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Commission de la défense nationale et des forces armées

Séance du 8 juillet 2009 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

Examen du rapport de la mission d'évaluation et de contrôle sur le coût des opérations militaires extérieures, notamment sous mandat international, présenté par Mme Françoise Olivier-Coupeau et M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteurs.

La séance est ouverte à dix heures cinq.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Mes chers collègues, nous sommes réunis ce matin pour entendre Mme Françoise Olivier-Coupeau et M. Louis Giscard d'Estaing au titre de la mission d'évaluation et de contrôle de la commission des finances sur un sujet qui nous intéresse particulièrement : le coût des opérations militaires extérieures, notamment sous mandat international.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Mission nous avait été donnée d'évaluer et de contrôler le coût des OPEX. Depuis près de deux décennies, la France projette en permanence 10 000 à 12 000 de ses militaires en opérations extérieures souvent périlleuses, en plus de ceux qui sont prépositionnés dans des pays avec lesquels la France a signé des accords. Ces opérations ont un coût élevé, et qui augmente continûment. Évalué à 852 millions d'euros en 2008 et probablement sous-estimé, il ne devrait guère se réduire, compte tenu de notre implication croissante en Afghanistan, un théâtre d'opération particulièrement onéreux.

En outre, à l'inverse de pays comme l'Allemagne, le Royaume-Uni ou les Pays-Bas qui sont présents, parfois en force, sur un nombre réduit de théâtres, la France participe à cinq opérations extérieures majeures. Cette dispersion génère un coût élevé en logistique, transport, service de santé et frais d'états-majors.

L'intervention de la MEC a été motivée par l'exigence d'un contrôle démocratique sur un poste majeur de dépenses de l'État. Il ne s'agissait ni d'empiéter sur les compétences constitutionnelles du chef de l'État et du Gouvernement s'agissant des décisions d'engager les forces armées et de définir leurs missions, ni de soumettre l'examen de ces crédits à une approche strictement financière.

Dans ce domaine comme dans les autres, la MEC est inspirée par la recherche de l'efficience de la dépense publique. Les rapporteurs ont donc souhaité examiner l'optimisation des moyens mis au service de la politique militaire extérieure de la France. Les OPEX doivent être menées au meilleur coût, et non au moindre coût.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Je vous remercie, monsieur le président, de nous permettre de présenter devant la Commission de la défense les conclusions de la mission passionnante que Mme Françoise Olivier-Coupeau et moi-même avons menée. Je tiens, à cette occasion, à souligner l'excellence de la coopération entre la commission des finances et celle de la défense sur un sujet sensible sur le plan budgétaire.

La France est aujourd'hui l'une des puissances les plus engagées dans ce type d'opérations internationales. Parmi les pays comparables, seul le Royaume-Uni atteint un niveau d'engagement équivalent au nôtre, avec quelque 15 000 militaires déployés à l'étranger, principalement en Irak et en Afghanistan.

La Cour des comptes, qui s'est penchée en même temps que l'Assemblée nationale sur le coût des opérations extérieures, a calculé que le déploiement permanent de 12 000 militaires hors de nos frontières rend nécessaire, compte tenu de la durée des séjours individuels, la rotation d'environ 40 000 militaires par an. Je fais remarquer, à ce sujet, que les contraintes du calendrier de la Cour des comptes associées aux délais de réception des questionnaires adressés aux ministres risquent de rendre quelque peu obsolètes les conclusions qu'elle s'apprête à publier.

La quasi-totalité des forces déployées et des ressources financières consacrées par la France aux opérations extérieures est concentrée sur les cinq théâtres les plus importants. En Afghanistan, la France déploie au total 3 400 hommes dans les opérations Enduring Freedom et Pamir, ainsi que dans les détachements air basés au Kirghizistan et au Tadjikistan et dans l'opération navale Héraclès. Au Kosovo, la participation française est de quelque 1 600 personnels à la KFOR – Kosovo force – de l'OTAN et de 160 hommes à la mission EULEX de l'Union européenne – mission de soutien juridique et de police. Au Liban, le contingent français – 1 500 militaires – est au deuxième rang de l'opération des Nations unies – FINUL –, derrière le contingent italien. Au Tchad, la France déploie 1 140 hommes dans le dispositif Épervier depuis 1986, et 230 hommes sont présents au Centrafrique dans le cadre de l'opération Boali depuis 2003. Depuis janvier 2008, nous avons aussi déployé 1 600 soldats dans le cadre de l'opération européenne Eufor, en cours de remplacement depuis le mois de mars par la Minurcat des Nations unies. En Côte d'Ivoire, la France, engagée dans l'opération Licorne et dans l'ONUCI, déploie environ 2 000 soldats.

Compte tenu des risques que ces opérations nombreuses et répétées font courir sur le recrutement, nous proposons de mettre en place des indicateurs de performance destinés à mesurer l'adaptation des armées aux OPEX : taux de militaires partant en OPEX plus fréquemment que la norme fixée par l'armée de terre, qui est de quatre mois sur seize, hors Afghanistan ; évolution du taux de renouvellement des contrats des militaires ayant servi en OPEX par comparaison à l'ensemble des militaires.

