COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES
Mercredi 17 juin 2009
La séance est ouverte à dix heures dix.
(Présidence de M. Pierre Méhaignerie, président de la Commission)
La Commission des affaires culturelles, familiales et sociales examine, sur le rapport de M. Jacques Domergue, la proposition de loi, modifiée par le Sénat, portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants (n° 1452).
Nous examinons aujourd'hui, en deuxième lecture, la proposition de loi de M. Jacques Domergue portant création d'une première année commune aux études de santé et facilitant la réorientation des étudiants.
C'est parce que son texte a été très légèrement modifié par le Sénat que nous examinons à nouveau cette proposition que nous avons votée il y a quelques mois. Je souhaite désormais qu'un vote conforme permette son entrée en vigueur dès la rentrée 2010.
Ce texte a pour finalité de mettre fin à un véritable « gâchis humain ». En effet, la première année du premier cycle des études médicales, PCEM 1, qui inclut aussi la première année des études d'odontologie et de sage-femme, est sanctionnée par un numerus clausus qui se traduit par un taux d'échec de 85 %, tandis que la première année de pharmacie connaît, par le même mécanisme, un taux d'échec de 75 %. On voit même des étudiants ayant obtenu la moyenne aux examens être recalés, car classés au-delà du numerus clausus.
Le texte crée donc de nouvelles voies de réorientation afin de permettre à ces étudiants de tirer profit de leurs acquis pour entrer dans d'autres filières sans perdre une année. Regrouper en une première année commune les études médicales, odontologiques et de sage-femme ainsi que les études de pharmacie permettra également de doter ces professions d'une culture commune, le pharmacien étant aujourd'hui un acteur de santé de première ligne, au sein d'une profession de plus en plus médicalisée.
Toujours pour remédier à ce gâchis, la proposition de loi favorise la mise en place de passerelles à la sortie et à l'entrée des études de santé. Les passerelles « sortantes » doivent permettre aux étudiants recalés, notamment ceux qui ont atteint la moyenne aux examens, d'intégrer d'autres filières scientifiques, voire de sciences humaines. Les passerelles « entrantes » doivent permettre à des étudiants de tous horizons d'accéder à la deuxième ou à la troisième année des études de santé, afin notamment d'enrichir le cursus médical de cultures différentes. Il est légitime en effet d'aménager, à côté de l'examen sanctionnant la première année des études de santé, des possibilités, marginales mais salutaires, d'intégration ou de réintégration de la filière, qui ne seront bien sûr ouvertes qu'à des candidats ayant suivi des parcours d'excellence – doctorat, mastères par exemple – et dont les dossiers seront examinés par une commission.
Sur le plan législatif, la seule modification substantielle introduite par le Sénat est le report de l'entrée en vigueur de la loi, que nous avions initialement prévue pour l'année universitaire 2009-2010, la réorientation des étudiants à l'issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci devant être mise en place au plus tard à compter de la rentrée universitaire 2011-2012. Accédant à la demande des universités de bénéficier d'un délai supplémentaire pour préparer la mise en application du texte, le Sénat a repoussé cette entrée en vigueur à la rentrée 2010, et la possibilité de réorientation des étudiants à la rentrée 2012. Ce délai supplémentaire me semblant finalement salutaire à la mise en oeuvre de la réforme, je vous demande de voter ce texte en l'état.
Une seule question : pourquoi ne pas avoir intégré les infirmiers et les kinésithérapeutes dans ce cursus commun ?
Cette loi est très attendue, en ce qu'elle vise à remédier au gâchis humain évoqué par le rapporteur par une simplification des études de santé et une possibilité de réorientation des étudiants de première année dès le premier semestre. Mais cette réforme est lourde à mettre en place et de ce point de vue la modification du Sénat est bienvenue.
Il faudra à l'avenir s'interroger sur la possibilité d'intégrer la formation des sages-femmes au cursus licence-mastère-doctorat (LMD).
