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Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Séance du 15 avril 2008 à 16h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a procédé à l'audition deMme Armelle Le Bras-Chopart, chargée de mission à l'égalité des chances femmeshommes dans l'enseignement supérieur.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a rappelé que, dans l'enseignement supérieur, seulement 17 % des professeurs et 38 % des maîtres de conférence sont des femmes. Devant cet état de fait, il faut s'interroger sur les conséquences des modes de recrutement et de constitution des jurys, notamment sur la composition non paritaire des jurys de concours d'agrégation de l'enseignement supérieur en droit et en sciences économiques. Des précisions seraient également nécessaires sur les mesures applicables en matière de congé de maternité ou de délivrance par les universités de titres finançant la garde des enfants ?

D'autre part, la Délégation souhaiterait savoir si les statistiques sexuées des universités sont régulièrement tenues à jour, quelle est la répartition des étudiants filles et garçons en fonction des filières et comment les enseignements et la recherche sur l'histoire des femmes et le genre sont soutenus et promus ?

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a précisé que les jurys des concours d'agrégation de l'enseignement supérieur s'approchent de plus en plus de la parité, ne serait-ce que grâce à l'augmentation du vivier de femmes agrégées. Il reste cependant encore difficile de trouver des femmes candidates pour présider ces jurys, en particulier en droit public. Cela tient, notamment, à l'organisation même du concours, qui s'étend sur six mois durant lesquels le jury siège trois ou quatre jours par semaine, à Paris.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

s'étonnant de cette explication, Mme Armelle Le Bras-Chopard a précisé que cela correspond à la réalité des témoignages des agrégées de province mariées et chargées de famille.

PermalienPhoto de Guénhaël Huet

ayant observé que la présidence des jurys d'agrégation échoit généralement à des personnes d'une cinquantaine d'années, qui n'ont plus d'enfants à élever, Mme Armelle Le Bras-Chopard a indiqué que, au contraire, pour faire appel à celles-ci, le problème est encore plus aigu car elles appartiennent à des générations où les agrégées sont rares : il n'y avait que 9 % de femmes professeures d'université il y a vingt ans.

S'agissant du congé de maternité, Mme Armelle Le Bras-Chopard a indiqué que, aupararavant, faute de textes, la future mère pouvait effectuer l'ensemble de son nombre d'heures d'enseignement annuel en dehors de la durée d'absence légale précédent et suivant l'accouchement ; par exemple, avoir fait tout son service au premier semestre et accoucher au second. Désormais, le mombre d'heures est diminué au prorata du congé. Par exemple, pour 6 mois de congé, la moitié des heures d'enseignement seulement est à effectuer. Le planning doit être prévu en début d'année universitaire et avalisé par le Président de l'établissement. Si la grossesse est déclarée après la fixation du planning, le problème se résout au cas par cas.

La Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) dresse des statistiques nationales sexuées par année. Chaque université a aussi été amenée à remplir un dossier d'une vingtaine de pages détaillant le taux des effectifs féminins en activité par discipline. Les résultats 2002-2003 ne sont plus disponibles sur le site du ministère. Le tableau exhaustif à l'échelle nationale présentait le mérite de permettre des comparaisons entre les quatre-vingt-huit universités. En attendant la réactualisation systématique de ces données annuelles, les chargées de mission mènent des enquêtes spécifiques dans leur université sur les doctorantes, sur la composition de chacun des trois conseils…Un travail peut aussi être accompli à partir du bilan social de chaque université.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a demandé si chaque université était dotée d'une chargée de mission parité et si ce n'était justement pas leur rôle de tenir ces statistiques ?

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a répondu qu'il n'y a pas de chargées de mission dans toutes les universités, loin s'en faut. Pour leur mise en place deux options étaient possibles : imposer leur nomination dans chaque université – mais encore faut-il avoir suffisamment de candidats compétents et motivés – ou fonctionner sur la base du volontariat. C'est la deuxième option qui a été retenue, avec des incitations à partir des contrats quadriennaux et des conventions du FSE qui apportaient un financement européen à hauteur de 45 %. Ces conventions n'existent plus depuis 2006. Les remboursements par le FSE, n'ont pas été effectués intégralement et, à la suite de certains dysfonctionnements, le Fonds voulait même récupérer les sommes versées. Après leur suppression, quelques universités ont pérennisé la mission tandis que d'autres, faute de moyen, n'ont pas pris le relais.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

s'est alors interrogée sur le rôle des chargés de mission. Si l'on veut obtenir des résultats, il faut identifier les missions et procéder à des évaluations.

