Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a organisé, conjointement avec la commission des affaires économiques, une table ronde consacrée à la filière photovoltaïque.
Mes chers collègues, nous sommes heureux de réunir ce soir la commission du développement durable et la commission des affaires économiques pour auditionner quelques acteurs de la filière photovoltaïque. Cette question a fait l'objet d'une première réunion, la semaine dernière, au cours de laquelle nous avons entendu M. Jean-Louis Borloo.
Nous recevons M. Philippe de Ladoucette, président de la Commission de régulation de l'énergie (CRE), M. Pâris Mouratoglou, président du conseil d'administration d'EDF Énergies nouvelles, M. André Joffre, président de Qualit'ENR et vice-président d'Enerplan, et M. Hadrien Clément, président de l'association des producteurs d'électricité solaire indépendants (APESI).
Deux questions me préoccupent. On dit que les projets photovoltaïques ont atteint, en dix-huit mois, les objectifs fixés pour 2020, et qu'il faut donc ralentir leur rythme. J'ai le sentiment que les choses ne sont pas aussi claires et que certaines prises de position, motivées par la garantie d'un coût de rachat intéressant, ne déboucheront pas sur une réalisation. Où en sommes-nous sur ce point ?
De quelle façon est calculée la CSPE ? Nous reviendrons sur la délicate question du tarif d'achat, mais l'argent public a-t-il vocation à soutenir à long terme ce type d'entreprise ? Je comprends qu'il soit nécessaire d'aider le secteur à émerger, mais quand pourrons-nous laisser le marché jouer son rôle ?
La commission des affaires économiques a effectivement souhaité vous recevoir, messieurs, pour évoquer avec vous les derniers arrêtés tarifaires, les niveaux de rentabilité dont bénéficient les investisseurs et les principaux scénarios d'évolution de la CSPE. Vous pourrez nous faire part de votre sentiment sur l'évolution du marché, laquelle peut passer par l'instauration de quotas ou par la dégressivité des tarifs. Vos réponses m'intéressent vivement car, comme vous le savez, j'ai rédigé en 2009 un rapport sur l'énergie photovoltaïque. Quelle pourrait être, selon vous, la croissance de la production d'électricité solaire ? Quels sont les obstacles rencontrés ? Quelles seraient les conséquences de l'application des propositions du rapport Charpin ? Quelles sont les perspectives de développement de la filière française, sachant que, selon ce même rapport, notre déficit commercial dans ce domaine atteint 800 millions d'euros ?
La compétence de la CRE n'est pas de définir la politique nationale en matière d'énergie renouvelable. Elle apporte des avis au Gouvernement sur les propositions de tarif d'achat et sur le calcul les charges de la CSPE. C'est sur ce point que portera mon exposé.
La loi impose aux fournisseurs historiques de remplir des missions de service public. Ces missions génèrent des charges, qui sont compensées par la contribution aux charges de service public de l'électricité, dite CSPE, payée par l'ensemble des consommateurs d'électricité – avec des plafonnements pour les gros consommateurs, en particulier les industriels.
Il existe trois types de charges. Il y a d'abord les coûts résultant des politiques de soutien à la cogénération et aux énergies renouvelables, dont les montants sont égaux à la différence entre le tarif d'achat pour la filière considérée et les prix de l'électricité sur le marché de gros. La CSPE couvre aussi le surcoût dû à la péréquation nationale des tarifs dans les zones non interconnectées – les DOM, la Corse, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et les îles bretonnes. Enfin, les dépenses liées au dispositif en faveur des personnes en situation de précarité relèvent du même mécanisme.
Chaque année, avant le 15 octobre, la CRE propose au ministre de l'énergie une prévision des charges de l'année n + 1. Nous avons donc évalué il y a quelques semaines le montant anticipé pour l'année 2011. Il se compose des charges attendues pour l'année n + 1 auxquelles s'ajoute l'écart entre prévision et réalisation pour l'année n - 1.
Dans le cadre législatif actuel, le montant de la CSPE est arrêté par le ministre de l'énergie sur la base de la proposition de la CRE. Si le ministre s'abstient, la CSPE de l'année précédente est automatiquement reconduite. C'est ainsi que, depuis 2006, la CSPE a été maintenue d'année en année à sa valeur fixée pour 2005, soit 4,5 euros le mégawattheure.
Depuis deux ans, ce montant ne couvre pas les charges constatées. EDF subit ainsi un défaut de compensation. Les charges effectivement supportées par EDF en 2009, que la CRE a calculées en octobre dernier, ne lui ont pas été intégralement remboursées par la CSPE en vigueur : une créance, qui s'élève à 1,4 milliard d'euros, est ajoutée aux charges anticipées pour 2011. À titre d'information, la créance 2010 est estimée à plus d'un milliard d'euros – elle sera intégrée à l'évaluation de l'année 2012.
L'évaluation opérée au titre de 2011 se monte à 3,4 milliards d'euros. Il s'y ajoute la créance 2009, 1,4 milliard, soit un total de 4,8 milliards d'euros. Pour compenser intégralement ces charges, la CSPE devrait s'élever à 12,9 euros le MWh – 9,3 euros pour couvrir les charges au titre de 2011 et 3,6 euros pour régulariser la créance de 2009. L'amendement voté dernièrement par la Commission des finances de l'Assemblée nationale limite cette hausse à 7,5 euros le MWh au 1er janvier prochain.
Les charges prévisionnelles au titre de 2011, qui s'élèvent à 3,4 milliards d'euros, résultent pour 42 % des énergies renouvelables en métropole continentale ; pour 35 % de la péréquation tarifaire dans les zones non interconnectées ; pour 21,5 % de la cogénération ; et pour 1,5 % de la solidarité envers les plus démunis.
Si la péréquation tarifaire constituait en 2010 le premier poste d'affectation – 38 % de charges prévues –, ce sont dorénavant les énergies renouvelables qui sont prépondérantes, en raison du fort développement du photovoltaïque et, dans une moindre mesure, de l'éolien. Toutes choses égales par ailleurs, ce poids devrait augmenter dans les années à venir. Les charges dues au photovoltaïque devraient représenter 30 % du total anticipé pour 2011, soit environ un milliard d'euros : 915 millions d'euros en métropole continentale et 83 millions d'euros dans les zones non interconnectées (ZNI).
Pour estimer le développement du solaire et calculer les charges prévisionnelles dues au titre de 2011 en métropole continentale, la CRE s'est basée sur la prévision des fournisseurs établie au mois de juillet, sur la puissance en service et en attente de connexion connue au 30 juin , et sur une estimation du rythme de raccordement des installations par ERDF.
Au 30 juin, 422 MW étaient en service et 2 900 MW en attente de raccordement. Les projets dans la file d'attente à cette date devaient disposer d'un permis de construire, puisque le décret du 19 novembre 2009 l'exige pour les installations de plus de 3 kWc, qui représentent une part très majoritaire – 80 % – de la puissance en attente de raccordement. ERDF a laissé aux porteurs de projet jusqu'au 1er juin pour fournir cette pièce. C'est ainsi que 1 000 MW ont quitté la file d'attente au cours des trois premiers trimestres 2010, dont 230 MW pour le troisième trimestre. La grande majorité des dossiers comptabilisés au 30 juin avaient donc une forte probabilité d'être raccordés.
On ne peut évidemment nier que certains projets ne se réaliseront pas. Il reste que le nombre de dossiers sérieux en file d'attente, au 30 juin, était très supérieur à celui qu'ERDF est en mesure de raccorder d'ici fin 2011. C'est donc le rythme de connexion des installations par ERDF qui a permis à la CRE d'évaluer le développement du photovoltaïque pour calculer les charges au titre de 2011 – environ 40 % de la file d'attente au 30 juin et 34 % au 1er octobre – et non l'importance de la file d'attente elle-même.
