COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
Mercredi 8 février 2012
La séance est ouverte à dix heures.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)
La Commission des affaires sociales examine, en réunion ouverte à la presse, le rapport d'information de M. Jean-Luc Préel sur la prévention sanitaire en conclusion des travaux de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale.
Avant de passer à l'examen du rapport de Jean-Luc Préel, je vous indique que j'ai décidé que notre commission se saisisse pour avis du projet de loi de finances rectificative pour 2012, actuellement examiné en conseil des ministres.
Notre saisine portera sur les deux articles qui entrent dans notre champ de compétence, celui sur le financement de la branche famille et celui portant sur le quota et la taxe d'apprentissage, c'est-à-dire les articles 1er et 8.
En ce qui concerne la désignation de notre rapporteur, j'ai reçu la candidature d'Yves Bur. Il n'y a pas d'opposition. Il en est ainsi décidé.
Par ailleurs, je viens d'apprendre que la proposition de loi n° 3977 d'Yves Bur relative à la gouvernance de la sécurité et à la mutualité sera inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée le lundi 27 février. Elle comporte trois mesures, dont notamment la fusion de la caisse régionale d'assurance maladie et de la caisse régionale d'assurance vieillesse d'Alsace-Moselle. Ces dispositions, déjà adoptées dans le cadre de la proposition de loi de loi déposée par M. Jean-Pierre Fourcade modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, avaient été jugées par le Conseil constitutionnel comme constituant des « cavaliers ». Je soulignerai qu'elles font l'objet d'un consensus.
Je propose qu'Yves Bur soit désigné rapporteur. Il en est ainsi décidé.
Nous en venons maintenant à l'examen du rapport de la Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, le dernier pour cette législature.
Après les médicaments, les affections de longue durée, la prestation d'accueil du jeune enfant, le fonctionnement de l'hôpital et la lutte contre la fraude sociale, la MECSS s'est penchée sur la politique de prévention sanitaire, qui apparaît comme le « parent pauvre » de notre système de santé. Il s'agit pourtant d'un véritable investissement, source d'économies à moyen terme, et d'un moyen efficace pour garantir un vieillissement en meilleure santé.
M. Jean-Luc Préel, rapporteur. Après trois mois d'auditions et avec l'assistance de la Cour des comptes, la MECSS a adopté mercredi dernier, 1er février, son rapport sur la prévention sanitaire à l'unanimité de ses membres présents.
Je souhaiterai souligner, en préambule, le travail très constructif qui a été mené au sein de la MECSS, enrichi des nombreuses suggestions de ses coprésidents, Jean Mallot et Pierre Morange, ainsi que de ses autres membres.
Notre pays souffre d'un manque de culture de santé publique.
L'assurance maladie, lors de sa création, a concentré son action sur la prise en charge des soins.
Le système de santé français reste donc très orienté vers le curatif.
Il est reconnu, à ce titre, comme performant, même si des gains d'efficience sont possibles et nécessaires. En revanche, il est considéré comme médiocre pour la prévention et l'éducation à la santé.
En l'améliorant, on peut espérer améliorer l'état de santé de la population et, en conséquence, diminuer le recours aux soins. La prévention peut ainsi être considérée comme un investissement, m
ême si, comme l'indique M. Didier Tabuteau, « la santé publique est un tout, la prévention ne doit pas être opposée aux soins ».
La Cour des comptes, dont nous avons pu bénéficier de l'expérience, a, dans sa communication transmise à la MECSS, clairement mis en évidence les difficultés suivantes : absence de coordination de nombreux intervenants, insuffisance, voire absence, de pilotage, grande incertitude sur le montant des financements consacrés à la prévention, manque d'évaluation de plans divers et peu cohérents entre eux, défaut de hiérarchisation des objectifs fixés dans la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.
Définir la prévention n'est pas aisé. La définition la plus utilisée, la plus classique, reste celle de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Elle distingue trois catégories de prévention : la « prévention primaire » qui a pour but d'éviter l'apparition de la maladie en agissant sur ses causes et qui inclut la vaccination, la « prévention secondaire » qui vise à détecter la maladie et qui comprend le dépistage, la « prévention tertiaire » qui a pour but de réduire les risque de récidive, les complications et les séquelles.
Cette définition classique conserve une coloration très sanitaire. Or, chacun sait ici que, parmi les déterminants de la santé, le facteur comportemental joue un rôle important. C'est pourquoi M. Robert Sirkosky Gordon a proposé une définition plus globale de la prévention. Ainsi, il distingue la « prévention universelle », destinée à l'ensemble de la population et qui rassemble les grands principes, la « prévention orientée », qui privilégie un groupe de population ayant un risque plus élevé, et la « prévention ciblée », tournée vers ce groupe de population et qui correspond à l'éducation thérapeutique.
M. Didier Tabuteau, auditionné par la mission, a, pour sa part, proposé une autre approche intéressante qui classe également la prévention en trois catégories : la prévention non médicalisée qui recouvre les actions portant sur les comportements et visant à réduire les facteurs de risques liés notamment au travail et aux transports, la prévention médicalisée qui passe par les acteurs de santé et repose sur des actions non techniques comme l'éducation à la prévention et des actions techniques, telles que le dépistage ou les analyses biologiques, et, enfin, les soins qui peuvent intégrer une composante préventive.
Il faut donc retenir l'idée d'un capital santé qu'il convient de préserver en agissant sur les déterminants qui sont, bien entendu, fort nombreux, comme l'environnement, les transports ou encore l'alimentation. Il est commun de considérer la prévention comme un investissement qui permettrait des économies. En réalité, si elle améliore l'état de santé et contribue à préserver des vies, la plupart des économistes considèrent qu'elle n'entraîne pas automatiquement des économies mesurables. Dans un premier temps, elle peut même créer des dépenses supplémentaires.
Tout au long de nos auditions, nous avons retrouvé les défauts dénoncés par la Cour des comptes, au premier rang desquels figure l'absence de priorités clairement définies. La loi de santé publique d'août 2004 a constitué un réel progrès mais elle a retenu une centaine d'objectifs quantifiés, sans véritable hiérarchisation.
À ceux-ci se sont ajoutés de multiples plans de santé, une trentaine au minimum. Chacun de ces plans a pour but de répondre à une question estimée, sur le moment, très urgente mais souvent sans les moyens humains et financiers suffisants, exception faite, sans doute, des plans Cancer et Alzheimer. Au total, des chevauchements regrettables s'accumulent. Ensuite, nous avons constaté que de multiples intervenants proposaient certes des actions intéressantes mais modestes et surtout sans coordination et sans pilotage.
Intervient tout d'abord l'État qui, en principe, fixe les grandes orientations, la politique de santé publique relevant de ses missions régaliennes. Mais, en son sein, plusieurs ministères sont concernés : le ministère de la santé, tout d'abord, avec ses trois directions qui peuvent être concurrentes, mais aussi le ministère du travail, ceux de l'éducation nationale, de l'environnement, des transports, ou de l'agriculture, chacun défendant son territoire. Dans la description de ce paysage, on ne saurait omettre de mentionner de nombreuses agences sanitaires.
Les collectivités territoriales interviennent également. Les conseils généraux se sont vu attribuer des compétences par les lois de décentralisation de 1983 en matière de vaccination, de lutte contre les maladies sexuellement transmissibles et de dépistage des cancers. Même si la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a opéré, à l'inverse, un transfert de ces missions vers l'État, certains départements ont choisi de conserver certaines compétences comme la vaccination. En tout état de cause, la protection maternelle et infantile et l'aide à l'autonomie des personnes âgées sont restées dans le champ de compétence des départements.
