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Commission de la défense nationale et des forces armées

Séance du 6 octobre 2009 à 16h30

Résumé de la séance

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  • afghanistan
  • armée
  • militaire
  • programmation militaire
  • équipement

La séance

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Audition de M. Hervé Morin, ministre de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2010

La séance est ouverte à seize heures trente.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Nous avons une fois encore le plaisir d'accueillir M. le ministre de la défense, qui va nous exposer les détails du projet de loi de finances. La réunion de travail que j'ai eue avec lui récemment à ce propos m'a permis de constater que le budget proposé est en concordance quasi parfaite avec la loi de programmation militaire, ce qui est très satisfaisant.

Je souhaiterais cependant, monsieur le ministre, que vous nous apportiez quelques précisions.

Tout d'abord, dans le contexte de la crise actuelle, les personnels civils et miliaires désirent-ils toujours quitter les armées, ou ont-ils adopté une attitude de prudence ?

Pouvez-vous, ensuite, faire le point sur les équipements, notamment sur les commandes anticipées de matériel que vous évoquiez au printemps ?

Où en sont, par ailleurs, au titre des recettes exceptionnelles, les cessions immobilières et celles des fréquences ?

Enfin, comment le budget à venir traite-t-il le maintien en condition opérationnelle (MCO), que la sophistication croissante des matériels rend de plus en plus coûteux ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Le budget que j'ai l'honneur de vous présenter est strictement conforme à la loi de programmation militaire que le Parlement a adoptée au mois de juillet et qui faisait suite au Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale présenté par le Président de la République le 17 juin 2008.

Pour 2010, la mission « Défense » bénéficiera d'un budget total de 39,18 milliards d'euros, dont 7 milliards d'euros de pensions.

Conformément à la trajectoire prévue par la programmation, qui avait pris acte du pic de besoin d'équipement et de la bosse résiduelle qui culminait en 2009, ce montant est inférieur au budget de 2009, mais bien supérieur à celui de 2008. L'évolution budgétaire devrait retrouver à partir de 2011 la ligne tendancielle de la loi de programmation militaire et du Livre blanc.

Les crédits de la mission « Défense » stricto sensu s'élèvent, hors pensions, à 30,12 milliards d'euros. Après prise en compte de l'inflation et retraitement des modifications de périmètre, c'est le montant exact prévu par la loi de programmation militaire en euros constants. En revanche, il est inférieur à celui qui avait été prévu par le budget triennal sur la base d'hypothèses d'inflation qui n'avaient pas anticipé la désinflation constatée en 2009 – la prévision de 2 % a ainsi été révisée à 0,4 %.

Les crédits de la mission « Plan de relance de l'économie » pour la défense s'élèveront à 770 millions en 2010, après 990 millions en 2009. Je souligne que mon ministère est à cet égard tout à fait exemplaire, car il aura dépensé 100 % des crédits prévus, les engagements représentant en effet déjà plus de 90 % des prévisions et les paiements près de 60 %.

Au-delà d'équipements majeurs tels que le bâtiment de projection et de commandement, qui permet d'assurer 25 % du plan de charge des chantiers navals de Saint-Nazaire, le plan de relance a permis d'anticiper des investissements prévus au titre de la loi de programmation militaire. J'ai ainsi pu constater sur le terrain que de nombreuses PME ont été sauvées, et avec elles des savoir-faire parfois uniques en France – je pense en particulier à une petite entreprise de 20 salariés, dans le département de la Meuse, qui fabrique des parties de bombes. Je rappelle à cet égard que 110 millions d'euros supplémentaires ont été engagés dans des études en amont, qui préparent les équipements et la valeur ajoutée de demain – et d'après-demain.

Enfin, nous disposerons de près de 1,3 milliard de recettes exceptionnelles en 2010, avec 700 millions d'euros de cessions d'actifs immobiliers, à Paris et en province, et 600 millions au titre de la cession des fréquences et de l'usufruit des satellites de télécommunication.

Pour ce qui concerne l'immobilier, nous avons déjà obtenu 400 millions d'euros de recettes en 2009, pour un objectif qui reste fixé à 970 millions d'euros. Plusieurs dossiers sont en cours de négociation, notamment en région parisienne où la discussion avec la Caisse des dépôts et la SOVAFIM est sur le point de s'achever. Dans cette affaire, nous souhaitons obtenir à la fois le prix de vente le plus élevé possible et une clause de retour à bonne fortune, qui permettrait à l'État de percevoir l'éventuelle plus-value que pourrait dégager l'évolution du marché d'ici à ce que les locaux concernés puissent être libérés, en 2014, lors de l'achèvement du nouveau ministère de la défense à Balard.

S'agissant des fréquences, le processus, qui dépend du Premier ministre et de l'ARCEP, a pris du retard. La cession des bandes de fréquence FELIN et RUBIS n'interviendra qu'après l'attribution de la quatrième licence. Nous ne percevrons donc pas de recettes à ce titre en 2009, mais seulement en 2010.

Parallèlement, nous prévoyons, conformément à la loi de programmation militaire, une recette provenant de la cession de l'usufruit des satellites de télécommunication. Nous allons donc pouvoir engager la procédure d'appel à la concurrence à cet effet. Je précise que tous les retards en matière de crédits ont été compensés par une décision du Premier ministre nous permettant d'utiliser les crédits de reports à due proportion de ce que nous aurions dû toucher au titre des recettes exceptionnelles, soit 500 millions en début d'année et 400 millions en juillet.

Le budget pour 2010 applique aussi à la lettre le mécanisme de financement des OPEX prévu par la loi de programmation militaire. La provision passera ainsi de 510 millions en 2009 à 570 millions en 2010, pour une dépense estimée à 870 millions en 2009 et autour de 800 millions en 2010. La loi prévoit que la couverture du solde est financée par la réserve de précaution interministérielle. Les opérations en Afghanistan comptent pour la moitié de ces 800 millions d'euros et la présence au Liban pour moins de 100 millions d'euros.

