Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2012 (n° 3775), la commission a auditionné Mme Marie-Luce Penchard, Ministre auprès du ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer, des Collectivités territoriales et de l'Immigration, chargée de l'Outre-Mer sur les crédits de la mission Outre-Mer.
Madame la ministre, nous vous auditionnons aujourd'hui dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2012. Je vous remercie de votre présence devant nous, alors que vous étiez il y a quelques minutes encore avec le Premier Ministre et le ministre de l'Intérieur afin d'évoquer les événements qui touchent actuellement Mayotte. Je vous laisse donc la parole afin de nous présenter les crédits de la mission « outre-mer », sur lesquels notre rapporteur, M. Alfred Almont, émettra ensuite un avis.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur Alfred Almont, Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de bien vouloir excuser mon retard. Vous l'avez compris, la situation à Mayotte est instable, et certains de vos collègues m'ont d'ailleurs interrogée lors des questions d'actualité hier et aujourd'hui sur la « cherté de la vie » dans ce département. Je vous remercie donc de m'avoir attendue.
Pour la troisième année consécutive, je me présente devant vous afin de vous exposer le budget de la mission « outre-mer ». Avant d'entrer dans le détail des crédits alloués à cette mission, je tiens à souligner que l'année 2011 a été une celle de la concrétisation à la fois de la loi pour le développement économique des outre-mer, la Lodéom, et des décisions du Conseil interministériel de l'outre-mer du 6 novembre 2009, le CIOM. Lors de mes derniers déplacements dans les départements ultramarins, j'ai pu m'assurer de la réalité de ces mesures sur le terrain. Ce matin d'ailleurs, le Conseil des ministres a été l'occasion de faire le point sur les avancées de ce plan d'action.
J'en viens à présent au projet de budget pour 2012. D'abord, permettez-moi de rappeler le contexte dans lequel il a été élaboré. Vous le savez, les pays industrialisés traversent une grave crise de la dette. Le Gouvernement a donc fait le choix de réduire le déficit public avec pour objectif de le ramener à 5,7 % de la richesse nationale en 2011, à 4,6 % en 2012 et à 3 % en 2013. Pour ce faire, le Premier ministre a annoncé en août dernier un plan de réduction de la dépense fiscale représentant 11 milliards d'euros d'économies sur 2012, ainsi qu'une diminution supplémentaire d'un milliard d'euros sur les dépenses budgétaires prévues pour 2012. L'outre-mer, comme tous les ministères, participera à cet effort collectif, même si le projet de budget que vous avez reçu ne tient pas compte de ce dernier objectif. Les mesures d'économies qui concernent le ministère chargé de l'outre-mer préserveront les priorités en faveur du logement, du développement économique, de l'emploi, de la continuité territoriale et le soutien apporté par l'État aux collectivités ultramarines dans leur politique d'aménagement du territoire.
En réalité, pour l'ensemble de la mission outre-mer, les économies supplémentaires représentent 48 millions d'euros en autorisations d'engagement et 56 millions en crédits de paiement. Le budget de la mission outre-mer pour 2012 s'établit in fine à 2 131 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 1 979 millions en crédits de paiement.
Il nous est donc permis d'affirmer deux choses. D'abord, ce budget permet de poursuivre en 2012 les principaux engagements pris pour l'application de la Lodéom et du CIOM, car la contribution à l'effort national a été bâtie de manière ciblée et équilibrée. Ensuite, le niveau des crédits de paiement mis à disposition de la mission se situe en 2012 à un niveau satisfaisant au regard de nos besoins.
Permettez-moi d'évoquer plus en détails l'application de la Lodéom et du CIOM. En 2011, les derniers décrets de la loi d'orientation sont parus. L'entrée en vigueur de l'ensemble de ces décrets a produit tout au long de l'année des effets positifs sur nos économies ultramarines : je pense notamment à la prime « bagasse », qui a donné un nouveau souffle à la filière de la canne à sucre. Ainsi, plus de 50 millions d'euros ont été versés aux planteurs de canne de la Guadeloupe et de la Réunion. Les aides budgétaires aux entreprises en matière de rénovation hôtelière ont été fortement appréciées, et la création des zones franches d'activités en 2010 a contribué au développement des secteurs prioritaires comme l'agroalimentaire. On estime aujourd'hui à 75 millions d'euros le montant des dépenses fiscales résultant des nouveaux dispositifs. Dès lors, on peut en déduire que grâce à ce budget, le gouvernement maintient son engagement au service du développement économique des territoires ultramarins, et que l'outre-mer participe à l'effort de rationalisation des dépenses fiscales détaillé par mes collègues François Baroin et Valérie Pécresse. Enfin, le gouvernement ne remet nullement en cause son engagement en faveur de l'outre-mer.
Pour ce qui est de la mise en oeuvre du CIOM, je l'ai rappelé ce matin en Conseil des ministres, 90 % des 137 mesures sont réalisées ou très avancées. J'ai déjà eu l'occasion de vous le dire ici même, le 18 mai dernier, à l'invitation de plusieurs d'entre vous.
Le budget de l'outre-mer conservera en 2012 ses capacités d'intervention, en particulier sur les deux priorités qui sont les miennes : le logement et l'emploi, mais aussi sur la continuité territoriale et le soutien aux collectivités
L'engagement gouvernemental pour le logement outre-mer, en particulier pour le logement social, est en constante augmentation depuis 2007. La ligne budgétaire unique (LBU) a été « sanctuarisée » : elle atteint un niveau de 274,5 millions d'euros. La LBU demeure donc le socle du financement du logement social outre-mer. Nos efforts ont été couronnés de succès puisque près 7 500 logements locatifs sociaux sont financés en 2011 contre 6 200 en 2010. En somme la défiscalisation a démontré son effet de levier.
