COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L'ÉDUCATION
Mercredi 19 octobre 2011
La séance est ouverte à onze heures quinze.
(Présidence de M. Christian Kert, vice-président de la Commission)
La Commission des affaires culturelles et de l'éducation examine, pour avis, les crédits pour 2012 de la mission « Recherche et enseignement supérieur » sur le rapport de M. Olivier Jardé (Recherche) et de Mme Martine Faure (Enseignement supérieur et vie étudiante).
Nous sommes réunis ce matin pour nous prononcer sur les crédits pour 2012 de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Je vous rappelle que nous avons entendu hier M. Laurent Wauquiez, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, qui a déjà répondu à un nombre important de questions. Je demanderai donc à nos rapporteurs de nous faire une présentation de leur avis, puis nous passerons aux explications de vote et au vote.
La recherche, c'est notre avenir, et d'autant plus en période de crise, puisque d'elle dépendent l'innovation et la valorisation. C'est un budget important et conforme aux engagements qui ont été pris, tant sur le plan financier que sur celui des recrutements. La mission n'étant pas concernée par le non remplacement d'un départ sur deux, les effectifs de la recherche sont complètement maintenus.
Le budget de la recherche représente 14 milliards d'euros, soit près de 5 % du budget de l'État, auquel il convient d'ajouter le crédit d'impôt recherche, qui fait la jonction entre la recherche académique et les entreprises. Il permet aux partenaires de mieux se connaître pour être plus efficaces.
À cela s'ajoutent les dotations du grand emprunt : sur 35 milliards d'euros, les investissements d'avenir dont bénéficie la recherche française atteignent 22 milliards, soit plus de 62 %. En 2012, les laboratoires devraient ainsi disposer de 1,2 milliard de crédits structurants.
Nous sommes devant des moyens consolidés, mais la recherche ne se réduit pas à des chiffres : pour faire partie d'équipes de recherche depuis de nombreuses années, je voudrais souligner que les scientifiques ont besoin d'une certaine reconnaissance de la Nation, en contrepartie de l'honneur d'être chercheur.
Beaucoup de jeunes n'envisagent pas, ou plus, de se diriger vers la recherche et il faut les y inciter. Une Nation a besoin de chercheurs de haut niveau, mais aussi des structures pour les accueillir. Je me réjouis, à cet égard, que des questions qui ont pu se poser naguère, comme le maintien du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) en tant que tel, par exemple, ne soient plus d'actualité. Cette grande et ancienne institution a su se réorganiser autour d'instituts qui permettent de mieux articuler des recherches menées, le plus souvent, à la jonction des domaines de la connaissance. Faut-il rappeler que l'IRM n'a pas été conçu en fonction de ses applications pour les diagnostics médicaux, pas plus que le Laser pour son utilisation industrielle ou médicale ?
La jonction entre les équipes de recherche, finalisée sous forme d'alliances prend dès lors une grande importance.
Au-delà des chiffres, donc, il est important qu'existent des structures efficientes et que soit reconnu le travail des chercheurs.
Le maintien des effectifs est d'autant plus appréciable que l'âge des chercheurs devient une des questions cruciales des dix prochaines années. Je serai, comme 50 % des chercheurs, à la retraite dans dix ans. En effet la moitié de nos chercheurs ont entre 50 et 60 ans. Se pose donc un problème de recrutement et de renouvellement des équipes, ce qui renforce le besoin de valoriser le métier de chercheur.
Le crédit d'impôt recherche que j'évoquais en introduction permet des développements à la jonction entre les universités et les entreprises. L'augmentation des activités de recherche et développement des entreprises a dépassé 1 % en 2009 alors que le PIB baissait. Le dispositif a connu un certain nombre d'aménagements dont une meilleure prise en compte de l'emploi des docteurs, ce qui me semble important, la France ne valorisant pas assez ses docteurs par rapport à ses ingénieurs.
La pérennisation du dispositif de remboursement immédiat des créances de crédit d'impôt recherche est une mesure utile pour les PME. Puisqu'il nous faut tenir compte du classement de Shanghai et des classements internationaux de ce type, le crédit d'impôt recherche donne à la recherche en entreprise en France une réelle attractivité, renforcée par la compétence de nos chercheurs.
En conclusion, le bon budget qui nous est proposé consolide notre capacité de recherche et d'innovation.
La partie thématique de mon avis porte sur les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES. Nous avons voté leur création en 2006, nous sommes en 2011. Cinq ans après, il me semble intéressant d'en faire une évaluation. Le PRES est-il une structure définitive ou intermédiaire ? Certains PRES conduisent à des fusions, après Strasbourg, qui n'est d'ailleurs pas passé par la forme PRES, comme à Aix-Marseille ou à Bordeaux : doit-on généraliser cette évolution ?
Nous avons en France deux niveaux d'enseignement supérieur, les universités et les grandes écoles, de très haut niveau, auxquelles je suis attaché mais qui sont essentiellement professionnalisantes. Elles nous sont très enviées, mais font relativement peu de recherche qui reste surtout universitaire. Le but des PRES était donc de regrouper les forces de recherche et de les recentrer autour de l'université en y associant les grandes écoles. Un étudiant issu d'une grande école française et docteur, diplôme reconnu partout, est évidemment très apprécié sur le plan international.
Je me suis intéressé à deux PRES représentatifs des deux formes qu'ils peuvent prendre : celle d'un établissement public et celle d'une fondation de coopération scientifique.