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a précisé que les chargées de mission ont pour tâche d'affiner les statistiques et d'identifier les problèmes dans leur université, de travailler sur les filières d'orientation et de sensibiliser aux questions d'égalité fillesgarçons, ceci, il est vrai, avec souvent très peu de moyens.

Des actions particulières sont menées. Par exemple, l'université de Lille a mis en place un lieu d'écoute sur le harcèlement sexuel comme le recommandait une circulaire de 2005 de la Direction de l'enseignement supérieur. Des professeures mènent des actions de sensibilisation dans l'enseignement secondaire. Les chargées de mission organisent des colloques dans leurs universités, par exemple pour lutter contre les stéréotypes. Elles organisent aussi des expositions et participent aux fêtes de la science. Le travail conduit à l'université de Dauphine a abouti à ce que la parité soit demandée pour les listes aux trois conseils…

Le fait que les femmes s'orientent moins vers les carrières scientifiques est un problème général qui se pose, non seulement en France, mais aussi dans le reste de l'Europe et du monde. Le travail de sensibilisation est essentiel pour susciter une prise de conscience et lutter contre les inégalités.

Cela peut sembler peu mais il faut avancer à petits pas, avec des moyens dérisoires.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a estimé que la question de l'égalité ne semble pas véritablement intégrée dans les actions et s'est inquiétée des résultats obtenus.

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a fait observer que les chargées de mission ne sont pas habilitées à modifier les règles des concours. Par ailleurs, il est, en réalité, difficile de définir un indicateur chiffré pour mesurer les progrès en matière d'égalité hommes-femmes. La seule certitude, c'est que le travail de sensibilisation porte ses fruits : plus personne ne ricane lorsque cette question est abordée et plus personne n'ose affirmer que l'égalité est acquise. Les mentalités ont changé et les universités prennent des initiatives.

Sur la question des chaires traitant du genre, il faut préciser que l'histoire et la sociologie ne sont pas seules concernées ; le droit et les sciences politiques aussi. Mais il n'existe pas de section du Conseil national des universités (CNU) qui soit consacrée au genre. Cela ne facilite pas la création d'une chaire car celle-ci doit se faire, dans un département donné, par un poste fléché sur le genre. La France souffre à cet égard d'un véritable handicap par rapport aux pays étrangers, qui disposent non seulement de chaires mais même de départements spécialisés. Cela pose des problèmes même pour les échanges d'étudiants Erasmus. De même, très peu de laboratoires travaillent spécifiquement sur le genre.

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a ensuite ajouté que le plafond de verre bloque également les carrières des personnels ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers et de service (IATOS) féminins : à l'université comme dans le secteur tertiaire, bien que les femmes soient largement majoritaires, les postes hiérarchiques sont surtout occupées par des hommes. En matière de gouvernance, c'est pareil : moins de dix femmes président des universités. Le conseil d'administration comme le conseil scientifique qui décide, entre autre, des promotions, sont généralement présidés par des hommes, tandis que le conseil de la vie étudiante est plus souvent présidé par des femmes.

PermalienPhoto de Guénhaël Huet

a exprimé la crainte les chargées de mission ne soient réduites à un rôle symbolique.

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a répondu que le rôle des chargées de mission n'est pas uniquement symbolique car il n'est pas inutile d'analyser une situation ni d'être disponible pour parler d'un sujet. L'évolution des dernières années est aussi à mettre au crédit de cette prise de conscience. Mme Armelle Le Bras-Chopard a indiqué qu'elle a été la première femme agrégée de sciences politiques et a attendu neuf ans avant qu'une seconde la rejoigne. Le retard qui caractérise cette discipline tend à se réduire. Il ne faudrait pas non plus décourager les chargées de mission parité.