Le budget proposé est au service de la réforme du ministère, avec des gains d'effectifs prévus de 8 250 postes et une réorganisation territoriale et fonctionnelle prévoyant la fermeture d'une dizaine d'unités cette année, avant les grands mouvements prévus pour 2010 et 2011. Des propositions de postes ont été faites à 95 % du personnel civil de la défense et 100 % du personnel a bénéficié d'un accompagnement.

La masse salariale sera stabilisée en 2010 à hauteur de 11,7 milliards. Conformément aux engagements pris, un plan sans précédent d'amélioration de la condition du personnel, d'un montant de 114 millions d'euros, sera mis en oeuvre. Un capitaine premier échelon célibataire verra ainsi sa rémunération mensuelle nette passer de 2 550 euros à 2 900 euros, soit une augmentation de 350 euros. Après avoir revalorisé la rémunération des militaires du rang en 2008 et celle d'une partie des sous-officiers et des officiers en 2009, ce sera en 2010 le tour de l'autre partie de ces corps, avant celui des officiers supérieurs et des adjudants-chefs et des majors en 2011. Il s'agit là d'un double mouvement de parité avec les fonctionnaires en tenue – gardiens de prison et policiers – et de repyramidage des salaires, visant à éviter qu'un sous-officier gagne plus qu'un jeune officier.

Plusieurs députés. Cela n'a rien de choquant en fin de carrière !

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Je ne suis pas choqué que, compte tenu de leurs niveaux de qualification respectifs, un pilote de Rafale – qui est lieutenant ou capitaine – soit mieux rémunéré qu'un adjudant-chef de la base aérienne, même si tous deux exercent des métiers indispensables pour la défense. Cette mesure donne suite au rapport du Haut comité d'évaluation de la condition militaire, adopté par le CSFM en février 2007, comme s'y était engagée Mme Alliot-Marie en février 2007.

Le plan d'accompagnement des restructurations recevra 180 millions d'euros. Les premiers enseignements de l'année 2009 montrent que ces dispositifs fonctionnent bien : 6 000 dossiers ont été déposés au titre des pécules militaires, pour un objectif de 1 100 par an, et 800 pour les indemnités de départ volontaire civiles, pour un objectif de 500 par an. Nous consacrerons donc un peu plus d'argent à absorber le stock de demandes et à poursuivre le mouvement l'année prochaine.

En matière d'équipement, l'effort engagé cette année, avec un montant de 18 milliards d'euros – supérieur de près de 20 % aux 15 milliards d'euros que comportait la loi de programmation précédente –, permet l'arrivée de matériels attendus. Seront ainsi livrés en 2010 99 VBCI, 5 000 FELIN et les premiers NH 90 marine dans un premier standard. Nous disposerons aussi du premier SNLE doté du missile M 51, ainsi que du nouveau satellite d'observation HELIOS 2, qui sera lancé en décembre 2009, sans oublier 11 Rafale, 7 Tigre et 34 canons CAESAR, lesquels donnent entière satisfaction en Afghanistan.

Nous commanderons par ailleurs en 2010 la première adaptation d'un SNLE au M 51, trois satellites d'observation optique MUSIS, 4 hélicoptères COUGAR et des missiles Météor, lesquels font partie des développements du Rafale.

J'ajouterai enfin que les restructurations territoriales concerneront en 2010 une cinquantaine de sites et 16 000 personnes. À partir des premiers retours d'expérience, qui sont positifs, nous poursuivrons le développement des bases de défense, dont le nombre passera de 11 à 18. Il apparaît que ces bases doivent avoir un volume significatif et nous prévoyons donc d'en créer non plus 90, mais plutôt 60 à 65. Je saisis cette occasion pour rappeler que la création des bases de défense consiste à regrouper des personnels pour servir l'ensemble des dispositifs, et non à supprimer des régiments.

Je conclurai en soulignant à nouveau que le budget qui vous est présenté est excellent et conforme aux décisions du Parlement. Il ne doit pas nous faire oublier pour autant que cette réforme colossale exige un accompagnement très fin du personnel. Mes collaborateurs et moi-même nous rendons fréquemment dans les unités destinées à fermer. Des hommes et des femmes ont été chargés d'assurer cet accompagnement individualisé et une bourse de l'emploi a été créée. Le personnel doit être convaincu que la réforme est nécessaire à la modernisation de notre outil de défense. C'est jusqu'à présent l'impression que m'ont donnée les hommes et les femmes que j'ai rencontrés.

PermalienPhoto de Guy Teissier

La forte demande de départs ne risque-t-elle pas de déstabiliser la courbe des âges ou celle des grades ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Il ne s'agit pas d'un système à guichet ouvert et les personnels indispensables – comme les atomiciens affectés aux SNLE ou aux SNA, qui seraient les premiers à pouvoir bénéficier d'un effet d'aubaine en empochant le pécule proposé avant d'aller travailler chez Alstom ou Areva –, n'ont pas droit à l'indemnité de départ, qui ne s'applique qu'aux catégories ou aux métiers en sureffectif.

PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Nous avons interrogé à plusieurs reprises et sans grand succès le ministère sur le retour d'expérience des bases de défense, souhaitant notamment savoir combien elles coûtent et combien elles rapportent au terme de la première année de la réforme. Pourriez-vous nous indiquer comment cet aspect de la réforme se met en place et si la mutualisation et les économies attendues sont bien au rendez-vous ?

