Je souhaite la bienvenue à M. Jacques Dermagne, président du Conseil économique, social et environnemental, que nous allons entendre à propos de l'excellent rapport qu'il a remis au Président de la République, intitulé : « Pour un développement durable de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle ».
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je suis heureux de vous présenter les conclusions de la mission que m'a confiée le Président de la République en vue d'esquisser, dans le respect des populations riveraines, les voies et les moyens d'un développement durable de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle.
Alors que nous sommes confrontés à la plus grave crise économique depuis des décennies, nous mesurons combien la croissance est indispensable à nos sociétés. Aux yeux du Conseil économique, social et environnemental, elle est non seulement le moteur du progrès, mais aussi, et surtout, la seule réponse possible aux défis de la pauvreté et du sous-développement. Si l'on ne parvient pas à résoudre ces derniers par la croissance, l'équilibre du monde et la possibilité même du progrès humain, au Nord comme au Sud, se trouveront remis en cause.
C'est dans ce cadre global qu'il faut replacer la mission qui m'a été impartie. En effet, un aéroport de dimension mondiale constitue un outil exceptionnel de croissance. C'est dans cette perspective que le Président de la République m'a confié, au milieu de 2007, c'est-à-dire avant même le déclenchement de la crise actuelle, une mission relative au développement durable de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, dans toutes les acceptions du terme, mission qui a été formalisée par lettre le 4 février 2008.
Comment ne pas reconnaître que la plate-forme de Roissy est un atout majeur pour le développement de l'Ile-de-France et de notre pays tout entier, en raison de son impact direct sur l'emploi, la croissance économique et l'attractivité de la capitale ? La poursuite de son développement est indispensable pour que Paris conserve son rang de métropole européenne et mondiale, capable de soutenir la concurrence des autres grandes portes d'accès au territoire européen que sont les hubs de Londres-Heathrow ou de Francfort. Ce qui était déjà indispensable avant le déclenchement de la crise est devenu vital : faute d'un développement dynamique, l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle ne pourra que perdre du terrain, au détriment de notre pays tout entier.
Conscient de cette exigence, le Président de la République a également compris, à l'heure du Grenelle de l'environnement, que le développement de la plate-forme de Roissy était pour les riverains une source légitime de préoccupations, en raison des nuisances sonores générées par le trafic aérien, des risques subséquents de congestion des transports terrestres, de la pollution atmosphérique et du développement de l'urbanisation. L'objectif premier de la mission qu'il m'a confiée est de définir une série d'orientations susceptibles de permettre le développement de Roissy tout en sauvegardant les intérêts vitaux des riverains, en améliorant leur environnement et en leur offrant des perspectives d'emploi sur place, le tout en liaison étroite avec les élus locaux, grâce à une gouvernance renouvelée.
D'aucuns estiment que le seul remède aux nuisances aériennes tient à la restriction drastique de l'usage de ce mode de transport. Je crois, au contraire, que le transport aérien conserve plus que jamais son utilité, parce qu'il est indissociable de la liberté d'aller et venir, qu'il est irremplaçable sur les longues distances qui caractérisent l'économie mondialisée dans laquelle nous vivons, et qu'il est un moteur fondamental du progrès humain et du développement économique, dans tous les pays ; en restreindre l'usage par des mesures autoritaires ou arbitraires reviendrait à en faire un privilège réservé aux plus riches.
Pour répondre à la demande du Président de la République, il me fallait rassembler autour de propositions précises une majorité de citoyens concernés, en dépit de leurs intérêts contradictoires et de l'incontestable complexité des problèmes. Il s'agit d'une problématique familière aux membres du Conseil économique, social et environnemental, qui s'appliquent à rechercher les points de convergence entre des représentants d'intérêts divergents, voire antagonistes. C'est pourquoi, bien que saisi à titre personnel, j'ai retenu les méthodes du palais d'Iéna pour élaborer les propositions contenues dans le présent rapport.
J'ai ainsi privilégié la recherche d'un consensus qui ne soit ni une démission devant les impératifs économiques, plus forts que jamais, ni une sous-estimation des besoins sociétaux. A cet effet, il m'est apparu qu'il fallait recueillir le plus largement et le plus précisément possible les positions des acteurs concernés. Aussi ai-je fait appel à quatre membres du Conseil économique, social et environnemental, représentatifs des diverses sensibilités – salariés, employeurs, agriculteurs, monde associatif –, entourés de quatre hauts fonctionnaires compétents dans les matières abordées, respectivement désignés par l'Inspection générale des finances, par l'Inspection générale de l'administration, par l'Inspection générale des affaires sociales et par le Conseil général de l'environnement et du développement durable. Pour coordonner le tout, j'ai recruté quatre de mes plus proches collaborateurs, chargés de tirer les conséquences des remarques des uns et des autres.
