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Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Séance du 3 novembre 2009 à 21h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION

Mardi 3 novembre 2009

À l'issue de l'audition de M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication, la Commission des affaires culturelles et de l'éducation examine pour avis les crédits pour 2010 de la mission « Culture » sur le rapport de M. Marc Bernier (programme « Patrimoines ») et de M. Marcel Rogemont, (programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture »).

La séance est ouverte à vingt et une heures.

(Présidence de Mme Michèle Tabarot, présidente de la Commission)

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Nous statuons d'abord sur les crédits de la mission « Culture » avant d'examiner les amendements déposés sur l'article 52.

Contrairement aux conclusions du rapporteur pour avis des crédits des programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » et conformément aux conclusions du rapporteur pour avis du programme « Patrimoines », la commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2010 de la mission « Culture ».

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Nous examinons maintenant les amendements à l'article 52 rattaché à la mission « Culture ».

Article 52 : Ouverture d'une possibilité de dévolution du patrimoine monumental de l'État aux collectivités territoriales volontaires

La Commission examine l'amendement n° 1 AC de M. Marcel Rogemont, rapporteur pour avis.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Cet amendement vise à répondre aux interrogations de notre collègue Nicolas Perruchot. Le ministre est d'accord sur tout et il n'est pas inquiet. Ce n'est pas mon cas, la décentralisation de tous les monuments pouvant intervenir à la demande de la collectivité uniquement sur décision du préfet. Il y a là un vrai problème : s'il y a de bons préfets, il y en a d'autres qui sont moins bons et s'il y a de bons élus, il y en a d'autres moins bons, c'est la nature des choses… Cet article 52 mériterait d'être étudié sur le fond par notre commission avant d'être adopté et le bilan de la première vague de décentralisation devrait être fait avant toute nouvelle décision. Il conviendrait également d'interroger le Centre des monuments nationaux, qui risque d'être déstabilisé si on ne lui laisse que les monuments qui ne sont pas rentables. Je préférerais que la discussion soit reportée. C'est pourquoi je propose la suppression de cet article.

PermalienPhoto de Marc Bernier

L'article 52 est l'occasion de se repencher sur le transfert aux collectivités locales de certains éléments du patrimoine monumental. On peut certes considérer que la proposition du Gouvernement aurait pu être précédée de davantage de concertation, comme cela avait été le cas pour l'article 97 de la loi de 2004. Pour autant, faut-il supprimer purement et simplement l'article ? Une approche plus constructive consisterait à travailler sur les conditions dans lesquelles des transferts ont été effectués en application de la loi de 2004 et comment on peut en tirer les conséquences pour des transferts ultérieurs. C'est pourquoi il ne faut pas supprimer l'article 52.

PermalienPhoto de Patrick Bloche

Nous soutenons cet amendement. La loi de 2004 était déjà une bombe à retardement. On sait que l'État veut se débarrasser de ses « ruines ». C'est cela la réalité. Et, demain, nos concitoyens viendront nous voir parce que le monument historique, appartenant à l'État, mais situé sur la commune, le canton ou le département, tombe en ruines. Ils nous diront que, du fait de ces nouvelles dispositions, nous pouvons en demander le transfert de propriété pour le restaurer, comment ferons-nous ? Je vous alerte donc avec le sens de l'intérêt général. La loi de 2004 avait mis en place un certain nombre de garanties que l'on ne retrouve pas ici.

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

Je pense que les amendements qui suivent permettront de trouver une solution de compromis.

La commission rejette l'amendement n° 1 AC.

La Commission examine l'amendement n° 2 AC de M. Gilles d'Ettore.

PermalienPhoto de Gilles d'Ettore

Cet amendement vise à rouvrir le délai prévu à l'alinéa 2 du I de l'article 97 de la loi du 13 août 2004 afin que les collectivités puissent à nouveau faire acte de candidature. Par ailleurs, M. Bloche, des ruines peuvent parfois être restaurées par les collectivités, et non par l'État. À l'inverse, il faut effectivement éviter que l'État ne se débarrasse de monuments rentables, qui permettent la péréquation.

PermalienPhoto de Frédéric Reiss

On a parlé du château du Haut Koenigsbourg. Le Conseil général du Bas-Rhin a effectivement pris sa décision en connaissance de cause : c'est un des monuments les plus visités de France. Ce n'est donc pas un cadeau empoisonné pour le Conseil général, bien au contraire.

PermalienPhoto de Patrick Roy

Le château du Haut Koenigsbourg est effectivement une bonne affaire pour la collectivité territoriale destinataire du transfert. Mais si l'État se débarrasse de ses ruines et que les collectivités n'ont pas les moyens de les restaurer, quelle réponse fournira-t-on ?