Je me félicite, monsieur le rapporteur, de votre changement de position quant à la date d'entrée en vigueur de la loi, alors qu'en décembre vous vous opposiez vigoureusement à tout report.
Quant à l'unanimité prétendue des doyens d'université en faveur de votre réforme, elle est pour le moins relative : la réforme ne semble pas avoir été si favorablement accueillie à Lyon et à Toulouse, et la conférence des doyens présidée par M. Thuillez ne serait pas passée au vote, apparemment parce qu'une majorité défavorable risquait de se dégager.
Nous nous félicitons de la volonté du Sénat de laisser aux universités une plus grande latitude dans la mise en place de la réforme.
Nous déplorons que ce texte, que vous avez mis sept ans à nous proposer, ne tienne pas compte de toutes les propositions de M. Debouzie, notamment celles relatives aux infirmières et aux kinésithérapeutes. Vous ne nous proposez qu'un bout de réforme, au risque de déplacer vers d'autres filières le gâchis que la réforme est censée combattre.
Puisque la révision constitutionnelle permet au Parlement d'effectuer des études d'impact des lois qu'il a votées, pourquoi ne pas évaluer d'abord le regroupement en PCEM 1 des études de médecine, d'odontologie et de sage-femme avant d'y ajouter les pharmaciens ? Cette intégration des étudiants en pharmacie est d'autant plus surprenante que les pharmaciens ne sont pas en contact direct avec le patient, que le conseil pharmaceutique n'est pas un diagnostic clinique, et que leurs conditions d'étude sont moins mauvaises que celles des médecins.
On peut craindre aujourd'hui que cette réforme crée un appel d'air et qu'on se retrouve en 2010 avec 65 000 étudiants inscrits dans la filière, au lieu des 55 000 actuels. Des propositions du rapport Bach, qui semble avoir été votre principal inspirateur, vous n'avez retenu que celles qui allaient dans votre sens, et non celles relatives à l'organisation d'un tutorat ou à l'information des lycéens. À terme, la réforme risque d'aggraver la sélection académique d'une sélection sociale, en favorisant le développement d'officines privées d'enseignement. En effet, les étudiants réorientés dès la fin du premier semestre vers des filières scientifiques risquent de mettre à profit cette « année blanche » pour « bachoter » leur examen de première année dans des cours privés.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas cette proposition de loi.
Je vous trouve excessivement dure avec vos collègues pharmaciens, Madame : j'en vois de plus en plus contester, parfois à juste titre, les prescriptions des médecins.
Cette proposition de loi a l'avantage de faire de ce qui n'était que des passerelles fonctionnelles des passerelles organiques, sur le modèle du système canadien. En revanche, elle laisse entière la question du numerus clausus. Or le problème du recrutement médical n'est pas seulement quantitatif, il est d'abord qualitatif, notamment dans les hôpitaux. Permettez-moi de vous citer l'exemple de deux étudiants de l'université de Montpellier : l'un passe brillamment ses examens mais, déçu par son échec à l'internat, doit renoncer à la cardiologie et devient urgentiste ; l'autre, après avoir triplé sa première année, obtient son diplôme de cardiologie à l'étranger et revient en France, où on l'autorise à exercer et où il devient chef de service à l'hôpital où officie son camarade. Cette anecdote résume le verrouillage de notre système de recrutement. C'est pourquoi cette réforme utile ne saurait être qu'une première étape.
Cette proposition de loi ne mérite certainement pas une telle polémique, Madame Lemorton : il s'agit d'un texte de bon sens, suscitant un large consensus chez les présidents et les professeurs d'université qui l'attendaient depuis longtemps.
C'est pourquoi je regrette le report de son entrée en vigueur, qui ne sera qu'une perte de temps pour des étudiants dont 80 % sont en situation d'échec à l'issue de la première année. Il faut très vite la voter et, surtout, la faire entrer en application.
Le véritable gâchis humain qui sanctionne les études médicales s'explique, non seulement par leur difficulté propre, mais également par le système de sélection.
