Comme notre président l'a indiqué, la deuxième chambre de la Cour des comptes a adopté des observations définitives le 15 juin 2009. D'autre part, les travaux de la MEC sont intervenus peu après une évaluation réalisée par le Gouvernement, au terme de laquelle les soixante-et-onze pôles existants ont été classés en fonction de trois critères : la précision de la stratégie suivie, le fonctionnement de leur gouvernance et la dynamique enclenchée au plan territorial. Trente-neuf pôles ont été considérés comme satisfaisants selon ces trois critères, dix-neuf selon deux critères seulement, et treize autres, formant un groupe de « pôles à reconfigurer », selon un seul des critères.
Nous avons mené nos réflexions sur trois sujets principaux : le pilotage des pôles au plan national, du point de vue aussi bien de la compétitivité que de l'aménagement du territoire, objectifs relevant de départements ministériels distincts ; leur gouvernance interne ; les relations entre les entreprises et les organismes de recherche. Des constats que nous avons dressés, nous avons déduit quinze propositions tendant à développer le rôle d'interface des pôles entre la recherche et les entreprises, à améliorer le pilotage et le financement des pôles, ainsi qu'à y renforcer la participation des PME.
Je traiterai, pour ma part, de notre premier axe de travail, le développement du rôle d'interface des pôles, et je laisserai à Jean-Pierre Gorges le soin de présenter les autres conclusions de la mission.
Selon le rapport général sur la stratégie nationale de recherche et d'innovation pour 2009, notre pays souffre d'un couplage insuffisant entre les organismes publics de recherche, les universités et les entreprises. Des structures nouvelles ont certes été instaurées, mais il reste à développer de véritables synergies entre elles.
Nous avons tout d'abord constaté que les dispositifs de soutien s'étaient empilés les uns sur les autres : il n'existe pas, pour le moment, de coordination entre la politique des pôles de compétitivité et les autres dispositifs territoriaux, tels que les PRES – les pôles de recherche et d'enseignement supérieur – créés par la loi sur la recherche de 2006, les RTRA, les réseaux thématiques de recherche avancée, et les instituts Carnot. Considérés séparément, ces différents dispositifs fonctionnent bien, mais il n'y a pas de synergies entre eux.
D'autre part, nous avons observé que la participation des acteurs de la recherche et de la formation restait trop faible au sein des pôles : les premiers ne représentent que 15 % des adhérents, et les seconds 3 %.
Troisième constat, la dimension scientifique des projets n'est pas suffisamment prise en compte au sein des pôles.
À la question de savoir si le dispositif actuel permet de coupler la recherche et l'industrie et de favoriser le passage de la recherche fondamentale à la valorisation industrielle, nous ne pouvons donc apporter qu'une réponse négative. Les financements publics sont notamment insuffisants au stade de la « modélisation ».
À cela s'ajoute le faible positionnement de la France sur certains secteurs émergents, notamment les écotechnologies, alors que celles-ci devraient constituer un axe prioritaire. Conscient de cette difficulté, le Premier ministre a annoncé, le 24 septembre 2008, que les nouvelles labellisations ne porteraient que sur des projets concernant les écotechnologies.
Pour améliorer le passage de la recherche fondamentale aux applications industrielles, qui est, en France, notre principal point faible, un effort particulier de la puissance publique s'impose. Nous proposons, tout d'abord, que les financeurs publics des pôles de compétitivité – l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, et Oséo – coordonnent leur action sous la forme d'un conventionnement. Un fonds dédié à la maturation des projets de recherche innovants pourrait également être créé.
En outre, nous recommandons de formaliser les relations entre les pôles de compétitivité et les PRES, instaurés en vue de rapprocher l'enseignement supérieur, les organismes de recherche et les structures innovantes. Si les universités participent effectivement aux PRES, les organismes de recherche n'ont pas dépassé, pour le moment, le stade de l'observation. À nos yeux, les PRES doivent certes remplir leur vocation première, qui est de favoriser la recherche, mais une complémentarité avec les pôles de compétitivité pourrait également être développée.
Une troisième série de propositions concerne les besoins en formation, que nous devons veiller à anticiper pour favoriser la création des emplois de demain. Cela suppose d'introduire de nouveaux indicateurs de performance dans les contrats d'objectifs des pôles, notamment l'évolution du nombre d'ingénieurs systèmes et la place faite aux chercheurs dans les embauches.
S'agissant des écotechnologies, nous proposons d'accorder un label « éco-tech » aux pôles dont au moins la moitié des projets de recherche concerneraient ce domaine. Nous devons maintenant nous fixer des objectifs chiffrés. Rapporteur spécial du budget pour la recherche dans les domaines du développement durable, je peux témoigner que nous avons encore des progrès à faire en ce qui concerne la traçabilité des crédits. Nous proposons également créer des pôles de compétitivité pionniers, centrés sur des domaines d'innovation émergents non couverts à ce jour.
En dernier lieu, il nous semblerait utile de simplifier la typologie des pôles et d'inciter ceux d'entre eux qui travaillent sur des thématiques communes à développer une « vitrine internationale » partagée : force est de constater que nos pôles sont aujourd'hui « invendables » au plan international.