Cette équipe de douze personnes a procédé à plus de cent cinquante auditions, auprès de députés – dont M. Paternotte, qui nous a accordé beaucoup de temps, ce dont je tiens à le remercier –, de sénateurs, de conseillers régionaux, de conseillers généraux, de représentants des communautés de communes et des communes concernées, de responsables des administrations intéressées, des autorités préfectorales, des autorités de contrôles des nuisances aéroportuaires, de la Commission nationale du débat public, de l'Institut de veille sanitaire, de la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, de diverses personnalités qualifiées, d'experts, d'acteurs économiques et sociaux, de toutes les organisations syndicales, locales et nationales, des organisations patronales, ainsi que de toutes les associations de défense de l'environnement et des riverains que nous avons pu répertorier. Ces auditions ont été méticuleusement préparées et organisées, dans un climat de confiance, afin que tous les acteurs puissent s'exprimer en toute liberté et franchise, dans le respect de l'autre, et présenter leur position de la manière la plus détaillée possible. J'y ai personnellement participé aussi souvent que possible. J'ai ainsi pu ressentir de la part de la quasi-totalité des intervenants la satisfaction d'être non seulement écoutés, mais entendus et, je le crois, compris. D'ailleurs, j'ai réuni tous les auditionnés dans l'hémicycle du palais d'Iéna, le 26 juin dernier, pour une réunion d'information et d'échanges, au cours de laquelle la méthode adoptée n'a fait l'objet d'aucune critique.
Enfin, nous nous sommes rendus non seulement dans les aéroports des alentours, à Beauvais et à Vatry, mais aussi dans les grands aéroports européens et américains : Francfort – le concurrent direct de Paris-Charles-de-Gaulle –, Londres-Heathrow, Amsterdam-Schipol, Washington, Dallas, Atlanta et Memphis. Cela a permis de confronter les points de vue des acteurs franciliens et des voisins de l'Ile-de-France et les solutions apportées dans les grandes métropoles occidentales. Bien que les organisations territoriales et les modes de gouvernance soient très différents, ces comparaisons ont montré que la gestion d'un aéroport et de son environnement pouvait être assurée de diverses manières, ce qui nous a été très utile pour l'élaboration de nos propositions.
Nos suggestions sont le reflet de la méthode retenue. Ce qui a guidé l'élaboration de ce document, ce n'est pas la recherche systématique d'un consensus, ce qui aurait rendu ce travail inopérant, mais la quête permanente d'un équilibre entre les nécessités du développement et les aspirations des populations, souvent attachées à l'opportunité que représentent l'aéroport en termes d'emploi et de développement économique, mais également légitimement soucieuses de leur qualité de vie, de la qualité des transports, de la transparence et de la loyauté des informations disponibles sur l'activité aérienne, et des opportunités d'emploi sur place.
Sur ce dernier point, une action indispensable est à mener afin de résoudre le paradoxe de la coexistence d'un gisement d'emplois exceptionnel, même à l'heure actuelle, et de demandes d'emplois insatisfaites, faute de communication entre des secteurs géographiques parfois éloignés de quelques kilomètres seulement. Quant à la formation, elle apparaît souvent très insuffisante : il n'est qu'à constater le nombre de jeunes qui ne peuvent trouver d'emploi sur la plate-forme faute de maîtriser les quelques mots d'anglais indispensables pour travailler dans le secteur aérien. Tout cela aboutit à des situations totalement absurdes. En définitive, davantage que les grands principes, c'est une volonté de pragmatisme qui a guidé nos travaux.
Je retiendrai douze objectifs principaux.
Premier objectif, rétablir la confiance – qui, aujourd'hui, n'existe entre personne. Cette confiance devra constituer la base de nouvelles relations entre les parties prenantes. Elle passe par le recours à des organismes d'expertise et de contrôle indépendants, par une réelle transparence de l'information, et par un dialogue permanent entre les élus, les riverains, Aéroports de Paris, les compagnies aériennes et les entreprises du site. Tant que la confiance n'existera pas, on ne pourra pas avancer.
Deuxième objectif, maîtriser les nuisances sonores. Si les enjeux économiques sont tels, on ne peut y répondre au détriment d'une minorité qui souffre. Il ne servirait à rien de nier les nuisances inhérentes à l'activité aéroportuaire : le bruit, la pollution de l'air, la congestion des transports terrestres. Il faut que le bruit soit le plus possible réduit à la source, en particulier la nuit, que les compagnies aériennes s'engagent à progresser dans ce sens, notamment en faisant appel aux technologies modernes – en la matière, les gisements sont immenses –, que les zones de survol soient modifiées, que l'information soit améliorée et que les techniques de mesure soient diversifiées et fiabilisées. Enfin, il faut que le système de sanction soit renforcé.
Troisième objectif : achever les travaux d'insonorisation. L'État pourrait fixer comme objectif l'insonorisation de l'ensemble des logements affectés par le bruit, dans un délai non de dix ans, mais de cinq ans – d'autant que l'on a besoin de créer des emplois. Il faudrait à cet effet simplifier les procédures et améliorer les taux des aides. Il pourrait même être envisagé d'acquérir les logements les plus exposés, sachant que, compte tenu du personnel travaillant à proximité, ces logements ne resteront pas vides, et que, même si cette solution a été adoptée à l'étranger, on ne peut se contenter d'insonoriser, car insonoriser c'est aussi interdire d'ouvrir la fenêtre. S'il existe des zones qui, quelle qu'en soit la raison, de tels logements ont été construits, il faut les acheter, ce qui peut même ne pas être une mauvaise opération.
