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Commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Séance du 8 octobre 2008 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • dispensés
  • hospitalier
  • patient

La séance

Source

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES

Mercredi 8 octobre 2008

Présidence de M. Pierre Méhaignerie,

président de la Commission

Audition, ouverte à la presse, de Mme Androulla Vassiliou, commissaire européenne à la santé, sur la proposition de directive relative à l'application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers

La séance est ouverte à dix heures

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Androulla Vassiliou, commissaire européenne à la santé, venue nous présenter la proposition de directive, adoptée par la Commission européenne le 2 juillet 2008, sur les droits des patients dans le cadre de soins dispensés dans un autre État membre que celui d'origine. Les citoyens de l'Union européenne peuvent déjà bénéficier de soins de santé dans un autre État membre que celui dont ils sont ressortissants et obtenir d'être remboursés, dans leur État d'origine, des frais engagés. Cependant, les règles concernant les droits et les remboursements sont loin d'être clairs. La Commission s'est donc attachée à préciser les conditions dans lesquelles les soins de santé transfrontaliers peuvent être dispensés et remboursés.

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

C'est un grand plaisir pour moi de vous présenter ce que je considère comme l'initiative la plus importante, dans le domaine de la santé, de la présidence de la Commission européenne par M. Manuel José Barroso. Ayant été parlementaire, je demeure convaincue de la nécessité de maintenir un débat avec les Parlements nationaux. C'est ce qui m'a poussée à me rendre au Bundestag, à rencontrer des membres du Bundesrat et à m'exprimer devant vous avant de me rendre à la Chambre des Lords, à la Diète polonaise et, si je le puis, dans d'autres Parlements encore. Ma pratique de la langue française n'étant pas aussi aisée que celle de l'anglais, je poursuivrai dans cette langue.

Depuis des années, dans une jurisprudence constante, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) a confirmé que le Traité confère aux patients le droit de se faire soigner dans d'autres États membres que le leur puis d'obtenir, chez eux, le remboursement des frais engagés. Cependant les modalités d'application de ce principe ne sont pas bien définies. Aussi, après que les soins de santé ont été - à mon sens, à juste titre - exclus en 2006 du champ d'application de la directive relative aux services, le Conseil et le Parlement ont invité la Commission à élaborer une directive distincte, relative aux soins de santé transfrontaliers.

La proposition de directive adoptée par la Commission vise à assurer aux patients un meilleur accès aux soins, quel que soit leur lieu de résidence, tout en respectant strictement les compétences nationales en matière de système de santé. Dans le cadre de la jurisprudence de la Cour, le texte tend à faciliter l'exercice des droits que le Traité a conférés aux patients en garantissant une plus grande transparence et de meilleures garanties concernant la sécurité et la qualité des soins. La proposition tend aussi à préciser les conditions dans lesquelles les patients peuvent se faire soigner dans un autre État membre puis se faire rembourser. Elle vise enfin à renforcer la coopération entre les États dans certains domaines liés à la santé pour améliorer les synergies sans, j'y insiste, modifier le cadre des systèmes nationaux de sécurité sociale.

Actuellement, pour être remboursés, les traitements dispensés dans un autre pays de l'Union doivent avoir fait l'objet d'une autorisation préalable. Avec le nouveau dispositif, les patients pourront se faire soigner dans un autre État membre que le leur s'ils le souhaitent et être remboursés des frais engagés à concurrence de ce qu'ils auraient perçu si les soins avaient été dispensés dans leur pays d'origine, tout coût supplémentaire demeurant à leur charge. Admettons ainsi que la pose d'une prothèse de hanche soit remboursée à hauteur de 1 000 euros en France ; un Français qui déciderait de subir l'intervention en Espagne et à qui cela coûterait 1 200 euros se verrait rembourser 1 000 euros.

