Je vous informe tout d'abord que nous avons reçu, en application de l'article 12 de la LOLF, un projet de décret portant transfert de crédits. Ce document est à votre disposition.
L'ordre du jour appelle maintenant l'examen du rapport de la mission d'évaluation et de contrôle sur les perspectives des pôles de compétitivité.
Nous sommes très nombreux à avoir des pôles de compétitivité implantés dans nos circonscriptions, ou à proximité. Le but de ces pôles était de dynamiser le développement et l'aménagement du territoire, ainsi que la recherche et la politique industrielle, grâce à l'irrigation apportée aux entreprises innovantes.
L'existence de plusieurs objectifs simultanés constituant souvent un exercice périlleux, une évaluation était bienvenue, d'autant qu'une nouvelle phase de développement des pôles est prévue.
Nos deux rapporteurs spéciaux des crédits de la recherche, M. Alain Claeys, à l'origine de ce thème d'évaluation, ainsi que M. Jean-Pierre Gorges, ont été désignés pour préparer ce rapport, en compagnie de M. Pierre Lasbordes, rapporteur pour avis sur le budget des organismes de recherche au nom de la commission des Affaires économiques. Il était naturellement intéressant que les deux commissions travaillent ensemble sur ce sujet. Pierre Lasbordes, frappé par un deuil dans sa famille, m'a chargé de vous demander de bien vouloir l'excuser pour son absence aujourd'hui.
Durant trois mois, d'avril à juin, la MEC a procédé à un ensemble très complet d'auditions. Elle a notamment rencontré les représentants des différents types de pôles de compétitivité. Ses informations ont été complétées par les réponses à un questionnaire adressé à l'ensemble des pôles, ainsi que par un déplacement des rapporteurs sur le site du pôle System@tic-Paris-Région.
Conformément à la tradition désormais établie, la Cour des comptes a accompagné les travaux de la MEC. De sa propre initiative, la Cour menait d'ailleurs un contrôle sur les pôles de compétitivité, dont les conclusions définitives nous ont été transmises il y a deux semaines. Une fois encore, nous nous réjouissons de la qualité des relations entre la MEC et la haute juridiction financière.
Le fruit du travail de nos rapporteurs me paraît très stimulant, quoique certainement « dérangeant » à certains égards. Je pense en particulier à leur étude critique de la politique territoriale des pôles comme à leur analyse des faiblesses persistantes de notre pays en matière de valorisation de la recherche.
Au lieu de multiplier les propositions, la mission a eu la sagesse de sélectionner quinze priorités, susceptibles de faire l'objet d'un suivi précis, auxquelles s'ajoutent une dizaine de recommandations complémentaires. La MEC, qui a adopté son rapport hier, nous propose de mettre en oeuvre l'article 60 de la LOLF, aux termes duquel le Gouvernement doit répondre, par écrit, dans un délai de deux mois, aux observations qui lui sont notifiées à l'issue d'une mission de contrôle et d'évaluation.
Si la Commission approuve la publication du rapport, j'adresserai donc ses propositions au Premier ministre en lui demandant d'engager le dialogue, dans le délai prévu par la LOLF, sur les suites qu'il entend leur donner.
J'ajoute qu'il nous appartient de tirer parti des possibilités offertes par la révision constitutionnelle de juillet 2008, notamment en prolongeant nos travaux par l'inscription à l'ordre du jour de la séance publique d'un débat ou d'une séance de questions portant sur les conclusions des rapports des missions d'information. Nous devrions notamment veiller à ce que les propositions concrètes formulées à l'occasion des rapports sur les services départementaux d'incendie et le secours – les SDIS – et sur les opérations militaires extérieures ne restent pas lettre morte. Nous exercerons de la sorte un « droit de suite », en particulier pour les rapports adoptés dans le consensus.
Cela me semble également nécessaire en ce qui concerne la gestion des ressources humaines au ministère de l'Écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, objet l'an dernier d'un rapport de la MEC dont j'étais co-rapporteur. Nous avions envisagé une nouvelle série d'auditions, conformément au souhait des organisations syndicales. Compte tenu de l'actualité récente – la presse a fait état de suicides au ministère de l'Écologie, et pas seulement à France Télécom –, il serait très opportun d'exercer notre droit de suite sur cette question.