Quatrième objectif, protéger la santé des riverains. À cet égard, il convient de développer les études épidémiologiques sur la nuisance et mettre en place une veille sanitaire sérieuse qui compléterait la diffusion d'une information véritablement indépendante – une demande récurrente.
Cinquième objectif, favoriser le transport collectif et les alternatives modales. Les vols courts courriers sont appelés à disparaître, dans des délais assez rapides : les connexions TGV doivent être systématiquement privilégiées. Pour le fret, il faut soutenir les initiatives des opérateurs, comme CAREX, La Poste ou la SNCF, en faveur du développement du transport ferroviaire, notamment la nuit – même si celui-ci n'est pas sans nuisance. Quant à la desserte de la plate-forme elle-même, elle doit être facilitée par la modernisation du RER B, par la création du Charles-de-Gaulle Express et par des aménagements complémentaires. Il faut savoir ce que l'on veut : si Roissy est un grand gisement d'emplois, bien plus important que ne l'ont jamais été les bassins miniers, sa desserte doit être une priorité. Certes, cela a un coût, mais les dividendes en termes d'emplois et de création de richesses seront extrêmement importants.
Sixième objectif, promouvoir le développement du territoire de Roissy. Il faut encourager les acteurs économiques et sociaux à s'organiser territorialement et aboutir, spontanément ou formellement, à la création d'un grand pôle de compétitivité des services aéroportuaires, faciliter l'accès aux métiers aériens, mettre en place une Bourse de l'emploi, qui n'existe pas vraiment aujourd'hui.
Septième objectif, assurer la cohérence du territoire de Roissy. À cet égard, l'élaboration d'une directive territoriale d'aménagement permettrait de faire évoluer l'établissement public d'aménagement Plaine de France.
Huitième objectif, affirmer l'identité de Roissy. Il s'agit de développer une politique d'animation et de communication axée sur l'activité aérienne, en lien avec le territoire, et de favoriser l'implantation de grands équipements.
Neuvième objectif, améliorer la vie quotidienne des salariés qui semble, d'après de nombreuses réflexions que nous avons pu entendre, « ne pas être drôle ». À cet égard, la politique de facilitation du logement des salariés de la zone de Roissy doit être poursuivie et améliorée. Il faut aussi répondre à aux lacunes criantes du système de transport de proximité.
Dixième objectif, faire de Paris-Charles-de-Gaulle un aéroport exemplaire, en garantissant la qualité de vie sur la plate-forme, en prenant en compte, en liaison avec les compagnies aériennes et les entreprises, les impacts environnementaux de ses activités, et en facilitant l'accès à l'aéroport, grâce par exemple à une meilleure organisation du système de taxis. Sur le plan organisationnel, un comité d'innovation et de coordination pourrait être créé, sous la présidence de l'exploitant, mais en présence des représentants de l'État, des entreprises, des salariés, des services publics et des élus locaux.
Onzième objectif, créer une « communauté de territoires » et renforcer la présence de l'État. Si le développement de Roissy est un grand enjeu national, il faut que l'État y participe activement et qu'il comprenne que l'avenir ne doit pas être construit au détriment de ceux qui, en raison des hasards de l'histoire, se trouvent là.
Pour utiliser pleinement la dynamique aéroportuaire, une modification de la gouvernance s'impose. Elle implique plusieurs conditions indispensables. D'abord, une vision stratégique clairement exprimée par l'État, tant pour l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle que pour le territoire de Roissy. Ensuite, un dialogue étroit et une coordination permanente entre l'ensemble des acteurs décisionnels : État, collectivités territoriales, organismes privés. Enfin, une écoute réelle des attentes et des propositions des riverains : la sincérité répondant à la sincérité, beaucoup de problèmes disparaîtront d'eux-mêmes. Afin de consolider le rôle de l'État dans la gouvernance, il serait bon de nommer un coordinateur, personnalité incontestable qui favoriserait le dialogue entre les parties prenantes, quel que soit leur niveau, et rendrait « fluides » les dispositions adoptées.
Douzième et dernier objectif, engager la mise en oeuvre et le suivi des décisions par la définition d'un calendrier précis et la publication de bilans réguliers.
Ces douze objectifs constituent le fil directeur des propositions remises au Président de la République, qui sont déclinées sous la forme de mesures précises, ponctuelles et pragmatiques. Elles permettraient des progrès significatifs à la fois sur le plan de la gouvernance, de la cohérence des orientations et de la transparence de l'information, de telle sorte que partenaires, riverains et élus pourraient agir dans un climat de confiance rétabli.
Le présent rapport a par ailleurs été adressé à toutes les parties auditionnées, qui ont été invitées à faire part de leurs observations aux deux ministres chargés du dossier, Dominique Bussereau et Christian Blanc. Je crois savoir qu'il n'y a pas eu beaucoup de réactions.
Si ce rapport doit être le point de départ d'une nouvelle politique, il reste maintenant à agir. J'ai cru comprendre que telle était bien l'intention des deux ministres concernés.