Le PRES Sorbonne Universités est très dynamique, il regroupe les universités Paris-Assas, Paris-Sorbonne, Pierre et Marie Curie et, plus surprenant, le Muséum d'histoire naturel. Son statut de fondation semble parfaitement adapté.
Le PRES UniverSud, constitué autour de l'université de Paris Sud – Orsay, est directement concerné par le projet du « Plateau de Saclay » et son fonctionnement s'en ressent largement. Le désengagement de ses dirigeants me semble néanmoins regrettable.
Depuis 2010, les PRES peuvent, comme c'était souhaitable, délivrer des diplômes, ce qui n'était possible, jusque-là, qu'aux universités.
La valorisation de la recherche publique n'avait pas été abordée directement dans la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006 qui créait les PRES. Elle a un rôle important mais relève souvent de petits services des universités et n'est pas à la mesure des besoins. Faire du PRES le lieu de la valorisation me semble donc une excellente chose qui se met efficacement en place.
Le PRES est ainsi une structure souple bien adaptée à l'harmonisation de nos dispositifs de recherche et d'enseignement supérieur et qui permet toute une série d'actions partagées, allant de la fusion complète à la simple mutualisation de certaines actions, comme dans le domaine de la vie universitaire.
Je conclurai en citant le président du PRES Sorbonne Universités : pour les universités, « le bonheur est dans le PRES ! »
L'essentiel de mon avis budgétaire est consacré au plan licence.
Je ferai, quand même, quelques remarques sur le budget 2012, qui devrait augmenter, au total, de 540 millions d'euros.
Certes, l'enseignement supérieur constitue une priorité budgétaire du gouvernement, mais, ainsi que je le montre dans mon avis, l'engagement du Président de la République d'augmenter de un milliard d'euros par an les moyens de ce secteur n'a pas été tenu, quoi qu'en dise avec beaucoup d'assurance le ministre, M. Laurent Wauquiez.
Je rappelle en outre que ce budget ne « délivre » pas que des crédits de paiement, immédiatement consommables. Il repose aussi sur des autorisations d'engagement, étalées sur plusieurs années, et des montages financiers complexes, comme les partenariats public-privé et les intérêts de la cession par l'État d'une partie de sa participation dans EDF, tous deux destinés à financer les programmes immobiliers universitaires.
Je ne m'engagerai pas dans la bataille des chiffres, mais le tableau comparatif figurant dans mon rapport indique que les moyens ont augmenté de 922 millions d'euros en 2008, puis de 1 154 millions en 2009, puis de 995 millions en 2010, puis de 706 millions en 2011.
Ce budget est donc moins généreux qu'il n'y paraît et peu lisible.
Il ne permettra pas à notre pays de rattraper son retard en matière de financement de l'enseignement supérieur. Je rappelle que nos dépenses cumulées par étudiant – soit 56 597 dollars – se situent bien en dessous de la moyenne des pays européens membres de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) – soit 62 985 dollars. En outre, comme l'a établi un récent rapport du Centre d'analyse stratégique, la France se situe au bas de l'échelle en ce qui concerne le taux d'encadrement dans l'enseignement supérieur, avec seulement 5 enseignants pour 100 étudiants.
Deux derniers chiffres enfin : la dépense par étudiant s'élevait, en 2009, à 14 850 euros en classe préparatoire et à 10 220 euros seulement à l'université.
Venons-en au plan pluriannuel pour la réussite en licence, un chantier ouvert par le ministère de l'enseignement supérieur à la demande des organisations étudiantes.
Je rappellerai au préalable que le cursus de licence a accueilli en 2010 750 000 étudiants, hors instituts universitaires de technologie.
Couvrant les années 2008 à 2012, ce plan appuie les initiatives des universités, déclinées autour de quatre grands axes : l'orientation et l'accueil des nouveaux étudiants ; le renforcement de l'encadrement pédagogique, avec la mise en place d'enseignants référents, l'augmentation des horaires d'enseignement, la réduction de la taille des groupes de travaux dirigés et la diversification des méthodes pédagogiques ; le suivi des étudiants en difficulté ; enfin, la professionnalisation, notamment par la mise en place de stages.
Quel bilan peut-on tirer de tous ces efforts ?
Le plan a eu, incontestablement, un effet « déclencheur ». Mais cette « mobilisation » en faveur de la réussite en licence, loin d'être totale, est, en réalité, très brouillonne, très disparate et très décevante.
Dans certains établissements, elle s'est traduite par la réactivation de mesures déjà mises en oeuvre et dans les autres, on constate soit qu'il ne se passe rien soit que les dispositifs mis en place souffrent d'une extrême « dispersion », faute de vision globale de la stratégie à mener au niveau de l'établissement. Par ailleurs, les mesures adoptées ne sont ni suivies ni – c'est plus grave – évaluées.
Par ailleurs, le plan licence n'a pas permis d'enclencher la révolution pédagogique attendue par les étudiants. Par exemple, la pédagogie de projet, la plus susceptible de motiver les étudiants, occupe, contrairement à ce qui se pratique au lycée, une place qui reste marginale. Les cours en amphithéâtre continuent en outre d'être très présents. Outre les contraintes budgétaires, qui seront évoquées plus loin, le principal obstacle à de nouvelles modalités pédagogiques est, selon plusieurs de mes interlocuteurs, le statut des enseignants-chercheurs, qui ne valorise pas assez leur investissement dans l'enseignement. Seule grande réussite à noter à ce niveau d'études, les licences professionnelles, qui sont un vrai sujet de satisfaction.