Les communes jouent un rôle important. Le maire exerce un pouvoir de police sanitaire. Les communes peuvent intervenir par l'intermédiaire des cantines scolaires, participent au programme Nutrition santé, assurent le soutien des associations ainsi que la préparation et la mise en oeuvre des contrats locaux de santé signés avec les agences régionales de santé.
Le troisième intervenant dans le domaine de la prévention est bien entendu l'assurance maladie qui intervient par le biais du Fonds national de prévention, d'éducation et d'information sanitaires (FNPEIS).
La convention signée entre l'État et la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés prévoit ainsi cinq objectifs : accroître la participation aux programmes de dépistage organisé du cancer, faire progresser la couverture vaccinale, renforcer les actions dans le domaine bucco-dentaire pour les enfants, prévenir l'obésité et lutter contre les dépendances.
La Mutualité sociale agricole, qui possède son propre fonds de prévention, organise des examens périodiques par tranche d'âge et insiste sur les risques professionnels encourus par les agriculteurs, comme le tétanos, les pesticides et le cancer de la peau.
Les complémentaires santé, de leur côté, proposent des actions de prévention très intéressantes, prévues notamment dans des contrats collectifs concernant certaines professions, comme les boulangers et les métiers du bâtiment, ou axées sur certaines pathologies, telles que le diabète ou l'asthme. Mais, ces complémentaires sont confrontées à la durée limitée de leurs contrats, en moyenne sept ans, et à la difficulté d'obtenir, auprès de l'assurance maladie, des données de santé.
Les professionnels de santé jouent également un rôle essentiel.
Les médecins sont au coeur de la prévention. Au cours du colloque singulier avec le patient, la consultation mêle le curatif et le préventif. Ainsi, 25 % à 35 % de l'activité du médecin dit « de premier recours » serait consacrée à des actes relevant de la prévention primaire ou secondaire. La mise en oeuvre de la nouvelle convention médicale signée avec l'assurance maladie prévoit ainsi une rémunération en fonction d'indicateurs liés à la prévention et au dépistage.
Les dentistes participent notamment à la campagne « M'T dents » et les pharmaciens contribuent à l'éducation thérapeutique et proposent des conseils de prévention. Ce rôle sera mieux reconnu grâce à l'adoption, dans la dernière loi de financement de la sécurité sociale, d'une disposition prévoyant un nouveau mode de rémunération pour cette activité.
Les autres professionnels, infirmiers ou kinésithérapeutes, prennent également une part importante aux actions de prévention.
Enfin, de nombreuses associations contribuent elles aussi à la prévention par l'entremise de deux réseaux principaux : les comités départementaux d'éducation à la santé (CODES), regroupés au niveau régional en instances régionales d'éducation et de promotion de la santé (IREPS), et les observatoires régionaux de santé (ORS).
Mais il ne faut pas oublier les associations spécifiques et les associations de patients, notamment la Ligue nationale contre le cancer, l'Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie ou encore AIDES.
Force est de constater que les intervenants sont multiples, et que la coordination est faible.
La Cour des comptes a par ailleurs estimé les dépenses consacrées à la prévention entre 1 milliard et 10 milliards : la fourchette est donc large.
Devant ce manque de pilotage, un espoir apparaît cependant depuis la création, en 2009, des agences régionales de santé.
Celle-ci avait pour but principal de revenir sur la coupure absurde qui prévalait alors, entre la prévention et le soin, la ville et l'hôpital, le sanitaire et le médico-social, et d'instituer un responsable unique de la santé au niveau régional. La commission de coordination permet d'ailleurs de réunir à cet échelon territorial tous les acteurs chargés de la prévention.
Cependant, la mise en place des agences régionales a été difficile, car il a fallu résoudre des problèmes organisationnels, notamment en intégrant des personnels à statuts différents, tandis que le partage des compétences avec l'assurance maladie a été incomplètement clarifié.
L'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) a été construit avec des enveloppes « fléchées », alors que des objectifs régionaux des dépenses d'assurance maladie (ORDAM), sous forme d'enveloppes globales déléguées, auraient dû être la conséquence logique de la création des agences régionales.
Les conférences régionales de santé et de l'autonomie vont sans doute jouer demain un rôle plus important, même si elles n'ont qu'un rôle consultatif.
Pour pallier ces difficultés, la MECSS fait trente-six recommandations que vous trouverez en annexe du rapport.
Je ne les développerai pas toutes mais je souhaiterais néanmoins insister sur certaines.
Tout d'abord, je soulignerai la nécessité d'élaborer une nouvelle loi quinquennale de santé publique, qui fixerait un nombre limité de priorités, et d'en prévoir l'évaluation. Quatre priorités paraissent essentielles à la MECSS : la lutte contre l'alcoolisme qui fait 50 000 morts par an, la lutte contre le tabagisme qui occasionne 60 000 morts par an, la lutte contre l'obésité et la lutte contre la sédentarité.
Un débat d'orientation devrait être organisé, au printemps, au Parlement sur les priorités de santé à partir des observations des conférences régionales de santé et de l'autonomie, les moyens afférents étant examinés lors de la discussion, à l'automne, du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Un pilote ayant de réels pouvoirs sur l'ensemble des intervenants doit être clairement identifié. Il ne peut s'agir que d'un délégué interministériel rattaché au Premier ministre, nommé en conseil des ministres, ayant ainsi autorité sur tous les ministères. Les missions aujourd'hui assurées par le secrétaire général du comité de pilotage des agences régionales de santé seraient transférées à ce nouveau délégué interministériel.
Ainsi, nous disposerions de réelles priorités de santé publique hiérarchisées, de moyens financiers et d'un pilote responsable.
D'autres préconisations nous semblent également importantes. Pour mener à bien sa mission, le délégué interministériel pourrait s'appuyer sur l'Institut national de la prévention et de l'éducation pour la santé (INPES), dont les missions seraient, elles aussi, élargies pour en faire une véritable agence nationale de la prévention qui mènerait des actions de promotion et d'éducation à la santé et évaluerait les expérimentations menées au niveau local pour, le cas échéant, les généraliser.
La MECSS recommande de favoriser l'échelon local, le plus à même d'agir au plus près des besoins de la population.
Pour ce faire, en premier lieu, la mission d'évaluation des expériences locales et de coordination confiée aux agences régionales de santé devrait être renforcée. Ce pilotage territorial passerait, en deuxième lieu, par un rôle accru dévolu aux conférences régionales de la santé et de l'autonomie. Elles définiraient leurs priorités avec l'aide des observatoires régionaux de santé et transmettraient leurs propositions à la Conférence nationale de santé. Les membres de celle-ci seraient issus des conférences régionales de la santé et de l'autonomie. La conférence nationale serait chargée d'élaborer une synthèse qui serait proposée au Parlement lors du débat d'orientation sur les priorités de santé publique.
Une politique de prévention digne de ce nom ne pourrait se concevoir sans intégrer deux composantes essentielles : la santé scolaire et la santé au travail. Ces deux domaines sont aujourd'hui insuffisamment pris en compte. Certaines des personnalités auditionnées par la mission ont même indiqué que la médecine scolaire était « en déshérence ».
C'est pourquoi la MECSS préconise de favoriser une plus grande transversalité entre la médecine du travail, la médecine scolaire et les politiques de santé publique.
Le médecin du travail devrait établir un document qui préciserait les risques que peut comporter le poste de travail, ce document étant transmis au médecin traitant. Quant au médecin scolaire, il devrait transmettre à ce dernier les conclusions relevées à l'occasion des visites médicales obligatoires.