En deuxième lieu, le dispositif que vous avez présenté voici quelques mois affiche une volonté forte de déflation des effectifs du ministère de la défense. Bien que vous indiquiez que l'objectif est atteint et dépassé, un « effet stock » est inévitable au début d'une telle réforme ; les premiers mois ne sont donc pas révélateurs de la tendance à long terme et de la capacité à maintenir le rythme. Comment évaluez-vous cet « effet stock » ? La crise économique aura-t-elle, selon vous, un impact sur la déflation à venir des effectifs et pensez-vous pouvoir maintenir le rythme de manière à atteindre le niveau d'économies attendu ?

Pour ce qui est enfin de la valorisation des actifs immobiliers et des fréquences, votre discours est exactement le même que l'an dernier, à cette différence près que vous annonciez alors que ces actions permettaient de réaliser 1,7 milliard d'euros, indiquant notamment que l'opération engagée avec la SOVAFIM serait achevée quelques semaines plus tard. Quels moyens envisagez-vous de mobiliser pour ne pas être contraint de tenir encore le même discours l'an prochain ? Quel est le niveau de réalisation de ces actifs ? Quant aux fréquences, qui les achètera et comment entendez-vous valoriser leur vente ?

PermalienPhoto de Marguerite Lamour

Qu'en est-il du programme des FREMM ?

Le budget pour 2010 prévoit-il des crédits pour d'éventuelles études sur le second porte-avions ?

Comment est prévue la continuité du navire-école Jeanne d'Arc, qui partira en fin d'année pour sa dernière campagne ?

Je tiens aussi à évoquer le démantèlement des navires, pour lequel vous m'aviez assuré, lors du vote de la loi de programmation militaire, que des crédits lui étaient consacrés. Depuis, le volet « éco-conception » du Grenelle de la mer a consacré cette filière de démantèlement européenne et mixte, qui correspond aux préconisations du rapport que j'ai rédigé en 2007. Les crédits dédiés à cette filière figureront-ils au budget de votre ministère ou à celui du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer ?

PermalienPhoto de Nicolas Dhuicq

L'augmentation du nombre des souhaits de départ est-elle liée à une moindre volonté, dans la Nation, de servir et de prendre des risques ?

Que comptez-vous faire, par ailleurs, dans l'éventualité de nouveaux morts français en Afghanistan ? De fait, les démocraties occidentales acceptent difficilement les pertes supplémentaires, comme le montre l'exemple canadien.

Que prévoit votre budget pour renforcer le sentiment patriotique et la notion de service ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Monsieur Cazeneuve, le questionnaire complet que vous avez adressé au ministère vient de parvenir dans les services et nous y répondrons.

Les bases de défense sont l'instrument de la réorganisation du système. La mutualisation permet des économies liées à la déflation des effectifs. Ces économies, comme celles qui sont réalisées sur le plan du fonctionnement, permettent d'abonder les investissements.

Pour ce qui concerne l'immobilier, les cessions diverses et la négociation du contrat avec la SNI ont dégagé cette année 400 millions d'euros. Pour l'immobilier parisien, les volumes seront peut-être inférieurs aux prévisions, mais une clause de retour à meilleure fortune est prévue et le Premier ministre s'est engagé à ce que les crédits de report puissent être consommés en cas de besoin. Les armées disposeront donc des crédits dont elles ont besoin, et c'est ce qui importe. Mieux vaut prendre le temps de négocier les meilleures conditions avec la Caisse des dépôts et la SOVAFIM, plutôt que de précipiter une mauvaise négociation que vous ne manqueriez pas de me reprocher. Je tiens à éviter que ne se reproduise la situation de la vente de l'Imprimerie nationale.

En matière de déflation d'effectifs, je ne sais pas lire dans le marc de café. Alors que de nombreux parlementaires prédisaient l'an dernier que, compte tenu de la crise, nous n'atteindrions jamais les objectifs fixés car le personnel civil ou militaire ne voudrait pas partir, nous n'avons au contraire pas pu répondre à la demande. Dès lors qu'un personnel possédant des compétences que nous n'entendons pas garder souhaite partir, il serait cohérent que nous puissions le lui permettre au plus vite, afin de ménager des marges budgétaires supplémentaires. Notre problème n'est pas tant d'atteindre le chiffre de 8 250 départs que de nous y limiter.

Madame Lamour, je vous donne la primeur de l'annonce que je comptais faire jeudi à Lorient de la commande des trois dernières FREMM.

En outre, quelques millions d'euros sont maintenus pour préserver les équipes et les compétences nécessaires à la construction d'un second porte-avions.

Quant au démantèlement des navires, 50 millions d'euros sont prévus à cet effet dans la loi de programmation militaire, et j'ai envoyé au Premier ministre et à la commission présidée par MM. Juppé et Rocard des demandes qui s'inscrivent dans le cadre du grand emprunt, afin que cette filière industrielle englobe l'ensemble des équipements militaires, notamment les blindés.

Monsieur Dhuicq, la capacité de résilience de la Nation, évoquée dans le Livre blanc, est l'un de mes soucis permanents. À chaque mort français en Afghanistan, je redoute que notre société cède à l'émotion et n'entende pas la raison. Toutefois, je suis fier, car je menais ce combat depuis 2007, d'avoir obtenu l'exonération totale des droits de succession pour les ayants droit des soldats morts en opérations extérieures. Cette disposition, qui ne sera plus dérogatoire, figure dans le projet de loi de finances.

PermalienPhoto de Michel Grall

La France conserve en 2008 le quatrième rang mondial en matière d'exportations d'armement. Quelles sont les perspectives en 2009 et 2010 pour ce secteur, qui concerne directement 50 000 emplois ?

Par ailleurs, dans le contexte de la tension croissante qui se manifeste entre Israël, les grands pays occidentaux et l'Iran, comment envisagez-vous le maintien – ou un éventuel redéploiement – des troupes françaises présentes au Sud Liban, où le Hezbollah est également présent ?

PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

La discussion de la loi de programmation militaire a fait apparaître une sérieuse interrogation quant aux capacités de notre armée de l'air. Quelles solutions à court terme allez-vous adopter pour pallier le retard de l'A400M ? Pensez-vous recourir à des appareils de type MRTT ou au CASA, voire à un avion brésilien évoqué récemment ?