Sur le plan financier, le plan licence représente un effort pour l'État, cumulé sur cinq ans, de 730 millions d'euros. Cet effort doit être cependant relativisé, la progression des moyens dans l'enseignement supérieur restant concentrée sur les autres filières, en particulier celle du master. Or le développement des volumes horaires d'enseignement, la réduction de la taille des groupes et le recours aux enseignants référents ont un coût qui rend problématique le « modèle économique » du plan licence. À ce contexte budgétaire défavorable s'ajoutent des contraintes techniques. En effet, les crédits du plan sont « fléchés », tandis que le budget des établissements ayant accédé aux compétences élargies de la loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « LRU », lui, est « global ». Les universités étant ainsi libres de répartir, entre leurs composantes et leurs filières, les moyens attribués par l'État, ce processus d'allocation est inadapté au financement d'une politique aussi transversale que celle de la réussite en licence. L'absence de comptabilité analytique rendant de surcroît difficile la « traçabilité » des crédits, ceux-ci ont pu être utilisés pour financer des heures complémentaires ou… la rénovation du parking d'une université.
Pour que le plan licence soit une réussite, il faudrait donc changer d'échelle, en agissant sur plusieurs leviers, tout en écartant les fausses bonnes idées.
Ainsi, il ne faut surtout pas « secondariser » l'université – ce serait nier la spécificité du premier cycle –, mais faire en sorte que tous les élèves de seconde puissent être considérés comme des étudiants potentiels et que la transition du lycée à l'université soit organisée dans les meilleures conditions. On pense inévitablement au dispositif d'orientation qui nous fait cruellement défaut.
De même, l'établissement de pré-requis, la mise en place d'une année de propédeutique, supprimée en 1968, les contrats d'études imposées aux étudiants décrocheurs et la licence en quatre années devraient être écartés, car ces solutions sont soit stigmatisantes, soit irréalistes.
En revanche, l'orientation devrait commencer dès la classe de première et concerner l'ensemble des filières post-bac. Mais il conviendrait d'aller plus loin en matière d'orientation, en mettant en place, avec l'appui des régions, un service public facilitant l'accès à une information et un conseil de qualité sur les formations et les métiers.
Par ailleurs, l'augmentation des places en section de technicien supérieur (STS) et en institut universitaire de technologie (IUT) est préférable à la fixation, au niveau national, de quotas pour les bacheliers technologiques. Des semestres « tremplins » et des « secondes rentrées » devraient par ailleurs être proposés à ces deniers afin de faciliter leur réorientation entre l'université et les filières courtes.
Quant aux étudiants décrocheurs, des mesures d'accompagnement diversifiées, à condition de les inscrire dans une stratégie cohérente, devraient être mises en oeuvre. Des semestres « rebonds » pourraient être notamment institués, afin de consolider les acquis des étudiants fragiles, par exemple au cours de l'été, entre le deuxième et le troisième semestre, mais de telles mesures devraient être concertées et travaillées.
Enfin, la pluridisciplinarité devrait être encouragée en licence, car elle faciliterait les réorientations et préparerait les étudiants aux études en master.
Un dernier mot sur les moyens et la pédagogie. L'abandon du modèle « tout amphi » postulé par le plan licence devrait conduire à des créations de postes supplémentaires, tandis que le système d'allocation des moyens aux universités devrait être réformé afin qu'un rééquilibrage des pondérations entre universités littéraires et scientifiques rende possible la mise en place, dans toutes les formations, d'une licence à 1 500 heures d'enseignement, car nous sommes très loin du compte aujourd'hui.
Surtout, la nouvelle licence devrait s'attacher – ce point étant essentiel – à créer de nouvelles modalités pédagogiques, qui fassent appel au travail de l'étudiant, tout en proposant des enseignements plus ou moins conceptualisés. Ceci suppose de valoriser l'investissement pédagogique des enseignants-chercheurs en évaluant cet aspect de leur travail au moment de leur titularisation et de leur passage du corps de maître de conférences à celui de professeur des universités. Ceci implique également d'identifier, notamment auprès des PRES, des structures de formation des doctorants à la pédagogie qui pourraient être les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM), ce travail devant donner lieu à une large concertation.
Enfin, il faudrait lutter contre les racines sociales de l'échec, notamment le travail étudiant, souvent plus subi que choisi, en instaurant une allocation d'études, versée sous conditions de ressources, afin d'aider les jeunes issus de milieux défavorisés à construire leur autonomie.
Ce chantier est urgent, car l'ascenseur social n'est plus en panne mais commence à redescendre. En 2005, M. Laurent Wauquiez, alors député, écrivait dans un rapport que « la vie étudiante n'est pas une parenthèse enchantée ». Aujourd'hui, six ans après, pour certains d'entre eux du moins, la situation s'est dégradée.
Pour toutes ces raisons et d'autres que je n'ai pas voulu développer, je donnerai un avis défavorable à l'adoption des crédits 2012.