Je pense quant à moi que l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle est devenu un atout décisif, non seulement pour la région et pour le pays, mais aussi pour l'Europe tout entière, ainsi que l'avait si bien anticipé le général de Gaulle. Il pourrait devenir un exemple de développement durable, et singulièrement dans ce secteur d'avenir qu'est le domaine aérien. Si les mesures préconisées par ce rapport étaient mises en oeuvres, en moins de cinq ans, on pourrait avoir largement remédié aux principaux désagréments subis par les riverains.
Nous retrouvons dans la méthode employée votre souci de prendre en considération l'ensemble des données, à savoir contribuer au maintien et au développement du rôle économique et stratégique de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, tout en tenant compte des nuisances inhérentes à l'activité aéroportuaire et en s'interrogeant sur la nécessaire évolution des méthodes de gouvernance.
Je donne tout de suite la parole à Yanick Paternotte, qui non seulement est concerné en tant qu'élu local, mais qui a également beaucoup travaillé sur le sujet, à la demande du président de la Commission des affaires économiques.
Je préside le groupe d'étude sur le développement durable aéroportuaire – auparavant baptisé groupe d'étude sur les vols de nuit et les nuisances aéroportuaires. Nous avions prévu, monsieur Dermagne, de vous auditionner, mais il a semblé préférable, avec l'accord de Christian Jacob, de nous joindre à la délégation, ce qui nous permettra de gagner du temps et, peut-être, d'enrichir les débats.
Je partage le sentiment qu'un nouveau mode de gouvernance est indispensable. J'en veux pour preuve l'expérience que certains d'entre nous ont vécue lorsqu'en 2000 ou 2001 un précédent gouvernement s'est résolu à changer les couloirs aériens autour d'Orly, ce qui avait bien évidemment un impact sur les approches aériennes dans le Bassin parisien. Jean-Claude Gayssot avait mis sur pied un groupe de travail, dont j'avais le plaisir de faire partie : le fait de se rencontrer régulièrement, de travailler avec un cabinet extérieur et, surtout d'associer tous les acteurs, y compris les pilotes et les contrôleurs aériens, a été extrêmement bénéfique.
En revanche, je déplore que vous ne parliez pas du tout du Bourget dans votre rapport. Il s'agit pourtant en réalité de la cinquième piste de Roissy, qui a été réorientée suivant un axe est-ouest, et les manoeuvres d'approche y créent d'importantes nuisances. Or, en raison du faible nombre de vols comptabilisés, il n'y a, suivant la réglementation en vigueur, ni plan d'exposition au bruit – PEB –, ni commission consultative de l'environnement – CCE. C'est un vrai problème. Il me semble difficile de dissocier Roissy et Le Bourget.
Vous avez raison.
Si l'on veut favoriser l'accès des populations locales à l'emploi sur la plate-forme, il convient d'améliorer le réseau de transports. En particulier, il faut impérativement réaliser le barreau de Gonesse, avec un débranchement vers le sud et vers le nord, sans s'arrêter au parc des expositions de Villepinte.
Il convient également d'améliorer la formation, non seulement aux filières aéronautiques, mais aussi aux métiers de l'hôtellerie et de la restauration. On comptabilise 7 000 chambres d'hôtel sur le pôle de Roissy. Or, faute de candidats locaux, les hôteliers sont obligés d'aller chercher leurs employés hors de l'Ile-de-France et de la Picardie !
En procurant des possibilités d'emploi aux riverains, on favorise l'intégration de l'infrastructure dans le territoire. Or, aujourd'hui, les Val-d'Oisiens occupent 14 % des postes sur la plate-forme, contre 16 % pour les Picards et pour les Seine-et-Marnais. Il est plus facile de trouver un emploi quand on habite au nord de l'aéroport que lorsqu'on se trouve dans l'axe des pistes, à l'est ou à l'ouest !
Si les aspects économiques et sociaux du développement durable sont bien traités dans votre rapport, je regrette – de même que mes collègues et les associations du Val-d'Oise – que le volet environnemental se trouve quelque peu négligé. Il manque l'affirmation de quelques principes forts.
Certes, vous évoquez, dans la proposition n° 2, de nouvelles méthodes de réduction du bruit à la source. Cependant, il aurait fallu aller plus loin et réclamer un couvre-feu nocturne, au moins sur le doublet sud chaque fois qu'il y a un plafonnement du nombre des mouvements aériens : aujourd'hui, entre minuit et 5 heures ; demain, peut-être, entre 22 heures et 6 heures.
Ce qu'il faut favoriser, ce sont non seulement les descentes lisses et les descentes continues, que vous évoquez dans le rapport, mais également les approches Riviera et vent arrière. En combinant ces différentes procédures, on pourrait enregistrer des gains environnementaux immédiats pour 90 à 95 % de la population. Mais il y a un problème culturel. Il est scandaleux d'attendre deux ans pour introduire la descente lisse à Roissy alors qu'elle est en expérimentation dès cette année à Orly, qui bénéficie déjà du couvre-feu nocturne. Tout cela parce que l'on a cédé aux exigences des contrôleurs aériens, qui menaçaient de faire grève !