Certains pays, confrontés comme la France à la hausse continue du coût des OPEX, essaient de la compenser en faisant participer largement leurs entreprises nationales aux travaux de reconstruction. C'est le cas de la plupart des pays anglo-saxons et aussi de l'Allemagne, voire de la Turquie, très présente sur les théâtres afghan, libanais et kosovar. Ces nations utilisent notamment des réservistes issus de grandes entreprises, qui profitent de leur présence sur le terrain dans des structures militaires et de leurs carnets d'adresses pour prospecter les marchés dont beaucoup sont financés par des fonds onusiens ou européens.

Les Français n'ont pas cet état d'esprit et privilégient plutôt les entreprises locales. Cela s'explique par la volonté de favoriser les entreprises et la main d'oeuvre locales pour stabiliser l'économie des régions en crise, mais surtout par l'absence des entreprises françaises, peu intéressées par des théâtres d'opération supposés instables et qui négligent le rôle d'information, voire de prospective, que pourraient jouer des réservistes issus de leurs rangs. Si l'absence flagrante des entreprises française en Afghanistan peut se comprendre, ce pays n'étant pas dans la zone d'influence française traditionnelle, il en est malheureusement presque de même au Tchad, pays francophone et dont les liens avec notre pays sont particulièrement anciens et étroits. Vos rapporteurs déplorent donc le faible engagement des entreprises françaises dans les opérations de reconstruction et de soutien de nos armées.

Par ailleurs, la charge financière des OPEX est nettement sous-évaluée. Jusqu'à présent, seuls les coûts directs sont pris en considération – principalement les rémunérations, le fonctionnement des forces envoyées en opérations et les éventuels investissements réalisés sur le terrain. Certains coûts pourtant structurels mais qui ne relèvent pas de ces catégories ne sont pas pris en compte alors qu'ils sont directement induits par les opérations extérieures. Il s'agit principalement des coûts suivants :

– les dépenses de long terme liées aux carrières des militaires ayant servi en OPEX telles que les bonifications de retraite liées aux états de service, les rentes ou pensions d'invalidité, les pensions versées aux veuves et ayants droit ;

– l'usure prématurée du matériel, ce qui en rend l'entretien plus onéreux, le surcoût étant évalué par les armées entre 25 à 30 millions d'euros par an – nous aurons probablement l'occasion de revenir sur la gestion des parcs ;

– la formation renforcée des personnels en partance pour l'Afghanistan, théâtre d'opérations où ils seront soumis aux dangers propres à la guerre et aux pertes humaines que cela suppose. Elle concerne 7 500 personnes par an, dure six mois au lieu de trois et comprend un stage en centre d'aguerrissement en montagne pour un niveau jamais atteint auparavant. Cette formation, jugée indispensable, induit un surcoût évident que l'état-major des armées n'a pas pu évaluer ;

– les programmes réalisés dans l'urgence, particulièrement coûteux, tels que l'achat de véhicules spécifiques – comme les chenillettes pour l'Afghanistan –, l'installation de tourelleaux téléopérés sur les VAB ou encore l'achat de brouilleurs. Le coût de ces programmes d'urgence a été estimé à environ 100 millions d'euros en 2008 ;

– les nombreuses opérations d'infrastructure non comptabilisées. Ainsi, la reconstruction de l'hôpital militaire de N'Djamena, pourtant financée par les différentes armées, n'est pas prise en compte dans le BOP « OPEX ».

Le ministère du budget s'en tient à une définition très restrictive du coût des opérations extérieures, considérées principalement sous l'angle des rémunérations et des frais de fonctionnement. Les dépenses d'équipement, considérées comme durables, sont exclues du champ puisque les matériels acquis à l'occasion d'une OPEX sont censés être réutilisés ultérieurement à l'opération. Or les logements de type Algeco installés pour héberger nos militaires à l'étranger ne sont pas facilement démontables et réintégrables en métropole.

Une instruction datant de 1984 fixe les règles de calcul des surcoûts liés aux OPEX. Adoptée à une époque où les opérations extérieures ne connaissaient pas l'ampleur qu'elles ont prise, cette instruction apparaît beaucoup trop restrictive. Sa modification, à l'ordre du jour depuis plusieurs années mais sans cesse reportée, doit aboutir.

Sur ce point, vos rapporteurs formulent plusieurs préconisations. Ils demandent d'abord que les consultations reprennent entre le ministère du budget et celui de la défense pour actualiser l'instruction de 1984 de manière à prendre en compte, de la façon la plus exhaustive possible, le coût des opérations extérieures. Nous demandons notamment que soient intégrées dans ce coût les dépenses de long terme liées aux carrières telles que les bonifications de retraites et les rentes et pensions d'invalidité ; les dépenses liées au renforcement de la préparation des personnels envoyés en opérations extérieures ; le coût des matériels et équipements perdus en action ; le coût des matériels achetés en urgence.

