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Commission de la défense nationale et des forces armées

Séance du 7 octobre 2009 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • OTAN
  • armée
  • commandement
  • exceptionnelles
  • militaire
  • équipement

La séance

Source

Audition du général Jean-Louis Georgelin, chef d'état-major des armées, sur le projet de loi de finances pour 2010 (accompagné du général de brigade Bruno Le Ray et du contre-amiral Jean-Marc Brûlez

La séance est ouverte à dix heures.

PermalienPhoto de Guy Teissier

L'année 2009 a été particulièrement importante pour le monde de la défense. L'adoption de la loi de programmation militaire, le transfert de la gendarmerie au ministère de l'intérieur et la réintégration de la France dans le commandement militaire de l'OTAN ont induit des mesures financières qui trouvent leur traduction dans le projet de loi de finances pour 2010.

Par ailleurs, les opérations extérieures nous préoccupent à plus d'un titre, qu'il s'agisse de leur financement ou de leur conduite. Le ministre, que nous avons auditionné hier soir, nous a expliqué que l'Afghanistan obérait 50 % des 840 millions d'euros consacrés aux Opex. Récemment, nous avons déploré de nouvelles pertes sur ce théâtre et le débat est rouvert, comme dans d'autres pays, sur la présence de soldats en Afghanistan. Pourriez-vous faire le point sur la stratégie et les efforts – exemplaires – déployés sur place ?

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

L'année dernière, je vous avais exposé la difficulté de l'exercice budgétaire 2009 ainsi que la nécessité d'assurer le niveau de ressources suffisant à la conduite des réformes de notre outil de défense. En début d'année, je suis venu vous présenter la loi de programmation militaire 2009-2014, traduction financière des choix politiques opérés à la suite du Livre Blanc.

Le projet de loi de finances 2010 s'inscrit dans un cadre sensiblement équivalent à celui que j'avais brossé lors de ces deux auditions. Il se place dans la continuité de la réforme lancée l'année dernière ; constituant la deuxième annuité de la LPM, il confirme l'effort réalisé au profit de l'équipement des forces et de la condition du personnel ; enfin, il survient dans un contexte marqué par la crise économique, la dégradation des finances publiques et la mise en oeuvre d'un plan de relance.

Dans de telles conditions, le PLF 2010 traduit l'effort que peut consentir la Nation pour sa défense. Il nous permet de poursuivre la réforme de nos structures et le renouvellement de l'équipement de nos armées.

Ma principale préoccupation est de disposer dans la durée des ressources humaines et financières qui permettront de conduire cette réforme et de construire un outil de défense performant, à même de répondre à une surprise stratégique toujours possible.

Je voudrais revenir sur une année 2009 très dense, tirer les enseignements de l'exécution de la première année de la LPM et souligner les principaux points du PLF 2010.

Si cette année a été marquée par une forte implication du Parlement – vote de la LPM, approbation de la poursuite des opérations extérieures, soutien de la réintégration des structures de commandement de l'OTAN –, elle a également été particulière dense pour les armées.

Dans le domaine des opérations, le niveau important de déploiements a été maintenu. Près de 33 000 hommes sont concernés – 10 000 sont engagés sur les théâtres extérieurs, 3 000 sont engagés au titre de la fonction « protection », 14 000 assurent des missions de souveraineté et 6 000 sont déployés sur nos bases.

Les armées appliquent avec rigueur le principe de juste suffisance. Le niveau des ressources consenti pour un engagement dépend toujours de l'analyse sécuritaire du théâtre. Ainsi, nous avons progressivement revu nos dispositifs en Afrique. Nous avons aussi commencé à ajuster notre dispositif déployé au Kosovo, en accord avec les décisions et la planification de l'OTAN.

Selon la même approche, nous avons marqué un effort en matière de lutte contre la piraterie au large de la Somalie. La France a déployé des moyens supplémentaires et a entrepris la formation de bataillons de l'armée somalienne tout en maintenant son soutien à la mission de l'Union Africaine. Les succès obtenus sont réels. Ils résultent d'une remarquable coordination tactique entre les moyens européens d'Atalante, les moyens de l'OTAN et ceux des divers dispositifs nationaux.

