Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination de la grippe A(H1N1)
Mercredi 9 juin 2010
La séance est ouverte à vingt heures.
(Présidence de M. Jean-Christophe Lagarde, président de la commission d'enquête)
La Commission d'enquête sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) entend le docteur Marc Girard, consultant.
Docteur Marc Girard, je vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de la commission d'enquête parlementaire sur la manière dont a été programmée, expliquée et gérée la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1).
J'indique à nos collègues que cette invitation a été demandée par M. Gérard Bapt et acceptée par le rapporteur, M. Jean-Pierre Door, et par moi-même.
M. Marc Girard prête serment.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, à quel titre vais-je me présenter devant vous ? Simplement comme celui qui peut justifier avoir introduit dans le débat public la quasi-totalité des éléments qui ont alimenté la légitime défiance de nos concitoyens à l'égard de la gestion de la grippe porcine. Dès le 28 avril 2009, lors d'une intervention sur la chaîne France 24, j'ai avancé les arguments que vous trouverez dans le script de l'émission, – pièce n° 1 du dossier que je vous ai remis. J'y posais notamment la question des conflits d'intérêts, demandant pour finir : à qui cela profite-t-il ?
Fondées chaque fois sur les données de l'expérience, mes interventions ultérieures sont revenues, notamment, sur l'art de créer des alertes en santé publique et sur la régularité du processus d'autorisation de mise sur le marché (AMM). En octobre, j'ai publié le livre dont je me suis permis de vous remettre un exemplaire et qui vise à replacer la question de la grippe A(H1N1) dans un contexte très large – historique, sociologique, épistémologique et politique.
À l'évidence, les frontières ont bougé, avec cette affaire : c'est la première fois qu'un débat de fond sur les vaccinations a pu sortir de l'éternelle guerre des religions entre pro- et anti-vaccins. Tous mes correspondants, qu'ils viennent des académies, des instances ordinales ou de la médecine militaire, ou qu'ils soient même pastoriens – lesquels ne sont pas des anti-vaccinistes – m'en attribuent le mérite : je le dis sans forfanterie, mais avec gravité.
Pour comprendre, il est utile de rappeler brièvement au terme de quel processus je suis tombé dans la marmite des vaccins. Consultant pour l'industrie pharmaceutique, estimé et confortablement rémunéré par les leaders du marché, n'ayant aucun intérêt personnel à me brouiller avec mes meilleurs clients, qui s'appelaient à l'époque Pfizer, GSK, Aventis, Novartis, Roche, j'ai été chargé par la justice française, au tout début des années 2000, d'expertiser dans le cadre de grandes affaires de santé publique impliquant des médicaments, notamment celle concernant la vaccination contre l'hépatite B. Par rapport à une profession alors fortement contrainte par une réglementation pointilleuse, j'ai alors découvert le secteur vaccinal comme une sorte de sédiment de pratiques pharmaceutiques dont je n'envisageais même pas qu'elles pussent encore exister – comme l'illustre la pièce n° 2 du dossier : une récente offre d'emploi d'un leader du secteur qui ne craint pas d'assumer le fait que, pour diriger le développement d'un projet vaccinal, « une compréhension » – et non, notez-le, « une expertise » – « des aspects cliniques de l'infectiologie serait très utile, mais pas essentielle ». Je ne commente pas.
Ce précédent me permet aussi de revenir sur les allégations de mes collègues experts qui justifient leur discrétion sur leurs liens d'intérêt par le fait que ceux-ci n'altéreraient en rien leur indépendance. La pièce 3, qui présente l'évolution de mon chiffre d'affaire réalisé avec l'industrie pharmaceutique, illustre clairement, je crois, qu'il faut bien du courage – ou de la témérité – quand on veut garder son indépendance en dépit de ces liens.
La question qui vous est posée aujourd'hui n'est pas de savoir comment les Français réagiront lors de la prochaine pandémie, en validant implicitement du même coup la mystification, désormais confirmée par la toute récente enquête du British Medical Journal, qui a consisté à faire accroire que nous venions d'en traverser une. Car cette pseudo-pandémie s'est fondée sur une triple exagération.
Exagération, d'abord, du nombre de personnes touchées, quand il est parfaitement établi aujourd'hui que, lorsque la pandémie a été déclarée, moins de 5 % des personnes répertoriées comme atteintes étaient effectivement positives pour le virus et que, par la suite, le délire des chiffres a été alimenté par des critères sémiologiques dont l'indigence saute aux yeux du moins professionnel : fièvre à 38 ° C, toux… Tous les Français ont vu des gamines la goutte au nez sortir de chez leur médecin paniquées avec une pile de masques et du Tamiflu ; il y a même eu des diagnostics par téléphone.
Exagération, ensuite, de la virulence du virus, avec des critères d'imputabilité des décès extraordinairement lâches et, en contradiction avec la réglementation en vigueur sur la pharmacovigilance, un refus systématique de considérer que les décès après prescription de Tamiflu aient pu correspondre à une toxicité du médicament.
Exagération médiatique, enfin, évidemment.
L'autre fausse question serait d'examiner comment protéger nos concitoyens des sectes. L'argumentaire antivaccinaliste, qui n'avait quasiment intéressé personne jusqu'à présent, a effectivement été examiné par des millions de Français indûment alertés : tout le monde s'est rendu compte de son indigence – je dispose à ce propos de remontées extrêmement convergentes –, de telle sorte qu'il n'est pas excessif de soutenir que, même s'ils surfent naïvement sur la vague, jamais les anti-vaccinalistes n'ont été aussi décrédibilisés qu'aujourd'hui. Dans une démocratie, quand 80 % des citoyens se sont prononcés sans ambiguïté, ils méritent mieux qu'une inquiétude condescendante quant à leur capacité à faire de bons choix.
La question n'est pas non plus de pointer les incompétences avec une sélectivité partisane. Certes, il y a des « Diafoirus d'Internet », mais les experts consultés par le ministère ont été répétitivement démentis par les faits et les virologues, par exemple, n'ont jamais craint de se prononcer avec assertivité sur des questions de santé publique qui dépassaient clairement leur compétence. Sans qu'il s'agisse d'attaquer les personnes, c'est aussi l'occasion, parce que la question est importante, de se demander s'il est encore acceptable que, dans un grand pays comme la France, la direction de l'Institut de veille sanitaire soit confiée à une personne avec qui j'entretiens des liens professionnels fort paisibles depuis vingt-cinq ans, mais dont il est facile de montrer qu'elle n'a à son actif ni les titres, ni les travaux justifiant une telle responsabilité.
Permettez-moi donc de vous proposer un critère de crédibilité expertale dont je vous garantis qu'il ne vous laissera jamais dans la peine : le bon expert, c'est celui dont on peut se passer, celui qui saura exprimer les problèmes technico-réglementaires d'une façon qui vous permettra de vous réapproprier les éléments du débat dans l'ordre de votre propre compétence. Vous êtes des politiques : laissez-moi illustrer par trois exemples la façon dont vous pourriez reprendre en mains la situation.
Tout d'abord, vous avez voté l'article L. 4113-13 du code de la santé publique, qui fait obligation à tout professionnel de santé s'exprimant dans la presse de faire préalablement état de ses liens d'intérêt : jugez-vous normal que, de tous les experts concernés que vous avez auditionnés jusqu'à présent, aucun ne se soit spontanément plié à cette disposition que vous avez pourtant voulue ?