Je suis d'accord sur le fait que l'État doit reprendre la main. D'abord, il doit de nouveau avoir une vision stratégique ; or il n'y a rien dans le rapport sur le troisième aéroport, sur les solutions alternatives en cas d'échec de la maîtrise des nuisances et sur d'autres aspects du développement durable, comme la qualité de l'air. Ensuite, l'État doit avoir un rôle régulateur. Tel est le sens de la gouvernance nouvelle à instaurer, sans laquelle on n'arrivera pas à rétablir la confiance et la sérénité.
Le préfet Carrère avait, en son temps, réalisé un excellent rapport. C'était tellement intelligent qu'on l'a vite rangé dans un placard. J'aimerais que votre rapport ne connaisse pas le même sort !
L'image de Roissy a beaucoup changé au cours de ces dix dernières années. Grâce à l'interdiction de la circulation nocturne des avions du chapitre 3, on a obtenu une amélioration de la qualité des mouvements qui a compensé l'augmentation de leur nombre. Avec la crise économique, celui-ci va diminuer de 6 à 8 %. Il ne faudrait pas que cela serve de prétexte pour enterrer le dossier.
Il est tout de même assez surprenant que, lors de la discussion du Grenelle 1, alors que vous étiez en train de finir votre rapport, nous n'ayons pas réussi à faire accepter par le Gouvernement la mise à l'étude du barreau TGV « Reims-Vatry ». On ne peut pas à la fois nous présenter Vatry comme une solution pour le fret et refuser de favoriser le report modal.
L'État stratège doit être de retour, sans chercher à reprendre d'une main ce qu'il donne de l'autre. Un double langage sur le développement durable aéroportuaire est inacceptable.
Monsieur Dermagne, votre rapport contient des éléments très intéressants. Toutefois, il laisse subsister certaines de mes craintes.
La première chose qui m'inquiète, ce sont les aspects sanitaires. Soit il est dangereux d'habiter à proximité d'un aéroport, et il faut en tirer les conséquences et évacuer les populations ; soit cela n'est pas dangereux, et il faut permettre aux villes et aux territoires concernés de se développer. Mais le principe du PEB, qui consiste à ne pas augmenter la population en raison des risques tout en laissant vivre sous les avions ceux qui sont déjà installés, est absurde. On ne peut faire supporter aux uns ce que l'on cherche à épargner aux autres. J'apprécie que vous recommandiez de développer les études ; encore faut-il qu'elles aient des conséquences dans la réalité.
Par ailleurs, j'entends bien votre proposition de faire acquérir par les pouvoirs publics les logements les plus exposés, mais que fera-t-on de ces espaces ? Je ne souhaite pas que Sarcelles devienne un nouveau Goussainville ! Il est surréaliste de voir, à vingt kilomètres de Paris, ce village abandonné, avec sa magnifique église, et ses maisons rachetées puis murées par Air France et ADP. Racheter, d'accord, mais pour faire quoi ?
Je suis pour ma part beaucoup plus pessimiste que vous. Cela fait longtemps que je ne vois plus en Roissy le pôle qui permettra aux territoires en difficulté de se développer. Vous n'évoquez pas dans votre rapport le problème de la discrimination. Pour avoir accès à Roissy, aujourd'hui, il faut un badge, et nos populations ne peuvent pas l'obtenir car les conditions d'attribution imposées par le ministère de l'intérieur ne sont pas adaptées à leurs caractéristiques. Ainsi des jeunes qui n'ont pas eu directement affaire avec la police ou avec la justice, mais qui peuvent avoir un entourage ayant connu des problèmes de délinquance, se voient privés du badge. L'un se l'est même vu refuser parce qu'il n'avait pas payé ses impôts. Je ne suis pas sûr que la sanction soit identique pour tous ceux qui travaillent sur la plate-forme !
Je comprends les impératifs de sécurité, mais les conditions d'obtention du badge méritent au moins discussion. Tant que l'on ne réglera pas le problème de la discrimination, l'emploi et la formation ne seront pas pour nos populations.
Je suis en conséquence favorable à votre proposition de rééquilibrer les activités de la Plaine de France en favorisant le développement d'autres équipements structurants forts, qui joueraient le rôle de locomotives pour l'ensemble du territoire. La plate-forme de Roissy n'est pas notre principale source d'emploi. À la mission locale Val-d'Oise Est, que je préside et qui est la plus importante d'Ile-de-France, 80 % des emplois sont obtenus dans les PME-PMI hors de la plate-forme. Il faut cesser de voir en Roissy un Eldorado. On peut tenter d'améliorer les choses, mais il faut savoir être pragmatique et développer ailleurs des activités créatrices d'emploi.
Enfin, je reste dubitatif, car si les propositions contenues dans votre rapport dénotent une réelle volonté de faire avancer les choses, les actes vont, au quotidien, dans le sens inverse. Il suffit d'examiner les décisions prises au cours de ces quatre derniers mois. D'abord, on a supprimé des rames sur le RER D. Ensuite, l'État, la région et le département se sont mis d'accord, dans notre dos, pour remplacer le barreau de Gonesse, qui nous avait été promis, par des bus, alors qu'ils déclarent depuis dix ans à qui mieux mieux qu'il est important de pouvoir se rendre en RER de l'est du Val-d'Oise à Roissy. En plus, on nous prend pour des idiots : on n'appelle pas cela des bus, mais des « bus à haut niveau de service » ou BHNS, et l'on continue à parler, dans les documents officiels, du barreau de Gonesse ! Dans le même temps, l'État et Réseau ferré de France – RFF – décident de faciliter la venue des Picards à Roissy par la création d'une liaison directe par TGV et TER.