Par ailleurs, les crédits destinés aux équipements de cohérence opérationnelle doivent être défendus, afin d'éviter à nos soldats d'aller eux-mêmes s'approvisionner. Quelles dispositions avez-vous prises à cet égard ?

PermalienPhoto de Yves Vandewalle

La question que je souhaitais poser est précisément celle que vient de poser M. Beaudouin à propos du transport aérien.

PermalienPhoto de Jean Michel

Le budget prévu dans le cadre de la loi de finances initiale respecte bien la loi de programmation militaire, mais il comporte 1,26 milliard d'euros de recettes exceptionnelles et 770 millions d'euros au titre du plan de relance, soit un total de 2 milliards. En outre, s'il est supérieur de près de 2 milliards à celui de 2008, il reste inférieur de 840 millions d'euros à celui de 2009.

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

J'ai expliqué pourquoi.

PermalienPhoto de Jean Michel

Pour ce qui concerne notamment les dépenses d'équipement, la progression, certes importante par rapport à 2008, se traduit par un montant inférieur de 920 millions d'euros au chiffre de 2009. Je me félicite au demeurant de l'augmentation de près de 11 % du nucléaire, due à la mise en oeuvre du M 51.

Votre projet de budget ne prévoit aucune commande nouvelle de Rafale en 2010, ni aucune commande d'avion de transport tactique dans l'attente du A400M. Je rappelle que la commande pluriannuelle de Rafale doit être signée avant la fin de cette année. Rien n'est prévu pour le successeur du missile Milan, qui sera sans doute acheté sur étagère à l'étranger – ce qui laisse incertain le sort de l'entreprise française fabriquant cet engin qui a donné entière satisfaction. Rien non plus en matière de commandes de drones. Si les OPEX représentent 65 % du montant prévisionnel de dépenses, aucun crédit n'est prévu pour le deuxième porte-avions. Ce projet de budget présente donc des insuffisances.

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Au Liban, où prévaut en effet une certaine tension entre l'armée libanaise et le Hezbollah, aucun redéploiement de notre dispositif n'est en cours. Les effectifs français devraient rester de 1 600 hommes, avec les mêmes équipements. J'ai cependant déjà indiqué à votre Commission que nous avions retiré le bâtiment de la marine nationale dont la présence au large des côtes libanaises semblait avoir peu d'utilité opérationnelle.

En matière d'exportations, 2008 a été la meilleure année depuis 2000, avec des recettes de 7,3 milliards d'euros pour un objectif de 7 milliards. En 2009, pour le seul Brésil et indépendamment du projet d'achat de Rafale, deux contrats ont rapporté 4,5 milliards d'euros à l'économie française – l'un pour des sous-marins, pour lesquels la France a été préférée à l'Allemagne, et l'autre, le plus important jamais signé par EADS en la matière, pour 51 hélicoptères. Je rappelle à ce propos que, pour la comptabilité nationale, les contrats ne sont pas pris en compte au moment de leur signature, mais lors de leur mise en oeuvre, c'est-à-dire au paiement du premier acompte.

Au-delà des nombreux contrats de 50 ou 100 millions d'euros qui font l'ordinaire de nos exportations, des perspectives prometteuses se dessinent notamment aux Émirats arabes unis et au Koweït. D'une manière générale, la situation des exportations françaises d'armement s'améliore dans le Golfe sous l'effet de deux facteurs. Tout d'abord, la France n'étant plus considérée comme hostile aux États-Unis, les États du Golfe, qui ont avec ce pays des relations privilégiées mais souhaitent disposer d'un deuxième partenaire pour leur sécurité, peuvent désormais se tourner vers nous. Ensuite, la France est de nouveau présente dans cette partie du monde, avec une base établie aux Émirats arabes unis. Alors que la France, qui avait participé à la libération du Koweït, n'avait pas signé un seul contrat avec ce pays durant quinze ans, le Koweït a aujourd'hui entrepris de renégocier son accord de défense et se montre intéressé par divers équipements français, notamment des avions de combat. Les discussions avec la Libye, quant à elles, ne sont pas enterrées.

Nous avons également divers prospects en Asie. Ainsi, la Malaisie, qui voulait acheter des Tigre, est sur le point d'acheter aussi des Caracal. Des discussions sont engagées avec l'Inde sur le retrofit des Mirage 2000 et de nouveaux équipements. Malgré la difficulté de ces discussions, le Premier ministre indien s'est engagé à ce qu'une partie de l'équipement de l'armée de son pays se compose de matériel français.

En Amérique latine, le partenariat industriel prévu avec le Brésil, loin d'être un risque de concurrence à moyen terme comme l'affirment certains, est au contraire une possibilité de retrouver la place que nous avons perdue dans la région, comme me l'ont confirmé les contacts que j'ai eus avec certains de mes homologues sud-américains lors du salon du Bourget. Ainsi, des perspectives se dessinent avec le Chili pour des sous-marins.

Les années 2009 et 2010 devraient donc être des années de records pour l'industrie de défense française. Les négociations n'en sont pas moins difficiles, compte tenu des engagements financiers et des contraintes liées à des systèmes d'armes appelés à servir quarante ans, sans parler des partenariats industriels et des transferts de technologies qui font aujourd'hui partie intégrante de ce type de discussions.

Pour ce qui concerne l'A400M, j'espère que nous aurons signé le nouvel accord avant la fin de l'année. J'ai réussi à convaincre les Britanniques de rester dans ce programme, qu'ils voulaient quitter, en faisant accepter par les autres partenaires qu'un accord particulier serait conclu entre EADS et les Britanniques sur le versement des acomptes sans remettre en cause l'équilibre global. Le contrat devrait être finalement signé à Séville au début de décembre.

