à ce titre que, dans la droite ligne de leur vote lors de la révision constitutionnelle, les députés du Nouveau Centre confirmeront leur soutien à l'occasion de cette seconde lecture, dès lors que l'amendement de la commission aura permis de rétablir l'équilibre entre nos assemblées. (Applaudissements sur les bancs des groupes NC et UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici à nouveau réunis pour discuter en deuxième lecture de deux textes dont l'objet est de permettre la mise en oeuvre effective de l'une des dispositions les plus importantes de la révision constitutionnelle de 2008 : je veux parler de la procédure de nomination aux emplois et fonctions publics, dont l'article 13 de la Constitution confie la responsabilité au Président de la République.

Notre Assemblée avait adopté en première lecture, le 29 septembre 2009, le projet de loi organique et le projet de loi ordinaire relatifs à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. Le Sénat a, quant à lui, adopté le 21 décembre 2009 ces deux textes en y apportant toutefois des modifications dont l'une ne me paraît – comme, je pense, la majorité d'entre, nous – pas acceptable, j'en reparlerai.

Permettez-moi de revenir sur le fond de ces deux textes qui sont caractéristiques de l'esprit même de la réforme constitutionnelle de l'été 2008 voulue par le Président de la République. En effet, ces textes lient le pouvoir de nomination du chef de l'État à l'avis des parlementaires. Ils constituent donc une reconnaissance pour notre Assemblée et une nouvelle marque de confiance accordée à ses représentants.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

L'article 13 de la Constitution, dans sa nouvelle rédaction, distingue les emplois régaliens, pour lesquels la procédure en vigueur depuis 1958 sera maintenue, de ceux qui ont une « importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation ». Pour ces derniers, la procédure nouvelle comprend l'audition de la personne proposée pour la fonction par la commission permanente compétente de chaque assemblée, suivie d'un vote. À ce titre, il convient de souligner que les commissions parlementaires sont dotées dorénavant d'un droit de veto lorsque « l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions ». Cette innovation permettra d'introduire une réelle transparence dans les procédures de nomination. Les commissions parlementaires devront vérifier la compétence, l'éthique et l'indépendance des personnes proposées.

Sans revenir sur un débat qui a déjà eu lieu, je sais que l'opposition regrette toujours qu'il faille, pour émettre un avis défavorable à une nomination, une majorité qualifiée. Pour ma part, je pense que cette exigence d'une majorité qualifiée était nécessaire pour ne pas tomber dans un blocage purement politique. Une telle procédure, loin d'être factice, sera bel et bien fonctionnelle et opérationnelle. La démonstration en a été faite. Alors non, il n'y a rien de surprenant à ce que le contrôle des nominations effectuées par le Président ne donne pas un droit de veto à l'opposition. Cela dit, avec la publicité des auditions, sauf dans certains cas liés à la préservation du secret professionnel ou du secret de la défense nationale, croyez bien, mes chers collègues, qu'il serait difficile à l'exécutif de confirmer la nomination d'un candidat qui aurait eu une audition agitée.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

C'est sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

Cette procédure publique, cette publicité donneront aux auditions une dimension médiatique qui aura plus d'effet que la menace d'un veto sur telle ou telle nomination. Comme le rappelait un éminent professeur de droit constitutionnel : « Ce pouvoir de contrôle parlementaire est donc réel et redoutable ».

Si le projet de loi organique fixe la liste des emplois et fonctions soumis à la nouvelle procédure d'avis parlementaire, le projet de loi ordinaire se borne à désigner concrètement la commission compétente au sein de chaque assemblée du Parlement. Le projet de loi organique prévoyait, à l'origine, de soumettre à la procédure d'avis des commissions permanentes compétentes des assemblées quarante et un emplois ou fonctions. Notre rapporteur, dont je salue le travail, avait proposé, ce que la commission avait accepté, de passer de quarante et une nominations dans le texte du Gouvernement à quarante-neuf. Avec sagesse, et je suis d'accord avec lui, il avait souhaité que le nombre de nominations concerné soit limité, faute de quoi nous aurions eu de la peine à exercer correctement et efficacement ce nouveau pouvoir. De même, je crois qu'il avait eu raison de ne pas élargir la compétence des commissions permanentes aux nominations faisant déjà l'objet d'une procédure garantissant suffisamment l'indépendance des membres d'une institution, comme la CNIL pour ne citer qu'elle.

On peut se réjouir que le Sénat ait approuvé la liste des emplois ou fonctions soumis à la procédure de nomination prévue par l'article 13 de la Constitution telle qu'elle résultait du texte adopté par notre assemblée. Il a toutefois souhaité ajouter à cette liste trois autres fonctions, ce qui porte le total à cinquante-deux emplois ou fonctions : celle de président du conseil d'administration de Voies navigables de France ; celle de président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires – cette autorité administrative ayant été créée par une loi adoptée postérieurement à l'adoption du présent projet de loi organique par notre assemblée en première lecture – et celle de président de la Commission de la sécurité des consommateurs. L'ajout de ces trois fonctions me paraît tout à fait correspondre à l'esprit de la loi. Le Sénat a, en outre, approuvé la répartition des avis sur les nominations entre les commissions permanentes telle qu'elle résultait du tableau annexé à l'article 1er approuvé par notre assemblée. Par ailleurs, par coordination avec l'introduction de trois nouvelles fonctions soumises à la procédure prévue par l'article 13 de la Constitution, le Sénat a complété le tableau relatif aux commissions permanentes compétentes.

Mes chers collègues, si nos collègues sénateurs ont salué l'amendement, introduit par notre assemblée, imposant la simultanéité du dépouillement du scrutin sur les nominations dans les deux assemblées, mesure qui permet de préserver l'impartialité et d'assurer l'objectivité du scrutin dans les deux chambres et de limiter l'influence de l'avis de l'une sur celui de l'autre, ils ont toutefois procédé à la suppression de l'article 3 du projet de loi organique, introduit également par notre assemblée, et aux termes duquel « Il ne peut y avoir de délégation lors d'un scrutin destiné à recueillir l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée sur une proposition de nomination selon la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution. » Je regrette vivement, comme certainement la majorité de mes collègues de tous bords, que le Sénat ait supprimé cet article que nous avions introduit en première lecture. Il ne s'agissait pas d'un article de défiance à l'égard de nos collègues sénateurs ou d'un article qui voulait que les députés s'immiscent dans l'organisation interne au Sénat,…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

… mais simplement d'une mesure qui tendait à harmoniser les règles de procédure et de computation des voix afin qu'elles soient identiques dans les deux chambres du Parlement. Par conséquent, l'article 3 du projet de loi organique est le vrai et unique enjeu de cette deuxième lecture.

Mes chers collègues, le débat ne situe pas entre la majorité et l'opposition, mais entre l'Assemblée nationale et le Sénat. Lors de mon intervention en première lecture, j'avais insisté sur cette question essentielle des modalités d'organisation du scrutin dans les commissions permanentes. Il m'apparaît, ainsi, indispensable que les procédures de vote respectent le parallélisme des formes entre nos deux assemblées.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

En effet, députés et sénateurs votent ensemble pour donner un avis sur une nomination. Nous avons tous conscience que, si tel n'était pas le cas, cette absence d'uniformité de la procédure pourrait être fatale à notre assemblée, car elle pourrait modifier les équilibres instaurés entre les représentants du peuple que nous sommes et les représentants des territoires que sont les sénateurs. C'est d'autant plus vrai qu'en l'absence de modification du nombre des commissions permanentes au Sénat, resté à six alors que notre assemblée en compte désormais huit, il existe un véritable risque que certaines commissions permanentes du Sénat pèsent davantage que celles de l'Assemblée nationale lors d'un vote sur une nomination, ce qui serait inacceptable.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

C'est pourquoi j'ai été très favorable, en commission, comme l'ensemble du groupe UMP et des autres groupes politiques, à ce que soit rétabli l'article 3 du projet de loi organique dans sa rédaction retenue en première lecture par notre assemblée, qui complétait l'article 1er de l'ordonnance du 7 novembre 1958 en interdisant les délégations de vote lors d'un scrutin destiné à recueillir l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée sur une proposition de nomination.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrice Verchère

Mes chers collègues, ces deux projets de loi qui nous avaient été soumis en première lecture au mois de septembre 2009 et que nous avions complétés devaient permettre d'unifier la procédure d'avis dans les deux assemblées, d'une part en interdisant toute délégation de vote, d'autre part en imposant un dépouillement simultané du scrutin dans les deux commissions concernées. Malheureusement, le Sénat n'a approuvé que la dernière de ces deux règles de procédure, ce qui ne nous permet pas une adoption conforme du projet de loi organique.

En revanche, le projet de loi ordinaire n'appelle pas de remarque particulière et rien ne s'oppose à son adoption.

Pour conclure, le groupe UMP votera le projet de loi ordinaire et votera le projet de loi organique sous la réserve expresse du maintien de l'article 3 rétabli en commission des lois et dont l'objet était d'interdire les délégations de vote, lors d'un scrutin destiné à recueillir l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée sur une proposition de nomination. J'espère que nos deux chambres s'accorderont et que le bon sens l'emportera ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, même si nous en sommes à la deuxième lecture, il n'est sans doute pas inutile de rappeler la philosophie du groupe SRC sur ce projet de loi organique,

Dès les débats constitutionnels, nous avions indiqué que la volonté d'encadrer le pouvoir de nomination du Président de la République partait d'une bonne intention. Nous en avions défendu le principe pour une raison assez simple : un tel contrôle représente potentiellement une avancée démocratique. Il vise naturellement à éviter que ces nominations n'apparaissent comme le « fait du prince ». Nous pouvons d'ailleurs a posteriori regretter une lacune : il aurait peut-être été sage de viser aussi les nominations faites par le Premier ministre. Je pense, par exemple, aux commissaires représentant la France à la Commission européenne, au risque – mais nous ne l'avons pas pris – d'ouvrir la « tentation occasionnelle » de contourner la procédure en abandonnant au chef du gouvernement ce qui resterait, dans les faits, un choix du Président de la République.

Quand vous nous avez proposé d'encadrer les nominations du Président de la République, nous avons, à notre tour, proposé une procédure que nous jugions transparente et surtout efficace. Ainsi, nos amendements prévoyaient-ils que l'encadrement parlementaire des nominations présidentielles soit le fait d'une commission ad hoc désignée en début de législature, composée à parité de députés et sénateurs, naturellement désignés à la proportionnelle des groupes. Mais, plutôt que de retenir cette idée de commission ad hoc statuant par un vote à une majorité qualifiée, le constituant a décidé, sur proposition du Sénat, que l'avis serait rendu dans le cadre d'une délibération distincte des commissions permanentes des deux assemblées, Ainsi, le sens de l'avis sera-t-il apprécié par l'addition des votes émis dans les deux commissions. Nous avons d'ailleurs noté, avec intérêt, que ce résultat ne fut, au final, guère prisé par le Sénat. Ce dernier, se refusant d'apparaître minoritaire dans une commission commune, avait donc modifié le dispositif adopté par l'Assemblée nationale, de telle sorte que son poids s'en était trouvé renforcé. Reconnaissons, ici, que ce point d'arrivée était conforme à la volonté du Constituant de 1958, quand il a forgé le bicaméralisme de la Ve République.

Par ailleurs, à l'initiative de notre rapporteur, l'Assemblée nationale a introduit un mécanisme de veto. Dans l'hypothèse où plus des trois cinquièmes des suffrages exprimés dans les deux commissions seraient négatifs, le Président de la République ne pourra procéder à la nomination et devra soumettre une nouvelle proposition aux commissions. Je rappelle tout de même que le comité Balladur, qui a inspiré nos travaux, avait simplement souhaité que l'avis public soit adopté à la majorité simple ! Nous aurions aimé, pour notre part, qu'il faille trois cinquièmes d'avis favorables pour permettre la nomination. Nous regrettons que la majorité, au fil des lectures, ait compliqué un mécanisme qui devait initialement être simple pour être transparent et en mesure de susciter l'adhésion de tous. Nous confirmons notre sentiment. A nos yeux, le droit de veto, tel qu'il existe aujourd'hui – et qui est donc constitutionnel – est, comme vient de le souligner notre collègue, pratiquement impossible à atteindre. Nous persistons donc à le regretter. La dépendance du législatif par rapport à l'exécutif est telle que l'on peut bien transférer hypothétiquement des responsabilités au Parlement, en pratique cela ne changera malheureusement rien.

C'est justement pour cela que la véritable nouveauté du texte doit concentrer notre attention dans cette deuxième lecture. Il s'agit d'un point qui n'a peut-être pas été suffisamment souligné lors de la première lecture : les conditions de l'audition publique des futurs impétrants à des nominations. À ce stade, en effet, les différents textes tels qu'ils existent sont muets sur les conditions de publicité. Certes, comme l'a très justement souligné notre rapporteur en commission, le règlement de l'Assemblée nationale – dans son article 29-1 – a organisé, pour notre assemblée, ces conditions. Aux termes de son alinéa 2, « la commission est convoquée dans les conditions prévues à l'article 40. Elle peut nommer un rapporteur sur la proposition de nomination. » et, selon l'alinéa 3, « la personnalité dont la nomination est envisagée est auditionnée par la commission. Sous réserve de la préservation du secret professionnel et du secret de la défense nationale constatée par le bureau, l'audition est publique. »

De fait, le souci de publicité est essentiel, comme le rappellent les exemples étrangers.

Je continue d'ailleurs à regretter au passage que l'article 33 de la Constitution ne comporte pas la mention souhaitée par le comité Balladur. Ce dernier prévoyait en effet que les auditions auxquelles procéderaient les commissions instituées au sein de chaque assemblée seraient publiques. Nous avions tenté, avec l'accord du Gouvernement, me semble-t-il, d'intégrer cette préconisation mais le Sénat, encore une fois, s'y était opposé. C'est la raison pour laquelle nous allons à nouveau déposer un amendement en ce sens sur la loi ordinaire, peut-être aussi sur la loi organique.

Puisque le veto est quasiment hors de portée, le seul intérêt de cette nouvelle disposition repose en effet sur la publicité de la confrontation avec les parlementaires. Nous voulons croire que la publicité de l'audience empêchera le Président d'utiliser son pouvoir pour gratifier un collaborateur plus connu pour sa fidélité ou son attachement partisan que pour ses qualités professionnelles et morales. Sinon, celui-ci risque d'être déconsidéré, et son mentor avec lui.

Dès lors, nous attachons une particulière importance au fait que la publicité doit être prévue par la loi, ce qui nous donnera des garanties pour l'avenir.