Le vote du groupe SRC sera conforme à la position exprimée par Mme Martine Faure. Nous n'avons en effet aucune raison objective d'adopter ce projet de budget qui est le plus drastique, depuis le début du quinquennat, pour l'enseignement supérieur et la recherche. Des efforts ont pu être accomplis en début de législature, peu après l'adoption de la loi « LRU ». Mais il est manifeste – en particulier dans ce projet de budget – qu'on a, depuis, laissé en l'état le chantier de la remise à niveau de l'université.
Se pose un véritable problème d'opacité que nous avons d'ailleurs souligné auprès du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche lors de son audition par la Commission. Opacité des chiffres, en premier lieu : à périmètre budgétaire constant, nous sommes très loin de la progression des crédits dont faisait état le ministre. On peut certes mêler des crédits d'origine diverse en une « mauvaise soupe » pour afficher que les ambitions et les objectifs fixés ont été atteints, mais en réalité, les moyens sont en retrait, qu'il s'agisse des budgets de fonctionnement, essentiels pour assurer les enseignements, ou de la masse salariale. Je confirme donc l'analyse de Mme Martine Faure : les objectifs ambitieux du plan licence ne pourront pas être tenus. Aujourd'hui, près d'une vingtaine d'universités sont incapables de « boucler » leur budget de fonctionnement pour l'année universitaire en cours faute de moyens suffisants ; des négociations sont d'ailleurs en cours avec le ministre. On ne peut donc pas adresser un satisfecit au projet de budget lorsqu'on connaît les données réelles.
En deuxième lieu, je déplorerai l'opacité de la gouvernance, que nous avions déjà dénoncée lors de l'examen de la loi « LRU ». Elle a aujourd'hui pour conséquence une extrême défiance du monde universitaire à l'égard des autorités décisionnaires.
Je souhaite aussi souligner l'opacité des nouvelles structures mises en place. Les PRES ont été évoqués. Mais s'il n'y avait qu'eux… Un nombre incalculable de nouvelles entités ont été créées dans l'enseignement supérieur. Plus personne ne s'y reconnaît !
J'en viens aux moyens consacrés à la vie étudiante, fondamentaux pour que ne s'aggravent pas les déséquilibres dans l'accès à la qualification universitaire. Certes, le dixième mois de bourse a été mis en place et devrait, semble-t-il, disposer de financements dans le projet de budget pour 2012. Mais il demeure insuffisant pour procéder aux rattrapages nécessaires.
Je ferai enfin part d'une forte inquiétude : nous constatons, au plan territorial, une accélération de la concentration du paysage universitaire, très préoccupante quant à l'accès de tous aux formations supérieures.
Pour l'ensemble de ces raisons, nous émettrons un avis défavorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur et de la recherche. Plus encore, nous dénonçons vigoureusement la communication gouvernementale : les chiffres annoncés ne reflètent pas la réalité budgétaire.
Une fois n'est pas coutume, je citerai Lénine qui a dit je crois : « les faits sont têtus ! » Le groupe UMP salue, pour sa part, les efforts budgétaires consentis en faveur de la recherche et de l'enseignement supérieur. Le groupe Socialiste, radical et citoyen conteste les chiffres du Gouvernement ; mais lors de son audition hier, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a très précisément présenté l'effort consenti en matière de recherche. Nous avons écouté avec satisfaction la présentation des crédits qui y sont consacrés par notre rapporteur pour avis Olivier Jardé. En revanche, le groupe UMP ne partage pas les propos de Mme Martine Faure sur le budget de l'enseignement supérieur, ceux-ci lui semblant reposer sur une analyse inexacte des crédits. Le groupe UMP est donc favorable à l'adoption des crédits de la recherche et de l'enseignement supérieur.
Le Gouvernement s'est enorgueilli de présenter cette année un projet de budget en croissance pour l'enseignement supérieur et la recherche. Ce n'est pas tout à fait faux sur un plan formel : les autorisations d'engagement augmenteront de 1,7 % et les crédits de paiement progresseront de 1 %. Mais si l'on neutralise l'opération de transfert progressif à la mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur » (MIRES) du paiement des pensions, la croissance annoncée est beaucoup plus modeste : elle n'est plus que de 1 % en autorisations d'engagement et est presque nulle en crédits de paiement puisqu'elle s'élève à 0,008 %.
Les moyens consacrés spécifiquement à la recherche régressent, hors paiement des pensions, de 0,1 % en autorisations d'engagement et de 1,4 % en crédits de paiement. Au total, les moyens de la mission interministérielle auront chuté de plus de 4 % en euros constants ces deux dernières années et se situeront finalement, en 2012, à un niveau inférieur à celui qu'ils atteignaient en 2007.
La situation n'est donc guère reluisante. Aucun emploi statutaire n'a été créé, ce que la France n'avait jamais connu auparavant. Le nombre de contrats de travail à durée déterminée et de contrats précaires a explosé : il est de 15 000 pour la seule Agence nationale de la recherche ! Vous n'avez pas réussi à développer la recherche privée qui reste une des grandes carences de notre pays ; le soutien à la recherche industrielle stratégique diminue d'environ 21 %. Nous déplorons ces orientations, sachant l'état de nos industries et des emplois qui y sont attachés et connaissant la faiblesse des moyens que les entreprises françaises consacrent à la recherche et au développement : ils n'atteignent que 1,3 % de notre produit intérieur brut, à comparer à un taux de 7 % au Japon, de 1,9 % aux États-Unis et de 1,8 % en Allemagne.