PermalienPhoto de Michèle Tabarot

L'État ne se « débarrasse » pas des monuments, ce sont les collectivités qui formulent une demande de transfert de propriété.

PermalienPhoto de Bernard Debré

Effectivement, l'argumentaire de M. Bloche est étrange. Il n'y a aucune obligation pour la collectivité de récupérer le bien et, par ailleurs, si le bien tombe en ruines, on peut également se retourner vers l'État. Le plus difficile sera, pour l'État, de faire un choix parmi les demandes des collectivités, notamment si elles demandent des monuments rentables. Il n'y a donc aucun risque pour les collectivités.

PermalienPhoto de Patrick Bloche

J'explique simplement qu'il s'agit d'un cadeau empoisonné. Bien sûr, la collectivité peut refuser ce cadeau. Certes, mais restera la pression de nos concitoyens qui acceptent difficilement que les monuments auxquels ils tiennent soient mal entretenus. Et c'est bien parce que les crédits du patrimoine n'ont pas été à la hauteur depuis vingt ou vingt-cinq ans que les monuments sont en mauvais état.

PermalienPhoto de Marc Bernier

L'intérêt de cet amendement est de faire revivre la possibilité de transfert qui avait été ouverte par l'article 97 de la loi de 2004 avec une liste limitative de monuments établie par la commission Rémond. Le délai d'option ouvert aux collectivités locales souhaitant se voir transférer un monument serait rouvert pour un an, après avoir été clos le 31 décembre 2008. L'esprit de cet amendement est de se donner du temps avant de basculer dans un dispositif de transfert portant potentiellement sur l'ensemble des monuments. Est-ce la meilleure voie à suivre ? D'un côté, cela permet de redonner la possibilité aux collectivités locales d'envisager des transferts de monuments. D'un autre côté, si les demandes de transfert n'ont pas été faites au 31 décembre 2008, il y a peu de chances que des demandes émergent soudainement. Par ailleurs, le délai d'un an prévu pour la réouverture est peut-être un peu court pour que des projets de transfert soient validés au sein des éventuelles collectivités locales demandeuses. Ne vaut-il pas mieux s'inscrire dans le cadre de l'article 52 tel que proposé par le gouvernement et inscrire des garde-fous – par exemple l'avis conforme du ministre de la culture ? Je demanderai donc à M. d'Ettore de bien vouloir retirer son amendement.

L'amendement n° 2 AC est retiré.

La Commission examine ensuite conjointement les amendements identiques n° 3 AC de M. Marcel Rogemont, rapporteur pour avis, et n° 4 AC de M. Gilles d'Ettore, ainsi que l'amendement n° 5 AC de Mme Muriel Marland-Militello.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

L'amendement n° 3AC est bien sûr un amendement de repli. Je partage les propos de Patrick Bloche. Il faut des garde-fous, afin notamment de ne pas déstabiliser le Centre des monuments nationaux, ce à quoi on aboutirait en décentralisant les seuls monuments rentables. Le préfet ne doit pas être le seul à décider de l'opportunité du transfert. Le ministre de la culture, ministre compétent car il est en charge du patrimoine, doit donner un avis conforme avant tout transfert.

PermalienPhoto de Gilles d'Ettore

Il y a contradiction entre les propos de M. Bloche et ceux de M. Rogemont. Je suis d'ailleurs plutôt d'accord avec M. Rogemont. Si les collectivités veulent récupérer des ruines et les faire revivre, c'est une très bonne initiative. Par contre, il convient d'être attentif à ne pas bouleverser la péréquation instaurée au sein du Centre des monuments nationaux : en effet, pour six monuments rentables gérés par l'établissement public, quatre-vingt dix sont déficitaires… Le ministre pourra, grâce à l'amendement, protéger cette péréquation.