Il est indispensable de revaloriser la fonction de médecin du travail en confortant son indépendance. De même, il est nécessaire de revaloriser les professionnels, médecins et infirmières, de la médecine scolaire.
Une « instruction sanitaire », pour reprendre les termes de M. Didier Tabuteau, obligatoire serait mise en place durant la classe de CM2 et concentrée sur les grands facteurs de risques. Les enseignants seraient encouragés à participer à ces actions.
Par ailleurs, la coordination entre tous ces acteurs nécessiterait une plus grande fluidité dans les échanges de données.
Les missions de l'Institut des données de santé seraient élargies pour qu'il puisse collecter et héberger les données de santé anonymisées qui lui seraient transmises de manière obligatoire et ainsi les communiquer à tous les acteurs.
Il importe de favoriser les échanges de données entre médecins, que ce soit le médecin scolaire, le médecin du travail, le médecin-conseil ou le médecin traitant, tous soumis au secret médical. Ainsi, le médecin traitant rédigerait chaque année un document de synthèse à l'issue d'une consultation de prévention.
Parmi les autres préconisations, je citerai l'élaboration de consultations de prévention par tranche d'âge sur le modèle de la Mutualité sociale agricole, notamment entre trente-cinq et cinquante-cinq ans, période où apparaissent ou s'accentuent les facteurs de risques, alors même que la personne se sent bien portante, l'élaboration des seuils de facteurs de risques comme le cholestérol ou la tension par les conférences des consensus sous l'égide de la Haute Autorité de santé, ou encore la nécessité de revoir le calendrier des vaccinations et de rendre obligatoire la vaccination contre la rougeole.
Il serait nécessaire d'instituer sur le chiffre d'affaires réalisé en France par les fabricants de produits de tabac une taxe dont les recettes seraient affectées à des actions de prévention et de lutte contre le tabagisme, d'interdire les messages publicitaires télévisés ou radiodiffusés qui portent sur des produits alimentaires sucrés, salés et gras durant les programmes à destination des enfants, et de supprimer le conseil dit « de modération et de prévention » qui modère surtout les campagnes contre l'alcoolisme.
Pour prévenir les risques iatrogènes, il faut encourager la prescription à doses administrées. Quant au dépistage du cancer du sein, il convient d'imposer au dépistage individuel les mêmes critères de qualité qu'au dépistage organisé et, pour le cancer colorectal, de remplacer l'hémoccult par le test immuno-histo-chimique.
Quant à l'hypertension artérielle sévère, après sa suppression malencontreuse de la liste des affections de longue durée, il est primordial de veiller à un suivi des hypertendus. Enfin, il conviendrait d'intégrer le collège du Haut Conseil de la santé publique au sein de la Haute Autorité de santé tout en conservant son expertise médicale d'évaluation des stratégies de santé publique.
Pour conclure, il est essentiel de préserver le capital santé en intervenant dès le plus jeune âge et en prenant en compte les déterminants santé.
Nous aurons besoin de définir clairement dans une loi quinquennale de santé publique quelques priorités déclinées au niveau régional et de mettre en place un chef d'orchestre national ayant l'autorité suffisante, sans oublier la nécessité d'une coordination de proximité impliquant tous les acteurs.
Pour terminer, je voudrais remercier mes collègues de la MECSS, les deux coprésidents ainsi que toutes les personnalités que nous avons auditionnées.
Monsieur Jean-Luc Préel, je vous remercie pour ce rapport passionnant. Celui-ci devrait constituer, notamment pour les élus locaux, un précieux outil d'action dans le domaine de la santé, dont je rappelle qu'elle figure parmi les toutes premières préoccupations de nos concitoyens. Ce document devra donc être largement diffusé. Je n'aurai qu'une observation : peut-être aurait-il pu s'attarder davantage sur les divers niveaux de mise en oeuvre de la prévention sanitaire, en tentant de déterminer lequel, des échelons national ou local, est le plus approprié.
Je pense que nous serons unanimes pour louer la qualité du travail mené par notre rapporteur Jean-Luc Préel. Il s'inscrit ainsi dans la lignée des précédents rapports de la MECSS, adoptés à l'unanimité par ses membres, ce qui fait toute leur force dans la perspective d'une mise en oeuvre opérationnelle.
Comme cela a été souligné, la politique de prévention sanitaire se caractérise par une dispersion des acteurs, une mauvaise coordination et un pilotage insuffisant des actions menées. La loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, qui avait donné lieu à de nombreux débats lors de son examen, a finalement davantage relevé de la posture que de l'ambition de mettre en oeuvre une politique de prévention effective. Il convient aujourd'hui d'élaborer une nouvelle loi de santé publique quinquennale, afin de se doter d'un outil efficace. J'espère donc que les préconisations émises dans le rapport seront effectivement appliquées.
Nous sommes tous d'accord pour dire que la politique de prévention sanitaire est un sujet important. Mais, une fois cela dit, on constate que peu est fait en la matière… Nous avons été nombreux à insister, au sein de la MECSS, pour que celle-ci se penche sur ce thème d'étude qui nous semblait insuffisamment traité. J'y vois plusieurs raisons. En premier lieu, la prévention sanitaire obéit à un calendrier particulier : les effets des actions de prévention ne se font sentir qu'à long terme, dans un délai de cinq à quinze ans, alors que l'horizon temporel d'un Gouvernement se limite généralement à trois années. Le « retour sur investissement » n'est donc pas immédiat et difficile à mesurer… En deuxième lieu, les acteurs de la prévention sont rarement ceux qui bénéficient de celle-ci, à savoir les organismes payeurs. Enfin, le secteur de la prévention se caractérise par des conflits d'intérêts importants. Ainsi en est-il, par exemple, en matière de nutrition, en particulier celle des enfants, où s'opposent les intérêts respectifs des producteurs, des consommateurs et des diffuseurs ou communicants ; le même constat s'impose s'agissant du tabac.
Le travail de la mission a été précédé par la remise d'une communication de la Cour des comptes qui a permis d'orienter nos travaux. La Cour a souligné combien les actions de prévention sanitaire étaient disparates et mal coordonnées ; elle a déploré qu'un trop grand nombre de priorités ait été fixé, de telle sorte qu'aucune ne soit finalement prioritaire ; elle a enfin signalé les difficultés rencontrées par le système de santé pour détecter, évaluer puis généraliser les bonnes pratiques expérimentées localement.
Dans le cadre de nos travaux, nous avons réussi à surmonter le cloisonnement généralement effectué entre médecine de ville, médecine du travail et médecine scolaire. Nous avons en effet jugé impensable de traiter de la prévention sanitaire sans évoquer ces deux derniers domaines qui sont particulièrement importants, bien qu'ils n'entrent pas strictement dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale.
Par ailleurs, bien que ce point ne constitue pas le sujet central d'étude de la mission, il me semble que la question de la prévention sanitaire ne peut être dissociée de celle de l'accès aux soins, au sens large, sur l'ensemble du territoire, car les déséquilibres constatés dans le domaine curatif sont reproduits en matière de prévention, certains territoires ruraux et quartiers urbains sensibles étant tout particulièrement démunis.