Mon dernier point portera sur la divergence entre notre assemblée et nos collègues du Sénat, qui concerne l'hypothèse de la délégation de vote au sein des commissions.

Aux termes de l'article 27 de la Constitution, le droit de vote des membres du Parlement est personnel. C'est la raison pour laquelle nous réaffirmons, comme je l'ai fait en commission, notre hostilité à la délégation de vote telle qu'elle se pratique en commission au Sénat.

Là encore, les exemples étrangers nous montrent que, de la qualité des auditions, dépendent souvent les votes, le rapporteur l'a très justement souligné. Comment alors imaginer qu'un absent puisse se prononcer ?

Les commissions parlementaires devront veiller à garantir la compétence, l'éthique et l'indépendance des personnes proposées. L'avis du législateur, garant des libertés fondamentales, exprimé par l'une de ses commissions permanentes, doit avoir pour conséquence de conférer une grande légitimité aux candidats retenus et de garantir la qualité et la transparence de la fonction. Dès lors, la motivation du vote peut bien relever du choix politique ou de l'appréciation personnelle de chacun des parlementaires, peu importe, du moment que le votant a assisté à l'audition.

Nous avons donc un désaccord avec le Sénat.

Pour autant, le moment où il se noue, lors de cette deuxième lecture, ne doit pas avoir pour conséquence de retarder l'application du texte. Je pense en effet à la prochaine nomination des membres du Conseil constitutionnel, désormais soumise à l'avis des commissions parlementaires, en vertu de l'article 2 du projet de loi.

Si nous n'en sommes pas encore à l'exemplarité de la Constitution allemande, qui prévoit que huit membres du tribunal constitutionnel fédéral sont élus par le Bundestag à la majorité renforcée des trois cinquièmes, ces prochaines auditions pourraient être intéressantes. Il ne faudrait donc pas que la majorité joue la montre pour permettre au Président de la République d'avoir les mains totalement libres au mois de mars.

Je note néanmoins qu'il suffit, non pas, comme l'a écrit un journal ce soir, que la loi organique soit votée, mais que la loi ordinaire soit votée pour que le texte puisse être appliqué. Je souhaite que nous puissions y arriver et que, très rapidement, au moins pour les membres du Conseil constitutionnel, nous ayons la capacité d'entendre les candidats.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Monsieur le ministre, permettez-moi tout d'abord de m'étonner, une fois n'est pas coutume, du calendrier de vos priorités constitutionnelles. Je suis déjà revenu à plusieurs reprises sur l'absence, ne serait-ce que sous la forme d'embryon, de projets de loi relatifs à la création du défenseur des droits ou au référendum d'initiative conjointe, pour ne parler que de ceux découlant de la réforme constitutionnelle votée en juillet 2008, alors que vous nous avez vendu ces sujets comme le volet citoyen de la réforme. Je ne parle même pas du mode de scrutin ou du droit de vote des étrangers, dont notre Président de la République a encore parlé dernièrement. On attend toujours…

En lieu et place de ces avancées réellement démocratiques que nous aurions souhaitées, nous discutons ce soir d'une procédure de ratification parlementaire de nomination à certains emplois par le Président de la République. Ce qui est présenté comme une avancée majeure pour le pouvoir du Parlement n'est, à nos yeux, ni plus ni moins qu'un gadget.

Les commissions compétentes des deux chambres devront réunir trois cinquièmes de suffrages négatifs pour s'opposer à une nomination présidentielle. Autant dire que cela n'arrivera jamais. En première lecture, j'avais fait le pari qu'il n'y aurait aucun contrôle parlementaire réel des nominations. Avec la nomination du nouveau PDG d'EDF, je l'ai gagné plus vite que je ne l'aurais cru.

En attendant, nous nous retrouvons face à une espèce de no man's land juridique où l'encadrement des nominations présidentielles devient complètement surréaliste. Nous sommes littéralement baladés entre la réalité du projet de loi qui nous occupe et qui, de fait, n'a pas encore été voté, et des principes qui sont chaque jour avancés par le Gouvernement et le chef de l'État, faisant comme si ce texte était déjà en vigueur. Comme l'a rappelé M. Brottes lors des questions au gouvernement de la semaine dernière, M. Sarkozy a affirmé que le Parlement avait validé la proposition de nomination de M. Proglio. Or il n'en était rien. Non seulement l'audition, qu'on pourrait qualifier de hors-la-loi puisque la loi n'existe pas, a été faite à huis clos, mais, surtout, aucun avis n'a été émis.

D'un côté, M. Sarkozy fait comme si la procédure de nomination existait déjà, de l'autre, M. Fillon nous rappelle, en guise de réponse officielle, qu'elle n'a pas encore été mise en place. D'un côté, on en appelle à une absolution parlementaire pourtant inexistante. De l'autre, on renvoie le Parlement aux oubliettes en lui rappelant que, pour l'instant, il a juste le droit de se taire.

Quoi qu'il en soit, cet imbroglio juridique et législatif constitutif de la réforme constitutionnelle et de votre volonté d'encadrer les nominations, qu'elles soient présidentielles ou pas, semble paralyser vos cabinets. Il semblerait qu'en plus de la double casquette de M. Proglio, vous deviez faire face à une erreur, ou un oubli, d'inscription à l'ordre du jour de nos assemblées du projet de loi organique relatif à la nouvelle procédure de nomination des sages siégeant au Conseil constitutionnel. Or, d'ici à mars, trois d'entre eux devront être nommés. II est à croire que la motivation de l'urgence vous fera passer outre l'assentiment du Parlement. Pour qui suit un peu la teneur et le déroulement de nos débats depuis le début de cette législature, rien de bien neuf, les droits du Parlements seront de nouveau largement mis de côté, mais, de grâce, arrêtez de nous raconter des histoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

Nos compatriotes doivent pouvoir faire la différence entre le discours médiatique aux accents et aux apparences persuasifs et volontaires, voire velléitaires, et la réalité des textes législatifs qui ancrent la société française dans un conservatisme rétrograde et ultra-libéral. À en croire les bilans du débat mettant en scène M. Sarkozy la semaine dernière, il semblerait que les Français soient de moins en moins dupes.

Touchés dans leurs gestes les plus quotidiens par des dispositions législatives dont ils n'ont pas eu écho immédiatement, nos concitoyens commencent à comprendre la portée réelle et liberticide des lois sécuritaires passées depuis 2002.

Prenons l'exemple de l'explosion du nombre des gardes à vue, qui saute aux yeux aujourd'hui. Leurs conditions méprisables et contraires aux conventions internationales ne sont pourtant que le résultat de huit ans de politique ultra-sécuritaire.

De la même façon, les difficultés que nombre de Français rencontrent dans le renouvellement de leurs pièces d'identité, je les ai déjà évoquées lors d'une question d'actualité, sont révélatrices de ce double langage. D'un côté, un discours bienveillant, de l'autre, une réalité législative liberticide, où l'ensemble de la population, à commencer par ses représentants les plus directs, nous, doit prouver chaque jour face à un État de plus en plus fort qu'elle a le droit d'exister et de faire valoir son opinion.

Ces deux exemples dressent le portait d'une France qui nous éloigne de l'exemple démocratique dont nous nous réclamons. Ils ne sont pourtant que les résultats de sept ans de politique. Mais nous aurons l'occasion, lors de la discussion de la LOPPSI 2, de revenir sur ces fausses victoires et ces chiffres bancals.

Revenons à la lettre du texte. Comme à votre habitude, vous usez de la technique du leurre afin de faire passer les membres de l'opposition pour des imposteurs qui utiliseraient chacun de vos faux pas pour créer la polémique. Monsieur le ministre, la perfidie vient de votre côté. Il n'y a qu'à penser encore une fois à la nomination du nouveau PDG d'EDF, qui, du début à la fin, est un démenti de tous les principes républicains et les mécanismes parlementaires que vous n'avez de cesse de nous vendre depuis juillet 2008.

Au moment de la réforme constitutionnelle et, il n'y a pas si longtemps, lors de l'examen du texte en première lecture dans cette enceinte, nous avions proposé que ce soient l'ensemble des emplois nommés par le Président de la République qui fassent l'objet d'un contrôle parlementaire. Il n'en est rien. Se pose toujours la question de la liste arbitraire de postes sur lesquels les parlementaires auront un prétendu droit de regard. Pourquoi seulement ces postes ? Quel a été le critère de sélection ? Pourquoi des postes importants exigeant impartialité et indépendance vis-à-vis de l'institution présidentielle ont-ils été écartés ? À part cela, tout va bien. Et vous osez encore parler d'indépendance sans sourciller !

Le projet ne concerne que sur les nominations au sein d'autorités administratives indépendantes ou de certaines entreprises publiques, écartant, de fait, les emplois les plus importants dans le fonctionnement de l'appareil d'État,…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Braouezec

… à savoir ceux de directeur d'administration centrale, de préfet ou de diplomate. Avec une procédure aussi peu contraignante, qui rend tout veto parlementaire quasi impossible, il n'aurait pourtant pas été très risqué d'introduire ces emplois dans la loi ordinaire. On aurait pu y voir le signe d'une bonne volonté de votre part. Mais, là encore, rien. Le Parlement n'aura aucun droit de regard sur ces nominations stratégiques, qui exigeraient pourtant impartialité, compétence et indépendance.

Pour ces postes-là, le chef de l'État, sorte de roi thaumaturge, faisant fi de la séparation des pouvoirs, conservera toutes ses prérogatives, sans s'encombrer du Parlement. Par conséquent, l'audition des candidats par les commissions concernées n'aura même pas lieu, alors que ce n'est pourtant qu'un simple exercice, et non le grand oral qui conviendrait à une pratique réellement démocratique et respectueuse du Parlement et qui validerait une démarche sérieuse et volontariste.

Soyons clairs, le texte tel qu'il nous est donné à discuter aujourd'hui n'a quasiment pas changé. Les principes sont les mêmes, les progrès, toujours aussi minimes, sont totalement anéantis par la mise en place de la majorité des trois cinquièmes pour qu'un veto soit opposé à la nomination d'un emploi public. Ce pseudo-droit est inapplicable en l'état : il paraît en effet tout à fait improbable, pour ne pas dire impossible, de voir une nomination présidentielle rejetée. Le Parlement continue de ne disposer d'aucun pouvoir puisque le Président de la République peut parfaitement passer outre son avis, bien que celui-ci soit public.

Autant dire que la volonté gouvernementale d'« encadrer » le pouvoir de nomination présidentielle est nulle et non avenue. La technique du paraître, du leurre, très inspirée de Machiavel, pour qui gouverner, c'est faire croire, ne doit pas être le leitmotiv d'une démocratie contemporaine. C'est pourtant le fil rouge du Président de la République et de ce gouvernement qui, avec cette loi comme avec les autres lois organiques ou encore la réforme territoriale à venir, suivent très directement le penseur italien, pour qui la question fondamentale est d'obtenir le pouvoir, et de le conserver.

En guise de renforcement des droits du Parlement, vous nous proposez donc ce texte qu'il serait malvenu de voter tant la procédure qu'il met en oeuvre et les moyens qu'il offre au Parlement sont minimes. C'est pourquoi le groupe GDR votera contre ce projet de loi, qui relève plus de la mascarade que d'autre chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Je remercie les différents orateurs qui se sont exprimés, avec, parfois, une certaine modération, parfois, un certain excès, mais cela fait partie du débat démocratique et je ne m'en offusque pas du tout.

Les thèmes qui ont été abordés cet après-midi l'avaient déjà été à l'occasion de la première lecture. Point n'est donc besoin de les reprendre un par un, en tout cas sur le fond.

Que la philosophie de votre groupe sur l'organisation des pouvoirs publics soit différente de la nôtre, monsieur Candelier, c'est tout à fait normal et légitime, mais il me paraît tout de même osé de contester la légitimité démocratique de l'élection du Président de la République, élu au suffrage universel depuis 1962. Néanmoins, je comprends que vous soyez dans une autre configuration.

Vous avez souligné que le Gouvernement faisait une utilisation de votre point de vue excessive de la procédure accélérée.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Depuis le mois de mars 2009, date à laquelle la nouvelle Constitution commence à entrer en vigueur, le taux de procédures accélérées sur les projets ou propositions de loi est de 22 %...

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Oui, mais il était de 43 % précédemment. Des efforts substantiels sont donc réalisés.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Puis-je également faire remarquer que le calendrier nous contraint parfois, par des dates butoirs, à recourir à la procédure accélérée ?

Monsieur Braouezec, votre propos était vraiment tout en nuances ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Comme tous les députés !

S'agissant de la nomination de M. Proglio, je redis quelque chose que tout le monde sait ici : il a été auditionné par la commission alors que, juridiquement, rien ne l'imposait.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Je n'ai pas dû bien comprendre.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Je vous remercie, cela m'aidera sûrement beaucoup.

Je pense que vous devriez remercier M. Proglio et ceux qui ont organisé cette audition qui vous a permis de lui poser toutes les questions que vous souhaitiez.

Je ne reviendrai pas sur la fameuse liste. La Constitution dit clairement qu'une loi organique détermine les emplois dont il s'agit ici. Sont concernées les fonctions dirigeantes d'organismes à compétence nationale ou dont l'action peut avoir des répercussions à l'échelon national. Je crois très sincèrement que ce n'est pas la peine d'y revenir sans cesse. Nous sommes dans la stricte application de la réforme de la Constitution.

Monsieur Jean-Christophe Lagarde, nous n'avons pas retenu le président de la CNIL sur la liste proposée car celui-ci est élu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Christophe Lagarde

Mon propos portait sur les membres désignés par le Président !

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Par ailleurs, le président de la Commission consultative du secret de la défense nationale est choisi sur une liste établie par le vice-président du Conseil d'État, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de le Cour des comptes. Les choses sont très claires.

Je remercie les autres orateurs. Monsieur Urvoas, je ne souhaite pas rentrer dans la discussion entre le Sénat et l'Assemblée nationale, mais il me semble que le principe de l'audition devrait être quasi automatique. Doit-elle être publique ? Le Gouvernement souhaite que le Sénat et l'Assemblée nationale, comme sur l'article 3, s'entendent sur ce sujet. (Applaudissements et « Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'appelle en premier lieu, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi organique relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Il s'agit d'un amendement de coordination.

(L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l'amendement n° 2 .

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Il s'agit de corriger ce qui est vraisemblablement un oubli. Tout le monde est d'accord pour dire que l'un des rares intérêts de la procédure réside dans le fait que les personnalités proposées à un poste soient auditionnées, mais cette audition n'est prévue par aucun texte. Puisqu'il y a consensus, il suffit d'inscrire ce point, sinon dans la loi organique, du moins dans la loi ordinaire.