De façon plus générale, nous aurions probablement intérêt à réaliser un bilan annuel : quelles sont les réponses qui nous sont parvenues ? Lesquelles manquent, au contraire, à l'appel ? À quelles relances faudrait-il procéder ? Quels sujets mériteraient une discussion en séance publique ? Il y a un véritable travail d'inventaire à réaliser afin que nos rapports débouchent sur des résultats concrets. Il y a sans doute matière à être plus offensif.
La réalisation de rapports d'étape, faisant suite à un premier rapport, constitue un outil très utile. Nous avons pu le constater dans le domaine de l'immobilier de l'État.
Comme notre président l'a indiqué, la deuxième chambre de la Cour des comptes a adopté des observations définitives le 15 juin 2009. D'autre part, les travaux de la MEC sont intervenus peu après une évaluation réalisée par le Gouvernement, au terme de laquelle les soixante-et-onze pôles existants ont été classés en fonction de trois critères : la précision de la stratégie suivie, le fonctionnement de leur gouvernance et la dynamique enclenchée au plan territorial. Trente-neuf pôles ont été considérés comme satisfaisants selon ces trois critères, dix-neuf selon deux critères seulement, et treize autres, formant un groupe de « pôles à reconfigurer », selon un seul des critères.
Nous avons mené nos réflexions sur trois sujets principaux : le pilotage des pôles au plan national, du point de vue aussi bien de la compétitivité que de l'aménagement du territoire, objectifs relevant de départements ministériels distincts ; leur gouvernance interne ; les relations entre les entreprises et les organismes de recherche. Des constats que nous avons dressés, nous avons déduit quinze propositions tendant à développer le rôle d'interface des pôles entre la recherche et les entreprises, à améliorer le pilotage et le financement des pôles, ainsi qu'à y renforcer la participation des PME.
Je traiterai, pour ma part, de notre premier axe de travail, le développement du rôle d'interface des pôles, et je laisserai à Jean-Pierre Gorges le soin de présenter les autres conclusions de la mission.
Selon le rapport général sur la stratégie nationale de recherche et d'innovation pour 2009, notre pays souffre d'un couplage insuffisant entre les organismes publics de recherche, les universités et les entreprises. Des structures nouvelles ont certes été instaurées, mais il reste à développer de véritables synergies entre elles.
Nous avons tout d'abord constaté que les dispositifs de soutien s'étaient empilés les uns sur les autres : il n'existe pas, pour le moment, de coordination entre la politique des pôles de compétitivité et les autres dispositifs territoriaux, tels que les PRES – les pôles de recherche et d'enseignement supérieur – créés par la loi sur la recherche de 2006, les RTRA, les réseaux thématiques de recherche avancée, et les instituts Carnot. Considérés séparément, ces différents dispositifs fonctionnent bien, mais il n'y a pas de synergies entre eux.
D'autre part, nous avons observé que la participation des acteurs de la recherche et de la formation restait trop faible au sein des pôles : les premiers ne représentent que 15 % des adhérents, et les seconds 3 %.
Troisième constat, la dimension scientifique des projets n'est pas suffisamment prise en compte au sein des pôles.
À la question de savoir si le dispositif actuel permet de coupler la recherche et l'industrie et de favoriser le passage de la recherche fondamentale à la valorisation industrielle, nous ne pouvons donc apporter qu'une réponse négative. Les financements publics sont notamment insuffisants au stade de la « modélisation ».
À cela s'ajoute le faible positionnement de la France sur certains secteurs émergents, notamment les écotechnologies, alors que celles-ci devraient constituer un axe prioritaire. Conscient de cette difficulté, le Premier ministre a annoncé, le 24 septembre 2008, que les nouvelles labellisations ne porteraient que sur des projets concernant les écotechnologies.
Pour améliorer le passage de la recherche fondamentale aux applications industrielles, qui est, en France, notre principal point faible, un effort particulier de la puissance publique s'impose. Nous proposons, tout d'abord, que les financeurs publics des pôles de compétitivité – l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, et Oséo – coordonnent leur action sous la forme d'un conventionnement. Un fonds dédié à la maturation des projets de recherche innovants pourrait également être créé.