Ensuite, jugez-vous décent que la politique préventive du Gouvernement ait été justifiée par le principe de précaution, quand la loi Barnier que vous avez votée en 1995 dispose sans ambiguïté que les mesures prises en son nom doivent l'être « à un coût économiquement acceptable » ?
Enfin, vous avez inclus le code de déontologie médicale dans le code de la santé. Jugez-vous normal que les Français aient reçu de leur ministre une circulaire leur certifiant que le vaccin était sûr malgré les allégations contraires de l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments (EMEA) – en contradiction, par conséquent, avec le principe déontologique sacré du consentement informé ?
Pour conclure brièvement, je proposerai une double lecture de la situation : l'une concernant le médicament et la santé publique, l'autre la politique.
Dans la vie d'un médicament, la phase de développement est incontournable. C'est le seul moment où l'on peut soumettre le nouveau produit à des évaluations contraintes par un minimum de rigueur : contrôle du processus de fabrication, tests chez l'animal, essais cliniques. Même si ces exigences peuvent être contournées, elles ne sauraient en aucun cas être remplacées par la promesse d'une pharmacovigilance qui serait assurée une fois le produit sur le marché. En l'espèce, alors que l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments reconnaissait sans fard que le rapport risquebénéfice du produit n'avait pu être évalué au cours du développement, l'administration sanitaire ne rougit pas de clamer, une fois le produit sur le marché, que les données de la pharmacovigilance « ne modifient en rien » le rapport risquebénéfice du produit, lequel n'avait justement pas été évalué. C'est dire, avec un certain cynisme, que ce rapport bénéficerisque n'a été et ne sera jamais évalué et que ces produits, pour lesquels on a un temps envisagé une obligation vaccinale, sont proprement défectueux au sens légal du terme. Or, cette séquence – développement bâclé sur la fallacieuse promesse d'une pharmacovigilance qui ne viendra jamais – est exactement celle qui sous-tend la proposition de directive modifiant la directive 200183CE, actuellement en discussion à Bruxelles : ce projet est proprement effrayant et la récente histoire des vaccins contre la grippe porcine est l'éloquent prélude de la caricature technico-réglementaire que les lobbies pharmaceutiques cherchent désormais à mettre en place.
Si j'ai maintenant l'audace de vous proposer une lecture politique, au sens étymologique du terme, je me tourne vers la préface à l'édition française, datée de février 2009, de l'ouvrage L'État prédateur, où l'économiste américain James Galbraith, digne fils de son père, admettait que sa réflexion portait d'abord sur les États-Unis tout en postulant qu'elle touchait à une dynamique bien plus universelle. Il n'aura pas fallu plus de deux mois pour le confirmer, car ce qui frappe le plus, dans cette histoire grippale dont les enjeux financiers ne sont même pas niés par ceux qui en profitent, c'est qu'à aucun moment on n'a entendu la voix promotionnelle des fabricants : la publicité de ces produits a été assurée par la voix du ministre et de ses conseillers, au moyen d'arguments qui, dans n'importe quelle autre situation, eussent été sanctionnés par la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion des recommandations sur le bon usage des médicaments. Bien pis : le Gouvernement n'a pas craint de recourir – et c'est là le plus important à mes yeux – à la réquisition, authentifiant ainsi de la façon la plus extrême une mystification sanitaire dont les déterminants lucratifs sautaient pourtant aux yeux. Se trouve dès lors illustrée de la façon la plus éloquente la thèse de l'Américain selon laquelle la déréglementation n'est pas la loi de la jungle au profit de lobbies, mais l'appropriation par les lobbies de l'autorité et de la puissance de l'État au bénéfice de leur prédation. En l'espèce, on les a donc vus capables de détourner à leur profit la plus extrême des prérogatives de l'État dans un pays qui a banni la peine de mort : son pouvoir de contrainte sur les corps – mais au seul bénéfice de la liquidation des stocks.
Mesdames et messieurs les députés, j'espère vous avoir convaincus que les Français n'ont nul besoin des sectes anti-vaccinalistes pour être légitimement inquiets.
Pouvez-vous nous donner des informations supplémentaires sur le projet de directive que vous jugez très dangereux et qui serait en préparation à l'échelon européen ?
Par ailleurs, la pharmacovigilance existe bel et bien. On trouve notamment sur les sites de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et de l'Agence européenne du médicament, le nombre des décès mis en relation avec la vaccination – de 15 à 25 en France et 121 à l'échelle de l'Union. La question est de savoir si on peut en tirer des conclusions en termes de rapport bénéficerisque.
Il y a quelque chose que j'ai du mal à comprendre. Pour un chef d'entreprise, la faillite peut emporter interdiction de diriger une entreprise. Quand un médecin fait une faute médicale, il peut être interdit d'exercice. Vous, hommes politiques, pouvez être déclarés inéligibles. Or, depuis le début de cette histoire, je suis frappé par la remarquable impunité qui entoure les opinions des autorités sanitaires et des experts qui leur sont associés, alors qu'il est patent, et démontrable, que, sur bien des points, ces autorités n'ont pas été crédibles. Dès lors que Mme Bachelot-Narquin déclare devant tout le monde que le vaccin est sûr, comment l'administration sanitaire pourrait-elle dire que, finalement, il n'était pas si sûr que cela ? Voilà un premier point.
Deuxièmement, voilà trente ans que je fais de la pharmacovigilance et, n'en déplaise à certains qui voudraient oublier que j'en suis quand même l'un des pères fondateurs, j'ai précisément obtenu un prix de thèse en 1983 pour avoir démontré que les méthodes d'évaluation de causalité de l'Agence étaient inopérantes. Et je n'ai pas changé d'avis depuis.
Comment les choses se passent-elles : un effet grave fait l'objet d'examens et d'analyses, puis on n'en entend plus parler, au motif qu'il n'y aurait pas plus de cas signalés que de cas attendus. Mais c'est négliger la sous-notification, qui est de l'ordre de 99 %. À cela s'ajoute le mécanisme scandaleux observé notamment dans le dossier Gardasil, vaccin pour lequel on affirme aujourd'hui qu'il n'y a pas lieu de modifier le rapport risquebénéfice. Mais par rapport à quoi le modifierait-on puisque, en délivrant l'autorisation de mise sur le marché (AMM), l'Agence européenne du médicament déclarait textuellement – je l'ai déjà souvent cité – que cela se faisait dans des conditions exceptionnelles : en l'absence de données d'efficacité et de tolérance adéquates ?
En un mot, ce que je dénonce, c'est le mauvais fonctionnement de la pharmacovigilance.
Le propos de la directive scélérate en préparation à Bruxelles est de libérer les fabricants du carcan du développement et des essais cliniques – qui du reste peut être contourné, comme on l'a vu avec l'affaire du Vioxx – tout en rassurant par la promesse que les produits seront étudiés, dans le cadre de la pharmacovigilance, lorsqu'ils seront sur le marché. Or, comme c'est le cas pour le vaccin contre l'hépatite B, les études qui font apparaître des effets indésirables sont réfutées comme n'étant pas scientifiques et sont mises en balance avec celles qui ont été faites, d'une façon plus ou moins transparente, par les fabricants.
