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Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

Séance du 31 janvier 2008 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • MRAI
  • SPSI
  • cession
  • emprise
  • entretien
  • immobilier
  • immobilière
  • infrastructure
  • patrimoine

La séance

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PermalienPhoto de Georges Tron

Messieurs, je vous remercie d'avoir répondu à l'invitation de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des Finances de l'Assemblée nationale.

Comme vous le savez, nous bénéficions pour nos auditions du concours de la Cour des comptes, représentée aujourd'hui par MM. Jacques Rigaudiat, conseiller maître et Claude Lion, conseiller référendaire. Je salue également la présence de notre Rapporteur, M. Yves Deniaud, ainsi que de M. Jean-Pierre Lourdin, secrétaire général du conseil de l'immobilier de l'État, que j'ai l'honneur de présider, et de M. Philippe Dumas, inspecteur général des Finances, qui travaille depuis longtemps sur les questions immobilières.

Lors de la préparation de ses deux premiers rapports sur l'immobilier de l'État, la MEC a déjà entendu plusieurs fois les représentants de la mission de réalisation des actifs immobiliers – MRAI. L'exercice auquel je vous remercie de bien vouloir bien vous prêter n'a d'intérêt pour nous que s'il s'inscrit dans la perspective des préconisations de ces rapports, et non s'il consiste à justifier l'existant.

L'enjeu pour nous est de savoir sur quelles pistes vous travaillez pour vous inscrire dans la réforme lancée par le gouvernement précédent et reprise par le gouvernement actuel.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

La commission des Finances a demandé à la Cour des comptes une enquête sur le sujet qui nous occupe aujourd'hui. L'impression générale donnée par ce rapport est que le ministère de la Défense semble se prévaloir d'un particularisme fort – qui est, au demeurant, peu contestable – pour se tenir à l'écart des évolutions de la nouvelle politique immobilière de l'État.

S'agissant du parc immobilier, la Cour des comptes indique que le ministère de la Défense dispose de 30 000 emprises représentant 52,3 millions de mètres carrés de surface utile, pour une valeur de 19 milliards d'euros inscrite au bilan de l'État. Cet ensemble, qui correspond à 43 % du parc immobilier de l'État, est très hétérogène : bureaux, terrains, cantonnements et bases militaires, monuments historiques, nécropoles, installations industrielles, logements… La Cour note une connaissance du parc encore très imparfaite, ainsi qu'une évaluation qui reste encore à fiabiliser. Les systèmes d'information sur la gestion immobilière sont multiples et insuffisants. Le ministère est dépourvu de système central de gestion domaniale : le progiciel SAGRI, qui n'est pas alimenté depuis 2006, est en fin de vie et le projet SAGRI 2, qui devait lui succéder, n'a jamais fonctionné. Un nouveau progiciel est prévu cette année : va-t-il enfin entrer en service ?

Le ministère de la Défense peut-il également nous indiquer le coût budgétaire annuel de son immobilier, en distinguant par grandes rubriques : acquisitions ; entretien, grosses réparations et maintenance, dépenses de fonctionnement ?

La Cour des comptes a relevé que d'importants crédits immobiliers échappent au Secrétariat général pour l'administration – SGA – et sont gérés directement par les états-majors. Il n'est pas fait de distinction entre les dépenses de gros entretien et celles d'entretien courant. Quelles sont les perspectives d'amélioration de cette situation ?

PermalienEric Lucas

On ne peut affirmer que le ministère de la Défense invoque systématiquement un particularisme pour échapper aux réformes. Comme les autres, il a suivi depuis 2005 les orientations de la politique interministérielle, tant en ce qui concerne le changement de statut de l'administration des domaines que pour la mise en place des loyers budgétaires, la politique de cession de biens immobiliers demandée par l'État et le Parlement, l'élaboration des schémas pluriannuels de stratégie immobilière – les SPSI –, la libération du foncier au profit de la politique du logement, ou encore la mise en place du compte d'affectation spéciale immobilier, le ministère étant, comme les autres, doté d'un budget opérationnel de programme, BOP.

Le ministère de la Défense a bien pour objectif de réduire le coût de son immobilier, tant en emprise qu'en entretien. Il dispose en effet d'emprises qui deviennent inutiles et qu'il n'a plus les moyens d'entretenir.