L'autre priorité de ce budget concerne l'emploi et la formation. Le service militaire adapté (SMA) se voit doté d'enveloppes stables afin d'offrir plus de places aux stagiaires. En 2011, le SMA a offert 4 000 places, soit 1 100 de plus qu'en 2010. Nous envisageons une montée en puissance pour l'année prochaine. Par ailleurs, le fonds exceptionnel pour la jeunesse a collecté près de 2,5 millions d'euros au profit de l'outre-mer en 2010.
S'agissant des contrats aidés, leur nombre a été porté à 52 270 pour 2011, contre 46 900 en 2010, soit une augmentation de près de 12 % par rapport à l'année passée. Ces contrats représentent aussi plus de 9 % du total national.
Concernant la continuité territoriale et de la formation en mobilité, des dispositifs qui favorisent directement l'emploi, l'aide prévue par la Lodéom est entrée en vigueur dans l'ensemble des territoires. Le premier bilan d'exécution a été réalisé : je peux d'ores et déjà vous affirmer que cette politique fonctionne bien. Sur les neuf premiers mois de 2011, près de 75 000 unités de voyage ont été délivrées au titre de la continuité territoriale. À la fin de l'année 2011, ce seront plus de 100 000 unités de voyage qui auront trouvé « preneur ». L'enveloppe annuelle de 45,3 millions d'euros qui y était consacrée sera bien consommée et je me félicite que cette somme soit d'ores et déjà reconduite l'an prochain. Pour 2012, je proposerai, dans les mois à venir, des mesures de corrections conformément à vos observations, s'agissant notamment des unités de voyage pour les territoires du Pacifique.
J'en viens à présent aux crédits du programme 138, consacré notamment à la compensation des exonérations de charges sociales. Pour 2012, le montant inscrit dans le projet de loi de finances correspond aux besoins estimés par les organismes de sécurité sociale. À cet égard, l'année 2011 a été l'occasion de réviser à mi-parcours ces programmations contractuelles, de les ajuster, de retirer les projets « en panne » et de rajouter de nouvelles initiatives, le tout à enveloppe constante. À ce titre, le volume des crédits prévus pour le financement des contrats de projet et de développement des territoires permettra d'atteindre un taux d'exécution en 2013 comparable à celui des contrats de projet en métropole et supérieur à celui de la génération précédente. Le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) voit son budget augmenter en 2012. Il sera doté, en effet, de 17 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 19 millions en crédits de paiement.
De façon plus spécifique, plusieurs mesures relatives à certains territoires répondent à un véritable besoin d'accompagnement. En Polynésie française, la réforme de la dotation globale de développement économique (DGDE) a connu sa première année d'application. Ce nouveau dispositif respecte l'autonomie de la Polynésie française et met l'accent sur le développement du territoire, en assurant la transparence et le contrôle des fonds publics.
La transformation de Mayotte en département est devenue effective le 31 mars dernier. Aujourd'hui, ce territoire connaît un large mouvement social sur le thème du pouvoir d'achat. Nous avons fait en sorte de maintenir les crédits alloués en ce territoire, notamment au niveau du FEI. Nous avons la volonté d'engager le plus rapidement possible le processus de la départementalisation, de manière à mettre en place les prestations sociales, et notamment le revenu de solidarité active, prévu dans le projet de loi de finances qui vous est soumis. En année pleine, ce seront ainsi près de 16 millions d'euros de revenus nets supplémentaires qui devraient être apportés à Mayotte au titre de la solidarité nationale. Le soutien financier à Mayotte se traduit également par la dotation de rattrapage et de premier équipement, d'un niveau de 8,9 millions, les crédits du contrat de projet 2008-2013, dotés d'environ 23 millions par an - hors LBU- en faveur du développement durable et de la modernisation des entreprises aquacoles, et de 19 millions en faveur du logement social.
Au total, en 2012, les crédits de la mission « outre-mer » dévolus à Mayotte représenteront 92,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 75 millions en crédits de paiement, alors que l'ensemble des crédits de l'État pour le territoire s'élève, je le rappelle, à 714 millions en autorisations d'engagement et à 674 millions d'euros en crédits de paiement, soit des progressions respectives de 3,2 % de 1,5 %. Ceci témoigne de l'effort pour accompagner ce territoire qui n'est pas un « parent pauvre » de la République mais au contraire bénéficie du plein soutien de l'État.
En guise de conclusion, je souhaiterais que vous reteniez que ce budget, comme les précédents, n'a qu'un but : il s'agit de redonner aux ultramarins les clés de leur développement et de les accompagner dans les projets qui sont les leurs.
Monsieur le président, Madame la ministre, mes chers collègues, l'année dernière, j'avais dû relever, avec une certaine inquiétude, que le budget de la mission « outre-mer » pour 2011 connaissait une baisse sensible par rapport aux années précédentes.
Cette année, nous l'avons bien compris madame la Ministre, le projet de budget de la mission se caractérise donc par une progression, notamment au niveau des autorisations d'engagements, avec une hausse de 1,1 %, les crédits passant de 2,15 à 2,79 milliards d'euros. Cette dynamique positive dans son ensemble, en dépit d'un contexte général difficile, appelle évidemment certaines nuances selon les programmes et, de manière encore plus précise, selon les actions présentées dans le projet annuel de performance. Vous venez de nous présenter dans le détail le projet de budget action par action. Je ne reviendrai donc pas sur les crédits prévus pour chacune d'entre elles mais me concentrerai sur quelques points qui ne manquent pas d'appeler l'attention.
S'agissant du programme « Emploi outre-mer », dont les deux actions sont appelées à faciliter, pour la première, la création d'emplois ainsi que l'accès au marché du travail et, pour la seconde, le soutien aux entreprises, je ne peux que me féliciter de l'augmentation constatée : 1,3 % en autorisations d'engagements et surtout 4,7 % en crédits de paiement. Le niveau de ce programme atteint un peu moins de 1,4 milliard d'euros. On peut encore se réjouir de voir le dispositif de l'aide au fret, destinée à améliorer la compétitivité des entreprises, se déployer réellement après des débuts difficiles dus, notamment, à des retards réglementaires. De même, pour l'aide à la rénovation hôtelière, les efforts de transcription de la Lodéom sont à souligner. Les crédits alloués au Service militaire adapté sont satisfaisants mais une question demeure : le calendrier prévoyant le doublement du contingent sera-t-il tenu ?