Il faudra d'ailleurs que ces auditions aient un certain lustre. Si nous procédons comme il nous arrive parfois de le faire, par flopées de questions avant de laisser la personne le soin de nous noyer dans ses réponses, ce ne sera pas suffisant. Le Bureau de l'Assemblée pourrait-il y réfléchir ? Je pense qu'il faudrait appliquer, comme dans les pays voisins, un système « une question, une réponse ». Nous aurions ainsi des auditions aussi intéressantes que celles que les futurs commissaires européens ont subies devant le Parlement européen il y a quelques semaines, et qui ont fait l'admiration de tous les démocrates.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles de La Verpillière

Défavorable, mais uniquement en tant que cet amendement porte sur la loi organique. Dans la loi ordinaire, nous avons émis sur la même proposition un avis favorable.

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Le Conseil constitutionnel a indiqué, dans sa décision du 3 mars 2009 relative à France Télévisions, qu'une telle règle ne relevait pas du domaine de la loi organique. C'est pourquoi j'émets, à regret, un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Oui, monsieur le président.

(L'amendement n° 2 est retiré.)

(L'article 1eret l'annexe amendée sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Avec votre accord, nous procéderons aux éventuelles explications de vote à la fin de la discussion des articles sur le projet de loi ordinaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique.

(L'ensemble du projet de loi organique est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi relatif à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution sur lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je suis saisi d'un amendement n° 1 du rapporteur, qui est un amendement de coordination.

(L'amendement n° 1 , accepté par le Gouvernement, est adopté.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'amendement n° 2 rectifié a été défendu par M. Urvoas.

Quel est l'avis de la commission ?

Debut de section - PermalienHenri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement

Sur le fond, le Gouvernement n'a aucune espèce d'opposition ; simplement, c'est un débat entre l'Assemblée nationale et le Sénat. J'émets un avis de sagesse, mais chacun en aura compris la signification.

(L'amendement n° 2 rectifié est adopté.)

(L'article 1er et l'annexe, amendés, sont adoptés.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas pour une explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Urvoas

Le groupe SRC sera fidèle à son vote en première lecture, où nous nous étions abstenus car, si le principe nous paraît intéressant, les modalités fixées par la Constitution, rendent le veto impossible à atteindre. Nous nous abstiendrons donc de nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

Vote sur l'ensemble

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2010 (nos 2239, 2268).

La parole est à M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, je vous prie d'excuser l'absence momentanée de Christine Lagarde, due à un simple problème d'avion. Elle interviendra après la discussion générale.

Il y a un peu plus d'un an, la crise menaçait l'équilibre du système financier et économique mondial, avant de s'étendre, avec une ampleur inédite, nous l'avons beaucoup dit, à l'ensemble du monde. En France, nous avons répondu à l'urgence de cette crise en mettant en oeuvre tous les moyens fiscaux et budgétaires pour soutenir l'économie et pour aider nos concitoyens à surmonter cette épreuve.

Cette action a d'ores et déjà porté ses fruits. Les chiffres publiés depuis la fin de l'année dernière montrent les premiers signes d'une reprise économique, qu'il faut évidemment encore conforter. Nos perspectives de croissance pour 2010 – 1,4 % – nous place, avec l'Allemagne – à 1,5 % –, dans le peloton de tête des pays dont la reprise est la plus marquée. Nous sommes en effet à 0,4 point au-dessus de la prévision de croissance pour l'ensemble de la zone euro, estimée à 1 % selon les dernières actualisations du FMI. Si la comparaison par rapport à nos voisins est à notre avantage, elle ne doit évidemment pas masquer certaines de nos faiblesses, qui, si nous ne les surmontons pas rapidement, constitueront autant de handicaps pour l'avenir.

Car c'est aujourd'hui, en cette période de crise, que notre avenir se joue. Personne ne peut ignorer cette réalité. Nous ne voulons pas passer à côté des évolutions que va connaître le monde de l'après-crise : évolution technologique probablement, évolution des savoirs, évolution des procédures, des méthodes et des processus, notamment financiers. C'est aujourd'hui qu'il faut réfléchir aux emplois de demain.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il serait si facile d'expliquer qu'il ne faut pas tout attendre de l'État, mais le Gouvernement a la conviction qu'il est possible de se donner un avenir en investissant maintenant. Cette conviction est ancrée en nous, elle détermine depuis bientôt trois ans nos priorités budgétaires. Celles-ci sont tournées vers la recherche, l'investissement, l'enseignement supérieur, la compétitivité et le développement durable. S'agissant par exemple de l'enseignement supérieur et de la recherche, vous savez que nous leur avons assuré, depuis 2007, une augmentation de crédits supérieure à 1,8 milliard d'euros chaque année. Et puis il y a aussi l'extension du crédit d'impôt-recherche, dont chacun peut constater le succès dans sa propre circonscription, et la suppression de la taxe professionnelle, elle aussi attendue par les entreprises. Toutes ces réformes modifient en profondeur le paysage de la fiscalité des entreprises…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…pour inciter à l'innovation et pour lever le joug qui dissuade l'investissement. Enfin, le Grenelle de l'environnement a marqué une rupture dans l'approche que nous avions jusqu'ici du développement durable.

Alain Juppé et Michel Rocard, dans le rapport qu'ils ont remis au Président de la République et dont ce collectif est la conséquence, rappelaient qu'il y a deux façons de mal préparer l'avenir : accumuler les dettes pour financer les dépenses courantes et, peut-être surtout, oublier d'investir dans les domaines moteurs. Le choix français est à cet égard cohérent avec celui de nos principaux partenaires européens d'investir pour l'avenir : c'est le cas notamment du Royaume-Uni, avec la mise en place du Strategic Investment Fund pour financer les projets innovants de haute technologie ; quant à l'Allemagne, elle prévoit un programme de soutien à l'innovation dans les PME pour un montant de 2 milliards.

Par ailleurs, personne ne peut douter de la détermination du Gouvernement à redresser l'équilibre de nos finances publiques – l'actualité vient encore de le rappeler avec l'organisation, la semaine dernière, de la conférence sur le déficit – ni reprocher au Gouvernement de ne pas penser à l'avenir car il démontre chaque jour le contraire à travers son action. La réflexion sur les priorités nationales à laquelle nous a appelé le Président de la République s'inscrit dans la même vision, dans la même stratégie. Elle s'en démarque uniquement par le caractère exceptionnel des moyens que nous sommes prêts à mobiliser pour ne pas être les esclaves d'un avenir qui nous échapperait. Plutôt que de grand emprunt, je préfère parler du grand investissement financé par l'emprunt. Sujet de réflexion inédit, il a suscité des débats. Certains ont voulu enfermer la discussion dans la seule et unique question de l'emprunt, comme si le projet se résumait à vouloir donner un successeur à M. Pinay,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Vous rêvez de l'être ! mais vous n'avez pas l'âge d'être un Pinay.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…à M. Giscard d'Estaing ou, plus près de nous, à M. Balladur. La polémique est passée à côté de l'enjeu mis en lumière par cette réflexion : comment réaliser les investissements nécessaires pour renforcer durablement la compétitivité de notre économie sans compromettre le redressement de nos finances publiques ?

Notre réponse est dans le collectif présenté à l'Assemblée nationale. Elle repose sur quatre principes : la sélectivité des projets, la recherche de l'excellence, la mise en place d'une gouvernance de l'emprunt tout à fait exceptionnelle et le mode de financement de ces investissements accompagné par un effort supplémentaire de réduction des dépenses courantes.

Tout d'abord, quelles sont les priorités d'investissement ? La commission co-présidée par Alain Juppé et Michel Rocard a eu le mérite d'écouter, de chercher à comprendre, et de tracer des voies pour éclairer l'avenir. Elle a fait ressortir un certain nombre de domaines prioritaires très resserrés. Ceux-ci se retrouvent dans les ouvertures de crédits proposées dans ce projet de loi de finances rectificative : 19 milliards pour l'enseignement supérieur, la formation et la recherche, 6,5 milliards pour l'industrie et pour les PME, 5 milliards pour le développement durable, 4,5 milliards pour le numérique, soit 35 milliards au total tournés vers l'investissement et l'innovation. Les projets ainsi financés sont extrêmement divers, des campus d'excellence à la promotion des nouveaux usages dans le numérique, de la conception du véhicule du futur à la recherche dans le domaine des biotechnologies. Mais tous ces projets se rejoignent dans la même ambition : celle de l'excellence.

« Excellence » est un mot dont on a presque perdu l'usage à force de céder aux pressions du nivellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Avec Sa Majesté Impériale, on est servi pour le nivellement !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Rassurons-nous : l'excellence ne se réalise pas contre ce qui existe. Pour prendre l'exemple de l'enseignement supérieur et de la recherche, nous allons consacrer presque 8 milliards d'euros à des campus d'excellence, avec l'objectif de faire de ces partenariats entre des écoles ou des universités et des organismes de recherche ou des entreprises, des pôles de visibilité mondiale. Nous mobilisons un milliard de plus pour la constitution du plus important campus scientifique et technologique européen, sur le plateau de Saclay. On a donc bien d'un côté ce qui relève des campus d'excellence et de la partie du grand emprunt qui, à travers une sélection de cinq à dix projets, vient s'y ajouter et, de l'autre, un milliard de plus sur Saclay. Nous sommes dans une logique très forte d'aide à nos universités. Avec l'émergence de ces pôles universitaires et de recherche, nous nous donnons les moyens de ne plus jouer dans la deuxième division du classement international de Shanghai, souvent cité. Il faut faire des choix, mais nous n'oublions pas les autres universités. Des financements sont ainsi prévus dans ce collectif pour tous les projets qui, sans être labellisés « campus d'excellence », comportent des points forts qui en feront dans leur domaine des acteurs de référence : un milliard ira à des laboratoires et un autre milliard à des équipements spécifiques. Au total, 3,5 milliards permettront de mieux valoriser les résultats de la recherche publique. S'il y a des projets émanant d'universités ou de labos qui n'ont pas été retenus dans le cadre des campus, des moyens leur seront donc consacrés. Ces investissements d'avenir ne remettent pas en cause la progression des moyens des autres universités et des autres organismes de recherche, qui demeurent évidemment une priorité budgétaire.

On ne peut cependant viser l'excellence sans un cadre rigoureux de mise en oeuvre et sans une gouvernance d'exception, c'est-à-dire adaptée à la spécificité du sujet qui nous occupe aujourd'hui.

L'exception se traduit tout d'abord par l'ouverture de crédits sur des programmes budgétaires spécifiquement dédiés. Au sein des missions déjà existantes, nous isolons donc les crédits par nature exceptionnels des autres dépenses de l'État.

Nous avons également fait le choix d'un décaissement en bloc à des opérateurs chargés de la gestion de ces crédits exceptionnels. Il ne traduira évidemment pas la réalité des décaissements chez les opérateurs car certains investissements s'inscriront nécessairement dans la durée. Cependant nul ne pourrait imaginer une cohabitation durable entre les crédits ordinaires des ministères et des crédits relevant d'un financement exceptionnel. Une telle cohabitation aurait pu conduire à une certaine porosité entre les deux, ce que nous avons voulu éviter.

Pour résumer, nous aurons donc des programmes spécifiques et un déblocage en bloc des crédits vers des opérateurs qui seront les acteurs des dépenses du grand emprunt.

Plus que l'architecture budgétaire retenue, c'est en réalité la procédure d'instruction des projets et de mise en oeuvre des investissements d'avenir qui les distinguera de toutes les autres interventions de l'État et de ses opérateurs. Dans cette démarche, l'évaluation est un enjeu majeur, à tous les stades du projet, depuis la sélection sur la base d'appels à projet lancés avec le concours d'experts reconnus jusqu'à la mesure des résultats obtenus.

La recherche d'un effet de levier sur les modes de financements autres que purement publics – ceux du secteur privé – ne peut que servir l'objectif d'un investissement intelligent, qui ne soit pas nécessairement porteur d'une rentabilité financière mais au moins d'un retour économique, social ou environnemental pour la société.

Notre objectif reste le même : que ces 35 milliards d'euros génèrent en réalité un investissement global de 60 milliards, grâce à cet effet de levier.

Dans l'architecture qui sera mise en place, M. René Ricol, le commissaire général à l'investissement, jouera un rôle central. Avec tous les ministères concernés, il aura la charge de préparer les outils de contractualisation avec les opérateurs gérant les fonds au quotidien. Des conventions détermineront précisément leur emploi en cohérence avec les politiques menées par le Gouvernement ainsi que les indicateurs destinés à mesurer les résultats attendus.

Un comité de surveillance sera mis en place, dans le prolongement de la mission qui avait été confiée à M. Juppé et M. Rocard. Il veillera particulièrement au suivi et aux résultats de la mise en oeuvre du programme d'investissements.

Quel rôle jouera le Parlement dans cette gouvernance ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Nous ne vous demandons pas de signer un chèque en blanc de 35 milliards d'euros. C'est pour cela que ce n'est pas une grande illusion !

La justification des crédits demandés éclaire chacun des objectifs visés par ces investissements sans pour autant s'enfermer dans la définition a priori de projets trop précis. En pratique, cette tâche sera dévolue à chacun des opérateurs dont c'est le métier, la vocation, l'expertise.

Il reviendra donc à ces opérateurs, pilotés par le commissaire à l'investissement et en liaison avec les ministères concernés – qui pourrait penser le contraire ? – de préciser les choix d'investissements, dans le respect des enveloppes et du cadre décidés.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Ils devront évidemment en rendre compte au comité de surveillance où siégeront des parlementaires, et surtout à vous-mêmes, au Parlement, par le biais de l'information que nous vous proposons d'introduire chaque année en annexe du projet de loi de finances. À ma connaissance, Gilles Carrez, le rapporteur général, propose d'ailleurs d'y apporter des améliorations.

Nous n'avons pas limité l'exemplarité à la définition de la gouvernance. Elle inspire également nos choix d'investissements d'avenir.

Au départ, l'annonce de l'emprunt national a pu dérouter : pourquoi ajouter de la dette à une dette que tout le monde s'accorde évidemment à trouver beaucoup trop lourde ? Cela étant, en ce qui concerne ses modalités, nous avons pris des décisions raisonnables, raisonnées et responsables qui doivent lever les inquiétudes initiales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ça va l'autosatisfaction ! Les chevilles ne gonflent pas trop ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

La première de ces modalités tient aux conditions d'emprunt retenues. Après avoir envisagé un appel au public, nous avons jugé qu'il fallait se financer au moindre coût, c'est-à-dire en allant sur les marchés.