Je voudrais savoir, Monsieur le rapporteur, si la commission sera tenue informée du bilan de la première année d'application de la réforme. Par ailleurs, la disposition ajoutée par le Sénat relative aux critères de répartition du numerus clausus, que vous approuvez pour les universités disposant de plusieurs UFR implantées sur plusieurs sites, ne semblent pas applicables aux autres.
Je suis enfin favorable la proposition de nos collègues socialistes d'instaurer un tutorat dans l'enseignement supérieur, afin d'améliorer l'encadrement des étudiants de première année.
Alors que nous avons là l'occasion rare, voire unique, de débattre de la première année de médecine, comment ne pas rappeler l'absurdité d'un numerus clausus trop strict quand nos hôpitaux souffrent de tels problèmes de recrutement qu'ils sont contraints de faire appel à des médecins étrangers ? Or la réforme proposée laisse ce problème entier.
C'est bien beau, par ailleurs, de prévoir des possibilités de sortir des études médicales : mais cela n'en reste pas moins un gâchis pour ceux dont la vocation était d'être médecin.
Je partage l'opinion qui vient de s'exprimer sur le numerus clausus : comment accepter que tant d'étudiants soient recalés à l'issue de la première année de médecine, alors que les hôpitaux et les zones rurales souffrent d'un manque criant de médecins ?
Par ailleurs, j'aimerais savoir pourquoi les professions paramédicales, telles que les kinésithérapeutes ou les orthophonistes, ne sont pas incluses dans la réforme.
Si l'on ne peut qu'approuver les passerelles « sortantes », je crains que les passerelles « entrantes » ne favorisent des stratégies de contournement du numerus clausus.
Je tiens à vous faire part de la satisfaction de la communauté des enseignants chercheurs, notamment ceux des universités de province, devant ce report de l'entrée en vigueur de la loi, étant donné le manque de moyens matériels et de temps dont souffrent notamment les petites universités.
La suite logique de cette réforme sera l'intégration des études médicales dans le cursus LMD, qui favorisera notamment le lien entre disciplines fondamentales et disciplines cliniques.
Enfin, des dérogations permettent actuellement à de futurs masseurs-kinésithérapeutes de suivre la première année des études médicales – c'est le cas à l'université de Reims. Quid de ces étudiants une fois la réforme adoptée ? N'aurait-il pas mieux valu intégrer ces étudiants dans la première année commune ?
J'apprécie particulièrement que les passerelles qui donnent accès aux études médicales ne bénéficient plus seulement à des scientifiques. Quant aux possibilités d'évitement du numerus clausus, elles existent déjà dans certaines universités : celle de Marseille autorise ainsi les masseurs-kinésithérapeutes ayant exercé au moins trois ans à intégrer la deuxième année d'études médicales à la condition qu'ils aient obtenu la moyenne aux épreuves de fin de première année de médecine.
Cette proposition de loi reprend une proposition de la mission parlementaire sur l'offre de soins sur l'ensemble du territoire qui avait été adoptée à l'unanimité de la Commission.
Le problème n'est pas que l'on manque de médecins, mais que ceux-ci sont inégalement répartis sur le territoire. Nous subissons par ailleurs les effets du numerus clausus très bas dans les années 1980 et 1990, mais son augmentation constante depuis lors ne fera sentir ses effets que dans les prochaines années.
Comme le groupe socialiste, je déplore qu'on n'ait pas inclus les professions paramédicales dans la réforme, surtout au moment où on évoque la création de maisons de santé pluridisciplinaires associant professions médicales et paramédicales.
Il faut enfin souligner combien les études de médecine sont difficiles en France : ne doit-on pas s'interroger sur la pertinence de critères de sélection aussi sévères, alors qu'on dispense à Bucarest un enseignement médical en français ?
Il faut définitivement faire un sort à l'idée reçue selon laquelle l'augmentation du numerus clausus suffirait à résoudre tous les problèmes de démographie médicale : la France est déjà le pays d'Europe où la densité médicale est la plus forte. En revanche, la médecine de premier recours n'attire que 6 % des diplômés.