Le véritable enjeu est aujourd'hui le déport de l'essentiel de l'évaluation du médicament, telle qu'elle est exigée par les textes depuis très longtemps, de la phase de développement – c'est-à-dire du « pré-AMM » – au « post-AMM », permettant une accélération du processus de mise sur le marché et, par conséquent, de la commercialisation, contre la promesse d'une pharmacovigilance qui ne viendra jamais. Les analyses de pharmacovigilance du vaccin contre l'hépatite B, du Gardasil et du vaccin contre le H1N1 – on les trouve sur mon site – avancent toujours les mêmes arguments, à savoir que les effets observés ne sont pas liés au vaccin. On ne constate aucun progrès. C'est très dangereux.
L'Agence européenne du médicament fait pourtant bien état de 176 décès du fait du Celvapan, du Focetria et du Pandemrix – dont 151 attribuables au seul Pandemrix. Dès lors que nous disposerons des études épidémiologiques, par pays et en fonction des taux de vaccination, j'imagine que nous pourrons déterminer le rapport bénéfice-risque, prenant en compte les effets indésirables, les hospitalisations, les décès…
Monsieur le député, si 176 décès ont été rapportés, quel est, selon vous, le taux de sous-notification ? Lors du développement du vaccin, la puissance statistique de la détection des effets indésirables, telle qu'elle figure dans le dossier de l'Agence européenne du médicament, était de 1 % – c'est-à-dire que l'agence ne se déclarait en mesure de détecter un effet indésirable que si sa fréquence atteignait 1 %. En envisageant une vaccination obligatoire – portant donc en France sur 65 millions de sujets –, le potentiel d'effets indésirables était de 650 000. Il est effarant que l'agence européenne et les autorités aient assumé ce risque sans ciller. Le problème est là.
Quand bien même il n'y aurait eu, comme vous le dites, que 176 décès, il est un fait qui interpellerait n'importe quel spécialiste de recherche clinique connaissant un tant soit peu la méthodologie : pourquoi, lorsque vous avez vacciné des millions de gens, n'y a-t-il eu que 176 décès, alors que, comme j'ai du reste été seul à le souligner, il y en a eu 7 sur 2 000 patients traités durant le développement du vaccin de Glaxo ? C'est là une proportion que je n'ai jamais rencontrée en trente ans de recherche clinique – et particulièrement frappante pour un vaccin à visée préventive.
Il est donc impossible de pousser plus loin l'analyse, faute d'éléments. Exigez donc qu'on vous communique les données de pharmacovigilance et nous les analyserons – je l'ai déjà fait dans le dossier du vaccin contre l'hépatite B. Les comptes rendus de pharmacovigilance actuellement publiés sur le site de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé n'ont véritablement aucune crédibilité.
À cela s'ajoutent les témoignages convergents qui me parviennent de la « base » : effets indésirables graves, comme cela a d'ailleurs été le cas avec le vaccin contre l'hépatite B ; refus forcené – on oserait presque dire : « hystérique » –, de la part de praticiens, de considérer qu'un décès survenu chez un quadragénaire dans la demi-journée qui suit la vaccination pourrait être une complication de celle-ci ; cas de chocs allergiques chez des femmes enceintes, suivis quelques heures après d'un avortement, et que l'on refuse d'imputer au vaccin.
Monsieur Marc Girard, merci de votre témoignage. Je tiens à m'étonner, avec colère, que notre assemblée n'ait pas débattu de la directive sur la pharmacovigilance.
J'ai été alertée très tôt par le collectif Europe et Médicament qu'une circulaire délétère était en préparation à Bruxelles. La commission des affaires européennes de notre assemblée a été jugée seule habilitée à statuer sur cette circulaire, sur le rapport de Mme Valérie Rosso-Debord. Cependant, cette commission ne comporte, à gauche comme à droite, aucun spécialiste de pharmacovigilance. Je m'en suis émue très vite au sein de la commission des affaires sociales, demandant que celle-ci soit au moins saisie pour avis.
Je tiens à alerter mes collègues : ce qui se prépare à Bruxelles est très grave. Les laboratoires pharmaceutiques ont fait auprès des instances européennes un important lobbying en vue de réduire la phase de développement et d'essais cliniques, puis d'assurer les plans de gestion de risques et le suivi des effets secondaires, pour s'approprier le recueil et la libération des effets secondaires – ce qui peut éventuellement se traduire par le retrait du marché. On ne saurait imaginer conflit d'intérêts plus flagrant.
Aujourd'hui, tous les centres de pharmacovigilance sont alertés et reprochent vigoureusement à notre assemblée la manière dont elle a traité cette question. Je ne reproche pas, quant à moi, à mes collègues de la commission des affaires européennes d'avoir rendu un avis, car on ne peut pas tout connaître, mais je sais que, pour ma part, ne connaissant pas bien les affaires étrangères, je ne manquerais pas de demander, si j'en avais besoin, l'avis de spécialistes. Nous avons fait une très grave erreur et sommes en train de livrer la pharmacovigilance européenne aux industries pharmaceutiques. Il serait fort étonnant que ces entreprises fassent retirer l'un de leurs produits du marché après quelques mois d'utilisation, quels que soient les effets secondaires. Elles ne libéreront ceux-ci que lorsqu'elles auront rentabilisé ces produits.
Cette affaire me reste d'autant plus en travers de la gorge que le débat était soumis à une date butoir et que, bizarrement, au mois de novembre, la commission des affaires sociales n'a pas pu se réunir le dernier mercredi où elle aurait pu se saisir du dossier.
J'en viens à mon deuxième point, qui est une question. Face à une telle pandémie et à l'urgence de la mise sur le marché des vaccins, je me suis d'emblée beaucoup préoccupée des modèles. On nous a expliqué que, puisqu'il existait un vaccin contre la grippe saisonnière, on pouvait en extrapoler le modèle à destination des adultes. Il ne me semble en revanche guère justifié d'avoir extrapolé à destination des enfants ce modèle qui n'existait pas pour leur âge. À l'exception peut-être de quelques centaines d'enfants très gravement malades ou cardiaques que l'on vaccine du reste par demi-doses, comment expliquer que l'on puisse envisager avec autant de légèreté de vacciner les enfants de six à vingt-quatre mois, qui sont déjà abondamment vaccinés ? Par ailleurs, face à la baisse de la demande de vaccination contre l'hépatite B, la stratégie de l'industrie pharmaceutique consiste désormais à proposer un vaccin hexavalent comportant ce vaccin et permettant ainsi de vacciner contre l'hépatite B les enfants sans que leurs parents le sachent. Les enfants sont ensuite vaccinés contre la rougeole, les oreillons et la rubéole, avec le ROR, puis reçoivent des rappels de l'hexavalent. En outre, on vaccine à nouveau contre la tuberculose, qui fait résurgence à la faveur de la précarité qui s'installe chez certaines populations de notre pays.
Les enfants sont donc énormément vaccinés. Or, un vaccin n'a rien d'anodin. Quoi qu'on dise dans la presse, je ne fais pas partie des sectes antivaccinales et je peux d'ailleurs montrer le carnet de vaccination de mes enfants : ils sont vaccinés contre tout ! Cependant, une vaccination s'accompagne toujours d'un choc immunitaire. Quand on injecte un agent pathogène, le corps réagit : que dire quand on en injecte six à un bébé de trois mois, et qu'on en ajoute éventuellement un autre, celui contre la grippe A(H1N1), sans avoir jamais fait de tests cliniques ?