Toutefois, la proposition de directive prévoit, en son article 8, que l'État d'affiliation peut exiger une autorisation préalable pour la prise en charge de soins hospitaliers reçus dans un autre État membre. Il s'agit ainsi d'éviter que l'application de la directive puisse porter atteinte à l'équilibre financier d'un système de sécurité sociale.

La proposition réaffirme les principes communs à tous les systèmes de sécurité sociale de l'Union européenne : universalité, équité, accès à des soins de santé de qualité, solidarité. Elle rappelle que, pour que ces principes s'appliquent, chaque État doit définir des normes claires de qualité et de sécurité des soins dispensés sur son territoire. C'est un moyen supplémentaire de lutter contre les affections nosocomiales, singulièrement dans les pays qui n'ont pas encore mis au point de telles normes. Il le faut : des enquêtes récentes ont mis en évidence que 5% des personnes hospitalisées en Europe sont atteintes de maladies nosocomiales, soit 4,1 millions de personnes chaque année, dont 37 000 meurent des suites de ces pathologies.

La proposition de directive dispose également qu'un patient ressortissant d'un autre État membre ne peut souffrir aucune discrimination dans l'accès aux soins. En précisant les conditions de l'exercice du droit qu'ont les patients de recevoir des soins dans un autre État membre que le leur, le texte permet aux États membres d'appliquer la jurisprudence de la CJCE de manière équilibrée et facilite l'exercice de ce droit par les citoyens européens car, à ce jour, la jurisprudence est parfois mal comprise, souvent sciemment ignorée ou incomplètement appliquée. Comme je l'ai dit, nous avons cependant prévu, afin de ne pas risquer de mettre en cause l'équilibre des systèmes de sécurité sociale nationaux, que les États membres soient autorisés à limiter le remboursement de soins dispensés à l'étranger, par exemple en instaurant un système d'autorisation préalable pour les soins hospitaliers.

La proposition précise par ailleurs la définition des soins hospitaliers et des soins ambulatoires, ce qui simplifiera les procédures et les conditions d'accès aux soins transfrontaliers. Je souligne que nous avons maintenu l'extension de la notion de « soins hospitaliers » à des soins qui n'exigent pas nécessairement une hospitalisation mais qui sont particulièrement coûteux ou qui supposent une très lourde infrastructure - tomographie par émission de positons, radio-chirurgie par couteau gamma ou radiothérapie par exemple.

Enfin, la proposition de directive fixe le cadre de nouvelles coopérations à l'échelle européenne. Elle devrait donc conduire à la création de réseaux européens de référence pour les maladies rares, les nouvelles thérapeutiques ou les nouvelles technologies. Ces coopérations pourraient également concerner : l'évaluation des nouvelles technologies de santé qui, toujours plus coûteuses, doivent être utilisées de la manière la plus efficace possible ; les services de santé en ligne, concernant notamment la question de l'interopérationalité ; la collecte de données statistiques sur les soins de santé transfrontaliers, pour mesurer l'impact des décisions prises et pour améliorer la surveillance épidémiologique ; la reconnaissance de prescriptions établies dans les autres États membres, étant entendu que le remboursement des médicaments continuera de se faire en fonction des règles établies par l'État d'origine. Le cadre ainsi défini devrait contribuer à actionner le formidable potentiel de la coopération paneuropéenne en matière de santé.

En conclusion, notre objectif est d'aider les citoyens européens à recevoir les soins qui leur sont nécessaires sur tout le territoire de l'Union. Il ne s'agit pas de promouvoir la mobilité pour la mobilité mais de définir des règles précises, fondées sur les droits déjà consacrés par la CJCE. Je tiens à être claire : nous ne modifions pas les règles de fonctionnement des systèmes nationaux de santé. Il demeurera de la responsabilité des États membres de décider quelles prestations ils entendent servir à leurs ressortissants et quels traitements et médicaments ils rembourseront. Seulement, les droits conférés aux citoyens par le Traité seront précisés.