Le remboursement des 13 milliards d'euros prêtés aux banques pendant la crise a permis de limiter le recours à l'emprunt à 22 milliards d'euros. Cette somme sera empruntée sur les marchés financiers dans le cadre du programme d'emprunts de l'Agence française du Trésor.

Nous avons écarté l'appel aux particuliers pour ne pas avoir à payer un surcoût d'intermédiation des réseaux bancaires, soit entre 1 % et 2 % de plus sur le montant des sommes empruntées. Cette solution qui n'avait aucun sens a été écartée.

Complément du choix précédent : les fonds gérés par les opérateurs seront obligatoirement déposés au Trésor, afin de limiter l'augmentation de la dette publique. En effet, l'État perçoit ainsi une ressource de trésorerie qui lui permet de réduire son recours à l'emprunt de court terme.

L'emprunt de moyen et long terme sera levé en bloc mais les opérateurs qui ne le dépenseront pas d'un seul coup seront obligés de déposer les fonds auprès de l'AFT ; ce sera autant que nous n'aurons pas à emprunter à court terme. En 2010, l'impact des dépenses d'avenir sur la dette publique ne sera donc pas de 35 milliards d'euros mais de l'ordre de 5 milliards d'euros.

Enfin, pour conclure sur ce chapitre, j'insisterai sur une idée particulièrement importante, celle de réorienter les moyens des dépenses courantes vers les dépenses d'investissement.

Ce mot « investissement » traduit bien le souhait exprimé par la commission : les dépenses d'avenir doivent donner lieu à la constitution d'actifs. De ce point de vue, l'objectif fixé par la commission à 60 % est plus qu'atteint.

Si l'on considère l'ensemble des dotations qui ne sont pas consommables, des prises de participations et des mécanismes de prêts, 63 % des dépenses d'avenir se traduiront par un enrichissement du patrimoine de l'État et de ses opérateurs. Le taux atteint même 71 %, si l'on ajoute des avances remboursables.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Enfin, pour compenser la charge du financement de ces investissements d'avenir, nous avons décidé de faire un effort supplémentaire sur la baisse des dépenses courantes : d'un côté, les dépenses non consommables qui représentent entre 63 % et 71 % de l'emprunt – fonds de dotation, avances, prêts, etc. – constituent un actif qui ne pèse pas sur le déficit ; de l'autre côté, les 500 millions d'euros de charge de la dette du grand emprunt, inscrits dans ce collectif budgétaire, sont gagés par une diminution des charges de fonctionnement du budget de l'État. Ainsi 500 millions d'euros de crédits sont annulés, en dehors de la réserve de précaution, sur les budgets des ministères.

Nous programmons donc 500 millions d'euros d'économies sur les dépenses actuelles, afin de financer nos dépenses d'avenir.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Au total, l'impact des investissements d'avenir sur le déficit sera d'environ 2,5 milliards d'euros par an, soit 0,1 point de PIB par an, parce que nous avons su faire des choix responsables dans la nature des investissements, quand certains nous accusaient de ne pas vouloir les faire.

L'amorce d'une sortie de crise se précise depuis la fin de l'année dernière, ce qui améliore nos perspectives financières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Les perspectives financières de ceux qui sont dans le bouclier fiscal !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Quand on marche à reculons, on finit par voir la sortie !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Ce collectif nous permet d'actualiser nos prévisions. Pour 2010, le déficit public sera limité à 8,2 % du PIB, ce qui représente une amélioration de 0,3 % par rapport à la prévision précédente.

Certes, le déficit budgétaire ressortant du projet de collectif s'élève à 149,2 milliards d'euros, un niveau historiquement élevé qui est dû à l'ouverture de 35 milliards d'euros de crédits destinés au financement des dépenses d'avenir. Cependant il ne doit masquer l'amélioration bien réelle de nos perspectives financières, due aux premiers effets de la reprise économique que nous avons déjà constatés sur les rentrées fiscales de la fin de l'année dernière : 2 milliards d'euros de recettes supplémentaires en impôts sur les sociétés et 1,5 milliard de plus en TVA, pour ne prendre que les postes les plus importants.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Nous avons passé de nombreuses discussions budgétaires à dire que cela allait moins bien ! Nous pouvons aussi, de temps en temps, signaler que les recettes sont meilleures !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Quand on est au fond de la cale et qu'on y reste, ça ne va pas moins bien !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je ne saute pas de joie comme un cabri à cette tribune, mais on n'est pas obligé de toujours tout peindre en noir ! Le pessimisme n'est pas non plus le gage d'une bonne gestion.

Avec la réactualisation du taux de croissance attendu cette année, l'amélioration se confirme en 2010. Dans l'ensemble, et malgré l'impact de la décision du Conseil constitutionnel qui se traduit par une diminution de 2,2 milliards d'euros des recettes fiscales et non fiscales de l'État, les prévisions de recettes sont en hausse de 3 milliards d'euros cette année.

En tenant compte de l'amélioration des perspectives économiques sur les recettes sociales, le déficit public est donc évalué à 8,2 points de PIB, soit 0,3 point de moins que dans les prévisions réalisées pour la présentation du PLF, fin décembre, et ce malgré les coûts du financement des investissements d'avenir et de la censure du Conseil constitutionnel – estimé à 0,1 point chacun –, qui sont inclus.

Évidemment, personne ne peut se réjouir d'un tel montant de déficit qui reste préoccupant quelle que soit la manière dont on le regarde. Je veux juste y voir un coup d'arrêt à sa dégradation continue…

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

… et un nouveau point de départ vers son passage sous le seuil de 3 % en 2013.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Réduire notre déficit de 5 % – c'est-à-dire de 100 milliards d'euros – en l'espace de trois ans, tel est l'objectif que nous avons transmis à la Commission européenne.

Le retour de la croissance nous mettra sur ce chemin difficile et nous permettra d'en faire la moitié – 50 milliards d'euros –, grâce à un effet mécanique de la croissance sur les recettes, au rattrapage des recettes fiscales et à la fin des mesures du plan de relance synonyme de moindres dépenses.

Cette croissance que nous devons engranger, nous allons la chercher en vous soumettant ce projet de loi : l'investissement est un gage et un moteur de croissance.

Cependant, la croissance ne suffit pas. Nous ne pourrons pas toucher au but sans faire un effort partagé, résolu et puissant de maîtrise des dépenses publiques.

Lorsque l'on constate un écart aussi important entre nos recettes et nos dépenses, alors même qu'en France les prélèvements obligatoires, donc les recettes publiques, sont parmi les plus élevées au monde…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'est pas vrai ! Il faut arrêter avec ça !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

…c'est bien que le problème se situe au niveau de la dépense.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Or les dépenses sont l'affaire de tous : État, sécurité sociale et – oserai-je le dire ? – collectivités locales.

Chaque année, l'État apporte près de 100 milliards d'euros de concours aux collectivités territoriales, sous différentes formes, et 50 milliards d'euros aux organismes de sécurité sociale.

Les interactions financières entre ces trois acteurs de la dépense publique sont nombreuses et fortes. Il serait donc absolument vain de vouloir faire porter l'effort sur seulement une partie d'entre eux, même si l'État représente la majeure part du déficit puisque tout le monde se retrouve en lui, à un moment donné.

Une conférence sur le déficit s'est tenue la semaine dernière à l'initiative du chef de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'était pas une conférence mais une messe !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Cette conférence se situe dans le cadre d'un processus de restauration de nos finances publiques à l'issue de la crise.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

De nombreux travaux opérationnels, concrets et précis ont été lancés. À partir du printemps, ils déboucheront sur des décisions qui, j'en suis persuadé, seront partagées.

D'ailleurs, le programme de stabilité que nous venons de transmettre à la Commission traduit cette démarche.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il repose sur un effort de maîtrise des dépenses représentant environ 50 milliards d'euros d'économies d'ici à 2013 : il s'agit d'un programme d'économies pluriannuel et non pas annuel comme j'ai pu le lire.

Cet effort portera sur tous les types de dépenses, y compris les dépenses fiscales et sociales, les niches auxquelles vous accordez une attention si vigilante. Il ne s'agit pas de faire des coupes brutales ou aveugles dans les dépenses comme on l'entend, mais de ralentir fortement leur rythme de progression.

Pour conclure, je dirai que notre politique budgétaire poursuit deux objectifs cohérents et liés.

Premier objectif : soutenir la croissance future grâce à ce collectif qui constitue un encouragement massif à l'investissement public et privé autour de priorités porteuses d'avenir. La croissance de demain, ce sont les recettes de demain.

Deuxième objectif : réduire les déficits grâce à une maîtrise des dépenses. Dans le cadre de la conférence sur le déficit qui se réunira de nouveau au printemps, je dois présenter un programme cohérent d'accélération de la réduction de la dépense publique, en incluant les niches fiscales et sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

Est-ce qu'il sera question du bouclier fiscal ?

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Comme vous le voyez, mesdames, messieurs les députés, le Gouvernement a une ambition forte, et il met tout en oeuvre pour que la sortie de crise se traduise par un surcroît de croissance pour la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances rectificative est exceptionnel à deux titres.

En premier lieu, il prévoit l'ouverture de 35 milliards d'euros de crédits. Depuis plusieurs années nous appliquons la règle du « zéro volume », selon laquelle les crédits n'augmentent, d'une année à l'autre, qu'à proportion de l'inflation, soit une marge de 3 à 4 milliards d'euros. Dans le cas présent, et à titre exceptionnel, l'engagement prévu s'élève à 35 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Exceptionnel, le texte l'est aussi au regard des règles d'utilisation et de suivi des crédits ; j'insisterai longuement sur cet aspect, qui intéresse le contrôle du Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ce projet de loi s'inspire directement des excellents travaux de la commission Juppé-Rocard, qui avait insisté sur la nécessité de redresser l'effort d'investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

De fait, l'évolution des trente dernières années révèle que les investissements, exception faite des crédits militaires, ne représentent plus que 5 ou 6 % du budget de l'État – soit 6 ou 7 milliards d'euros –, contre 20 % autrefois, et ce même en tentant compte de la décentralisation. Bref, les investissements sont désormais réduits à la portion congrue.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est pourquoi le texte propose, dans le sillage de la commission Juppé-Rocard, de mettre l'accent sur les dépenses d'investissement d'avenir, susceptibles de générer de la croissance supplémentaire et de la valeur ajoutée dans des secteurs modernes. Ces dépenses concernent l'enseignement et la recherche, les innovations articulant la recherche et les processus de développement industriel, et le développement durable. Pour résumer,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…les deux priorités sont la matière grise et l'économie verte.

Je le dis pour souligner aussi les investissements que le texte ne retient pas, investissements traditionnels que sont, par exemple et notamment, les infrastructures de transports. La commission, après un débat approfondi, a finalement décidé de les exclure ; loin de moi, d'ailleurs, l'idée qu'ils ne créent pas de croissance ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Sandrier

C'est pourquoi rien n'est prévu pour le ferroviaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cependant nous avons tous en tête l'exemple de l'AFITF, l'Agence de financement des infrastructures de transport de France : dotée, il y a quatre ans, de 4 milliards d'euros provenant en partie de la privatisation des sociétés autoroutières, elle avait consommé, trois ans plus tard, la totalité de cette somme.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

En matière de transports, les besoins ressemblent à un puits sont fond ; c'est donc judicieusement que le choix de la commission s'est porté sur les investissements que j'évoquais, et sur eux seuls. Aussi me verrai-je obligé d'émettre un avis défavorable aux quelques amendements tendant à redéployer les crédits vers les infrastructures de transports.

Les investissements sont donc très ciblés. La recherche et l'enseignement supérieur représentent 20 des 35 milliards d'euros prévus ; quant au soutien à quelques secteurs stratégiques comme la santé, l'énergie et le développement durable – lequel, avec les véhicules du futur, concerne indirectement les transports, qu'ils soient terrestres, maritimes ou aériens –, ainsi que le numérique. Une telle approche n'est pas sans rappeler les grandes interventions de l'État au cours des années soixante et soixante-dix. On n'en retient que les échecs, qu'il ne faut certes pas nier, tels que le plan calcul ; mais n'oublions pas les grandes réussites : le transport aérien, le domaine aérospatial ou encore l'énergie nucléaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Notre balance commerciale évolue d'ailleurs au gré des ventes d'Airbus, ce qui résulte directement de l'engagement massif de l'État dans les années soixante et soixante-dix.

Dans un souci de modernisation, l'État, au lieu d'intervenir directement sur l'ensemble de la chaîne, doit jouer un rôle de facilitateur en investissant dans le cadre de réseaux et de partenariats avec le secteur privé. Cette logique appelle de nouvelles règles d'utilisation des fonds, dont je souhaite vous dire quelques mots.

En premier lieu, contrairement à la règle budgétaire traditionnelle, les crédits seront étanches, puisqu'ils seront affectés à des opérateurs, et ce dès 2010. La question, dès lors, est la suivante : comment éviter les écueils bien connus de la débudgétisation ? (Rires et approbations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Comment profiter pleinement des avantages offerts par des procédures extra-budgétaires ?

La première réponse du Gouvernement, dans la lignée de la commission Juppé-Rocard, est de constituer, pour la majeure partie des 35 milliards concernés, un patrimoine d'actifs, lesquels, bien sûr, sont plus ou moins risqués et plus ou moins profitables. Néanmoins la contrepartie, comme vient de l'indiquer M. le ministre, est que, pour 73 % de l'emprunt, soit 25 milliards d'euros, les actifs seront, soit conservés au sein de la trésorerie de l'État sous la forme d'actifs « non consomptibles »,…

Debut de section - PermalienPhoto de René Couanau

L'argent reste dans les caisses, mais il se déprécie !

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…soit utilisés pour des prêts, des avances ou des garanties. L'expérience montre que, en général, l'État recouvre ces prêts ou ces avances : en témoigne l'exemple du secteur aéronautique. Quant aux garanties, il arrive qu'elles soient appelées, mais c'est assez rare.

Troisième aspect : les prises de participations via des organismes tels que OSEO et le FSI, le Fonds stratégique d'investissement. La Caisse des dépôts aura bien sûr un rôle important à jouer. L'objectif de la constitution d'actifs est d'abandonner les abonnements budgétaires au profit d'une sélection de projets par des jurys et des panels d'experts, selon des critères d'évaluation précis. Une telle méthode permet aussi d'associer les financements privés, à l'exemple des démonstrateurs, pour lesquels ces financements représentent au moins 30 %.