J'en viens aux préconisations émises par la mission. Certaines peuvent paraître évidentes, mais il est des évidences qu'il est bon de rappeler. Nous devons nous doter, enfin, d'une loi de santé publique dont la prévention constituerait « l'acte premier », en fixant un nombre limité de priorités et en procédant à une évaluation périodique de sa mise en oeuvre. La coordination des actions doit être renforcée, en instituant, par exemple, un délégué interministériel rattaché au Premier ministre. Les actions menées doivent en outre être coordonnées avec celles des agences régionales de santé qui constituent un nouvel outil sur lequel on doit s'appuyer. J'ai insisté pour renforcer les préconisations relatives à la médecine du travail et à la médecine scolaire. Il convient de revaloriser ces métiers, ce qui suppose de renforcer leurs moyens mais aussi de leur accorder une plus grande place. D'autres préconisations ont été émises sur lesquelles, n'étant pas médecin, je ne me suis pas forgé d'opinion particulière, en particulier concernant le remplacement du test de l'hémoccult par celui immuno-histo-chimique pour le dépistage du cancer colorectal ; j'accorde toute ma confiance au rapporteur sur ce point.
Je soulignerai enfin deux insuffisances, du rapport, insuffisances qui ne m'ont cependant pas empêché de l'adopter. En premier lieu, il ne va pas assez loin sur certains points. J'ai évoqué la médecine scolaire et la médecine du travail ; il conviendrait, plus largement, de renforcer les moyens permettant de se doter d'une véritable politique de santé publique et de prévention sanitaire. En second lieu, il n'aborde pas suffisamment la question, certes délicate mais essentielle, des modalités de rémunération des actions de prévention qui sont difficiles à appréhender selon la tarification à l'acte.
En conclusion, le rapport qui vous a été présenté constitue un document très important et même indispensable, sur lequel nous devrons à l'avenir nous appuyer pour mettre en oeuvre la politique de prévention sanitaire. Cela nécessitera certes une volonté politique ; celle-ci existe dans mon groupe et je puis vous assurer que, si nous sommes portés aux responsabilités, nous donnerons suite au travail qui a été mené, pour mener une politique de prévention sanitaire inscrite dans la durée.
La prévention sanitaire est un sujet extrêmement important, dont nous sommes souvent amenés à débattre. Nous partageons tous le même constat : dans ce domaine, la France est en retard, et des efforts doivent être consentis.
Certes, « mieux vaut tard que jamais ». Permettez-moi néanmoins de regretter que ce rapport ait été si tardif. Je reconnais qu'il résulte d'un travail important, que je tiens à saluer, et qu'il contient des éléments intéressants, tant en ce qui concerne le constat que pour certaines de ses préconisations. Je ne partage toutefois pas l'enthousiasme dont a fait preuve le président de notre commission, car j'estime que ce rapport manque cruellement d'ambition au regard de la situation actuelle.
Certaines propositions méritent certes notre intérêt, comme l'élaboration d'une nouvelle loi de santé publique que nous réclamons dans nos rangs depuis longtemps, la coordination des actions entreprises, l'organisation d'un débat parlementaire sur les orientations retenues en matière de santé publique, un accès et une transmission des dossiers médicaux facilités entre médecins scolaires, médecins du travail, médecins-conseils et médecins traitants, ou encore l'interdiction de messages publicitaires portant sur certains produits alimentaires. Sur ce dernier point, permettez-moi de rappeler que notre groupe, mais pas seulement, a déjà eu l'occasion de déposer des amendements en ce sens et qu'ils ont toujours été rejetés par la majorité… Il est certes tout à fait « sympathique » d'émettre aujourd'hui une telle préconisation, mais encore faudrait-il, lorsque l'occasion en est donnée, y donner suite !
J'estime qu'en réalité, une grande partie des préconisations de la mission s'apparentent à des déclarations d'intention. Ainsi, la proposition d'un développement de la visite à domicile dans les familles en situation précaire dans le cadre de protection maternelle et infantile est évidemment excellente, mais pourquoi un tel dispositif n'existe-t-il pas aujourd'hui ? Où sont donc les moyens humains, en particulier les assistantes sociales, qui permettraient de le mettre en oeuvre ? De la même manière, il est proposé de renforcer les missions transversales des agences régionales de santé en matière de prévention sanitaire, mais on sait bien que ces instances travaillent surtout à supprimer des services sanitaires et des hôpitaux et qu'elles consacrent beaucoup moins de moyens à adapter la réponse sanitaire aux besoins de santé.
Ce rapport, catalogue de bonnes intentions, comporte de nombreuses carences et ne propose pas de mesure sérieuse ou ambitieuse pour améliorer la situation. Ainsi en est-il en matière de médecine du travail : rien n'est proposé pour responsabiliser les employeurs et réduire la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles. Tout au plus préconise-t-on de confier au médecin du travail le soin de rédiger et transmettre au médecin traitant un document précisant les risques éventuels que peut comporter un poste de travail… Quelle sera l'efficacité d'une telle mesure qui vise non pas à supprimer les risques mais simplement à les signaler, d'autant que les dernières réformes ont conduit à fragiliser l'indépendance des médecins du travail à l'égard de l'employeur ? Des insuffisances similaires peuvent être observées en matière de médecine scolaire. Les préconisations émises manquent singulièrement d'ambition au vu de la situation de ce secteur. Je rappelle qu'on ne compte en moyenne qu'un médecin scolaire pour 12 000 élèves et que seulement 62 % des postes de médecins scolaires et 69 % des postes d'infirmiers scolaires sont pourvus. Pourquoi cette situation ? Comment la surmonter ? Le rapport ne donne pas de réponse à ces questions ; il se borne à proposer la suppression des visites médicales des élèves âgés de neuf et douze ans, ce qui me laisse dubitative.
Le rapport est également silencieux sur le subventionnement par l'État de substances dangereuses, en particulier des pesticides qui bénéficient d'un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, sur les déterminants sociaux qui déterminent le mauvais état de santé ou encore sur les inégalités d'accès aux soins.
Pour toutes ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) juge très insatisfaisant ce rapport qui témoigne d'une ambition bien en-deçà de ce que la situation actuelle aurait exigé, notamment en termes de moyens consacrés à la prévention sanitaire. Ses insuffisances sont telles que nous nous sommes abstenus sur l'adoption du rapport.
Membre de la MECSS, je souhaite faire quelques observations sur le rapport, de grande qualité, qui nous a été présenté. Il résulte d'un travail approfondi ; son analyse est juste ; ses propositions sont pertinentes.
Je rejoins le constat dressé : notre système se caractérise aujourd'hui par la prépondérance des démarches curatives, au détriment de la prévention. Les actions de prévention sont en outre mal organisées, inégalement réparties entre les différents acteurs – caisses d'assurance maladie, mutuelles et collectivités territoriales – et résultent, souvent, davantage d'initiatives associatives que de décisions institutionnelles.
Comme l'a souligné le rapporteur, la communication en faveur de la prévention sanitaire souffre de certaines insuffisances. C'est le cas lorsqu'elle s'adresse aux plus fragiles, mais aussi quand elle est menée en milieu professionnel où la prévention sanitaire est souvent mal perçue et jugée intrusive par les salariés et leurs représentants syndicaux.
Certes, des campagnes de dépistage ont été mises en oeuvre à grande échelle, tant par l'État que l'assurance maladie ou les mutuelles. Des expérimentations sont menées. Une politique de lutte contre les risques en milieu professionnel a également été développée. Mais nous n'avons pas atteint les résultats escomptés, sans doute parce que l'on privilégie encore trop l'approche curative par rapport à la démarche de prévention.
Les propositions figurant dans le rapport sont, de ce point de vue, tout à fait intéressantes et doivent être encouragées. Il nous faut valoriser la prévention auprès de nos concitoyens et inventer de nouveaux dispositifs incitatifs. Nous devons viser une mise en oeuvre précoce de la prévention sanitaire, non seulement dans le cadre de la médecine de ville mais aussi dans le milieu professionnel ou scolaire. La participation des médecins à la démarche de prévention est à cet égard fondamentale. On pourrait sans doute utilement s'inspirer des expériences suédoise et danoise.