Par ailleurs, il a mené depuis trois ans ses propres réformes en matière d'immobilier. Dans le cadre de la LOLF, une partie des crédits de l'immobilier – environ un milliard d'euros, soit la moitié du total – a été regroupée au sein des crédits gérés par le secrétariat général pour l'administration (SGA). Nous aurions également souhaité regrouper les crédits de la gendarmerie, mais le Parlement en a décidé autrement. Cette procédure permet d'identifier les crédits dédiés à l'immobilier et de réaliser des arbitrages au sein du seul domaine immobilier, et non plus entre l'immobilier et d'autres secteurs.

En outre, comme cela nous était demandé depuis des années, nous avons mis en place un service d'infrastructures de la défense par la fusion des trois grandes directions centrales de services d'infrastructure. Nous renforçons aussi l'interarmisation du réseau dans le cadre de la RGPP.

Alors que l'application de la LOLF aurait pu conduire à un éclatement des responsabilités en matière immobilière, nous avons accru les pouvoirs de la direction de l'immobilier : c'est elle qui pilote les crédits de politique immobilière du SGA ; le secrétaire général pour l'administration et le directeur de la Mémoire, du patrimoine et des archives président les comités de coordination de la fonction immobilière.

Nous poursuivons notre travail sur la segmentation du patrimoine, destinée à déterminer ce qui peut être cédé et ce qui ne peut l'être, de même que nous poursuivons l'élaboration de schémas directeurs interarmées – SDIA – en complément des SPSI. Alors que les SPSI sont adaptés pour l'immobilier de bureaux, les SDIA visent à reconcentrer l'immobilier à l'échelle de grandes emprises comme, par exemple, Toulon, Brest ou Belfort. Nous en avons conclu sept ou huit. Actuellement, l'instruction des nouveaux dossiers est stoppée dans l'attente des décisions relatives au plan de stationnement des forces.

Nous souhaitons poursuivre le regroupement des crédits d'entretien sur le programme du SGA, améliorer la connaissance des coûts d'entretien, clarifier les responsabilités – je voudrais notamment supprimer la notion d'attributaire au sein du ministère de la Défense pour la remplacer par celle d'occupant, corrélat de celle d'État propriétaire unique –, procéder à une séparation des rôles entre la DMPA, chargée de la politique immobilière, et le service des infrastructures, chargé de l'entretien.

Il faut également fiabiliser les systèmes d'information, réduire les délais de cession, dont la Cour des comptes a démontré qu'ils s'élevaient à six ans en moyenne, et enfin adapter l'infrastructure aux exigences en matière d'environnement.

Même si nous souhaitons, malgré tout, maintenir quelques spécificités, et même si nous bénéficions de quelques dispositifs dérogatoires, tout ce que le ministère a réalisé en interne s'inscrit dans la politique interministérielle.

Nous avons également donné suite aux critiques adressées par la Cour des comptes au sujet de la connaissance imparfaite du parc immobilier.

Au 1er janvier 2002, le patrimoine immobilier domanial de la défense en métropole représentait 263 000 hectares ; en mai 2007, le tableau général des propriétés de l'État – TGPE – recensait 252 000 hectares. Entre 2002 et octobre 2007, le montant des cessions encaissées s'est élevé à 325 millions d'euros. Au 1er janvier 2007, le montant correspondant à des actes de vente signés ou à des arrêtés de changement d'affectation en attente d'encaissement est de 60 millions. Il existe également 83 millions correspondant à des décisions de remise aux services fiscaux qui n'ont pas encore donné lieu à un acte de vente. La politique de cession du ministère se poursuit donc à un rythme normal.

La connaissance imparfaite du parc tient à des disparités dans les notions utilisées. Le système SAGRI, que nous avons essayé, sans succès, de moderniser, se référait plutôt à des emprises ou à des sites, ce qui n'a rien à voir avec les notions d'unité immobilière ou d'unité administrative du TGPE. Une personne de ma direction se consacre entièrement à la fiabilisation des emprises avec France Domaine. Le nouveau système que nous mettons en place sera interfacé avec le TGPE de façon à ce que les données concernant la surface et la valorisation soient les mêmes dans les deux systèmes. Je n'ai pas dans ma documentation la date précise de sa mise en oeuvre, mais je pourrai vous donner prochainement cette information, si vous le souhaitez.