La proposition de directive est déjà débattue au sein du Conseil et du Parlement. Ce dernier a nommé deux rapporteurs, et ils souhaitent que la première lecture ait lieu rapidement. Je l'espère aussi, puisque notre démarche consiste à maintenir le patient au coeur du dispositif.

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Je vous remercie, Madame la commissaire, et je donne la parole à M. Yves Bur.

PermalienPhoto de Yves Bur

Je salue votre démarche exemplaire et novatrice, Madame, et le fait que, n'ayant pas oublié votre engagement parlementaire, vous ayez voulu associer les Parlements nationaux, très en amont, à l'élaboration de la directive, car c'est précisément ce qu'attendent les citoyens européens et leurs élus.

D'évidence, dans une Europe sociale qui se cherche, les questions de santé doivent être abordées, mais ce champ relevant de la compétence des États, la chose est compliquée. J'apprécie que les droits des patients soient au coeur de votre proposition. Il le fallait, car si la mobilité des Européens ne cesse de progresser, les prises en charge diffèrent selon les États, ce qui a conduit la Cour de justice à rappeler avec constance le droit de tous les patients à accéder à des soins de qualité. Votre démarche est radicalement différente de celle qui avait présidé à l'élaboration de la proposition de directive relative aux services, dont le secteur de la santé a finalement été exclu, ce dont je me félicite, d'autant que l'angle d'approche était alors l'offre de soins et la libéralisation des services, et non les droits des patients.

La proposition de directive, fondée sur la jurisprudence de la CJCE, répond à un besoin réel. Élu d'une région frontalière, je sais à quelles difficultés mes concitoyens se heurtent, et quelles complications entraînent des prises en charge nationales différentes. Je me dois de dire que les organismes de sécurité sociale français donnent parfois l'impression de tout faire pour décourager l'exercice du droit aux soins transfrontaliers, même si la création de l'Eurodistrict Strasbourg-Ortenau a marqué une volonté partagée de coopération. Le droit aux soins transfrontaliers conféré par le Traité doit dès lors être organisé dans un cadre clair. J'espère que la directive le permettra. Je note qu'aucune restriction n'est prévue pour les soins ambulatoires ; s'agissant des soins hospitaliers, la France tient absolument à ce que le principe de l'autorisation préalable soit maintenu.

Plusieurs questions restent en suspens. Ainsi, comment mieux garantir l'information des patients ? Seront-ils en mesure d'apprécier la qualité des établissements de soins des autres États membres ? Quelles garanties auront-ils que les dommages qui résulteraient d'une intervention faite à l'étranger seront indemnisés, et par qui ? L'interrogation paraît d'autant plus fondée que si l'on reprend l'exemple de la prothèse de hanche, on sait que des complications peuvent survenir plusieurs années après l'opération. Qu'en sera-t-il alors ? Pourra-t-on, par ailleurs, imposer à tous les pays de l'Union la prise en charge de soins particulièrement onéreux ? Si certains États n'ont pas les moyens budgétaires nécessaires pour cela, ne faudrait-il pas envisager la mise en commun de certains équipements ? Sur la forme, pensez-vous que le processus d'adoption de la directive aboutira avant les élections européennes et, sinon, faudra-t-il tout reprendre à zéro en juin 2009 ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Concernant votre dernière question, les deux rapporteurs souhaitent vivement conclure leurs travaux et ils tiennent en tout cas à ce que la première lecture ait eu lieu avant les élections. Dans ce cas, le Parlement nouvellement élu mènera la procédure à son terme sans qu'il faille la reprendre à son début.

Comme vous l'avez souligné, la proposition a trait aux droits des patients, dont la jurisprudence de la CJCE a mis en évidence la nécessité de préciser les conditions de mise en oeuvre, et non pas à la mobilité des professionnels de santé. Les études d'impact ont indiqué qu'un très faible nombre de citoyens de l'Union vont dans un État autre que le leur pour recevoir des soins ; pour la plupart, ce sont des gens qui vivent dans des régions frontalières et qui veulent aller au plus près.