S'agissant du programme « Conditions de vie outre-mer », qui représente près de 642 millions d'euros, je constate que nous gagnons en autorisations d'engagements ce que nous perdons en crédits de paiements : +0,8% contre -0,8%. Je m'attacherai particulièrement à deux des sujets qui apparaissent primordiaux : le logement et la continuité territoriale.
Concernant le logement, permettez-moi d'abord de me réjouir de voir que la « sanctuarisation » de la LBU n'est pas mise en cause. Les actions de l'État sur le logement social neuf et la résorption de l'habitat insalubre se poursuivent, dans la continuité des décisions du CIOM du 6 novembre 2009 et de la Lodéom. Néanmoins, on ne saurait occulter que sur le terrain, les opérateurs du logement social sont de plus en plus demandeurs d'un produit d'accession sociale adapté à l'outre-mer. Ils sollicitent également une affectation de la LBU par zone, et la possibilité de consacrer une ligne de la LBU au logement évolutif social et à l'aide à l'amélioration de l'habitat.
Par ailleurs, tous les acteurs du logement regrettent que ne soit pas lancée une grande opération d'identification des besoins selon les territoires. Un tel recensement pourrait-il s'opérer sur les crédits du budget de la mission « outre-mer », et quel opérateur pourrait en être chargé ? En outre, si la LBU doit rester le socle du financement du logement social, la défiscalisation ne devrait-elle pas viser un objectif d'amélioration des taux d'effort en permettant par exemple une baisse des loyers ? Enfin, Madame la ministre, à la suite du vote de la loi initiée par notre collègue Serge Letchimy sur la lutte contre l'habitat indigne, la question se pose maintenant de connaître quand interviendra l'arrêté fixant les barèmes de l'aide financière de même que l'indispensable circulaire interministérielle relative aux modalités de mise en oeuvre des différentes dispositions ? Les attentes sont, croyez-moi, fortes sur le sujet !
J'en viens à présent à la continuité territoriale. La baisse des AE et des CP n'est semble-t-il pas significative - 0,3 %. À mes yeux, le fonds de continuité territoriale, créé par la Lodéom, a répondu à la plupart des attentes de nos concitoyens ultramarins, et notamment les publics les moins favorisés. J'apporterai toutefois quelques observations à ce constat globalement positif.
D'abord, comment expliquer que la Guyane apparaisse en retrait alors que ce dispositif est satisfaisant pour les autres départements et régions d'Outre-mer ? Ensuite, il semble qu'en l'état, le dispositif ne soit pas véritablement adapté pour nos concitoyens résidant en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. En effet, les aides sont versées sous conditions de ressources et il semblerait que les plafonds fixés soient trop bas dans ces régions, ne tenant ainsi pas assez compte des prix du billet d'avion particulièrement élevés. Peut-être conviendrait-il, Madame la ministre, de revoir le seuil de ces plafonds…
D'une manière globale, le projet de budget de la mission apparaît plutôt satisfaisant. Il s'inscrit dans le cadre d'une programmation pluriannuelle des finances publiques, marquée bien sûr, comme l'année dernière, par les effets de la crise de la dette et la volonté du gouvernement de réduire le déficit. Le Premier ministre a par ailleurs exprimé sa volonté, lors de la présentation du budget, de réduire d'un milliard d'euros le projet de budget pour 2012, en plus des onze milliards d'euros économisés grâce à la réduction des dépenses fiscales et de certaines niches sociales. À ce stade, disposez-vous, Madame la ministre, d'informations concernant les sources de cette économie : pouvez-vous nous dire si le projet de budget de la mission « outre-mer » est touché, et dans quelle mesure, par la réduction annoncée ? Si tel devait être le cas, notre appréciation générale serait naturellement atténuée.
Nous sommes donc tous conscients, madame la Ministre, mes chers collègues, de l'exigence qu'il y a à réduire le déficit public et de la nécessité pour l'outre-mer de participer à l'effort demandé à tous. Le souhait qui est à l'évidence largement formulé aujourd'hui est de voir cet effort équitablement réparti.
Notre échange ne saurait passer sous silence certains dispositifs du PLF, de nature fiscale qui, au delà de la mission outre-mer, concernent et parfois affectent les territoires ultramarins. Le gouvernement n'a pas d'autre choix pour faire face à la crise de la dette que d'assurer en priorité la maîtrise de la dépense publique. Mais comment ignorer en effet que de nombreuses voix s'élèvent encore dans ces territoires, celles des milieux socio-professionnels en particulier, mais aussi des collectivités, et plus largement des élus, pour en appeler à la juste répartition de l'effort demandé, faisant valoir notamment le coût de la vie comme le niveau des revenus ?
Les territoires d'outre-mer ont fourni un important effort à l'occasion de l'adoption de la Lodéom. Ils ont amplement participé à l'action de réduction des dépenses fiscales menée l'an dernier. Ainsi, ont-ils supporté la réduction homothétique de l'avantage en impôt prévu par l'article 199 undecies B du Code général des impôts ainsi que l'aménagement des avantages fiscaux à l'investissement dans la production.
Force est de constater que de nouvelles contributions sont encore demandées à l'outre-mer dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2012.
D'abord, le gouvernement propose de poursuivre l'effort de diminution et de rationalisation de la fiscalité dérogatoire. Ainsi, l'article 45 du projet de loi de finances propose une nouvelle réduction de 10 % sur l'avantage prévu par l'article 199 undecies B du Code général des impôts. Il faut toutefois se réjouir que cette mesure ne s'applique qu'au périmètre déterminé par la loi de finances initiale pour 2011.