Je souhaite néanmoins interroger M. le ministre sur ce sujet essentiel que sont les dotations non consomptibles.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cette technique, monsieur le ministre, est utilisée depuis trois ans pour les 3,7 milliards d'euros résultant de la cession d'actifs d'EDF. (Approbations sur les bancs du groupe UMP.) Cette somme a été placée sur un compte spécial et, depuis, plusieurs questions restent posées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

D'abord quand les dotations et les intérêts qui leur correspondent seront-ils versés aux universités, et selon quel taux ? Quand les partenariats public-privé seront-ils signés ? Le premier d'entre eux, dit-on, ne le sera pas avant la fin de 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Bref, quand les opérations de rénovation immobilière de nos universités commenceront-elles ? Toutes ces questions,…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…nous les avons posées lors de l'audition, par notre commission des finances, du commissaire général à l'investissement, M. Ricol. Si le rythme d'engagement des 35 milliards prévus devait être le même que celui des 3,7 milliards destinés à la rénovation immobilière des universités, il y aurait beaucoup de souci à se faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Dès lors que l'essentiel de la somme sera constituée par des actifs, nous devrons être très vigilants à la rapidité de son emploi ;…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…je soumettrai sur ce point quelques propositions à notre assemblée.

Deux mots sur le recours aux opérateurs.

Cette méthode présente l'immense avantage de sanctuariser les crédits, puisque, en échappant ainsi à la régulation budgétaire et à la norme de dépense, ils ne risquent pas d'être annulés. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe UMP.) Ils feront donc l'objet d'un suivi comptable spécifique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

C'est en effet toute la question, monsieur Mariton. Ce n'est pas parce que les crédits sont étanches et délégués à des opérateurs qu'ils seront forcément employés avec efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il y a quelques jours, j'ai rencontré l'équipe de l'Agence nationale de la recherche, dont la méthodologie m'a semblé particulièrement intéressante ; c'est d'ailleurs celle qu'emploient les chercheurs du monde entier depuis une quinzaine d'années : appels à projets, formation de jurys d'experts internationaux, mise en réseau systématique avec des financements privés et suivi assuré par des indicateurs, moyennant des exigences de résultats. C'est une bonne méthodologie, dont je donne crédit au Gouvernement ; néanmoins, je le répète, nous devrons être extrêmement vigilants.

Comme l'a observé M. le commissaire général aux investissements en répondant à M. Giscard d'Estaing, même si la totalité des fonds est déléguée aux opérateurs dès cette année, y compris à la Caisse des dépôts, il ne faut pas en autoriser l'utilisation intégrale de façon automatique : la délégation des crédits doit se faire par tranches.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cette remarque m'a paru frappée au coin du bon sens.

J'évoquerai rapidement, car M. le ministre l'a déjà fait, l'impact sur les finances publiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il convient évidemment de distinguer entre l'impact budgétaire et l'impact pour la comptabilité nationale. Le premier avoisine les 35 milliards d'euros, puisque l'État versera la totalité des crédits aux opérateurs dès cette année.

Cela explique, au passage, que notre prévision de déficit pour 2010 passe de 117 à 139 milliards d'euros. Cependant, en comptabilité nationale, dès lors qu'il y a constitution d'actifs, on change de catégorie. Si une partie des fonds n'est pas utilisée – je pense notamment aux dotations –, seuls les intérêts annuels décidés par arrêté du ministre au titre des fonds placés auprès des opérateurs peuvent être considérés comme des dépenses. Le gros avantage, c'est que cela garantit une pluriannualité de la dépense : tout ne sera pas consommé en une seule fois.

Il convient d'établir, dans divers programmes, une importante distinction entre le consomptible et le non-consomptible. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe UMP.) Mes chers collègues, en votant ce texte, nous n'allons pas entériner le rapport, souvent retenu mais purement indicatif, de 25 % de consomptible pour 75 % de non-consomptible.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Il faudra probablement que ce rapport évolue dans le temps, car la ligne de partage entre consomptible et non-consomptible n'est pas immuable. Voyez le programme des instituts thématiques d'excellence en matière d'énergies décarbonées : compte tenu des projets retenus et des besoins immédiats, il n'est pas impossible qu'il faille, dans un premier temps, légèrement dépasser les 25 %.

Je vais terminer mon intervention en abordant quelques points complémentaires concernant le rôle du Parlement.

Nous aurons ainsi à examiner un amendement adopté par la commission des finances et qui demande que soit transmises à l'Assemblée, avant signature, toutes les conventions qui seront passées entre l'État et les opérateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Même si, à peine créés, les crédits de ces programmes quittent le budget de l'État dès 2011, il faut – c'est l'objet d'un autre amendement – qu'un « jaune » budgétaire spécifique nous informe de manière très précise sur l'utilisation que les différents opérateurs feront des crédits qui leur auront été délégués, faute de quoi le Parlement ne pourra pas remplir son rôle. Quant aux rapporteurs spéciaux et aux rapporteurs pour avis, ils devront être à même, chacun dans son domaine, de suivre à l'intérieur des budgets des opérateurs l'utilisation des crédits de l'emprunt national.

Je veux enfin évoquer l'article 1er du projet de loi.

La commission des finances a adopté un amendement qui vise à affecter au budget de l'État la taxe sur les bonus versés aux professionnels des marchés financiers, au-delà d'un certain montant, au titre de l'exercice 2009.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Cet amendement de la commission des finances a fait l'objet d'un large accord. Cependant, je tiens à insister sur un point important : cette taxe ne peut pas être récurrente.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Ce n'est pas parce qu'elle est affectée au budget de l'État qu'il faudra la reconduire chaque année. Elle a son origine dans l'exercice 2009, qui a été très particulier, puisque c'est au cours de cette année que les banques ont bénéficié du soutien de l'État à travers l'accès au financement, d'une part, et à travers des prises de participation pour améliorer leur ratio de fonds propres, d'autre part.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On ne veut pas améliorer le rendement les autres années ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Même dans ce pays, pourtant bien géré et très soucieux des finances publiques, la plupart des Landesbanken auront coûté très cher aux contribuables des Länder. Et je ne parle ni des États-Unis ni du Royaume-Uni. En définitive, le pays où les déboires des banques n'auront rien coûté – ou presque rien – aux contribuables, c'est la France : il n'est pas mauvais de le rappeler. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Au contraire, à travers la société de financement et la société de prises de participation, ce sont 2,3 milliards d'euros de recettes supplémentaires que nous avons pu inscrire au budget de l'État.

Il est un autre point à ne pas oublier, monsieur Brard : dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle, le secteur qui va payer le plus…

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

…à hauteur de 150 millions d'euros, c'est le secteur financier, banques et assurances.

Par ailleurs, ce sont les banques qui, à partir de cette année, assurent les frais de supervision, ce qui est tout à fait normal. Cela nous permettra d'améliorer le versement de dividendes de la Banque de France à l'État, puisque, jusqu'à présent, c'est elle qui prenait ces dépenses en charge à travers la commission bancaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilles Carrez

Nos banques font donc un effort bien réel. N'oublions pas qu'elles créent des emplois, qu'elles sont compétitives. Ne mettons pas en péril, par un excès d'intégrisme, un secteur dont nous avons absolument besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je vous propose donc de voter, comme l'a fait la commission des finances, cet excellent projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

La parole est à M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, avec un léger décalage par rapport à l'année dernière, nous sommes invités, déjà, à l'examen d'un premier projet de collectif budgétaire, à partir, notamment, d'une proposition de grand emprunt supplémentaire, traduisant un certain nombre de priorités qui nous étaient déjà connues lorsque nous avons examiné la loi de finances pour 2010, voire le collectif de 2009.

Je suis de ceux qui regrettent que nous saucissonnions ainsi nos textes budgétaires et financiers, ce qui retire quelque lisibilité à une politique qui doit s'examiner de façon globale, cohérente.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Comment isoler ce qui nous est proposé de la politique économique, budgétaire, fiscale, qui est conduite depuis plusieurs années ?

Monsieur le ministre, vous profitez de ce texte budgétaire pour réviser vos prévisions de croissance. Nous n'avons pas d'observations particulières à formuler sur cette estimation, que nous tenons pour raisonnable…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…et qui correspond à ce que les conjoncturistes pensent de l'année économique qui s'ouvre. Vous passez de 0,75 % à 1,4 % : en effet, c'est dans l'ordre du possible, et cela vous permet de faire apparaître plusieurs recettes fiscales en hausse, ce qui ne peut nuire au décor et arrange votre raisonnement.

Toutefois, je ne suis pas sûr que la comparaison, que vous avez esquissée, avec d'autres pays soit aussi flatteuse que cela pour la France. Certes, nous nous situons dans le peloton de tête pour ce qui est de la croissance retrouvée en 2010. En revanche, contrairement à d'autres pays qui nous sont comparables, nous avons et une dette élevée, et un déficit élevé, et un chômage élevé.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Or cela n'est le cas ni pour l'Allemagne, ni pour la Grande-Bretagne, ni pour l'Espagne, ni pour d'autres pays, où l'un de ces indicateurs au moins n'est pas aussi défavorable qu'en France. Notre particularité tient au fait que, lorsque nous sommes entrés dans la crise, notre situation était plus dégradée que celle de ces pays ; nos marges de manoeuvre sont donc moins importantes.

Monsieur le ministre, je vous ai écouté avec une grande attention. Sans doute, quelqu'un qui suit d'un peu loin les questions budgétaires ne peut qu'être bluffé par votre discours.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

C'était en effet assez merveilleux.

À vous entendre, c'est tout juste si ce grand emprunt correspond à une dette supplémentaire, voire à une dépense supplémentaire. C'est sans doute la magie du verbe !

Hélas, 35 milliards d'emprunt supplémentaire, cela fait bien 35 milliards de dettes supplémentaires, 35 milliards de dépenses supplémentaires. On peut aborder la question sous n'importe quel angle, cette vérité s'impose. On a beau dire que, en fait, ce ne sont pas 35, mais 23 milliards, puisque les banques nous remboursent 12 milliards, c'est oublier que ces 12 milliards étaient considérés comme un endettement provisoire. En les comptabilisant dans les 35 milliards, d'une certaine façon, nous rendons pérenne cette dette provisoire. Pour moi, 35 n'égale pas 23. Il s'agit donc bien de 35 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

En ce qui concerne les priorités, je n'ai pas non plus d'observations particulières à faire. Celles que vous définissez sont effectivement stratégiques pour l'avenir. Nous nous interrogeons cependant sur les modalités de financement. Pour financer les dépenses correspondant à des priorités stratégiques, nous aurions pu éviter d'augmenter à nouveau la dette et de consentir diverses réductions d'impôt qui représentent autant de capacités à agir en moins pour l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Nous pourrions très facilement retrouver le montant de ce grand emprunt à travers telles ou telles décisions fiscales ou budgétaires qui ont été prises depuis 2007.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Au-delà des sensibilités politiques de ses membres, la commission des finances souhaite que nous prenions à bras-le-corps cette question de la situation financière. Cette année, comme dans la plupart de ses rapports, le rapporteur général fait une observation : emprunter davantage, c'est s'endetter davantage, c'est voir la charge de la dette augmenter. L'augmentation de la charge de la dette amoindrit d'autant les capacités de l'État à agir.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

C'est d'ailleurs le calcul du rapporteur général qui a chiffré l'augmentation de la charge de la dette à plus de 5 milliards d'euros en 2010.

Dès lors, comment revenir à une situation plus saine de nos finances publiques ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Vous avez à cet égard, monsieur le ministre, formulé un certain nombre de propositions et, jeudi dernier, s'est tenue la première conférence nationale sur les déficits publics sous la présidence et l'autorité du Président de la République. J'étais présent et je reconnais que ce fut une réunion intéressante où nous avons, les uns et les autres, pu exprimer nos points de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Est-ce que Nicolas Sarkozy a appris quelque chose ?

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Des groupes de travail ont été mis en place. Je considère que cela va dans le bon sens sauf que tout reste à faire et que tout dépend des rapports qui nous seront présentés et des conclusions que nous pourrons en tirer. Il y a un certain paradoxe, voire une contradiction, à tenir un discours extrêmement rigoureux sur la dépense publique – en décembre déjà – et, parallèlement, à présenter une augmentation de la dépense à hauteur de 35 milliards.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Il faut choisir, monsieur le ministre. En tout état de cause, il ne faut stigmatiser personne, notamment pas les collectivités territoriales. Certes leurs dépenses augmentent, mais d'une certaine façon, l'État…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…ne les a-t-il pas poussées à augmenter la dépense par le biais de mécanismes que nous avons votés ? Lorsque nous votons un remboursement anticipé du fonds de compensation de TVA, c'est bien pour encourager l'investissement des collectivités territoriales. On ne peut, d'un côté, reprocher aux collectivités territoriales de dépenser et, de l'autre, mettre en place des mécanismes qui poussent à l'investissement. On ne peut davantage reprocher aux collectivités territoriales de sortir des domaines de compétences qui sont les leurs et de les inviter systématiquement à participer aux compétences de l'État, notamment dans le cadre des contrats de projets, voire dans le cadre d'un certain nombre d'actions nouvelles.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Je pense au plan de relance, au grand emprunt qui nécessiteront sans nul doute le concours des collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Launay

C'est écrit noir sur blanc dans le rapport !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Vous dites vous-même, monsieur le ministre, que ces 35 milliards sont appelés à augmenter, compte tenu de la participation d'entreprises, mais également de collectivités territoriales qui seront vraisemblablement sollicitées pour contribuer à ces investissements. Abordons ces questions sérieusement et sans parti pris et interrogeons-nous sur l'intérêt qu'il y aurait à respecter les règles que nous nous sommes données.

Je considère avec intérêt le débat autour de la question de savoir s'il faut inscrire cette fameuse règle d'or de l'équilibre des comptes publics dans notre Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est du « vil plomb » comme aurait dit Faust !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Or cela figure déjà dans la Constitution, Jean-Pierre Brard, mais on l'a oublié. Il y a peu de temps, vous avez élevé au niveau constitutionnel les orientations pluriannuelles et la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques. Nous avons même précisé que les lois de programmation doivent s'inscrire dans l'objectif d'équilibre des comptes des administrations publiques. Comment être plus clair ?

Je fais observer qu'il existe d'autres règles, mais que celles-ci sont en permanence contournées : celles du traité de Maastricht et celles de la loi de programmation. Dans l'interview qu'il a donnée ces jours-ci dans Le Figaro, le Premier ministre ne fait que reprendre un certain nombre de règles qui normalement s'imposent à nous, mais que nous contournons dès qu'il s'agit de les appliquer. Le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a eu une appréciation extrêmement sévère, mais peut-être lucide, de la façon dont nous appliquons les règles : le Gouvernement interprète les règles de façon « laxiste », « non conforme à l'esprit de la loi » de programmation et les « vide de fait de l'essentiel de leur portée ».