La CRE a retenu un développement prévisionnel un peu inférieur à celui prévu par EDF, soit 2 100 MW installés fin 2011 sur le réseau d'ERDF. Après 200 MW installés fin 2009, la CRE prévoit que 700 MW le seront au cours de l'année 2010 et 1 200 en 2011. La pertinence de cette prévision est démontrée par le nouveau bilan de la file d'attente disponible au 1er octobre 2010, soit 614 MW déjà raccordés et 3 550 en file d'attente, celle-ci étant sensiblement supérieure à ce qu'elle était au 30 juin.
ERDF a raccordé 70 MW au premier trimestre 2010, 150 MW au deuxième, 200 MW au troisième, et, d'après sa programmation, raccordera 240 MW au cours du quatrième.
L'hypothèse prise en compte par la CRE d'un raccordement de 1 200 MW en 2011 correspond à 300 MW par trimestre. Elle est cohérente avec l'accélération du rythme de connexion constaté et avec la puissance des projets en file d'attente, beaucoup plus élevée en moyenne – 48 kW – que celle des installations déjà raccordées, de 6 kW. La prévision de la CRE ne représente par ailleurs que 40 % de la puissance des installations en file d'attente au 30 juin.
Les autres paramètres entrant dans le calcul des charges dues au photovoltaïque sont le tarif d'achat et le prix de marché servant au calcul du coût évité. Le nombre prévisionnel d'heures de fonctionnement des installations correspond à la moyenne française, soit 1 100 heures par an.
Cela conduit à un tarif d'achat moyen pour 2011 de 546 euros le MWh. Le calcul du coût évité pour 2011 est basé sur les prix de marché à terme pour 2011 connus au moment de l'évaluation des charges. Il s'établit à 55 euros le MWh. Il est évident que plus le prix sur le marché de gros est élevé, moins il est nécessaire de compenser. Les charges dues au titre de 2011 sont estimées à 915 millions d'euros en métropole continentale, dont 821 millions pour EDF et 94 millions pour les entreprises locales de distribution.
Je reviens sur les prévisions au titre de l'année 2010. La CRE a considéré en octobre 2009 que 320 MW seraient installés fin 2010, ce qui équivaut à 130 millions d'euros de charges. Or ce sont 860 MW qui devraient être raccordés au réseau, soit environ 300 millions d'euros à compenser.
Je commencerai mon propos par deux observations sur ce qui vient d'être dit. En premier lieu, le permis de construire est exigé au-dessus de 250 kW et uniquement pour les centrales au sol, puisque pour les installations de toiture une simple déclaration de travaux suffit. Celle-ci est obtenue en quelques mois, ce qui n'est pas le cas d'un permis de construire, que l'on peut attendre jusqu'à deux ans. Cela explique le grand nombre de projets sur toiture dans la file d'attente.
En second lieu, il me semble que le président de la CRE opère une confusion. Dans la file d'attente, on rencontre des projets qui se sont vu attribuer un tarif. Mais ils ne sont pas forcément en attente de raccordement car, pour la majeure partie d'entre eux, ils ne donneront pas lieu à réalisation. Ce n'est pas parce qu'un projet figure dans la file d'attente qu'il sera concrétisé – de nombreux dossiers ne sont pas sérieux et ne sont déposés que par effet d'aubaine.
Nous sommes parfaitement conscients que le tarif photovoltaïque induit des subventions très élevées. Le solaire fournit l'énergie renouvelable la plus chère à produire.
Par ailleurs, la société EDF Énergies nouvelles s'est d'emblée inscrite dans la perspective d'une filière industrielle, sans laquelle on ne peut envisager une activité durable. Il existe deux types d'installations photovoltaïques : les panneaux fixés sur les toitures et ceux posés au sol. Les premiers, plus anciens, sont composés de silicium cristallin. Ceux posés au sol, dits « en couches minces », constituent une nouvelle génération technologique plus compétitive.
Le solaire représente un gigantesque potentiel. Il appartient à l'État, et non aux acteurs économiques, de décider de doter la France d'une industrie de cellules photovoltaïques. Si nous voulons une filière compétitive, si nous voulons exporter nos produits, nous devons mettre en place une industrie de semi-conducteurs et développer la cellule, élément qui crée la valeur ajoutée. Les autres éléments sont l'encapsulation, l'équilibre du système, l'étanchéité, l'électricité et l'installation, mais ce n'est pas sur eux que repose la compétitivité par rapport aux pays concurrents. La France ne doit pas rester à quai dans l'attente vaine d'un avantage procuré par ses équipes de recherche. Si nous nous contentons de fabriquer des panneaux au silicium cristallin, nous serons perdants avant d'avoir commencé. C'est une technologie déjà très répandue dans le monde : ainsi, les Chinois jouissent d'une position favorable du fait du faible coût de leur main-d'oeuvre et d'importantes subventions ; ils produisent 30 % moins cher que nous.
Si nous voulons une industrie photovoltaïque, c'est sur les couches minces qu'il faut investir, c'est pour elles qu'il faut mettre en place les conditions favorables au développement d'un marché. C'est chose faite si l'on en croit ce que déclarait M. Borloo il y a deux ans. La construction de la première usine de panneaux en couches minces en France, avec First Solar, débutera à la fin de l'année ou au début 2011.
En ce qui concerne le silicium, la France abrite la société Photowatt, qui existe depuis très longtemps mais qui a perdu sa compétitivité face à la concurrence chinoise. Toutefois, elle développe une importante recherche en partenariat avec le CEAEA, et nous avons bon espoir que, dans les trois ans à venir, elle emploiera une technologie plus performante.
Il faut développer une industrie photovoltaïque dans notre pays et ne pas mobiliser la totalité des subventions aujourd'hui. Nous aurons aussi besoin d'argent demain, lorsque la nouvelle technologie du silicium sera au point.
La file d'attente gagnerait à être purgée de tous les projets spéculatifs qui l'encombrent. Il faut contrôler les dossiers et s'en tenir aux projets sérieux. N'oublions pas que le photovoltaïque a fait naître en France une filière liée à l'installation des panneaux, qui emploie environ 20 000 personnes. Même si les cellules des panneaux de toiture viennent de Chine, les éléments annexes donnent du travail aux entreprises et aux artisans français. L'intérêt national commande de maintenir cette filière active jusqu'à ce que les panneaux soient totalement français.
Le succès passe par un investissement massif dans la recherche. Notre pays a beaucoup d'atouts : une recherche de grande qualité et d'excellents ingénieurs électroniciens, au Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles et les nanomatériaux (LITEN), au CEAEA et à l'Institut national de l'énergie solaire (INES). EDF Énergies nouvelles a dépensé 30 millions d'euros pour un projet de couches minces – Necxis – et nous prévoyons d'engager la même somme en 2011. Nous avons bon espoir quant à l'émergence d'une filière française.
Je vous remercie de donner la parole à l'association des producteurs d'électricité solaire indépendants, laquelle regroupe des PME spécialisées dans le solaire photovoltaïque.
Avant d'évoquer les pistes de réforme de la filière, sous les angles réglementaire et organisationnel, je tiens à vous remercier pour le travail parlementaire accompli sur l'électricité solaire, en particulier l'excellent rapport de M. Poignant en 2009.
Pourquoi le photovoltaïque est-il une chance pour la France ? Pourquoi le Président Sarkozy a-t-il dit, il y a un an : « là où on investit un euro dans le nucléaire, on investira un euro dans les énergies renouvelables » ? Pourquoi l'Allemagne, l'Espagne, la Chine, les États-Unis et le Japon jugent-ils le photovoltaïque comme une chance et font-ils la course pour s'équiper en installations performantes ?
Je ne pense pas que les politiques soient réticents par principe au photovoltaïque, mais pas à n'importe quel coût. Cette position est celle du bon sens, et il ne s'agit pas de créer une filière qui grève de manière irrémédiable les finances publiques.
La capacité installée française est très faible par rapport à l'Allemagne : 500 MW installées en France en quatre ans, dix fois plus outre-Rhin au cours de cette seule année. Le parc raccordé était de 289 MW au 31 décembre 2009 et de 422 MW au 30 juin 2010, soit une évolution de 133 MW en six mois. Nous sommes très loin des 3 000 MW annoncés dans la presse !