J'étudie les mesures de compensation nécessaires dans l'intervalle. Il serait possible de recourir au CASA ou à des Airbus.

L'avion brésilien, quant à lui, serait un complément, et non un substitut, de l'A400M. Il s'agirait, en langage militaire, d'une « brouette », moins technologique et capable de transporter loin des charges lourdes. Cet avion serait construit en partie par l'industrie européenne, aux termes d'un accord avec le Brésil. Nous pourrions ainsi répondre à certains de nos besoins tout en approfondissant le partenariat industriel avec le Brésil.

Les programmes de cohérence opérationnelle sont conformes à la loi de programmation, mais appellent assurément notre vigilance. Je tiens cependant à indiquer à la commission qu'un dynamique capitaine français que j'ai rencontré la semaine dernière en Afghanistan et qui, au fin fond du district de Surobi, côtoie l'armée américaine et l'armée nationale afghane, m'a déclaré que l'équipement de nos soldats suscitait l'envie de leurs homologues américains. Nous avons en effet consacré 200 millions d'euros à des programmes de cohérence opérationnelle, de telle sorte que les armées déployées ont aujourd'hui un bon niveau d'équipement.

Monsieur Michel, la commande de Rafale arrivera. Je souhaite cependant intégrer dans la réflexion à ce propos les perspectives d'exportation.

Quant au missile Milan, je ne puis envisager l'achat d'un système d'arme que l'armée de terre juge inapproprié. De nouvelles études s'imposent pour assurer la sécurité des personnels qui le servent. De fait, le tireur est actuellement exposé durant toute la phase de guidage du missile. Un système de type « tire et oublie » serait bien préférable. En outre, le tir dans des espaces clos se révèle problématique, ce qui serait particulièrement préjudiciable, par exemple, sur le terrain afghan. Nous achèterons donc les équipements nécessaires pendant que MDBA remet le projet à l'étude.

En matière de drones, nous avons décidé de racheter des SDTI aux Canadiens et un quatrième système de SIDM. Pour l'avenir, différentes options sont possibles et je ne suis pas certain que l'Advanced UAV tel qu'il nous est proposé actuellement soit le meilleur système possible, compte tenu de son coût et des aléas des partenariats industriels.

PermalienPhoto de Michel Voisin

Monsieur le ministre, le civilo-militaire accuse un retard considérable par rapport à ce qu'il est dans les autres Nations occidentales. Malheureusement, 36 000 réservistes ne suffiront jamais pour appuyer l'ensemble de nos forces armées. Dans ces conditions, faut-il développer le civilo-militaire ou, au contraire, l'abandonner puisque nous sommes pratiquement absents sur tous les théâtres d'opérations ?

Il faudrait, semble-t-il, multiplier par deux, voire par trois, les forces présentes en Afghanistan pour parvenir à un résultat. Qu'en est-il ? Le présent budget permettra-t-il de soutenir l'effort demandé ?

PermalienPhoto de Christophe Guilloteau

La courbe des crédits destinés aux OPEX poursuit sa progression. Pour 2010, on observe deux postes importants : l'Afghanistan et la piraterie. Cette courbe pourra-t-elle, un jour, s'inverser ?

PermalienPhoto de Damien Meslot

En cas de dégradation de la situation en Afghanistan, pourrons-nous tenir le budget des OPEX si nous renforçons nos effectifs sur place ?

Quels sont les moyens médicaux dont nous disposons pour soigner et rapatrier nos hommes blessés dans le cadre des OPEX ?

Pourrez-vous nous communiquer la nouvelle organisation des bases de défense ?

Enfin, quels moyens sont consacrés au renseignement ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Comparé aux budgets norvégien, suédois ou allemand, notre budget CIMIC est très peu élevé. Pour ce qui concerne l'Afghanistan, les Allemands y consacrent beaucoup plus que nos 50 millions. En revanche, notre effort militaire n'est pas le même que celui des Allemands.

Il faut abandonner l'idée que ce qui se passe en Afghanistan est un conflit du type conflit est-ouest, avec une ligne de front et des zones qui, dès lors qu'elles sont reconquises, permettent d'afficher un espace de sécurité et de liberté. Même dans les vallées tranquilles, où ont été restaurées la confiance et la coopération avec les populations, on n'est jamais à l'abri d'un engin explosif, d'une incursion de talibans.

La population afghane doit percevoir notre présence non comme une force d'occupation, mais comme un bienfait. La semaine dernière, des militaires m'ont expliqué pouvoir se déplacer sans équipement militaire et sans gilet pare-balles dans une petite ville où nous avons construit une école. Cela a représenté deux ans de travail. Il faut moins s'occuper des talibans que des populations, qui nous soutiendront si nous nous inscrivons dans une démarche de construction, de respect des familles et des traditions. Grâce à une pression des populations sur les talibans et les insurgés, nous serons en mesure de progresser en Afghanistan. Cela veut dire qu'il faut sortir les militaires des bases, créer les conditions pour que l'armée nationale afghane prenne le contrôle des zones, et que nous devons être présents pour appuyer l'aide au développement et la construction d'infrastructures.

Même si elle est parfois inquiétante, la situation en Afghanistan est loin d'être perdue : certains réseaux routiers de ce pays sont maintenant parfois bien meilleurs que nos réseaux départementaux ; 6 millions d'enfants ont été scolarisés ; des universités ont pu rouvrir. Les Russes eux-mêmes sont prêts à coopérer davantage avec nous pour aider au développement et à la reconstruction, parce qu'ils savent que se joue en Afghanistan une partie de la stabilité de leur zone d'influence. Bref, le discours consistant à dire qu'il faut partir de ce pays est à mon sens totalement irresponsable.

S'agissant des réservistes, l'objectif est d'arriver au plan tel qu'il avait été présenté : 40 000 réservistes et 25 jours d'activité. Des gels de crédits ont été nécessaires à partir de septembre-octobre 2008, mais avons essayé de faire mieux en 2009.