Commençons par respecter les règles que nous nous fixons afin d'être en mesure de conforter la croissance, de maîtriser davantage l'évolution de la dépense publique ; je suis de ceux qui n'ont pas peur de ce travail. Je considère pour ma part que la révision générale des politiques publiques a été une occasion ratée. Il faut partir de constats plus partagés et les étendre à l'ensemble de nos politiques publiques ; des redéploiements sont possibles afin de faire en sorte que l'action publique soit la plus efficace possible. Il est également nécessaire de protéger les recettes ; sur ce sujet, nous sommes d'accord, monsieur le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

D'où ce travail que nous devons mener sur les niches fiscales et sociales. Nous ne pourrons améliorer la situation de nos finances publiques si nous n'avons pas une action concertée, coordonnée dans une politique de relance et de maîtrise de la dépense, une politique qui protège nos recettes tant que la situation de nos comptes publics n'est pas suffisamment rétablie. Nous aurons l'occasion de revenir sur tous ces sujets.

Permettez-moi de formuler une observation qui traduit un certain nombre de dysfonctionnements dans notre république, monsieur le ministre. À propos du millefeuille territorial dont on parle beaucoup, vous avez dit qu'il fallait prévoir une certaine étanchéité entre les dispositifs, mais est-ce si vertueux que cela ? Je constate que lorsque nous lançons un plan de relance, nous créons un ministère de la relance.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Lorsque nous lançons le grand emprunt, nous ne créons pas de ministère, mais nous nommons un commissaire général. À chaque nouvelle action publique, nous en rajoutons une couche dans l'organisation administrative ou gouvernementale !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

C'est une façon de lutter contre le chômage ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Ce n'est pas une couche supplémentaire, mais un élément supplémentaire !

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Ne vaudrait-il pas mieux s'interroger sur les moyens de rendre l'organisation existante plus réactive et plus efficace ? Comment allons-nous contrôler et évaluer ce qui est prévu dans la loi de finances initiales, dans le plan de relance et dans le grand emprunt dans le domaine de la recherche et de l'université par exemple ? Comment distinguer les uns des autres à partir du moment où l'objectif est le même ? Il est donc plus que nécessaire d'établir un certain nombre de règles de gouvernance.

Je conclurai mon propos en évoquant la taxation des bonus.

J'ai écouté avec attention vos observations, monsieur le rapporteur général. La taxation exceptionnelle sur les bénéfices des banques n'est pas un problème nouveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Nous l'avions posé par le biais d'un amendement qui avait été adopté par notre commission et par l'Assemblée. Malheureusement, le processus n'est pas allé à son terme. Si nous l'avions adopté, le débat serait clos.

Même si la situation de nos banques peut difficilement être comparée à celle des banques anglaises, allemandes ou américaines, toujours est-il que leur profitabilité retrouvée est pour beaucoup la conséquence du soutien massif de l'État, lequel était nécessaire, mais dont les modalités, une fois de plus, ont été contestables.

À la suite de la proposition de la commission des finances, Christine Lagarde a proposé une taxe sur la régulation…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…et sur le coût de la supervision bancaire et financière. Elle nous a dit également réfléchir à la possibilité de demander une contribution supplémentaire aux banques pour le Fonds de garantie des dépôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Sur la question des bonus, elle estime que les règles d'encadrement sont suffisantes tant que d'autres pays ne prévoyaient pas de taxation. En outre, elle a évoqué une taxe systémique.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

En fait, on mélange plusieurs éléments ; nous y reviendrons en examinant l'article 1er qui a fait l'objet d'un amendement de la commission des finances.

Pour nous, et pour une majorité de la commission des finances, il n'est pas envisageable de mélanger la question de la cotisation des banques – conséquence d'une réglementation européenne sur le Fonds de garantie des dépôts – et celle de la taxation exceptionnelle sur les bonus exceptionnels des traders. Ce n'est pas comparable et c'est une erreur que de l'avoir fait. Vous ne pouvez prétendre que vous reprenez le dispositif anglais, monsieur le ministre, car cela n'a strictement rien à voir avec ce que propose le gouvernement anglais.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

Nous aurons l'occasion d'y revenir, mais il est très important de faire en sorte que cette taxation exceptionnelle soit directement affectée au budget de l'État…

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Migaud

…afin de faire prendre conscience aux banques qu'il est nécessaire de prendre en compte l'état de l'opinion publique. Les banques doivent assumer leur part dans le financement d'un certain nombre d'actions qui ont été rendues nécessaires en raison de la crise économique et financière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Mon rappel au règlement a trait au déroulement de nos débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Cela va de soi, en effet, monsieur le président ! C'est un truisme que je viens de commettre ! (Sourires.)

Le rapporteur général a tout à l'heure utilisé l'adjectif « consomptible », terme inhabituel à propos d'une loi de finances. Je me suis donc rendu à la bibliothèque pour consulter Le Grand Robert.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

On y découvre que « consomptible » est un adjectif qui remonte à 1585.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Ce n'est pas une séance de l'Académie, monsieur Brard ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je ne veux pas embrumer le débat, monsieur le président.

Le Grand Robert en donne la définition suivante : « Dont on ne peut se servir sans le détruire. » Pour l'illustrer, il l'agrémente d'une citation d'un certain M. Planiol – rien à voir avec notre collègue Plagnol – qui aurait pu être un haut fonctionnaire de la direction du budget : « Les choses non consomptibles sont celles qui résistent à un usage même prolongé, comme les maisons, les meubles meublants, les vêtements, les outils de travail. Le plus souvent, les mêmes choses qui sont consomptibles par le premier usage sont en même temps fongibles entre elles. »

À la lecture de cette définition, on se demande, monsieur le président, où est le piège ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Si bien que j'ai immédiatement consulté…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je n'ai apporté que deux volumes, monsieur le président !

J'ai également consulté la définition du mot « attrape » : « Apparence destinée à duper » et constaté qu'elle se trouve juste avant plusieurs mots composés. Notre collègue M. Piron ne manquera pas d'apprécier car c'est sur son incitation télépathique que je me suis rendu à la bibliothèque. (Sourires.) : « Attrape » se trouve ainsi juste avant : attrape-couillon, attrape-gogo, attrape-mouche, attrape-niais, attrape-nigaud. (Sourires.)

Voilà ce qu'il en est de la consomption, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, lorsque l'on examine ce premier projet de loi de finances rectificative de l'année – je ne doute pas qu'il y en aura d'autres –, il paraît légitime de nourrir quelques inquiétudes ; il semble même normal de formuler quelques critiques, tout au moins à l'endroit de certains aspects du texte.

Je songe à trois sujets au moins. Tout d'abord, bien entendu, la situation de nos finances publiques, qui inquiète depuis longtemps les parlementaires, qui commence à inquiéter une majorité de nos concitoyens, et qui avait alerté le Premier ministre dès l'été 2007. À l'époque, madame Lagarde – je salue votre arrivée –, vous nous annonciez pour votre part un choc de croissance et de confiance, bref, le bonheur imminent pour tous nos concitoyens. On sait ce qu'il en fut.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Cette situation est donc particulièrement inquiétante ; or je ne crois pas que ce projet de loi de finances rectificative soit de nature à apaiser ces inquiétudes. J'y reviendrai.

Le deuxième sujet est évidemment le grand emprunt – puisqu'il porte toujours ce nom. On sait qui en eut l'idée et ce qu'en fut la genèse. On en doit le projet à l'un des collaborateurs du Président de la République, venant duquel l'adjectif « grand », mon cher collègue Brard, ne doit pas nous surprendre, puisque ce collaborateur voit toujours tout en grand : les conseils qu'il donne, les discours qu'il écrit, les références qu'il fait citer par ceux qui prononcent ces discours, enfin cet emprunt. On sait qu'il fut profondément déçu par le montant de 35 milliards d'euros qui fut décidé, et dont il espérait qu'il serait au moins trois fois plus élevé, afin de justifier le qualificatif. Je le répète, il voit tout en grand : ses conseils, l'endettement, voire parfois – pardonnez-moi si je vous choque – sa propre rémunération, sur laquelle il faudra tout de même s'interroger un jour, eu égard à la valeur ajoutée qu'il apporte à la conduite des affaires de notre pays. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Quoi qu'il en soit, il s'agit de quelqu'un qui compte – bien qu'il n'ait aucun compte à rendre à qui que ce soit, puisqu'il ne jouit d'aucune légitimité propre. En effet, nous lui devons en grande partie le projet de loi de finances rectificative dont nous débutons l'examen aujourd'hui : sans grand conseiller, nous n'aurions pas connu le grand emprunt, ni, probablement, ce texte, au demeurant plutôt modeste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Le troisième sujet est bien entendu la taxe que vous nous proposez dans l'article premier auquel le rapporteur général, comme le président de la commission des finances, a fait référence.

Telle qu'elle ressort du projet de loi gouvernemental, cette taxe n'a rigoureusement rien à voir avec ce qui avait été annoncé – notamment par les membres du Gouvernement lorsque, en loi de finances initiale, il s'est agi de convaincre certains de nos collègues de la majorité de ne pas voter un amendement que les membres de l'opposition avaient proposé à notre assemblée, et que certains d'entre vous, mesdames et messieurs les députés du groupe UMP, avaient pourtant estimé assez judicieux pour le voter.

En ce qui concerne le premier sujet, la situation des finances publiques, le constat est connu. En 2008, le déficit public représentait 3,4 % du PIB et le stock de dette 67,4 %. Nous savons que, fin 2009, le premier variera entre 7,9 à 8,2 % – il sera sans doute légèrement supérieur à 7,9 %, mais attendons la loi de règlement – et que le second atteindra 77,1 %, soit dix points de plus que l'année dernière.

Cette situation très préoccupante s'explique par la crise, sinon exclusivement, du moins pour l'essentiel : prétendre que la crise explique à elle seule la dérive de nos comptes publics au cours de l'année 2009 est commode, mais inexact. En effet, comme plusieurs études le démontreront très bientôt, mais comme nous autres le savons déjà, l'aggravation du déficit s'explique pour trois points de PIB par l'effondrement des recettes dû à la crise, et pour 1,2 point par le plan de relance.

Il manque donc, selon le montant définitif du déficit public, 0,3 à 0,6 point, ce qui résulte non de la crise, mais des deux facteurs suivants : d'une part, une maîtrise de la dépense publique différente de ce que l'on nous annonce ; d'autre part, très certainement, une préservation insuffisante de la matière fiscale beaucoup plus inquiétante que ce que l'on veut bien prétendre.

Ardue à réaliser, la maîtrise de la dépense publique n'est pas toujours facile à comprendre. Si le sujet vous intéresse, je vous invite, mes chers collègues, à parcourir deux documents dont la lecture est quelque peu aride, mais instructive. D'une part, un texte que nous avons voté le 9 février 2009 : la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. D'autre part, le rapport annexé au projet de loi de finances pour 2010.

Que déduire de ces textes ? Tout d'abord, comme l'a dit le président de la commission des finances, le Gouvernement ne respecte pas les lois qu'il présente au Parlement et que celui-ci vote. En effet, l'article 12 de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques enjoint le Gouvernement d'informer le Parlement, par un rapport, de l'évolution de la dépense fiscale au cours des douze mois qui précèdent et des douze mois à venir. Ainsi, les élus qui votent l'impôt, et, souvent, son affectation, peuvent constater le niveau de la dépense budgétaire, mais aussi et surtout de la dépense fiscale, laquelle n'est pas soumise, on le sait, à la même norme.

Or, si les années 2010, 2011 et 2012 font bien l'objet d'un rapport inclus dans celui qui est annexé au projet de loi de finances pour 2010, ce n'est pas le cas de l'année 2009. Vous deviez pourtant, monsieur le ministre, veiller au respect de cet article 12. S'il n'a pas été respecté, c'est parce qu'un autre article de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques ne l'a pas été. Il s'agit de l'article 11, qui dispose que toute dépense fiscale nouvelle doit être gagée par la suppression d'une autre, afin de ne pas creuser la dépense fiscale totale, ce qui exposerait nos finances publiques à un péril plus grand encore.

Si ce rapport fait défaut, c'est, selon toute vraisemblance, parce que la dépense fiscale s'est aggravée l'année dernière, en dépit des affirmations contraires, notamment celles des membres du pouvoir exécutif. Cette aggravation représente probablement 2 milliards d'euros et se poursuivra en 2010, pour atteindre sans doute 2,5 à 3 milliards. Les documents objectivement disponibles ne permettent pas de se faire aisément une idée plus précise. Mais je ne doute pas que nous saurons ce qu'il en est une fois que ces articles de loi seront enfin respectés.

Ce manque de respect des dispositions relatives à la dépense fiscale témoigne de l'insuffisante maîtrise de la dépense publique. Mais celle-ci résulte surtout du fait que l'inflation s'est élevée à 0,4 % au lieu des 2 % prévus par la loi de finances pour 2009, ce qui aurait dû entraîner une révision en valeur des crédits budgétaires et de l'ONDAM, lesquels avaient été déterminés en valeur. Cette révision n'ayant pas eu lieu, la dépense augmente de 1,6 % en volume. Or la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques annonçait 1 % en volume. Vous n'avez pu maîtriser cette dépense ; je ne vous en fais pas nécessairement grief, mais je ne crois pas que l'on puisse continuer de prétendre que le pouvoir actuel maîtrise la dépense publique.

Il y a plus grave. On ne peut inclure dans une loi de finances des dispositions qui conduisent à abaisser le niveau de recettes fiscales fixé par la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques. C'est pourtant ce que vous avez fait : la recette fiscale a notablement diminué en 2009, d'au moins 1,5 milliard d'euros. Je fais naturellement référence à la suppression de la TVA dans la restauration, qui entraînera un manque de recettes de 3 milliards d'euros en 2010. Une fois de plus, monsieur le ministre, vous n'avez pas respecté des textes que vous aviez pourtant présentés vous-même au Parlement et que celui-ci avait votés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Le non-respect de ces règles qui concernent les lois de programmation pluriannuelle des finances publiques conduit à en enfreindre d'autres. Ainsi, c'est en lisant la presse que l'on apprend que notre pays propose aux autorités de la Communauté européenne un nouveau plan de redressement : en ont été informés, dans l'ordre, Les Échos, Le Monde, la Commission européenne et, par hasard, le Parlement ! Ce n'est pas là de bonne méthode, ni même conforme aux bonnes manières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Au-delà de la courtoisie, le respect de la démocratie impose d'informer d'abord les parlementaires, le cas échéant en commission, et certainement pas de prévenir la presse et la Commission européenne avant que les parlementaires aient pu donner leur avis. Cette pratique fondée sur le mépris, à tout le moins sur une forme de désinvolture,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

…se généralise pourtant manifestement ; il est vrai que la désinvolture vient du plus haut sommet de l'État…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Ce n'est pas l'Himalaya, ce sont plutôt les fosses !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

…et que ceux qui en dépendent finissent souvent par adopter les mêmes méthodes. Libre à vous, mes chers collègues, de ne pas vous en formaliser. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Au-delà de notre sort particulier, il s'agit d'une institution dans laquelle nous siégeons, qui existait avant nous et perdurera après nous, et au respect de laquelle nous aurions intérêt à veiller de près.