En Afghanistan, 2009 a été marquée par le redéploiement de notre dispositif. A compter du mois de novembre, nous concentrerons nos moyens dans les districts de Surobi et de Kapisa pour y conduire des actions coordonnées de sécurisation des villages et de développement local. Agissant en liaison avec les forces de sécurité et les autorités afghanes, la France estime pouvoir ramener ces districts sur la voie de la stabilité dans les deux prochaines années.

Je me suis rendu sur ce théâtre à plusieurs reprises pour apprécier les progrès obtenus par nos troupes dans leurs zones de responsabilité. Je ne retrouve pas toujours sur le terrain les descriptions faites dans la presse, notamment anglo-saxonne. Le rapport McChrystal s'inscrit bien dans la stratégie générale qui a été définie au sommet de Bucarest.

Et la situation s'améliorera effectivement si nous parvenons à coordonner plus efficacement les actions civiles et militaires et à établir la confiance des Afghans dans leur administration locale.

Je retiens de ces opérations plusieurs enseignements. Il nous faut disposer d'un outil de défense réactif qui puisse s'adapter à la diversité des crises auxquelles nous sommes confrontés. Cela suppose une formation particulière du personnel ainsi qu'une mise à disposition rapide des équipements. Sur ces deux points, nous ne pouvons que nous féliciter de la manière dont les armées françaises se comportent.

Enfin, nous avons besoin du soutien de la Nation et de ses représentants pour conduire des opérations qui s'inscrivent dans la durée.

Cette année a également été marquée par le retour de la participation pleine et entière de la France dans les structures de l'OTAN. Dès cet été, des commandements nous ont été attribués. Quelques défis restent encore à relever sur le plan de l'organisation et des finances : le surcoût de notre participation n'est pas encore stabilisé et le périmètre des « paquets de capacités » – les investissements que nous aurons à financer – n'est pas totalement connu.

Nous devons maintenir l'attractivité des affectations pour le personnel appelé à rejoindre les structures de l'OTAN. Le succès de notre participation dépend de la qualité des conditions de vie réservées aux militaires français mais aussi de l'adaptation de nos méthodes de travail et de planification.

Enfin, cette année a été marquée par des décisions qui permettront de mettre en place l'organisation et le fonctionnement des armées, dans la perspective du regroupement à Balard. Ainsi, le décret du 15 juillet 2009, qui confirme celui de 2005, place les armées au coeur de l'organisation. Ces évolutions répondent à la nécessité de renforcer l'efficacité de notre outil de défense dans une perspective interarmées.

Je souhaiterais à présent tirer quelques enseignements de la première année d'exécution de la programmation budgétaire triennale et de la LPM. Cette dernière repose sur un certain nombre de principes : le maintien au sein du budget de la défense des économies résultant de la réduction du format des armées ; l'optimisation du dispositif de maintien en condition opérationnelle ; la réalisation du volet « export » de nos programmes d'équipement ; l'obtention de recettes exceptionnelles.

Au terme de cette première année, les armées sont au rendez-vous et suivent avec détermination la trajectoire de ralliement du format du Livre Blanc.

Les objectifs de déflation des effectifs ont été atteints puisque 16 500 postes seront supprimés en deux ans.

Les équipements destinés à être retirés du service actif l'ont été. Cela a été le cas, par exemple, de deux bâtiments de guerre des mines, deux bâtiments de soutien, une centaine de chars Leclerc, et d'une quarantaine d'avions de combat.

24 emprises ont déjà été libérées et une vingtaine le sera d'ici la fin de l'année ; 11 bases de défense expérimentales ont été créées et 43 formations auront été déplacées ou dissoutes en 2009.