Les surcoûts liés aux OPEX, de 870 millions d'euros en 2009, passeront à 800 millions l'année prochaine. Les chiffres pour 2009 sont les suivants : 400 millions pour l'Afghanistan ; 100 millions pour le Tchad ; 70 millions pour l'Eufor Tchad contre 109 millions en 2008 – et le chiffre devrait bientôt s'approcher de zéro ; 85 millions pour le Liban ; 80 millions pour le Kosovo contre 100 millions en 2008 ; 70 millions pour la Côte-d'Ivoire contre 110 millions en 2008 – et la courbe s'infléchira également, M. Gbagbo nous promettant des élections depuis trop longtemps !

En ce qui concerne les bases de défense, il est trop tôt pour vous répondre. Cela dit, j'ai abandonné l'idée de créer une base propre à la Légion étrangère, car ce n'est pas une bonne idée : la Légion étrangère sera intégrée dans la base de défense de Marseille.

La question de Paris est compliquée, car cela concerne énormément de monde. Mais je m'engage à vous fournir un tableau dès que possible.

Pour ce qui est des renseignements, nous continuons l'effort, avec 150 personnels de plus au titre de la DGSE, et la substitution de personnels des catégories C et B par des personnels de catégorie A, notamment des linguistes, pour lutter contre le fléau que représente le développement d'Al Qaida au Maghreb – et la tâche s'étend au Mali, à la Mauritanie, au Niger et jusqu'au Soudan. Nous faisons des efforts énormes pour lutter contre les volontés permanentes d'infiltration et les opérations terroristes en Europe.

PermalienPhoto de Alain Marty

Peut-on faire une estimation des investissements en matériels en Afghanistan ? Je pense au CAESAR et au Tigre.

PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Le budget est conforme à la loi de programmation miliaire, que je n'ai pas votée…

Les efforts en direction du personnel sont positifs.

Les budgets de 2010 et pour 2009 se ressemblent : la logique de guerre est toujours d'actualité !

Les crédits OPEX augmentent, les dépenses pour l'Afghanistan continuent de s'accroître : il est temps de réfléchir à un calendrier de retrait de nos troupes.

En ce qui concerne la dissuasion nucléaire, je pense qu'elle doit faire l'objet d'un large débat à l'échelon mondial.

En conclusion, le budget pour 2010 ne donne pas pleinement satisfaction.

PermalienPhoto de Jean-Claude Viollet

L'A400M est un bon avion, mais le premier appareil ne sera livré à nos forces qu'en 2013 ou 2014, ce qui signifie que le trou capacitaire demeure. Vous avez évoqué des solutions d'attente avec les CASA et les A 330. Cela dit, il est urgent de prendre une décision car on perd une capacité tactique et une capacité opérationnelle. Pensez-vous qu'une décision interviendra en 2010, sachant que les A 330 pourraient être mis à disposition rapidement, et à budget constant ?

S'agissant du MRTT, le choix de principe devrait intervenir en 2010 – mais on disait déjà la même chose en 2008. C'est tout de même notre force aérienne stratégique qui est en cause : sans ravitaillement en vol, elle n'existe plus.

Pour le Rafale, j'ai compris qu'il y avait un lien entre la cible et les réussites potentielles à l'export. Pour autant, si l'on rétrograde la cible, n'a-t-on pas intérêt à accélérer la révision mie-vie du 2000 D de façon à homogénéiser notre flotte et réduire le MCO ?

Enfin, le renseignement emploie des spécialistes dont un certain nombre sont sous contrat à durée déterminée, d'où une certaine précarité. Ne faut-il pas donner une pérennité à ces contrats pour conserver nos compétences et nos savoir-faire ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

S'agissant de l'Afghanistan, il faut faire porter tous nos efforts sur la formation. Aujourd'hui, l'armée nationale afghane commence à ressembler à quelque chose : maintenant, il y a des soldats !

Il faut, comme je l'ai dit au secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, s'interroger sur le coût du militaire supplémentaire par rapport au coût de formation du militaire afghan. Nos 3 000 hommes en Afghanistan nous coûtent 450 millions d'euros, soit 150 000 euros par homme supplémentaire et par an. L'intérêt est donc de financer un maximum de formations et de soldes de l'armée nationale afghane dont les combattants sont excellents. Les officiers qui forment les cadres de l'armée afghane parlent de jeunes totalement investis dans l'idée de reconstruire leur pays.

Monsieur Marty, s'agissant toujours de l'Afghanistan, le poste munitions coûte 10 millions d'euros supplémentaires, le MCO 30 millions – ce chiffre englobe les MCO des CAESAR et des Tigre – et l'infrastructure 5 millions.

Monsieur Viollet, en ce qui concerne l'A400 M, je dois prendre la décision en 2010.

Pour le MRTT, la décision sur le mode d'acquisition est prévue pour cette année. En cas d'acquisition patrimoniale, les livraisons sont prévues pour la période 2015-2022, avec une cible de 14 avions – dans le cas du choix de l'A 330. L'idée d'un partenariat public-privé auquel on avait pensé n'est pas si simple à mettre en oeuvre, d'où le retard.

S'agissant du Rafale, le problème n'est pas tant la cible que la demande de Dassault de fabriquer onze avions par an pour maintenir en activité la chaîne de production. Une demande à l'export nous permet de décaler une partie de la demande nationale, sachant que la loi de programmation militaire a été construite en tenant compte de la réalisation de certains programmes à l'export. Nous envisageons d'inclure dans le contrat une clause qui prévoit que la commande de Rafale est revue en fonction des succès à l'exportation. Le pire pour nous serait de ne pas avoir de contrats à l'export : les chaînes de production de Dassault doivent être alimentées par autre chose que la commande nationale.