Je conclurai en appelant l'ensemble des membres de la commission à autoriser l'adoption de ce rapport.
Ce rapport est intéressant mais j'ai trouvé que certains points développés par le rapporteur étaient assez négatifs et pessimistes. Il parle de résultats décevants, de foisonnements d'actions, de compétences mal identifiées, de confusion, de dilution des responsabilités, de priorités trop nombreuses, d'évaluation malaisée. Si l'analyse est juste, des efforts, sur le terrain, sont faits, en particulier, comme l'a souligné le président Pierre Méhaignerie, par les collectivités territoriales. À côté du rôle de l'État et des départements dans ce domaine, les communes sont directement impliquées dans des actions utiles. La prévention, selon moi, n'est pas seulement l'affaire des pouvoirs publics, c'est aussi la responsabilité de chacun, de chaque citoyen. Une action d'information et de responsabilisation doit être mise en oeuvre sur tout le territoire. Les maires sont les mieux placés pour y contribuer à travers, comme vous l'indiquez dans votre rapport, les actions de prévention en direction des jeunes par exemple, actions qui passent par les cantines, l'éducation à la santé faite dans les écoles, ou le programme national Nutrition santé, mis en oeuvre par beaucoup de communes. Ces dernières peuvent également négocier un contrat local de santé avec les agences régionales de santé, mettre en place un service communal d'hygiène et de santé qui mène des actions dans les différents quartiers et pour certaines, dont ma ville, créer des maisons des adolescents, en liaison avec les hôpitaux. Ces structures prennent en charge les problèmes de santé des jeunes, en particulier pour répondre à des fragilités psychologiques et au besoin d'accompagnement à des moments importants de leur vie.
Il faut donc valoriser l'action des collectivités locales. La prévention telle que vous la décrivez a pour but d'informer, d'accompagner, de vacciner ou de dépister. Un véritable pilotage est nécessaire. C'est ici que doit se situer le rôle des agences régionales de santé qui doivent élaborer un schéma régional de prévention. Ont-elles déjà commencé à le faire ? Il leur appartient, en effet, de coordonner et de mettre en oeuvre des politiques de prévention.
Je ne partage pas la satisfaction de Bernard Perrut sur la mise en oeuvre des politiques de prévention dans lesquelles l'État, en charge de la santé publique, a un rôle majeur à jouer. Un fait capital ne doit pas être méconnu : notre médecine est en train de basculer. Si les maladies lésionnelles ou infectieuses régressent globalement, les hôpitaux voient se développer des maladies sociétales, comportementales. Elles sont évitables et relèvent de ce fait de la santé publique. Malheureusement la progression de ces pathologies est considérable.
Autre constat, une grande loi de santé publique est évoquée depuis le début de la législature, et en particulier lors de la discussion de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, de même qu'une loi sur la dépendance, nous les attendons encore. Cette dissociation entre le dire et le faire conduit à regretter que ce rapport n'ait pas été plus incitatif.
En matière de santé publique, tout le monde s'accorde sur les propositions, comme celle consistant à favoriser les bons comportements, à repérer et à soutenir les actions utiles, mais ce genre de remarques pourrait figurer dans tous les rapports. Il serait souhaitable de faire des suggestions qui sortent de l'ordinaire.
Par exemple, l'éducation à la santé en milieu scolaire, que vous préconisez, devrait être plus tonique : l'éducation sanitaire et environnementale, qui pour moi est la même chose, devrait être un des savoirs fondamentaux de l'école et ce dès le plus jeune âge, comme c'est le cas dans les pays du Nord.
De même, et je m'oppose parfois sur ce point à certains de mes collègues dans mon propre groupe, il faut savoir transgresser cette règle inscrite dans le code de la santé publique selon laquelle seules les vaccinations et les actes médicaux concernant les maladies infectieuses sont obligatoires. Certains processus de prévention, comme la prévention secondaire et le dépistage, ne touchent que les personnes les mieux informées et n'atteignent donc pas celles auxquelles ils devraient être d'abord destinés. C'est par exemple le cas du suivi et des soins buccodentaires pour les enfants, qui fait consensus contrairement à d'autres.
J'aurais également souhaité que soit davantage soulignée la prévention du vieillissement. Ce n'est bien sûr pas une maladie évitable : ce n'est pas une maladie et le vieillissement est inéluctable. Mais il est possible de prévenir le vieillissement dans de mauvaises conditions, qui malheureusement dépend d'abord du niveau de revenus des personnes âgées.
Le dépistage et la prévention des maladies mentales n'ont pas été évoqués. Or ils doivent être un axe majeur d'une politique de santé publique, les maladies mentales prenant actuellement un caractère pratiquement épidémique.
Dernier point, vous avez rappelé à juste titre la dispersion des initiatives, et il est notoire qu'un grand ministère de la santé publique et de la santé durable ainsi qu'une intégration de ces différentes composantes de la prévention que sont la santé scolaire et la santé au travail seraient nécessaires.
Je profite du débat sur ce rapport d'information pour vous rappeler celui que j'ai présenté cet automne dans le cadre de mon avis budgétaire sur les crédits de la santé dans le domaine de la prévention et de la sécurité sanitaire. Son audience a été faible parce que nous n'avons disposé que de peu de temps pour le présenter. Or je constatais alors que le budget consacré à ces actions diminuait. J'entends aujourd'hui qu'il faudrait que ce domaine soit prioritaire, alors que votre majorité a adopté ces crédits en baisse. Ce double langage me semble préjudiciable à l'élaboration de politiques de long terme.
Vous souhaitez que l'on vaccine davantage, mais pour cela il faudrait une plus grande confiance des citoyens dans la vaccination, un groupe de travail de députés a d'ailleurs été créé sur ce point. Des inquiétudes demeurent, en particulier sur les adjuvants contenant de l'aluminium qui peuvent avoir un impact sur la santé des personnes se faisant vacciner. Là non plus vous ne faites pas de propositions précises pour redonner confiance dans la vaccination.
S'agissant d'alimentation, vous rappelez qu'il faut responsabiliser les citoyens, nous avions fait dans ce domaine des propositions concrètes qui consistaient à imposer la mention sur les produits un signe de type feu vert, orange ou rouge en fonction de la composition des aliments, propositions qui ont toutes été repoussées. Ce moyen était pourtant simple. L'utilisation de produits « bio » que nous préconisions dans la restauration scolaire, notamment pour les plus petits – l'effet des pesticides étant particulièrement néfaste sur la santé –, n'est pas davantage prise en compte dans le rapport.
Le principe de précaution que nous avons introduit dans notre Constitution ne concerne que l'environnement et non la santé. Je plaide donc pour un élargissement du champ de ce principe. Cette mesure nous éviterait de prendre des décisions sans précaution, comme pour les ondes électromagnétiques, ou l'implantation des centrales nucléaires, alors que le nombre de leucémies augmente autour de ces dernières.
Enfin, je regrette de ne pas trouver dans le rapport des mesures favorisant le rôle de la marche ou du vélo. Plus précisément, rien n'est envisagé pour que nos villes rendent ces activités praticables simplement.
Il serait bien que le rapport qui a été distribué soit lu… Et l'État ne peut pas tout imposer. En la matière, Bernard Perrut nous l'a rappelé, place doit être laissée à la responsabilité individuelle.