Les nouveaux commandements et services permettant de rationaliser l'emploi de nos moyens ont été créés – comme le commandement interarmées des hélicoptères – ou sont en cours de création : le commandement interarmées de l'espace, l'organisation interarmées des soutiens, le service industriel de maintenance des matériels terrestres, le service du commissariat des armées…

Vous le savez, ces réformes sont d'une ampleur considérable et présentent des risques. La manoeuvre concernant les ressources humaines est particulièrement délicate à conduire. La préservation de la capacité opérationnelle des armées passe en effet par le maintien d'un bon niveau de recrutement des jeunes cadres et militaires du rang. Nous devons obtenir le flux de sortie nécessaire pour atteindre notre objectif de réduction des effectifs, sans pénaliser le recrutement.

Dans le domaine du soutien, le retour d'expérience des bases de défense demande du temps. Nous devons être pragmatiques et bien évaluer ce que nous pouvons mutualiser avant de faire basculer l'ensemble du ministère de la défense dans un nouvel environnement.

Par ailleurs, des incertitudes pèsent sur des programmes majeurs comme le Rafale et l'A400 M. Les recettes exceptionnelles prévues dans le budget 2009 ne sont pas, à ce stade, pleinement au rendez-vous.

Ces difficultés en matière de ressources ont été atténuées par l'autorisation de consommer 900 millions d'euros de crédits reportés de la gestion 2008 ainsi que par la mise en oeuvre d'avances au titre du plan de relance. Il est à noter que ces avances ont été remboursées en construction budgétaire 2010.

En outre, ce plan a permis de passer plusieurs contrats dont les plus emblématiques sont l'acquisition, en anticipation, d'un bâtiment de projection et de commandement ; la livraison de deux Rafale supplémentaires en 2011 ; l'acquisition de cinq hélicoptères EC 725 ; l'avancement d'un an de la fin des livraisons des VBCI ; l'achat de pièces de rechanges de Rafale pour 50 millions d'euros ; et enfin la mise aux normes de l'installation de conditionnement d'air du SNLE « Le Triomphant » pour 11 millions d'euros.

Je voudrais à présent détailler les caractéristiques du projet de loi de finances, qui marque, dans une période difficile, l'effort significatif de notre pays à l'égard de son outil de défense.

Le budget de la mission défense, hors pensions, s'élève à 30,12 milliards d'euros. Il est complété par 770 millions provenant du plan de relance et par 1,26 milliard de recettes exceptionnelles. Au total, les ressources prévues atteignent 32,15 milliards, en léger retrait par rapport à 2009 mais en conformité avec la LPM. En prenant en compte l'ensemble des ressources attendues, l'effort de défense est donc maintenu aux environs des 2 % du PIB.

Les ressources attribuées nous permettent de poursuivre le processus de réforme des armées et de remplir nos contrats opérationnels. Nous pourrons également conduire une politique d'équipement ambitieuse au profit de la fonction connaissance et anticipation, de la protection du combattant et de l'adaptation de nos équipements aux nouvelles menaces.

J'observe cependant que le niveau de ressources inclut 1,26 milliard d'euros de recettes exceptionnelles. Or l'exercice budgétaire 2009 nous a montré toutes les difficultés que cela pouvait engendrer. Ce point devra donc faire l'objet d'une attention particulière car il conditionne le maintien de l'effort accordé en matière d'équipement de nos forces.

L'analyse de ce projet laisse apparaître quatre traits dominants. Il maintient d'abord la priorité accordée à la « recapitalisation » de notre outil de défense. Après la forte augmentation de l'année passée, les ressources totales consacrées aux équipements s'élèvent à 17 milliards d'euros, soit une progression de 11 % par rapport à 2008. Ces ressources permettront de réaliser ou d'engager des commandes portant sur les équipements modernes dont les armées ont besoin pour faire face à la situation sécuritaire définie par le Livre Blanc.

Elles se traduiront par des moyens de renseignement renforcés – C160 Gabriel rénové, AWACS rénové, satellites HELIOS et MUSIS, nacelles de reconnaissance –,des moyens de protection pour nos combattants – VBCI, VBL, PVP, FELIN, brouilleurs – et enfin des moyens permettant d'améliorer l'efficacité de notre outil de défense, un outil capable de faire face aux menaces et aux défis d'un monde incertain avec des équipements renouvelés : Rafale, TIGRE, NH90, SAMPT, EXOCET, M51, FREMM.