Je préfère des avions qui volent que le contraire faute d'avoir un MCO à la hauteur – et nous avons été indigents dans la prise en compte du MCO. Rien ne sert de commander des avions si on les laisse dans les hangars ou si on les « cannibalise » parce qu'on n'est pas capable de faire fonctionner les moteurs ! Ce deuxième paramètre explique aussi notre retard.

Le fait que les spécialistes de la DGSE soient des contractuels apporte davantage de souplesse dans les modes de rémunération.

La rénovation du 2000 D est prévue. Je vais étudier la possibilité, comme vous le proposez, d'accélérer la révision mie-vie du 2000 D.

PermalienPhoto de Philippe Folliot

Les opérations civilo-militaires sont utilement complétées par l'action du service de santé des armées. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur les moyens déployés dans le cadre des OPEX ?

Êtes-vous satisfait du « retour sur investissement » de l'effort très significatif que nous faisons en Afghanistan en y augmentant le nombre de nos effectifs?

Pouvez-vous nous parler de la PESD, des opérations en cours dans ce cadre, de nos engagements dans Eufor Tchad, dans l'opération Atalante et dans l'intervention en Géorgie ?

Enfin, qu'en est-il du projet ERASMUS militaire ?

PermalienPhoto de Philippe Vitel

S'agissant du FELIN, 5 000 équipements de fantassins seront livrés en 2010, mais il n'y aura pas de commandes. Ce programme est-il terminé ?

Où en est le projet de remplacement des bâtiments affectés aux DOM-TOM ?

D'après les médias, les Russes seraient intéressés par nos BPC, voire par le FELIN. Cela ne risque-t-il pas de poser des problèmes au regard de notre retour au sein de la structure intégrée de l'OTAN?

Hier à Toulon, nous avons inauguré l'agence « défense mobilité », qui est une très belle initiative. Cette structure de guichet unique donnera toutes leurs chances à ceux qui quittent l'armée.

PermalienPhoto de Alain Rousset

Le maintien en condition opérationnelle du moteur du Rafale est un sujet inquiétant. Il semblerait que les choses ne soient pas suffisamment précisées entre les AIA –les ateliers industriels aéronautiques – et la SNECMA. Monsieur le ministre, les techniciens de votre ministère devraient se pencher sur ce problème. Il n'est pas possible de réparer le moteur d'un Rafale en remplaçant toutes ses pièces par des pièces neuves. A terme, l'exportation de cet avion risque d'être mise en cause car c'est l'une des inquiétudes de ses acheteurs potentiels.

La qualité de la poudre et des munitions du CAESAR suscite des inquiétudes. Pouvez-vous nous apporter des précisions ?

Les problèmes des PME sont liés à la dualité civilo-militaire, au volume des fonds propres et aux relations qu'elles entretiennent avec les donneurs d'ordres. Pour ma part, je plaide pour une convention parrainée par l'État entre les donneurs d'ordres et les PME, car ce que fait Dassault en diminuant les plans de charges peut poser des problèmes aux sous-traitants aéronautiques.

S'agissant du grand emprunt, vous avez évoqué la déconstruction. Pour ce qui me concerne, j'estime qu'un partie de celui-ci devrait être affectée aux technologies du futur : nouveaux radars, nouveaux cockpits, nouveaux matériaux – nous sommes dépendants du Japon et des États-Unis en matière de fabrication des fibres composites, et il nous faudrait engager un programme de 500 millions d'euros pour détenir les précurseurs de ces fibres.

Enfin, je reste indigné du sort réservé aux anciens combattants africains de la Seconde Guerre mondiale. En effet, la décristallisation totale des pensions n'est toujours pas effective. Certes, le tribunal administratif de Bordeaux a fait bouger un certain nombre de choses, mais l'image donnée par la France à l'Afrique noire, au Maroc, à l'Algérie et à la Tunisie ne lui fait pas honneur. Cette situation est indigne et insupportable.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je partage foncièrement votre point de vue sur le problème des combattants africains, qui existe depuis soixante ans – mais cela n'exonère personne.

PermalienPhoto de Alain Rousset

Si mes collègues de la Commission de la défense signaient la proposition de loi que j'ai déposée, elle n'en aurait que plus force.

PermalienPhoto de Franck Gilard

Monsieur le ministre, en Afghanistan, certains cavea aboutissent à des situations ubuesques. Une solution est-elle en vue ?

PermalienHervé Morin, ministre de la défense

Monsieur Folliot, notre dispositif de santé sur zone est extraordinaire. Le dispositif MORPHEE permet d'affréter des gros-porteurs pour ramener une quinzaine ou une vingtaine de soldats, dont certains peuvent être gravement blessés. En outre, nous pouvons transformer nos FALCON pour opérer des rapatriements sanitaires : ainsi, le week-end dernier, un FALCON 900 et un FALCON 50 sont partis en Afghanistan. Ce dernier dispositif est assez tendu – le nombre des avions est limité et certains sont en réparation ou utilisés par le Gouvernement –, mais il répond à un principe simple : la vie de nos soldats est prioritaire.

Par ailleurs, je vous invite à aller voir en Afghanistan l'hôpital qui se trouve sur la base aérienne : certains de nos hôpitaux ruraux sont moins bons que celui-ci.

S'agissant de l'OTAN, il est difficile aujourd'hui de parler de « retour sur investissement », puisque l'on ne fait que rejoindre le commandement intégré. Toutefois, nous sommes placés dans une position stratégique en raison de la présence du général Abrial à la tête du SACT, organisme qui conduit la réflexion sur la transformation de l'Alliance et sur ses nouvelles missions.