On connaît les conséquences de cette infraction aux règles : sous réserve du dévoilement et de l'analyse de ce plan, puis de son application, le stock de dette a augmenté de dix points entre 2008 et 2009 et augmentera bien davantage d'ici à 2012, date à laquelle il devrait atteindre 90 % du PIB, si rien d'autre n'est fait.

Néanmoins, comme l'a dit le président de la commission des finances, ceux-là même qui ne respectent pas les règles qu'ils ont fait établir, ou qu'ils ont défendues par leurs prises de position ou par leur vote, nous en annoncent d'autres, encore plus dures. Convenons que n'importe quel gouvernement, ici ou ailleurs dans le monde, se serait affranchi des règles communautaires qui fixent le déficit à 3 % du PIB et le stock de dette à 60 %. Mais s'être émancipé des règles nationales que la majorité a elle-même adoptées paraît plus curieux.

Ainsi, la révision constitutionnelle de 2008, que le président de la commission des finances a également évoquée, a permis de préciser clairement que les lois de programmation pluriannuelle doivent inscrire les dépenses dans une perspective d'équilibre des comptes des administrations publiques. Cette norme de niveau constitutionnel, le Gouvernement vous a demandé de la voter, mes chers collègues, ce que vous avez fait ; il vous demande, presque d'un même mouvement, de ne pas la respecter, ce que, de manière assez surprenante, vous faites également.

S'y ajoute la règle incluse dans la nouvelle loi organique relative aux lois de finances, dont la lettre fut respectée, mais non l'esprit. Selon la loi organique, la loi de finances doit en effet indiquer le plafond indépassable de dette négociable d'une durée supérieure à un an, lequel fut fixé pour l'année dernière à 45 milliards d'euros. Or, si ce plafond n'a pas été dépassé, c'est pour 80 milliards d'euros que des taux à moins d'un an ont été négociés et souscrits ; en réalité, la dette négociable a augmenté de plus de 120 milliards d'euros l'année dernière. Si la règle est respectée dans sa lettre, son esprit est donc évidemment violé : entre un plafond d'autorisation de 45 milliards d'euros et une dette constatée de près de 124 milliards, l'écart est considérable. Ainsi, vous enfreignez jusqu'à cette loi organique, sans même prendre la peine de faire semblant de la respecter.

Ni les règles communautaires, ni les règles constitutionnelles ne sont donc respectées, non plus que celles des lois organiques ou des lois de programmation pluriannuelle des finances publiques – puisque le rapport visé n'a pas été transmis à l'Assemblée.

Les dépenses fiscales nouvelles ne sont pas gagées par d'autres impôts et, lorsque le niveau de recettes prévu n'est pas atteint du fait des suppressions d'impôts, aucune compensation n'est envisagée. J'ai déjà indiqué ce qu'il en a été de la suppression de la TVA dans la restauration.

À ces règles, il faut ajouter les engagements forts qui ont été pris. Je pense au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Comme l'a démontré un récent rapport du Conseil d'État, ce principe a été appliqué dans les administrations de l'État, mais une soupape a été trouvée à travers des recrutements par les opérateurs publics, qui neutralisent au moins pour une part – et nous craignons que ce ne soit une large part – les non-recrutements par les administrations de l'État, la direction du budget a été éclairante sur ce point. Au fond, l'éducation nationale, la police ou la gendarmerie ont servi de gages à des augmentations de postes chez les opérateurs publics. Je ne crois pas que ce soit satisfaisant.

Le non-respect des règles et des engagements pris aboutit à une dérive manifeste de nos comptes publics, d'autant plus préoccupante qu'elle va se poursuivre.

J'en viens à ma deuxième inquiétude : le grand emprunt.

Ces 35 milliards d'euros constituent à l'évidence une aggravation du déficit budgétaire.

À cet égard, il me paraît délicat de dire que les choses s'améliorent et de se réjouir que le déficit soit un peu moindre à la fin de l'année 2009 – 2 milliards d'euros de différence – alors que vous allez contribuer à son augmentation en 2010. Les faits sont là : si, en 2009, le déficit est en définitive de 139 milliards d'euros, il atteindra en 2010 au moins 150 milliards d'euros, sans compter les surprises que peuvent réserver les mois à venir.

À vous entendre, monsieur le ministre, on a le sentiment que plus on emprunte, plus on s'enrichit. Vous nous avez en effet expliqué qu'avec cet emprunt, le pays allait prospérer. Je n'en suis malheureusement pas sûr. Les conditions dans lesquelles se déroule cette opération me paraissent en effet susciter bien des interrogations.

Au moins 22 à 23 milliards seront empruntés sur les marchés financiers. À cet égard, je vous remercie d'avoir convaincu le Président de la République, et surtout son grand conseiller, de ne pas s'adresser directement au public, ce qui aurait coûté plus cher encore. Reste que les intérêts seront de 3 ou 4 % et qu'à ce coût s'ajoutera la rémunération des comptes d'affectation du Trésor, car j'ai cru comprendre qu'une partie des sommes serait placée sur ces comptes sous forme de dotations en capital. Monsieur le rapporteur général, j'aimerais que vous nous donniez votre sentiment à ce propos.

Ce grand emprunt, outre qu'il ne mobilisera que 30 % des sommes empruntées, coûtera plus cher que les intérêts à 4 %, puisqu'une partie des sommes placées devra faire l'objet d'une rémunération.

Il faut évoquer aussi l'écart entre la réalité et l'affichage.

Prenons l'exemple de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui se voient affecter 19 milliards d'euros. Mes chers collègues, dois-je vous rappeler que ce même secteur a fait l'objet d'une annulation de crédits de 110 millions d'euros à l'occasion de la loi de finances initiale et de 124 millions d'euros à l'occasion de la loi de finances rectificative ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

Ainsi, dans le même texte, vous prévoyez, d'un côté, d'emprunter sur les marchés financiers des sommes pour développer un secteur qui, à l'évidence, a besoin d'investissements, et, de l'autre, vous supprimez des crédits dans ce même secteur car il faut bien gager le coût supplémentaire généré par les intérêts de ce grand emprunt. Où est la cohérence, en effet ?

Je rappelle que, dans cette loi de finances rectificative, les annulations de crédits s'élèvent à 124 millions d'euros pour l'enseignement supérieur et la recherche, à 110 millions d'euros pour le développement durable et à 60 millions d'euros pour la sécurité.

Vous prétendez investir pour l'avenir en choisissant des secteurs particuliers tout en leur faisant subir des annulations de crédits. La réalité est donc autrement plus préoccupante que ce que vous voulez bien afficher.

Sur le fond, qu'il faille investir dans certains secteurs ne soulève aucune objection. Nous contestons seulement les modalités de ces opérations d'investissement. Si vous aviez vraiment besoin de 35 milliards d'euros, monsieur le ministre, il était assez simple de vous les procurer par des dispositions fiscales relevant du simple bon sens ou de l'élémentaire justice.

Certes, il aurait été compliqué de revenir sur la totalité du paquet fiscal, mais au moins auriez-vous pu annuler, ne serait-ce que temporairement, quelques-unes de ses dispositions, ce qui aurait rapporté 4 à 5 milliards d'euros. Vous auriez également pu revenir sur la fameuse niche fiscale dite Copé, qui a tout de même coûté 20 milliards d'euros en deux ans. Huit à dix milliards supplémentaires n'auraient pas fait mauvaise figure dans le tableau !

En annulant certaines dispositions, votées récemment, dont l'efficacité est plus que douteuse, vous seriez parvenus à un total largement supérieur, ce qui aurait permis à l'État d'investir sans s'endetter davantage.

Il est vrai que, depuis de trop nombreuses années, notre État n'investit plus. Sur un budget qui, exceptés les prélèvements sur recettes, s'élève à 260 ou 270 milliards d'euros, il n'investit qu'une vingtaine de milliards, subventions aux collectivités territoriales incluses. Il est absolument pathétique qu'une si petite part d'un tel volume soit consacrée à l'investissement. Convenons que revenir à une politique fiscale de bon sens ou de justice élémentaire nous aurait permis d'investir sans alourdir notre dette.

Si nous sommes d'accord sur le choix des investissements – développement durable, enseignement supérieur, recherche, développement numérique –, nous contestons les modalités retenues. Un emprunt n'est pas une recette. Ce n'est qu'un impôt de plus pour les générations futures qui devront le rembourser, si d'aventure le Parlement vote cette disposition.

Puisque vous m'avez demandé de ne pas utiliser entièrement mon temps de parole, monsieur le président, je dirai un dernier mot sur la taxe instituée par le fameux article 1er, qui a suscité de fructueux débats en commission des finances. Si le rapporteur général a indiqué qu'un accord assez large s'était dégagé, c'est sans doute qu'il fait référence à l'état actuel de l'opinion dans l'hémicycle plutôt qu'à celui que nous avons pu constater en commission des finances, car si l'amendement a été adopté, ce fut à une très courte majorité, beaucoup étant défavorables à cette disposition pourtant nécessaire.

Souvenez-vous : la taxation des banques était censée avoir une vertu moralisatrice. Il faut toujours se méfier de ce mot et avoir quelques soupçons quand des dirigeants politiques, en l'espèce des ministres, prétendent être mus par la morale en matière de finances publiques. Mais pourquoi pas ? Après tout, l'avidité de certains opérateurs financiers et bancaires…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

…est en partie responsable de la crise que nous connaissons.

La taxe, telle que le Gouvernement nous la propose, ne peut avoir de vertu moralisatrice. D'abord, parce qu'elle repose sur des activités passées qui, par définition, ne peuvent être modifiées. Ensuite, parce que n'ayant qu'une application unique, elle ne peut en rien modifier les comportements futurs.

Lors de la discussion de la loi de finances initiale, madame Lagarde, vous aviez convaincu vos amis de la majorité de revenir sur leur vote initial concernant l'amendement relatif à la taxation des banques. Vous aviez insisté sur le fait qu'il s'agissait de prévenir toute dérive dans les comportements. Or, à l'évidence, cette taxe ne pourra y parvenir.

Le deuxième objectif de cette taxe était de demander aux banques de soulager les finances publiques puisque, quoi que vous en disiez, ce sont ces dernières qui les ont sauvées. Or vous proposez que le produit de la taxe soit affecté à un compte destiné à garantir les dépôts effectués par nos concitoyens, compte abondé par une cotisation volontaire des banques, dont le produit n'est pas déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Autrement dit, cela revient pour les banques à acquitter, pratiquement à l'euro près, les sommes que, de toute façon, elles auraient versées à ce compte. L'effort réclamé aux institutions financières et bancaires est donc rigoureusement identique.

Madame la ministre, nous avons tous en mémoire les propos d'Alain Juppé au sujet de la réforme de la taxe professionnelle. Il me semble qu'il avait dit, en en prenant connaissance, que le Gouvernement « se foutait du monde ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

C'est un peu la même expression qui m'est venue à l'esprit lorsque vous avez soumis au Parlement ce projet de taxe en prétendant qu'il se situait dans la droite ligne du dispositif que vous aviez promis à la représentation nationale lors de l'examen de la loi de finances initiale.

Oui, madame la ministre, proposer une taxe dont le produit est déductible de l'assiette de l'impôt sur les sociétés en lieu et place d'une cotisation volontaire que les banques auraient de toute façon acquittée, c'est, objectivement, « se foutre du monde ». Pardonnez-moi si j'emploie pour la deuxième fois cette expression à la tribune de l'Assemblée nationale, mais je ne vois pas de mots plus appropriés pour qualifier ce que vous avez tenté de faire. J'ose espérer cependant que l'amendement de Didier Migaud, qui vise à ne pas affecter le produit de la taxe à ce compte mais au budget de l'État – ou un amendement équivalent, car nous savons que la majorité rechigne à voter les amendements de l'opposition –, sera adopté par notre assemblée afin que les finances publiques soient soulagées, ne serait-ce qu'un peu, par une contribution des banques, lesquelles auront de surcroît à abonder le fonds destiné à protéger les dépôts de nos concitoyens.

Bref : une maîtrise des dépenses publiques et une protection fiscale insuffisantes, des dépenses fiscales exagérées, une dérive des comptes publics annonciatrice d'un stock de dettes de 90 % du PIB en 2012, un grand emprunt – qui ne reste grand que parce qu'il ne faut pas fâcher le conseiller spécial, mais qui n'est, en réalité, ni grand ni petit – inutile car un peu de justice et de bon sens fiscal auraient été suffisants, une taxation que le Parlement modifiera, je l'espère, en profondeur, du moins dans son affectation.

Dans l'incertitude où nous sommes quant à l'acceptation de cette taxation, à la dérive des comptes publics et au grand emprunt, je vous invite, chers collègues, à voter la motion de rejet préalable que je viens de vous présenter, au nom du groupe SRC. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Monsieur le président, j'aimerais répondre brièvement à cette motion, qui contient beaucoup de points.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je ne dis pas le contraire : j'estime seulement que l'argumentation développée ne correspond pas au texte dont vous êtes saisis.

S'agissant des déficits en 2009. il faut rappeler, monsieur Cahuzac, qu'ils sont bien dus à la crise.

Un premier facteur d'explication est la chute des recettes, liée à la faiblesse de la croissance. La diminution du produit des impôts est d'abord liée aux mesures de relance fiscales, comme les dispositions relatives à la trésorerie des sociétés – le carry back – ou le remboursement plus rapide que prévu de la TVA. La baisse de la croissance a abouti à un moindre produit de l'impôt sur les sociétés puisque les entreprises ont fait moins de bénéfices ou plus de provisions. Cela vaut également pour la TVA et, pour partie, pour l'impôt sur le revenu. Tout cela s'est soldé par 3,3 points de PIB en moins.