Le projet de loi de finances permet également d'accompagner la conduite de la réforme.

Les marges de manoeuvre dégagées par les réductions d'effectifs et le resserrement du dispositif des implantations militaires, notamment autour des 18 bases pilotes de défense, permettent l'accompagnement des restructurations – 180 millions – et l'amélioration de la condition du personnel – 203 millions, dont 114 de mesures nouvelles.

Il maintient par ailleurs l'effort indispensable en matière de préparation de nos forces.

Les ressources prévues pour financer l'entraînement et l'entretien programmé des matériels permettront aux armées de réaliser leurs activités de préparation opérationnelle.

Enfin, la provision OPEX pour 2010 s'élève à 570 millions d'euros, en hausse de 60 millions. Cette provision couvrirait 65 % des besoins estimés pour l'année 2009. Cet effort de financement s'avère indispensable car nous constatons une augmentation des dépenses lorsque le degré de violence s'accroît. Au-delà de cette provision, il sera encore nécessaire de recourir à un décret d'avances pour couvrir intégralement le financement des OPEX.

L'examen du budget me permet également de souligner combien il est nécessaire de maintenir une bonne adéquation entre les ressources et les besoins. Le risque d'être trop optimiste quant aux économies à réaliser et la difficulté à maîtriser les besoins ne peuvent être négligés.

S'agissant des ressources humaines, l'expérience de la précédente LPM a montré que le respect des hypothèses de construction pouvait se heurter à la dure loi de la gestion et des contraintes budgétaires, conduisant à une déflation de nos effectifs plus forte que prévue.

Ce risque de découplage a été identifié et une clause de sauvegarde a été introduite dans la LPM. Il conviendra de la mettre en oeuvre si le besoin s'en fait sentir.

De même, le Livre Blanc a défini le dispositif stationné à l'étranger ou dans les départements et collectivités d'outre-mer. Nous devons être en mesure de pouvoir le réaliser.

Enfin, des financements complémentaires ne se situent pas dans la trajectoire prévue en LPM. Je pense aux coûts, aujourd'hui mieux appréciés, relatifs à l'OTAN ou à l'implantation aux EAU, aux coûts de démantèlement des équipements et aux coûts liés à la mise aux normes environnementales.

La réforme demandée aux armées représente un effort considérable. Elle est sans commune mesure avec ce que connaissent les autres ministères. Pour en assurer l'équilibre financier et permettre de tenir nos objectifs, il est indispensable que les ressources budgétaires et les ressources exceptionnelles soient au rendez-vous.

La profonde transformation de notre outil de défense se poursuit sur fond d'engagement de nos forces dans des opérations difficiles, notamment en Afghanistan. Cet engagement de nos soldats constitue, ne l'oublions pas, la finalité des armées, la raison d'être de notre ministère et de ce budget.

PermalienPhoto de Gilbert Le Bris

Les moyens matériels et juridiques mis au service de l'opération Atalante ont augmenté sensiblement. Cette opération fonctionne bien, mais elle connaît des problèmes de coordination, dus, notamment, à la diversité des objectifs : protection des voies commerciales pour certains pays asiatiques, lutte contre le terrorisme pour les Américains, défense du programme alimentaire mondial, des zones de souveraineté et des réserves halieutiques pour les Français. Comment remédier à cette situation ?

Ma deuxième question concerne les forces de présence et de souveraineté. Nous disposons aujourd'hui de quatre bases en Afrique, d'une base, qui monte en charge, aux Emirats arabes unis, ainsi que de la flotte de l'océan indien. Au regard des seuils de crédibilité, il va falloir faire des arbitrages. Notre présence traditionnelle en Afrique semble remise en question, notamment par l'attitude ambiguë du président de la Côte d'Ivoire. Les rééquilibrages seront-ils faits au bénéfice de l'axe Europe-Asie, conformément aux préconisations du Livre Blanc ?

Enfin, le flux de sortie est-il atteint aussi facilement dans chacune des armes ou une arme est-elle plus déficitaire qu'une autre ?