Ensuite, je pense à l'article 4 du PLF, voté en première partie, qui supprime le dispositif d'abattement d'un tiers sur le résultat soumis à l'impôt sur les sociétés des exploitations situées dans les départements d'outre-mer. Comme vous l'avez déjà souligné, cette disposition devrait rapporter cent millions d'euros à l'État et n'était plus justifiée dans la mesure où elle bénéficiait surtout aux plus grandes entreprises, et elle était moins efficace que la zone franche d'activité pour les PME. Néanmoins, il est difficile de comprendre là encore que la différenciation ne soit pas intervenue pour faire en sorte que ce dispositif soit maintenu pour les plus petites entreprises, alors qu'un récent rapport de l'inspection générale des finances sur les dépenses fiscales indiquait que 46 % du coût de cette mesure bénéficiait à des entreprises de moins de neuf salariés !
L'année dernière, à la même époque, je vous exprimais déjà ma crainte face à l'instabilité des dispositifs
Bien évidemment, nous enregistrons cette année que des fonds spécifiques sont mis à disposition de l'Agence française de développement (AFD) pour favoriser l'accès aux prêts bancaires et susciter la confiance du secteur bancaire. Ces actions qui visent à permettre aux collectivités de développer leurs capacités d'investissement, viendront compléter celles menées sur le terrain par des collectivités qui n'ont pas hésité à s'engager. L'AFD a par ailleurs complété sa gamme d'intervention en direction d'un financement direct des entreprises pour des projets structurants.
Mais au delà, l'essentiel, croyez-le bien, consiste à préserver un dispositif fiscal, encadré certes mais voulu pérenne, afin de sauvegarder une incitation fiscale à l'investissement indispensable au développement, sans naturellement remettre en cause la solidarité de l'outre-mer à la réduction incontournable des dépenses publiques. C'est du reste ce qui résulte de la plupart des auditions auxquelles notre commission a procédé pour la circonstance.
L'année 2011 qui a été voulue par le Chef de l'État « Année des Outre-mer » aura été l'occasion pour ces collectivités de promouvoir leurs réelles potentialités au service d'un développement endogène. Et pour y parvenir l'autre besoin qui s'exprime aussi fortement est un besoin de stabilité. Il s'agit bel et bien, en particulier, de conforter un secteur privé dynamique et désireux de participer à l'investissement, mais fragilisé par des handicaps structurels auxquels nous sommes évidemment attentifs, un secteur qui a aujourd'hui du mal à résister. À titre d'exemple les acteurs du bâtiment, devant le recul de la commande publique, se tournent vers les promoteurs de logements sociaux, avec l'espoir de retrouver un flux normal difficile à garantir en l'état actuel des choses. L'outre-mer doit dans ces conditions pouvoir exploiter ses atouts qui sont indéniables et largement concurrentiels : nous pensons en particulier au secteur de l'énergie, sans lequel tout développement endogène restera chimérique.
Madame la ministre, tous ces sujets auxquels vous n'êtes pas indifférente, il faut bien le dire, sont abordés fort à propos par nos collègues à l'occasion de l'examen du projet de budget de la mission « outre-mer », j'ai bien conscience de m'écarter ici de l'objet précis de notre réunion.
C'est donc pourquoi je conclurai en rappelant que, sous réserve des modifications susceptibles d'être apportées par le gouvernement lors de l'examen des crédits en séance publique, ce projet de budget nous semble, dans le contexte actuel, plutôt satisfaisant. Il renoue avec la dynamique de progression freinée en 2011 et porte l'accent sur les enjeux fondamentaux pour notre développement.
Dans ces conditions, je vous propose, mes chers collègues, d'émettre un avis favorable à son adoption.
Nous ne sommes pas réunis pour égrener des chiffres et vous faire querelle sur ce point, au terme de bientôt trois ans de votre activité au ministère, Madame le ministre, ce ne sont pas ces derniers qui comptent mais la réalité de la situation de l'outre-mer. Ce matin, sur la chaîne de télévision I télé, vous avez considéré que 90 % des mesures du CIOM avaient été mises en place. Cela paraît bien courageux de votre part car l'évolution de la situation an cours des dernières années n'est pas, sur le terrain, ce que vous dites. La réalité c'est le chômage qui persiste, le mécontentement des chefs d'entreprises la dramatique situation du logement, particulièrement à Mayotte, du fait de la cherté de la vie. Votre bilan est globalement négatif. Je vous pose donc une simple question : au terme de cinq années de sarkozysme, dont celles qui vous concernent en tant que ministre, êtes-vous fière des résultats obtenus ? Tous les arguments que vous avancez sont contredits par les faits. L'outre-mer est-elle en marche sur les rails du progrès et du développement ? Tous les secteurs de la vie économique et sociale sont en difficulté. En ce qui concerne le logement, je lis dans la documentation budgétaire que les crédits de la LBU sont en baisse et, tout à l'heure, vous allez démontrer le contraire. Les chefs d'entreprises disent de façon unanime que la situation s'est aggravée, que le chômage augmente et qu'ils ne disposent plus de fonds de roulement. Les collectivités territoriales ne se portent pas mieux. Depuis 3 ans, leurs dotations sont gelées. Je suis maire de la commune de La Trinité qui compte 14 000 habitants : je puis vous assurer, que dans un contexte de vie chère, sur les 34 communes que compte la Martinique, 20 sont placées dans le réseau d'alerte et 5 devant la « commission de la hache » de la chambre régionale des comptes. Il est de plus en plus difficile de trouver des solutions : la situation est dramatique. Je suis sans doute parmi ceux qui ont été les moins durs avec vous, car je pensais que l'arrivée au ministère d'une domienne, d'une Antillaise, pouvait annoncer un progrès. Cependant, tous les indicateurs sont au rouge. L'heure du bilan a sonné : je vous le dis il est négatif.