De la même façon, nous travaillons pour intégrer totalement le système CHORUS.

Au 31 décembre 2007, le patrimoine détenu par l'État au titre de la défense représente une valeur de 19,86 milliards d'euros, contre 19,25 milliards au 31 décembre 2006. Cette valeur correspond à 42 % du bilan immobilier total, contre 43,2 % un an auparavant. Dans cet ensemble, l'armée de terre et la gendarmerie ont une part prépondérante. Il est à noter également que la valorisation des emprises dans la région parisienne est égale à celle du parc de la marine nationale.

L'essentiel des surfaces se trouve en province : 7 % seulement sont situées en Île-de-France. Le caractère militaire des biens est prépondérant : 70 % de terrains d'entraînement, 15 % de surfaces dédiées aux infrastructures de bases navales ou aéronavales, 6 % de surfaces dédiées aux infrastructures industrielles et logistiques, 8 à 9 % de surfaces dédiées aux infrastructures de commandement et de vie ; les bureaux ou les locaux purement administratifs ne représentent que 0,38 % du total, ce qui explique les discussions que nous avons avec France Domaine au sujet des loyers.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Il convient de rappeler que la question de la valorisation du patrimoine a fait l'objet d'une partie des réserves émises par la Cour des comptes à l'occasion de la certification des comptes de l'État. Les propos de M. Lucas attestent la difficulté considérable qu'il y a à développer un système d'information complet, fiable, sans rupture dans les interfaces.

D'après les informations que nous tenons de la Cour des comptes, celle-ci a eu du mal à dresser une cartographie budgétaire de l'enveloppe immobilière du ministère de la Défense. En dépit des efforts effectués à l'occasion de la LOLF – le regroupement dans le programme 212 de l'essentiel des crédits immobiliers a impliqué une réorganisation aboutissant à la création du service d'infrastructure de la défense –, l'estimation de cette enveloppe reste vraisemblablement sous-évaluée.

Au-delà du problème spécifique du programme 152, qui concerne la gendarmerie, deux autres programmes prennent en compte des éléments budgétaires. Le programme 146 comprend l'immobilier propre de la DGA et l'on peut s'interroger sur la nécessité d'une telle autonomie. Le programme 178, qui comprend les crédits directement utilisés par les militaires sur le terrain, pose le problème des « masses » : il s'agit de montants importants qui ne sont pas identifiables car ils suivent des circuits comptables particuliers. Il est extrêmement difficile de reconstituer ce qui, dans les masses, correspond à de l'entretien, de la mise aux normes, etc. Les difficultés d'identification ne portent donc pas seulement sur les marges, mais sur des éléments importants.

En outre, le ministère de la Défense bénéficie d'un retour complet sur les cessions, mais, pour des raisons difficiles à cerner, il éprouvait encore récemment des difficultés pour consommer ces crédits inscrits dans le compte d'affectation spéciale.

Outre la longueur des délais de cession – de l'ordre de six à sept ans en moyenne –, n'y a-t-il pas un problème en amont, dans le processus de segmentation proprement dit ou dans les procédures de cession du ministère de la Défense ?

PermalienEric Lucas

En ce qui concerne l'entretien, nous sommes d'accord avec les observations que la Cour des comptes nous avait adressées. Grâce à la LOLF, nous avons pu identifier les programmes d'infrastructures au sein d'un BOP, de manière à protéger l'immobilier d'arbitrages en faveur d'autres secteurs. Cependant, tout n'a pas été identifié dans cette ligne budgétaire. Dans la loi de finances pour 2008, 234 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 351 millions d'euros de crédits de paiement d'investissement sont inscrits au programme 146 pour les infrastructures, notamment celles liées aux programmes nucléaires et à la DGA. Ce rattachement est une spécificité du programme nucléaire.