Quant au tutorat, c'est une très bonne idée, mais point n'est besoin d'une loi pour l'organiser : mieux vaut laisser ce soin aux initiatives locales.
En revanche, je défends vigoureusement le développement des passerelles, car il permet d'échapper au formatage qui vous destine à exercer toute la vie la même profession. Voilà pourquoi je suis très favorable à cette proposition.
Je veux d'abord me féliciter du report de l'entrée en vigueur de la loi, puisque les étudiants n'auraient pas pu être informés au moment de leur inscription de ces nouvelles possibilités de réorientation.
Hormis ce point, je ne vois pas en quoi cette loi remédiera au gâchis que vous évoquez : elle ne va pas faire baisser le nombre d'inscrit en PCEM 1, alors que le numerus clausus reste inchangé. En conséquence, on risque d'assister à un afflux d'étudiants vers les facultés de sciences, qui ne sont pas prêtes à faire face à une telle augmentation de leurs effectifs.
La possibilité de repasser l'examen après deux ans dans une autre filière risque en outre de favoriser les étudiants aisés, qui peuvent s'engager dans de longues études.
Cette proposition fait enfin l'impasse sur la question des spécialités médicales. L'insuffisance du nombre d'étudiants formés en ophtalmologie au regard de l'accroissement des besoins dû au vieillissement de la population, pour ne citer que cet exemple, rendra nécessaire le recrutement de personnes insuffisamment formées ou de médecins étrangers. Cela ne peut qu'inciter les étudiants français à suivre un cursus médical en Roumanie.
Les arguments relatifs au numerus clausus sont parfaitement réversibles.
Si je trouve excellente en théorie l'idée de développer les voies de réorientation, il faudra être prudent dans sa traduction pratique, et veiller notamment à ce qu'elle soit suffisamment souple. Ce qui me peine, c'est que tout notre travail demeurera vain tant qu'on n'aura pas le courage d'adapter le statut du médecin aux besoins réels. Ceci étant dit, la philosophie de ce texte me convient parfaitement.
Il aurait fallu associer à la réforme certaines professions paramédicales, telles que les infirmiers ou les masseurs-kinésithérapeutes. Il est très important par ailleurs que la loi prévoie l'organisation d'un tutorat, au bénéfice notamment des étudiants dont la situation sociale est difficile, afin de faire pièce aux officines privées d'enseignement qui convoitent cette clientèle.
En ce qui concerne les passerelles, le « purgatoire » de dix-huit mois que vous mettez en place ne fera que déplacer le problème vers les facultés de sciences, sur lesquelles se déversera le trop-plein des étudiants en médecine. On peut en outre s'interroger sur l'opportunité de limiter ainsi les possibilités de réorientation : il faudrait faire preuve d'une plus grande ouverture à d'autres disciplines. Il conviendrait à ce propos que le contenu de la première année d'études médicales soit plus exigeant en matière de sciences humaines.
Je me félicite également du report décidé par le Sénat, qui aura l'avantage de laisser le temps aux universités de s'organiser et aux lycéens de décider de leur orientation.
L'objectif d'éviter le gâchis humain que représente le taux d'échec en PCEM 1 me semble en contradiction avec la possibilité laissée à tout étudiant de s'y inscrire. Ne vaudrait-il pas mieux instaurer à l'entrée de cette filière une sélection comme il en existe dans beaucoup d'autres ?
Vous avez évoqué, Monsieur le rapporteur, le caractère marginal des possibilités de réintégration des études de santé par des passerelles « entrantes » au regard de la voie normale de recrutement : pouvez-vous nous préciser dans proportion d'étudiants bénéficieront de ces possibilités ?
Étant donné le caractère socialement homogène du recrutement des médecins – on trouve quand même peu de fils d'ouvriers dans cette filière –, on doit également s'interroger sur la composition de la commission chargée de sélectionner les dossiers des étudiants : il ne faudrait pas que celle-ci renforce encore le déterminant social du recrutement de nos futurs médecins.