Je ne pensais pas que nous étions réunis aujourd'hui pour faire le bilan des 5 années de l'action du gouvernement, mais bien pour se pencher sur le projet de loi de finances de 2012 ! Le budget présenté se situe dans un contexte de crise. Vous avez déclaré, Mme. la ministre, qu'aucun gouvernement n'avait autant fait pour l'outre-mer depuis des années. Vous n'avez d'ailleurs jamais prétendu avoir réglé tous les problèmes ! Votre mérite est d'au moins faire avancer les choses tant il est vrai que tout ne peut être fait. L'Outre-mer doit, lui aussi, participer à l'effort de réduction des coûts de fonctionnement engagé par l'État. Permettez-moi de vous interroger sur trois questions. D'abord, au sujet des événements à Mayotte, pouvez-vous faire le point sur la situation ? Les opérateurs du logement social font état d'une articulation difficile entre les financements budgétaires et la défiscalisation : comment fluidifier le dispositif ? Le Conseil des ministres de ce jour a dressé un premier bilan du comité interministériel, pouvez-vous, à cette occasion, nous faire part des principales réussites ?
Mme la ministre, je serais bref car je dois prendre ce soir un avion pour la Réunion et, de ces avions, il n'y en a pas beaucoup ! D'après la présentation de la mission, le budget de l'outre-mer augmenterait de 50 millions d'euros avec une hausse de même ampleur pour les politiques transversales. Ces chiffres pourraient ainsi sembler positifs. Or, la réalité montre une succession de situations catastrophiques trop peu perçues donc méconnues en métropole. Les chiffres de l'INSEE sont tombés ce matin : à la Réunion, le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans s'élève à 60 % ! Imaginez, chers collègues, une telle situation dans vos départements respectifs. Le gouvernement admet à présent que les prévisions de croissance doivent êtres revues à la baisse, cela rend les budgets présentés caducs puisqu'il est, de plus, demandé à l'outre-mer une participation aux efforts de réduction du déficit ! Si des dépenses futures sont affichées à la hausse, le projet de loi de finances pour 2012 n'en comporte pas moins une menace supplémentaire sur l'activité économique avec le coup de rabot sur les investissements des entreprises. Il en va de même pour la suppression de l'abattement de 30 % sur les résultats d'exploitation des entreprises ultramarines avec un coût de 100 millions d'euros. On voit mal la cohérence d'une politique qui, d'un côté dit donner 50 millions et, de l'autre, en retire 100.
Mme le ministre, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue René-Paul Victoria qui désirait pourtant être présent mais je vais me substituer à lui pour vous poser les questions qu'il a préparées. Quelles sont les mesures d'accompagnement prévues pour aider les entreprises frappées de plein fouet par la baisse de l'abattement 30 % de l'impôt sur les sociétés ? Quid des baisses en autorisations d'engagements pour l'aide à l'insertion et la qualification professionnelle : pourquoi une telle mesure, a-t-elle une explication spécifique et quels sont les secteurs et les publics concernés ? De mêmes interrogations se posent d'ailleurs pour le programme sanitaire « Action jeunesse et sports ».
A l'instar de mon collègue Louis-Joseph Manscour, je dirais qu'il n'est effectivement pas besoin de se livrer à une bataille de chiffres, un exercice plus ou moins convenu, pour dresser votre bilan. De fait, un budget n'est que l'expression d'une politique, vous augmentez cette année les crédits, modérément d'ailleurs, après les avoir baissés au titre de l'exercice précédent. Voilà qui permet d'estimer le degré de volontarisme du gouvernement face à une grave situation sociale. Quel est le bilan aujourd'hui alors qu'en fait toutes les années se ressemblent ? Il est clair que l'outre-mer ne constitue pas une priorité pour le gouvernement. Le plus fort taux de chômage de toutes les régions de l'Union européenne, un record, est enregistré à la Réunion dont 52 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté.
La vie économique et sociale se caractérise par l'endettement et l'appauvrissement. Le dernier communiqué du Conseil des ministres montre bien que les difficultés rencontrées par une population, pourtant paisible, n'ont pas été prises en compte. Mme la ministre, vous avez pourtant été nommée après une situation de violence et de crise aux Antilles notamment, comment le gouvernement peut-il aujourd'hui se congratuler des résultats prétendument obtenus ? Il y a là quelque chose d'indécent. Votre politique a échoué.
Permettez-moi, mes chers collègues, de vous rappeler que la situation de l'outre-mer est régulièrement évoquée, en particulier au sein de notre commission qui a d'ailleurs adoptée, ici même et à l'unanimité, la proposition de loi sur le logement indigne.
Avant d'en venir aux questions, Madame la ministre, je signale que j'ai obtenu de vos services la communication, à titre informel, du document de politique transversale que nous n'avons toutefois pas reçu officiellement à l'Assemblée, ce qui est dommageable.
Je voudrais d'abord savoir à combien vous chiffrez exactement l'effort demandé à l'outre-mer en termes de dépenses fiscales : en additionnant au titre des programmes 123 et 138 du « bleu » budgétaire, on arrive à un total de 382 millions d'euros. Sommes-nous bien d'accord sur ce chiffre ?
J'ai bien noté que la LBU serait « sanctuarisée », mais elle sert à tellement de choses que j'en ai le tournis – entre autres à abonder le fond régional d'aménagement foncier urbain (FRAFU), à faire de la réhabilitation de l'habitat insalubre (RHI). En outre, l'articulation entre la LBU et la défiscalisation est assez complexe et a beaucoup de mal à se mettre en place en Guyane. Les acteurs du secteur vont d'ailleurs vous saisir officiellement sur ce sujet, mais je vous pose directement la question : est-il envisageable de rallonger le délai entre la date d'agrément et la date de livraison, actuellement de dix-huit mois si ma mémoire est bonne, afin d'améliorer les conditions de réalisation du peu d'opérations que nous pouvons mener ? Autre sujet relatif au logement : la réhabilitation du logement social. Vous présentez un montant de crédits, mais sur quelle durée la réhabilitation va-t-elle être réalisée par les opérateurs ? Au départ il y avait un engagement sur deux ou trois ans, mais un décalage a eu lieu.