En outre, nous recommandons de formaliser les relations entre les pôles de compétitivité et les PRES, instaurés en vue de rapprocher l'enseignement supérieur, les organismes de recherche et les structures innovantes. Si les universités participent effectivement aux PRES, les organismes de recherche n'ont pas dépassé, pour le moment, le stade de l'observation. À nos yeux, les PRES doivent certes remplir leur vocation première, qui est de favoriser la recherche, mais une complémentarité avec les pôles de compétitivité pourrait également être développée.
Une troisième série de propositions concerne les besoins en formation, que nous devons veiller à anticiper pour favoriser la création des emplois de demain. Cela suppose d'introduire de nouveaux indicateurs de performance dans les contrats d'objectifs des pôles, notamment l'évolution du nombre d'ingénieurs systèmes et la place faite aux chercheurs dans les embauches.
S'agissant des écotechnologies, nous proposons d'accorder un label « éco-tech » aux pôles dont au moins la moitié des projets de recherche concerneraient ce domaine. Nous devons maintenant nous fixer des objectifs chiffrés. Rapporteur spécial du budget pour la recherche dans les domaines du développement durable, je peux témoigner que nous avons encore des progrès à faire en ce qui concerne la traçabilité des crédits. Nous proposons également créer des pôles de compétitivité pionniers, centrés sur des domaines d'innovation émergents non couverts à ce jour.
En dernier lieu, il nous semblerait utile de simplifier la typologie des pôles et d'inciter ceux d'entre eux qui travaillent sur des thématiques communes à développer une « vitrine internationale » partagée : force est de constater que nos pôles sont aujourd'hui « invendables » au plan international.
En matière de pilotage des pôles au niveau national, on constate un tâtonnement entre la logique de compétitivité et la logique territoriale. En témoigne l'existence d'une double tutelle, exercée par la DIACT, la direction interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité du territoire, et la DGCIS, la direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services. D'autre part, il n'y a pas aujourd'hui de stratégie globale, ni d'évaluation de la performance dans les documents budgétaires. Au plan interne, les formes de gouvernance des pôles sont très diverses et de qualité variable.
À cela s'ajoutent des insuffisances dans le pilotage des financements. La multiplicité des intervenants – le fonds unique interministériel, le FUI, l'ANR, Oséo, les régions, les acteurs du secteur privé – nuit, tout d'abord, à la lisibilité du dispositif. Les procédures en vigueur sont également trop longues et trop complexes : il faut notamment remplir un dossier par financeur et le délai d'octroi des crédits s'élève, en moyenne, à neuf mois. Il en résulte un niveau élevé de crédits non consommés : les aides engagées entre 2005 et 2008 ne s'élèvent qu'à 76,6 % des crédits de paiement disponibles.
Pour y remédier, nous proposons d'unifier et de simplifier les dossiers de demande d'aide, de parachever le transfert des missions du FUI vers Oséo en adoptant sans délai une convention précisant les modalités concrètes de l'opération, d'instaurer des guichets locaux uniques de financement grâce au développement des fonds régionaux pour l'innovation, et de conditionner le maintien des crédits actuels à la réalisation des objectifs fixés par les contrats de performance. On peut également envisager d'ôter leur label à certains pôles dits « à reconfigurer ».
Il nous paraît également utile de renforcer la part du financement privé en soutenant les opérations de communication des pôles à destination des investisseurs privés – je pense notamment aux business angels, aux opérations « Coup de poing ISF », ou encore à la création de clubs d'investissement.
J'en viens à notre troisième axe de travail, qui portait sur la participation des PME aux pôles de compétitivité. L'un des objectifs initiaux était, en effet, d'amener les PME au contact de la recherche.
D'un point de vue quantitatif, leur participation aux pôles est globalement satisfaisante : elles représentent 85 % des adhérents, et il existe même des pôles exclusivement constitués de PME, comme Imaginove et Cap Digital, et d'autres présidés par des représentants de PME – une quinzaine aujourd'hui. Ajoutons à cela que le taux d'implication des PME dans les projets du FUI atteint un niveau correct – environ 27 %.
Des freins puissants restent toutefois à lever. À la différence des grandes entreprises, les PME demeurent centrées sur la gestion du quotidien, attitude peu propice à la recherche, dont les cycles sont longs par nature. Si des PME se sont impliquées dans les pôles de compétitivité, c'est avant tout pour gagner des marchés ; le contact avec la recherche reste plus délicat, notamment du fait des craintes qui persistent – j'y reviendrai.