Je crains que la mise en place de cette année commune et de passerelles « entrantes » ne crée un appel d'air, provoquant l'inscription d'un nombre encore plus important d'étudiants en PCEM 1. L'accès par ces passerelles sera-t-il limité par un quota et quels seront les critères pour en bénéficier ?
Quand on sait qu'un tiers des femmes diplômées de médecine n'exercera jamais et qu'un tiers seulement exercera effectivement en médecine générale ou spécialisée, la détermination du numerus clausus devrait prendre en compte la féminisation des études médicales à laquelle on assiste depuis plusieurs années.
Je déplore que cette proposition ne donne aux universités aucun moyen supplémentaire pour assurer l'accueil de nouveaux étudiants ou la réorientation vers d'autres filières.
Avant de donner la parole au rapporteur, je souhaite vous entretenir de l'ordre du jour de nos travaux à venir.
Hier, après dix heures de réunion au Sénat, la commission mixte paritaire chargée d'examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires est parvenue à élaborer un texte, qui devrait venir en séance publique le mardi 23 juin.
Par ailleurs, la proposition de loi tendant à garantir la parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées sous contrat d'association lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence n'est pas reprogrammée : peut-être attend-on pour le faire le 1er juillet et la création de la nouvelle commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Le 22 juin, nous examinerons à 21 heures 15, au titre de l'article 88, les amendements à la présente proposition de loi, qui viendra en séance publique à 21 heures 30.
Le 23 juin, nous aurons à 16 heures 15 avec la commission des finances une audition commune du président Séguin en vue du débat d'orientation des finances publiques pour 2010. Puis, à 17 heures 30 nous examinerons la proposition de loi Mallié réaffirmant le principe du repos dominical et visant à adapter les dérogations à ce principe dans les communes et zones touristiques et thermales ainsi que dans certaines grandes agglomérations pour les salariés volontaires. Sauf miracle, cette discussion se poursuivra à 10 heures et 16 heures 15 le 24 juin.
Le 30 juin se tiendra en séance publique le débat d'orientation des finances publiques.
Le 1er juillet à 16 heures 15 et 21 heures et le 2 juillet à 9 heures 30, nous examinerons le rapport de M. Cherpion sur le projet de loi relatif à l'orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie, qui devrait venir en séance publique le mercredi 15 juillet et faire l'objet d'une semaine et demie de débat, jusqu'à la fin de nos travaux. Pour que ce débat d'importance ne se disperse pas, je souhaite que la majorité fasse à un effort de discipline et se limite à une centaine d'amendements.
Merci pour ces indications. On ne peut que regretter que le projet relatif à la formation professionnelle, qui est un texte majeur, ne soit examiné en séance publique qu'après le 15 juillet. Il est vrai que ce n'est pas une première puisque nous avions déjà examiné la réforme de la sécurité sociale et la réforme des retraites à cette période de l'année…
Nous en revenons aux études médicales.
Il apparaît qu'en ayant reculé la date d'entrée en application de la réforme, le Sénat nous a en fait permis d'approfondir le débat… Si nous avions voulu qu'il s'applique dès la prochaine rentrée, c'était d'une part parce qu'il est en préparation depuis longtemps, d'autre part parce que, contrairement à ce qu'a dit Mme Lemorton, beaucoup de facultés y étaient prêtes.
Ce report facilitera également les aménagements nécessaires dans les universités pour permettre aux étudiants précédemment répartis entre la première année de médecine et la première année de pharmacie de suivre désormais des enseignements communs. Nous sommes tous très attachés à la qualité et à l'équité de cet enseignement.
Peut-être la Conférence des doyens ne s'était-elle pas prononcée, mais lors de l'audition à laquelle j'avais procédé, un accord s'était dégagé en faveur de l'application rapide de la réforme.
La finalité de cette proposition est d'éviter le gâchis que j'évoquais. Je vous concède que l'on pourrait faire mieux, en particulier en prenant en compte les professions paramédicales. C'est un sujet sur lequel je souhaite que l'on revienne à l'avenir.