Autre question récurrente, Mme. La ministre : pourquoi les jeunes guyanais non francophones, nombreux dans la région ouest, ne peuvent-ils pas bénéficier du SMA ?
Enfin, il faut rappeler que la Guyane connaît une croissance démographique élevée : j'aimerais que vous puissiez accorder le même rythme d'évolution pour les moyens budgétaires consacrés à la Guyane. Ce serait plus équitable.
Nous pensons aussi que le budget est l'expression d'orientations politiques majeures. Ses orientations ne sont pas de nature à nous rassurer. Concernant l'application du CIOM, les retards sont considérables en Guyane. La conception que vous avez du développement endogène, qui est d'accompagner des projets d'impulsion extérieure, n'est pas la nôtre. Enfin, nous n'avons pas les mêmes chiffres concernant l'effort demandé aux outres mers, et je me demande si nous avons bien la même calculette : nous arrivons près de 500 millions d'euros, plus exactement à 460 millions en additionnant la suppression de l'abattement sur les exploitations, la suppression des autres dispositifs fiscaux, et l'effort sur ce qu'on appelle le « Girardin industriel ». En plus que dire de cette loi de programme adoptée par le Parlement pour quinze ans et qui a été retouchée au bout de trois ans.
Pour la Guyane, vous avez affirmé dans l'une de vos déclarations que le poids du spatial doit être pris en compte pour évaluer les résultats économiques. C'est un effort de lucidité que vous faites là, car le spatial, qui est une bonne chose, n'irrigue effectivement pas beaucoup le tissu économique local : à preuve, le taux de chômage de la jeunesse. Il y a aussi la question du pétrole qui va arriver. Sur ce sujet, les déclarations de votre collègue du gouvernement, Mme Kosciusko-Morizet, ne sont pas de nature à nous rassurer. En effet, les précédents comparables comme celui du développement d'activités minières, je pense aussi à l'or, qui sont restées très fortement exogènes, sont inquiétants. De telles autorisations d'activités génèrent des attributions foncières importantes à des intérêts privés avec peu de contrôles et aucune directive sur un recrutement local.
Je voudrais savoir, même si c'est un peu « hors budget », où en sont les textes d'application de la proposition de loi de notre collègue Serge Letchimy que nous avions votée, je le rappelle, à l'unanimité. Je crois me souvenir que le gouvernement n'avait pas fait preuve d'un enthousiasme forcené en faveur de l'adoption de ce texte. Je ne voudrais pas que les réticences de l'époque conduisent aujourd'hui à un retard dans la mise en oeuvre de ce dispositif législatif !
Je vais parler du 101ème département dans lequel la situation est grave. Force est de constater que les problèmes ne sont pas réglés, comme vous le reconnaissez vous-même d'ailleurs. Nous sommes au coeur du sujet aujourd'hui car les problèmes de Mayotte appellent des solutions, et ces solutions passeront nécessairement par des moyens budgétaires.
Les problèmes sont multiples : le chômage et son indemnisation, la décentralisation, avec le dossier des charges indues, à propos duquel j'aimerais que vous nous disiez où nous en sommes, la solidarité nationale avec l'annonce d'un RSA à 25 % de celui de la métropole, ce qui n'a pas été sans susciter des réactions, l'éducation, avec des besoins dans les établissements du secondaire du fait d'une démographie importante à laquelle il faut répondre etc. Enfin, il faut parler de « la bombe à retardement » que vous connaissez et que constituent ces milliers d'enfants abandonnés. Peut-être la focalisation des énergies de tous les bords pour faire aboutir la départementalisation de Mayotte a-t-elle masqué les problèmes de fond que je viens de décrire ? Aujourd'hui, estimez-vous, Madame la ministre, que les moyens qui vous sont alloués vous permettent de répondre à de tels problèmes ?
Je voudrais poser une question supplémentaire à Madame la ministre avant de lui passer la parole pour qu'elle réponde aux nombreuses questions qui viennent d'être posées. Quand disposerons-nous des résultats de la commission dite « Baroin » sur les investissements photovoltaïques en outre-mer ?
Je commencerai par répondre aux questions du rapporteur. S'agissant du calendrier de mise en place du SMA avec 6 000 volontaires, le délai a été fixé à 2014, en décalage de deux ans par rapport au délai initial comme je l'avais indiqué lors du débat de l'année dernière ; ce calendrier devrait être tenu.
Sur le logement, vous avez fait un certain nombre d'observations, concernant notamment la possibilité de mieux utiliser la LBU pour les projets en accession sociale. Je voudrais vous indiquer à ce propos qu'un groupe de travail va être mis en place le 29 novembre sur ces questions avec les bailleurs et l'Union sociale pour l'habitat (USH), sachant que, pour l'affectation des crédits par zone, un recensement est réalisé sur la base des outils existants et les enveloppes budgétaires déterminées sur ce fondement en concertation avec les bailleurs sociaux. Concernant le logement insalubre, vous savez que j'ai soutenu la proposition de loi portée par votre collège Serge Letchimy. Ce texte va dans le bon sens en permettant en complément de la réalisation de logements sociaux neufs de prendre en compte la situation particulière de certains territoires dans lesquels l'habitat est fortement dégradé. Les arrêtés sont en cours de préparation et j'espère qu'ils pourront être publiés avant la fin du mois de novembre 2011.
Vous avez noté, monsieur le rapporteur, l'existence d'inégalités en matière de continuité territoriale : à ce propos, nous nous étions demandés s'il fallait assouplir les critères pour l'attribution des bons de voyages en Polynésie, Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna, en raison de l'éloignement de ces territoires. J'ai commandé une étude sur la question et nous serons en capacité de faire des propositions dès le début de l'année 2012. Je constate, par ailleurs, que lorsque nous conventionnons avec certains territoires, comme nous l'avons fait à la Réunion ou en Martinique, cela nous permet de démultiplier notre intervention et de faire en sorte qu'un plus grand nombre de nos compatriotes bénéficient de l'aide à la continuité territoriale. S'agissant de la Guyane, le choix a été fait de consacrer une partie des crédits à la desserte intérieure.