Une étude relative au nombre d'enseignements et de recherches consacrés au genre dans les universités françaises, a été réalisée sur la base d'un questionnaire envoyé en 2001. Les chiffres ont forcément évolué mais pas les tendances comme le montre le rapport de l'ANEF, l'Association nationale des études féministes qui est consultable sur son site.

Les enquêtes comme celles sur le nombre de cours sur le genre, sur la répartition des sexes entre les disciplines, sur l'avancement dans la carrière… sont des préalables à l'identification des blocages. En matière de recrutement, les blocages se situent, d'abord, au niveau national dans la composition du CNU. Dans chaque section le nombre de femmes est inférieur à ce qu'elles représentent dans leur discipline, et les femmes sont peu présentes à la tête des sections: 10 présidentes de section en 2006 pour 71 sections… Les blocages existent ensuite au niveau de chaque université, dans la composition des Commissions de spécialités. Ces commissions ont été supprimées par la nouvelle loi : le nouveau dispositif qui les remplace permettra-t-il une meilleure répartition entre les sexes ? Il faut rappeler que le vivier de femmes maîtres de conférences existe et qu'elles devraient être plus nombreuses à devenir professeures, ce qui est particulièrement notoire en biologie…

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a tout de même déploré le peu de résultats obtenus.

PermalienArmelle Le Bras-Chopard

a remarqué que certaines réalités dépendent exclusivement de la réglementation. Les cours sur le genre sont très prisés, précisément parce qu'ils sont transversaux, mais celui qui veut créer un cours n'en a pas forcément la possibilité. Les chargées de mission sont surtout pour rôle de contribuer à la sensibilisation. Certains réflexes n'ont plus cours, grâce à de telles missions qui contribuent à faire évoluer la société.

La Délégation a ensuite entendu Mmes Véronique Chauveau, vice-présidente de l'Association femmes et mathématiques, Suzanne Mathieu, vice-présidente de l'Association des femmes ingénieurs, Claudine Hermann et Colette Guillopé, présidente d'honneur et présidente sortante de l'Association Femmes et Sciences.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a souligné que, malgré des résultats souvent excellents au baccalauréat, les filles ne s'orientent que trop peu vers les carrières scientifiques. Quelle analyse les trois associations auditionnées font-elles de ce phénomène ? Quelle est leur action pour tenter de l'inverser ?

PermalienVéronique Chauveau

a indiqué que les jeunes filles forment 46 % des effectifs de la filière S car c'est la filière d'excellence mais qu'il existe une différenciation au niveau des spécialités : les garçons choisissent majoritairement la physique et les jeunes filles majoritairement les sciences de la vie et de la terre.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a rappelé que la série S résulte de la fusion, en 1995, des séries C, D et E. Cette réforme a-t-elle été une bonne chose ?

PermalienVéronique Chauveau

a observé que l'objectif était de tenter de mettre fin à la suprématie de la série C. Cependant, nombreux sont ceux qui estiment que certains jeunes se seraient mieux trouvés dans l'ancienne série D que dans la filière S telle qu'elle existe actuellement. Sans qu'il soit question de revenir en arrière, il convient de réfléchir, dans le cadre d'une éventuelle réforme du lycée, aux effets pervers de la fusion : alors que cette matière continue à jouer un rôle de sélection, le nombre d'heures de mathématiques n'est plus suffisant, si bien que de nombreux élèves rencontrent des difficultés après une seconde générale qui les prépare mal à la filière scientifique. Ils doivent recourir à une aide extérieure, ce qui favorise les enfants de milieux aisés.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a demandé comment les associations pouvaient peser sur l'action du ministère de l'éducation nationale.

PermalienVéronique Chauveau

a précisé que le collectif « ActionSciences » regroupe quatorze associations, parmi lesquelles Femmes et Sciences et femmes et mathématiques, mais aussi des sociétés savantes. Fort de ses cinq années d'existence, il a demandé à participer aux groupes de travail annoncés par le ministre pour réfléchir sur les filières au lycée.

PermalienColette Guillopé

a regretté que les conclusions auxquelles les travaux d'« ActionSciences » ont abouti rencontrent si peu d'écho.