Votre politique visant à encourager les laboratoires de recherche publics à devenir des prestataires de services aux entreprises a échoué. Elle a parfois conduit, comme chez Sanofi, à la fermeture des centres de recherche de grandes entreprises privées. Nous retrouvons le même effet d'aubaine dans le crédit d'impôt recherche, niche fiscale qui a coûté à la recherche 5,8 milliards d'euros en 2009 et n'a pas permis le « bond en avant » attendu des moyens consacrés à la recherche et développement. Nous estimons donc que cette mesure doit être mise en cause et remplacée par des subventions favorisant la création d'emplois et les petites et moyennes entreprises innovantes.
La France occupe aujourd'hui le quatorzième rang mondial en termes d'effort de recherche. L'objectif, qui avait été fixé par le Président de la République, de le porter rapidement à 3 % de notre produit intérieur brut n'a aucune chance d'être atteint. Cela supposerait de l'augmenter de 5 % par an pendant dix ans. Ce n'est pas le chemin que vous prenez… La France risque donc d'occuper durablement le vingt-sixième rang – sur trente-deux – pour son budget civil de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Concernant les pôles d'excellence, on constate une croissance des inégalités territoriales. Dans le contexte actuel de dégradation, il est permis de s'interroger sur la pertinence du privilège qui est accordé à ces structures. Une quinzaine de projets devraient être retenus et financés – leur liste a été complétée au printemps dernier pour intégrer des projets portés par des laboratoires de renom de la recherche française –, mais la répartition spatiale des laboratoires pose question. Le président de la Conférence des présidents d'université s'en est ému en avril dernier pour regretter que les lauréats se concentrent essentiellement en région parisienne, en Alsace, en région Rhône-Alpes et, dans une moindre proportion, dans le Sud – au profit de Montpellier et au détriment d'Aix-Marseille.
Le financement de pôles d'excellence par la voie du grand emprunt a, dans les faits, conduit à promouvoir un système universitaire à deux vitesses. Il se traduira par un renforcement des inégalités territoriales et mettra la moitié des universités « sur la touche ». De surcroît, il soumet à une gouvernance rigide et contrainte les universités sélectionnées, en excluant les représentants des personnels et des étudiants du conseil d'administration. Ce n'est pas notre conception de l'enseignement supérieur et de la recherche. Nous sommes favorables à des financements adossés au budget de l'État, en conformité avec les missions de production et de transmission des savoirs de l'université.
Il convient de garantir l'autonomie des universités. Mais l'autonomie que vous préconisez, de même que celle des présidents d'université à l'égard du personnel, signifient en réalité une perte d'autonomie des laboratoires de recherche.
Si nous disons « oui » à l'autonomie des universités, c'est parce que nous disons « non » à la dépendance de la recherche publique, notamment à l'égard des marchés. C'est pourquoi le groupe GDR votera contre l'adoption du projet de budget de la recherche.
S'agissant de l'enseignement supérieur, le budget des universités semble être le grand perdant du projet de loi de finances. Sa légère augmentation ne couvrira même pas l'inflation. Le ministre nous a fait part, hier, de son plaisir de voir se multiplier les grues sur les campus universitaires. Le tableau est ainsi bien brossé, car à l'exception notable des crédits octroyés aux établissements d'enseignement supérieur privés, les crédits pour l'immobilier et les bibliothèques sont quasiment les seuls à augmenter dans le programme. Il est clair que cette politique est très profitable aux partenariats public-privé, mais moins aux étudiants fréquentant les établissements qui n'ont pas été sélectionnés pour ces chantiers. Je rappelle, sur ce point, que la Cour des comptes avait déploré l'absence d'efficacité et de cohérence de ces dispositifs, tandis que le Conseil constitutionnel avait recommandé que les contrats de partenariat gardent un caractère dérogatoire.
Il est toujours procédé à l'allocation des moyens selon des critères de performance, ce que nous continuons à condamner : ce sont les établissements dont le taux d'échec est le plus élevé qui sont les plus pénalisés. J'ai cité hier M. Jean-Louis Gout, président de l'université de Pau qui témoignait de sa détresse pour maintenir l'équilibre budgétaire ; le ministre a sobrement reconnu des « frictions » dans certains établissements…
Concernant les moyens consacrés à la vie étudiante, le projet de budget est très mauvais. Les oeuvres universitaires étudiantes sont encore amputées, avec une baisse de 5,5 % pour les centres régionaux, ce qui est particulièrement inquiétant pour leurs personnels et témoigne d'une volonté de réduire le périmètre de ces structures pour laisser le champ libre à des intervenants extérieurs.
La pérennisation du dixième mois de bourse n'est pas acquise. Les crédits du fonds d'aide d'urgence créé en 2008 stagnent et demeurent soumis à des décisions discrétionnaires.
Enfin, même si ce point ne relève pas directement du budget de l'enseignement supérieur, je souhaite souligner que nous sommes très inquiets du doublement de la taxe qui pèsera sur les mutuelles et donc sur la santé des étudiants, alors que les données concernant leur accès aux soins sont alarmantes.
Pour l'ensemble des raisons que je viens d'évoquer, les membres du groupe GDR voteront contre les crédits de l'enseignement supérieur.