On trouve également 200 millions d'AE et de CP au programme 178, avec des crédits « massifiés » qui sont à la disposition des unités pour l'entretien de l'infrastructure. Il est exact que le système des masses empêche de déterminer précisément le montant des crédits consacrés à l'entretien. Cela dit, ce système est en cours de suppression. De plus, un groupe de travail réuni entre octobre et décembre a déterminé cinq niveaux d'entretien et réparti leur responsabilité entre l'occupant secondaire, l'occupant principal et le service d'infrastructure de la défense. Sur cette base, nous allons évaluer les crédits qui seront progressivement transférés du programme 178 vers le programme 212.

Il y aura toujours des crédits réservés aux unités pour l'entretien courant, mais tout ce qui concerne le gros entretien doit être géré par le SID. On pourra ainsi, dans le cadre de la politique immobilière de l'État, déterminer des ratios d'entretien, ce qui permettra de se tourner, le cas échéant, vers la direction du Budget si les crédits s'avèrent insuffisants. Il est toutefois difficile de comparer l'entretien de locaux techniques de la DGA ou d'une base navale ou aéronavale et celui de mètres carrés de bureaux.

S'agissant du compte d'affectation spéciale, il y a eu en effet un certain retard. En 2006, au moment de l'adoption de ce dispositif, nous avons dû consommer 3 millions d'euros. En 2007, le total des dépenses du CAS en autorisations d'engagement s'élève à 69 millions d'euros, soit 60 % de consommation des ressources, le montant disponible aux dates de fin de gestion s'élevant à 117 millions. Les dépenses ont concerné des opérations de dépollution préalable pour cession et des opérations de réaménagement liées à des SDIA : dégagement d'emprises en centres villes et reconcentration dans d'autres zones, notamment.

Quant à la segmentation, il était en effet indispensable de l'engager. La longueur des délais de cession est due pour une grande part aux procédures internes. L'idéal serait qu'un bien considéré comme cessible soit immédiatement remis en mandat à la MRAI, pour que celle-ci engage les opérations administratives et techniques permettant la cession et, en particulier, les procédures liées à la dépollution. La difficulté vient du fait qu'un bien est souvent déclaré cessible alors qu'il est encore occupé. La situation évoluera lorsque le nouveau plan de stationnement des forces sera adopté.

PermalienPhoto de Georges Tron

La segmentation vous semble-t-elle un mode de classification encore justifié ? Elle est, du reste, loin d'être achevée : environ un tiers du patrimoine n'y est pas inclus. Elle ne concerne pas le patrimoine de l'outre-mer et de l'étranger. En définitive, n'est-ce pas plutôt un frein ?

PermalienEric Lucas

Nous venons juste de commencer à travailler sur l'outre-mer, où la détermination des emprises est la plus difficile. En métropole, la segmentation n'est pas achevée et il faut encore la fiabiliser. Cependant nous ne pourrons savoir vraiment si elle a été utile que lorsque le plan de stationnement des forces sera connu.

PermalienPhoto de Georges Tron

Le rythme de cessions de la MRAI, qui détient entre 40 et 45 % du parc immobilier de l'État, est de 50 à 60 millions par an. Or, lors des trois dernières années, le produit global des cessions de l'État était de l'ordre de 600 à 800 millions d'euros, ce qui signifie que vous êtes particulièrement en retrait par rapport à d'autres ministères. On peut admettre la complexité spécifique au patrimoine de la défense, mais le modus operandi – la segmentation et les délais de cession – a de quoi laisser dubitatif.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

La MRAI a été le premier opérateur ministériel à céder de l'immobilier, mais il est à craindre qu'elle ne se soit, depuis, laissée aller à une certaine routine. Tous les élus locaux ont été confrontés un jour ou l'autre à ses procédures interminables, qui ne se sont pas accélérées en dépit des remarques et des rapports. Pourquoi son rôle de pionnier n'a-t-il pas été suivi par une évolution des méthodes et des pratiques ? Depuis la fin du service national, le format des armées – donc celui des emprises – s'est singulièrement réduit. Le chef d'état-major de l'armée de l'air a affirmé que sept bases aériennes suffiraient, lorsqu'il en existe trente-cinq. Tout cela justifierait une politique de cessions beaucoup plus dynamique.

PermalienEric Lucas

La segmentation a été utile et j'estime qu'il faut la poursuivre. Cependant, pour qu'elle soit efficace, il faut immédiatement remettre à la MRAI les biens déclarés cessibles. Cela suppose une validation politique. Pour les bases aériennes, nous ne pouvons mettre sur le marché un bien avant que le ministre ait décidé d'une évolution du plan de stationnement des forces.