Bien évidemment, le budget est l'expression politique d'une politique. C'est évident. Mais le budget de l'État n'a pas vocation à régler tous les problèmes qui se posent en outre-mer. Mme Taubira disait que nous n'avons pas la même calculette ! J'aurais envie de dire que nous ne lisons pas la même chose. Même s'il est vrai que l'on peut faire parler les chiffres, il y a quand même une réalité dans le soutien qui a été apporté à l'outre mer. Je peux vous donner des chiffres : dans le cadre du CIOM, avec le small business act, ce sont près de 80 millions d'euros de garanties de prêt à court terme qui ont été apportées à 280 entreprises, permettant de préserver 10 000 emplois. Dans le cadre de la médiation, nous avons pu sauver 6 404 emplois – vous voyez que je donne des chiffres très précis. Même si je ne peux pas me satisfaire du taux de chômage des jeunes, je me félicite que nous ayons eu le souci d'en proposer un traitement social, avec 52 271 contrats aidés contre 46 223 contrats en 2010, la Réunion mobilisant d'ailleurs 67,8 % des contrats aidés affectés à l'outre-mer. Ce qui me permet de dire que la situation particulière qui prévaut à la Réunion, avec la fin d'un grand chantier qui n'avait pas été préparé et a conduit à une augmentation du chômage, a bien été prise en compte : je rappelle que l'État a conservé le milliard d'euros qui était prévu pour le tramtrain et j'ai entendu aujourd'hui le président de la région annoncer qu'il y aurait 8 000 emplois pour la Réunion.
S'agissant des questions fiscales, notamment l'abattement de 30 % sur l'impôt sur les sociétés, on sait aujourd'hui que 60 % de cet abattement bénéficiait à seulement 7 % des entreprises. Le périmètre était celui de la défiscalisation et ne concernait pas le secteur du commerce. J'ai entendu que la suppression de cet abattement remettrait en cause les zones franches globales d'activité. Je voudrais vous donner un chiffre : une entreprise qui avait un bénéfice de 100 000 euros, sans l'abattement ni la zone franche globale d'activité, devrait payer 22 000 euros d'impôt sur les sociétés ; en supprimant l'abattement, au lieu de payer 4 000 euros, elle devra payer 6 000 euros. Si on me dit qu'une telle entreprise ne peut pas supporter cet effort de 2000 euros, je dis qu'il faut cesser de soutenir cette activité et porter notre effort sur une autre activité, et c'est ce que nous faisons pour le développement endogène. Le développement endogène n'est pas pour nous seulement un moyen de soutenir des projets venant de l'extérieur des territoires mais aussi des initiatives locales : j'en veux pour preuve ce que nous avons fait à la Martinique avec l'agroalimentaire notamment pour la transformation de la banane ainsi qu'à la Réunion pour soutenir les filières de la viande et des fruits et légumes et j'ajoute qu'en Guyane, cinq projets de biomasse sont soutenus par le gouvernement.
Je veux aussi répondre, à propos du logement social, sur les interrogations de M. Jean-Charles Taugourdeau au sujet de l'articulation entre la LBU et la défiscalisation. Le démarrage a été difficile, je n'en disconviens pas. J'ai été la première à dire qu'il fallait revoir la circulaire, ce que j'ai fait. Par ailleurs, j'ai rencontré les opérateurs et j'ai pu constater, lors du dernier congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH), que les bailleurs sont plutôt aujourd'hui satisfaits par la montée en charge des opérations financées. C'est parce que nous avions mis en place à la fois le dispositif LBU et la défiscalisation que nous avons pu obtenir un nombre beaucoup plus important de logements financés. Dans un contexte difficile, nous avons ainsi soutenu la commande publique et sauvé des emplois dans le bâtiment, même si j'aurais préféré sauvegarder tous les emplois qui ont été perdus à La Réunion.
Vous avez également parlé de Mayotte. Le gouvernement a accompagné ce territoire pour aller vers la départementalisation, respectant ainsi la parole donnée vis-à-vis des Mahorais. Nous avons organisé la consultation et beaucoup d'entre vous ont participé au débat. Vous avez eu connaissance du Pacte pour la départementalisation. Le président de la République a reçu les élus, très en amont, nous en avons débattu au Parlement. Un texte de loi a été voté. Nous avons alors indiqué les conditions dans lesquelles la départementalisation allait se faire, c'est-à-dire de manière progressive et adaptée. Progressive ne signifie pas que nous ne souhaitons pas aller vers l'égalité sociale, de même que nous n'avons jamais considéré que Mayotte doit être un département au rabais. Nous avons bien le souci d'accompagner les Mahorais pour qu'ils obtiennent à la fois un statut garant de l'égalité de leurs droits mais nous devions aussi prendre garde à préserver le tissu économique de Mayotte, particulièrement fragile. Au vu des informations dont je dispose – et je ne veux pas que mes propos soient interprétés comme une quelconque forme de chantage – le conflit actuellement en cours menace près de 2 800 emplois. On peut ainsi craindre que Mayotte ne se relève pas économiquement d'une telle crise, si celle-ci se poursuit. C'est pourquoi nous devons rapidement retrouver les chemins du dialogue. C'est à ma demande, que le préfet de Mayotte a engagé des négociations en vue de la conclusion d'un protocole de sortie de crise. La distribution a accepté de baisser de plus de 10 % les prix de 8 produits de première nécessité identifiés par les syndicats. Cette baisse est aujourd'hui effective même si le protocole n'est pas signé par la distribution. Il existe en effet une négociation qui se poursuit sur d'autres produits, pour lesquels nous devons encore analyser la manière dont les prix sont fixés. Une délégation est même venue de la Réunion pour essayer de faire par comparaison un point sur les modalités de fixation des prix. Ce travail n'ayant pu aboutir, c'est tout le rôle du médiateur sur place de voir quels moyens peuvent encore être mis en oeuvre pour venir en aide aux familles modestes. J'ai personnellement proposé de venir en aide à ces familles par le biais d'une convention avec la caisse d'allocations familiales, cela n'est pas une formule choquante car elle existe partout ailleurs. Seulement, l'État s'est substitué car la collectivité, qui pourrait le faire dans le cadre de sa politique sociale – elle dispose de la compétence – mais elle n'en a pas la capacité financière, du fait de son déficit. Nous devons impérativement prendre en compte la situation de cette collectivité, qui consacre actuellement 7 millions d'euros à la politique sociale, sur les 330 millions d'euros de son budget. Elle doit pouvoir retrouver les moyens d'exercer cette compétence.