S'agissant des soins ambulatoires et des soins hospitaliers, la proposition de directive reprend la distinction clairement marquée par la CJCE. Ainsi, aucune obligation d'entente préalable ne peut être exigée d'un citoyen qui souhaite recevoir des soins ambulatoires dans un autre État membre. Il en va autrement pour la prise en charge des soins hospitaliers qui, parce qu'ils peuvent atteindre des montants considérables, pourrait avoir un impact significatif sur le système de sécurité sociale d'un État membre.

La proposition de directive prévoit expressément, en son article 10, le droit à l'information des patients concernant le recours à des soins de santé dans un autre État membre et les dispositions applicables, en cas notamment de préjudice résultant de ces soins. C'est d'ailleurs pourquoi le texte précise aussi, à l'article suivant,les règles applicables aux soins de santé dispensés dans un autre État membre. Pourquoi donc, me demanderez-vous, puisque nous en avons déjà ? Certes, mais ce qui vaut dans certains pays ne vaut pas partout ; en particulier, cela ne vaut pas dans la plupart des nouveaux États membres.

Ainsi, tous ceux qui se rendent en Hongrie pour s'y faire dispenser des soins dentaires à moindre coût se rendent-ils bien compte que ce pays n'a pas défini de normes de sécurité ou de qualité des soins ? Si la directive est adoptée, il devra le faire.

La création de centres européens de référence - et d'excellence - sera très bénéfique, j'en suis convaincue, aussi bien pour les citoyens que pour les États. Elle permettra en particulier que les maladies rares soient mieux prises en charge.

PermalienPhoto de Jean-Pierre Door

Je vous remercie à mon tour, Madame, d'être avec nous ce matin. Il est satisfaisant que ce texte, en fixant des règles claires, donne des garanties aux patients de l'Union européenne, ce qui va dans le sens d'une Europe ambitieuse. Toutefois, des interrogations continuent de se poser. Ainsi, la qualification des professionnels de santé diffère sensiblement selon les États membres ; comment pourra-t-on certifier leur qualité ? Il est bon de faciliter l'accès aux soins mais la question de la responsabilité reste en suspens. Vous avez évoqué les affections nosocomiales et l'éventualité d'un préjudice découlant d'une intervention chirurgicale pratiquée à l'étranger. Pareilles circonstances sont-elles couvertes, en tous pays, par des assurances de responsabilité civile professionnelle ? Si une prothèse de hanche est implantée dans un État et qu'une infection se déclare plusieurs années plus tard, qu'adviendra-t-il ? Enfin, la certification des établissements hospitaliers et l'accréditation des équipes médicales, que nous nous efforçons de mettre au point, pourraient-elles être mises en oeuvre dans d'autres pays de l'Union, afin que tous les Européens sachent pouvoir se rendre dans des hôpitaux sûrs, à la qualité reconnue ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

La reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles n'entre pas dans le champ de ce texte, car ce régime fait l'objet de directives distinctes. Le problème est réel, mais il doit être traité dans un autre cadre.

La proposition de directive a pour objet de faciliter l'accès de tous aux soins, sans discriminations entre ressortissants d'un pays donné et étrangers. Cependant, tout État devant en premier lieu fournir des soins à ses ressortissants, on ne peut imposer à un système hospitalier donné plus qu'il ne peut faire. C'est pourquoi le système d'autorisation préalable est maintenu pour les soins hospitaliers dispensés à l'étranger ; ainsi évitera-t-on de porter atteinte à l'équilibre financier d'un système de sécurité sociale ou à la planification d'un secteur hospitalier.

S'agissant des lésions ou dommages consécutifs à des soins, la proposition de directive dispose, en son article 5, que les États membres doivent veiller à la création de systèmes d'assurances de responsabilité professionnelle pour les traitements dispensés sur leur territoire.