Des recommandations pertinentes sont certes présentées, mais qui ne se traduisent pas dans la vie quotidienne de nos concitoyens, à qui on se contente de suggérer qu'il convient de se responsabiliser, sans leur en donner les moyens. Des incitations fiscales existent pour utiliser une voiture ou les transports en commun, pourquoi ne pas, de même, inciter à utiliser un vélo ? Je m'abstiendrai donc sur l'autorisation de publication de ce rapport qui ne présente que des voeux pieux.
Le rapport qui nous est présenté est utile et réaliste. Si, comme le relevait également notre collègue Bernard Perrut, il peut apparaître parfois négatif, il décrit cependant la réalité de la politique de prévention. La question que l'on peut se poser est de savoir s'il n'y a pas trop de « pilotes dans l'avion »… Comment rendre le pilotage plus lisible ? On assiste au déploiement des actions d'une multiplicité d'intervenants qui organisent chacun la prévention dans son secteur. Ce manque de clarté dans le pilotage est bien illustré par la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique qui avait recensé une centaine priorités de santé, autant dire aucune…
Les efforts sont dispersés alors que des priorités sont faciles à identifier. Aujourd'hui, nous savons que ce sont les maladies non transmissibles qui constituent le phénomène le plus critique pour la santé publique dans les pays développés. Dans le monde, elles représentent également plus de pathologies et de décès que les maladies infectieuses. Les progrès de l'hygiène, la lutte contre les épidémies portent leurs fruits. Les maladies que nous devons combattre sont maintenant celles du comportement de vie.
Ces maladies inscrites dans les affections de longue durée vont constituer 70 % des remboursements de l'assurance maladie en France, ce qui va poser un vrai défi financier. Il est donc nécessaire d'étudier les facteurs à l'origine des maladies non transmissibles. Ce fut l'objet d'un sommet des Nations Unies, au mois de novembre dernier je crois. Le tabac, l'alcool et la mauvaise alimentation sont apparus comme les facteurs les plus négatifs. Là doit se situer notre action. La lutte contre le tabagisme donne des résultats à l'horizon des dix ou quinze prochaines années, ce qui n'est pas une durée du même ordre que celle du temps politique. C'est aussi le cas des actions contre la surconsommation d'alcool. Les répercussions de la prévention en matière de comportements alimentaires sont également visibles sur le long terme. Les questions d'alimentation, le surpoids ou l'obésité sont aux États-Unis des facteurs de mort prématurée qui commencent à avoir un impact sur l'espérance de vie.
Jean-Luc Préel l'a souligné, il faut mettre en place un vrai pilotage de la prévention au niveau national, sur un plan interministériel. C'est nécessaire, sans créer de nouvelles structures mais en redéployant l'existant pour le rendre plus efficace. Les problèmes d'alimentation relèvent en effet de la santé mais aussi de l'agriculture qui en a aujourd'hui la responsabilité principale, de l'Éducation nationale ou de la politique familiale. Un pilotage interministériel serait donc parfaitement utile.
La volonté politique pourra se traduire à travers cette nouvelle organisation régionale que sont les agences régionales de santé qui sont au commencement de leur fonctionnement. Les plans régionaux de santé seront adoptés dans les prochains mois. Les agences régionales devront donc devenir le pilote interministériel régional, permettant une mise en phase des politiques de prévention menées par les différents acteurs. Quel sens aurait, en effet, une action des communes sur certains déterminants de santé ou les maladies non transmissibles si, par ailleurs, le citoyen usager de santé est au cours de sa vie pris en charge par la médecine scolaire, la protection maternelle et infantile, la médecine du travail, le médecin de famille. Un pilotage médical devra donc également se mettre en place à ce niveau.
Pour conclure, je regrette simplement que ce rapport, utile, présente trente-six pistes, ce qui me semble encore beaucoup et insuffisamment hiérarchisé.
Je confirme que ce rapport était évidemment attendu et indispensable. Je regrette simplement qu'il arrive un peu tard en cette fin de législature. Je remercie en tout cas notre collègue Jean-Luc Préel pour ce travail, auquel il tenait beaucoup et qui nous permet d'avoir ce débat ce matin.
J'insisterai pour ma part sur le fait que la prévention sanitaire dans notre pays est le « parent pauvre » de la santé publique. Nous l'avons d'ailleurs souligné à maintes reprises au cours des débats menés sur certains textes depuis cinq ans, de même que nous avons demandé l'élaboration d'une grande loi de santé publique. Aujourd'hui, nous constatons une absence de pilotage sur le territoire alors que les intervenants sont nombreux.
De façon plus précise, je souhaiterais revenir sur deux points : la protection maternelle et infantile et la santé scolaire. S'agissant de la protection maternelle et infantile, des difficultés sont constatées dans tous les départements, comme l'ont souligné de nombreux rapports et différents experts. Beaucoup de familles ne mesurent pas l'importance de la prévention. La question se pose de savoir comment mieux toucher les jeunes parents ou les futures mamans. Ce point a été évoqué lors d'une des premières auditions de la mission. Les propositions sur ce sujet mériteraient d'être renforcées.
Par ailleurs, dans le cadre de la protection maternelle et infantile et de la médecine scolaire, la question du dépistage se pose. On a besoin de dépister plus tôt les troubles des très jeunes enfants en matière de vision, d'audition, de langage ou d'autres types de handicap. Certains enfants seront sujets à des handicaps plus lourds simplement parce que leurs difficultés n'auront pas été détectées à temps et qu'ils n'auront pas fait l'objet d'un suivi. Une volonté affichée est nécessaire pour dépister et faire fonctionner la protection maternelle et infantile et la médecine scolaire. Encore faut-il qu'il y ait suffisamment de personnel pour assurer ces missions, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
Il y a dans tous les départements des organismes tels que les centres médico-psycho-pédagogiques ou d'autres instances, qui très souvent ne peuvent pas organiser leurs missions de manière partagée. Il serait bon de dépasser les frontières entre ces différentes entités.
Il est enfin nécessaire de rapprocher les intervenants et les dispositifs médicaux des lieux de vie sur les territoires. Nous savons que certaines personnes aujourd'hui renoncent aux soins ou les diffèrent. Il est donc important, en matière de prévention, d'intervenir de manière plus organisée et plus forte. Plusieurs propositions du rapport vont certes en ce sens. Mais il faut une politique très forte. On ne saurait se contenter de propositions qui risqueraient de rester au stade des intentions. Des trente-six propositions contenues dans le rapport, il serait bon de mettre quelques-unes plus particulièrement en exergue, en insistant sur la nécessité d'une intervention dès le plus jeune âge.
Je ne reviendrai pas sur le manque d'une loi de santé publique. Concernant le plan Santé Jeunesse de février 2008 présenté par Mme Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé, nous n'en avons pas vu le commencement.
S'agissant de la proposition n° 12 du rapport, qui vise à mettre l'accent, dans un souci de rationalisation, sur les visites médicales des élèves âgés de six ans et quinze ans et, en conséquence, à supprimer les visites des élèves âgés de neuf et douze ans, il me semble que le suivi scolaire devrait commencer dès l'âge de trois ans, ce qui permettrait de limiter les inégalités sociales.
Quant à la proposition n° 15, elle a pour ambition de prévenir les risques iatrogéniques en encourageant la prescription de doses administrées. À ce sujet, j'aimerais que les industries de la santé réfléchissent sur les doses pédiatriques pour éviter certains accidents.