PermalienPhoto de Jean Michel

Comme le ministre de la défense, vous vous êtes félicité que cette loi de finances corresponde à la LPM. Toutefois, si l'on compare ce budget à celui de 2008 et non à celui de 2009, on constate une diminution des dépenses d'équipement de l'ordre de 920 millions d'euros.

Par ailleurs, les recettes exceptionnelles attendues en 2009 n'ont pas suivi. Or les recettes exceptionnelles annoncées pour 2010 – 1,26 milliard d'euros –, ajoutées aux 770 millions du plan de relance, représentent plus de 10 % du budget d'investissement. Si ces recettes ne devaient pas être réalisées, la crédibilité même du budget ne serait-elle pas remise en cause ?

Vous avez annoncé que deux Rafale supplémentaires seraient livrés. Quels pourraient être les effets des commandes d'autres pays ? Pourriez-vous nous apporter des précisions concernant les crédits affectés à l'observation ainsi qu'aux transports tactiques, dans l'attente des premiers A400 M, dont la fabrication tarde ? Enfin, quels sont les tenants et les aboutissants du triste accident qui vient d'impliquer deux Rafale ?

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je vous rappelle que nous auditionnerons dans quelques minutes le chef d'état-major de l'armée de l'air.

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

L'opération Atalante diffère des précédentes opérations menées par l'Union européenne au Tchad et au Congo car il s'agit véritablement d'une grande opération européenne. Dans la mesure où elle est menée conjointement avec l'opération Ocean Shield de l'OTAN et d'autres opérations bilatérales, les chefs d'état-major de l'Union ont souhaité que soit mise en place, à Djibouti, une structure de coordination, à laquelle participent tous les pays engagés dans la zone.

Toutefois, les règles juridiques – voyez les difficultés que pose le traitement des pirates appréhendés, comme ceux qui, par malchance pour eux, ont tenté, la nuit dernière, de s'en prendre à notre navire de commandement, la Somme – les règles d'engagement, les comportements mêmes des militaires diffèrent d'une nation à l'autre. Il appartient aux différents commandements de faire preuve de doigté. Ces opérations étant internationales, il y aura toujours un conflit d'intérêt entre l'exercice de la souveraineté des États sur l'emploi de leurs forces et l'efficacité militaire. C'est la raison pour laquelle ces opérations sont souvent moins efficaces que ce que laisseraient présumer les moyens déployés.

S'agissant des bases, notre feuille de route est celle décrite par le Livre Blanc, qui réduit leur nombre à trois et fait de l'arc de crise Atlantique-Afghanistan une priorité. Nous aurons à terme une base sur la façade atlantique – Libreville ou Dakar –, une à Djibouti, une aux EAU. Cette dernière devrait bientôt atteindre son seuil critique, grâce à un rééquilibrage avec Djibouti. J'y ai rencontré récemment les trois commandants, qui m'ont semblé imprégnés de l'esprit de la mission, parfaitement en phase avec leurs interlocuteurs des EAU. Leur action est fortement connectée avec celle de l'amiral commandant les forces en océan Indien (Alindien). Notre schéma sera bientôt conforme à l'analyse stratégique du monde contemporain, validée par le Parlement.

Il n'est pas anormal d'observer un décrochage dans le budget puisqu'une partie des crédits pour 2008 étaient affectée au financement de la « bosse ». J'aurais bien sûr préféré des crédits budgétaires plutôt que des recettes exceptionnelles.

PermalienGérard Raymond

En 2009, un milliard d'euros devait être obtenu grâce aux cessions immobilières et 600 millions grâce aux cessions de fréquences. Ces dernières ont été décalées d'un an. 400 millions ont pour le moment été tirés des cessions immobilières. Les autorisations de consommation de report de crédit, à hauteur de 400 millions accordés par la lettre plafond du projet de loi de finances pour 2010, et de 500 millions d'euros attribués dans le cadre du plan de relance en début d'année, ont permis de compenser la non-réalisation de ces recettes exceptionnelles.