Quand on appelle l'État au secours, cela me fait un peu peur : il ne faut pas oublier que c'est lui qui est responsable de la situation actuelle. Ce sont ses représentants qui, en imaginant faire de Sarcelles la ville emblématique de l'an 2000, ont demandé à la Caisse des dépôts de construire de grands ensembles, qui devaient devenir cinquante ans plus tard des ghettos sociaux et ethniques, tout en décidant de construire, quelques années plus tard, un grand aéroport international sept kilomètres plus loin, sans imaginer – ou en l'occultant – que les gens allaient vivre sous les avions. Les élus locaux n'y sont pour rien ! L'État a une obligation historique de réparation à l'égard de ces territoires, sachant qu'il ne pourra l'honorer sans les habitants et les élus locaux.
L'est du Val-d'Oise correspond à des territoires oubliés. On a décidé un beau jour d'abandonner à proximité de Roissy l'autoroute A 16, qui coupait les villes en deux ; or rien n'a été prévu pour se substituer à elle : on a laissé des friches urbaines, non constructibles, gelées par l'État, sans aucun projet alternatif. Tout cela dure depuis cinquante ans, quel que soit le gouvernement.
Je suis donc d'accord avec toutes vos propositions, mais ne croyons pas que Roissy, à lui seul, permettra à ces territoires de s'en sortir. Il faut trouver des solutions alternatives afin de permettre à leurs populations d'avoir accès à l'emploi. Je rappelle que l'on y compte 30 % de chômeurs parmi les moins de vingt-cinq ans : c'est inadmissible.
Nous auditionnons, monsieur Pupponi, le président du CESE, et non le secrétaire d'État aux transports – qu'il serait par ailleurs intéressant d'entendre sur ce sujet.
Je précise que je suis tout à fait d'accord avec les propositions de Yanick Paternotte concernant les pistes d'atterrissage. Une décision rapide en ce sens favoriserait le retour de la confiance.
Pour commencer, je voudrais rappeler à Yanick Paternotte qu'il n'y a pas un doublet nord et un doublet sud, mais un aéroport, celui de Paris-Charles-de-Gaulle !
Monsieur Dermagne, ne pensez-vous pas que votre deuxième objectif, la maîtrise des nuisances sonores, est un préalable indispensable au premier – le retour de la confiance ? Dans le cadre d'une mission qui m'avait été confiée par le député de la sixième circonscription de Seine-et-Marne, je me suis plus particulièrement intéressé à la question des vols de nuit. Aujourd'hui, Roissy-Charles-de-Gaulle est le premier aéroport en nombre de vols et le deuxième en nombre de passagers. À Londres-Heathrow, c'est l'inverse grâce à un meilleur taux de remplissage des avions. Or, là-bas, on a réglé le problème du bruit à la source : on ne comptabilise plus que seize vols en moyenne par nuit, contre cent soixante à Roissy-Charles-de-Gaulle.
Le problème, à Roissy, réside notamment dans les vols liés à la plate-forme de FedEx, qui engendrent des nuisances importantes pour les habitants de Seine-et-Marne. Ce qui a été possible à Londres est-il concevable en France, sans que l'on brandisse, à chaque fois, la menace à l'emploi ? La réduction des nuisances nocturnes me paraît en tout cas un préalable indispensable, en privilégiant les créneaux vingt-deux heuresminuit et cinq heuressix heures. Par ailleurs, vous ne pourrez pas rétablir la confiance si l'on mure des maisons là où des gens continuent à habiter.
S'agissant du décollage par vent arrière, des spécialistes m'ont dit qu'il ne pouvait se pratiquer que sur piste sèche, que cela augmentait la distance nécessaire au décollage, et que les pentes étant différentes en raison du risque, le survol des agglomérations s'effectuait à des altitudes plus faibles, ce qui risquait d'entraîner une augmentation des nuisances sonores. Par conséquent, la combinaison d'une plus grande utilisation du doublet nord et d'un décollage par vent arrière vers l'est augmenterait considérablement les nuisances sur le nord de la Seine-et-Marne. En d'autres termes, on transférerait le problème sur un autre territoire.
Troisième remarque, monsieur Dermagne : les transports, dans le nord-ouest de la Seine-et-Marne, sont catastrophiques. Le RER B s'arrête à Mitry, et le réseau routier est quasiment inexistant : Chelles et Meaux, les deux plus grandes villes du département, ne sont même pas reliées par une deux fois deux voies ; d'ailleurs, la plate-forme aéroportuaire n'est pas non plus desservie par une deux fois deux voies. Pour couronner le tout, le conseil général est en train de construire une déviation Meaux-Roissy en deux fois une voie. Avant de dérouter le fret ferroviaire, il faudrait déjà s'occuper des populations du bassin d'emploi de Roissy.