PermalienPhoto de Guénhaël Huet

a rappelé que la suprématie de la filière C n'était pas exempte d'ambiguïtés : de nombreux étudiants titulaires d'un baccalauréat C se sont ensuite tournés vers des études qui n'avaient rien à voir.

PermalienVéronique Chauveau

a estimé que la situation est encore pire aujourd'hui.

Selon Mme Claudine Hermann, les études très détaillées de la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'éducation nationale sur le parcours des titulaires d'un baccalauréat scientifique montrent que ceux-ci s'orientent de moins en moins vers les filières scientifiques supérieures.

PermalienSuzanne Mathieu

a pris l'exemple d'un lycée où, sur trois classes de terminale S, seuls quatre élèves voulaient poursuivre dans la voie scientifique.

PermalienVéronique Chauveau

a ajouté que, si les filles sont plus nombreuses à obtenir le baccalauréat S et à décrocher des mentions, elles se dirigent ensuite plutôt vers la médecine, peu vers les écoles d'ingénieurs, deux fois moins que les garçons vers les classes préparatoires. Le poids de la société est ici considérable. Il faut dénoncer des thèses qui se réfèrent à une prétendue différence homme-femme pour expliquer les différences de choix d'orientation. Un article de Phosphore, disait aussi qu'en mathématiques, les garçons ont des éclairs de génie pour résoudre les problèmes alors qu'il faut tenir les filles par la main !

PermalienClaudine Hermann

s'est référée aux travaux de Françoise Vouillot : il est important, pour les adolescents, de se reconnaître dans un groupe de pairs, si bien que le choix des études scientifiques est difficile pour une fille, qui risque de se retrouver ainsi seule dans une classe. Les jeunes filles qui veulent faire ce type de choix ne sont pas assez soutenues.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

s'est demandé pourquoi ce phénomène était moins accentué pour les générations précédentes.

PermalienColette Guillopé

a insisté sur le fait que le lycée accueillait alors beaucoup moins d'élèves. En outre, les filles étaient en majorité dans des établissements non mixtes. Ce qui ne veut pas dire que nous souhaitons revenir à des classes non mixtes...

PermalienSuzanne Mathieu

a remarqué que la proportion de femmes ingénieurs n'est devenue significative – même si elle restait modeste – que vers 1964. Le problème prend aujourd'hui de l'acuité, parce que l'on a besoin que plus de jeunes filles se dirigent vers ces professions.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

s'est interrogée sur les raisons pour lesquelles les professeurs de classe préparatoire estiment que le niveau des bacheliers scientifiques a baissé.

PermalienVéronique Chauveau

a fait valoir que le nombre d'heures de mathématiques a été considérablement réduit.

PermalienPhoto de Guénhaël Huet

s'est demandé si, outre le poids de l'environnement social dans le choix des études scientifiques, il n'existait pas une forme d'autocensure de la part des filles.

PermalienVéronique Chauveau

a observé que pourtant beaucoup d'entre elles se dirigent vers les études de médecine, qui sont encore plus sélectives que les classes préparatoires. Comme l'explique bien Françoise Vouillot, c'est parce que la division du travail est sexuée que les métiers sont sexués et hiérarchisés et que l'orientation est sexuée. Après l'enseignement, c'est la médecine qui se dévalorise, et l'on y retrouve de plus en plus de femmes.

PermalienSuzanne Mathieu

a observé que la réaction la plus courante des jeunes filles, lorsqu'on les encourage à s'engager dans la filière S, est de dire : « Je ne suis pas assez bonne en mathématiques. »

PermalienPhoto de Guénhaël Huet

a estimé que le complexe devant les mathématiques, qui constituent le point dur de la sélection, touche aussi les garçons.

PermalienVéronique Chauveau

en a convenu mais a rappelé qu'à notes égales, les filles choisissent moins les filières sélectives.

PermalienClaudine Hermann

a souligné que l'action des associations auprès des élèves est forcément limitée. Une action d'envergure nationale est nécessaire, à commencer par la formation de tous les enseignants au genre dans les IUFM.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a rappelé que la Délégation a choisi ce thème de travail car le problème de départ est un problème d'éducation.