Les passerelles « sortantes » ne sont pas réservées aux facultés de sciences. Si nous avons souhaité une procédure de réorientation dès la fin du premier semestre, ce n'est pas pour pénaliser les étudiants mais parce que, statistiquement, ce que Catherine Génisson a appelé le « purgatoire » intervient à ce moment-là puisqu'un étudiant qui a moins de 620 de moyenne aux partiels de décembre n'a aucune chance de réussir le concours à la fin de la première année et même pratiquement aucune chance ultérieure s'il poursuit dans la même filière. L'idée est donc de permettre à l'étudiant qui reviendra en première année après avoir amélioré son niveau en faculté de sciences de se représenter avec des chances réelles d'intégrer l'une des quatre filières des études de santé.
Les passerelles « entrantes » ne joueront qu'à la marge : ne laissons pas croire que tous les titulaires d'un doctorat ou d'un mastère pourront entrer dans la filière médicale. Mais cette dernière tente de très nombreux étudiants et au moins la possibilité de l'intégrer sera-t-elle désormais offerte, de manière sélective car il n'est pas question de concurrencer la voie normale d'accès aux études médicales, à des étudiants méritants, qui ne seront absolument pas sélectionnés sur des critères sociaux, et qui pourront ainsi enrichir nos filières de santé. C'est en effet à juste titre que plusieurs d'entre vous avez insisté sur la nécessité d'une plus forte présence des sciences humaines dans les programmes car on a fait du médecin un technicien en laissant de côté l'aspect humaniste, au détriment du bon sens et du contact, pourtant importants, notamment en psychiatrie.
Je ne puis laisser dire à Mme Lemorton que le pharmacien n'a aucun contact avec le patient (Mme Catherine Lemorton proteste). Ne dit-on pas en politique que les pharmaciens sont ceux qui sont le plus en contact avec les électeurs ? Or les électeurs sont aussi les patients... Je crois qu'au contraire le pharmacien est appelé de plus en plus à être le premier recours dans l'accès aux soins et c'est une bonne chose. Avec les dispositions que nous avons adoptées dans le cadre du projet de loi portant réforme de l'hôpital en matière de conseil médical, le pharmacien a désormais une certaine latitude de prescription, notamment en matière de contraception. Il est ainsi un acteur à part entière de la santé publique et il paraît légitime de l'intégrer dans la réforme des études médicales.
Dans un certain nombre d'universités, la sélection des kinésithérapeutes se fait par le biais de la première année des études de santé, mais ailleurs elle passe par des officines préparant à un concours privé, ce qui rend les études bien plus onéreuses. De même que nous nous apprêtons à « mastériser » la profession de sage-femme, il faudra nous pencher sur les études de kinésithérapeutes, mais aussi rechercher une évolution des études d'infirmières. Cela ne peut pas se faire du jour au lendemain, mais je m'engage, lorsque ce dossier aura mûri, à oeuvrer en faveur d'une clarification de la formation des professions paramédicales et de la création de passerelles qui permettront également d'éviter le gâchis que vous avez été nombreux à souligner.
Il est vrai que l'on voit des médecins se former à l'étranger et qu'en Roumanie les enseignements sont dispensés en français. Pour autant, je crois nécessaire de maintenir un numerus clausus. Il est déjà passé de 3 500 en 1995 à près de 8 000 aujourd'hui, mais l'inertie est forte en la matière puisque, compte tenu de la durée des études médicales, il s'écoule pas moins de 10 ans avant qu'une décision porte ses fruits. Il est donc bien difficile aux planificateurs de savoir quand ils doivent ouvrir ou fermer les vannes.
Je souhaite enfin que les sciences humaines soient plus présentes dans les programmes car on voit les limites d'une formation trop scientifique. Je suis d'ailleurs persuadé que les passerelles « entrantes », en particulier au profit de littéraires, apporteront un peu d'oxygène aux études de santé. La sélection des jeunes qui veulent s'engager dans ces métiers pose manifestement problème. Désormais, ils pourront d'ailleurs opter pour l'une des quatre filières alors qu'ils étaient auparavant bloqués dans celle qu'ils ont choisie en première année.