S'agissant de la file d'attente, plusieurs chiffres circulent : 4 800 MW selon le rapport Charpin, 3 717 MW selon ERDF et la CRE – je note avec intérêt que le président de la CRE vient de fournir des chiffres plus précis.
Quelques associations, dont l'APESI et Enerplan, ont mené une enquête auprès de 95 % des acteurs du secteur hors EDF : quatre projets sur cinq ne se réaliseront jamais, du fait de difficultés techniques et financières ou de problèmes liés au raccordement. Par ailleurs, trois projets sur quatre appartiendraient à EDF. Selon le rapport semestriel d'EDF EN, le pipeline solaire de la société se monterait à 2 013 MW ! Sommes-nous vraiment dans un marché ouvert à la concurrence ?
Que propose la filière ? Tout d'abord, la purge de la file d'attente. Tous ceux qui bénéficient du tarif 2006 – celui qui coûte très cher à la collectivité – devraient mobiliser 30 % de l'investissement total pour pouvoir rester dans la file d'attente. Il convient de laisser de côté les projets qui ne sont que pure spéculation et, en contrepartie, simplifier les démarches administratives pour accélérer les procédures. L'effort de la filière doit être contrebalancé par une diminution du délai d'instruction des dossiers par ERDF : l'envoi de la convention n'intervient que trois mois après le versement du premier acompte, ce qui est inacceptable dans un secteur industriel.
Quel est le coût du solaire pour la CSPE ? Le photovoltaïque ne représente en 2010 que 5,7 %, soit 120 millions d'euros – 4 euros par an et par ménage. Ce n'est rien. Les autres composants de la CSPE sont le TaRTAM, la cogénération et la péréquation tarifaire.
Pourquoi une telle différence avec les chiffres lus dans la presse et ceux du rapport Charpin ? S'agissant de la file d'attente, on parle de 4 000 MW alors que seuls 122 MW ont été installés en six mois !
À propos des surcoûts, le président de la CRE évoque la différence entre le tarif d'achat et les prix de marché de gros pour l'électricité. Or la loi qui institue la CSPE mentionne le « prix du marché » et non « les prix du marché de gros ». D'autant que les particularités du photovoltaïque – production pendant les pics de consommation, raccordement à la charge du producteur et autoconsommation possible – le rapprochent plutôt des prix de détail. En France, il y a un panachage entre le nucléaire et les énergies complémentaires, et, comme pour l'hydraulique, c'est le prix du marché de détail qui doit s'appliquer.
Je vais plus loin : la CSPE est une cagnotte pour EDF. Nous lisons en effet dans les comptes annuels de l'entreprise que ses obligations d'achat nettes de CSPE lui ont rapporté 670 millions d'euros en 2009. Cela suffirait pour financer le photovoltaïque pendant plusieurs années.
Venons-en aux gains de la filière. Aujourd'hui, la priorité de la France, c'est l'emploi. Avec le photovoltaïque, on parle de 25 000 emplois – 32 000 selon Jean-Louis Borloo. L'INSEE estime à 17 000 euros le gain d'un emploi. Le calcul est rapide.
La filière photovoltaïque est également une source de revenus pour l'État, à travers l'impôt sur les sociétés, et pour les collectivités, par le biais de la contribution économique territoriale, de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux et de la taxe d'aménagement. De plus, si l'exécutif local consent un effort fiscal pour qu'une entreprise s'implante sur son territoire, il favorise en contrepartie la création d'emplois.
N'oublions pas que si nous n'atteignons pas 23 % de consommation finale d'électricité issue des énergies renouvelables, nous ferons l'objet de sanctions financières de la part de l'Union européenne. La filière permet aussi de sécuriser nos approvisionnements et de contribuer à l'indépendance énergétique de notre pays.
Enfin, le photovoltaïque participe à la stimulation de l'industrie nationale. Le prix d'une installation se compose pour 40 % des panneaux eux-mêmes et pour 60 % de la main-d'oeuvre. Par ailleurs, la production de panneaux français correspond à 230 MW, achetés par des Français. S'agissant des panneaux achetés en France, une part vient des pays limitrophes, mais seulement un tiers vient de Chine car ils sont plus difficiles à assurer et les bailleurs de fonds refusent de coopérer. Comme vous le savez, les installations sont financées à 80 % par la dette : les investisseurs privés ont besoin de l'accord des banques.
La grande chance du photovoltaïque tient à son acceptation parfaite par le public. La cagnotte de demain, quant à elle, proviendra de l'octroi de certificats verts.
Quelles sont les propositions de l'APESI ?
Tout d'abord, purger la file d'attente passe par la radiation des projets inscrits avant le 12 janvier 2010 dont les promoteurs ne sont pas en mesure de transmettre une attestation d'acompte de la commande de modules photovoltaïques. C'est un engagement que la filière est à prête à soutenir. En échange, elle souhaite une transparence totale sur la CSPE. Nous ne voulons plus lire dans la presse que le photovoltaïque impacte gravement les finances publiques, ce qui est faux. La CRE pourrait établir un tableau de bord de tous les indicateurs.
Enfin, nous devons repenser l'objectif de 5,4 GW, qui représente 3 milliards d'euros de bénéfices en matière d'impôt et de contribution économique territoriale. Si vous portez cet objectif à 20 GW, en laissant faire le marché, vous obtiendrez un bénéfice de 9 milliards. Si l'objectif de 5,4 GW représente 60 000 emplois, imaginez ce que pourrait créer un objectif de 20 GW et l'intérêt que cela représente en période de crise.
Pour structurer la filière, il faut créer un indice corrélé au prix des panneaux. Une baisse trop forte des tarifs – en l'occurrence plus de 40 % en six mois – nuit à la confiance nécessaire aux investisseurs. Créons un indicateur sur la base de 40 % pour les panneaux et 60 % pour la main-d'oeuvre.
Pour conclure, je demande solennellement que l'on ne baisse pas les tarifs en janvier. C'est l'ensemble de la filière qui mettrait la clef sous la porte. Il ne serait plus question de créer les emplois de demain mais de créer une file d'attente au Pôle Emploi.
Il est très difficile d'obtenir des informations concernant la file d'attente : cela semble relever du secret défense. Pourtant, elle sert de support au rapport Charpin. C'est donc un élément très important. On pourrait se demander si les projets développés par EDF et ses filiales doivent entrer dans la file d'attente. Bien entendu, les installations d'EDF EN ou d'EDF ENR ont accès au tarif, mais dans la mesure où EDF verse alors de l'argent à sa filiale, cet argent tourne en rond. Il ne s'agit pas pour autant d'interdire à EDF EN de faire du solaire en France – c'est un acteur de premier plan – mais selon que les projets d'EDF et de ses filiales sont pris en compte ou non, l'importance de la file d'attente varie grandement.
Par ailleurs, près de la moitié des projets de la file d'attente émanent d'entreprises qui n'ont pas les moyens de les développer, faute de fonds propres. Selon une étude du BET (bureau d'études thermiques) à la demande du syndicat des énergies renouvelables, deux tiers des projets auraient du mal à être financés. J'ajoute que les banques se montrent plus exigeantes désormais. J'ai vu, en tant que président d'une Banque populaire régionale, des personnes demander un milliard d'euros, soi-disant pour construire des hangars agricoles : ce n'est pas sérieux ! Pour les installations en toiture, les prêteurs s'assurent que d'éventuels problèmes techniques ne mettront pas en défaut l'entreprise. Investir sur une toiture représente, en effet, un risque industriel dans la mesure où aucun fabricant de panneaux ne peut garantir une performance de production dans le temps.
Si la file d'attente est si importante, c'est que le dépôt d'un projet auprès d'ERDF est gratuit, tout comme la déclaration de travaux en mairie. Nombre de développeurs ont pris des positions en espérant les vendre ensuite à des investisseurs. Mais cela ne marche plus : les nombreux portefeuilles mis sur le marché ne trouvent pas preneur. En fait, la file d'attente pourrait bien se dégonfler comme une baudruche.