Enfin, je rappelle que, dans le cadre de la discussion de l'article 33 de la loi sur le renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, la présente majorité a refusé d'intégrer l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé dans le groupement d'intérêt public nouvellement créé pour recueillir les données de santé de l'assurance maladie. Or, la proposition n° 5 du présent rapport inclut cet institut dans la politique de santé publique. C'est incohérent. En tout cas, nous avions raison : l'institut national avait bien sa place dans le groupement d'intérêt public.
Je tiens à souligner l'intérêt de ce rapport. Cela dit, je me concentrerai sur la proposition n° 35 qui s'inscrit dans la lutte contre les inégalités. Elle fixe comme objectif de favoriser l'égal accès à la prévention sur tout le territoire en assurant une présence médicale équilibrée. Je m'étonne que le rapport ne mette pas plus en avant les difficultés d'accès aux soins et les difficultés de la prévention en faveur des personnes en situation d'exclusion. Il ne s'agit pas seulement des personnes sans domicile fixe mais également de ceux qui renoncent de manière substantielle aux soins. Si je partage beaucoup de préconisations énoncées dans ce rapport, en revanche il me semble qu'il y a là un manque, notamment en termes de mobilisation de moyens.
Je voudrais aussi faire deux remarques concernant des décisions prises récemment. Des restrictions ont été mises en place concernant l'accès à l'aide médicale de l'État. La mise en place du droit de timbre a provoqué un moindre recours à l'offre de soins, notamment pour des pathologies particulièrement infectieuses. Ceci fait peser des risques sur la santé publique.
Par ailleurs, les moyens des centres d'examens de santé ont été diminués. Or, ce sont précisément des lieux où la population défavorisée, notamment ceux qui renoncent aux soins, pourraient trouver des éléments importants de prévention.
La prise en charge de ces personnes en précarité est indispensable pour éviter la recrudescence de certaines pathologies, notamment celles qui sont particulièrement transmissibles.
Je souligne que nous parlons ici de charges financières importantes. Le rapport que nous avions publié sur l'aide médicale de l'État montrait que, plus les gens arrivaient tard à l'hôpital, plus cela coûtait cher à la collectivité. La notion d'investissement est donc déterminante.
Je ne vais pas reprendre les propos de notre collègue Jacqueline Fraysse, que je partage entièrement. J'ai une préoccupation récurrente, concernant la santé au travail, les accidents du travail et les maladies professionnelles. Nous sommes fort éloignés de ce qu'il conviendrait de faire en la matière. Ce sujet est toujours relégué, comme par hasard, à la fin de la discussion des projets de lois de financement de la sécurité sociale. Un ministre s'était engagé à aborder ce sujet beaucoup plus tôt dans les débats. Toutefois, en pratique, cela n'a jamais été fait.
Les problématiques de reconnaissance de certaines pathologies liées aux maladies professionnelles et des effets de certains produits toxiques sur la santé me semblent essentielles. Je regrette qu'elles ne soient traitées dans ce rapport qu'au détour d'une phrase sur les médecins du travail et la nécessité de transmettre ce type d'information. On est loin du compte.
La proposition n° 13 du rapport incite à revaloriser les métiers de la santé scolaire. Avec notre collègue Gérard Gaudron, j'ai travaillé sur ce sujet, dans le cadre d'un rapport du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques. Il faut déplorer la faiblesse du nombre de médecins et d'infirmières scolaires, relevée par le rapport. Je rappelle par ailleurs qu'un médecin scolaire en début de carrière est moins bien rémunéré qu'un interne. Plus encore que la rémunération, c'est la place de la médecine scolaire qui doit être revue. Plus généralement, j'invite à réfléchir à la mise en place d'un corps de médecins de santé publique dédiés à la prévention.
À mon tour, je voudrais féliciter le rapporteur pour ce rapport riche et très intéressant. Comme cela est mentionné dans son introduction, la prévention a été longtemps le « parent pauvre » de la médecine car elle n'était pas prise en charge par la sécurité sociale.
En tant que médecin, je suis très attaché à la prévention, mais il serait fallacieux de croire que celle-ci pourrait permettre des économies. N'oublions pas que nous sommes tous mortels et que nous dépensons au cours de la dernière année de notre vie 50 % à 90 % du total de nos frais de santé.
Les causes de mortalité se divisent en trois groupes d'importance à peu près égale : les maladies cardiovasculaires, les cancers et les autres pathologies. Les maladies cardiovasculaires ne sont pas prises en compte en tant que telles dans ce rapport. Certes, on parle du tabagisme, de l'obésité ou encore de l'hypertension artérielle. Je partage l'interrogation du rapporteur sur le fait que l'hypertension artérielle ne soit plus prise en charge à 100 % car c'est un facteur important de maladie cardiovasculaire. S'agissant du cancer du sein, le rapport l'évoque en mentionnant toutes les précautions qui s'attachent au résultat du dépistage. Il cite aussi le cancer de la prostate avec la même circonspection et celui du col de l'utérus, mais il omet un autre type de cancer, pour lequel le dépistage est possible : le cancer cutané.
Dans les conclusions, il n'est pas fait de propositions réelles, sauf pour le cancer colorectal. Pour le cancer du sein, il s'en tient au statu quo. Pour le cancer de la prostate et pour le cancer du col de l'utérus, aucune proposition n'est faite.
Parmi les maladies infectieuses, je n'ai pas vu mentionnée, ou en tout cas pas suffisamment mise en lumière, la question du SIDA. Pour les jeunes, c'est capital.
Pour ce qui est du dossier médical personnel, le rapport consacre un encadré à ce sujet. Il parle de la loi d'août 2004, mais pas de l'amendement voté l'année dernière à la proposition de loi de loi déposée par M. Jean-Pierre Fourcade modifiant certaines dispositions de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, permettant d'établir un dossier médical personnel sur un support amovible. Cette disposition nécessitait, pour être appliquée, des décrets qui devaient être publiés avant le mois de décembre 2011. On attend toujours ces décrets. Si le dossier médical personnel voyait enfin le jour, ce serait un élément important en termes de coordination entre les médecins et un moyen de prévention notamment des maladies iatrogéniques.
Je voulais souligner d'abord l'excellent travail accompli.
Sur le fond, nous avons fait le constat ce matin que la médecine scolaire était un échec. Pour en trouver la cause, il faut remonter à l'époque des discussions qui ont présidé à l'adoption de la loi du 13 août 2004 sur la décentralisation. J'avais plaidé pour que ce soit les régions ou les départements qui assument la charge de la médecine scolaire. Les syndicats ont refusé cette décentralisation et le transfert du personnel. Il n'y a pas eu de liberté de choix : on a décidé que les médecins et les infirmières scolaires resteraient de la compétence de l'État. Aujourd'hui, la situation est dramatique. Or, nous sommes confrontés à un taux particulièrement élevé de suicide chez les adolescents. Je dis à l'opposition qu'elle n'arrête pas de plaider pour la décentralisation mais qu'elle n'en tire pas les conséquences, en se focalisant non sur la santé des enfants mais sur les exigences syndicales.
Ce rapport relève l'absence de pilotage. Il est vrai qu'on n'a pas suffisamment rapproché la population des moyens de prévention. Mais cela n'a pas de sens de rechercher un seul pilote au niveau national. Cela ne fonctionnerait pas mieux.
Il y a quelque chose d'autre qui manque. La proposition n° 18 vise à charger le médecin traitant d'élaborer un document médical de synthèse annuel pour chaque patient qui pourrait être transmis aux autres médecins. S'agit-il de la dernière version officielle du dossier médical personnel ? S'agit-il de reprendre la proposition de loi relative à l'expérimentation du dossier médical sur support numérique portable que j'avais cosignée avec nos collègues Jean-Pierre Door et Pierre Morange et qui a été reprise dans la loi issue de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Fourcade ? Il s'agit de permettre aux professionnels de santé de partager l'information plutôt que de confier celle-ci au seul médecin traitant. J'aurais aimé que ceci soit mentionné dans le rapport.