Je répète que les pharmaciens ne feront jamais de diagnostic clinique car ce serait un exercice illégal de la médecine. D'ailleurs, que je sache, le législateur ne les a pas inclus dans les maisons pluridisciplinaires. De même, ils n'ont obtenu qu'à l'arraché que la loi Bachelot autorise la délégation de tâches et leur permette de délivrer trois mois de pilules à la suite d'une contraception d'urgence. Et au titre II de cette même loi, il n'a pas été question que les pharmaciens soient considérés comme un premier recours au sein des équipes dédiées aux urgences. Sur ce sujet, je vous renvoie donc à vos contradictions, monsieur le rapporteur.
La Commission passe ensuite à l'examen des articles de la proposition de loi.
Article 1er : Création d'une première année commune aux études de santé et de nouvelles voies de réorientation des étudiants ayant choisi ce cursus
La Commission examine l'amendement AC 1 de Mme Catherine Lemorton.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement AC 2 de Mme Catherine Lemorton.
S'agissant des professions paramédicales, je répète que je souhaite que nous travaillions ensemble sur ce sujet.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement AC 10 de M. Gérard Charasse.
Cet amendement, comme le suivant, vise à éviter que l'on ne cherche à faire des économies au détriment des établissements.
Il n'en est nullement question. Tout au plus le nombre des étudiants peut-il varier légèrement. Mais les moyens sont bien là puisque je rappelle que le budget de l'enseignement supérieur et de la recherche a augmenté de 6,7 % en autorisations d'engagement. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement, de même que l'amendement AC 11, du même auteur.
Elle examine l'amendement AC 3 de Mme Catherine Lemorton.
Nous proposons d'informer très en amont les lycéens de la difficulté et de la longueur des études de santé.
Avis défavorable car cela fait partie de l'ensemble de l'information délivrée aux lycéens.
À ce propos, je félicite notre collègue Françoise Guégot, qui vient d'être chargée par le Premier ministre d'un rapport sur le développement d'une « véritable politique publique d'orientation professionnelle ».
La Commission rejette l'amendement, de même que l'amendement AC 4, du même auteur.
Elle examine ensuite l'amendement AC 5 de Mme Catherine Lemorton.
Cet amendement fait référence aux expériences précédentes de tutorat, ainsi qu'au rapport Bach qui semble être à la base de cette proposition.
Avis défavorable. Il n'y a pas de problème matériel car les enseignants sont disponibles. Il est simplement nécessaire d'aménager l'organisation des travaux dirigés pour faciliter le travail en petits groupes. Le report de l'entrée en vigueur de la réforme facilitera d'ailleurs les choses.
La Commission rejette l'amendement, de même que l'amendement AC 6, du même auteur.
Elle examine l'amendement AC 7 de Mme Catherine Lemorton.
Il s'agit de faire en sorte que les « reçus-collés » obtiennent une équivalence en deuxième année d'université scientifique.
Avis défavorable car cet amendement limiterait en fait cette possibilité aux études scientifiques, alors que nous entendons l'ouvrir pour d'autres filières.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 1er sans modification.
Après l'article 1er
La Commission examine l'amendement AC 9 de Mme Catherine Lemorton.
Cet amendement a trait à l'intégration de l'ensemble des professions paramédicales, en particulier des infirmières, dans le dispositif LMD. Mme Pécresse avait annoncé dès 2007 la constitution d'un groupe de travail, nous attendons toujours…
La Commission rejette l'amendement.
Article 2 : Entrée en vigueur des dispositions de l'article 1er
La Commission examine l'amendement AC 8 de Mme Catherine Lemorton.
Avis défavorable. J'ai déjà dit que la question des moyens ne faisait pas obstacle à la réforme.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 2 sans modification.
Elle adopte enfin l'ensemble de la proposition de loi sans modification.
La séance est levée à onze heures vingt.