Enfin, vous parlez de communauté, mais il y a quelques années, on avait envisagé de créer une communauté aéroportuaire, de manière à mutualiser les moyens. Elle n'a jamais vu le jour. Pourquoi ne pas la réactiver ? J'ai d'ailleurs posé à Dominique Bussereau une question en ce sens.
J'espère, monsieur Dermagne, que votre rapport – très intéressant au demeurant – ne sera pas qu'un rapport de plus, et qu'il ne connaîtra pas le même sort que les précédents. Reconnaissons toutefois que le sujet est complexe.
Vous voulez rétablir la confiance. Pour ma part, je suis toujours parti du postulat que l'aéroport international de Paris-Charles-de-Gaulle était un atout extraordinaire pour l'Ile-de-France et pour la France entière. Alors, pourquoi cette méfiance ? Elle tient certes aux nuisances, en particulier sonores, mais aussi au fait que nombre de territoires limitrophes ne bénéficient pas des fruits de la croissance, qui permettraient aux élus d'accroître les ressources de leurs collectivités et aux populations d'accéder à l'emploi. La confiance reviendra quand on aura fait comprendre aux habitants qu'il s'agit d'un outil extraordinaire de développement et de réduction des fractures territoriales, lesquelles sont, rappelons-le, particulièrement vives dans la région.
Personnellement, je n'ai jamais été un ardent défenseur de la communauté aéroportuaire, qui me semblait être une usine à gaz. Vous souhaitez que l'État reprenne la main : cela ne me dérange pas, à condition qu'il y ait équité et égalité entre les populations. J'attends avec impatience le discours du Président de la République sur l'Ile-de-France le 29 avril, dans la mesure où je suis d'accord avec M. Blanc pour qui les portes de Paris sont les aéroports et les gares TGV.
S'agissant de l'insonorisation des habitations, vous lancez un sacré défi en proposant de l'achever en cinq ans ! Avez-vous évalué le coût d'une telle mesure ? Comment comptez-vous la financer ?
Quant aux études épidémiologiques, on n'en voit nulle trace. Pourtant, il existe de toute évidence des problèmes de santé publique liés à la présence de l'aéroport – même si les résultats des analyses réalisées par Airparif ne sont pas plus mauvais qu'au centre de Paris.
Je connais bien le doublet sud : il m'empêche de dormir ! Des statistiques avaient évalué à quelque 22 000 le nombre annuel de vols de nuit, dont au moins la moitié concernait des destinations inférieures à 700 kilomètres. L'avenir, pour un tel rayon d'action, est au TGV.
Si l'État reprend la main, il faudra également éviter les concurrences mortifères entre Air France, qui a été privatisée, et la SNCF, qui risque de l'être. On sait en effet que des accords ont été conclus entre Air France et Veolia dans le cadre de la libéralisation du transport de voyageurs, et il serait dommage qu'on en arrive à une guerre économique entre ces deux grandes sociétés françaises.
Ce rapport est très intéressant s'agissant des questions économiques, sociales et commerciales : dans ces matières, il avance des propositions stimulantes. En revanche, le traitement des aspects environnementaux me semble insuffisant, notamment en ce qui concerne les procédures d'approche. Pourquoi attendre deux ans pour mettre en oeuvre à Roissy les nouvelles procédures alors qu'elles sont déjà appliquées à Orly et qu'elles sont inscrites, de même que la décision de détourner le supplément de fret sur Vatry, dans le Schéma directeur de la Région Île-de-France – SDRIF – adopté en février 2007 ?
De même, la question du troisième aéroport reste posée. En réponse à une récente question orale, Dominique Bussereau m'a dit qu'il s'agissait d'un « attrape-nigaud ». J'ai pourtant souvenir qu'un précédent ministre des transports s'y était déclaré favorable… On ne peut pas balayer cette option d'un revers de main : il faudrait au moins procéder à une évaluation.
Dans la vallée de Montmorency, les problèmes ne sont pas du tout les mêmes que dans l'est du Val-d'Oise : nous subissons les nuisances liées aux avions, mais nous ne bénéficions pas de la proximité de la plate-forme aéroportuaire en terme d'emplois. Nos interrogations concernent donc les suites de ce rapport. Des groupes de travail seront-ils institués pour élaborer une charte définitive ? Quels en seront les membres ? Comment travailleront-ils ? Selon quel calendrier ? Comment sera composé le comité consultatif de développement durable ?
Je ne pourrai pas répondre à toutes vos questions, mais je suis d'accord avec la quasi-totalité de vos remarques.
Il s'agit d'un dossier particulièrement complexe, où les intérêts nationaux ne coïncident pas avec les intérêts locaux, et où les intérêts des acteurs économiques ne coïncident pas avec les intérêts sociétaux et sociaux. C'est pourquoi le rétablissement de la confiance est une priorité, avant même la lutte contre les nuisances sonores. Les gens ont l'impression qu'on se moque d'eux et personne ne croit plus personne. Même les experts ne sont plus écoutés : on en trouve toujours un pour contredire l'autre !