D'autre part, les délais de versement des aides publiques et les contraintes administratives nous paraissent inadaptés au rythme des PME, notamment du point de vue de la trésorerie. Tout va trop lentement, alors que les PME peuvent se retrouver en difficulté du jour au lendemain.
Nous avons également constaté que les PME n'étaient pas suffisamment représentées dans les instances de gouvernance des pôles : 66 % d'entre elles déclarent qu'elles souhaiteraient être plus impliquées. Nous pensons, pour notre part, que cela permettrait non seulement de favoriser des approches plus pragmatiques, mais aussi de modifier les rythmes.
Une autre difficulté concerne la valorisation de la recherche, dont le partage est aujourd'hui insuffisant. Les PME redoutent de se faire « piller », ce qui ne facilite pas les contacts : pour des raisons de propriété intellectuelle, les PME ont souvent peur d'entrer en relation avec les « mastodontes » qui les concurrencent.
Pour renforcer la place des PME dans les pôles, nous proposons de redéfinir leur dimension territoriale en développant la mise en réseau autour de thématiques communes et en élargissant les critères d'adhésion. Les pôles ne doivent pas être fermés sur eux-mêmes dans une logique purement territoriale : leur but initial n'était pas d'amener des activités sur un territoire donné, mais d'améliorer les contacts entre la recherche et les entreprises.
Nous proposons également d'instaurer une « procédure flash », plus rapide et plus simple, sur la base de crédits spécifiques, pour les projets de recherche des PME. Cela permettrait en particulier de monter des projets avec deux partenaires seulement.
Afin de dissiper les craintes en matière de propriété intellectuelle, des correspondants pourraient enfin être nommés au sein des pôles, en lien avec les services de l'INPI, l'Institut national de la propriété industrielle.
Chacun sait que la France est en retard du point de vue de la propriété intellectuelle et de l'innovation. Il faut agir. La plupart des brevets étant désormais déposés, non plus au niveau national, mais au niveau européen, auprès de l'Office européen des brevets, un véritable savoir-faire est nécessaire. Dans ce domaine, les pôles pourraient utilement apporter leur concours aux entreprises, notamment aux PME.
Il y avait sans nul doute une part d'affichage dans le lancement des pôles de compétitivité et il est vrai qu'annoncer la création d'un outil pour rapprocher l'enseignement supérieur, la recherche et l'activité économique est bien perçu localement. Qui plus est, un certain nombre de responsables d'administration avait bien identifié des blocages qu'ont justement rappelés nos rapporteurs.
Mais cette création a aussi emporté des désillusions et s'est accompagnée de visions trop administratives, déconnectées de la réalité, voire absurdes, en particulier au sein de la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires, la DIACT, ex-DATAR.
Pour autant, en dépit des échecs et des différences d'un pôle à un autre, une idée dont le contour est aussi libre et la mise en oeuvre aussi variée est intéressante, en particulier parce qu'elle tend à décloisonner des univers différents afin d'accompagner des mutations.
Les pôles rencontrent toutefois deux limites importantes. La première tient à la territorialité. Comment a-t-on pu penser que les relations entre des entreprises et un organisme de recherche se cantonneraient dans un cadre territorial, qui ne correspond à l'organisation ni de la recherche ni de l'activité économique ?
La deuxième limite a trait à la concurrence que se livrent les entreprises d'un même secteur, qui ne sont donc guère enclines à mettre en avant, lors de rencontres communes avec les organismes de recherche, les thèmes qu'elles jugent les plus porteurs pour l'avenir. En insistant sur la propriété intellectuelle, on ne répond que très partiellement à ce problème puisqu'il est fort rare que l'on dépose un brevet pour lancer une innovation sur un marché.
Ne négligeons pas par ailleurs un effet d'éviction des PME par les grands groupes : si les premières figurent dans les conseils d'administration des pôles, ce peut être seulement pour y faire de la figuration… Dans plusieurs pôles, un ou deux grands groupes ont pris les commandes et ont mobilisé les financements, qui ne viennent finalement qu'abonder ce que ces entreprises faisaient déjà.