Monsieur Marc Girard, sur combien d'enfants de cette tranche d'âge, sollicitée immunitairement, a-t-on fait de tests cliniques ? A-t-on lancé la vaccination de cette génération sans avoir réalisé ces tests, en se disant qu'on verrait bien ce qui se passerait ?
Avant de répondre à cette question, je reviendrai sur la directive scélérate. Comment se fait-il – et je vous pose la question naïvement – que la seule commission d'enquête qui ait été refusée soit celle du Parlement européen, alors que toutes les conditions nécessaires étaient remplies ? Vous pourriez penser que les députés européens sont moins habiles que vous, mais j'ai une autre idée. Il ne faut pas non plus imputer ce refus au manque de spécialistes de pharmacovigilance au sein d'une commission, car il est toujours possible d'en trouver. En revanche, ce projet de commission d'enquête est le seul qui ait été inspiré par un spécialiste de pharmacovigilance – suivez mon regard ! Il était donc clair que cette commission se serait intéressée non seulement à l'Organisation mondiale de la santé mais aussi à l'Agence européenne du médicament, et aurait ouvert – ce qui n'aurait pas manqué pas d'être « saignant » – le dossier d'enregistrement des vaccins, en s'intéressant notamment aux sept morts dont on nous dit aujourd'hui qu'elles n'ont pas été causées par le vaccin – sans nous dire pour autant à quoi elles sont dues. À l'évidence, l'Agence européenne du médicament a senti venir le coup. Vous êtes des politiques, pas moi. Je trouve effrayants les mécanismes souterrains par lesquels cette demande d'enquête a pu être sabordée.
Pour ce qui est du nombre, bien que je n'aie pas le dossier sous la main, je crois me souvenir que quatre cents enfants ont reçu le vaccin Pandemrix et que deux hépatites auto-immunes se sont déclarées : c'est quand même beaucoup. Vous avez rappelé avec beaucoup de pertinence que ce n'est pas être antivaccinaliste que de dire, comme nous l'avons appris voilà trente ans à la faculté, que tout vaccin comporte un risque minime de réaction auto-immune. Ce risque peut être acceptable si le vaccin protège contre une maladie très grave comme la poliomyélite ou le tétanos, et s'il n'y a pas trop de vaccins. Mais au fur et à mesure que vous augmentez indûment le nombre de ceux-ci, vous augmentez mécaniquement, statistiquement, le risque de pathologies auto-immunes.
Pourquoi une telle excitation à propos du vaccin contre la grippe ? La grippe est peut-être une maladie très grave, mais il ne faut pas exagérer : voilà encore trois ou quatre ans, on la soignait en prenant un grog et en se mettant au lit ! Cependant, de tous les vaccins disponibles, le vaccin contre la grippe est le seul qu'on peut prescrire à nouveau tous les ans. L'espérance de vie étant aujourd'hui en France de l'ordre de quatre-vingt ans, s'il faut vacciner tout le monde chaque année, chacun recevra 80 immunisations au cours de son existence – mais avec trois antigènes, ce qui signifie que, pour une maladie strictement bénigne, vous recevrez, pour le seul vaccin antigrippe, 240 immunisations au cours de votre vie. Ce n'est pas compatible avec la prudence hippocratique. En outre, je mets au défi quelque autorité sanitaire que ce soit de me montrer les études permettant d'évaluer le risque d'une telle surimmunisation.
Pour qui a un peu l'habitude de la pharmacovigilance se pose un autre problème, totalement sous-estimé : celui des morts subites du nourrisson. Songez au nombre de gamins qu'on vaccine… Or, voici comment fonctionne la pharmacovigilance : un gamin meurt. Il a été vacciné deux ou trois jours avant. On parle alors de mort subite. Parfois, on n'enquête même pas. J'ai même vu un article dans lequel, au lieu de se demander s'il y avait un lien avec le vaccin, les auteurs indiquaient fièrement que l'enfant était à jour de ses vaccinations. Or, c'est peut-être bien parce qu'il était à jour de ses vaccinations…
On parle de « sectes antivaccinalistes » et de guerre de religions. Pour ma part, je me suis efforcé d'intervenir en professionnel pour rappeler que les vaccins sont des médicaments comme les autres, avec leur potentiel d'effets indésirables. Ainsi, je ne comprends pas M. Bernard Debré – et s'il était là, je le dirais de la même manière –, qui a été l'un des premiers à employer la jolie formule de « grippette » : s'il s'agissait d'une grippette, pourquoi fallait-il vacciner les enfants ? Il entre là de l'inconscient, qui fait dire que les vaccins ne sont pas dangereux. Je cite souvent l'exemple du dossier de l'Engerix, le vaccin contre l'hépatite B. Savez-vous combien de temps ont duré les études de tolérance pour ce vaccin – sachant qu'il s'agit d'un dossier américain, beaucoup plus lourd que s'il s'était agi de l'Institut Pasteur ? Quatre jours ! Il n'est pas besoin d'être un professionnel de santé pour comprendre…
Un vaccin est un médicament fait pour induire en vous des effets immunitaires, présumés bénéfiques, pendant des années, voire des décennies. Par quelle inconscience, par quelle inconséquence peut-on considérer que, si un médicament est apte à générer chez vous des effets immunologiques bénéfiques pendant des dizaines d'années, il ne serait pas apte, du même coup, à générer des effets immunologiques néfastes ? Or, avec le vaccin contre l'hépatite B, il est question de sclérose en plaques et de maladies auto-immunes : on est au coeur du problème, mais cela n'a pas été étudié.
Vous êtes un procureur implacable. À titre personnel, je tiens à dire que je ne cautionne aucun de vos propos sur les vaccins, et que je les trouve même très inquiétants. Qu'on pense seulement aux résultats des vaccins contre la polio, le tétanos ou la variole !
Je m'exprime maintenant en ma qualité de rapporteur. La commission d'enquête a accepté votre audition, à la demande de M. Gérard Bapt, et il sera pris note de vos propos. Puisque vous avez critiqué sévèrement la sécurité des vaccins et avez même déclaré en septembre sur une chaîne de télévision qu'il pourrait y avoir 60 000 décès liés au vaccin, à raison d'un décès par 1 000 personnes vaccinées, comment interpréter le fait que près de 6 millions de personnes ont été vaccinées et que l'on n'ait pas constaté cette hécatombe ? De tels propos tenus sur une chaîne de télévision m'inquiètent et vous me permettrez d'en être choqué.
Monsieur le rapporteur, je vous renvoie à la pièce n° 3 du dossier que je vous ai remis. Si j'étais aussi imprudent que vous le sous-entendez, j'aurais eu beaucoup plus d'ennuis encore. Je pense d'ailleurs avoir répondu à la question. En outre, j'ai dit que je ne voulais pas parler des vaccins en général. Je crois avoir une certaine originalité dans ce débat. Les vaccins sont des médicaments parmi d'autres. Certains sont bons et d'autres mauvais. Par exemple, pour un spécialiste de pharmacovigilance, il sautait aux yeux, à la lecture des rapports périodiques de tolérance du vaccin contre l'hépatite B, que ce vaccin était toxique.