En ce qui concerne l'intégration au bâti, j'ai participé en 2006 à la négociation sur le premier arrêté tarifaire. Nous souhaitions alors limiter l'intégration de panneaux solaires au secteur du neuf en prévoyant des obstacles techniques. Nous n'y sommes pas parvenus car beaucoup de Français n'hésitent pas à défaire les tuiles de leur toit ou, pour des raisons sanitaires, à remplacer leur toiture en éverite ou en amiante-ciment, ou encore à installer des panneaux solaires sur des membranes d'étanchéité. Les logements anciens représentent ainsi un gisement considérable de clients.
Aujourd'hui, un groupe de travail est en place, piloté par le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et l'ADEME, pour réfléchir aux tarifs qui doivent être appliqués aux installations selon qu'elles dépassent la hauteur de la toiture de 3 ou de 7 centimètres. C'est dire à quels détails nous nous confrontons.
Ce qui importe, c'est que les règles du jeu soient connues. Ce n'est pas le cas, puisqu'elles doivent encore changer le 1er janvier. On ne peut structurer une industrie dans ces conditions. Il y a un an, nous avons eu le courage de déclarer dans Les Échos que la baisse des tarifs était nécessaire. Tout en étant d'accord sur ce point, la profession nous a reproché de le dire ouvertement. De fait, si les tarifs avaient diminué au cours de l'année 2009, il n'y aurait pas eu une telle inflation de projets. Depuis, les subventions sont devenues raisonnables, la rentabilité n'est pas trop élevée et les projets ne produisent pas tous 200 KWh par an. En raison d'anomalies, de jours de panne, la réalité des chiffres est bien loin des calculs théoriques présentés aux banquiers. Quoi qu'il en soit, les installations solaires seront beaucoup moins coûteuses pour la CSPE qu'elles ne le sont aujourd'hui.
Au sein du pôle de compétitivité DERBI, que je préside dans le midi de la France, nous avons travaillé sur l'industrialisation des projets relatifs aux cellules issues de la technologie développée à l'INES et à Grenoble. Mais n'oublions pas ces PME qui ont investi sur fonds propres, comme Fonroche à Agen, ou encore une entreprise de Perpignan qui s'est découvert un vrai savoir-faire sur les profilés aluminium.
Le pôle DERBI a labellisé l'an dernier un projet permettant la convergence entre technologies de l'information et énergies renouvelables. Avec IBM pour leader et une douzaine d'entreprises partenaires, cette opération va créer de la richesse. Nous n'avons pas encore perdu la guerre de la production de panneaux photovoltaïques. À ce sujet, j'ai pu constater, en visitant l'usine Yingli en Chine, que ce secteur ne crée pas d'emplois : tout y est automatisé. J'ai également découvert à cette occasion que la Proparco, filiale de l'Agence française de développement, venait d'investir 15 millions de dollars au capital de Yingli ! Est-ce bien cohérent ?
J'en termine avec un exemple qui, s'il est à la marge du sujet, n'en est pas moins éloquent : le solaire thermique. En France, nous installons 400 000 m2 de panneaux solaires destinés à produire de l'eau chaude. En Chine, ils en installent 148 millions de m2 ! Et néanmoins, il n'y a pas un panneau chinois sur le marché français. En effet, dans ce secteur, nous avons de grandes entreprises – parfois à capitaux allemands – qui fabriquent des produits de qualité, et nous sommes exportateurs nets.
Je remercie les intervenants de leur présentation. Nous en venons aux questions des députés.
Je pense qu'aucun parlementaire ici n'est hostile à la filière photovoltaïque, mais nous ne voudrions pas tomber dans le panneau ! Ce que nous voulons, c'est connaître son coût réel, savoir qui profite des effets d'aubaine, et identifier qui prend de vrais risques pour développer la filière. Il y a en outre la question de la CSPE, voire du tarif d'utilisation du réseau public d'électricité, le TURP, qui a aussi une incidence sur le tarif de l'énergie. L'influence du photovoltaïque sur notre balance commerciale mérite également éclairage.
Ces questions de coût se posent pour l'ensemble des filières, notamment pour le nucléaire. Malheureusement, je n'y vois pas beaucoup plus clair qu'avant d'avoir entendu vos explications. Il est temps d'avancer sur ces questions de coût de production et de prise en charge financière. Même si la CSPE a été imaginée par une majorité à laquelle j'appartenais, la croissance exponentielle des énergies renouvelables nous impose de renouveler totalement son financement. On pourrait même envisager une autre assiette pour assurer des investissements à la hauteur de nos objectifs dans ce domaine.
Nous voulons également pouvoir distinguer entre les spéculateurs et les investisseurs vertueux prêts à assumer un risque industriel normal. Or il faut bien avouer que la complexité du sujet contribue à l'absence de transparence. Comment, par exemple, purger la file d'attente sans disposer d'informations incontestables ? Il ne faudrait pas handicaper de véritables démarches industrielles au prétexte que les quatre cinquième des projets sont fictifs.
Serge Grouard. Si le but de notre réunion est de nous éclairer parfaitement sur ces sujets complexes, il reste des marges de progression ! Pour parler d'un sujet que je maîtrise, je me permettrai de vous dire que la délivrance d'un permis de construire ne demande pas deux ans.
Je voudrais vous interroger précisément sur l'organisation de la filière industrielle, notamment sur la recherche et développement. À ma connaissance, la technologie des couches minces fait l'objet d'un seul projet en France, contre une quinzaine en Allemagne. Est-ce exact ? Avons-nous d'autres perspectives ?
En ce qui concerne la production de silicium, on sait que le dossier Silpro a connu quelques déconvenues. Est-il définitivement abandonné ? Le silicium cristallin offre-t-il encore des voies d'avenir ? Où en sont les projets de production de plaquettes à partir de lingots de silicium portés par Total et GDF-Suez ? Plus généralement, quelles sont les perspectives de réduction des coûts de production ? Quel gain peut-on espérer de cette transition technologique et à quelle échéance ? Quand la parité réseau, c'est-à-dire un coût de production du kilowattheure photovoltaïque égal au coût d'achat de l'électricité au détail, sera-t-elle atteinte ?
Où en est la filière industrielle, mis à part Photowatt ? Comment doit-on gérer l'innovation : en favorisant la constitution de champions ou à partir des PME innovantes ? Où trouver les financements qui permettront de transformer la recherche en gains de productivité ?
La réglementation suscite également beaucoup d'interrogations. Joue-t-elle un rôle positif ou n'est-elle qu'une contrainte supplémentaire ?
Le photovoltaïque devra représenter 30 % des charges compensées par la CSPE au titre de 2011, soit un milliard d'euros. Nous avons entendu les paramètres fondant cette estimation. Or certains parlent de 850 millions d'euros pour 1 600 mégawattheures. Il est vrai que les ordres de grandeur sont similaires. Mais ces chiffres différents nous aident peu.
Après avoir entendu la CRE et les producteurs d'électricité, il serait bon que nous interrogions les industriels sur la possibilité de faire émerger une filière photovoltaïque, faute de quoi le débat restera confus. Nous devrions notamment entendre M. Yann Moss qui, en tant que président de Fonroche, est une voix particulièrement autorisée dans ce domaine.
Ne nous payons pas de mots : oui ou non, la filière photovoltaïque a-t-elle une chance d'être autre chose qu'une industrie d'assembleurs de panneaux, alors que seule la société Photowatt est capable de fabriquer des cellules et que 70 seulement sur 305 mégawatts sont produits à partir de cellules françaises, soit environ 20 % ?
J'ai entendu une prise de position hostile à l'instauration de quotas. Une telle régulation serait pourtant un moyen de concilier la nécessité de ne pas augmenter le prélèvement sur le consommateur et la volonté de structurer une filière. La proposition de M. Jean-Louis Borloo d'un quota de 500 à 800 mégawatts avait l'avantage de clarifier le débat. Je serais même favorable à l'instauration de sous-quotas par catégories d'installations, notamment pour aider les agriculteurs.