PermalienPhoto de Muriel Marland-Militello

Je rappellerai à mes collègues que le préfet représente l'ensemble du Gouvernement dans les régions et donc l'ensemble des ministres. Je suis favorable à l'article 52 car il ouvre un peu plus les possibilités de transfert aux collectivités. Je proposerai, conjointement à cet amendement, un amendement précisant que le transfert doit se faire dans le respect des qualités artistiques et historiques du monument. Un avis simple du ministre compétent suffit. On voit mal comment un préfet prendrait une décision contraire à celle d'un ministre ! Par ailleurs, les représentants du Centre des monuments nationaux ne sont pas forcément meilleurs que les autres et les préfets ne sont pas libres, comme le sous-entendent certains de nos collègues, mais soumis à des contraintes précises.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Les amendements s'inscrivent dans le cadre proposé par le Gouvernement dans l'article 52, que l'on peut schématiser ainsi : pas de liste préétablie de monuments transférables – à l'inverse de l'article 97 de la loi de 2004 ; initiative de la collectivité locale qui doit être validée par le représentant de l'État. Le texte de l'article 52 se caractérise par l'absence d'intervention de l'échelon administratif central directement concerné, à savoir le ministre de la culture. Cela peut se comprendre dans une pure logique de décentralisation – ou de « dévolution » ainsi que l'indique l'intitulé de l'article 52 – mais il se trouve que les biens en cause ont par définition un intérêt national puisqu'ils sont dans le patrimoine de l'État. Les préfets sont effectivement bien placés pour apprécier le caractère éventuellement relatif de cet intérêt national et ils sont garants des intérêts de l'État, mais il apparaît évident que le ministre doit pouvoir garder un oeil sur les transferts qui se profilent.

C'est pourquoi, si l'on accepte de suivre la logique de l'article 52, un avis préalable du ministre doit être prévu. Faut-il que cet avis soit « conforme » ? C'est ce qui garantit au mieux l'intérêt de l'État et cela ne porte atteinte en rien aux principes de la décentralisation. C'est ce que proposent les amendements de M. d'Ettore et de M. Rogemont. L'amendement de Mme Marland-Militello propose un avis simple, qui ne lierait pas le préfet. En apparence, il est moins protecteur des intérêts de l'État, mais on imagine mal qu'un préfet passe outre un avis négatif du ministre… En termes d'affichage pour les défenseurs du patrimoine monumental national, ce dispositif apparaît néanmoins plus faible que la procédure de l'avis conforme. C'est pourquoi je suis favorable aux amendements n° 3 AC et 4 AC et défavorable à l'amendement n° 5 AC.

La commission adopte les amendements identiques n° 3 AC et 4 AC. En conséquence, l'amendement n° 5 AC devient sans objet.

La commission examine ensuite l'amendement n° 6 AC de Mme Muriel Marland-Militello.

PermalienPhoto de Muriel Marland-Militello

Pour donner plus de liberté d'action aux collectivités tout en respectant le patrimoine transféré, il paraît fondamental de prévoir que sa réutilisation éventuelle doive se faire dans des conditions respectueuses de son histoire et de son intérêt artistique et architectural.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Cet amendement introduit la notion de réutilisation des monuments transférés tout en apportant des garanties sur les conditions de cette réutilisation : il conviendra de respecter leur histoire et leur intérêt artistique et architectural. J'y suis favorable.

La commission adopte l'amendement n° 6 AC.

La commission examine ensuite l'amendement n° 7 AC de M. Marcel Rogemont, rapporteur pour avis.

PermalienPhoto de Marcel Rogemont

Cet amendement va dans le sens d'un meilleur contrôle de l'utilisation du monument après dévolution. Il convient de pouvoir vérifier que la collectivité n'a pas détourné les objectifs inscrits dans la convention de transfert. Le présent amendement précise dont qu'à l'issue d'une période de sept ans, la collectivité ou le groupement de collectivités bénéficiaires du transfert transmet un rapport au ministre de la culture détaillant la mise en oeuvre du projet de conservation et de mise en valeur du monument depuis son transfert. À défaut de transmission de ce document, ou si le bilan de la mise en oeuvre s'avère insuffisant, le ministère de la culture peut demander la résiliation de la convention de transfert.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Il s'agit effectivement d'une disposition utile. J'y suis favorable.

La commission adopte l'amendement n° 7 AC.

La commission donne ensuite un avis favorable à l'adoption de l'article 52 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 52 : Rapport au Parlement sur la décentralisation du patrimoine protégé

La commission examine l'amendement n° 8 AC de Mme Muriel Marland-Militello.

PermalienPhoto de Muriel Marland-Militello

Dans l'esprit du renforcement des pouvoirs du Parlement et pour lui permettre d'effectuer convenablement sa mission d'évaluation des politiques publiques, le présent amendement prévoit un rapport annuel sur l'application de l'article 97 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Cet amendement prévoit un rapport au Parlement chaque année sur l'application du dispositif de transfert. Le principe paraît utile pour l'information du Parlement. La périodicité peut être discutée : une fois par an, n'est-ce pas trop fréquent par rapport au nombre et au rythme des opérations de transfert envisageables ? Je vous propose donc de sous-amender votre amendement afin de prévoir une périodicité de deux ans, si vous en êtes d'accord.

La commission adopte l'amendement n° 8 AC, ainsi sous-amendé.

La séance est levée à vingt et une heure trente.