Par ailleurs, bien que je n'aie pas fait la transcription de toutes les émissions de télévision auxquelles j'ai participé, je me souviens assez bien de celle que vous citez. Je n'ai jamais affirmé : « Il va y avoir 60 000 morts ». Comme je l'ai dit tout à l'heure à M. Gérard Bapt, j'ai expliqué une question de puissance statistique : risque contre risque. J'ai associé au risque qui nous était indiqué le risque théorique de mourir de la grippe. Avec un seuil de détection de 1 sur 1 000 ou, ce qui est compatible, de 1 sur 10 000, on obtient, par une simple règle de trois, un risque de 600 000 effets indésirables graves – car je n'ai pas parlé de « décès ». Je ne comprends pas... C'est un peu comme quand on nous parle de principe de précaution en faisant abstraction du débat sur sa pertinence : c'est un principe de précaution à sens unique. Quand bien même il y aurait un risque lié à la grippe, pourquoi ne tient-on jamais compte du risque propre aux vaccins ? Je le maintiens et le répète devant vous, sans avoir le moins du monde l'impression de me décrédibiliser : je ne peux pas vous garantir que personne de votre famille, un enfant par exemple, ne va mourir de la grippe, mais, sur la base d'une expérience de trente ans de recherche clinique très axée sur la pharmacovigilance, toutes choses égales par ailleurs, je dis que les risques que vous encourez à assumer une grippe normale et ceux que vous encourez à vous faire vacciner avec des vaccins bâclés en deux mois sont sans commune mesure. Voilà ce que j'affirme.
Pour ne pas être comme vous un spécialiste de ces questions, mais simplement quelqu'un qui essaie de se documenter, j'avoue que je suis, comme le rapporteur et comme d'autres sans doute ici, assez impressionné par le caractère très affirmatif des propos que vous tenez tant sur les laboratoires que sur les vaccins. J'aurai tout à l'heure quelques questions à vous poser.
Je me contenterai, à ce stade, d'une observation. Vous avez prêté serment de dire la vérité, toute la vérité. Or, ce que vous venez de dire concernant vos déclarations sur France 24 est un mensonge. Le texte a été caviardé sur votre site Internet, mais j'ai fait rechercher le verbatim de l'intégralité de l'interview que vous avez donnée à cette chaîne en septembre 2009 :
« Question : La France a commandé 92 millions de doses de ce vaccin, qui a été préparé en six mois, donc très rapidement. Quels sont les risques ?
« M. Marc Girard. On développe un vaccin dans des conditions d'amateurisme que je n'ai jamais vues. Prenons l'hypothèse pessimiste d'un décès chez 1 000 patients. On va vacciner 60 millions de gens. Eh bien, vous allez avoir 60 000 décès et, cette fois-ci, des gens jeunes, des enfants, etc. »
Vos affirmations avaient un caractère aussi péremptoire que tout ce que je viens d'entendre.
Dans la même interview, un peu plus loin :
« Maintenant, quand on regarde les quelques données qui sont quand même disponibles au regard des spécialistes, on se rend compte que c'est effrayant. Par exemple, il y a un essai clinique avec 1 100 patients. Il y a un mort, alors on dit : " C'est pas lié au vaccin ". Moi, j'aimerais bien savoir pourquoi. Ça fait trente ans que je fais du développement ».
Vous nous avez d'ailleurs resservi le même argument tout à l'heure.
Si ce que vous avez effectivement dit en septembre 2009 s'était avéré, et non pas ce que vous venez d'affirmer en disant qu'il y aurait des effets indésirables – à moins que, dans votre esprit, le décès soit un effet indésirable –, il y aurait déjà six mille morts. Où sont ces six mille morts ?
Six mille, puisqu'il y a eu 6 millions de vaccinés. Je sais encore calculer, même si je raisonne « comme un chaudron » !
Je vous demande, pour comprendre, où sont les 6 000 morts que vous annonciez sur France 24 en septembre 2009.
Quel est le facteur de sous-notification, à votre avis, quand toute l'administration sanitaire s'est liguée pour dire aux médecins que ce vaccin était sûr, avant même qu'il n'obtienne l'autorisation de mise sur le marché ?
Si je comprends bien, on aurait caché 5 800 morts. L'administration sanitaire, dans son ensemble, aurait accepté l'idée de cacher 5 800 décès liés à la vaccination.
Non, monsieur, je ne suis pas dans l'interprétatif : je lis vos propos. Je préside cette commission et j'ai tout de même le droit de poser des questions et de ne pas laisser dire n'importe, surtout un mensonge. Je n'ai pas de parti pris, mais je viens d'entendre des choses péremptoires qui, si elles étaient vraies, mériteraient légitimement que les parlementaires que nous sommes, même s'ils sont membres d'un Parlement « croupion » et si « les résultats des commissions d'enquête sont connus d'avance » – je ne relirai pas toutes vos déclarations sur ce thème –, les soumettent à un examen très attentif.
Néanmoins, après avoir entendu vos explications et vos interprétations péremptoires de la manière dont, pour le dire d'un mot, tout cela a été monté par le lobby pharmaceutique, je m'interroge.
Lorsque je vous demande où sont les six mille décès, et alors que M. Gérard Bapt évoque 176 morts, vous dites que l'administration sanitaire s'est liguée pour les cacher. Je pourrais comprendre, et cela me paraîtrait plus crédible, que vous disiez que, la pharmacovigilance étant insuffisante, on ne connaît pas la réalité aujourd'hui. En revanche, expliquer sur un média destiné au grand public qu'il va y avoir 60 000 morts si on vaccine toute la population, et expliquer devant cette commission d'enquête que l'administration sanitaire, aux mains des lobbys pharmaceutiques – point sur lequel je ne me prononcerai d'ailleurs pas –, aurait caché 6 000 morts, me paraît aussi crédible que l'affirmation selon laquelle c'est George Bush qui a organisé les attentats du 11 septembre.
Je peux vous répondre. On sait comment se déroulent ces émissions et vous êtes des hommes de la parole. Quant au script, je le vérifierai.
Vous ne reprenez pas ces propos. Vous vérifierez et vous y rajouterez vos prévisions, afin qu'elles puissent être comparées à celles des autres experts, que vous qualifiiez tout à l'heure de « collègues » et qui ont, quant à eux, prévu 30 000 décès à cause de la grippe – lesquels ne se sont pas produits non plus, je vous l'accorde.
Que les autres experts se trompent et se soient trompés à chaque fois, comme vous venez de le dire, peut inviter chacun à un peu plus d'humilité.
Je vérifierai. De toute façon, je me plaçais dans une perspective qui a constamment été la mienne : celle de la puissance statistique – qui consiste à dire, toutes choses égales par ailleurs, ce qui peut se passer.
Par ailleurs, vous m'avez interpellé sur mes engagements passés. Je me permets de vous rappeler quand même…
Pour ce qui est de mon travail passé, je dois aussi ma connaissance des mécanismes de la pharmacovigilance aux milliers d'heures que j'ai passées, sur ordre du pôle santé, à les décortiquer. C'est la raison pour laquelle je dis que je n'ai pas grande confiance en la pharmacovigilance.
Nous ne jouons pas à armes égales, car je suis tenu au secret de l'instruction. Si vous me déchargez du secret de l'instruction en vertu de vos pouvoirs d'investigation, je pourrai vous dire bien des choses.