Par ailleurs, j'avais attiré l'attention sur l'intérêt de tarifs dégressifs en fonction de la puissance du projet. Ce système présenterait l'avantage de favoriser les productions française et européenne, puisque ce sont surtout les très gros projets qui utilisent des panneaux chinois.
Comme François Brottes l'a dit, nous sommes tous favorables au développement des énergies renouvelables, mais force est de constater que la libéralisation du secteur n'a pas simplifié la situation. En matière de détermination du montant de la CSPE, il est incompréhensible que nous ne disposions pas de chiffres incontestables et incontestés, alors que cette contribution est acquittée par les consommateurs.
Le financement du développement de la filière pose question. Pour ma part, je ne suis pas favorable à une augmentation permanente du prix de l'électricité sous prétexte qu'il faut prendre en charge les frais de raccordement au réseau, que le coût de la distribution augmente, et que sais-je encore. Le tarif de l'électricité en France était jusqu'à présent un atout social et économique. On ne va tout de même pas remettre en cause un avantage qui faisait l'unanimité dans notre pays, depuis un demi-siècle, pour satisfaire je ne sais quel lobby. Nous devons réfléchir au moyen de favoriser le développement du photovoltaïque, notamment sur le plan industriel, sans le faire payer par la CSPE. La filière, ou tout au moins les entreprises ici représentées, ont-elles un avis sur ce sujet ?
Par ailleurs, je suis énervé de recevoir, chez moi ou à ma permanence, des publicités assurant une rentabilité de vingt ans à ceux qui installeraient des panneaux sur leur propriété. Un tel argument promotionnel est d'autant plus insupportable qu'on nous assure simultanément que l'écart avec les autres modes de production électrique est appelé à s'estomper : cela s'apparente à une escroquerie ; les pouvoirs publics devraient prendre des sanctions.
J'ai trois questions à vous poser. Quelle est la production réelle d'énergie photovoltaïque injectée dans le réseau, sachant que le nombre d'installations photovoltaïques en France est connu ? Pourquoi n'arrive-t-on pas à régler le problème de la liste d'attente ? Enfin quelle est la part de chacun des acteurs ici présents dans le parc actuel ?
Lorsqu'on rapproche un certain nombre de faits, d'événements, de déclarations et de rapports, on ne peut se défendre d'un sentiment de manipulation. En effet, peu après que M. Borloo nous indique que les objectifs du Grenelle pour le secteur photovoltaïque seraient atteints en 2013, on nous annonce que le crédit d'impôt dont il bénéficie baisse de 50 %. Or celui-ci ne concerne que les toutes petites installations ne dépassant pas trois kilowatts crête. De même, après la publication du rapport Charpin et du rapport parlementaire de MM. Diefenbacher et Launay, on communique que le prix de l'électricité augmentera au 1er janvier en raison de la hausse de la CSPE.
Pourrions-nous savoir la part des petits équipements qui bénéficient du crédit d'impôt sur les 4 000 mégawatts en attente qui ont été évoqués ? Pouvons-nous avoir des informations sur les gros porteurs de projets : qui sont-ils ? Quelle puissance représentent-ils ? Par quel pays les panneaux utilisés sont-ils fabriqués ?
Par ailleurs, selon le rapport Charpin, le développement d'une filière industrielle nécessiterait de 100 à 150 millions d'euros. Or, en 2009, 26 millions d'euros seulement ont été consacrés à la recherche dans le photovoltaïque. Mme Valérie Pécresse m'a indiqué que 460 millions d'euros seraient mobilisés dans le domaine des énergies renouvelables. Dans quelle proportion ces crédits seront-ils destinés au photovoltaïque en 2011 ?
Pourquoi être opposé à un système de quotas, qui permettrait d'éviter la spéculation qui a condamné le développement de la filière en Espagne ? L'installation irréfléchie de 2 500 mégawatts en 2007 a justement conduit le solaire à une impasse de l'autre côté des Pyrénées..
Ne faudrait-il pas travailler avec vous à l'instauration d'une dégressivité des tarifs à tous les niveaux, et pas seulement selon les puissances installées ? En effet, la spéculation s'explique aussi par l'absence de lisibilité et de prévisibilité de la décision publique pour les industriels. Pour ma part, comme je l'ai écrit dans le rapport que j'ai consacré à l'électricité photovoltaïque, je suis favorable à une dégressivité adaptée à la production, régulièrement révisable – éventuellement chaque trimestre – dans la perspective de la parité réseau. On écarterait ainsi les risques de spéculation tout en assurant aux industriels une viabilité financière.
Mon rapport soulignait aussi la nécessité de réduire les délais de raccordement, et la loi a prévu des dispositions visant à accélérer la procédure. ERDF nous oppose son incapacité à connecter des centaines de milliers d'installations, faute de moyens. Au-delà du taux de réfaction, seriez-vous favorables à ce que le raccordement ne soit plus à la charge de l'opérateur de distribution ?
Quant à la répartition des projets en attente de raccordement selon leur puissance, on la connaît : sur les 3 000 projets de la file d'attente, 300 à 400 sont d'une puissance inférieure à 36 kilowatts ; ceux d'une puissance située entre 36 et 250 sont au nombre de 700 ou 800, tous les autres dépassent les 250 kilowatts.
Aux termes de la loi actuelle, 60 % du coût du branchement et de l'extension sont à la charge du producteur, les 40 % restants étant couverts par le TURP, alors que le coût du renforcement est assuré à 100 % par le TURP. Le coût pour ERDF était de 74 millions d'euros en 2008, 105 millions d'euros en 2009, et il devrait se monter à 226 millions d'euros en 2010. En revanche, le projet de loi NOME, actuellement discuté par l'Assemblée nationale, met 100 % du coût du branchement et de l'extension à la charge du producteur, le renforcement demeurant entièrement couvert par le TURP.
Le tarif d'achat prend en compte les coûts évités à EDF, c'est-à-dire le prix du marché de gros, sur lequel EDF se fournirait en l'absence de l'obligation d'achat. Si le calcul était réalisé à partir du prix du marché de détail, il tiendrait compte du coût de production : celui-ci étant inférieur au prix de gros, la compensation serait encore plus importante.
Il y a une confusion – entretenue ou non – entre EDF Énergies nouvelles et EDF. Filiale à 50 % d'EDF, EDF EN est une société cotée en bourse, financièrement et juridiquement distincte.
Je trouve inélégant que des confrères attaquent la seule entreprise française véritablement créatrice dans l'industrie photovoltaïque ! Nous avons quand même été capables, au prix de nombreux efforts, de décider la société First Solar, qui domine le secteur mondial de la fabrication de panneaux photovoltaïques, de construire en France une usine que nous cofinançons, ce qui représente pour nous un très gros risque industriel.
Il est aussi absurde de prétendre que nous occupons les trois quarts de la file d'attente. Il ne faut pas confondre les dossiers sur lesquels nous travaillons avec ceux de la file d'attente. Sur les 4 000 mégawatts d'installations déjà raccordées ou en attente de raccordement, nos projets ne représentent que 300 à 400 mégawatts en tout et pour tout. En revanche, ils sont sérieux et leur réalisation est certaine.
La délivrance d'un permis de construire suppose, depuis le 1er janvier 2010, la modification du plan local d'urbanisme. Il est en effet rarissime que les PLU en vigueur prévoient l'installation de panneaux photovoltaïques. L'ensemble de la procédure dure alors au moins deux ans.
En dépit de l'importance des panneaux en silicium, puisque ce sont eux qui sont installés sur les toits, leur production industrielle n'a pas d'avenir en Europe. Les pays émergents proposent des prix 30 % inférieurs aux nôtres. Il est temps de passer à la prochaine génération de cellules au silicium, notamment à l'hétérojonction sur laquelle le CEAEA travaille en partenariat avec Photowatt.
Je confirme que la délivrance du permis de construire doit être précédée d'une étude de son impact sur la faune et la flore pendant quatre saisons, dès lors qu'on évoque des équipements de grande envergure.
