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Intervention de François Pupponi

Réunion du 31 mars 2009 à 16h00
Délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Pupponi :

Monsieur Dermagne, votre rapport contient des éléments très intéressants. Toutefois, il laisse subsister certaines de mes craintes.

La première chose qui m'inquiète, ce sont les aspects sanitaires. Soit il est dangereux d'habiter à proximité d'un aéroport, et il faut en tirer les conséquences et évacuer les populations ; soit cela n'est pas dangereux, et il faut permettre aux villes et aux territoires concernés de se développer. Mais le principe du PEB, qui consiste à ne pas augmenter la population en raison des risques tout en laissant vivre sous les avions ceux qui sont déjà installés, est absurde. On ne peut faire supporter aux uns ce que l'on cherche à épargner aux autres. J'apprécie que vous recommandiez de développer les études ; encore faut-il qu'elles aient des conséquences dans la réalité.

Par ailleurs, j'entends bien votre proposition de faire acquérir par les pouvoirs publics les logements les plus exposés, mais que fera-t-on de ces espaces ? Je ne souhaite pas que Sarcelles devienne un nouveau Goussainville ! Il est surréaliste de voir, à vingt kilomètres de Paris, ce village abandonné, avec sa magnifique église, et ses maisons rachetées puis murées par Air France et ADP. Racheter, d'accord, mais pour faire quoi ?

Je suis pour ma part beaucoup plus pessimiste que vous. Cela fait longtemps que je ne vois plus en Roissy le pôle qui permettra aux territoires en difficulté de se développer. Vous n'évoquez pas dans votre rapport le problème de la discrimination. Pour avoir accès à Roissy, aujourd'hui, il faut un badge, et nos populations ne peuvent pas l'obtenir car les conditions d'attribution imposées par le ministère de l'intérieur ne sont pas adaptées à leurs caractéristiques. Ainsi des jeunes qui n'ont pas eu directement affaire avec la police ou avec la justice, mais qui peuvent avoir un entourage ayant connu des problèmes de délinquance, se voient privés du badge. L'un se l'est même vu refuser parce qu'il n'avait pas payé ses impôts. Je ne suis pas sûr que la sanction soit identique pour tous ceux qui travaillent sur la plate-forme !

Je comprends les impératifs de sécurité, mais les conditions d'obtention du badge méritent au moins discussion. Tant que l'on ne réglera pas le problème de la discrimination, l'emploi et la formation ne seront pas pour nos populations.

Je suis en conséquence favorable à votre proposition de rééquilibrer les activités de la Plaine de France en favorisant le développement d'autres équipements structurants forts, qui joueraient le rôle de locomotives pour l'ensemble du territoire. La plate-forme de Roissy n'est pas notre principale source d'emploi. À la mission locale Val-d'Oise Est, que je préside et qui est la plus importante d'Ile-de-France, 80 % des emplois sont obtenus dans les PME-PMI hors de la plate-forme. Il faut cesser de voir en Roissy un Eldorado. On peut tenter d'améliorer les choses, mais il faut savoir être pragmatique et développer ailleurs des activités créatrices d'emploi.

Enfin, je reste dubitatif, car si les propositions contenues dans votre rapport dénotent une réelle volonté de faire avancer les choses, les actes vont, au quotidien, dans le sens inverse. Il suffit d'examiner les décisions prises au cours de ces quatre derniers mois. D'abord, on a supprimé des rames sur le RER D. Ensuite, l'État, la région et le département se sont mis d'accord, dans notre dos, pour remplacer le barreau de Gonesse, qui nous avait été promis, par des bus, alors qu'ils déclarent depuis dix ans à qui mieux mieux qu'il est important de pouvoir se rendre en RER de l'est du Val-d'Oise à Roissy. En plus, on nous prend pour des idiots : on n'appelle pas cela des bus, mais des « bus à haut niveau de service » ou BHNS, et l'on continue à parler, dans les documents officiels, du barreau de Gonesse ! Dans le même temps, l'État et Réseau ferré de France – RFF – décident de faciliter la venue des Picards à Roissy par la création d'une liaison directe par TGV et TER.

Quand on appelle l'État au secours, cela me fait un peu peur : il ne faut pas oublier que c'est lui qui est responsable de la situation actuelle. Ce sont ses représentants qui, en imaginant faire de Sarcelles la ville emblématique de l'an 2000, ont demandé à la Caisse des dépôts de construire de grands ensembles, qui devaient devenir cinquante ans plus tard des ghettos sociaux et ethniques, tout en décidant de construire, quelques années plus tard, un grand aéroport international sept kilomètres plus loin, sans imaginer – ou en l'occultant – que les gens allaient vivre sous les avions. Les élus locaux n'y sont pour rien ! L'État a une obligation historique de réparation à l'égard de ces territoires, sachant qu'il ne pourra l'honorer sans les habitants et les élus locaux.

L'est du Val-d'Oise correspond à des territoires oubliés. On a décidé un beau jour d'abandonner à proximité de Roissy l'autoroute A 16, qui coupait les villes en deux ; or rien n'a été prévu pour se substituer à elle : on a laissé des friches urbaines, non constructibles, gelées par l'État, sans aucun projet alternatif. Tout cela dure depuis cinquante ans, quel que soit le gouvernement.

Je suis donc d'accord avec toutes vos propositions, mais ne croyons pas que Roissy, à lui seul, permettra à ces territoires de s'en sortir. Il faut trouver des solutions alternatives afin de permettre à leurs populations d'avoir accès à l'emploi. Je rappelle que l'on y compte 30 % de chômeurs parmi les moins de vingt-cinq ans : c'est inadmissible.

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