Le trafic à Heathrow en est l'exemple type : les associations environnementales parlent toujours de seize vols par nuit. Je suis allé me renseigner auprès du cabinet du ministre et de la direction générale de l'aviation civile : c'est faux. À force de toujours écrire le même chiffre, on finit par y croire ! Cela montre le degré de confusion atteint : on confond passion et raison.
S'agissant de la procédure par vent arrière, qui concerne aussi bien le décollage que l'atterrissage, nous proposons de l'utiliser la nuit. D'abord, il n'y a quasiment jamais de vent la nuit. Ensuite, Orly étant fermé entre minuit et cinq heures, si l'un des deux doublets est également fermé, il n'en reste plus qu'un à gérer, ce qui simplifie considérablement les choses ; en effet, quand Orly et Roissy sont tous les deux ouverts, un choix stratégique s'impose, les approches devant toutes avoir lieu du même côté.
Par ailleurs, ce ne sont pas les épisodes pluvieux qui posent problème pour l'atterrissage, mais les conditions anticycloniques, avec un temps chaud et sec. C'est le moment où le bruit est le plus gênant, car les gens vivent les fenêtres ouvertes. En automne et en hiver, on peut à nouveau changer de système et abandonner la procédure par vent arrière.
Je ne connais pas encore le chiffre exact, peut-être une cinquantaine, voire une centaine, mais il est certain que ce n'est pas seize.
Et la procédure par vent arrière serait utilisée seulement la nuit et en certaines saisons ?
Il ne sert à rien de polémiquer sur ces sujets : il faut en débattre avec les pilotes et les aiguilleurs du ciel, et de prendre en compte le bonheur des gens, en termes de qualité de vie comme d'emploi. Si je fais du rétablissement de la confiance une priorité, c'est que j'ai constaté que tout le monde se parle mais que personne ne s'entend.
Nous avons tous les mêmes préoccupations, mais il est difficile de donner à un pilote ou à un aiguilleur du ciel, le sentiment qu'il est un mauvais citoyen s'il ne fait pas l'effort nécessaire pour mettre en oeuvre les procédures par vent arrière ou fondées sur des pentes lentes – de même qu'il est difficile de responsabiliser nos concitoyens sur le gaspillage de l'eau. Ce sont des problèmes sociologiques qui ne pourront être résolus que par la confiance et grâce à un travail commun des élus, des responsables économiques et des opérateurs.
Plus les moyens de communication se développent, plus les rumeurs, les procès d'intention et les considérations électorales prennent de l'importance. C'est pourquoi je propose qu'une personnalité reconnue prenne en charge l'application des décisions.
Vous avez raison, le pilier environnemental est faible. Cet aspect est devenu prioritaire et il faut le traiter, c'est évident. Toutefois, il me paraît inutile d'agiter le chiffon rouge. Les vols de nuit sont la principale préoccupation des riverains et des élus locaux, mais des décisions cruciales sont en cours de négociation concernant le choix de la porte aéroportuaire de l'Europe.
Ce rapport ayant suscité le déplacement au palais d'Iéna des PDG des plus grandes entreprises américaines, j'ai souhaité prendre en compte les intérêts de la France. Cela ne signifie pas que les aspects environnementaux ne sont pas une priorité pour moi, mais il faut savoir livrer certains combats de manière indirecte. Ce ne sera possible que s'il s'agit d'une décision de l'État, mise en oeuvre sous la responsabilité d'une haute personnalité.
Le problème, ce ne sont pas les rapports, mais les destinataires. Or, si, comme je le crois, les volontés affichées initialement se trouvent confirmées par le Président de la République, les choses peuvent aller très vite. Bien entendu, les élus locaux devront être associés. Prenez d'ailleurs l'exemple de l'aménagement de la Défense, qui était lui aussi un problème d'État : les élus locaux n'ont pas été négligés, bien au contraire, puisque certains sont même devenus président de la République. Rien ne pourra se réaliser sans les territoires, mais à faire des procès d'intention, on diminue les chances de réussite.
Pardonnez-moi de ne pas être entré dans le détail des propositions, mais je souhaitais vous présenter les orientations générales du rapport. Pour le reste, je suis à votre disposition.
Je remercie Jacques Dermagne de sa présence. Nous souhaitons faire vivre son rapport grâce à ce type d'échanges, en complément des travaux conduits par Yanick Paternotte. Nous essaierons d'auditionner le secrétaire d'État aux transports, Dominique Bussereau, sur le même sujet. C'est grâce aux efforts complémentaires de nos deux assemblées que nous pourrons faire avancer les choses.
C'est précisément parce que Roissy sera la tête de pont d'un vaste projet pour l'Ile-de-France, dont la définition sera probablement bien avancée le 29 avril, qu'on ne peut prendre aucun risque avec les nuisances. Il faudra nécessairement faire les investissements nécessaires pour les riverains. Quant à leur financement, une meilleure répartition de la fiscalité est nécessaire, mais si, dans le contexte actuel, il est un secteur où il y a urgence à procéder à des embauches, c'est bien celui-là. Les dividendes bénéficieront à la nation tout entière.