Nous ne sommes pas opposés à la régulation. Les tarifs sont déjà dégressifs en fonction de la puissance, une installation au sol produisant par nature plus d'énergie qu'un équipement intégré au bâti. Je vous rappelle qu'il y a trois tarifs : pour la toiture chez les particuliers, de puissance inférieure ou égale à trois kilowatts crête ; l'installation intégrée au bâti d'une puissance comprise entre 3 et 250 kilowatts crête ; enfin le tarif le moins cher, à 27,60 euros le kilowattheure, pour plus de 250 kilowatts. Il s'agit, dans ce dernier cas, d'installations au sol.
L'augmentation du tarif de l'électricité traduit une réalité économique. EDF ne peut pas constituer des provisions pour financer le remplacement de la cinquantaine de ses réacteurs nucléaires sans qu'il y ait un impact sur le consommateur. Il est évident que ce « mur nucléaire », évalué à 200 milliards d'euros, fera augmenter le tarif français, qui est le plus bas d'Europe, d'au moins 3 % par an. Il a déjà bondi de 7,22 % cette année. Cette évolution tarifaire est conforme à l'objectif de parité réseau que se fixent les énergies renouvelables.
On estime aujourd'hui que 10 % des 422 mégawatts de puissance installée – ce qui correspond à la consommation de 230 000 ménages – sont produits par des particuliers. Le crédit d'impôt vise précisément à favoriser l'investissement des ménages. Je rappelle que le développement du photovoltaïque traduit une prise de conscience collective, celle de la nécessité de réduire la consommation finale, et répond à un des objectifs du Triple 20, renforcé par la décision de porter à 23 % la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique français.
L'instauration de quotas est un vrai débat. Si on instaure un contingentement de 500 mégawatts en laissant 100 mégawatts sur le sol, on favorise un seul acteur, et non toute une filière. Les 300 mégawatts en file d'attente d'EDF EN bénéficient d'ores et déjà d'un permis de construire ; ils sont prêts à être raccordés. Étant données les relations privilégiées que cette société entretient avec EDF, qui détient 50 % de son capital, on peut craindre qu'elle n'occupe une position de monopole.
En ce qui concerne la proposition de dégressivité des tarifs, nous proposons la mise en place d'un mécanisme d'indexation des tarifs sur l'évolution des coûts d'installation des panneaux et de la main-d'oeuvre. Les coûts d'installation ont baissé de 30 % ces quatre dernières années alors que l'ensemble des tarifs a diminué de 44 % en six mois. Une meilleure corrélation serait bienvenue.
Quant à la suggestion de mettre le raccordement à la charge des producteurs, je ne peux qu'y être favorable : ils doivent participer à l'effort national, à condition de bénéficier d'une rentabilité suffisante. Un projet d'installation au sol d'une puissance d'un mégawatt, soit la consommation de 1 500 foyers, demande un investissement de trois millions d'euros pour un chiffre d'affaires de 276 000 euros et un résultat opérationnel de 220 800 euros, ce qui signifie une rentabilité de 7,36 %. Ce chiffre est à comparer avec la progression de l'indice du CAC 40 ces dix dernières années, soit 7 à 8 %. Il n'est déjà pas évident, dans de telles conditions, d'investir dans une PME qui n'a pas encore de véritable existence plutôt que d'investir en bourse. Si les tarifs baissent encore de 10 %, la rentabilité du projet passe sous les 6 %, et l'investisseur disparaît. De même, si les tarifs baissent tous les trois mois, la confiance sera mise à mal, d'autant que l'installation de panneaux demande six à neuf mois quand ils sont intégrés au bâti, deux ans au sol.
Je suis très heureux d'apprendre que EDF EN n'occupe que 300 à 400 mégawatts dans la file d'attente. Cette société a les moyens de réaliser les projets qu'elle développe. Cela signifie que la file d'attente sera encore plus réduite qu'on le pensait : les projets finalement raccordés représenteront probablement 1 000 ou 1 500 mégawatts, ce qui est une bonne nouvelle pour les finances de l'État et d'EDF.
La question du financement d'une filière industrielle mérite débat. Ce n'est pas à nous d'y répondre, mais on peut constater que la subvention par le tarif fonctionne bien en Europe : en Allemagne, la filière photovoltaïque devrait produire cette année 8 à 9 gigawatts, et en Italie plus de 2000 mégawatts en 2011. À l'aune de ces précédents, le tarif semble une bonne incitation pour les industriels. Parmi ces industriels, il y a les grands groupes dont on parle souvent, notamment le rapport Charpin qui fait abstraction de tous les autres acteurs de la filière. Saint-Gobain vient de s'associer avec Hyundai pour construire en Corée une usine de panneaux en couches minces. Si Saint-Gobain délocalise ainsi sa production, c'est d'abord pour être présent sur les marchés émergents, qui devraient connaître une explosion de la consommation de panneaux solaires, mais aussi à cause de l'absence en France d'une stratégie industrielle lisible.
Mais il y a aussi le tissu des PME, susceptible de créer des centaines d'emplois. Ce sont souvent des entreprises familiales de taille modeste, qui doivent avoir l'opportunité de se développer. N'oublions pas que les sociétés allemandes, qui sont aujourd'hui des valeurs sûres de l'indice boursier, regroupaient à peine quelques personnes il y a dix ans.
On doit également se demander pourquoi le projet industriel que la société Photovoltech, commune à Electrabel et Total, avait envisagé de créer en France est au point mort. L'entreprise préfère pour le moment développer son site belge. La réponse est certainement dans le fait que la politique française pèche par manque de lisibilité.
Mme Fabienne Labrette-Ménager remplace M. Christian Jacob à la présidence.
Les acteurs économiques se sont organisés au sein du syndicat des énergies renouvelables, qui est seul habilité à formuler des propositions au nom de l'ensemble de la filière. Je ne peux pas laisser dire que les permis de construire sont délivrés préférentiellement à EDF EN : c'est faux. Tous les projets de la file d'attente doivent forcément obtenir, soit un permis de construire, soit une autorisation de travaux. Tout le monde est à égalité sur le plan administratif.
Les retards de raccordement imputables à ERDF, mis en exergue par l'excellent rapport de M. Poignant, pénalisent fortement la filière. Les agriculteurs de mon département, la Lozère, me parlent de délais dépassant deux, voire trois ans, ce qui bloque des projets de construction de bâtiments agricoles. On aboutit à des situations ubuesques, où la validité du permis de construire ou de l'arrêté attribuant des subventions expire avant le délai de raccordement. Êtes-vous souvent confrontés à de telles situations ? Comment y remédier ?
Comment se fait-il que nous ne puissions pas disposer d'informations précises et incontestables sur l'état du stock ?
Pourquoi notre pays n'est-il pas encore parvenu à construire une industrie photovoltaïque ?
Si la France n'est pas compétitive dans le domaine du silicium destiné aux toitures, doit-elle privilégier la voie de la recherche – je pense aux tentatives de fabriquer du silicium à partir du verre – aux fins d'applications industrielles ?
J'ai entendu que les projets de EDF-EN en attente de raccordement ne représentent que 300 mégawatts. Or je croyais que la centrale solaire projetée à Toul-Rosières, dans ma région lorraine, en association avec First Solar, aurait à elle seule une puissance de 400 mégawatts. Cela signifie-t-il que ce projet est abandonné ?
Quid du démantèlement des modules, notamment des panneaux de cadmium ? Le coût de leur démantèlement est-il provisionné ?
Je voudrais interroger le régulateur à propos de l'appel d'offres lancé par M. Jean-Louis Borloo pour la construction d'une centrale solaire photovoltaïque dans chaque région. La Lorraine relève de la troisième des quatre zones définies. Un tel projet est très important, car il permettait d'assurer la reconversion d'une friche industrielle. Est-il vrai que la CRE aurait jugé que les projets en zone 3 n'étaient pas rentables ?