S'agissant des PRES et des RTRA, il n'est pas toujours opportun de les rapprocher des pôles de compétitivité. Certes, quand les universités d'une région sont regroupées, le PRES doit être évidemment l'interlocuteur du pôle, mais il arrive aussi que le PRES ne corresponde pas à l'objet du pôle. S'il s'agit d'un outil utile dans bien des domaines, la présence du PRES n'est pas systématique dans l'organisation de l'enseignement supérieur et de la recherche et on ne peut donc pas toujours non plus le mettre en adéquation avec les pôles.
On peut peut-être envisager de rapprocher l'ANR et Oséo par le biais de conventions, mais leurs mécanismes d'allocation des ressources à la recherche diffèrent considérablement et l'ANR est surtout tournée vers des thèmes de recherche appliquée.
Il est vrai que les sources de financement sont diverses, ce qui oblige à monter de nombreux dossiers et entraîne des pertes en ligne. Dans ces conditions, il me paraîtrait efficace d'apporter – non pas après avis d'un comité de pilotage mais de façon systématique – un financement public, qui pourrait être partagé entre État et collectivités, dès lors qu'un contrat de recherche est confié par une entreprise à un organisme de recherche au sein d'un pôle.
Le concepteur des pôles de compétitivité a « vendu » l'idée de la territorialisation à M. Raffarin. Ainsi, les régions se sont vues dans l'obligation de monter les dispositifs et ont dû payer massivement.
Dès le départ, la conception a été viciée. Par conséquent, il est difficile de s'émanciper de la territorialisation. Un exemple : le pôle Agroressources a pu être créé car la Champagne-Ardenne et la Picardie avaient les moyens de se lancer dans une opération assez lourde. Mais il y a eu, ensuite, des batailles sur la localisation des chercheurs. Il y a une ambiguïté : un projet national d'un côté et, pour des raisons financières évidentes, une quête territoriale de l'autre.
Par ailleurs, je pense que certains pôles de compétitivité n'auraient jamais dû être admis. Si l'État a formulé des remarques à l'égard de certains d'entre eux, un petit nombre seulement est devenu un peu plus dynamique. Cela mérite réflexion si nous voulons être crédibles au niveau international. Le nombre très élevé des pôles n'a, selon moi, pas de sens.
On assiste à une montée en puissance du crédit d'impôt recherche. Le lien du CIR avec la politique des pôles pourrait-il être approfondi ? Commence-t-on à avoir une idée des secteurs économiques qui utilisent le plus cet instrument ?
On connaît le poids des finances privées outre-Atlantique, aux côtés des collectivités publiques très actives. N'y a-t-il pas là une piste à explorer ?
À mon tour, je voudrais saluer le travail réalisé par la MEC, avec pour résultat un rapport et des propositions lisibles.
Il est souhaitable qu'une démarche de long terme corrige les défauts majeurs de l'action publique : insuffisance des crédits attribués à la recherche ; nécessité d'encourager la recherche en matière d'environnement et d'adapter nos procédés de production, donc nos modes de consommation.
Un travail devrait être mené – et les propositions du rapport nous y invitent – pour conserver un équilibre entre des pôles mondiaux organisés et visibles et des pôles plus territoriaux qui doivent, à mon sens, l'être tout autant.
Les propositions 10 à 13 du rapport, relatives aux fonds régionaux, aux PME, aux financements européens et à la mise en réseau des pôles, me semblent aller dans le sens d'une nécessaire dimension territoriale des pôles de compétitivité. Elles permettront d'affirmer le lien avec le secteur de la recherche et de déboucher sur des créations d'emploi local.
Je voudrais également dire aux deux rapporteurs combien j'apprécie le travail remarquable qu'ils ont réalisé.
Comme M. Balligand l'a rappelé, nous avons été amenés à financer des projets dans certaines de nos entreprises, au niveau tant de la ville que de la région. Or, si nous pouvons suivre les projets au niveau de l'entreprise elle-même, nous n'avons pas de lisibilité au niveau régional ; je pense en particulier au projet Mov'eo en Normandie.
Quelle lisibilité pouvons-nous avoir quant à nos pôles de compétitivité ?
Je voudrais souligner combien il a été agréable d'animer cette MEC avec les trois rapporteurs.
Les pôles de compétitivité ont seulement quatre ans, ce qui est peu dans le monde de l'entreprise et explique qu'un certain nombre d'entre eux cherchent encore à trouver leur place. Accordons-leur quelques années supplémentaires avant de procéder à une deuxième évaluation et d'en tirer des jugements définitifs.