Il y a eu une impulsion budgétaire importante, qui a représenté de 1 à 1,2 point de PIB, ce qui donne bien un déficit atteignant 7,9 % du PIB.

Quant aux comptes sociaux, ils sont soumis à une incertitude qui représente environ 0,1 point de PIB.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

L'augmentation du déficit public en 2010 par rapport à 2009 est due exclusivement à la crise, et non à un dérapage des dépenses de l'État...

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

...ou à une quelconque défiscalisation. Nous disons la vérité ; vous ne pourrez pas démontrer le contraire. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Est-ce que nous respectons les lois de programmation auxquelles a fait référence M. Migaud ? Les dépenses fiscales sont bien évaluées dans les documents budgétaires qui vous sont confiés. L'article 1er du projet de loi de finances et l'annexe « Voies et moyens » font état de 75 milliards d'euros, y compris les mesures de relance, soit environ 70 milliards hors mesures de relance.

La question du gage des dépenses fiscales est intéressante. Elles ne sont pas gagées sur une année, mais sur plusieurs années. C'est vrai notamment de la baisse de la TVA sur la restauration.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

C'est une mesure structurante pour ce secteur d'activité, et elle est gagée par toute une série de dispositifs à l'horizon 2013.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Vous ne pouvez pas classifier les niches fiscales comme cela ! Celle dont vous parlez est sensible et l'on pourrait caricaturer les choses très rapidement. Vous plaisantez quand vous dites que la baisse de la TVA sur la restauration profite aux riches. Croyez-vous que les clients qui viennent boire leur café au bar sont nécessairement les plus riches ? (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

Debut de section - PermalienPhoto de Élie Aboud

Laissez le ministre s'exprimer ! Nous, on vous a écoutés !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

La baisse de la TVA sur la restauration profite à toute une profession qui ne mérite pas vos critiques, ainsi qu'à tous les consommateurs de France.

Enfin, les objectifs de dépenses sont parfaitement respectés. La règle dite « zéro volume », très importante depuis les années 2003-2004, est restée avec beaucoup d'opiniâtreté, et même au-delà, puisque, en 2009, nous sommes en dessous – même si, je l'admets, c'est plus facile lorsque l'inflation est faible.

L'ONDAM, comme je l'ai dit à plusieurs reprises ici lors de l'examen du PLFSS et du PLF, est quasiment respecté, et ce pour la première fois depuis 1997. Cela vaut la peine d'être souligné, car vous prétendez qu'aucune règle n'est respectée.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Non, c'est complètement faux !

Nous prévoyons un déficit budgétaire de 149 milliards d'euros pour l'année 2010.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Il sera peut-être moins élevé, vous avez raison ! (Sourires.)

Certes, il est important. Qui peut dire le contraire ? Il intègre naturellement le grand emprunt, lequel est une dépense budgétaire, mais non pas une dépense maastrichtienne, ce qui est différent. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je l'avoue, ce serait assez difficile à expliquer dans un journal destiné au grand public,...

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

...mais devant des parlementaires, notamment ceux de la commission des finances, je peux me livrer à ce type d'explication.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

C'est un emprunt sans échéances ni amortissement !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Pour que Christine Lagarde puisse discuter de ces questions avec ses collègues européens, il faut des repères communs, qui sont les règles de la comptabilité maastrichtienne, sinon aucune comparaison n'est possible.

Au sens européen du terme, les déficits publics ne sont pas aggravés de plus de 0,1 point de PIB par an par le grand emprunt. Voilà la réalité.

En France, la comptabilité publique est une comptabilité de décaissement. Dès lors que l'on décaisse vis-à-vis des opérateurs, il s'agit pour l'État d'une dépense.

Dans les règles de comptabilité maastrichtiennes, dès lors qu'il y a des actifs, on ne parle pas de décaissement, donc pas de déficit. Je rejoins ce qu'a dit Gilles Carrez en parlant d'actifs « non consomptibles » ou, si vous préférez, non consommables.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Je vérifierai dans les traités de comptabilité publique…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Cahuzac

M. Brard va encore sortir son dictionnaire ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Bref, cela signifie qu'il y a des actifs et que l'on ne consomme pas les crédits. Les curseurs s'arrêteront lorsque les projets seront décidés les uns après les autres.

Vous estimez que l'État n'a pas joué son rôle depuis de nombreuses années et qu'il a transféré l'ensemble de ses dépenses en fonctionnement plutôt qu'en investissement.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

C'est justement pourquoi nous voulons sortir de la crise en provoquant une nouvelle forme de croissance. Mais encore faut-il se donner les moyens de le faire : si l'on joue « petit bras », on n'a aucune chance de créer un accélérateur de croissance. La France a pris du retard, et l'investissement des collectivités locales n'a rien à voir avec celui qui est évoqué ici. Quand vous construisez une nouvelle salle des fêtes – je rêve de le faire dans ma commune –, cela n'apporte pas grand-chose, si ce n'est que cela fait travailler une entreprise de travaux publics. Ce dont il s'agit, c'est d'une croissance bien plus forte, d'une croissance durable et qui apporte une vraie valeur ajoutée.

Les collectivités locales devraient consacrer 20 % de leurs investissements au financement de grands projets d'infrastructures communes. Or, vous savez bien qu'elles réalisent, pour l'essentiel – elles sont d'ailleurs là pour cela –, des investissements de proximité à faible valeur ajoutée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Croyez-vous que les communes n'investissent que dans le TGV ? C'est une plaisanterie !

Ce collectif vise à réaliser des investissements afin de créer, en France, de la valeur ajoutée à long terme.

Nous évitons des frais de fonctionnement en gageant 500 millions d'euros de la charge d'intérêt supplémentaire due à l'emprunt. Ainsi, monsieur Cahuzac, s'agissant de l'enseignement supérieur, nous réduisons certains crédits de fonctionnement du ministère pour les imputer en investissement. Il n'y a donc pas d'incohérence dans ce domaine-là.

Vous prétendez qu'il s'agit d'un impôt supplémentaire pour l'avenir. Au contraire, ce sont des promesses de recettes importantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Bapt

Année après année, on nous raconte des balivernes !

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

La croissance, c'est la promesse de recettes. Comme nous sommes au maximum en termes de prélèvements obligatoires, nous devons développer les recettes par la croissance. C'est en allant chercher plus de croissance que nous aurons plus de recettes.

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

Si nous voulons aller au-delà de la croissance potentielle de la France telle qu'elle est analysée aujourd'hui, il faut un surcroît d'investissements.

Je m'arrêterai là...

Debut de section - PermalienÉric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état

...car je pense vous avoir convaincus, à droite comme à gauche (Sourires), de ne pas voter la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

On aurait pu avoir droit à un peu plus de sérieux !

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Au titre des explications de vote, la parole est à M. Jean-Pierre Brard.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Madame, monsieur le ministre, en s'adressant à vous je ne sais pas si Jérôme Cahuzac pensait à Lénine,…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

…qui disait que, lorsqu'un gouvernement viole sa propre légalité, on est dans une situation prérévolutionnaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Monsieur le ministre, où est la vision gouvernementale ? Avons-nous encore un Gouvernement et des ministres ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

En vous écoutant, monsieur le ministre, je pensais à Balzac ou à Alexandre Dumas, et je vous voyais, un crayon derrière l'oreille en train de faire les comptes. Avec tout le respect que je vous dois, vous êtes un « petit bras », pour reprendre une expression que vous avez utilisée, vous êtes ce personnage du Comte de Monte-Cristo qui entasse ses pièces au fond de sa boutique. Vous êtes le chef comptable de l'épicerie Sarko & Co (Sourires), où vous gérez au jour le jour la descente aux enfers – mais pas pour tout le monde : uniquement pour les petites gens. Pour les autres, ça fait « gling-gling » puisque vous veillez à ce que les piécettes rentrent dans la caisse.

La situation de nos finances publiques est suffisamment dramatique pour ne pas épiloguer, comme vous l'avez fait. Contrairement à ce que vous dites, on ne peut pas faire confiance au Gouvernement. Tout à l'heure, vous avez déclaré : « Personne ne peut douter de la détermination du Gouvernement à redresser les finances publiques ». Mais non : vous n'avez pas cette détermination, car chaque nouvelle détérioration constitue un point d'appui pour remettre en cause le contrat social, en particulier celui issu de la période de la Résistance. Vous taillez, par exemple, dans l'enseignement supérieur qui voit son budget de fonctionnement diminuer de 124 millions d'euros.

En face de moi est assis Bernard Debré, qui me fait penser au virus H1N1 dont il nous a protégés par la clairvoyance de ses propos. Souvenez-vous : il nous parlait de 2 milliards jetés par la fenêtre ! Et pendant ce temps-là, monsieur le ministre, vous nous amusez avec des histoires à dormir debout.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Je terminerai mon propos par une citation qui ne provient pas du Grand Robert de la langue française, mais de M. Woerth lui-même, qui disait, le 20 octobre dernier : « Ne perdons pas nos repères. Passer de 141 milliards d'euros à 116 milliards d'euros représente une baisse de 18 % en un an. Ces 16 milliards d'euros ne nous manquent pas pour passer sous la barre des 100 milliards d'euros dès 2010. » Il est maintenant question de 2013. Mais en 2013, il n'y aura pas d'abonné au numéro que vous demandez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Moscovici

Ce n'est pas une surprise : le groupe SRC votera la motion qu'il a déposée.

En réalité, les conditions d'examen de ce texte sont une manifestation supplémentaire du mépris dans lequel le Gouvernement tient les différentes composantes de la nation.

Mépris, d'abord, envers notre Parlement lui-même. Il y a un mois seulement, nous avons voté un budget initial dont l'insincérité était évidente, étant donné que le grand emprunt avait été annoncé par le Président de la République dès le 22 juin, à Versailles. Cette méthode de gouvernement qui consiste à faire adopter une loi de finances d'emblée caduque est assez coutumière, mais elle prend cette année des proportions exceptionnelles puisque, comme l'a rappelé le rapporteur général, le déficit passe de 117,4 à 149 milliards d'euros, soit une augmentation de 27 %, ce qui est à la fois inédit et préoccupant.

Mépris envers les collectivités locales, que le Gouvernement asphyxie financièrement et accuse à tort de mener grand train – comme si leurs dépenses étaient somptuaires – alors qu'il permet à l'État de s'endetter de 35 milliards d'euros, en sus des émissions sur les marchés financiers qui ont atteint 275 milliards en 2009. Cette sorte de « treizième mois » se révèle fort coûteux, comme l'a montré Jérôme Cahuzac.

Le procès permanent que le Gouvernement instruit aux collectivités est d'une mauvaise foi inadmissible.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Moscovici

En effet, leurs budgets de fonctionnement sont en équilibre, elles réalisent 75 % de l'investissement public, et leur part dans la dette publique représente 8 % quand celles de l'État et de la sécurité sociale atteignent 75 %.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Moscovici

Vous n'avez convaincu personne, monsieur le ministre, sur le déficit et sa résorption. Le déficit structurel représente bien la moitié du déficit public.

Mépris enfin envers les Français, à qui le Gouvernement veut faire croire que l'emprunt serait une ressource nouvelle, alors qu'il s'agit en vérité d'une dette supplémentaire qui fera exploser le déficit et augmentera la charge de la dette, déjà considérable, de 5 milliards en cinq ans. Ce n'était pas non plus une nécessité, car l'on pouvait, à la place, revenir au moins en partie sur une politique fiscale économiquement inefficace et socialement injuste – les exemples ne manquent pas, depuis la niche Copé jusqu'à la baisse de l'impôt sur les revenus des plus riches, en passant par la baisse de l'ISF, le paquet fiscal, la baisse de la TVA au profit des restaurateurs, la suppression de la taxe professionnelle. Voilà une politique qui pèse plus de 50 milliards d'euros, soit près du double du montant de l'emprunt !

En revanche, si le Gouvernement se joue de la santé des comptes publics, il semble se soucier bien davantage de celle des comptes en banque des plus puissants.

De ce point de vue, la taxe sur les bonus des opérateurs de marché n'est que poudre aux yeux, et le Parlement serait bien inspiré de voter un amendement à l'image de celui que le groupe socialiste a proposé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Moscovici

Le groupe SRC ne peut cautionner ni la fuite en avant que représente l'emprunt national, ni l'écran de fumée qu'est cette prétendue taxe. Aussi votera-t-il la motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

J'avoue vivre, mes chers collègues, un moment quelque peu surréaliste. Reportons-nous un an en arrière, à l'époque où le parti socialiste répétait à longueur de temps que la croissance ne serait pas au rendez-vous en 2010, que les emprunts proposés par le Gouvernement, destinés à financer le fonctionnement, étaient par nature de mauvais emprunts…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…et qu'il était bien dommage qu'aucune mesure ne soit prise pour taxer les bonus des traders.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Brard

Il faut arrêter la fumette, Jérôme ! (Sourires.)

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Or, voici que le Gouvernement propose un projet de loi de finances rectificative où il affiche des performances économiques dont nous n'aurions pas même osé rêver voici un an, tant elles marquent le retour progressif de la croissance,...

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

…sans parler du recul du chômage que nous avons pu constater au dernier mois de l'année 2009.

Voici un projet de loi de finances rectificative dans lequel 35 milliards d'euros sont consacrés à de véritables dépenses d'avenir, comme l'a souligné Gilles Carrez. Ces dépenses seront certes engagées progressivement et étalées sur les prochaines années, mais elles rendront service à la nation pendant des dizaines d'années, en ce qu'elles permettront de structurer l'industrie, la recherche, l'économie numérique et le développement durable. Bref, voici véritablement des dépenses d'avenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Enfin, dernier volet, dans le droit fil de l'annonce faite par le Président de la République le 22 juin 2009 (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) : la taxation tant attendue sur les bonus des traders réalisés en 2009, année il est vrai exceptionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Alors que le Gouvernement répond aux attentes de tous les socialistes, voici qu'ils refusent aujourd'hui d'approuver ce projet de loi qu'ils devraient voter des deux mains !

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Chartier

Voilà pourquoi nous n'arrivons pas à vous comprendre. Non seulement, alors qu'Henri Guaino – on peut tout de même le nommer – voit tout en grand, vous voyez tout en noir, et vous persistez en plus, par principe, à être « contre tout ce qui est pour et pour tout ce qui est contre ». (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Non, chers collègues, nous ne pouvons pas vous suivre : nous rejetterons votre motion, car nous voulons entrer dans le vif du sujet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Emmanuelli

Vos amis ont du mérite à applaudir !

(La motion de rejet préalable n'est pas adoptée.)

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Le Fur

Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi de finances rectificatives pour 2010.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures cinquante.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Claude Azéma