Enfin, la certification des établissements de santé, qui est de la compétence du commissaire chargé du marché intérieur et des services, M. Charlie McCreevy, n'entre pas dans le champ de ce texte. La question est très complexe, mais un système de normes minimales a déjà été mis au point pour les universités.

PermalienPhoto de Jean Ueberschlag

Ne faudrait-il pas harmoniser les codes de déontologie des professionnels de santé et renforcer les contrôles des prestations facturées ? Il faut, d'évidence, pouvoir s'assurer que les soins pour lesquels des remboursements sont demandés ont effectivement été dispensés et qu'il n'y a pas de fraude car les fraudes sont fréquentes en matière de chirurgie esthétique par exemple, on le sait. Concernant les médicaments inscrits au remboursement, on pourrait aussi envisager l'instauration d'une pharmacopée européenne.

Dans un autre domaine, ne pourrait-on envisager l'extension à la Suisse du dispositif que vous nous présentez ? J'insiste enfin pour que l'on prenne le temps d'examiner tous les effets induits, parfois insoupçonnés, des dispositions que l'on va prendre, afin de les limiter le plus qu'il est possible. J'en donnerai un exemple : faute de maternité, côté français, aux environs de Bâle, tous les bébés français de la région sont, pendant un temps, nés à Bâle. Ils ne sont pas Suisses pour autant mais, devenus adultes, ils doivent, quand ils veulent un passeport, le demander à Nantes, au service des « Français de l'étranger »…

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

L'Union a passé des accords avec la Suisse, en matière de sécurité alimentaire par exemple, et nous sommes en passe d'en négocier un autre sur la santé. Je n'exclus donc pas qu'à terme le dispositif puisse être étendu à la Suisse ainsi qu'à la Norvège. Nous y travaillerons.

Le remboursement des médicaments est l'objet de grands débats partout en Europe, du fait notamment du coût élevé de certains médicaments innovants. Ainsi, le traitement de certaines maladies rares entraîne une dépense quotidienne de 7 000 euros par patient. Peut-on contraindre la Lituanie, Malte ou Chypre à de telles dépenses ? Leur budget n'y suffirait pas.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Je vous remercie, Madame la commissaire, de nous associer à la réflexion sur cette directive. Le texte consacre la liberté de choix des patients, mais tout n'est pas réglé pour autant. Se pose en effet la question des maladies nosocomiales, de la sécurité des soins et de la responsabilité en cas de dommage, concernant par exemple les soins dentaires qui sont peu remboursés en France, les prothèses dentaires étant par ailleurs de plus en plus souvent fabriquées en Asie du Sud-Est.

Par ailleurs, les assurances complémentaires prendront-elles en charge une partie des frais afférents aux actes pratiqués dans un autre pays que le pays d'origine ?

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

Il faut savoir qu'en France, les dépenses de santé sont prises en charge à hauteur de 78 % en moyenne par les régimes de sécurité sociale et de 12 % par les organismes complémentaires, 10 % de la dépense restant à la charge du patient.

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Comme je vous l'ai indiqué, les traitements seront remboursés à hauteur de ce qu'ils l'auraient été dans l'État d'origine du patient. À ma connaissance, la chirurgie esthétique n'est nulle part prise en charge par les sécurités sociales nationales, mais uniquement par les assurances privées. Encore une fois, la proposition de directive ne vise pas à ouvrir de nouveaux droits en matière de prise en charge : nous restons dans le cadre de l'existant, pas davantage.

Je rappelle que le texte prévoit explicitement le droit à l'information des patients concernant le recours à des soins de santé dans un autre État membre. C'est indispensable pour qu'ils soient protégés et cela suppose une coopération entre les États, qui devront diffuser tous les renseignements nécessaires sur leur système de soins.

PermalienPhoto de Marc Bernier

Cela implique-t-il la transmission des dossiers médicaux des patients au pays dans lequel les soins seront dispensés ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Nous avons prévu une disposition dans ce sens, étant entendu que la transmission des données personnelles ne sera possible que de médecin à médecin.