Je serai bref en déclarant que les députés du groupe du Nouveau centre émettront, pour leur part, un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Pascal Deguilhem a indiqué qu'à périmètre et euros constants, on constatait une diminution des crédits consacrés à la recherche. Le rapporteur pour avis s'est-il livré au même exercice et en a-t-il tiré les mêmes conclusions ? Sinon, la commission ne pourrait-elle procéder aux mêmes calculs pour confirmer – ou infirmer – les propos tenus par notre collègue ?
Par ailleurs, nous observons une croissance importante du nombre d'acronymes dans le domaine de la recherche qui en compte quarante-sept nouveaux… Je citerai à cet égard les propos de M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes : « pour la Cour, le moment est peut-être venu de s'assurer, dans ce paysage très évolutif marqué par une succession d'annonces – il s'agit des quarante-sept acronymes – que la ligne stratégique du Gouvernement est claire ». Le rapporteur pour avis a-t-il établi un bilan de toutes les créations de structures intervenues depuis 2007 ?
Enfin, ma dernière question concerne les pôles d'excellence, qui sont en quelque sorte la « Rolex » des universités. Mais qu'en est-il des autres pôles universitaires ? Sont-ils les pôles de la médiocrité ?
Monsieur le rapporteur pour avis, nous avons, hier, longuement interrogé le ministre sur la constitution et l'évolution des PRES. J'aurais apprécié que la présentation que vous en avez faite soit conforme aux propos qu'il nous a tenus. Il a ainsi déclaré qu'il ne souhaitait pas seulement des fusions d'universités, mais qu'il était aussi favorable à des mutualisations, ne serait-ce que pour assurer un équilibre entre territoires. Je n'ai pas entendu de telles nuances dans vos propos. Je rejoins ainsi M. Marcel Rogemont, puisque dans ses recommandations, la Cour des comptes a indiqué qu'il fallait donner aux PRES un second souffle. Monsieur le rapporteur, quelle est votre position sur ce point ?
Ma deuxième question porte sur les premiers usagers de l'université que sont les étudiants et les enseignants chercheurs. Monsieur le rapporteur pour avis, vous n'avez pas évoqué les « thésards », alors qu'aujourd'hui, le nombre de thèses n'augmente pas. Cela pose question en termes de formation et de statut des enseignants-chercheurs. Celui-ci doit évoluer, notamment pour assurer la survie et l'évolution des PRES. Qu'en pensez-vous ?
Enfin, pourriez-vous nous indiquer le montant du financement accordé aux centres régionaux des oeuvres universitaires ? Leurs moyens sont en baisse de 7,6 %, ce qui pénalise les étudiants en situation de précarité, d'autant qu'au vu des évolutions touchant le secteur des assurances complémentaires santé, leur budget dédié à la santé est dans une situation très préoccupante. Des études récentes montrent en effet que les étudiants sont deux fois plus nombreux que le reste de la population à devoir renoncer à des soins, faute de moyens.
Mme Martine Faure a évoqué, dans son rapport, les questions relatives à la vie quotidienne des étudiants et propose la mise en place d'une allocation de formation, délivrée sur conditions de ressources.
De nombreux étudiants rencontrent, en effet, de nombreuses difficultés. 35 % d'entre eux doivent travailler pour financer leurs études ; 10 % sont obligés de travailler à temps plein, ce qui emporte évidemment des conséquences sur leur cursus universitaire.
Mme Amiable a souligné la baisse des budgets alloués aux oeuvres universitaires. Je voudrai, pour ma part, insister sur le poste logement, particulièrement important. À chaque rentrée universitaire, sont diffusés des reportages télévisés sur la recherche par les étudiants de logements privés. On voit fleurir dans les villes universitaires des résidences étudiantes privées, dans lesquelles les loyers évoluent entre 430 et 800 euros. On voit aussi apparaître de nouvelles initiatives, comme la suggestion de loger des étudiants chez des familles ou des personnes âgées, moyennant la délivrance de services. Mais on ne parle plus du tout des cités universitaires. Or, celles-ci sont synonymes d'accessibilité, même si les loyers commencent à être élevés – 200 à 400 euros par mois. Elles sont aussi le lieu d'une vie sociale importante et d'une vie associative ; elles permettent aux étudiants de se rencontrer et de travailler ensemble ; elles offrent des services sociaux. Or on voit que des cités universitaires, comme celle d'Antony qui accueillait des étudiants célibataires ou en couple et mettait à leur disposition des crèches, sont désormais laissées à l'abandon ; des bâtiments sont même détruits. Je n'ai pas connaissance d'un plan de construction de nouvelles cités pour répondre au besoin de logement ; pouvez-vous m'éclairer sur ce point ?
Mme Martine Faure a eu raison de mettre le doigt sur ce qui est aujourd'hui la question principale en matière de vie étudiante, à savoir la création d'une allocation d'études sous conditions de ressources. La situation financière des étudiants et les problèmes de santé et de logement qu'ils rencontrent sont très préoccupants. Comme l'a indiqué Mme Buffet, plus de 30 % d'entre eux doivent travailler pour payer leurs études. La moitié des étudiants vivent avec moins de 400 euros par mois ; un quart ont du mal à « joindre les deux bouts ».
S'agissant de leur santé, l'enquête récemment menée par la mutuelle des étudiants est extrêmement alarmante : aujourd'hui, 20 % des étudiants renoncent à se faire soigner en raison de difficultés financières ; 19 % ne disposent pas d'une assurance complémentaire santé. Une mesure forte est donc nécessaire pour répondre aux besoins.