Monsieur Marc Girard, la question n'est pas là. D'abord, je ne vous ai rien demandé concernant vos activités passées : vous venez de l'imaginer. J'ai simplement remis les déclarations que vous avez faites ce soir en relation avec celles que vous faisiez voici quelques mois. Je ne suis le défenseur d'aucun groupe de pression. On chercherait en vain la preuve du contraire : je n'avais jamais rencontré aucun laboratoire avant cette commission d'enquête et je n'en ai rencontré que dans le cadre de celle-ci.
Je ne doute pas que vos connaissances soient infiniment supérieures aux miennes, qui sont inexistantes. J'ai simplement, comme citoyen et comme parlementaire, le souhait d'y voir clair. Qu'il s'agisse de vos confrères ou de vous-même, il me semble difficile de se fonder sur la parole des experts, tant de précisions ayant été systématiquement infirmées. Je n'ai donc pas parlé de vos expériences passées et me contente de dire que, pour défendre les intérêts de la collectivité, chacun gagnerait à un peu plus d'humilité dans ses prévisions et dans ses analyses.
J'ai lu par ailleurs que vous jugiez inutile la campagne de vaccination contre la grippe saisonnière. Pouvez-vous l'expliquer aux membres de la commission – cette fois avec des faits, et non pas à l'aide de chiffres extrapolés ou fantasmés ? C'est là en effet une position originale parmi les personnes auditionnées – y compris celles qui étaient hostiles à la vaccination en général ou opposées à la vaccination contre la grippe A(H1N1). Vous pourriez sans doute, avec des arguments scientifiques et peut-être plus mesurés, nous expliquer en quoi la campagne de vaccination qui a lieu chaque année et qui est remboursée par l'État pour un certain nombre de publics – et qui donc nous concerne à double titre en tant que parlementaires – vous paraît inutile, voire nuisible.
C'est très facile. Je suis engagé par les centaines de pages que j'ai écrites sur le sujet. Je me permets de rappeler que le 1er septembre 2009, j'ai été le premier Français à faire intervenir dans le débat national les fameuses évaluations Cochrane, dont le diagnostic est absolument convergent : les vaccins contre la grippe ne fonctionnent pas.
Cela me permet d'ailleurs de rebondir sur la question de Mme Catherine Lemorton : il y a eu un dérapage réglementaire consistant à appliquer aux modifications des vaccins contre la grippe, au lieu d'une nouvelle autorisation de mise sur le marché (AMM), ce qu'on appelle en termes réglementaires une « variation de type II », ce qui est un coup de force. Alors que, pour modifier ne serait-ce qu'un excipient du Doliprane par exemple, il faut présenter un nouveau dossier d'AMM, ce qui prend au moins un an, il s'agissait ici de changer l'antigène, le principe actif du vaccin – ce qui signifie, par définition, qu'on ignorait absolument quels en seraient les effets à l'intérieur de l'organisme. La réponse a été que tout cela était du pipeau, qu'on savait faire et, de fait, tout a été fait en deux mois – je vous renvoie pour cela aux propos du Professeur Marc Gentilini. Pour un spécialiste du médicament, c'est atterrant.
Cela signifie-t-il qu'à vos yeux, tous les vaccins réalisés chaque année contre la grippe saisonnière sont dangereux ?
Je cite encore, à cet égard, un extrait de la même émission télévisée :
« Question. C'est presque grave, ce que vous dites là. On est prêt à tous se faire vacciner, et vous, vous dites : il ne faut pas se faire vacciner. On est bien d'accord ?
« M. Marc Girard. Oui. C'est un vaccin qui est absolument développé à la va-vite, dans des conditions qui mettent en danger la santé publique. »
En quoi ces vaccins ont-ils mis la santé publique plus en danger que les vaccins saisonniers ? Considérez-vous que les deux, en réalité, la mettent en danger ?
Malheureusement, on se heurte là à des limites pharmaceutiques. Prenons l'exemple d'un médicament bien connu : pour développer le Prozac, qui est un produit hyper-simple, composé d'un principe actif et d'excipients, il a fallu quinze ans. Certes, il ne s'agissait pas de la grippe. Cependant, le fabricant du Prozac avait autant envie que les autres de faire de l'argent. Le fait qu'il ait passé quinze ans à développer ce produit donne une indication du temps nécessaire pour procéder à des essais, rédiger des documents et faire ce qui doit être fait. Dans des situations d'urgence, on peut certes contraindre les choses, mais je dis, je maintiens et je maintiendrai toujours qu'il n'est pas raisonnable de faire des vaccins en deux ou trois mois. La réglementation européenne qui a accepté de substituer à une nouvelle AMM une variation de type II a été un coup de force réglementaire.
Je n'ai pas de questions. Je suis probablement l'une des seules ici à ne pas être médecin…
Je suis atterrée par vos propos, qui me ramènent à une période que j'ai connue quand j'étais petite fille, au début des vaccinations antipoliomyélitiques : je me souviens des scandales que provoquaient, dans certaines écoles, les parents qui, à l'instigation de certaines personnes, venaient reprendre leurs enfants pour qu'ils ne soient pas vaccinés.
Tout au long des travaux de cette commission d'enquête, et cet après-midi encore, nous avons entendu des témoignages selon lesquels les populations les plus défavorisées de notre pays ne souhaitaient pas se faire vacciner, faute d'avoir eu accès aux bonnes informations.
J'ai d'abord cru que vous étiez passionné, mais je crois maintenant qu'il y a là plus que de la passion. Dans mon esprit, les médecins ont une obligation de moyens, et non pas forcément de résultats. En outre, si l'espérance de vie augmente, c'est sans aucun doute parce que nous avons eu tous ces vaccins. Si vous avez toutes les qualités que vous alléguez – je ne vous connais pas –, le discours que vous tenez sur tous les médias est de nature à faire que les gens ne croient plus en rien, et c'est très dommage. De fait, les extraits de votre interview que nous a lus le président sont atterrants.
Je voulais vous faire part de mes impressions. Si je peux comprendre qu'on engage une forme de croisade contre ce qui serait de nature à détériorer la pharmacologie à l'avenir, il me semble tout de même que ce qui est excessif n'a pas de poids.
Vous avez déclaré qu'un vaccin n'est acceptable que dans le cas de maladies très graves, comme la poliomyélite ou le tétanos, et s'il n'y a pas beaucoup de vaccins, c'est-à-dire, je suppose, s'il n'y a pas à vacciner trop de monde.
Cela signifie-t-il que les vaccins contre la polio ou le tétanos, qui s'appliquent à toute la population par obligation légale, font courir aux gens un risque important et qu'on a tort de vacciner contre ces maladies ?
Peut-être ai-je dit : « et pas beaucoup de vaccins », mais je pense avoir voulu dire : « et pas de traitement curatif ».
Ces auditions étant enregistrées, nous pourrons vérifier. Pour ma part, j'ai entendu ce que je vous ai dit.
Parmi les droits des personnes auditionnées, vous n'avez apparemment pas mentionné celui de faire un lapsus. Je l'ai cependant écrit assez souvent. C'est aussi ce qui explique pourquoi, historiquement, des vaccins qui ont pu être justifiés peuvent cesser de l'être – par exemple des vaccins que l'on pratiquait avant qu'on ne dispose de la réanimation ou des antibiotiques. On peut être amené à réévaluer très régulièrement le rapport bénéficerisque de ces vaccins.