Nous souhaitons que les ministères du budget et de la défense se réunissent rapidement après la publication de ce rapport afin d'actualiser au plus vite l'instruction de 1984. Mme Françoise Olivier-Coupeau et moi-même sommes prêts à mettre à disposition des Casques bleus pour parvenir à un accord définitif entre ces deux ministères…

La mission s'est aussi interrogée sur le point de savoir si les dépenses faites relevaient de la défense ou de l'aide au développement. Lorsqu'elles se trouvent en opération à l'étranger, les forces françaises font profiter les populations locales d'actions qui s'apparentent davantage à de l'aide au développement qu'à de la défense, même si le coût est considéré comme relevant des OPEX.

Les armées françaises en opérations extérieures bénéficient du soutien du service de santé des armées. Des centres médicochirurgicaux sont installés sur les théâtres d'opération et des médecins et chirurgiens sont présents en permanence – Jean-Claude Beaulieu a l'occasion de s'y rendre. Comme la situation, sauf en Afghanistan, est généralement calme, les personnels médicaux interviennent le plus souvent au profit des populations locales, dans des pays où le système de soins est défaillant. Cette aide médicale aux populations, entièrement gratuite et trop peu mise en valeur, coûte 4,5 millions d'euros par an, tous théâtres confondus.

Afin de mieux faire accepter sa présence sur les territoires où elle stationne, l'armée française procède à des actions civilo-militaires : il s'agit de mener, si possible avec l'aide des autochtones et pour un budget limité, des opérations au profit des populations locales : rénovation d'un pont, d'un bâtiment public, d'un dispensaire, d'une pompe à eau…

Sur décision politique, la France assure depuis plusieurs années le soutien total ou partiel de contingents étrangers au sein des coalitions auxquelles elle participe. Depuis 2000, elle assure ainsi le soutien complet – hébergement, logement, alimentation… – du contingent marocain stationné à Novo Selo, au Kosovo, et principalement utilisé à la garde du camp. Ce bataillon, qui comptait 450 soldats à l'origine a été réduit, début 2009, à 220 hommes. L'« arrangement technique » signé le 25 mars 2000 entre les deux pays prévoit un montant mensuel de dépenses limité à 149 400 euros. Le coût cumulé depuis 2000 du soutien de ce bataillon s'est élevé à 21,3 millions d'euros, entièrement prélevés sur le budget consacré aux OPEX.

Au Tchad, l'armée française a fourni gratuitement au contingent polonais divers matériels d'un coût de 2,4 millions d'euros, dont un système d'hébergement pour 150 hommes ; aux 60 Albanais d'Abéché qu'elle nourrit gratuitement, elle a prêté des véhicules pour leur permettre de mener à bien leur mission de garde des camps, et des habillements tropicaux. Aux Ukrainiens, elle fournit gratuitement 350 m3 de carburant aéronautique par mois et de l'alimentation pour 18 militaires, pour un coût de 8,5 millions d'euros. À la Russie, elle fournit également un module destiné à loger 150 personnes… Le coût total de cette aide aux contingents étrangers est évalué, pour le théâtre tchadien, à 12,68 millions d'euros en 2008.

Enfin, en Afghanistan, l'armée française, comme les autres armées alliées, contribue gratuitement à la formation de l'armée nationale afghane. Cet effort, dont le coût ne semble pas être précisément chiffré, est également imputé sur le budget des opérations extérieures du ministère de la défense alors qu'à bien des égards il s'apparente à une action de coopération.

Les rapporteurs demandent donc que soient bien distinguées, dans le coût des opérations extérieures, les dépenses qui relèvent réellement de la défense et celles qui ressortissent à la coopération ou à l'aide au développement. Il n'apparaît pas anormal que les actions relevant de l'action extérieure de la France soient financées, au titre de la LOLF, par les crédits du ministère des affaires étrangères plutôt que par ceux de la mission « Défense ».

Par ailleurs, la mission a constaté une sous-budgétisation initiale chronique.

Pendant longtemps, le coût des opérations extérieures n'a pas été inscrit en loi de finances initiale car il était considéré comme un événement exceptionnel et imprévisible. En 2003, pour la première fois, 24 millions d'euros ont été provisionnés pour des opérations dont le coût réel s'est élevé, cette année-là, à environ 630 millions. Partie de rien, la budgétisation des OPEX s'est faite très lentement pour plafonner à 55 % du montant réel en 2007 et en 2008. Dans le cadre du budget pluriannuel 2009-2011, cette provision a été portée à 510 millions. Toutefois, compte tenu du niveau de l'engagement extérieur de la France, cette somme ne suffira même pas à couvrir les deux tiers des dépenses attendues cette année.

Jusqu'à présent, les surcoûts non provisionnés ont été le plus souvent compensés en cours d'exercice par l'annulation de crédits d'équipement. Cette procédure, préjudiciable au bon déroulement des programmes d'équipement, a conduit au respect très approximatif des dernières lois de programmation. Les armées étant tenues d'avancer la trésorerie des OPEX, cette manière de procéder a contribué à accroître les reports de crédits d'un exercice sur l'autre tout en augmentant les intérêts moratoires dus aux fournisseurs payés avec retard. Ainsi, selon l'état-major des armées, la part des surcoûts restés à la charge du ministère de la défense et financée par les crédits d'équipement depuis 1998 s'élèverait à près de trois milliards d'euros.

À ce sujet, les rapporteurs formulent deux propositions.