Nous sommes par ailleurs déterminés à mener une analyse approfondie pour réduire les délais internes. Il n'est pas nécessaire de demander trois fois l'accord d'un commandant de région !

Le montant annuel moyen des cessions de la MRAI peut paraître en effet modeste, rapporté à 19 milliards de patrimoine, mais un regain d'activité devrait intervenir compte tenu des prochaines évolutions politiques au sujet du plan de stationnement des forces.

PermalienPhoto de Georges Tron

Depuis deux ans, deux types d'arguments sont systématiquement tenus devant le CIE et la MEC : la spécificité de chaque ministère et le fait que les réformes vont rapidement s'engager. La MRAI nous l'avait expliqué quasiment dans les mêmes termes il y a deux ans.

La spécificité du ministère de la Défense ne saurait être niée mais n'est-ce pas cela qui empêche le système de bouger ? N'y a-t-il pas là un alibi pour justifier une attitude qui s'apparente singulièrement à une forte réticence au changement ? Les régimes dérogatoires, dont le taux de 100 % sur les retours de cessions, y contribuent.

Le processus avance très lentement. On peut invoquer le prétexte des décisions politiques, mais les procédures internes – tels les trois quitus que vous évoquiez – semblent extrêmement sclérosantes, à un moment où, au contraire, tous les ministères devraient avancer à peu près à la même vitesse et adopter la même culture. La question peut paraître provocante, mais le système du ministère de la Défense ne devrait-il pas être totalement repensé ?

PermalienEric Lucas

L'annonce de la modification du plan de stationnement des forces devrait intervenir durant l'été. Nous aurons alors à nous reconcentrer sur des emprises, à rebâtir rapidement les installations destinées à accueillir les unités déplacées, et à vendre les emprises abandonnées pour financer, autant que possible, les opérations. Pour mener à bien cette entreprise, nous devrons continuer de bénéficier de 100 % de retour sur le CAS. Il faudra probablement instituer une société foncière de défaisance, soit qui porte nos biens, soit qui nous les achète, tandis que la MRAI continuera de travailler sur des emprises difficiles à reconvertir et à vendre. Nous souhaiterions que la possibilité d'effectuer la dépollution pyrotechnique sous le contrôle de l'État soit élargie à tous les acquéreurs, ce qui accélérerait la cession des emprises fortement polluées.

PermalienJacques Bouchez

Le délai moyen de cession, qui s'élève en effet à six ans, concerne des biens très divers, dont certains sont complexes et propres au secteur de la défense. Souvent, la mise sur le marché d'emprises très importantes nécessite un travail avec les élus concernés et une préparation du terrain. La dépollution pyrotechnique, soumise à des règles strictes de sécurité, accroît parfois les délais de plusieurs années. Les installations classées pour la protection de l'environnement – ICPE – présentent en général moins de difficultés.

Quand des sites n'ont aucune qualification dans les plans d'occupation des sols, désormais plans locaux d'urbanisme, il faut inventer leur destination en concertation avec les élus avant de passer à la phase de transmission de domanialité. Ensuite, le bien est évalué avec les trésoriers-payeurs généraux, généralement en fonction du bilan de l'opération de reconversion. En définitive, le ministère de la Défense détient très peu de biens banalisés qui puissent être rapidement mis sur le marché, comme par exemple des immeubles de bureaux. Le travail de reconversion est en général long, dans un environnement réglementaire contraignant, notamment en matière de dépollution.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

M. Éric Lucas a parlé de la nécessité de maintenir le taux de retour sur les cessions à 100 %, mais tous les ministères pourraient dire la même chose.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Quelle est la participation de France Domaine aux opérations de la MRAI ? Même avec ce retour à 100 %, il s'agit du patrimoine de l'État et non de celui d'un ministère particulier. Plus précisément, consultez-vous France Domaine sur l'emploi des fonds que vous récoltez grâce aux cessions ?