Se référant à son expérience de professeur de lettres classiques, Mme Martine Martinel a observé que les représentations des disciplines recoupent des représentations sociales. Il est fâcheux que les professeurs soient amenés à défendre leur matière comme s'il s'agissait d'un « domaine en péril ». Il faudrait éviter de donner l'image d'un certain corporatisme.

Par ailleurs, le problème de la baisse du niveau au sortir du lycée se pose également dans les classes préparatoires littéraires, où les programmes sont restés sensiblement les mêmes depuis trente ou quarante ans.

PermalienSuzanne Mathieu

a précisé que son association insiste beaucoup sur l'importance du français et des langues dans les études d'ingénieur.

PermalienVéronique Chauveau

a remarqué que l'on dit de l'enseignement des mathématiques aux filles aujourd'hui ce que l'on disait de celui du grec et du latin. « Une femme qui sait le grec, écrivait Kant, est si peu une femme qu'elle pourrait bien avoir une barbe. » La formation n'en reste pas moins un préalable indispensable. Or, c'est sur ce point que l'on n'arrive pas à faire évoluer le ministère de l'éducation nationale. On fait valoir qu'il n'y a pas place au sein des 240 heures de formation. À l'IUFM de Paris, les quelques heures annuelles consacrées aux relations entre filles et garçons sont optionnelles.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

a estimé que c'est l'enseignement tout entier qui devrait être vu à travers le prisme du genre, à commencer par les manuels.

Pour Mme Véronique Chauveau, l'immobilisme actuel repose sur l'illusion que les choses ont changé et continueront à évoluer naturellement.

PermalienColette Guillopé

a remarqué qu'il a fallu passer par la loi pour imposer des évolutions dans les pratiques politiques. Il faudrait donc mettre en place des systèmes incitatifs très forts, comme les anciennes bourses d'IPES – institut de préparation aux enseignements du second degré.

PermalienVéronique Chauveau

a rapporté que les responsables rencontrés au ministère ont toujours répondu que l'idée était excellente mais trop onéreuse.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

s'est demandé si l'on n'assiste pas actuellement à un recul en matière d'égalité des sexes, comme si un mur se dressait entre les garçons et les filles.

PermalienVéronique Chauveau

a confirmé que, dans certains endroits, il existe beaucoup de tensions. Il faut malheureusement que les problèmes surgissent pour que les établissements se mettent à travailler sur la mixité. Pour le reste, le discours ambiant est que les filles réussissent mieux que les garçons, ce qui n'incite guère à prendre la question au sérieux. Quelle est, pourtant, la proportion de femmes à la tête des entreprises, dans le monde politique, etc. ?

PermalienSuzanne Mathieu

a ajouté que les associations n'étaient pas en mesure de mener une sensibilisation dans tous les établissements.

PermalienVéronique Chauveau

a pris l'exemple de l'opération « Ambassadrices pour les sciences à Paris », lancée en décembre par la mairie de Paris à laquelle seuls dix-huit lycées ont répondu.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

s'est demandé si des actions de ce type sont bien dans le rôle d'une municipalité.

PermalienClaudine Hermann, Suzanne Mathieu

et Véronique Chauveau ont souligné la variété des initiatives, qui peuvent émaner des mairies, des rectorats, des chefs d'établissement, de professeurs. Beaucoup de communes et de communautés de communes organisent des forums des métiers, où les associations peuvent toucher un public plus large.

Cette disparité démontre, en creux, l'inaction du ministère de l'éducation nationale. La convention pour l'égalité homme-femme dans le système éducatif, signée en 2000, a été renouvelée le 29 juin 2006. Pourtant, personne au ministère n'était chargé de mettre en oeuvre cette convention jusqu'en décembre 2007, date à laquelle une chargée de mission a été nommée. Elle a certes la possibilité de travailler, mais sans aucun moyen financier. Quant au pilotage de la convention, il a fallu attendre le 8 mars 2008 pour que soit nommée Mme Marie-Jeanne Philippe, rectrice de l'Académie de Besançon.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

a souhaité qu'un secrétaire d'État au genre soit placé auprès du ministre de l'éducation nationale.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a remarqué que cela ne semble pas une priorité du ministère.