D'une part, il faut poursuivre l'amélioration de l'inscription en loi de finances initiale de la totalité du coût prévisionnel des OPEX : pour une raison de sincérité budgétaire, celle-ci doit être plus près de 80 % que de 55 %.

D'autre part, lorsque le Gouvernement présente au Parlement une demande d'autorisation de renouvellement d'opérations extérieures, il doit, en application de la réforme constitutionnelle, communiquer une actualisation des coûts et une étude d'impact pour chaque théâtre d'opération.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Sur la base de ce constat, la mission a formulé des propositions visant à réduire les coûts.

La première proposition concerne les hébergements de nos militaires.

Lorsqu'une opération extérieure est entreprise, les troupes déployées sont d'abord hébergées dans des logements provisoires, généralement sous des tentes. Ces dernières sont ensuite « winterisées », c'est-à-dire isolées. Puis, l'opération durant, des logements préfabriqués sont achetés, acheminés et installés. Dans un troisième temps, au bout d'un certain nombre d'années, la fabrication d'éléments en « dur » est décidée.

L'expérience montre que, sauf cas très particuliers, les opérations extérieures doivent s'envisager dans la longue durée. L'OPEX en Bosnie a duré 15 ans, celles au Kosovo, en Côte d'Ivoire, au Tchad, en Afghanistan se prolongent, respectivement, depuis 10, 7, 23 et 8 ans, sans réelle perspective de désengagement à court terme, sauf peut-être pour le Kosovo.

De surcroît, comme l'a souligné M. Louis Giscard d'Estaing, les logements préfabriqués de type Algeco – appelés Corimec dans l'armée – doivent être laissés sur place : cela coûte très cher de les acheminer vers d'autres théâtres d'opérations et encore plus de les rapporter en France. La solution la plus rationnelle semble être de construire aussitôt que possible des bâtiments durables pour loger nos troupes, avec des schémas standardisés assurant des constructions sécurisées bien définies. Le coût de la main d'oeuvre locale et des matériaux rend la construction moins onéreuse que l'achat et l'acheminement de préfabriqués qui, bien que censés être mobiles, ne pourront que très difficilement être réutilisés.

Outre les économies financières réalisées sur le long terme, les constructions présentent plusieurs avantages : elles assurent une bien meilleure protection contre les roquettes et tout autre type d'attentat, comme nous l'avons vu en Afghanistan ; elles procurent un meilleur confort pour les personnels ; elles assurent du travail à la main d'oeuvre locale – ce qui est un élément important dans l'acceptation de nos troupes ; elles peuvent être rétrocédées aux autorités locales lors du retrait des troupes françaises.

Certes, une installation de ce type présente l'inconvénient de donner d'emblée le signal d'une installation longue. Mais cela peut aussi avoir l'effet bénéfique de montrer la détermination de notre pays.

Aussi considérons-nous que, lorsqu'une opération extérieure est lancée et s'il n'est pas expressément décidé que sa durée sera limitée à quelques mois, les armées ont intérêt à bâtir rapidement des installations pérennes aussi standardisées que possible qui, outre les avantages sécuritaires, feront réaliser, sur la durée, des économies substantielles en matière d'infrastructures.

Une autre proposition est relative à la facturation des prestations rendues par la France.

Au sein de coalitions comme l'Otan ou l'Union européenne, les services rendus de nation à nation, comme l'alimentation ou le transport, font l'objet d'une facturation. Or, la France ne facture pas à ses alliés les prestations qu'elle leur fournit au même niveau qu'elle s'acquitte de ses factures. Notre pays facture ses prestations à « coût coûtant », alors que les autres nations facturent un coût global qui intègre l'amortissement.

C'est ainsi que l'alimentation quotidienne d'un militaire français par l'armée néerlandaise en Afghanistan nous est facturée 50 euros, alors que la France en réclame beaucoup moins aux armées dont elle nourrit les soldats – et dans certains cas, elle ne leur présente même pas de facture.

Un interprète afghan recruté à Kaboul par les forces françaises est rémunéré environ 600 euros par mois. Mais lorsque la France doit exceptionnellement faire appel à un interprète fourni par une autre nation de la coalition, ce service lui est facturé 2 500 euros par mois !

Cette forme de candeur aboutit à ce que, pour l'année 2009, la France doit 7,45 millions d'euros à ses alliés quand ceux-ci ne lui doivent que 4,91 millions d'euros.

Au Tchad, ce sont les géographes de l'armée française qui ont réalisé la cartographie complète de l'est du pays. Lorsque la Minurcat est arrivée, sans la moindre carte, les données cartographiques appartenant à l'armée française ont été cédées à l'ONU pour une somme dérisoire, à peine plus que le prix du papier sur lequel elles sont imprimées.

Nous proposons de facturer les prestations servies par la France aux armées alliées selon les méthodes de calcul utilisées pour facturer les prestations équivalentes à nos forces, en se fondant sur le coût global et non sur le coût marginal.

Une troisième proposition résulte de la comparaison entre le coût de location d'un matériel et son coût d'achat.