Par ailleurs, j'ai pu constater que les Russes ont considérablement évolué sur un certain nombre de sujets, que ce soit sur l'Iran et la prolifération nucléaire – sous l'administration Bush, c'était une des cartes majeures pour s'opposer aux Américains – ou sur leurs relations avec l'OTAN. Aujourd'hui, leur discours est très proche du nôtre : le Président Medvedev s'inquiète autant que nous de l'avancement du programme nucléaire iranien – il est vrai que l'arrivée de l'administration Obama nous a beaucoup aidés. On ne peut pas vouloir une nouvelle relation stratégique avec la Russie, la création d'un espace de sécurité, de droit, de liberté et de stabilité en Europe et, en même temps, continuer à regarder ce pays comme il l'était avant 1989, continuer à regarder les Russes comme ceux qui veulent envahir le monde ! La Russie n'est plus l'Union soviétique, c'est avec elle que nous construirons cet espace de sécurité et de stabilité, et c'est cette démarche qui me guide s'agissant de la vente du BPC, monsieur Vitel. On ne peut pas réfléchir sur la transformation de l'Alliance, sur ses missions et sur les menaces qui pèsent sur le continent européen, ni évoquer la protection contre les missiles balistiques sans les Russes ! Il faut sortir des adhérences intellectuelles qui sont les nôtres : la Russie est une puissance avec laquelle nous devons discuter.

Les Russes veulent quatre BPC : c'est une opportunité, ne serait-ce que pour les Chantiers de Saint-Nazaire – le seul que nous avons commandé représente un quart du plan de charge du chantier. Vendre déjà un seul BPC, c'est une référence à l'exportation, d'autant que la marine russe n'est pas une petite marine.

Le projet ERAMUS, défendu par toutes les présidences successives de l'Union européenne, continue de progresser ; les Espagnols souhaitent également le porter. L'idée est d'arriver dans deux ans à un recensement total des formations et des cursus et à des harmonisations. J'ajoute qu'ERASMUS est déjà en place de façon très partielle entre différents pays.

Les Russes sont intéressés par le FELIN, mais leur demande essentielle porte sur le BPC. Il faut toutefois savoir que nous sommes en concurrence avec les Hollandais et les Espagnols.

Par ailleurs, nous pourrions tirer profit d'une coopération industrielle avec les Russes dans le secteur des hélicoptères lourds, secteur dans lequel ils sont bons.

En ce qui concerne les DOM-TOM, le remplacement des bateaux est prévu pour 2014.

Une commande globale de 12 500 FELIN ayant été passée, nous n'avons plus besoin d'en commander à court terme. La loi de programmation prévoit un total de 28 000 équipements. Les premières livraisons porteront sur 5 000 équipements, puis les livraisons seront liées à la commande passée l'année dernière.

Concernant le Rafale, il est vrai, monsieur Rousset, que nous avons un problème d'organisation industrielle. Il faut reconnaître, monsieur Viollet, que l'armée de l'air ne s'est pas emparée du dossier au bon moment. Une difficulté se pose sur l'ensemble de la logistique, avec Safran. L'organisation du travail doit aussi progresser entre l'industriel et les AIA. Qu'un avion aussi performant reste dans les hangars ou soit « cannibalisé » faute de pièces de rechange me navre ! Pour des raisons budgétaires, nous n'avons pas commandé assez de pièces en 2004 et en 2005. Nous récoltons aujourd'hui les fruits de cette situation. Nous devrions, me dit-on, revenir à un niveau de disponibilité opérationnelle bien meilleur à partir de l'année prochaine.

J'ai mandaté une mission sur les difficultés en matière de munitions. L'idée est de favoriser les regroupements dans ce domaine à l'échelle européenne. Quant au problème de poudre pour les munitions du CAESAR, il va être réglé. Cela dit, le CAESAR est un excellent canon.

Dans le cadre du plan PME, j'avais fixé comme objectif d'établir une sorte de charte, tout au moins de fixer des principes élémentaires à appliquer entre les grands donneurs d'ordres et les PME, que ce soit sur les délais de paiement – il ne faut pas que les PME soient étranglées – ou sur leurs relations. Cependant, il est très difficile d'avancer sur ce sujet en raison de nombreux freins.

Pour ce qui est du grand emprunt, nous avons indiqué au Premier ministre les éléments sur lesquels nous souhaitons avancer : les radios du futur ; le haut débit sur réseau nomade ; la gestion dynamique du spectre des fréquences ; les technologies pour la maîtrise de l'information – moteur de recherche, traducteur automatique, sécurisation des réseaux, télé-santé ; une nouvelle génération d'hélicoptères légers ; la robotique, en particulier pour la surveillance, la logistique et l'interface cerveau-machine ; les nanotechnologies et la réalisation des capteurs intégrés des sources d'énergie compacte ; les matériaux énergétiques et les matériaux à haute température pour l'aéronautique et le spatial ; la filière de démantèlement ; et les moyens mobiles de traitement des déchets.

Par ailleurs, il serait très positif d'organiser des partenariats avec les régions – je pense à la région PACA, où se trouve une industrie aéronautique et militaire très importante. Après un recensement précis des programmes, il faudrait monter des financements communs entre les régions et le ministère de la défense. Un tel dispositif serait très intéressant pour les programmes de technologies duales. Des signatures sont possibles.

Certains pays, notamment l'Allemagne, ont annoncé à l'OTAN, monsieur Gilard, qu'ils renonçaient aux caveat.

Enfin, pour ce qui est des anciens combattants, vous avez raison, la situation mérite d'être réévaluée. Le secrétaire d'État aux anciens combattants s'est saisi du dossier. J'ajoute qu'Éric Woerth a donné, début juin, des directives à ses services en faveur de mesures de décristallisation partielle ou totale des ressortissants d'États autrefois sous souveraineté française, dès lors qu'ils résident en France ou dans l'un des autres États de l'Union européenne. Ces mesures concernent essentiellement les ressortissants de l'Algérie, du Maroc, de la Tunisie et du Liban.

La séance est levée à dix-huit heures trente.