PermalienPhoto de Martine Martinel

a souligné que la refonte en cours des programmes peut être l'occasion de mettre en avant les questions relatives au genre.

PermalienVéronique Chauveau

a relaté que, lors d'un récent colloque sur l'égalité filles-garçons à l'école organisé à l'École supérieure de l'éducation nationale à l'intention des cadres du ministère, plusieurs intervenantes ont ironisé sur le fait que les mêmes colloques se tiennent régulièrement depuis trente ans sans que la situation change le moins du monde.

Le thème « femmes et sciences » est inscrit dans les thèmes des travaux personnels encadrés en classe de première. De même, les programmes d'éducation civique, juridique et sociale incluent la question de la place des femmes dans la société. Mais comme il s'agit de thèmes transversaux, ils sont laissés au libre choix des enseignants.

PermalienClaudine Hermann

a remarqué que le changement le plus significatif est peut-être le fait que les entreprises cherchent de plus en plus à embaucher des femmes et lancent des campagnes de promotion en direction des jeunes filles.

Selon Mme Suzanne Mathieu, cela s'explique par le manque actuel d'ingénieurs, mais aussi par le fait que des études ont démontré que les équipes mixtes sont plus performantes. Les entreprises savent bien que le client du XXIe siècle ne sera pas seulement un homme.

PermalienClaudine Hermann

a soulevé la question des internats de filles pour les classes préparatoires, question qui est pendante depuis dix ans. Certains lycées parisiens ont profité de la réfection de leurs internats pour réserver des chambres aux filles. En province, en revanche, dans certaines villes aucun lycée n'offre cette possibilité.

PermalienVéronique Chauveau

a rapporté que les dernières places d'internat pour filles à Toulouse ont été fermées. Il ne reste plus que la solution du logement chez l'habitant ou dans un couvent.

PermalienPhoto de Martine Martinel

a observé qu'effectivement le lycée Pierre de Fermat donne priorité aux garçons et que cela ne suscite guère de protestations. Pas un article de presse n'a abordé ce problème. Les enseignants de classe préparatoire n'ont pas l'air non plus de s'en émouvoir. Pourtant, être obligé de prendre un logement en ville est très coûteux pour les familles.

PermalienPhoto de Catherine Quéré

a souligné la responsabilité des politiques à cet égard. Les présidents de région ont compétence pour les lycées : pourquoi ne pas mener une enquête auprès d'eux pour vérifier qu'ils sont attentifs à la question des internats de filles ?

Par ailleurs, Mme Véronique Chauveau a fait état du souhait des associations de participer au comité de pilotage de la convention pour l'égalité entre les filles et les garçons.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

s'est proposée pour relayer cette demande. La question de l'égalité professionnelle est primordiale. La lutte contre les violences faites aux femmes est systématiquement mise en avant, mais la première façon de respecter une femme est de lui permettre d'exister en lui offrant une situation qui garantisse son indépendance.

PermalienPhoto de Martine Martinel

a convenu que la victimisation est beaucoup plus facile que l'action. On s'apitoie, on se donne bonne conscience, mais rien n'avance. Au contraire, l'école apprend à parler, à exister, à gagner l'estime de soi, ce qui est fondamental.

PermalienClaudine Hermann

a évoqué la place des femmes dans l'enseignement supérieur. Si l'on prolonge les courbes retraçant le pourcentage de femmes en poste dans les facultés scientifiques de 1981 à aujourd'hui, la parité s'établira dans à peu près cent cinquante ans ! C'est dans les facultés scientifiques que la situation est la pire. Il y a lieu de se soucier de l'évolution du CNRS, où l'on s'apprête à embaucher des personnes sur des postes précaires pendant plusieurs années avant de les accepter comme fonctionnaires. Qu'en sera-t-il pour les jeunes femmes qui souhaitent avoir des enfants ? Si, dans d'autres pays européens, la mentalité qui veut que l'on choisisse entre fonder une famille et avoir un métier est fortement ancrée, il n'y a aucune raison que la France s'aligne sur cette position ! Il faudra donc être très attentif aux nouveaux textes réformant la recherche et l'enseignement supérieur.