Les nombreuses personnes auditionnées sur l'évaluation des pôles en termes d'emplois ont été dans l'incapacité de nous apporter des réponses : la logique de l'emploi n'était pas le critère dominant. Or ce qui a animé les instigateurs des pôles a été la nécessité de développer la recherche, d'encourager le développement industriel, mais aussi – et peut-être surtout – de créer de l'activité. Il me semble donc nécessaire de reconsidérer les priorités en matière d'évaluation.
S'agissant de la territorialisation, il ne s'agit pas de savoir s'il y a trop de pôles de compétitivité, il s'agit de ne laisser aucun territoire à l'écart. À cet égard, il me semble que la DIACT devrait revisiter sa carte des pôles.
Les liens avec l'international ont été très peu évoqués, si ce n'est lors de l'audition des représentants de l'Aerospace Valley. Or un certain nombre de pôles auraient intérêt à permettre à leurs entreprises de travailler de concert avec des entreprises transfrontalières. Je pense en particulier aux entreprises espagnoles pour la filière carbone dans l'aéronautique. Il nous faut donc adapter les procédures.
Comme François Goulard, je voudrais souligner que les pôles sont une démarche intéressante, centrée sur la ressource humaine : savoir-faire, formations, anticipation des compétences à venir, politiques de recrutement.
David Habib l'a dit, et je l'ai moi-même constaté dans l'Est de la France : l'évaluation de l'articulation entre les pôles et l'emploi – en termes de gestion prévisionnelle, d'embauches, d'amélioration des conditions de travail, de rémunérations, de qualifications des salariés – est le parent pauvre. C'est dommage car notre souci est bien de trouver des liens avec les TPE et les PME, mais aussi d'expliquer au grand public l'utilité de cette politique.
Vous avez évoqué la vague de labellisations envisagée pour de nouveaux pôles dans le domaine des écotechnologies. Quelles précautions devraient être prises pour permettre à ces pôles d'enregistrer de meilleurs résultats que ceux de la première vague, dont les performances sont très diverses ?
Enfin, comment voyez-vous l'articulation entre les évaluations dont vous faites état et les propositions que nous pourrions faire dans le cadre du grand emprunt ?
Les rapporteurs ont souligné la complexité des dossiers, du financement, des délais. Est-il possible d'envisager une simplification à l'avenir ?
Je tiens à rappeler que notre mission a pour but d'évaluer une politique publique.
L'espace d'une entreprise, l'espace d'un laboratoire de recherche n'a jamais correspondu à un espace territorial, que ce soit la commune, le département ou la région. Il faut le répéter dans nos assemblées locales ! L'université de Poitiers, par exemple, est liée par des contrats avec des entreprises dont aucune ne figure dans le territoire. C'est pourquoi la proposition de mise en réseau est juste. Qu'une niche de recherche présentant des potentialités importantes rejoigne un pôle de compétitivité sur la même thématique est une bonne chose.
Nous n'avons pas travaillé sur l'évaluation du crédit d'impôt recherche, mais nous prévoyons de le faire dans le cadre de la MEC.
S'agissant du pilotage, il y a une ambiguïté. On a « vendu » un label territorial pour une politique d'innovation. Après l'audit du Gouvernement, le travail mené par notre mission et le rapport de la Cour des comptes, il serait à présent utile, pour les uns et les autres, de lever cette ambiguïté. C'est le sens d'un grand nombre de nos propositions.
En ce qui concerne le financement, monsieur Goulard, lorsqu'une entreprise veut être éligible à Oséo et un laboratoire de recherche à l'ANR, il serait intéressant de regarder s'il y a complémentarité – ce qui, en termes d'utilisation de l'argent public, est fort utile. C'est le sens de notre proposition.
Pour la gouvernance des pôles, qui est un indicateur quant aux formations, les métiers de demain me paraissent essentiels.
Vous avez soulevé, monsieur Goulard, un problème majeur : le secret en matière de recherche. Le Fonds démonstrateur de recherche, dont, en tant que rapporteur spécial, j'ai auditionné les représentants hier, détermine, sur une thématique donnée – par exemple, la voiture de demain –, les blocages technologiques et lance des appels pour savoir quels acteurs souhaitent travailler. Résultat : certains équipementiers sont plus allants pour travailler sur tel ou tel blocage technologique que les constructeurs eux-mêmes…
Enfin, je considère que la politique de notre pays en matière de propriété intellectuelle n'est pas suffisamment dynamique. Si nos PME sont moins bien placées que les PME allemandes en termes de recherche-développement, c'est parce qu'elles n'ont pas franchi une marche.