Les armées utilisent sur la plupart des théâtres d'opérations des véhicules civils, parfois achetés mais généralement loués. C'est le cas en Afghanistan, pour 28 véhicules tout-terrain, pour une bonne partie blindés. Si le prix de location d'une voiture non blindée reste acceptable – 600 euros par mois –, le coût de la location d'un 4X4 blindé est de 6 600 euros par mois. Il est vrai que le marché est étroit et le nombre de prestataires faible, ce qui ne favorise pas la concurrence.

Selon les calculs du ministère de la défense, une voiture blindée louée reviendrait, sur trois ans, à peine plus cher – 37 000 euros de plus, quand même – qu'une voiture achetée. Outre que le mode calcul, dont vous trouverez le détail dans le rapport, nous paraît discutable, ces 37 000 euros d'économie par véhicule ne nous paraissent pas négligeables, sans compter que l'état-major des armées semble oublier que, contrairement à une voiture louée, une voiture achetée peut être revendue. En réalité, nous avons le sentiment que les armées préfèrent louer plutôt qu'acheter, même si cela revient plus cher aux finances publiques, car ce qui est loué est imputé en frais de fonctionnement remboursables par Bercy en fin d'exercice, alors que les achats d'équipement ne sont pas remboursables. Des raisons procédurales et la mésentente entre les deux ministères ont donc pour effet un gaspillage d'argent public.

Nous recommandons donc de privilégier l'acquisition lorsqu'il apparaît que le coût de location d'un matériel, notamment d'un véhicule, est supérieur, pour la durée d'utilisation envisagée, au coût d'achat.

Une quatrième proposition a trait à la lutte contre la piraterie maritime.

Depuis quelques années, la piraterie maritime se développe sur une grande échelle. Malgré les mises en garde répétées des autorités françaises, nombre de navires battant pavillon national – des plaisanciers comme des navires marchands – continuent à fréquenter les eaux dangereuses du Golfe d'Aden, notamment. Certains de nos compatriotes ont été victimes d'enlèvements, et, pour les libérer, les armées ont dû mettre en place des dispositifs lourds et coûteux. La vie de nos soldats a été mise en danger à l'occasion de chacune de ces opérations. Si la décision de mener ces missions pour sauver des vies humaines ne se discute pas, il n'en demeure pas moins que ces missions permettent également de récupérer les navires détournés ; or ce sauvetage de biens matériels est réalisé au profit de propriétaires et d'assureurs à qui il ne vient parfois même pas l'idée d'écrire une lettre de remerciement au ministre de la défense.

Il n'y a aucune raison pour que coût du sauvetage d'un navire – pas celui d'un otage – ne soit pas facturé au propriétaire ou à l'assureur du bâtiment en question. Outre le dédommagement que le ministère de la défense recevrait, on peut penser que la menace de cette sanction financière aurait une vertu pédagogique et pourrait conduire armateurs et plaisanciers à mieux respecter les mises en garde des autorités françaises. Le commandant du Ponant, qui a été victime d'un acte de piraterie, m'a indiqué que son armateur, considérant qu'il était plus simple de passer par cette route, l'a renvoyé plusieurs fois dans le Golfe d'Aden. Ce faisant, non seulement il prend un risque non pour lui-même, mais, de plus, il en fait courir un pour nos forces armées.

Nous recommandons donc que toute intervention militaire aboutissant à la récupération d'un navire mis en difficulté par un acte de piraterie fasse l'objet d'une facturation au propriétaire ou à son assureur.

Une cinquième proposition a trait au matériel saisi en opération.

Le budget contraint de la mission « Défense » ne permet pas toujours aux forces de disposer de tout le matériel dont elles peuvent avoir besoin. Or, les opérations permettent parfois de réaliser des prises qui pourraient être réutilisées par les armées. C'est le cas des embarcations rapides utilisées par les narcotrafiquants aux Antilles et en Méditerranée – les go fast. Nous proposons donc que la législation soit modifiée pour permettre aux armées de réutiliser pour leur propre compte le matériel saisi en opération, en particulier les embarcations rapides saisies lors d'arrestations de narcotrafiquants, ou pour l'accomplissement de leur mission ou au moins comme réserve de pièces de rechange. À l'heure actuelle, le matériel saisi pourrit dans des hangars.

Nous considérons enfin que le Parlement doit s'intéresser à l'externalisation.

La volonté de recentrer les forces sur leur coeur de métier a conduit l'état-major des armées à développer un vaste projet en la matière. Cette externalisation n'est réalisable que sur des théâtres d'opération stabilisés. En effet, dans une situation potentiellement dangereuse, confier des tâches à des sociétés privées reviendrait à exposer des civils aux dangers de la guerre et constituerait un poids pour les militaires qui devraient, en plus de leur mission, assurer la protection de ces civils. Le recours à des entreprises privées reste très utile dans des domaines qui ne relèvent pas du coeur de métier des armées comme la construction ou l'agrandissement de bases, la fourniture d'eau, de groupes électrogènes ou de produits alimentaires.