Le précédent projet de loi sur la recherche ne comportait rien sur la place des femmes. Les associations, après avoir rencontré le ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche, François Goulard, et effectué un lobbying intense pendant presque deux mois ont réussi à obtenir deux amendements gouvernementaux tendant à assurer une représentation équilibrée dans les comités et prévoyant la remise d'un rapport annuel sur l'état de l'égalité professionnelle dans la recherche – ce que tous les ministères devraient faire, au demeurant.

M. Goulard a mis en place un comité pour l'égalité professionnelle mais Mme Pécresse ne l'a réuni que le 8 mars 2008. La question des congés de maternité dans l'enseignement supérieur, notamment pendant les bourses de thèses, reste entourée d'un grand flou. Mme Valérie Pécresse a pour sa part chargé M. Lionel Collet, président de l'université de Lyon I, de mener une réflexion au sein de la Conférence des présidents d'université pour que la charte pour l'égalité, que son établissement a adoptée, soit étendue à d'autres universités.

PermalienClaudine Hermann

a souligné que les missions parité du ministère de la recherche et du CNRS ont financièrement soutenu les associations ici représentées. Dans certaines universités et certaines régions, on assiste à des avancées sur la question de l'égalité hommes-femmes dans les études ou les professions, généralement du fait de l'action de quelques personnes efficaces.

PermalienColette Guillopé

a regretté l'absence de pilotage politique.

Pour Mme Claudine Hermann, la perte d'intérêt pour ces sujets se constate également dans les instances européennes, alors qu'une série d'initiatives intéressantes avaient été lancées dans les années 1998-1999.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

s'est alarmée de l'absence d'implication des jeunes générations.

PermalienSuzanne Mathieu

a remarqué qu'il existe des exceptions, comme l'association « Grandes écoles au féminin ».

PermalienVéronique Chauveau

a déploré pour sa part que la commission Pochard, censée réfléchir à l'avenir du métier d'enseignant, métier tellement féminisé, ait été composée en majorité d'hommes. Elle a ensuite évoqué l'action des associations contre une publicité à caractère sexiste diffusée sur le site du conseil général des Yvelines. Le président du conseil général, M. Bédier, et Mme Valérie Pécresse ont répondu tout deux par une fin de non-recevoir.

PermalienColette Guillopé

a souligné la puissance des médias dans la construction et la diffusion des stéréotypes sexués, et ce dès la petite enfance.

PermalienVéronique Chauveau

a rappelé que statistiques sexuées publiées à l'occasion des vingt ans de l'Association femmes et mathématiques mettent en évidence une dégradation en mathématiques et une situation catastrophique pour l'informatique, alors que beaucoup de femmes suivaient cette filière il y a vingt ans.

PermalienSuzanne Mathieu

a cité les résultats d'une enquête menée par une sociologue de l'École nationale supérieure d'arts et métiers pour savoir pourquoi les filles ne se tournent pas vers les études informatiques. Il en ressort qu'elles imaginent les informaticiens comme des hackers et qu'elles redoutent l'absence de contacts et de communication dans cette discipline, ce qui est évidemment une image erronée.

PermalienColette Guillopé

a précisé que la proportion d'enfants issus de milieux modestes dans les classes préparatoires a également beaucoup diminué. Les sciences ne sont plus un facteur d'ascension sociale, alors qu'elles offraient des possibilités de réussite à des élèves n'ayant pas forcément, du fait de leur milieu social, une culture générale très étendue.

PermalienClaudine Hermann

a déploré l'absence d'une vision générale des flux d'étudiants, de l'entrée dans le système à la sortie. En Allemagne, par exemple, les signaux en provenance de l'industrie ont une influence sur les inscriptions.

PermalienPhoto de Marie-Jo Zimmermann

a remercié les intervenantes et a indiqué qu'elle allait intervenir auprès de M. Xavier Darcos pour le saisir des nombreux sujets d'inquiétude que cette audition a permis de mieux cerner.