Un sujet aussi important et aussi vaste que la politique de prévention aurait sans doute nécessité un délai d'examen plus long que trois mois : le rapporteur a donc dû privilégier certains thèmes et cette situation explique que certains points restent peu développés. L'éducation à la santé doit être encouragée dans les écoles et dans les familles dès le plus jeune âge. Des mesures de bon sens, comme le simple fait de ne pas fumer en présence d'un enfant ou le fait de se laver les mains avant de passer à table, ne semblent plus être appliquées aujourd'hui dans toutes les familles et dans tous les établissements scolaires. S'agissant du dossier médical personnel, je partage l'avis de Dominique Tian, il est regrettable que la mesure qu'il a proposée ne soit toujours pas mise en oeuvre tant les lacunes en matière de transmission de l'information entre professionnels de santé sont patentes. Le rapport aurait aussi pu évoquer la prévention de la dépendance, car il s'agit d'une problématique essentielle. Des mesures d'adaptation de l'habitat pourraient être utilement préconisées. D'autres sujets auraient aussi pu être développés : l'impact de l'environnement sur la santé – le plan national Santé environnement, qui fait l'objet d'un groupe de suivi que je préside, témoigne de l'importance de ce sujet – l'éducation à la sexualité, l'accès à la contraception et la prévention des grossesses non désirées ou les maladies sexuellement transmissibles…
Le rapport propose de mettre en place un délégué interministériel à la prévention sanitaire rattaché au Premier ministre. Il serait chargé d'assurer le pilotage administratif et de coordonner les actions entre tous les acteurs et il exercerait également les missions aujourd'hui confiées au secrétaire général du comité de pilotage des agences régionales de santé. Je me demande si l'allocation des ressources permettrait de confier à ce délégué interministériel les missions aujourd'hui dévolues aux agences régionales de santé. Une telle réforme serait opportune car la politique de prévention constitue actuellement la variable d'ajustement des budgets de ces agences. Ainsi, dans la région Midi-Pyrénées, les effectifs affectés à cette politique ont diminué d'un tiers. Se pose aussi la question du rétablissement de la confiance vis-à-vis de la vaccination à la suite de la pandémie grippale H1N1. J'ai interrogé le directeur général de la santé sur une proposition formulée par Jean-Pierre Door dans son rapport sur la gestion de cette maladie et qui concerne la suppression du Comité national de lutte contre la grippe, créé dans la plus grande discrétion auprès de la direction générale de la santé. Ce comité a-t-il disparu ou a-t-il été intégré au Haut Conseil de la santé publique ? Je tiens aussi à souligner le manque de volontarisme politique en matière de lutte contre le tabagisme comme en témoigne l'augmentation de la consommation de tabac chez les adolescents depuis trois ans. On peut regretter que la taxe sur la valeur ajoutée sociale ne s'applique pas au tabac puisque les droits d'accises vont être réduits : cela aurait permis de dégager des fonds non négligeables en faveur des politiques de prévention. Enfin, je regrette que l'expérimentation du dossier médical partagé sur un dispositif de type clé USB, adopté à l'initiative des plusieurs parlementaires de la majorité, n'ait pas encore été mise en oeuvre. Pas un seul décret d'application n'a, pour l'instant, été adopté. Cela témoigne d'un grand mépris du Gouvernement à l'égard du Parlement et même de sa majorité. Alors que certains sites très sécurisés, à l'instar du Pentagone, font actuellement l'objet d'attaques informatiques, la mise en place d'un tel support serait de nature à limiter la centralisation des données et donc à éviter d'éventuelles modifications de ces données par des pirates informatiques. Le recueil des données serait limité au seul médecin traitant.
Les associations qui, dans chaque département, sont chargées de l'organisation du dépistage du cancer du sein et du cancer colorectal font un travail essentiel. Ces associations qui réunissent notamment des élus, des professionnels de santé et des représentants des caisses primaires d'assurance maladie, ne bénéficient que de moyens financiers limités alors même que la communication dans ce domaine est essentielle pour vaincre les réticences des personnes concernées à l'égard de ce dépistage et que d'autres maladies feront très certainement l'objet de telles campagnes dans les années à venir.
Je suis surpris, lorsqu'on évoque la prévention sanitaire, qu'on n'aborde pas la question du « bien vieillir » qui est pourtant au coeur de notre société. En tant que maire d'une ville thermale, je pense que le travail effectué auprès de nos compatriotes âgés, notamment dans le cadre des cures thermales, a un impact important en matière de prévention sanitaire.
Je tiens, en premier lieu, à rappeler que la mission a disposé d'un temps limité alors que le thème de la prévention est particulièrement vaste. Cependant, la lecture du rapport et du compte rendu des nombreuses auditions vous permettra de constater que les sujets que vous avez évoqués ont tous été abordés. La question du « bien vieillir » est notamment évoquée au travers de la question du « bien vivre » et de l'expérimentation menée par la caisse primaire d'assurance maladie de la Sarthe, dénommée « Santé active » et qui sera étendu à d'autres caisses primaires. Par ailleurs, je regrette le retard pris pour mettre en place le dossier médical partagé sur clé USB. Cela améliorerait grandement la transmission de l'information entre professionnels de santé. À titre d'exemple, lors de son audition, le docteur Leicher, représentant du syndicat MG France, a notamment proposé que le médecin traitant fasse, chaque année, une synthèse sur la santé du patient à destination du médecin du travail et que ce dernier transmette au médecin traitant des éléments sur les risques d'exposition au poste. S'agissant de la médecine scolaire, je partage, à titre personnel, le constat de Dominique Tian : la médecine scolaire est aujourd'hui peu développée, alors que l'éducation sanitaire est primordiale dès le plus jeune âge. Un transfert de la responsabilité de la gestion des médecins et des infirmières concernés aux collectivités territoriales serait de nature, j'en suis convaincu, à améliorer l'efficacité de cette médecine.
La politique de prévention est aujourd'hui le « parent pauvre » de la politique de santé en raison d'une culture française davantage tournée vers le « curatif » mais aussi en raison de la multiplicité des acteurs, des lacunes dans le pilotage de cette politique et du manque de priorités. C'est pourquoi, je propose une nouvelle loi de santé publique qui comprendrait quatre priorités et dont la mise en oeuvre serait régulièrement évaluée. De même, le pilotage national et régional de la politique de prévention doit être réformé. Au niveau national, la création d'un délégué interministériel, rattaché au Premier ministre et ayant capacité à agir sur l'ensemble des ministères, me semblerait de nature à faire de la politique de prévention une priorité. La direction générale de la santé n'a pas aujourd'hui une telle capacité interministérielle. Au niveau régional, les agences régionales de santé permettent de réunir tous les acteurs dans les commissions de coordination. Une fois les priorités de la politique de prévention définies et le pilotage réformé, je pense que cette politique pourra être déclinée dans différents secteurs comme la médecine scolaire, la médecine du travail ou les déterminants de santé… J'espère que la prochaine législature verra la mise en oeuvre des préconisations de cette mission ; les deux coprésidents de la MECSS y veilleront très certainement.
La Commission autorise à l'unanimité le dépôt du rapport d'information sur la prévention sanitaire en vue de sa publication.
La séance est levée à douze heures.