PermalienPhoto de Georges Tron

J'aimerais que la réponse de nos interlocuteurs ne donne pas le sentiment que, bien entendu, France Domaine est incontournable, que, bien entendu, on travaille avec lui, que, bien entendu, il a un pouvoir décisionnaire, mais que, cependant, etc., etc.

PermalienJacques Bouchez

Lorsque nous travaillons à la reconversion des emprises avec les élus concernés, le comité de pilotage comprend dès le départ le TPG, qui est le représentant local de France Domaine. Nous n'attendons pas la phase d'évaluation pour l'associer au processus.

PermalienEric Lucas

Le dispositif de la MRAI n'est pas dérogatoire aux règles des finances publiques. Nous discutons sur la base d'un prix fixé par France Domaine. C'est d'ailleurs ce service qui signe l'acte de vente.

Juridiquement, il n'existe aucune difficulté à ce que France Domaine représente l'État propriétaire, mais il peut en aller autrement politiquement. L'immobilier de l'État ne se réduit pas à des questions de cession ou d'entretien : il s'agit aussi de savoir où seront situées les administrations et les forces armées. Le ministre de la Défense est responsable, aux termes de l'ordonnance de 1959, de l'implantation de ces forces, et il ne se détermine pas seulement en fonction des coûts, même si cet aspect est important.

Pour ce qui est de la réutilisation du produit des cessions supérieures à 2 millions d'euros, nous demandons à chaque fois l'accord de France Domaine. Le schéma directeur d'aménagement interarmées n'est pas validé globalement comme il l'est avec les autorités locales et les préfets : chaque opération nécessitant un déplacement doit être validée par France Domaine pour pouvoir bénéficier des crédits de réemploi. À cet égard, les réaménagements importants qu'impliquera la modification du plan de stationnement des forces nécessiteront une modification de ce dispositif afin que l'on puisse aller plus vite. C'est pourquoi nous réfléchissons à la mise en place d'une société foncière de restructuration ou de portage de terrains.

PermalienEric Lucas

La réflexion se déroule en interne pour l'instant.

PermalienPhoto de Georges Tron

La création d'une telle structure ne correspond-elle pas, in fine, au déploiement d'un dispositif parallèle à celui que nous appelons de nos voeux, lequel ferait apparaître clairement que le pilotage est exercé par l'État ? Malgré des évolutions, la MRAI continue d'insister sur les spécificités de la défense, alors que nous souhaitons pour notre part affirmer le rôle de France Domaine.

PermalienEric Lucas

Quoi que nous fassions nous ne pourrons pas agir seuls. Sur ce sujet le débat sera interministériel. Pour commencer, est menée une réflexion interne au ministère, mais nous ne pourrons avancer qu'avec l'accord du ministère du Budget.

Il peut s'agir d'établissements publics complémentaires en fonction des besoins. Il est également possible que des liquidités soient nécessaires pour faire face aux restructurations.

Nous avons besoin de France Domaine pour mettre des biens immobiliers sur le marché, notamment à Paris. Plusieurs dispositifs complémentaires devraient donc permettre d'accélérer ce processus de cession et d'adaptation.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

L'ordonnateur principal reste le ministre. Or ce dernier n'a passé une convention qu'à la fin de 2007. Comment a-t-il donc pu ordonnancer les dépenses en l'absence de cette convention ? Plutôt comment le ministère a-t-il pu contracter avec France Domaine ?

PermalienEric Lucas

J'ai signé cette délégation de gestion en arrivant dans mes fonctions. Il s'agissait surtout d'un débat sur la question de l'ordonnateur entre le ministère de la Défense et celui des Finances. Il a été tranché dans le sens souhaité par France Domaine.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Cette décision est bien tardive.

Je reviens sur l'organisation de la fonction immobilière au sein du ministère, car elle n'est pas clairement établie. Quelles sont en la matière les attributions exactes du secrétariat général pour l'administration et de ses différents services : DMPA et MRAI ?

Le service des Infrastructures de la défense, le SID, regroupe 4 400 postes équivalents temps plein. Quel est le poids de ce nouveau service créé il y a trois ans, en particulier face aux trois états-majors ?

La Cour des comptes a souligné que, dans ce domaine, les relations n'étaient pas clarifiées. Il semblerait logique que son rôle se limite à l'entretien courant, mais que tout soit regroupé pour les décisions importantes. Or l'armée de terre a refusé la charte qui tendait à régler cette question en raison de son attachement à l'autonomie de ses services.