Ma question portera sur la pratique sportive à l'université : il y a trois ans, a été remis à Mme Valérie Pécresse, alors ministre chargée de l'enseignement supérieur, un très bon rapport de MM. Stéphane Diagana et Gérard Auneau sur le développement du sport à l'université. Il montrait que 70 % des étudiants souhaitaient faire du sport, mais que seulement 20 % avaient effectivement une pratique sportive, cet écart étant imputable au manque d'infrastructures mais aussi à l'absence de réelle volonté politique de faire entrer le sport à l'université et, plus largement, dans l'enseignement supérieur. Madame la rapporteure pour avis, que pensez-vous de la proposition qui consisterait à encourager la pratique sportive à l'université en attribuant aux étudiants des crédits ECTS ?
Je pense que nous pouvons saluer les efforts de communication et de prestidigitation visant à faire croire à la population – et parfois aux députés – que les moyens destinés aux universités et à la recherche progresseraient de manière significative. Lorsqu'on interroge les universitaires et les chercheurs, on constate au contraire une profonde dépression.
Le budget qui nous est soumis est en trompe-l'oeil ; nous ne pourrons donc pas l'approuver. D'un côté, nous entendons des annonces et l'autosatisfaction ; de l'autre, on constate qu'à périmètre et euros constants, les moyens régressent.
Le crédit d'impôt recherche a certes certaines vertus, mais son champ s'est progressivement étendu pour englober des activités sans lien avec la recherche. Il a été très largement dénoncé par la Cour des comptes. Entend-on tenir compte de ses remarques acerbes et critiques ?
Comme cela a été rappelé, « les chiffres sont têtus ». En voici quelques-uns : la France occupait en 1995 la sixième place en matière d'enseignement et de recherche au sein de l'OCDE ; elle n'occupe plus aujourd'hui que la treizième place. Pour la seule recherche civile, la France ne détient que le vingt-sixième rang, ce qui est franchement humiliant. Je pose donc la question : va-t-on engager une remise à niveau ? Nous ne comptons que 6 enseignants pour 100 étudiants ; la moyenne au sein de l'OCDE se situe entre 8 et 9 enseignants pour 100 étudiants. Il nous faudrait donc au moins un tiers de plus d'enseignants.
Enfin, on constate dans le projet de budget une régression très significative et inquiétante des moyens de la recherche universitaire en sciences de la vie, biotechnologies et santé qui sont des domaines clefs. Monsieur le rapporteur pour avis, pouvez-vous le confirmer, ou bien s'agit-il, comme l'a suggéré hier le ministre, d'une erreur de présentation ?
Je souhaitais compléter la question de M. Touraine concernant le crédit d'impôt recherche. Je ne reviendrai pas sur le fait que le crédit d'impôt recherche témoigne tout particulièrement de l'effort fait en faveur de la recherche – 4,7 milliards d'euros lui étaient consacrés en 2010 –, mais je soulignerai qu'a contrario, les dépenses de recherche-développement des entreprises progressent très modestement – 1 % en 2009. Je rappellerai les deux recommandations que formulait le rapport d'information de la mission d'évaluation et de contrôle déposé en juin 2010 par MM. Alain Claeys, Jean-Pierre Gorges et Pierre Lasbordes : d'une part, créer des équipes de contrôle du crédit d'impôt recherche communes aux services fiscaux et aux services du ministère de la recherche tant au niveau central qu'au niveau régional – pour les grandes régions – et, d'autre part, mettre en place des outils qualitatifs de suivi de la performance du crédit d'impôt recherche. En tant que rapporteur de ce budget, avez-vous pu vérifier quelles suites ont été données à ces deux recommandations qui émanent de parlementaires?
Mme Martine Faure a insisté sur le recentrage autour de l'université, et notamment sur l'absence de passerelles entre le lycée et l'université. Or, la pluridisciplinarité en tant que passerelle entre les différentes formes de connaissances académiques devrait être encouragée car elle pourrait faciliter les orientations. Qu'en pensez-vous ?
Notre pays compte 2,3 millions d'étudiants. Seuls 20 % d'entre eux bénéficient d'une bourse du sixième échelon alors que trois sur quatre doivent trouver des « petits boulots » pour assumer le coût de leurs études. Le niveau des bourses a augmenté au bénéfice des classes moyennes et défavorisées, mais ce n'est certainement pas suffisant dans la mesure où à Paris et dans nos régions, le logement représente un poste lourd dans le coût des études, les capacités d'accueil en cité universitaire étant toujours très faibles, comme l'ont signalé plusieurs collègues. Le budget consacré à ces postes ne répond toujours pas aux énormes besoins. Nous ne pourrons donc pas le voter mais nous souhaitons connaître les projets du ministère en ce domaine.
Ma question porte sur le plan licence. Mme Martine Faure souligne que le plan licence propose une exigence académique, à savoir 1 500 heures. Comment ces heures sont-elles assurées ? Le sont-elles à budget constant ?
Je répondrai d'abord à Mme Martine Martinel que la mise en place des 1 500 heures prendra de longues années s'il n'y a pas d'augmentation de crédits permettant de créer des postes. Cette création de postes est pourtant indispensable si l'on veut passer de 450 à 1 500 heures, mais elle est actuellement impossible à budget constant.
Mme Françoise Imbert relève que la vie étudiante est toujours aussi difficile malgré l'augmentation du montant des bourses. C'est la raison pour laquelle il conviendra d'envisager la création d'une allocation d'autonomie car on ne peut pas éternellement constater la panne de l'ascenseur social sans agir.