Toutefois, la répartition des marchés accordés aux entreprises peut créer un risque politique. Ainsi, selon les statistiques du ministère de la défense, 96 % des entreprises travaillant pour l'Eufor au Tchad sont des multinationales, souvent européennes ; seuls 4 % des marchés sont donc récupérés par les entreprises tchadiennes. Il n'est pas rare de voir les autorités locales manifester leur insatisfaction devant la faible place faite aux entreprises de leur pays. C'est une des raisons pour lesquelles les militaires français tentent, au Tchad comme en Afghanistan, de favoriser les entreprises locales.

Par ailleurs, compte tenu des rémunérations versées par les forces françaises, il est fréquent qu'un interprète ou un personnel de restauration soit mieux rémunéré qu'un policier ou un professeur. Le risque existe donc de voir des professionnels particulièrement qualifiés – des universitaires ou des chirurgiens, par exemple – abandonner leur métier et priver leur pays de leurs compétences parce que l'interprétation est plus rémunératrice.

Autre inconvénient : l'externalisation de services se traduit par la passation de contrats qui ne sont pas toujours d'une grande souplesse. Ainsi, l'une des raisons du coût élevé des opérations menées au Tchad tient à ce que les contrats passés avec le secteur privé pour la construction et le fonctionnement du « camp des étoiles », à Abéché, l'ont été pour 2 000 soldats. Or, au cours de l'année 2008, ce camp a plutôt hébergé 1 000 à 1 500 personnes en moyenne, mais les prestataires ont argué de leurs investissements pour facturer un montant de prestations correspondant à 2 000 occupants. Si ce camp avait été géré avec des moyens uniquement militaires, l'adaptation aurait été certainement plus facile.

Enfin, il arrive que, dans certaines régions déshéritées, l'économat des armées ne trouve pas de prestataires de services ou qu'il en trouve un seul. Dans ce cas, le bénéfice financier de l'externalisation est loin d'être évident.

Pour toutes ces raisons, les rapporteurs ont appelé l'attention de la Commission des finances sur l'utilité de s'intéresser de plus près à l'externalisation, menée à grands pas par le ministère de la défense, en créant éventuellement une mission d'évaluation et de contrôle sur le coût et les bénéfices attendus de l'externalisation au sein de ce ministère.

PermalienPhoto de François-Michel Gonnot

Quel est le montant des remboursements versés par l'ONU et l'Otan à la France pour sa participation aux OPEX ? Quelle part représentent-ils par rapport au coût des OPEX en 2008, à savoir 852 millions d'euros ? Ces remboursements reviennent-ils dans le budget général, sachant que ceux de l'ONU sont estimés à 71,6 millions d'euros en 2009 ?

Quel est le rôle joué par les réservistes dans les OPEX et quel est leur coût ? Comme la pratique est en train de s'installer, …

PermalienPhoto de François-Michel Gonnot

. j'aimerais savoir si le coût d'un réserviste est le même que celui d'un militaire.

Enfin, quel est le coût de la base d'Abou Dhabi ?

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Le tableau figurant à la page 33 du rapport indique les remboursements de l'ONU en 2008 et les prévisions pour 2009 par théâtre d'opération.

Le remboursement le plus important concerne la FINUL, au Liban : il a été de 34 millions d'euros en 2008 et devrait se monter à 54 millions d'euros en 2009.

Il existe un petit décalage, lié aux procédures de remboursement, entre la dépense supportée par les armées et le remboursement réalisé par l'ONU. Après avoir transité par Bercy, les sommes sont recréditées sur le budget de la défense et viennent en déduction du surcoût des OPEX.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Je crois qu'elles reviennent en fonctionnement.

Les dépenses de personnels, par exemple, sont remboursées sur la base forfaitaire de 1 028 dollars par homme et par mois, ce qui explique que certains pays soient plus motivés que d'autres pour que leurs troupes soient placées sous mandat ONU. Dans certains cas, ce forfait est supérieur à la solde exprimée en monnaie locale alors que, dans d'autres – c'est le cas pour la France –, il ne couvre pas la totalité des rémunérations.

Nous vérifierons ce point avec la Cour des comptes.

Lors de l'examen du projet de loi de programmation militaire, j'ai déposé un amendement afin que les réservistes soient plus largement utilisés dans le cadre des OPEX. J'estime que ce point n'est pas très clair dans la LPM. Les derniers chiffres qui nous ont été fournis font état de 100 réservistes en opérations militaires extérieures, ce qui est une évolution préoccupante. Toutes les personnes sous contrat ESR – qu'il s'agisse d'ingénieurs des travaux publics ou de spécialistes de l'eau, des télécommunications ou des infrastructures – devraient être davantage impliquées dans ces opérations, notamment quand elles sont liées à des entreprises françaises susceptibles de participer aux travaux de reconstruction du pays.

La base d'Abou Dhabi n'est pas une opération militaire extérieure mais une opération de forces prépositionnées, ce qui répond à une autre logique.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je précise que les coûts d'installation de la base d'Abou Dhabi, pour sa partie maritime et terrestre comme pour sa partie aérienne, sont entièrement pris en charge par l'Émirat. Cette opération n'en induit pas moins des coûts pour l'acheminement et le rapatriement des hommes et la prise en charge des familles.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

S'agissant du remboursement des dépenses, je précise que les versements de l'ONU ont lieu en dollars, ce qui nous pénalise compte tenu des fluctuations monétaires.