La question principale est donc celle de l'unicité de gestion immobilière du ministère. En effet il n'est pas possible d'assurer une intégration harmonieuse de la politique immobilière de la défense dans celle de l'Etat s'il n'y a pas unicité au sein du ministère lui-même.

PermalienEric Lucas

Nous avons commencé à le faire dans le cadre de la mise en oeuvre de la LOLF.

La DMPA, sous la responsabilité du SGA, est responsable de la politique immobilière dans son ensemble. À coté existe le service des infrastructures qui est rattaché au SGA, non aux états-majors. Il s'agit bien de mettre en place une politique immobilière d'ensemble. Le fait que les deux organismes soient tous deux au sein du SGA permet d'échanger et de coordonner leurs actions, sous l'autorité de ce dernier.

En termes budgétaires, il s'agit de 200 millions d'euros, inscrits au titre 3, qui échappent au BOP sur les crédits de la politique immobilière. Nous transférons progressivement les dotations d'entretien immobilier du programme 178 au programme 212 en fonction des niveaux de responsabilité identifiés en termes d'entretien, car il faut qu'une partie reste au sein des unités. Cependant la plus grande part de ces crédits sera gérée par le SID qui sera l'opérateur essentiel en matière d'infrastructures.

Se pose également la question des effectifs qui, au sein des armées, sont affectés à l'entretien ; ils peuvent faire l'objet d'une réforme.

Par ailleurs nous allons travailler à la déconcentration des responsabilités, sous mon autorité, et à la simplification des attributions en termes de responsabilité. Néanmoins on ne peut pas ignorer le fait qu'un chef d'état-major veuille conserver auprès de lui des personnes chargées de la politique immobilière, ne serait-ce que pour des questions de cohérence. Cependant l'objectif est de renforcer le rôle de la DMPA et du SID.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Où en est le SPSI pour le ministère de la Défense ?

L'extrême diversité de ses biens immobiliers rend très difficile une vue d'ensemble exhaustive. Comment envisagez-vous d'intégrer, en 2008, ce SPSI dans le cadre de la revue générale des politiques publiques (RGPP) ?

Où en sont les discussions sur le SPSI avec France Domaine ?

Où en est l'élaboration de SPSI déconcentrés ?

PermalienEric Lucas

En ce qui concerne les SPSI déconcentrés, nous avons seulement fait un diagnostic avec France Domaine dans les départements où un SPSI a été élaboré.

En ce qui concerne l'administration centrale, nous avons préparé un SPSI sur lequel le ministère du Budget a formulé diverses observations. Il nous a notamment demandé de le reprendre pour présenter un document définitif fin mai 2008, en insistant sur la nécessité de réduire les surfaces d'occupation et les dépenses immobilières.

Cela étant, le SPSI sera forcément impacté par le projet Balard. En effet, initialement, était prévue une réduction progressive des implantations parisiennes. Or ce projet d'un Pentagone à la française va modifier la donne, mais il répondra aussi aux motifs d'élaboration d'un SPSI. Il aura en effet trois objectifs : améliorer la gouvernance du ministère en regroupant les autorités sur la même emprise autour du ministre lui-même ; réduire les emprises et les coûts d'occupation en région parisienne ; recenser les organismes qui pourraient être implantés en province afin de diminuer les effectifs et le nombre des organismes dans Paris.

Je prépare donc une lettre pour indiquer au ministère du Budget qu'il ne sera sans doute pas possible de rendre ce document pour fin mai 2008, car il faut attendre de connaître les conséquences qu'aura le projet Balard.

PermalienPhoto de Georges Tron

Il s'agit donc d'un élément nouveau qui fait que l'on doit tout revoir d'année en année !

Nous avons été très déçus par les SPSI. Ils ont peut-être constitué de bons éléments de diagnostic, mais ils ont été tout sauf prospectifs. Nous en attendions autre chose.