J'espère avoir répondu globalement à l'ensemble des questions qui m'ont été posées. Au travers de la LODEOM et des décisions prises dans le cadre du CIOM, nous avons voulu tenir un discours de vérité et dire exactement où nous en sommes, sachant que bien des mesures ne sont aujourd'hui pas toujours perceptibles par la population mais qui ont été bien engagées. Le conseil des ministres de ce matin a d'ailleurs fait un point sur l'état d'avancement de ces décisions.
Je vous remercie, Madame la ministre, de nous avoir rappelé ces objectifs de la Lodéom et du CIOM et d'avoir mis en perspective, au-delà du budget, la politique globale de l'État en faveur de l'outre-mer. S'agissant du photovoltaïque…
… il y avait en effet deux questions. L'effort ne figure pas dans le document et le complément demandé s'élève à 48 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 56 millions au titre des crédits de paiement. Je ne le ferai porter ni sur la LBU, ni sur la continuité territoriale, ni sur les dotations spécifiques telles que le fonds mahorais ou les dotations scolaires pour la Guyane. Il sera procédé à des rationalisations au niveau des dépenses de fonctionnement pour ce qui concerne le SMA. Je vais également faire porter un complément d'effort lorsque je disposerais toutefois d'un point de situation plus précis en fonction des remontées émanant des partenaires et organismes sociaux et par rapport aux besoins : il concernera l'aide à la rénovation hôtelière, l'aide au fret car les mesures de ce dispositif sont difficiles à mettre en oeuvre ainsi que le volet social, culture, jeunesse et sports, en préservant bien évidemment le financement de l'agence de santé pour Wallis et Futuna et la base avancée de Guyane. Je peux enfin intervenir sur d'autres lignes budgétaires car, comme vous le savez, nous n'avons pas cette année à organiser l'Année des Outre-Mer, ce qui dégage quelques marges.
Sur le photovoltaïque, j'ai obtenu des appels à projets spécifiques pour l'outre-mer qui permettront de financer des installations supérieures à 250 kilowatts, avec stockage, les installations sans stockage étant réservées pour les petits projets. J'ai aussi obtenu le principe d'un tarif spécifique pour le « surimposé », dans l'attente du développement d'une technique pour une pose intégrée et adaptée au bâti. Sur ce point, nous avons demandé le concours de deux organismes : nous disposons de l'avis du Centre Scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et nous attendons encore celui de l'ADEME. J'ai enfin proposé qu'il y ait une aide spécifique à l'investissement dans les sites isolés où le photovoltaïque est une solution crédible. Voilà la position du ministre de l'outre-mer, dans l'attente du rapport qui doit être transmis au Parlement par le gouvernement.
Vous avez parlé de rationaliser les dépenses du SMA. Or, c'est précisément l'une des rares actions où l'on voit des résultats positifs…
… Vous ne m'avez pas bien comprise, M. le député, l'exercice qui nous est demandé n'est pas facile. J'ai simplement dit que j'allais regarder comment rationaliser les coûts de fonctionnement du SMA, cela ne signifie pas que je vais remettre en cause le programme, notamment l'investissement qui doit nous permettre de respecter l'échéance de 2014. C'est un objectif présidentiel que nous n'allons pas encore reporter d'une année de plus : à la fin de 2013, nous devons avoir atteint les 6 000 volontaires.
Merci pour toutes ces précisions. Je vous adresse tous mes encouragements pour faire face à la situation difficile de Mayotte, dont je sais qu'elle est une préoccupation du gouvernement tout entier.
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Puis la commission a examiné les crédits de la mission Outre-mer pour le projet de loi de finances pour 2012 (n° 3775), sur le rapport de M. Alfred Almont, rapporteur pour avis.
Dans le contexte actuel, ce budget m'apparaît plutôt satisfaisant car il renoue avec une dynamique qui avait été freinée en 2011. Avis favorable, donc.
Suivant l'avis de M. Alfred Almont, rapporteur pour avis, la commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2012 de la mission Outre-mer.
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Informations relatives à la commission :
Avis sur la nomination de M. Yves de Gaulle
Les scrutins effectués par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale et la commission de l'économie, du développement et de l'aménagement durable du Sénat concernant l'avis sur la nomination de M. Yves de Gaulle au poste de président du directoire de la Compagnie nationale du Rhône ont donné les résultats suivants :
Votants
82
Exprimés
76
Pour
51
Contre
25
Blancs
6
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du mercredi 26 octobre 2011 à 16 h 15
Présents. - M. Alfred Almont, M. François Brottes, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Jean Gaubert, Mme Laure de La Raudière, Mme Annick Le Loch, M. Louis-Joseph Manscour, M. Jean-Marie Morisset, M. Serge Poignant, Mme Josette Pons, M. Jean Proriol, M. François Pupponi, M. Jean-Charles Taugourdeau, M. Alfred Trassy-Paillogues
Excusés. - M. Bernard Brochand, M. Jean-Michel Couve, M. Jean-Pierre Decool, M. Pierre Gosnat, M. Jean-Marc Lefranc, Mme Frédérique Massat, M. Michel Raison
Assistaient également à la réunion. - Mme Chantal Berthelot, M. Jean-Claude Fruteau, M. Patrick Lebreton, M. Bernard Lesterlin, Mme Christiane Taubira