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

S'agissant de l'A400M, nous avons évité un fiasco industriel complet lorsque les dirigeants d'EADS et d'Airbus ont pris conscience de la gravité de la situation. Désormais, le moteur est au point, le premier vol est prévu avant la fin de l'année et la première livraison devrait être effectuée en 2013.

Pour pallier les grandes difficultés à venir, nous allons agir sur trois leviers : augmentation de notre droit de tirage sur le contrat « Salis aviation » – 400 à 2 000 heures supplémentaires – ; livraison de huit avions de type CASA ; prolongation des Transall jusqu'en 2018.

Permaliencontre-amiral Jean-Marc Brûlez

Dix nouveaux Transall subiront une visite supplémentaire, ce qui portera au nombre de 22 les avions dont nous pourrons disposer au cours de la période 2015-2018. L'arrivée progressive des CASA, dès la fin de 2011, permettra de retirer les Transall d'un certain nombre de missions de capacité ou d'importance particulière et de les réserver à des missions faciles de transport tactique.

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

Soucieux de la sécurité de mes troupes, je suis allé visiter les ateliers d'Orléans et de Clermont Ferrand où les Transall subissent une révision complète ; j'avoue avoir été convaincu que cette flotte, qui devait être retirée en 2002, pourra, en partie, servir jusqu'en 2018.

PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Les 400 millions d'euros que vous avez évoqués représentent-ils une part des 3,7 milliards d'euros de recettes exceptionnelles qui doivent être réalisées dans le temps de la loi de programmation militaire ou une part de l'enveloppe de 1,2 milliard correspondant à la vente des emprises en province, dans le cadre de la réforme des implantations territoriales ? Il serait très important, pour la clarté du dispositif et compte tenu du modèle extrêmement tendu de la réforme, de préciser ce point.

Dans le projet de réforme, il était prévu de créer 90 bases de défense. Dans les discours du ministre, il est davantage question de 65. Les informations dont nous disposons font état de deux problèmes : certaines bases coûtent plus cher qu'elles ne rapportent ; la mutualisation pose davantage de problèmes opérationnels que prévu. Ne pensez-vous pas qu'il serait temps de tirer les enseignements de la création des premières bases afin de réévaluer les modalités de leur mise en oeuvre et d'éviter que leur création n'obère l'équilibre budgétaire de la réforme ?

PermalienPhoto de Patrick Beaudouin

Un certain nombre de dispositifs de gouvernance ou d'arbitrage ont été mis en place, à l'image du comité interministériel d'investissement ou du copilotage du programme par le CEMA et la DGA. Quelle appréciation portez-vous sur ces outils et sur leur efficacité ?

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

Les 400 millions d'euros sont labellisés comme « recettes exceptionnelles ».

PermalienPhoto de Bernard Cazeneuve

Quelles sont les emprises qui doivent être vendues ?

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

Je n'en ai pas le détail, mais je pourrai vous le fournir.

L'expression « base de défense » peut être ambiguë, car il s'agit moins d'une unité géographique précise que d'une circonscription administrative de soutien, dont le bon fonctionnement doit permettre la projection de nos forces. Si le nombre de bases peut être ramené autour de 65, c'est que nous nous sommes rendu compte qu'il fallait en regrouper certaines. Pour autant, cela ne remet pas en cause l'économie générale du projet et, du point de vue des élus locaux, n'emporte aucune conséquence en termes d'aménagement du territoire.

Les anciens dispositifs de suivi de la conduite des programmes d'armement et de gestion de nos crédits d'investissement ne méritaient pas l'opprobre dont ils ont été l'objet. Alors que la Grande-Bretagne et les Etats-Unis étaient cités en exemple, on assiste aujourd'hui à d'énormes difficultés outre Manche et à un gaspillage des crédits publics d'investissement dans les programmes publics d'armement américains, sous la pression des lobbies industriels. Nos crédits d'investissement, eux, sont maîtrisés, le plus souvent bien mieux que dans d'autres ministères. Souvent, nos difficultés découlent de problèmes industriels, comme cela a été le cas pour l'A400M.