Le photovoltaïque n'est pas nécessairement l'alpha et l'oméga en matière d'énergies renouvelables. Quelles sont les autres filières porteuses ? Quels sont nos principaux concurrents dans le domaine des solutions alternatives ?
Le modèle économique du développement de la filière semble poser problème. De combien faudrait-il augmenter la CSPE pour assurer son équilibre ?
Force est de constater que les choix actuels n'ont pas permis de développer la filière, et même s'il convient de saluer l'investissement d'EDF EN en matière de recherche, grâce notamment à son travail avec le CEAEA, d'autres opérateurs sont nettement moins vertueux. Nous avons besoin de savoir qui fait quoi et où les opérateurs intervenant sur notre territoire sont localisés, sur le plan juridique et fiscal.
Pourquoi n'avons-nous pas été au rendez-vous de la première génération de l'industrie photovoltaïque, celle du silicium cristallin ? Où trouver les investissements nécessaires au développement de cette filière, qui est pour l'instant financée par les pouvoirs publics ? Je rappelle que ce sont les collectivités territoriales qui financent, au moins à parité avec l'État, la recherche dans le photovoltaïque, à des niveaux considérables – plus de 45 millions d'euros pour l'Institut national de l'énergie solaire, l'INES. Or elles n'ont pas vocation à subventionner indéfiniment, sans aucun retour sur investissement puisqu'il n'y a plus de taxe professionnelle.
Enfin, je pense que nous devons auditionner les industriels de la filière si nous voulons comprendre pourquoi ils ne parviennent pas à avancer et ce qu'ils attendent de nous. Un modèle économique ne peut pas se fonder sur la mise à contribution du consommateur.
On ne peut que s'interroger sur les raisons, économiques, tarifaires, réglementaires, de l'échec de tant de projets figurant dans la liste d'attente. Pourrions-nous avoir un éclairage quantifié sur les difficultés rencontrées ?
Sachant que, dans le domaine des énergies renouvelables, l'un des handicaps est l'approvisionnement pendant les pics de consommation, les acteurs de la filière travaillent-ils à des dispositifs de stockage, aussi bien pour les petites unités que pour les plus importantes ?
La CRE a-t-elle émis un avis sur le prix de rachat de l'énergie photovoltaïque ? Quand celui-ci sera-t-il compétitif ? Jusqu'à quand faudra-t-il compter sur le consommateur pour rentabiliser les installations ? J'ai du mal à expliquer à un abonné, qui peine à régler sa facture d'électricité, qu'il doit subventionner une entreprise qui s'assure une rente assez coquette sur son dos.
En ce qui concerne l'énergie solaire, les avis sont partagés : ne vaudrait-il pas mieux concentrer nos efforts sur le solaire thermique plutôt que sur le photovoltaïque ? Que fait-on, enfin, des panneaux en fin de vie ?
Il serait en effet intéressant d'entendre les industriels sur les freins qui entravent le développement de cette filière, et notamment sur l'instabilité de la réglementation. Depuis le début de l'année, l'État a émis pas moins de douze circulaires, arrêtés et notes. À cela s'est ajoutée une baisse brutale des tarifs de rachat et du crédit d'impôt. Comment une filière pourrait-elle s'installer durablement dans de telles conditions ?
Même si nous devons nous montrer prudents afin de ne pas reproduire l'échec espagnol, un encadrement excessif ne risque-t-il pas de tuer une filière créatrice d'emplois ?
De plus, l'objectif des 23 % d'énergies renouvelables sera-t-il accessible sans un parc photovoltaïque conséquent, à la hauteur de ceux de nos voisins ?
Les propositions de l'APESI sont intéressantes, mais je reste dubitatif devant son analyse des inconvénients de cette technologie. Quelle approche avoir du recyclage des panneaux en fin de vie ?
M. Jean-Louis Borloo nous a déclaré la semaine dernière que la filière n'avait pas vocation à subventionner des panneaux venus de pays lointains, et qu'il comptait soumettre les panneaux photovoltaïques à un dispositif de bonus-malus fondé sur leur bilan carbone. Qu'en pensez-vous ?
Existe-il une filière de recyclage des panneaux, notamment pour les installations des particuliers ?
Quel est l'impact sur les réseaux de distribution de l'injection de l'énergie photovoltaïque ?
Je partage enfin l'indignation exprimée à propos des publicités distribuées par certaines sociétés qui incitent les particuliers à s'équiper de panneaux photovoltaïques en invoquant le prix d'achat de l'électricité par EDF. Puisque vous insistez sur la nécessité de maîtriser le risque spéculatif et les effets d'aubaine, quelles sont vos propositions en la matière ?
La brochure de l'APESI indique que le tarif d'achat français serait le plus faible d'Europe, alors que, selon Mme Bellon, présidente d'ERDF, il coûte excessivement cher ! Comment expliquez-vous cette contradiction ?
Je vous pose la question que j'avais posée la semaine dernière à M. Jean-Louis Borloo sans obtenir de réponse : qui doit prendre en charge le coût du renforcement du réseau électrique pour les grosses installations ? Il est aujourd'hui assumé par ERDF, les syndicats d'électricité et deux conseils généraux, celui de la Sarthe et celui du Loiret, pour qui cela constitue une charge très lourde.
J'ai parlé de 3 550 mégawatts en file d'attente au 1er octobre, mais je n'ai fait aucune prévision au-delà de 2011. J'ai simplement dit qu'à cette date, ERDF pouvait raccorder 1 200 mégawatts. Cette puissance représente environ un milliard d'euros pour le photovoltaïque.
La problématique des réseaux est importante pour l'avenir. Pour l'instant il n'y a pas de problème d'insertion étant donné la faiblesse de la production réelle – 0,1 térawattheure en 2009, et 1,7 prévu pour 2011. Ce type de production énergétique pose cependant un problème de prévisibilité, à l'inverse de l'énergie thermique, qui passe d'abord par les réseaux de transport. La seule solution pour intégrer les énergies renouvelables aux réseaux de distribution et de transport consiste à développer des réseaux intelligents à l'horizon 2020-2025, ce qui suppose des investissements relativement lourds.
En ce qui concerne les délais de raccordement, la loi Grenelle II fait obligation à ERDF de connecter les installations de moins de trois kilowatts en deux mois à compter de la signature de la convention de raccordement. Pour une puissance supérieure, ERDF doit obtenir des autorisations d'urbanisme, dont le temps de délivrance n'est pas encadré. Le délai de raccordement est prévu par convention, avec les aléas possibles, dont la nécessité de renforcer le réseau, qui peuvent entraîner des retards importants.
La CRE a émis deux avis sur le prix d'achat de l'énergie photovoltaïque, en décembre 2009 et en août 2010. Elle alertait sur les risques de dérapage et de création d'une bulle spéculative. Quelques changements ont été recommandés, qui ont été effectués à la rentrée de septembre. Pour revenir à l'équilibre, il faudrait que la CSPE soit fixée à un niveau qui permette de purger la dette et d'acquitter les charges futures, soit 12,50 euros le mégawattheure.
Nous ne décidons pas du résultat des appels d'offres. Nous n'avons fait que transmettre un classement des candidatures au ministre de l'énergie. Il faut tout de même dire que cet appel d'offres aboutit à des prix de vente de 7 à 14 % plus élevés que les tarifs d'achat. Deux candidats ont même déclaré qu'ils comptaient se développer à partir du tarif d'achat si l'appel d'offres était déclaré infructueux.
Il sert à répartir les puissances, non à définir des prix.
est favorable à l'instauration d'un quota, à condition qu'il ne soit pas trop faible. C'est la seule manière de réguler le marché. Nous sommes aussi partisans d'une évolution des tarifs en fonction du coût de revient de l'installation. Nous pourrions effectivement agir sur la mercuriale qu'est le prix des panneaux, mais nous n'endiguerons pas la spéculation sans quota.