PermalienPhoto de Jean-Marie Rolland

Délais de recours, procédures et niveaux d'indemnisation variant grandement selon les pays, j'insiste sur la nécessité d'une information exhaustive des patients. Se pose également la question de la santé en ligne, concernant en particulier les médicaments et plus généralement l'information dispensée par l'industrie pharmaceutique, et de la distinction entre l'information générale avant le diagnostic et celle délivrée sur un traitement particulier.

Dans un autre domaine, ira-t-on jusqu'à permettre l'accès au dossier médical informatisé des patients ?

Enfin, concernant le regroupement en cours des laboratoires d'analyses de biologie médicale, quel est le risque de cette concentration sur la qualité des analyses, dont on peut craindre qu'elles soient faites là où les coûts sont les moins élevés ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Le rapport final du Forum pharmaceutique européen, présenté à Bruxelles il y a quelques jours, comporte différentes recommandations visant à améliorer l'accès à l'information et la qualité de celle-ci. Cela va dans le sens de ce que souhaite mon collègue le commissaire Günter Verheugen, chargé des entreprises et de l'industrie. De fait, une distinction nette est nécessaire entre information et publicité. La plus grande prudence est donc de mise dans la formulation du droit à l'information, qui ne doit s'exercer qu'à la demande du patient : elle lui est due, mais elle ne doit pas lui être imposée. À cet égard, l'internet est source de bien des dangers, car on y trouve beaucoup d'informations incontrôlées. L'idée a donc été lancée de certifier des sites d'information sur les médicaments.Le débat est en cours.

Enfin, un dossier médical ne pourra être transmis à un médecin d'un autre État membre qu'à la demande du patient concerné, dans le strict respect des règles concernant la protection des données personnelles.

PermalienPhoto de Jacques Domergue

Certains États, dont la France, ont instauré un numerus clausus pour les étudiants en médecine et d'autres professions de santé. Il en est résulté que des étudiants français ont choisi de faire leurs études de médecine en Belgique, où la sélection était moins rude. La Belgique ayant à son tour renforcé son système de sélection, les étudiants désireux d'apprendre la médecine se tournent maintenant vers de nouveaux États membres, au point que la Pologne aurait commencé à dispenser des cours en anglais, et la Roumanie en français. Qu'en penser ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Cette question n'est pas de mon ressort. Tout au plus puis-je vous indiquer qu'une communication de la Commission relative aux professions de santé sera faite sous peu. Il faut en effet répondre aux inquiétudes qui s'expriment face au manque de médecins et d'infirmières et aux différences de qualification, en prenant garde de ne pas créer de fractures au sein de l'Union car les professionnels de santé qui choisissent de s'installer à l'Ouest font défaut à l'Est. Un débat à ce sujet est nécessaire avec tous les intéressés.

Je sais que certaines universités d'Europe orientale proposent des cours, surtout en anglais et peut-être en français, pour attirer des étudiants d'Europe de l'Ouest. C'est une bonne chose, à condition que certaines normes soient respectées. C'est l'un des objectifs de la proposition de directive.

PermalienPhoto de Claude Greff

Si je m'interroge, comme mes collègues, sur les contentieux éventuels, je suis satisfaite par cette proposition de directive à laquelle je ne vois que des vertus. En effet, elle améliorera les conditions de mobilité pour les patients comme pour les professionnels de santé. Il convient toutefois d'associer les associations de patients à la coopération souhaitée entre les États, qui permettra aussi, j'en suis convaincue, de faire progresser la recherche sur le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et sur le cancer.

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Je pense, comme vous, que la coopération entre les États membres permettra de mieux lutter contre les pandémies. Les ministres européens de la santé réunis à Angers par la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ont traité de sécurité sanitaire et sont convenus qu'une plus grande coopération à ce sujet était nécessaire entre les pays membres mais aussi, dans chaque pays, entre les différents ministères.