Ainsi que l'a souligné David Habid, la période d'observation des pôles – quatre ans – est très courte. Il ne faut donc pas tirer de jugements hâtifs.
Si la démarche territoriale peut aujourd'hui être contestée au regard de ses limites, elle était nécessaire : les pôles n'auraient jamais été lancés sans elle. Certes, les collectivités mettent de l'argent dans les pôles, mais les retours se font globalement. Il serait simpliste de présenter la dimension territoriale comme une erreur. Aujourd'hui, nous proposons d'aller vers une organisation en réseau.
Certains pôles partent de la recherche pour aller vers l'entreprise. D'autres partent des entreprises qui se sont regroupées pour se diriger vers la recherche, laquelle peut s'exercer ailleurs qu'en France : dans le domaine du parfum, par exemple, les essences se trouvent partout dans le monde. Avoir les deux modèles n'est pas choquant.
Soixante-et-onze graines ont été semées : quelques-unes germent, d'autres vont s'étioler, de nouvelles vont pousser. Au reste, même si les pôles de compétitivité n'existaient plus, certaines continueraient à prospérer. La filière des parfums et des cosmétiques à Chartres – dont les entreprises oeuvrent aujourd'hui au sein de la Cosmetic Valley – n'existait-elle pas dix ans avant la création des pôles ? D'autres phases d'observation seront nécessaires. S'enfermer dans cette démarche territoriale serait dangereux.
Le système de financement, tel qu'il est conçu, permet une sélection naturelle : les pôles qui n'ont pas accès aux fonds s'éteignent, les autres prospèrent.
S'agissant des relations entre Oséo et l'ANR, la formule du PDG d'Oséo me semble intéressante : « Quand l'ANR transforme l'argent en idées, nous transformons les idées en argent. »
Comme nous l'ont expliqué les représentants du CNRS, nombre de brevets sont sur les étagères et personne ne les concrétise dans les entreprises. C'est un problème de taille ; il faudra prévoir des fonds spécifiques pour le régler.
Monsieur Carré, faire venir d'autres financiers, certes, mais, nous l'avons constaté, ils n'arrivent que lorsque tout est prêt ! J'y insiste : il faut « flécher » de l'argent pour faciliter le passage de l'idée vers l'entreprise. Si un accompagnement est nécessaire, c'est surtout dans ce domaine.
Monsieur Cousin, il n'y a pas d'indicateurs quant au suivi par les collectivités locales. Ils seraient utiles, mais il faut cependant veiller à ne pas créer une contradiction entre le territoire et le passage en réseau : il faut éviter que chaque collectivité réclame un retour, sous prétexte qu'elle a mis quelques sous dans le financement d'un pôle de compétitivité.
Monsieur Hénart, le label « éco-tech » sera attribué aux pôles existants réalisant plus de 50 % de projets de recherche dans le domaine des écotechnologies. Les nouveaux pôles devront, eux, remplir les critères dès le départ. La labellisation devra être conditionnée à des critères très précis.
Le ministère de la recherche a réalisé un travail considérable dans son rapport général sur la stratégie nationale de recherche et d'innovation 2009. Nous connaissons les thématiques sur lesquelles nous devons porter tous nos efforts dans les années à venir, que ce soit en matière de formation ou de recherche.
En outre, toute une série de structures sont susceptibles d'apporter des financements.
À partir de là, faire un emprunt, flécher des crédits n'est pas compliqué. En termes de communication, c'est une autre affaire…
L'État intervient déjà dans les secteurs dits « stratégiques et d'avenir » et tous les outils sont en place.
Le grand emprunt a surtout pour but de faire de la communication sur ces secteurs.
Quelques pistes figurent dans le rapport, notamment en matière d'énergies renouvelables. Cela passera par les canaux classiques : les outils pour le financement sont mis en évidence dans le rapport.
Consultée, la commission autorise la publication du rapport. Elle approuve, en application de l'article 60 de la LOLF, la notification au Gouvernement des quinze propositions prioritaires de la MEC.
Information relative à la Commission