La question des passerelles a été évoquée par Mme Colette Langlade. Les passerelles constituent à mon sens un outil d'orientation indispensable, qu'il importe de mettre en place si l'on veut prévenir l'échec en licence. Il faut créer des occasions d'échanges voire de travaux communs entre enseignants des lycées et professeurs d'université.
Pour répondre à M. Marcel Rogemont sur les acronymes, je dirai que celui que j'ai trouvé le plus surprenant est celui du modèle d'allocation des moyens aux universités, « SYMPA », parce qu'il est en complet décalage avec sa signification ; il s'agit en effet d'ajouter aux difficultés des universités en mettant l'accent sur les compétences et les résultats.
Comme Mme Marie-George Buffet, je suis préoccupée par les conditions de travail des étudiants, le prix des logements et la vie en cité universitaire dont le caractère déprimant était déjà dénoncé dans le rapport qu'avait rédigé en 2005 M. Laurent Wauquiez, aujourd'hui ministre. On ne s'est toujours pas attaqué à l'heure actuelle au problème structurel que constituent ces conditions faites aux étudiants.
Mme Marie-Hélène Amiable a évoqué le modèle d'allocation des moyens qui n'est pas appliqué et dont l'augmentation demeure en-deçà de l'inflation pour beaucoup d'établissements. Je rappellerai en outre que les crédits consacrés aux centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) sont réduits de 5,5 % dans ce budget, ce qui est consternant ; cela représente une baisse de 80 millions d'euros ! De plus, le dixième mois de bourse, qui n'est pas pérenne, pourra être remis en cause en 2013.
S'agissant de la place du sport à l'université, je partage l'avis de M. Régis Juanico : les étudiants n'ont pas la possibilité de faire du sport à l'intérieur des campus, bien que cela soit essentiel à leur équilibre. Je ne peux donc que préconiser de mettre l'accent à l'avenir sur cet aspect de la vie à l'université.
Monsieur Rogemont, les crédits de la recherche figurent dans les tableaux de mon rapport provisoire qui est en distribution. Effectivement les crédits de paiement à périmètre constant sont en baisse de 80 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2012 par rapport au budget de 2011, sur 14 milliards d'euros je le rappelle. La croissance apparente sur certains documents budgétaires est due à l'intégration de la contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) destiné aux pensions.
Les 47 sigles sont développés dans mon rapport lorsqu'ils y figurent, Idex, Labex, Equipex et autres, mais les professionnels et les syndicalistes semblent apparemment s'y retrouver.
S'agissant enfin des pôles d'excellence, il me semble légitime de s'interroger sur la place de la recherche dans l'aménagement du territoire. Les chercheurs doivent d'abord faire de la recherche. La mise en réseau, afin de favoriser la proximité des laboratoires de recherche, est importante, pour autant il ne me semble pas que le premier critère en matière de recherche soit l'aménagement du territoire. Il convient en revanche de développer les laboratoires performants, c'est par exemple le cas à Amiens avec un laboratoire spécialisé dans les cellules pluripotentes dont j'ai favorisé la mise en réseau avec le Professeur Peschanski du Génopôle d'Évry.
Madame Boulestin, comme vous, je regrette la baisse du nombre de thésards et des scientifiques, et pas seulement en France d'ailleurs. De plus, certains étudiants en sciences abandonnent ensuite ce domaine, pour rejoindre les banques, ce qui pose d'autres problèmes… Il faut multiplier les initiatives comme la Fête de la science qui permettent à des jeunes de visiter des laboratoires et suscitent souvent des vocations. Je milite également pour une chaîne de télévision scientifique. On connaît, à cet égard, le succès de la série « Urgences » et son impact sur les vocations d'urgentistes. Des émissions de télévision sont un bon appui au développement des études scientifiques.
Sur les conditions d'études j'avais, à titre personnel, déposé un amendement exonérant les mutuelles étudiantes de taxation. Je regrette qu'il n'ait pas été voté. La santé des étudiants est un problème important. De fait : ils ne se soignent pas.
Monsieur le professeur Touraine et Madame Karamanli, des remarques de la Cour des comptes et de la mission d'évaluation et de contrôle sur le crédit d'impôt recherche ont été prises en compte dans la loi de finances pour 2011, en resserrant certains aspects du dispositif mais les contrôles de son utilisation optimale sont encore perfectibles.
S'agissant des moyens de la recherche en sciences de la vie et en biotechnologies, je ne peux que vous citer le ministre qui estimait hier soir que les chiffres publiés étaient inexacts.
Madame Langlade, la pluridisciplinarité que vous souhaitez à juste titre me semble pouvoir trouver sa place dans les PRES. Elle permet par exemple aux étudiants ayant échoué au concours de fin de première année de médecine, souvent très doués, de poursuivre leurs études dans un autre domaine avec une prise en compte de cette année.
Je remercie les rapporteurs et je vous propose de passer au vote de l'avis de la commission sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour 2012. J'ai retenu que notre rapporteur pour avis concernant la recherche donne un avis favorable et que notre rapporteure pour avis sur l'enseignement supérieur et la vie étudiante émet un avis défavorable.
La Commission donne un avis favorable à l'adoption des crédits pour 2012 de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
La séance est levée à douze heures trente.