La participation des associations de patients à la réflexion est en effet nécessaire. La question vient d'être évoquée au Forum européen de la santé qui s'est tenu à Gastein, en Autriche.

PermalienPhoto de Céleste Lett

En Lorraine, il existe environ 85 000 personnes qui travaillent en Allemagne. Se pose à eux le problème particulier de l'appréciation du taux d'invalidité, qui n'emporte pas les mêmes conséquences en France et en Allemagne. Ils en sont pénalisés : ainsi, un travailleur frontalier auquel un médecin français a reconnu un taux d'invalidité de 66% devra continuer de travailler en Allemagne, ce qui n'aurait pas été le cas s'il avait travaillé en France. Une solution européenne globale est-elle concevable ?

De même, un travailleur frontalier ne peut être hospitalisé dans l'hôpital de son choix ; enfin, les cures sont soumises à l'accord préalable de la caisse allemande.

PermalienPhoto de Pierre Morange

Il serait en effet judicieux que les sites d'informations médicales en ligne soient agréés, car le doute plane sur leur qualité. De plus, la vente de médicaments en ligne ne laisse pas d'inquiéter avec le développement exponentiel de la contrefaçon dans le Sud-Est asiatique, qui est devenue une activité criminelle à haute rentabilité, avec un risque de sanction pénale très inférieur aux risques que l'on fait courir à la population. Quelles mesures pourrait-on prendre pour lutter contre de tels circuits de distribution non sécurisés ?

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Les questions abordées, qui n'entrent pas dans mon champ de compétences, devront faire l'objet d'une réflexion au sein du collège des commissaires. Je sais que mon collègue Vladimir Spidla, chargé des affaires sociales, est préoccupé par les différences de prise en compte des taux d'invalidité, et je suis certaine qu'il s'attachera à proposer une solution.

Ce qui a trait au commerce en ligne et à la contrefaçon relève des attributions de mon collègue Günter Verheugen ; je sais qu'il tente de trouver un moyen de traiter cette question éminemment inquiétante.

PermalienPhoto de Yves Bur

Vous l'aurez constaté, la proposition de directive suscite un intérêt réel. Ma dernière question portera sur les politiques nationales de santé publique, actuellement menées en ordre dispersé, notamment en matière de lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme chez les jeunes. Pourriez-vous nous indiquer les initiatives que la Commission entend prendre en ce domaine pour favoriser une approche globale ?

PermalienPhoto de Pierre Méhaignerie

De fait, tout effort de comparaison des politiques de santé menées dans les États membres nous serait très utile. Il nous aiderait à légiférer et à maîtriser les dépenses de santé.

PermalienAndroulla Vassiliou, commissaire européenne à la sant

Je suis convaincue que l'éducation et l'action sur les déterminants de santé doivent se faire dès le plus jeune âge et c'est une de mes priorités. Dans ce domaine, les décisions juridiquement contraignantes relèvent de la responsabilité des États membres, mais la Commission peut encourager, par ses initiatives, la mise en oeuvre des politiques de santé publique efficaces. À cette fin, dès mon arrivée à la Commission j'ai écrit à tous les ministres de la santé et de l'éducation des États membres pour envisager avec eux les moyens de faire participer les jeunes européens à la lutte contre le tabagisme, l'alcoolisme, le stress et à la sensibilisation sur la santé mentale. J'ai eu plusieurs réponses et nous continuons d'y travailler ensemble. Je souhaite organiser à Bruxelles, l'an prochain, une conférence au cours de laquelle des jeunes auront l'occasion de dire comment mieux traiter ces graves questions.

Je remercie tous les intervenants et je me félicite de ce débat intéressant. Je tiendrai compte de vos observations dans les initiatives relatives à la santé que je prendrai.

M. Pierre Méhaignerie, président. Je vous remercie, Madame la commissaire, pour la qualité de vos réponses.

La séance est levée à onze heures vingt-cinq.