En ce qui concerne le traitement des panneaux en fin de vie, en particulier le cadmium, First Solar est le seul industriel au monde qui assure un recyclage à 100 %. Pour chaque panneau vendu, l'entreprise engage de l'argent dans une compagnie d'assurances, pour être indépendante d'une faillite éventuelle, et assurer une prise en charge en cas de défaillance de sa part. EDF Énergies nouvelles est sur le point de construire à Bordeaux une usine qui opérera le recyclage des panneaux dans ses locaux – à hauteur de 96 % des matériaux.
Nous travaillons beaucoup sur la thématique du stockage. Nous avions d'ailleurs répondu à l'appel d'offres, dont nous regrettons qu'il ait été infructueux, concernant l'équipement dans les DOM.
Il faudrait, pour ouvrir droit au tarif, instaurer une éco-condition fondée sur le bilan carbone, ce qui favoriserait les fabrications françaises. Dans ce domaine, grâce à l'électricité d'origine nucléaire, nous sommes imbattables.
Il est normal que le marché photovoltaïque soit spéculatif dès lors que le dépôt d'une demande ne coûte rien. Pour éviter la spéculation, il faudrait faire ce qu'a fait l'Espagne, malheureusement trop tard : payer pour être connecté au réseau, soit en argent, soit sous forme d'une garantie bancaire, étant entendu que si le projet n'est pas réalisé, cet apport est perdu. Cela dit, lorsque j'ai fait cette proposition il y a deux ans, on m'a répondu qu'elle n'était pas démocratique car elle favoriserait les gros par rapport aux petits. Il faut savoir ce que l'on veut.
Si nous n'avons pas de filière industrielle en France, tant dans le photovoltaïque que dans l'éolien, c'est non seulement parce que nous avons créé les conditions de ce marché beaucoup plus tard que nos voisins, quand l'industrie était déjà installée ailleurs, mais aussi parce que le secteur français souffre d'une certaine imprévisibilité – la preuve, nous remettons aujourd'hui en cause ce que nous avons fait il y a deux ans. Dans ces conditions, pourquoi un industriel, qui doit amortir son usine en dix ou quinze ans, viendrait-il s'installer en France ? Notre pays ne bénéficie pas non plus d'avantages compétitifs comme il en existe en Chine, où la main-d'oeuvre est très bon marché et les subventions gigantesques, ou en Allemagne, où les usines sont toutes installées dans l'ex-RDA car cela permet de bénéficier de subventions d'au moins 50 % ainsi que d'une main-d'oeuvre très bien formée et nettement moins chère.
Quant à la recherche, elle aboutira à des résultats. Les travaux sur le silicium au sein du CEAEA sont très avancés et porteront prochainement leurs fruits. J'ai entendu dire que ces équipes avait obtenu, en un an, les résultats acquis par les Japonais au bout de dix ans, avec des cellules dont le rendement est supérieur à 20 %. Nous ne sommes jamais certains des résultats, mais gageons que dans les trois ans qui viennent, nous aurons une technologie française à très haut rendement. Nous sommes donc très en avance sur les Chinois. Cela dit, je ne sais pas où ils en seront dans trois ans…
S'agissant du recyclage, une usine de retraitement des panneaux, PV Cycle, vient d'être construite en Allemagne, à Fribourg. Nous souhaitons nous inspirer du modèle allemand. Tous les acteurs de la filière provisionnent de l'argent pour le recyclage.
Je rappelle que l'électricité obtenue grâce au raccordement des petites installations est consommée sur place. Il n'y a donc pas de transport d'électricité. Par ailleurs, l'installation de petites puissances se fait sur le réseau de basse tension, ce qui n'exige pas de renforcement des lignes. Enfin, le raccordement de nombreuses productions décentralisées a un impact limité sur le fonctionnement d'ERDF.
Le tellure de cadmium, technologie mise en place par First Solar, ne représente qu'une petite part des panneaux utilisés en France, du fait d'une légère toxicité du produit.
Vous dites n'importe quoi !
Je dis que le cadmium est une technologie moins utilisée en France que le silicium. Certes, First Solar s'engage à provisionner de l'argent pour démonter et retraiter les panneaux, mais ce n'est pas le cas de tous les opérateurs.
En France, si un produit est autorisé, c'est qu'il respecte les règles sanitaires en vigueur.
Je vous remercie de le souligner.
L'instauration d'un dispositif de bonus-malus est une piste intéressante, que les Allemands essaient d'ailleurs d'imposer à l'Europe. Ce serait un bon moyen de rendre les produits européens plus compétitifs, mais nous devons d'abord nous mettre d'accord sur deux points.
Tout d'abord, il faut retenir une définition du contenu CO2 de l'électricité. Cela ne peut se faire qu'à partir de valeurs moyennes européennes, ce qui n'est pas si simple car les Allemands voudront prendre en compte les déchets nucléaires. En tout cas, il est difficile d'imaginer un bonus-malus franco-français : je ne suis pas certain que nous pourrions bloquer les panneaux allemands sur le pont de Kiel sous prétexte qu'ils auront rejeté plus de CO2 que les produits fabriqués en France.
En outre, à côté de la spéculation sur les grands projets, il en existe une seconde forme, celle à laquelle se livrent des entreprises qui déversent de la publicité dans nos boîtes aux lettres pour vendre des produits de mauvaise qualité, qui sont ensuite mal montés et mal entretenus. C'est la raison pour laquelle, avec la profession et les investisseurs, nous avons mis en place le label Qualit'EnR. Nous incitons les particuliers qui souhaitent se doter de panneaux solaires à faire appel à un artisan du bâtiment ayant les références nécessaires – dans ce cas, il se sera vu remettre ce label. Certes, dans un marché libre, il n'est pas question d'interdire à une entreprise qui fabrique des panneaux solaires de les vendre, mais Enerplan a édité une charte de qualité que doivent respecter les adhérents. Il en résulte que nous refusons régulièrement des candidats.
Dès 2016, les bâtiments publics seront à énergie positive, dotés de panneaux photovoltaïques. Le Parlement européen a voté une directive en ce sens. Cela représente 2 GW par an à l'horizon 2020. Il est clair que l'objectif de 5 400 MW que nous nous sommes fixé n'est pas assez ambitieux. Sachant que les prix des modules ont diminué de moitié depuis trois ans et baisseront vraisemblablement encore, je suis favorable à une régulation adaptative en fonction des prix réels de revient des installations. Nous parviendrons avant 2020 à la parité réseau, ce qui ouvrira forcément le marché. Nous pouvons accepter une baisse de tarif progressive, mais, en compensation, il faut donner une visibilité aux industriels.
Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mardi 16 novembre 2010 à 18 heures
Présents. - M. Jérôme Bignon, M. Maxime Bono, M. Christophe Bouillon, Mme Françoise Branget, M. Jean-Paul Chanteguet, Mme Claude Darciaux, M. Raymond Durand, Mme Odette Duriez, M. Daniel Fidelin, M. André Flajolet, M. Jean-Claude Fruteau, M. Jean-Pierre Giran, M. Serge Grouard, M. Michel Havard, M. Christian Jacob, Mme Fabienne Labrette-Ménager, M. Jean Lassalle, M. Jean-Marc Lefranc, M. Jacques Le Nay, M. Philippe Meunier, Mme Marie-Françoise Pérol-Dumont, M. Philippe Plisson, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, M. Martial Saddier, M. Philippe Tourtelier
Excusés. - M. Jean-Yves Besselat, M. Yanick Paternotte, M. André Vézinhet
Assistaient également à la réunion. - M. François Brottes, M. Pascal Clément, M. Louis Cosyns, Mme Catherine Coutelle, M. Jean Dionis du Séjour, M. William Dumas, Mme Corinne Erhel, M. Daniel Fasquelle, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Jean Gaubert, M. Jean Grellier, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Michel Lefait, Mme Annick Le Loch, Mme Marie-Lou Marcel, M. Jean-René Marsac, M. Philippe Armand Martin, Mme Frédérique Massat, M. Jean-Pierre Nicolas, M. Daniel Paul, M. Michel Piron, M. Serge Poignant, M. Jean Proriol, M. Francis Saint-Léger, M. Jean-Charles Taugourdeau