PermalienEric Lucas

Nous essayons d'identifier et de dénombrer les effectifs présents dans Paris. Nous recensons la totalité des emprises occupées, à la fois en termes de surfaces et de valorisation, en examinant comment en concentrer le maximum sur Balard. Il y aura une réflexion très approfondie et la prise de décision sur ce Pentagone à la française nécessitera des données précises et des arbitrages préalables.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Pouvez-vous nous en dire plus sur le projet Balard, notamment en termes de financement ?

PermalienEric Lucas

Ce projet répond à trois objectifs : regrouper sur une même emprise l'ensemble des grands décideurs, cela étant lié à la mise en place d'une nouvelle gouvernance au sein du ministère de la Défense ; diminuer le nombre des emprises et les surfaces occupées ; déplacer en province des éléments dont l'implantation à Paris ne s'impose pas.

L'horizon du ministère est 2012 et la volonté est de réaliser cette opération en autofinancement. Pour l'instant, aucune liste de cession n'est établie ; il faut travailler sur le programme.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

Il y aura donc regroupement du ministre, du secrétariat général et des chefs d'état-major des trois armes sur un site unique ?

PermalienEric Lucas

On se demande même si l'on ne va pas les regrouper dans le même bâtiment.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

En ce qui concerne le SID, la Cour des comptes nous a signalé que l'armée de l'air insiste sur l'originalité de ses implantations en matière d'infrastructures, alors que l'armée de terre et la marine jouent mieux le jeu. Cette originalité va-t-elle persister ? Est-il envisagé de réduire ces implantations ?

PermalienEric Lucas

Il y a un chantier RGPP dont un chapitre concerne l'infrastructure des bases aériennes, car on sait qu'elle recèle des gisements de productivité. Il faut travailler, sur ce sujet, avec les services de l'Équipement, car ces derniers assument la charge de l'entretien des pistes et des bases. Un travail en commun est donc engagé afin que le SID soit utilisé pour toutes les armées et récupère, en particulier, l'entretien des bases aériennes.

PermalienPhoto de Yves Deniaud

J'ai enfin quelques questions sur le logement des agents publics.

La défense en utilise 76 196 pour les gendarmes et 52 182 pour les personnels des autres armes, ce qui est un parc considérable. Ce dernier est géré par une société autonome, mais cela nous a valu des remarques de la Commission européenne pour manque de mise en concurrence. Une modification est-elle étudiée à cet égard ?

L'examen du parc des logements des gendarmes fait apparaître que leur entretien est très insuffisant et ils sont nombreux à se plaindre de l'état des locaux. Comment envisagez-vous de traiter la rénovation de ce parc de logements ?

Enfin, la Cour des comptes a relevé le mauvais état chronique des bâtiments occupés par le ministère de la Défense, ce qui est sans doute lié au surdimensionnement actuel des occupations ; et ce sera encore plus vrai à l'avenir. Il y a donc une dégradation de la valeur du patrimoine, d'où la nécessité d'accélérer les cessions. Que pensez-vous faire pour que ce qui sera conservé soit remis en état et bien entretenu ?

PermalienEric Lucas

En ce qui concerne les logements des gendarmes pour nécessité absolue de service, on dénombre en effet environ 76 000 logements. J'entends également les plaintes qui viennent de leur côté. Cependant les crédits de la gendarmerie ne figurent plus dans le programme 212.

L'idée est d'essayer de remettre à niveau et d'externaliser leur entretien afin de trouver des marges utilisables pour leur réhabilitation. Il y avait un grand projet d'externalisation, mais il s'est heurté au code des marchés publics. Il semble que la gendarmerie s'oriente actuellement vers des opérations d'externalisation ponctuelle région par région. Cela semble plus adapté et plus réalisable qu'une opération de grande envergure.

En ce qui concerne les logements familiaux des militaires, une partie appartient aux domaines, une autre relève de conventions de réservation. Par la Société nationale immobilière (SNI), qui gère les logements domaniaux, il y a déjà une sorte d'externalisation. À cet égard, nous travaillons depuis trois mois avec le ministère du Budget sur le problème posé par les règles européennes. Plusieurs schémas sont étudiés qui entraîneront une remise en concurrence quelles que soient les modalités de gestion choisies.

PermalienEric Lucas

Oui, avec le ministère, France Domaine, la direction du Budget, et nous allons lancer un appel d'offres auprès des banques pour obtenir des conseils sur ce sujet.