PermalienPhoto de Michel Voisin

Il existe un régiment, basé à Lyon, qui est spécialisé dans les actions civilo-militaires. Avez-vous une idée des résultats et du coût de son engagement dans les opérations extérieures ?

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Je ne possède pas d'indications précises sur les coûts. Ce type d'actions présente un grand intérêt stratégique, qui va bien au-delà de leur aspect humanitaire : cela permet de montrer que nous ne réalisons pas que des missions de guerre. J'ai pu constater en Afghanistan que c'est un moyen efficace pour fraterniser avec les populations locales et pour obtenir des renseignements.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Le budget annuel de ces opérations ne dépasse pas quelques centaines de milliers d'euros pour l'Afghanistan, c'est-à-dire beaucoup moins que les millions d'euros de crédits qui pourraient être directement versés aux autorités afghanes, selon les indications qui nous ont été fournies par Pierre Lellouche.

Ces actions revêtent une grande importance pour la sécurité des troupes, car elles permettent effectivement de fraterniser avec les populations locales.

PermalienPhoto de Christian Ménard

Je trouve intéressante l'idée de facturer les opérations de sauvetage des navires qui n'auraient pas respecté les mises en garde. Il reste que ce ne sera pas aisé : nous ne pourrons pas être les seuls à facturer ces coûts, de sorte qu'il faudra sans doute envisager une action commune au plan européen.

Vous avez fourni quelques éléments de réponse s'agissant de l'aide financière apportée au détachement marocain au Kosovo. Pour ma part, j'aimerais savoir si d'autres pays sont dans la même situation que nous et s'ils procèdent de façon similaire.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Je ne pourrais pas citer d'exemples précis, mais il me semble que les États-Unis sont dans le même cas que nous.

Cela étant dit, le fait que nous entretenions 220 soldats marocains pour assurer la protection de 1 000 hommes, dans le camp de Novo Selo, peut laisser songeur.

PermalienPhoto de Nicolas Dhuicq

J'ai l'impression que les Américains cherchent à gagner des parts de marché grâce aux opérations civilo-militaires, et nous le coeur des populations. D'autre part, je ne suis pas sûr que les résultats des dispositifs multilatéraux auxquels nous participons soient toujours probants, notamment en Asie centrale.

Ne pensez-vous pas que l'on pourrait envisager une péréquation – en particulier avec les Allemands en Afghanistan – prenant en compte les pertes humaines et les dépenses réelles ?

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Il existe des différences d'approche : les Allemands sont moins engagés que nous sur le plan militaire dans les zones de combat, mais ils sont davantage présents sur le plan économique grâce au dynamisme de leurs entreprises. Nous devrons nous efforcer d'impulser une nouvelle orientation associant davantage la question de la sécurisation du terrain et celle de la reconstruction.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

Personne n'empêche les Français de participer à la reconstruction en Afghanistan. Ce sont nos entreprises qui ne se portent pas candidates. D'où l'intérêt d'un plus grand recours aux réservistes.

PermalienPhoto de Nicolas Dhuicq

Quid des risques humains encourus ? Chacun sait que tous les pays ne s'exposent pas de façon identique. Or, on ne prend en compte que les effectifs déployés sur le terrain et les dépenses.

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Chaque pays apporte sa contribution. Comme l'indique le tableau figurant à la page 61 du rapport, le Canada a subi 112 pertes humaines en Afghanistan, contre 29 pour l'Allemagne et 27 pour la France. Il faut ajouter à cela, pour être complet, que le Canada n'est pas non plus très présent sur le terrain d'un point de vue économique.

PermalienPhoto de Alain Marty

Les 160 derniers soldats du régiment de Sarrebourg reviennent d'Afghanistan, vendredi matin. J'avais demandé, au mois de février, à me rendre sur le terrain au titre du lien entre l'armée et la défense, mais cela n'a pas été possible. Je voudrais exprimer ici ma très grande déception.

Ma question porte sur le matériel utilisé par les unités déployées en OPEX, notamment en Afrique. Ce matériel est tantôt prépositionné, comme j'ai pu le constater au Tchad, tantôt envoyé en même temps que les troupes, par exemple en Côte-d'Ivoire. Quelle est, selon vous, la solution optimale d'un point de vue économique ?

PermalienPhoto de Louis Giscard d'Estaing

Tout dépend des théâtres d'opération et des matériels concernés. Au Liban, par exemple, il est très vite apparu préférable que les chars Leclerc restent sur place au lieu de suivre les unités. Cela étant, on constate des problèmes de maintien en condition opérationnelle, notamment pour les véhicules de l'avant blindés, qui montrent des signes d'usure au bout de plusieurs mois. Il faut arbitrer en fonction des coûts.

Nous manquons encore d'informations – le ministère devra nous les fournir –, mais nous savons que les coûts de logistique sont très élevés au Tchad et en Afghanistan.