Cela a été le cas, par exemple, pour le vaccin contre la tuberculose, malgré une pression invraisemblable et en dépit de la complicité de l'administration sanitaire, je suppose ?
C'est surtout que le vaccin contre la tuberculose ne rapporte pas d'argent : il n'intéresse personne.
Un autre problème dont on pourrait discuter, qui est aussi une gifle pour les politiques, est qu'on ne trouve plus les vaccins obligatoires – ce n'est pas Mme Catherine Lemorton qui va me contredire. À partir de 1975, le législateur a voulu, dans un souci d'équilibre, compte tenu des vaccinations obligatoires qu'il imposait, mettre en place un dispositif d'indemnisation – c'est l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, qui définit le schéma de la responsabilité sans faute de l'État. Ainsi, en cas d'accident vaccinal – une encéphalopathie, par exemple –, il suffit de démontrer un lien de causalité avec le vaccin pour être indemnisé. Or, aujourd'hui, pour des raisons que Mme Catherine Lemorton peut certainement mieux détailler que moi, on ne trouve plus ces vaccins sur le marché qu'en association, ce qui pose un vrai problème de consentement, car les patients ne savent pas ce que contiennent ces associations. En outre, si l'expert reconnaît, en cas d'accident, la responsabilité du vaccin, le tribunal administratif refuse de reconnaître celle des vaccins obligatoires lorsqu'il est question d'indemnisation.
Nous sommes donc confrontés à une situation très grave, sur laquelle j'ai l'intention d'interpeller les politiques dans les semaines qui viennent : alors que vous avez voulu une indemnisation des victimes des vaccins, ce dispositif d'indemnisation est, par suite d'une situation difficile à comprendre, voué à l'échec. Aujourd'hui, il n'est plus possible de se faire indemniser après un accident vaccinal, ce qui est très préoccupant.
C'est une accusation grave. Pouvez-vous nous rappeler l'article du code de la santé auquel vous avez fait référence ?
Bien volontiers. Il s'agit de l'article L. 3111-9. Cet article a été voté par le Parlement pour remplacer une vieille législation selon laquelle il fallait, pour être indemnisé, démontrer l'existence d'une faute. Il n'est pourtant pas nécessaire d'être antivaccinaliste pour savoir que des accidents de type encéphalopathie sont possibles. Après donc une période où prévalait une jurisprudence un peu sauvage du Conseil d'État, le Parlement a voté, en 1975 si je ne me trompe, ce dispositif d'indemnisation sans faute de l'État.
Vous reconnaissez donc, si j'ai bien compris, que la vaccination contre la poliomyélite et le tétanos est légitime.
Vous avez également évoqué la mort subite chez le nourrisson, semblant établir un lien entre celle-ci et les vaccinations qu'on fait subir aux enfants. Existe-t-il des données scientifiques étayant votre affirmation ?
S'agit-il de danger ou de risque ? Quand on saute par la fenêtre du troisième étage, il y a danger. Le risque, c'est ce qui est inclus dans le rapport bénéficerisque. Je vous renvoie à la législation sur les produits de santé : le niveau de sécurité auquel on peut légitimement s'attendre présuppose que des études aient été faites. Ce qui est ennuyeux avec la pharmacovigilance, c'est qu'on ne fait pas les études adéquates chaque fois qu'il y a une alerte. Je ne connais pas aujourd'hui d'étude sérieuse sur le risque de mort subite après vaccination, alors qu'à l'évidence un certain nombre de cas nous obligent à nous poser la question.
C'est aussi pour cela que je dis que la pharmacovigilance ne fonctionne pas. Elle repose sur des notifications spontanées, marquées par un énorme taux de sous-notification. Vient un moment où, au vu de la situation, on se dit qu'il faudrait faire des études – et c'est là que ça bloque.
Ce problème est typiquement celui qui s'est posé lors de la multiplication des cas de scléroses en plaques qui a alarmé les neurologues de la Pitié, après la vaccination contre l'hépatite B. Le 15 septembre 1994, la première réunion de la commission de pharmacovigilance concluait que les soupçons appelaient des études épidémiologiques – études qui n'ont pas été faites. En 1998, M. Bernard Kouchner a tapé du poing sur la table en réclamant ces études. Or, dans l'intervalle, 30 millions de Français avaient été vaccinés et, à l'évidence, il était trop tard pour dire qu'il y avait un risque. On a donc lancé – je pourrais vous en parler longuement – des études conçues pour ne pas conclure, c'est-à-dire ne disposant pas de la puissance statistique suffisante, et on a annoncé qu'il n'y avait pas de risque démontré. Peut-être ai-je dit, un soir de fatigue, quelque chose qui dépassait ma pensée, mais, je le répète, ma position figure dans les centaines de pages que j'ai écrites, ainsi que les milliers de pages rédigées pour le pôle santé.
Autrefois, on ne prenait pas de médicaments si on n'était pas malade – pas d'anticancéreux si on n'avait pas de cancer, pas d'antimigraineux si on n'avait pas la migraine. Sous prétexte de prévention, on a réussi à faire tomber les limites naturelles du marché pharmaceutique et désormais, tous les gens en bonne santé, comme vous et moi, doivent prendre des médicaments. Le problème se pose en termes de rapport risquebénéfice, et non pas de danger.
La chose est facile à comprendre : dans les procès auxquels donne lieu le vaccin contre l'hépatite B, on nous dit qu'à défaut de bénéfice individuel, il y aurait un bénéfice collectif. Or, le seul niveau de risque qu'on puisse admettre pour un bénéfice collectif est un risque zéro. C'est bien là que le bât blesse : avec des vaccins qui tendent à couvrir de plus en plus de maladies dites bénignes de l'enfance – j'ai d'ailleurs écrit récemment que l'Institut de veille sanitaire devrait nous dire quelles sont les maladies bénignes qu'on a encore droit de contracter ! –, le bénéfice tend asymptotiquement vers zéro, ce qui n'est pas le cas pour le risque. Tout médicament comporte en effet des impuretés, un risque allergique, ou un risque auto-immun, etc. In fine, le rapport bénéficerisque de ces produits à usage préventif – car le propos pourrait s'élargir bien au-delà des vaccins – devient inacceptable. Le bénéfice individuel est proche de zéro. Quel est votre risque d'attraper une hépatite B grave, ou qui d'entre vous en a déjà vu un cas ? En revanche, même si on peut chipoter sur le chiffre, le risque n'est pas incompressible. Multipliez cela par le nombre de personnes vaccinées… J'attends encore une explication décente du fait que, tandis qu'on comptait en 1991, avant la campagne vaccinale, 25 000 scléroses en plaques dans ce pays, tout le monde s'accorde à dire qu'il y en a maintenant 80 000.
Pour la sclérose en plaques, les éléments établis ramènent certains propos à leur juste proportion.
Dans toute votre réponse, cependant, je n'ai pas entendu, de façon intelligible pour tous, si d'après vous, oui ou non, on peut établir aujourd'hui un lien entre la mort subite du nourrisson et la vaccination obligatoire qu'on impose aux enfants.
Formellement non, mais la suspicion est telle que des études guidées par l'éthique et l'esprit scientifique devraient s'imposer.
Voilà une réponse qui me paraît à la fois plus sensée et plus modérée que votre explication initiale.