Les outils de gouvernance dépendent de l'énergie et de la constance des hommes qui les utilisent. J'ai été auditionné par la deuxième chambre de la cour des comptes sur la question du copilotage CEMA-DGA : il était exclu que le CEMA ne puisse agir sur le programme 146. Je constate que le bon sens a fini par prévaloir.

PermalienPhoto de Damien Meslot

Quel bilan tirez-vous du retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN, en termes de coût et de bénéfices pour nos armées ?

Vous avez parlé de stabilisation et d'amélioration de la situation en Afghanistan, ce qui ne semble pas être le point de vue des observateurs anglo-saxons. Pensez-vous que l'on puisse réellement stabiliser la situation sans s'occuper d'abord des zones tribales du Pakistan ?

PermalienPhoto de Philippe Nauche

Où en est la mise en place du commandement interarmées du soutien – COMIAS ?

Un bilan des expériences d'externalisation a-t-il été dressé ? Comptez-vous développer l'externalisation des services ?

Pouvez-vous éclairer les élus locaux que nous sommes – certains d'entre nous ont dû faire face aux traumatismes liés à la disparition des unités – sur la diminution du nombre de bases de défense ?

Permaliengénéral d'armée Jean-Louis Georgelin

Il me semble que l'on n'a pas mesuré la portée du retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN : cette décision de bon sens a permis à notre pays de retrouver une place de premier rang dans la communauté militaire internationale et a fait de nous de véritables interlocuteurs, notamment aux yeux des États-Unis. Ce sont des Français qui ont été désignés pour diriger deux commandements majeurs : le général Philippe Stoltz au quartier général interarmées permanent – JHQ – de l'OTAN à Lisbonne et le général Stéphane Abrial au Commandement allié Transformation – ACT –, à Norfolk. Je peux vous dire que cela n'est pas passé inaperçu et que la jalousie de certains de nos partenaires y a trouvé de quoi s'exacerber puisqu'on a même entendu que la France ne méritait pas d'exercer un commandement stratégique !

Toutefois, les réflexes anti-OTAN sont toujours aussi vivaces au sein de nos armées et conduisent, en fin de compte, à une moindre efficacité militaire. Je trouve cela regrettable. Nous sommes revenus ; il faut l'assumer et prendre toute notre part dans le fonctionnement de l'OTAN. 30 millions d'euros supplémentaires y seront consacrés cette année, 60 le seront en 2010 ; je veillerai à ce que les conditions de vie faites aux Français soient dignes : outre le fait que la solde est supérieure chez les Britanniques, ces derniers prennent en charge l'intégralité des coûts, ce qui n'est pas notre cas.

Je ne me suis pas félicité de la situation qui prévaut en Afghanistan. J'ai simplement noté que dans les secteurs français de Surobi et Kapisa, qui seront réunis sous un même commandement à partir du 1er novembre, les résultats obtenus sont prometteurs. Je ne peux m'empêcher de penser que ce paradigme, appliqué à l'ensemble du pays, donnerait de bons résultats. Pour autant, il faut être prudent et clair dans la manière dont nous demandons des renforts, d'autant que nous sommes desservis par le tintamarre produit par le rapport McChrystal.

Le COMIAS, qui marque l'autorité du chef d'état-major des armées sur les chefs d'état-major des trois armes, monte en puissance.

Il faut faire preuve de prudence en matière d'externalisation et ne jamais oublier que les armées doivent pouvoir fonctionner lorsque tout s'est effondré. Le ministre est du même avis et tient à ce que le moindre projet d'externalisation lui soit soumis. Ce sont toujours les mêmes domaines qui, en soutien, sont concernés, bien s'il s'agisse de secteurs d'importance à l'opérationnel : l'alimentation, la protection, l'habillement.

Si le nombre des bases de défense diminue, celui des unités demeure le même et cette diminution du nombre de bases n'a donc pas d'impact sur les services ou sur l'administration d'un élu local. Mais je vous l'accorde, ces subtilités lexicales font régner un brouillard clausewitzien !

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je vous remercie. Les députés qui, faute de temps, n'ont pas eu l'occasion de vous interroger vous soumettront leurs questions par écrit.

La séance est levée onze heures trente.