D'autre part, je n'ai pas besoin de vous rappeler les difficultés auxquelles nous nous heurtons pour transporter le matériel lourd sur les théâtres éloignés compte tenu du retard du programme A400M. Dans ces conditions, il peut être préférable de gérer le matériel sur place, tout au moins s'il est possible de le maintenir en condition opérationnelle au plan local.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Je prends acte de votre doléance, monsieur Alain Marty. Je suis d'autant plus consterné que j'étais intervenu auprès du ministre. D'autres collègues ont visiblement eu plus de chance : Philippe Folliot, par exemple, a pu se rendre en Afghanistan.

Certains militaires estiment qu'il y a trop de parlementaires en visite sur ce théâtre d'opération. Toutefois, c'est notre devoir de nous rendre là où notre drapeau flotte et là où nos soldats risquent leur vie. Quelles que soient les gênes que cela peut occasionner à l'armée, nous avons un devoir de contrôle.

PermalienPhoto de Alain Marty

Pour sa part, le colonel du régiment m'avait fait part de sa tristesse à l'idée que je ne pourrais pas me rendre sur place.

PermalienPhoto de Jean-Jacques Candelier

Merci à nos collègues pour cette intéressante présentation, qui donne envie de lire leur rapport de très près. Je n'y manquerai pas.

Les opérations extérieures, au titre desquelles nous déployons plus de 12 000 hommes et femmes en dehors de nos frontières, coûtent fort cher : il est question de près de 1 milliard d'euros pour l'année en cours. La France est l'un des pays les plus engagés au monde dans ce domaine.

Les travaux de la MEC ont mis en exergue des gisements d'économies, mais aussi des dysfonctionnements. Je pense notamment à la formation gratuite que nous dispensons aux soldats afghans, à la facturation de certaines prestations à un prix dérisoire, ou encore aux missions de sauvetage des victimes de piraterie, fort onéreuses pour l'État.

Cessons de jouer aux gendarmes et aux mécènes : nous jetons l'argent par les fenêtres. L'Afghanistan n'est pas notre guerre, et nous n'avons rien à faire dans ce pays. Montrons-nous économes et réalistes en cessant de dépenser à tort et à travers des crédits dont nous aurions grand besoin pour d'autres missions dans notre pays.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

L'objet de notre rapport n'était pas de porter une appréciation sur l'opportunité des OPEX en cours, ni sur leur stratégie. Nous demandons seulement une plus grande transparence en vue d'une optimisation des moyens – c'est le titre de notre rapport.

PermalienPhoto de Philippe Folliot

J'ai sans doute eu plus de chance que notre collègue Alain Marty, puisque j'ai pu me rendre en Afghanistan. Cela étant, j'ai dû régler moi-même les frais de déplacement, l'armée ne prenant en charge que les frais de séjour. C'était l'une des conditions pour que je puisse me rendre à Kaboul.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Cela me paraît tout à fait inacceptable. On peut comprendre un certain nombre d'exigences, notamment en ce qui concerne les dates des déplacements ; en revanche, chacun sait qu'il y a des vols militaires qui décollent à moitié vides. Les emprunter ne coûterait pas un euro de plus à la République ! Il y a un problème avec le ministère.

PermalienPhoto de Philippe Folliot

Pour l'aller, je précise que j'ai emprunté un vol de relève, qui devait initialement m'être facturé. Pour le retour, j'ai dû acheter une place sur un vol commercial.

Sur le fond, il me semble important que nous puissions nous rendre sur le terrain pour accompagner nos hommes, mais aussi pour nous rendre directement compte de la situation.

Compte tenu de la faiblesse des crédits disponibles, plusieurs collectivités du Tarn se sont associées pour financer des activités CIMIC – civilo-militaires – sur le terrain. Elles l'ont fait de bon coeur, mais on peut légitimement penser que c'est un rôle qui devrait revenir à l'État.

Quant aux services de santé et au soutien sanitaire des populations, il faut être conscient que ce sont des efforts essentiels qui portent leurs fruits.

S'agissant des matériels confisqués, il ne faudrait pas oublier la question du maintien en condition opérationnelle. J'ai pu constater en Guyane qu'il n'était pas possible, pour des raisons budgétaires et juridiques, d'entretenir les bateaux saisis dans le cadre de la lutte contre l'orpaillage clandestin.

PermalienPhoto de Gilbert Le Bris

Je suis plus que réticent à l'idée de faire payer des opérations de sauvetage en mer par leurs bénéficiaires si ces derniers n'ont pas respecté les mises en garde officielles. Cela pourrait en effet poser des problèmes juridiques et humanitaires considérables. Ne modifions pas le droit applicable au détour d'un rapport, sans réaliser une étude précise : d'autres interventions de l'État pour protéger des biens – en cas de conflit armé, par exemple, ou pour des motifs humanitaires – risquent d'être affectées.

PermalienPhoto de Guy Teissier

Notre collègue pense peut-être aux commandos de marine susceptibles d'être embarqués sur des thoniers pendant les campagnes de pêche.

PermalienPhoto de Françoise Olivier-Coupeau

J'avais déposé un amendement correspondant aux préconisations du rapport lors de l'examen de la loi de programmation militaire. Arguant – à juste titre – que la lutte contre la piraterie s'inscrit dans un cadre international, le ministre avait émis un avis défavorable, mais il s'était engagé à ce qu'un travail soit réalisé sur les conditions d'application de la mesure.

La séance est levée à onze heures dix.