Pour ramener de la sérénité sur un sujet que je connais par coeur depuis quinze ans et à propos duquel j'ai tendance à m'énerver,…
… je rappellerai qu'un vaccin est un médicament, et que tout médicament a des effets secondaires. Les bénéfices sont nombreux mais, à la marge, il se produit des accidents. J'ai eu assez de débats sur les radios nationales avec les représentants des Entreprises du médicament (LEEM) pour savoir que les industries pharmaceutiques ont aujourd'hui deux stratégies : la stratégie vaccinale et la stratégie de la biomédecine. Elles n'en ont pas d'autre, car elles sont – de leur faute ou non – en panne d'innovation.
Une vaccination, je le répète, n'est pas anodine. Je refuse de faire le procès de M. Marc Girard et je tiens à rappeler que d'autres avant lui ont évoqué devant cette commission d'enquête le vaccin contre l'hépatite B pour expliquer la réticence de nos concitoyens à l'égard de campagnes de vaccination dans lesquelles ils ne voient pas bien leur intérêt individuel. Ainsi, M. Bernard Bégaud, pharmacologue qui n'a rien d'un hystérique, cité dans un article de La Presse médicale, déclare que tant que la France n'aura pas réglé son problème avec le vaccin de l'hépatite B, la population française se montrera réticente face à des campagnes massives – surtout quand les parents apprennent que leurs enfants ont été vaccinés contre l'hépatite B à trois mois, avec un rappel à quatre mois, sans qu'on le leur ait dit. La transparence commande à tout praticien de dire aux parents quels sont les six agents pathogènes contre lesquels il vaccine leur enfant. Or, aujourd'hui, au comptoir de la pharmacie, plus d'un patient est surpris quand je lui annonce que son enfant a été vacciné contre l'hépatite B par le vaccin hexavalent. Est-il normal que le pédiatre ne le lui ait pas dit ? Si vous ne voulez pas que nous nous fâchions, ne me dites que j'ai tort !
Madame Catherine Lemorton, le travail de notre commission d'enquête porte sur la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1).
Nous sommes en train de relancer la campagne de vaccination contre l'hépatite B, selon le souhait exprimé par Mme Roselyne Bachelot-Narquin depuis six mois. Tout cela fait un ensemble. Si nous voulons éviter les erreurs lors de la prochaine pandémie, il faut tenir un discours clair à nos concitoyens.
Ce problème a été évoqué par M. Bernard Bégaud, puis par le syndicat des infirmières scolaires, que nous avons auditionné, il y a quinze jours. Or, lorsque celles-ci ont, sous une autre forme, tenu des propos qui s'apparentaient à ceux de M. Marc Girard, on a commencé à faire leur procès. Si les Français se posent des questions, on ne peut pas leur dire qu'il n'y a aucun problème et qu'ils doivent se faire vacciner. Je me réjouis d'ailleurs que, lors de l'examen d'un projet de loi de financement de la sécurité sociale, il y a deux ans, des collègues de l'UMP aient défendu un amendement, relatif aux services départementaux d'incendie et de secours, tendant à l'indemnisation des problèmes neuromusculaires susceptibles d'aboutir à une sclérose en plaques susceptible de se déclarer chez les pompiers, tenus de se faire vacciner contre l'hépatite B. Cet amendement ne venait pas de nos rangs, monsieur Jean-Pierre Door, mais de la majorité.
Madame Catherine Lemorton, vous vous égarez. Si vous voulez faire le procès de la vaccination contre l'hépatite B, il y a d'autres lieux pour cela.
La commission d'enquête procède à l'audition de M. Marc Girard. Nous aurons tout le loisir d'écouter vos explications à un autre moment. Ce n'est pas le sujet aujourd'hui et il est déjà vingt et une heures.
Nous sommes en effet ici pour auditionner M. Marc Girard. La commission des affaires sociales pourra, si elle le souhaite, reprendre le débat sur l'hépatite B. Ce n'est pas le propos de notre commission d'enquête.
C'est trop facile ! Avez-vous une question à poser à M. Marc Girard ?
Au demeurant, je ne souscris pas à tout ce que vous avez dit à propos de l'hépatite B. Plus exactement, ceci ne justifie pas cela. Certaines personnes nous ont dit qu'à la suite de la vaccination contre l'hépatite B, les Français avaient davantage de doutes à propos de la vaccination. Je me souviens cependant que, selon le sociologue que nous avons auditionné, l'élément déterminant en la matière était que les Français considéraient la grippe comme peu dangereuse pour eux ; comme l'illustrait un graphique, ils étaient peu nombreux à invoquer le précédent de l'hépatite B. Il ne me semblait pas inutile de rectifier ce point.
À propos du vaccin contre la grippe A(H1N1), internet a véhiculé tout et n'importe quoi, provenant de gens sans aucune crédibilité, voire de sectes. Je rappelle que les effets secondaires dont les Français ont peur ne sont ni la rougeur qui apparaît au point d'injection, ni le pic de fièvre à 39°C le lendemain, ni la douleur au bras qui dure une semaine, mais les effets secondaires à long terme. Il ne s'agit pas de remettre en cause la politique vaccinale, mais s'il y a de tels effets, comment les pouvoirs publics réagissent-ils ?
Monsieur Marc Girard, trouvez-vous normal que M. Jean Marimbert, directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, réponde qu'il faut prouver l'existence d'un lien entre le vaccin et les effets secondaires à long terme ? Ces propos sont-ils de nature à donner confiance aux Français ?
Bien sûr que non. Cela renvoie à la notion que j'essaie d'introduire : il faut cesser de parler des vaccins en général et de les considérer comme des médicaments parmi d'autres. Cependant, les études sur les vaccins sont beaucoup plus complexes que celles qui portent sur les médicaments. Lorsque, par exemple, vous cessez de prendre le Prozac que vous preniez parce que vous étiez déprimé, les effets disparaissent en quelques semaines. En revanche, lorsqu'on vous injecte un vaccin, les effets vont durer des années – le vaccin est même conçu pour cela. Les adjuvants qui l'accompagnent sont des produits relativement « costauds », qui mériteraient évaluation. À cela s'ajoutent des conservateurs qu'on ne trouve nulle part ailleurs, comme le thiomersal.
Ce n'est donc pas être antivaccinaliste, mais réagir en spécialiste du médicament que de dire que, comparés à des médicaments banals, les vaccins sont en quelque sorte des « monstres » pharmaceutiques.
Pour ce qui est par ailleurs de leur efficacité, quand bien même vous montreriez – ce que les fabricants n'ont jamais réussi à faire – que le nombre de personnes atteintes de la grippe a baissé, vous n'auriez nullement démontré que vous avez réduit le nombre de complications graves, qui est, en matière de vaccins, la seule chose qui nous intéresse. Je le répète, attraper la grippe n'inquiète personne, ce n'est pas grave. Mais il n'y a aucune étude là-dessus.
Quant aux études sur le risque de mort subite, il n'y en a pas de sérieuses. Cependant, on peut aussi inverser la question : quelles sont les études sur l'intérêt des vaccins ? Vous êtes-vous avisés – je suis persuadé que vous pouvez le faire – de commander les comptes rendus des réunions du comité technique des vaccinations ? Faites-le : vous verrez sur la base de quelle évidence épidémiologique est décidé le calendrier vaccinal et vous ne serez pas déçus du voyage !
La séance est levée à vingt et une heures dix.